<p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><b><span lang="FR" style="font-size:16.5pt"><span georgia="" style="font-family:">Carole Philippon</span></span></b></span></span></p> <p align="center" style="text-align:center">&nbsp;</p> <p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><b><span lang="FR" style="font-size:18.0pt"><span georgia="" style="font-family:"><span style="color:red">L&rsquo;&eacute;clectisme anachronique de Mattia Preti</span></span></span></b></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p>Dans le panorama de la peinture italienne du XVIIe si&egrave;cle, l&rsquo;iter pictural de Mattia Preti appara&icirc;t comme atypique, riche et particuli&egrave;rement &eacute;clectique. Il na&icirc;t le 24 f&eacute;vrier 1613 &agrave; Taverna (Calabre) et meurt le 3 janvier 1699 &agrave; La Valette (Malte)&nbsp;; tout au long de ses six d&eacute;cennies de pratique artistique intensive &ndash; il est l&rsquo;un des artistes les plus prolifiques du <em>Seicento</em> &ndash;, Preti s&rsquo;inspire de certaines tendances artistiques contemporaines, mais il regarde &eacute;galement beaucoup vers le pass&eacute;.<br /> Toutefois, on retrouve, dans sa production, un artiste de r&eacute;f&eacute;rence, v&eacute;ritable fil conducteur qui traverse toute sa carri&egrave;re, depuis ses d&eacute;buts romains jusqu&rsquo;&agrave; ses derni&egrave;res &oelig;uvres maltaises, et qui est presque oubli&eacute; au moment o&ugrave; il commence &agrave; peindre&nbsp;: le Caravage. Fid&egrave;le au langage m&eacute;risien<font color="#000032"><sup>1</sup></font> dont il reprend les innovations artistiques mais dont il d&eacute;laisse l&rsquo;id&eacute;ologie subversive, Preti s&rsquo;int&eacute;resse &eacute;galement aux suiveurs &ndash; romains puis napolitains &ndash; du Lombard. Ainsi, certaines de ses &oelig;uvres de jeunesse trahissent davantage l&rsquo;influence des peintres de la <em>Manfrediana Methodus</em><font color="#000120"><sup>2</sup></font> que celle du Caravage. Il s&rsquo;agit d&rsquo;un caravagisme &ldquo;filtr&eacute;&rdquo; par les interpr&eacute;tations des &eacute;pigones du Ma&icirc;tre&nbsp;; prudence, donc, lorsque l&rsquo;on qualifie Preti de &laquo;&nbsp;plus caravagesque des caravagesques&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>3</sup></font>, dans la mesure o&ugrave; il abandonne la port&eacute;e r&eacute;volutionnaire de la pens&eacute;e et de l&rsquo;art m&eacute;risiens pour ne se focaliser que sur la forme. Malgr&eacute; cela, on ne peut que constater l&rsquo;enthousiasme de Preti face &agrave; la po&eacute;tique du Caravage, avec lequel il partage une trajectoire artistique commune entre Rome, Naples et Malte, et une m&ecirc;me insertion dans l&rsquo;Ordre de Malte. Artiste polyvalent, il se d&eacute;marque de la technique du Caravage par sa grande ma&icirc;trise du dessin et ses talents de fresquiste. Sa carri&egrave;re peut &ecirc;tre divis&eacute;e en trois p&eacute;riodes distinctes&nbsp;: les premi&egrave;res ann&eacute;es de sa carri&egrave;re &agrave; Rome, entrecoup&eacute;e de voyages dans le nord de l&rsquo;Italie (1630-1653), son s&eacute;jour &agrave; Naples (1653-1660) et les quarante derni&egrave;res ann&eacute;es de sa vie pass&eacute;es &agrave; Malte (1660-1699). &nbsp;</p> <p>Selon les ex&eacute;g&egrave;tes pr&eacute;tiens et certaines sources historiques, Preti serait arriv&eacute; &agrave; Rome &agrave; dix-sept ans, autrement dit autour de 1630<font color="#000120"><sup>4</sup></font>. Il y rejoint son fr&egrave;re a&icirc;n&eacute;, Gregorio (1603-1672), qui fut vraisemblablement &laquo;&nbsp;son premier ma&icirc;tre&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>5</sup></font>. Dans la cit&eacute; papale &ndash; qui est pourtant dans une phase post-caravagesque &ndash; il est d&rsquo;embl&eacute;e fascin&eacute; par les chefs-d&rsquo;&oelig;uvre du Caravage et de ses suiveurs issus de la <em>Manfrediana Methodus</em>. Bartolomeo Manfredi (1582-1622) est mort depuis quelques ann&eacute;es, mais son &oelig;uvre et les sc&egrave;nes de genre qu&rsquo;il popularisa exercent une fascination certaine sur le jeune artiste. Dans ces ann&eacute;es 1630, soit vingt ans apr&egrave;s la mort du Caravage, son &oelig;uvre n&rsquo;a plus vraiment d&rsquo;impact sur les jeunes peintres, sa renomm&eacute;e et le mythe qui entouraient son existence se sont &eacute;vanouis, la parenth&egrave;se caravagesque est referm&eacute;e. Seul Valentin de Boulogne &ndash; qui s&rsquo;&eacute;teint en 1632 &ndash;, perp&eacute;tue encore cet h&eacute;ritage caravagesco-manfr&eacute;dien. Entre 1615 et 1622, soit &agrave; l&rsquo;apog&eacute;e de la <em>Manfrediana Methodus</em>, chaque peintre issu de ce courant a fait siennes les innovations stylistiques et iconographiques caravagesques. Les boh&eacute;miennes, joueurs, popolani, buveurs et autres musiciens sont tous des arch&eacute;types caravagesques&nbsp;; Mattia Preti reprend ces figures (d&eacute;sormais traditionnelles) dans ses &oelig;uvres de jeunesse. Sa belle figure isol&eacute;e de <em>Soldat </em>(ill. 1) correspond parfaitement &agrave; la phase caravagesque &ldquo;orthodoxe&rdquo; du Calabrais.</p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204110902-1.jpeg" style="width: 350px; height: 477px;" /><br /> <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span style="font-size:10.0pt">1. Mattia Preti, v. 1633-35, <i>Soldat</i>, Rende, Museo Civico</span></span></span></p> <p style="margin-left: 72px;">&nbsp;</p> <p>&nbsp; &nbsp; &nbsp;&nbsp; Pour satisfaire la demande des collectionneurs contrari&eacute;s par la mort du Lombard, les repr&eacute;sentants de la<em> Manfrediana Methodus </em>r&eacute;&eacute;laborent et reproduisent &agrave; l&rsquo;envi tous ces types de personnages &ndash; en les figurant souvent dans des sc&egrave;nes de taverne &ndash; tout en simplifiant les th&egrave;mes originels et en &eacute;radiquant l&rsquo;id&eacute;ologie m&eacute;risienne, transgressive et r&eacute;volutionnaire. Le caravagisme des ann&eacute;es 1620, auquel se r&eacute;f&egrave;re en partie Preti, &laquo; se charge in&eacute;vitablement du sens du pass&eacute;, en devenant de plus en plus le moment inactuel qui a perdu sa fonction subversive et p&eacute;remptoire&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>6</sup></font>. Le <em>Cavalier Calabrese</em><font color="#000120"><sup>7</sup></font>, qui commence sa carri&egrave;re une vingtaine d&rsquo;ann&eacute;es apr&egrave;s la mort du Caravage, exprime ici la caract&eacute;ristique principale de son temp&eacute;rament artistique: sa tendance &agrave; regarder vers le pass&eacute; et &agrave; enrichir son penchant naturellement caravagesque d&rsquo;&eacute;l&eacute;ments qui pourraient para&icirc;tre archa&iuml;ques, mais qui se fondent parfaitement dans sa po&eacute;tique et qui la rendent absolument unique. Il remet ainsi au go&ucirc;t du jour les tableaux du Caravage (y compris les plus anciens, qui remontent &agrave; la fin du XVIe si&egrave;cle) dans une d&eacute;marche anachronique qu&rsquo;il assume pleinement. En effet, bien que son go&ucirc;t pour l&rsquo;esth&eacute;tique caravagesque soit d&eacute;j&agrave; d&eacute;pass&eacute; lorsque Preti commence sa carri&egrave;re de peintre<font color="#000120"><sup>8</sup></font>, la constante de son &oelig;uvre reste sa fid&eacute;lit&eacute; ind&eacute;fectible au Caravage&nbsp;; jamais il ne d&eacute;laissera les trouvailles iconographiques et la conception luministe de son a&icirc;n&eacute;, auquel il voue une admiration ind&eacute;fectible. En revanche, il se montre herm&eacute;tique &agrave; toute id&eacute;e d&rsquo;opposition ou d&rsquo;ind&eacute;pendance par rapport aux pr&eacute;ceptes artistiques tridentins<font color="#000120"><sup>9</sup></font>. C&rsquo;est aussi pour cette raison que le caravagisme manfr&eacute;dien &ndash; qui a &eacute;dulcor&eacute; l&rsquo;h&eacute;ritage intellectuel du caravagisme originel &ndash; appara&icirc;t parfaitement conforme &agrave; sa nature. C&rsquo;est le caravagisme dans son acception la plus large que Preti analyse avec int&eacute;r&ecirc;t, avant de s&rsquo;inscrire lui-m&ecirc;me dans cette lign&eacute;e et d&rsquo;apporter ainsi sa contribution &agrave; l&rsquo;h&eacute;ritage caravagesque.&nbsp;</p> <p>&nbsp; &nbsp;&nbsp; D&rsquo;ailleurs, Preti, qui, contrairement &agrave; bon nombre de peintres acad&eacute;miques, n&rsquo;a aucun pr&eacute;jug&eacute; sur l&rsquo;art, regarde &eacute;galement avec int&eacute;r&ecirc;t la production des <em>Bamboccianti</em>, que Roberto Longhi qualifiait de &ldquo;Caravagistes &agrave; marche r&eacute;duite&nbsp;&rdquo;. En t&eacute;moignent ses deux <em>Sc&egrave;nes de peste</em> (1640, Collections particuli&egrave;res), qui sont comme des chroniques de la vie quotidienne en temps de peste. Pour ces deux compositions hautement dramatiques, Mattia Preti s&rsquo;est en partie inspir&eacute; de la tragique <em>Peste d&rsquo;Asdod</em> de Nicolas Poussin (1630, Mus&eacute;e du Louvre), mais on devine &eacute;galement son attrait pour la peinture injustement m&eacute;pris&eacute;e&nbsp;des <em>Bamboccianti</em>, et pour leur univers pictural d&eacute;nu&eacute; d&rsquo;&laquo;&nbsp;intentions moralisatrices ou de &ldquo;critique sociale&rdquo;&raquo;<font color="#000120"><sup>10</sup></font>, qui met en sc&egrave;ne des anti-h&eacute;ros, des gens ordinaires figur&eacute;s dans leur vie et dans leurs activit&eacute;s quotidiennes, qu&rsquo;il s&rsquo;agisse de mendiants, de travailleurs humbles, de flagellants, de paysans ou de personnages bigarr&eacute;s issus de sc&egrave;nes festives et populaires. Ce rapprochement avec les suiveurs du Bamboche &ndash; avec lesquels Preti partage le go&ucirc;t du naturalisme caravagesque &ndash; est, de par leur int&eacute;r&ecirc;t pour la r&eacute;alit&eacute;, coh&eacute;rent avec ses premi&egrave;res passions picturales ; comme le souligne Claudio Strinati, &laquo; ce n&rsquo;est [&hellip;] pas un hasard si Mattia Preti fait ses d&eacute;buts plus ou moins au moment o&ugrave; les <em>Bamboccianti</em> prennent consistance, eux qui partagent avec Preti (et plus particuli&egrave;rement Peter Van Laer et Cerquozzi) une interpr&eacute;tation qui, en r&eacute;alit&eacute;, ennoblit l&rsquo;h&eacute;ritage caravagesque, mais qui s&rsquo;en distinguent par le choix des sujets. [&hellip;] Les Bamboccianti ne provoquent naturellement aucune d&eacute;gradation de la dignit&eacute; du langage caravagesque, mais ils assimilent ce langage &agrave; bien d&rsquo;autres composantes&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>11</sup></font>.&nbsp;</p> <p>&nbsp; &nbsp;&nbsp; Force est cependant de constater que la plupart de ses compositions de jeunesse sont intrins&egrave;quement caravagesques&nbsp;; durant sa premi&egrave;re p&eacute;riode romaine, le Calabrais, dans le sillage des peintres issus de la <em>Manfrediana Methodus</em>, ex&eacute;cute des sc&egrave;nes de la vie romaine quotidienne &ndash; avec ses personnages r&eacute;currents &ndash; alli&eacute;es &agrave; de forts contrastes clairs-obscurs, &agrave; l&rsquo;instar de son splendide <em>Concert</em> madril&egrave;ne (ill. 2), qui t&eacute;moigne de son adh&eacute;sion pr&eacute;coce et inconditionnelle aux principes caravagesques, mais qui, dans la couleur gris&acirc;tre de la peau de ses protagonistes, trahit &eacute;galement&nbsp; son observation attentive des &oelig;uvres de Giovanni Lanfranco. Mettant ses pas dans ceux du Caravage, Preti reprend, d&rsquo;une &oelig;uvre &agrave; l&rsquo;autre, les m&ecirc;mes mod&egrave;les&nbsp;; ainsi, les protagonistes de ce <em>Concert </em>r&eacute;apparaissent dans sa belle <em>Partie de cartes</em> (1635, Collection particuli&egrave;re), &agrave; la diff&eacute;rence pr&egrave;s qu&rsquo;un soldat remplace le tr&egrave;s jeune chanteur.</p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align: center; text-indent: 35.45pt;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204111913-2.jpeg" style="width: 400px; height: 293px;" /><br /> &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp;&nbsp; <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span style="font-size:10.0pt">2. Mattia Preti,<i> Concert</i>, v. 1635, Madrid, Museo Thyssen-Bornemisza</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">&nbsp; &nbsp; &nbsp; </span></span></p> <p>&nbsp; &nbsp; &nbsp; Dans la plupart de ces &oelig;uvres, Preti a recours &agrave; une lumi&egrave;re nocturne, autrement dit &agrave; un &eacute;clairage artificiel, qui fait irruption (lat&eacute;ralement) dans l&rsquo;espace pictural pour venir extirper les figures des t&eacute;n&egrave;bres. &Agrave; l&rsquo;instar des caravagistes qui l&rsquo;ont pr&eacute;c&eacute;d&eacute;, Preti se d&eacute;tourne de la lumi&egrave;re du jour &ndash; il pr&eacute;f&egrave;re situer ses personnages dans des milieux sombres et ind&eacute;finis &ndash;, opte souvent pour des figures &agrave; mi-corps (d&rsquo;ascendance romano-bolonaise) et choisit d&rsquo;ex&eacute;cuter ses tableaux religieux comme des sc&egrave;nes de genre. Ses &oelig;uvres sacr&eacute;es sont directement inspir&eacute;es de celles du Caravage, comme le prouve sa <em>Vocation de saint Matthieu </em>(ill. 3), qui rappelle l&rsquo;&oelig;uvre &eacute;ponyme de la Chapelle Contarelli, peinte par le Caravage en 1600. Matthieu, qui est percepteur &agrave; Capharna&uuml;m, est figur&eacute; par Preti au moment o&ugrave; le Christ l&rsquo;appelle, alors qu&rsquo;il est occup&eacute; &agrave; compter la recette journali&egrave;re. Le parti pris esth&eacute;tique de proposer &laquo;&nbsp;un sujet religieux repr&eacute;sent&eacute; comme une sc&egrave;ne de genre en lumi&egrave;re nocturne&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>12</sup></font> trahit l&rsquo;attrait incontestable qu&rsquo;exercent sur lui le traitement de la lumi&egrave;re et des contrastes clairs-obscurs caract&eacute;ristiques des chefs-d&rsquo;&oelig;uvre du Caravage, ainsi que les innovations iconographiques majeures consistant &agrave; mettre le sacr&eacute; &agrave; la port&eacute;e des hommes, et &agrave; faciliter l&rsquo;identification aux &eacute;v&eacute;nements sacr&eacute;s en ins&eacute;rant ses personnages bibliques dans la r&eacute;alit&eacute; contemporaine. Pour mieux rappeler, aussi, que le sacr&eacute; est universel et intemporel, et qu&rsquo;il peut surgir hic et nunc. Par rapport &agrave; la version m&eacute;risienne, Preti propose une composition rapproch&eacute;e et sur&eacute;lev&eacute;e, qui permet &agrave; l&rsquo;observateur de voir clairement ce qui se passe sur la table, ainsi que sur le visage des personnages, et plus pr&eacute;cis&eacute;ment sur celui de Matthieu, qui, dans le doute, reprend le c&eacute;l&egrave;bre geste m&eacute;risien en pointant sa main vers lui, comme pour avoir la confirmation que l&rsquo;appel du Christ le concerne directement. Le Christ, qui tourne le dos au faisceau de lumi&egrave;re, a le visage partiellement dans l&rsquo;ombre&nbsp;; quant &agrave; saint Pierre, qui l&rsquo;accompagne, il pose sa main sur l&rsquo;&eacute;paule du percepteur comme pour confirmer les paroles christiques. Les autres personnages, sourds &agrave; l&rsquo;appel du Christ, ne se rendent pas compte de la situation. Notons que le fait de figurer un &eacute;pisode biblique dans une taverne de la Rome du XVIIe si&egrave;cle fait explicitement r&eacute;f&eacute;rence au Caravage, de m&ecirc;me que de v&ecirc;tir ses protagonistes avec des habits contemporains, qui semblent tout droit sortis de la <em>Bonne Aventure</em>, des <em>Tricheurs</em> ou de la <em>Vocation de saint Matthieu</em>.</p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204112608-4.jpeg" style="width: 410px; height: 259px;" /><br /> <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:10.0pt">3. Mattia Preti, <i>Vocation de saint Matthieu</i>, 1635-40, Vienne, Kunsthistorisches Museum<font face="Times," new="" roman="" size="3" times=""> (</font></span></span></span><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:8.0pt">www.khm.at)</span></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">Parmi les tableaux de Preti les plus ouvertement caravagesques &ndash; adjectif &agrave; prendre ici dans son acception la plus large &ndash;, on retrouve l&rsquo;impressionnant <em>Crucifiement de saint Pierre</em> (ill. 4). Cette composition majeure revisite l&rsquo;&oelig;uvre &eacute;ponyme du Caravage, que le Calabrais admira, d&egrave;s son arriv&eacute;e &agrave; Rome, en l&rsquo;&eacute;glise Santa Maria del Popolo. Prenant mod&egrave;le sur Merisi, Preti fixe sur la toile le point culminant du supplice endur&eacute; par le vieil ap&ocirc;tre. La lumi&egrave;re, qui semble avoir plusieurs sources et qui &eacute;claire par intermittence plusieurs points de l&rsquo;espace pictural, conf&egrave;re &agrave; cette composition une &eacute;tonnante intensit&eacute;. Les vastes zones d&rsquo;ombre laissent la place &agrave; des &eacute;l&eacute;ments (typiquement caravagesques) mis en lumi&egrave;re, tels que le corps du vieil ap&ocirc;tre et ceux des travailleurs qui ex&eacute;cutent leur funeste besogne, ou le rendu des mati&egrave;res, gr&acirc;ce &agrave; de l&eacute;g&egrave;res touches blanches (sur le casque du soldat ou les tissus). L&rsquo;inspiration de Preti pour ce <em>Crucifiement</em> semble avoir &eacute;t&eacute; puis&eacute;e &agrave; la fois chez le Caravage et chez Valentin de Boulogne (<em>Martyre des saint Processe et Martinien</em>, 1629, Rome, Musei Vaticani). Le Caravage n&rsquo;aurait, en effet, pas reni&eacute; les corps robustes des personnages &agrave; moiti&eacute; nus, qui semblent tout droit sortis de son <em>Crucifiement de saint Pierre</em>, de son <em>Martyre de saint Matthieu</em> ou de sa <em>Flagellation</em> de Capodimonte. Il en va de m&ecirc;me pour l&rsquo;ange pr&eacute;tien qui apporte la palme du martyre &agrave; saint Pierre, qui rappelle celui des <em>Sept &OElig;uvres de Mis&eacute;ricorde</em> du Pio Monte della Misericordia<span lang="FR"><font face="" georgia=""><font color="#000120"><sup>13</sup></font>. </font></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align: center; text-indent: 35.45pt;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204112859-5.png" style="width: 380px; height: 529px;" /><br /> <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:10.0pt">4. Mattia Preti, <i>Le crucifiement de saint Pierre</i>, v. 1640, Grenoble, Mus&eacute;e de peinture et de sculpture</span></span></span></p> <p style="text-align: center; margin-left: 48px;"><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:8.0pt">Photographie &copy; Mus&eacute;e de Grenoble</span></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p>&nbsp; &nbsp; &nbsp; Le bourreau &ndash; qui est repr&eacute;sent&eacute; comme un homme occup&eacute; &agrave; faire son travail au mieux, sans aucune animosit&eacute; &ndash;, figur&eacute; de face, en train d&rsquo;aider son acolyte &agrave; &eacute;riger la lourde croix, est inspir&eacute; du bourreau du Christ de la Flagellation m&eacute;risienne, ainsi que de celui de saint Jean-Baptiste dans la Salom&eacute; de la National Gallery, et de celui du Martyre de sainte Ursule. Mariella Utili insiste sur le fait que cette toile &laquo;&nbsp;s&rsquo;ins&egrave;re dans le contexte des grands retables ex&eacute;cut&eacute;s au tout d&eacute;but des ann&eacute;es 1640, dans lesquels la r&eacute;f&eacute;rence au Caravage est tr&egrave;s forte&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>14</sup></font>; toutefois, elle s&rsquo;en &eacute;loigne &eacute;galement par l&rsquo;effervescence g&eacute;n&eacute;rale qui se d&eacute;gage (aussi bien plastiquement que lumineusement) des quatre coins de l&rsquo;espace pictural, et qui accentue le caract&egrave;re protobaroque de Preti. Avec ce chef-d&rsquo;&oelig;uvre incontournable, Preti incarne le trait d&rsquo;union entre le t&eacute;n&eacute;brisme caravagesque et le baroque&nbsp;; en effet, sa composition se situe entre celles, &eacute;ponymes, du Caravage et de Luca Giordano, qui s&rsquo;inspirera de cette composition pour son propre Crucifiement de saint Pierre (1691, Venise, Gallerie dell&rsquo;Accademia).&nbsp;</p> <p>&nbsp; &nbsp;&nbsp; Dans la m&ecirc;me lign&eacute;e de grandes compositions religieuses, on retrouve deux &oelig;uvres monumentales, le Bapt&ecirc;me de saint Augustin (1639-42, Tortoreto, Chiesa di Sant&rsquo;Agostino) et L&rsquo;Imp&eacute;ratrice Faustine rendant visite &agrave; sainte Catherine d&rsquo;Alexandrie en prison de Dayton (ill. 5). Dans la toile de Dayton, Preti reprend le r&eacute;cit narr&eacute; dans la L&eacute;gende dor&eacute;e de Jacques de Voragine&nbsp;; Faustine, l&rsquo;&eacute;pouse de l&rsquo;Empereur Maximin, rend visite &agrave; sainte Catherine dans son cachot, o&ugrave; son &eacute;poux l&rsquo;a faite enfermer. Catherine lui avait reproch&eacute; la pers&eacute;cution des chr&eacute;tiens, l&rsquo;avait effray&eacute; par ses talents d&rsquo;&eacute;vang&eacute;lisatrice et avait refus&eacute; de remplacer Faustine en devenant sa femme. Elle est donc fouett&eacute;e puis emprisonn&eacute;e, mais l&rsquo;imp&eacute;ratrice en personne demande &agrave; la rencontrer avant son ex&eacute;cution. C&rsquo;est le capitaine Porphyre &ndash; que l&rsquo;on aper&ccedil;oit &agrave; l&rsquo;arri&egrave;re-plan, &agrave; gauche&nbsp;&ndash; qui l&rsquo;y conduit; il est dans l&rsquo;ombre, pr&egrave;s de la grille de la prison, et la lumi&egrave;re se refl&egrave;te faiblement dans son casque. S&eacute;duits par le discours de Catherine, tous deux se convertissent au Christianisme et sont condamn&eacute;s &agrave; mort par l&rsquo;Empereur. Dans la magistrale composition de Preti, on observe de nombreux personnages, qui prennent place autour de la sainte. Ainsi un ange prie pour la jeune femme tout en veillant sur elle &ndash; selon la l&eacute;gende, les anges l&rsquo;auraient soign&eacute;e et nourrie chaque jour &ndash;, tandis que d&rsquo;autres prisonniers, plus inqui&eacute;tants, &eacute;mergent des t&eacute;n&egrave;bres carc&eacute;rales pour assister &agrave; la rencontre entre les deux femmes&nbsp;; l&rsquo;un d&rsquo;eux, situ&eacute; au premier plan, &agrave; proximit&eacute; d&rsquo;un chien (qui est tapi dans l&rsquo;ombre, &agrave; gauche) tient l&rsquo;un des instruments de torture qui servirent &agrave; torturer la sainte avant de la jeter en prison, une boule d&rsquo;acier constitu&eacute;e de piques et d&rsquo;une cha&icirc;ne, que la faible lumi&egrave;re permet de distinguer, aux pieds de la sainte. Catherine n&rsquo;est pas au centre de l&rsquo;espace pictural, puisque c&rsquo;est Faustine qui occupe cette place. Elle, se situe &agrave; droite ; assise, les poignets li&eacute;s, elle est richement par&eacute;e &ndash; ce d&eacute;tail rappelle qu&rsquo;elle &eacute;tait une princesse avant d&rsquo;&ecirc;tre une sainte &ndash;. Elle fixe la tr&egrave;s belle Faustine, qui tend la main dans sa direction. Un faisceau lumineux artificiel, qui a ici un r&ocirc;le symbolique puisqu&rsquo;il pr&eacute;dit le destin de martyre de Catherine, fait miraculeusement irruption dans la prison, pour mieux sugg&eacute;rer que Faustine elle-m&ecirc;me, en rencontrant sainte Catherine d&rsquo;Alexandrie, est touch&eacute;e par la gr&acirc;ce divine. Dans cette &oelig;uvre romaine, outre les r&eacute;miniscences caravagesques, on per&ccedil;oit clairement l&rsquo;influence du Guerchin dans le luminisme (la fameuse macchia guercinesca), qui privil&eacute;gie de petites touches claires qui &eacute;voquent une lumi&egrave;re tombant sur plusieurs &eacute;l&eacute;ments du tableau, et dans la mise en &eacute;vidence des corps d&eacute;nud&eacute;s et puissants, qui se distinguent par leur grand naturalisme<font color="#000120"><sup>15</sup></font>. L&rsquo;observation attentive et rapproch&eacute;e des visages des protagonistes &ndash; celui de l&rsquo;imp&eacute;ratrice Faustine in primis, m&ecirc;me s&rsquo;il est partiellement plong&eacute; dans l&rsquo;ombre &ndash;, mais &eacute;galement la finesse de certains d&eacute;tails &ndash; les v&ecirc;tements de toutes les figures f&eacute;minines, de m&ecirc;me que leurs bijoux (la d&eacute;licate couronne de Faustine, par&eacute;e de perles) &ndash;, et les regards des deux femmes qui se croisent et se comprennent dans une sc&egrave;ne &ldquo;muette&rdquo; particuli&egrave;rement intense en font une &oelig;uvre inoubliable des ann&eacute;es romaine de Preti. Ce chef-d&rsquo;&oelig;uvre illustre parfaitement son &laquo;&nbsp;grand et triomphant naturalisme, d&rsquo;ascendance clairement caravagesque&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>16</sup></font> et confirme le statut de Preti, qui appara&icirc;t comme l&rsquo;ultime suiveur du Ma&icirc;tre &agrave;&nbsp;Rome<font color="#000120"><sup>17</sup></font>.</p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align: center; text-indent: 35.45pt;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204124716-1.png" style="width: 380px; height: 648px;" /><br /> <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:10.0pt">5. Mattia Preti,<i> L&rsquo;Imp&eacute;ratrice Faustine rend visite &agrave; sainte Catherine d&rsquo;Alexandrie en prison</i>, v. 1640-43, 425,5x254 cm, Dayton, The Dayton Art Institute, Gift of Mr &amp; Mrs Elton F. Mac Donald</span></span></span></p> <p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:8.0pt">Reproduction interdite</span></span></span></p> <p align="center" style="text-align:center">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Certaines de ses compositions caravagesques romaines sont ex&eacute;cut&eacute;es avec son fr&egrave;re Gregorio<font color="#000120"><sup>18</sup></font>, avec lequel il partage un atelier. C&rsquo;est le cas de <i>Ja&euml;l et Sisara</i> (ill. 6), sujet qui se pr&ecirc;te particuli&egrave;rement bien au traitement caravagesque des th&egrave;mes bibliques (de par son intensit&eacute; dramatique et sa violence), mais qui fut, somme toute, assez peu trait&eacute; par les caravagistes (on pourrait tout de m&ecirc;me citer la version d&rsquo;Artemisia Gentileschi du Sz&eacute;pm&uuml;v&eacute;szeti M&uacute;zeum de Budapest). Cette &oelig;uvre commune des fr&egrave;res Preti trahit la fascination que la po&eacute;tique caravagesque exerce sur les deux peintres, comme le prouvent les violents effets clairs-obscurs, qui permettent aux figures de sortir de l&rsquo;ombre. Mattia a probablement peint la splendide figure de Ja&euml;l, tant elle est caract&eacute;ristique de son style&nbsp;; c&rsquo;est m&ecirc;me une figure typiquement pr&eacute;tienne, que l&rsquo;artiste reprend &agrave; l&rsquo;identique pour incarner son all&eacute;gorie de la <i>Vanit&eacute;</i> (1650-51, Florence, Galleria degli Uffizi). Elle est figur&eacute;e dans la m&ecirc;me position que bon nombre de ses autres h&eacute;ro&iuml;nes &ndash; sacr&eacute;es ou profanes &ndash;, avec une attitude identique (regard inspir&eacute;, tourn&eacute; vers le ciel) et un beau visage vu de<i> sottins&ugrave;<sup>19</sup></i>. Le visage de Sisara, quant &agrave; lui, &eacute;merge des t&eacute;n&egrave;bres dans un ultime hurlement, le pieu enfonc&eacute; dans le front. </span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204125018-2.png" style="width: 440px; height: 322px;" /><br /> <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span style="font-size:10.0pt">6. Gregorio et Mattia Preti, <i>Ja&euml;l et Sisara</i>, v. 1650-51, Taverna, Museo Civico </span></span></span></p> <p style="text-align: center; margin-left: 48px;"><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span style="font-size:10.0pt">Archivio Museo Civico di Taverna</span></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Mattia Preti, qui, bien qu&rsquo;avec inconstance, est &agrave; Rome dans les ann&eacute;es 1630-1650, a la chance d&rsquo;&ecirc;tre ins&eacute;r&eacute; dans un milieu artistique foisonnant, au carrefour de nombreux mouvements picturaux <i>a priori</i> antagonistes, mais qu&rsquo;il parvient &agrave; rapprocher, en une synth&egrave;se extr&ecirc;mement singuli&egrave;re et &nbsp;in&eacute;dite. Il faut dire que le<i> Cavalier Calabrese</i> est l&rsquo;un des artistes les plus &eacute;clectiques et les moins dogmatiques du <i>Seicento</i>, et qu&rsquo;il d&eacute;veloppe un &laquo;&nbsp;dialogue ouvert et r&eacute;ceptif&nbsp;&raquo;</span></span><font color="#000120"><sup>20</sup></font><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:"> avec tous les artistes de son temps &ndash; quel que soit le courant artistique dont ils sont issus &ndash; et, par-del&agrave; les fronti&egrave;res temporelles, avec les grandes tendances artistiques (notamment v&eacute;nitiennes) du si&egrave;cle pr&eacute;c&eacute;dent<font color="#000120"><sup>21</sup></font>.</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">&Agrave; mille lieues des peintres fid&egrave;les &agrave; une seule chapelle, Mattia Preti s&rsquo;int&eacute;resse dans un premier temps au R&eacute;el &ndash; d&rsquo;o&ugrave; son choix caravagesque initial &ndash; mais il s&rsquo;int&eacute;resse aussi &agrave; l&rsquo;Id&eacute;al, se focalisant un temps sur le classicisme des grands Bolonais (et plus particuli&egrave;rement sur les productions de Reni et du Dominiquin<font color="#000120"><sup>22</sup></font>), de m&ecirc;me qu&rsquo;il regarde avec beaucoup d&rsquo;attention les fresques lumineuses et puissantes de Lanfranco, et le courant n&eacute;ov&eacute;nitien caract&eacute;ristique des &oelig;uvres&nbsp; de Pietro Testa, de Pier Francesco Mola et de Nicolas Poussin.&nbsp; Par la suite, durant les ann&eacute;es 1640 et 1650, Preti voyage en Italie septentrionale. Il a l&rsquo;occasion de se rendre en &Eacute;milie-Romagne, o&ugrave; il conna&icirc;t son deuxi&egrave;me grand choc esth&eacute;tique face &agrave; la th&eacute;&acirc;tralit&eacute; dramatique des &oelig;uvres du Guerchin, en Ligurie (&agrave; G&ecirc;nes), ainsi qu&rsquo;en V&eacute;n&eacute;tie&nbsp;; le fait qu&rsquo;il ait s&eacute;journ&eacute; &agrave; Venise semble ne plus faire aucun doute. Certaines de ses &oelig;uvres sont tellement empreintes de<i> venezianit&agrave;</i> qu&rsquo;il semble impossible qu&rsquo;il n&rsquo;ait pas admir&eacute; <i>de visu</i> les chefs-d&rsquo;&oelig;uvre des grands V&eacute;nitiens du<i> Cinquecento&nbsp;</i>; comme le dit tr&egrave;s justement Mariella Utili &laquo; il est tr&egrave;s probable que Mattia Preti ait s&eacute;journ&eacute; &agrave; Venise [&hellip;]. On le d&eacute;duit clairement gr&acirc;ce aux r&eacute;sultats stylistiques d&eacute;coulant d&rsquo;une telle exp&eacute;rience visuelle, non seulement du point de vue chromatique et luministe, mais au niveau de la composition dans le sens le plus global&nbsp;: le souvenir du plafond v&eacute;ron&eacute;sien de San Sebastiano est trop vif dans l&rsquo;imagination pr&eacute;tienne pour ne pas supposer une connaissance <i>de visu</i> et m&eacute;dit&eacute;e&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>23</sup></font>. Aupr&egrave;s de l&rsquo;h&eacute;ritage des artistes septentrionaux, le Calabrais trouve une source d&rsquo;inspiration in&eacute;puisable. Ces influences disparates sont toutes assimil&eacute;es par ce peintre dot&eacute; d&rsquo;une tr&egrave;s grande culture artistique, d&rsquo;une curiosit&eacute; insatiable et d&rsquo;une facult&eacute; &eacute;tonnante &agrave; exp&eacute;rimenter et &agrave; s&rsquo;approprier des langages artistiques h&eacute;t&eacute;roclites.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">En 1649, la &ldquo;Confraternita del Santissimo Sacramento&rdquo; de San Martino al Cimino commande &agrave; Preti un &eacute;tendard processionnel &ndash; en vue des c&eacute;l&eacute;brations pour le jubil&eacute; de 1650 &ndash;, comportant sur une face un <i>Christ Salvator Mundi</i> et, de l&rsquo;autre, une repr&eacute;sentation de leur saint patron, d&rsquo;o&ugrave; l&rsquo;ex&eacute;cution de<i> Saint Martin et le Pauvre</i> (ill. 7). Pour Spike, il s&rsquo;agit de sa &laquo;&nbsp;toute premi&egrave;re &oelig;uvre (datable), dans un style que l&rsquo;on pourrait qualifier de &ldquo;mature&rdquo;&nbsp;&raquo;<font color="#000032"><sup>24</sup></font>. &Agrave; l&rsquo;aube des ann&eacute;es 1650, Preti a beaucoup &eacute;volu&eacute; depuis ses d&eacute;buts caravagesques&nbsp;; mais comment pourrait-il en &ecirc;tre autrement, au vu de toutes les exp&eacute;riences accumul&eacute;es au cours des dix ann&eacute;es pr&eacute;c&eacute;dentes&nbsp;? Ce sont les influences lanfranquiennes et guerchinesques qui &eacute;loignent Preti de son premier caravagisme &ldquo;orthodoxe&rdquo;. Le Calabrais ne renonce pas au naturalisme, mais il choisit davantage de monumentalit&eacute; pour ses figures. Saint Martin est figur&eacute; sous les traits d&rsquo;un jeune soldat qui, comme le veut la l&eacute;gende, partage son manteau avec un pauvre. L&rsquo;action de &ldquo;v&ecirc;tir les malheureux&rdquo; fait partie des sept &OElig;uvres de Mis&eacute;ricorde (originellement pr&eacute;sentes dans l&rsquo;&Eacute;vangile de saint Matthieu), qui sont l&rsquo;un des piliers de la Contre-R&eacute;forme. L&rsquo;&eacute;pisode de <i>Saint Martin et le Pauvre</i> peut donc &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; comme une version&nbsp;&ldquo;isol&eacute;e&rdquo; de ces sept &nbsp;&OElig;uvres.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align: center; text-indent: 35.45pt;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image18.png" style="width: 430px; height: 544px;" /><br /> <span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:10.0pt">7. Mattia Preti, <i>Saint Martin et le pauvre</i>, 1649, San Martino al Cimino, Museo dell&rsquo;Abbazia di San Martino</span></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Cette composition, &agrave; l&rsquo;instar du<i> Christ Salvator Mundi<sup>25</sup></i><i> </i>qui l&rsquo;accompagne, pr&eacute;sente des &eacute;chos guerchinesques issus de la p&eacute;riode tardive du peintre de Cento. &Agrave; l&rsquo;instar du Caravage, le Guerchin (1591-1666) est une source d&rsquo;inspiration in&eacute;puisable pour Mattia Preti, qui eut l&rsquo;occasion de se familiariser avec les compositions de l&rsquo;&Eacute;milien lors de ses voyages dans le nord de l&rsquo;Italie, mais &eacute;galement un peu plus t&ocirc;t &agrave; Rome (o&ugrave; le Guerchin avait &eacute;t&eacute; appel&eacute; par Gr&eacute;goire XV de 1621 &agrave; 1623). L&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t pour une &laquo;&nbsp;recherche orient&eacute;e vers des effets lumineux suggestifs, au rendu atmosph&eacute;rique et au naturalisme passionn&eacute;&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>26</sup></font> provient directement de l&rsquo;&eacute;tude des &oelig;uvres guerchinesques, qui accompagneront Preti durant toute sa carri&egrave;re.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Apr&egrave;s un s&eacute;jour &agrave; Mod&egrave;ne o&ugrave; Preti ex&eacute;cute les fresques de l&rsquo;&eacute;glise de San Biagio<font color="#000120"><sup>27</sup></font> (autour de 1652), il part pour Naples, o&ugrave; il s&rsquo;&eacute;tait certainement d&eacute;j&agrave; arr&ecirc;t&eacute; avant de gagner Rome, un peu plus de vingt ans auparavant. Il arrive dans la capitale m&eacute;ridionale vraisemblablement en mars 1653, puisque le 22 mars de cette m&ecirc;me ann&eacute;e il ouvre un compte au Banco di Piet&agrave; et y d&eacute;pose deux cent cinquante ducats. Le chapitre romain est d&eacute;finitivement termin&eacute;. Commence alors sa p&eacute;riode napolitaine, unanimement reconnue comme la plus importante de sa carri&egrave;re&nbsp;; &agrave; Naples, il joue un r&ocirc;le de premier plan (surtout apr&egrave;s la peste de 1656) en imposant son style inclassable &ndash; et ce malgr&eacute; l&rsquo;&eacute;mergence fulgurante du jeune Luca Giordano &ndash; tout en s&rsquo;adaptant aux go&ucirc;ts en vogue dans la capitale m&eacute;ridionale, tr&egrave;s diff&eacute;rents de ceux de Rome&nbsp;; comme nous le confirme Mariella Utili, son s&eacute;jour napolitain co&iuml;ncide avec &laquo; les ann&eacute;es durant lesquelles le &ldquo;m&eacute;tier&rdquo;, dans son acception la plus &eacute;lev&eacute;e, [&hellip;] se manifeste &agrave; son apog&eacute;e, avec une perfection et un niveau qualitatif tr&egrave;s &eacute;lev&eacute; &raquo;<font color="#000120"><sup>28</sup></font>. En d&rsquo;autres termes, sa p&eacute;riode napolitaine repr&eacute;sente l&rsquo;aboutissement de cette synth&egrave;se de prime abord improbable, mais qui constitue l&rsquo;un des langages figuratifs les plus singuliers du XVIIe si&egrave;cle. Son &eacute;volution stylistique est constante jusqu&rsquo;&agrave; son arriv&eacute;e &agrave; Malte. Par la suite, le manque de nouveaut&eacute;s et l&rsquo;&eacute;loignement des centres artistiques de premier plan lui feront r&eacute;p&eacute;ter &ndash; non sans talent &ndash; les solutions qu&rsquo;il avait assimil&eacute;es lors des d&eacute;cennies pr&eacute;c&eacute;dentes.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Les raisons&nbsp; exactes&nbsp; du transfert du <i>Cavalier Calabrese </i>&agrave; Naples ne sont pas tout &agrave; fait claires, mais il pense vraisemblablement que la disparition de Ribera a laiss&eacute; un vide immense qu&rsquo;il pourrait combler et dont il pourrait tirer b&eacute;n&eacute;fice&nbsp;; d&rsquo;autre part, il est conscient du fait qu&rsquo;il pourra compter, dans la capitale du vice-royaume espagnol, sur le soutien de la nombreuse communaut&eacute; calabraise. Cela ne manque pas&nbsp;: d&egrave;s son arriv&eacute;e, il re&ccedil;oit une commande publique pour l&rsquo;&eacute;glise de la communaut&eacute; calabraise, San Domenico Soriano, pour laquelle il ex&eacute;cute son monumental <i>Saint Nicolas de Bari</i> (1653, Naples, Museo di Capodimonte). Ce premier chef-d&rsquo;&oelig;uvre napolitain entrem&ecirc;le habilement, dans une synth&egrave;se jusqu&rsquo;alors in&eacute;dite, les influences classiques (importance du dessin), lanfranquiennes (effets spectaculaires li&eacute;s &agrave; la dimension monumentale, a&eacute;rienne et dynamique des figures, qui donne un nouveau souffle &agrave; son style), guerchinesques (th&eacute;&acirc;tralit&eacute; exacerb&eacute;e alli&eacute;e &agrave; un fort naturalisme) et caravagesques (forts contrastes clairs-obscurs). De Dominici &eacute;voque, dans ses <i>Vite</i>, la r&eacute;action des peintres napolitains, qui rest&egrave;rent stup&eacute;faits et &eacute;blouis devant cette d&eacute;monstration virtuose. Toutefois, toujours en symbiose avec les milieux artistiques qu&rsquo;il fr&eacute;quente, Preti s&rsquo;adapte aux go&ucirc;ts en vogue &agrave; Naples, qui sont &agrave; mille lieues du baroque romain triomphant, en m&eacute;ditant plus particuli&egrave;rement sur la production de Ribera ou sur le luminisme battistellien. Il se focalise &eacute;galement sur les sujets de pr&eacute;dilection de la<i> Scuola Napoletana<sup>29</sup></i>, r&eacute;put&eacute;s &acirc;pres et violents, voire particuli&egrave;rement sanglants. Preti revient &agrave; une esth&eacute;tique caravagesque, d&eacute;montrant par l&agrave; m&ecirc;me sa capacit&eacute; d&rsquo;adaptation et, surtout, de profonde compr&eacute;hension du milieu culturel dans lequel il &eacute;volue.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">C&rsquo;est ainsi qu&rsquo;il est amen&eacute; &agrave; peindre ses &oelig;uvres les plus sanglantes, &agrave; l&rsquo;instar de sa splendide <i>Judith</i> (v.1653-54, Naples, Museo di Capodimonte), dont le th&egrave;me l&rsquo;inspire tout particuli&egrave;rement<font color="#000120"><sup>30</sup></font>. Ce tableau donne un aper&ccedil;u de son aptitude &agrave; repr&eacute;senter des sc&egrave;nes &agrave; fort potentiel dramatique, conformes &agrave; sa nature artistique. Judith, qui est rel&eacute;gu&eacute;e au second plan et qui ne sort de l&rsquo;ombre que gr&acirc;ce au faisceau lumineux qui vient percuter son visage diaphane, n&rsquo;est pas sans rappeler la <i>Ja&euml;l</i> ex&eacute;cut&eacute;e quelques ann&eacute;es plus t&ocirc;t &agrave; Rome, avec son fr&egrave;re Gregorio (ill. 6). L&rsquo;expression des deux h&eacute;ro&iuml;nes juives, dont le destin est de lib&eacute;rer leur peuple de la tyrannie, est identique. En revanche, le corps puissant et inanim&eacute; d&rsquo;Holopherne est le v&eacute;ritable protagoniste de cette &oelig;uvre sans concession, qui n&rsquo;&eacute;pargne rien &agrave; l&rsquo;observateur. Preti nous montre les cons&eacute;quences du geste de la jeune h&eacute;ro&iuml;ne juive plut&ocirc;t que de fixer sur la toile le moment m&ecirc;me de la d&eacute;capitation&nbsp;; et force est de constater que le r&eacute;sultat n&rsquo;en est que plus impressionnant, pour ne pas dire effroyable. Le corps sans vie d&rsquo;Holopherne, protagoniste de cette version de l&rsquo;&eacute;pisode biblique, est en revanche totalement absent de la <i>Judith pr&eacute;sentant la t&ecirc;te d&rsquo;Holopherne &agrave; son peuple </i>(1660, Chamb&eacute;ry, Mus&eacute;e d&rsquo;Art et d&rsquo;Histoire) qui est, en quelque sorte, la suite iconographique de la phase de la d&eacute;capitation &agrave; proprement parler.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">L&rsquo;effroyable d&eacute;tail de la d&eacute;pouille du corps du g&eacute;n&eacute;ral Holopherne fait &eacute;cho au terrifiant<i> Saint Jean-Baptiste d&eacute;capit&eacute;</i> (ill. 8), &oelig;uvre iconographiquement in&eacute;dite, qui nous montre le corps du saint couch&eacute; sur le dos juste apr&egrave;s sa d&eacute;capitation, alors que sa t&ecirc;te repose &agrave; l&rsquo;arri&egrave;re-plan, sur un plateau d&rsquo;argent que Salom&eacute; pr&eacute;sentera d&rsquo;ici peu &agrave; son p&egrave;re, H&eacute;rode. Son visage, d&eacute;sormais gris&acirc;tre, pr&eacute;sente les stigmates des souffrances endur&eacute;es avant sa mort. </span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align: center; text-indent: 35.45pt;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204130133-1.jpeg" style="width: 440px; height: 244px;" /><br /> &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp;&nbsp; <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:10.0pt">8. Mattia Preti,<i> Saint Jean-Baptiste d&eacute;capit&eacute;</i>, v. 1660, S&eacute;ville, Palacio Arzobispal</span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Pour l&rsquo;observateur, il n&rsquo;y a pas d&rsquo;&eacute;chappatoire possible. Rien ne nous est &eacute;pargn&eacute;&nbsp;: aucune figure f&eacute;minine ne vient adoucir cette vision d&rsquo;&eacute;pouvante (Salom&eacute; &ndash; si souvent repr&eacute;sent&eacute;e dans la peinture napolitaine de la premi&egrave;re moiti&eacute; du XVIIe si&egrave;cle &ndash; est absente de cette version d&eacute;cid&eacute;ment unique de la mort du Pr&eacute;curseur), et rien ne pourrait donner l&rsquo;illusion d&rsquo;une sc&egrave;ne de th&eacute;&acirc;tre. Le cou tranch&eacute; et sanguinolent est repr&eacute;sent&eacute; avec une extr&ecirc;me pr&eacute;cision anatomique&nbsp;: la plaie b&eacute;ante laiss&eacute;e par la d&eacute;capitation laisse entrevoir l&rsquo;art&egrave;re qui continue de se vider de son sang et qui macule la peau de b&ecirc;te dont le Baptiste &eacute;tait couvert, ainsi que le drap&eacute; rouge vermillon qui l&rsquo;entoure ; sa main gauche tient fermement la croix sur laquelle repose une cartouche contenant l&rsquo;inscription<i> Ecce Agnus Dei</i>. Le th&egrave;me des t&ecirc;tes d&eacute;capit&eacute;es (de saints) est issu de la tradition espagnole, r&eacute;put&eacute;e sans concession. L&rsquo;&acirc;pret&eacute; tragique de ces repr&eacute;sentations trouve, &agrave; Naples, un terrain favorable (Ribera et Battistello en ont ex&eacute;cut&eacute; eux aussi) de par le fait que dans le Vice-Royaume espagnol les concepts iconographiques hispanisants sont &eacute;videmment en vogue, mais &eacute;galement parce que toute la p&eacute;riode tardive du Caravage &ndash; &agrave; consid&eacute;rer ici en tant qu&rsquo;artiste fondateur de la <i>Scuola Napoletana</i> &ndash; repose en grande partie sur la th&eacute;matique de la d&eacute;capitation, que l&rsquo;on retrouve dans bon nombre de ses chefs-d&rsquo;&oelig;uvre m&eacute;ridionaux. D&rsquo;o&ugrave; le d&eacute;veloppement (dans la peinture napolitaine de la premi&egrave;re moiti&eacute; du XVIIe si&egrave;cle) des th&egrave;mes tels que Judith et Holopherne, Salom&eacute; tenant la t&ecirc;te de saint Jean-Baptiste, David et Goliath ou la D&eacute;capitation de saint Janvier.</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">D&rsquo;autre part, lors de son s&eacute;jour napolitain, Mattia Preti n&rsquo;h&eacute;site pas &agrave; s&rsquo;inspirer des artistes locaux, tels que Ribera (la gestuelle des saints rib&eacute;resques semble l&rsquo;inspirer particuli&egrave;rement) ou Battistello Caracciolo (le luminisme, le chromatisme froid et les tons verd&acirc;tres de l&rsquo;&eacute;piderme des protagonistes battistelliens font irruption dans certains tableaux pr&eacute;tiens). Les collectionneurs napolitains (et en particulier le marquis flamand Ferdinand van den Eynden) commandent beaucoup de Martyres de saints &agrave; Preti, lequel s&rsquo;inspire &eacute;norm&eacute;ment de la production martyrologique rib&eacute;resque, ex&eacute;cut&eacute;e une trentaine d&rsquo;ann&eacute;es auparavant. &Agrave; l&rsquo;instar de Ribera, Preti peint de nombreuses variations sur le th&egrave;me du martyre de saint Barth&eacute;l&eacute;my, dont le supplice particuli&egrave;rement sanglant (il fut &eacute;corch&eacute; vif) s&rsquo;accorde parfaitement avec les repr&eacute;sentations naturalistes. Il d&eacute;montre ainsi, une fois encore, ses capacit&eacute;s d&rsquo;adaptation &agrave; tous les milieux artistiques dans lesquels il s&rsquo;ins&egrave;re&nbsp;; John T. Spike &eacute;voque l&rsquo;&eacute;volution iconographique de Preti (qui va de pair avec son &eacute;volution stylistique), rappelant qu&rsquo;avant d&rsquo;arriver &agrave; Naples, le <i>Cavalier Calabrese</i> avait une pr&eacute;dilection pour les &eacute;pisodes de la vie du Christ et pour des sujets bibliques issus de la tradition artistique v&eacute;nitienne de la Renaissance, alors que d&egrave;s son arriv&eacute;e dans la capitale m&eacute;ridionale, il tend &agrave; choisir des th&egrave;mes hautement dramatiques, typiques de la tradition locale<font color="#000120"><sup>31</sup></font>. Toutefois, dans son <i>Martyre de saint Barth&eacute;l&eacute;my</i> de L&rsquo;Aquila (ill. 9), la rudesse rib&eacute;resque est att&eacute;nu&eacute;e, malgr&eacute; des accents purement naturalistes (l&rsquo;&eacute;corchement de la jambe du vieil homme, les physiques d&eacute;nud&eacute;s puissants ou d&eacute;charn&eacute;s&hellip;). Toutefois, si l&rsquo;on compare ce <i>Martyre</i> avec la version t&eacute;n&eacute;briste du Martyre &eacute;ponyme ex&eacute;cut&eacute; par&nbsp; Jusepe de Ribera (<i>Martyre de saint Barth&eacute;l&eacute;my</i>, v. 1628, Florence, Palazzo Pitti, Galleria Palatina), dont il s&rsquo;inspire, on remarque que Preti parvient &agrave; maintenir un &eacute;quilibre entre le supplice repr&eacute;sent&eacute; et sa capacit&eacute; &agrave; ne pas choquer l&rsquo;observateur. C&rsquo;est ce que pr&eacute;conise l&rsquo;art contre-r&eacute;formiste en mati&egrave;re d&rsquo;art sacr&eacute;&nbsp;: pour &eacute;duquer le fid&egrave;le, il faut le toucher sans l&rsquo;effrayer, ni le bouleverser. Preti en fait de m&ecirc;me dans ses autres martyres de saints d&rsquo;inspiration rib&eacute;resque, telles que le <i>Martyre de saint Barth&eacute;l&eacute;my</i> (1655-56, Manchester, New Hampshire, Currier Gallery of Art), le <i>Crucifiement de saint Pierre</i> (1655-56, Birmingham, Barber Institute of Fine Arts), la <i>D&eacute;capitation de saint Paul</i> (1656-59, Houston, The Museum of Fine Arts) ou son autre <i>Saint Barth&eacute;l&eacute;my</i> (v. 1660, Rome, Galleria Nazionale d&rsquo;Arte Antica di Palazzo Corsini). Ainsi, en mati&egrave;re de peinture hagiographique (et plus particuli&egrave;rement martyrologique) Preti prend la place de l&rsquo;Espagnolet (qui meurt en 1652) et h&eacute;rite des commandes rest&eacute;es orphelines suite &agrave; cette disparition. Avec ces sc&egrave;nes de martyres napolitaines, Mattia Preti se r&eacute;v&egrave;le &ecirc;tre un &laquo; peintre d&rsquo;histoire sacr&eacute;e de premier rang&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>32</sup></font>.</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align: center; text-indent: 35.45pt;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image19.png" style="width: 480px; height: 335px;" /><span roman="" style="font-family:"> &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp;&nbsp; </span><br /> <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span style="font-size:10.0pt">9. Mattia Preti, <i>Martyre de saint Barth&eacute;l&eacute;my</i>, v. 1656, L&rsquo;Aquila, Museo d&rsquo;arte nazionale d&rsquo;Abruzzo</span></span></span></p> <p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span style="font-size:8.0pt">&ldquo;Su concessione del Ministero dei Beni e delle Attivit&agrave; Culturali e del Turismo &ndash; Soprintendenza per i Beni Storici, Artistici ed Etnoantropologici dell&rsquo;Abruzzo &ndash; Archivio fotografico&rdquo;</span></span></span></p> <p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span style="font-size:8.0pt">Reproduction interdite</span></span></span></p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">&nbsp; &nbsp; &nbsp; En 1656, Naples conna&icirc;t une terrible &eacute;pid&eacute;mie de peste qui d&eacute;cime la moiti&eacute; de sa population. Preti est l&rsquo;un des seuls artistes &ldquo;napolitains&rdquo; &agrave; survivre au fl&eacute;au. Certains des membres de sa famille survivent eux aussi, et ses cousins Giovan Tommaso et Marino Schipani lui commandent un <i>ex-voto</i> pour rendre gr&acirc;ce &agrave; la Vierge de les avoir &eacute;pargn&eacute;s&nbsp;; c&rsquo;est ainsi que voit le jour la splendide <i>Vierge de Constantinople</i> (1656, Naples, Museo di Capodimonte). Il s&rsquo;agit de l&rsquo;une des rares compositions dat&eacute;es et sign&eacute;es par le Ma&icirc;tre&nbsp;; elle nous pr&eacute;sente une <i>Sacra Conversazione </i>insolitement associ&eacute;e &agrave; un couronnement de sainte Rosalie. Alors qu&rsquo;un ange s&rsquo;appr&ecirc;te &agrave; couronner la Vierge, cette derni&egrave;re, avec l&rsquo;aide de J&eacute;sus, d&eacute;pose en m&ecirc;me temps une d&eacute;licate couronne de fleurs sur la t&ecirc;te de Rosalie, qui est humblement agenouill&eacute;e devant eux. La r&eacute;p&eacute;tition d&rsquo;un m&ecirc;me geste &agrave; deux niveaux diff&eacute;rents de la composition constitue une trouvaille iconographique originale. La jeune sainte palermitaine, qui prit son envol iconographique sous les pinceaux de Van Dyck &ndash; lors de son s&eacute;jour sicilien &ndash;, est fid&egrave;le aux repr&eacute;sentations traditionnelles. Les visages d&rsquo;ascendance guerchinesque &ndash; tr&egrave;s p&acirc;les, presque lunaires &ndash; des deux protagonistes f&eacute;minines sont typiquement pr&eacute;tiens. Quatre saints entourent le noyau central constitu&eacute; de la Vierge &agrave; l&rsquo;Enfant et de sainte Rosalie&nbsp;: saint Joseph, saint Janvier (le saint patron de Naples qui est reconnaissant &agrave; la Vierge d&rsquo;avoir mis fin au fl&eacute;au dans sa ville), saint Roch (le saint protecteur contre la peste par antonomase) et saint Nicaise (qui porte une armure arborant la croix des Chevaliers de l&rsquo;Ordre de Malte, symbolisant la d&eacute;f&eacute;rence de Preti &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de la prestigieuse institution, dont il fait partie).</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Paradoxalement, la peste de 1656 se r&eacute;v&egrave;le &ecirc;tre une v&eacute;ritable aubaine pour Mattia Preti, qui b&eacute;n&eacute;ficie de commandes prestigieuses qu&rsquo;il va se faire un devoir d&rsquo;honorer. Vient le temps de la reconnaissance publique&nbsp;; le 27 novembre 1656 les &Eacute;lus du Peuple le choisissent pour peindre, au-dessus des sept portes de la cit&eacute;, des fresques votives, v&eacute;ritables <i>ex-voto</i> &agrave; l&rsquo;attention de l&rsquo;Immacul&eacute;e Conception et les saints protecteurs de la ville. Preti devient <i>de facto</i> l&rsquo;une des personnalit&eacute;s napolitaines les plus importantes, puisque ses &oelig;uvres, plac&eacute;es sur chaque point d&rsquo;acc&egrave;s de la ville, accueillent les Napolitains (et les &eacute;trangers de passage &agrave; Naples) et veillent sur la capitale du vice-royaume. La fresque peinte sur la porte de Saint-Janvier &agrave; Naples a &eacute;t&eacute; restaur&eacute;e en 1997&nbsp;; et l&rsquo;on conna&icirc;t les deux <i>Esquisses des fresques votives pour la peste de 1656 </i>&nbsp;&ndash; conserv&eacute;es &agrave; Capodimonte &ndash;, v&eacute;ritables visions apocalyptiques qui pr&eacute;sentent toutes deux l&rsquo;Immacul&eacute;e Conception tenant J&eacute;sus dans ses bras, entour&eacute;e de plusieurs saints, parmi lesquels saint Janvier et sainte Rosalie. L&rsquo;Archange Michel, qui se situe entre le monde c&eacute;leste et le monde terrestre, est lui aussi un Saint protecteur contre la peste. La sph&egrave;re terrestre n&rsquo;est que mort et d&eacute;solation&nbsp;; le fait d&rsquo;avoir connu la peste et d&rsquo;y avoir surv&eacute;cu permet &agrave; Preti de repr&eacute;senter au plus juste la r&eacute;alit&eacute; du fl&eacute;au. Il met sa virtuosit&eacute; naturaliste au service de ce qu&rsquo;il a vu, afin de&nbsp; figurer au mieux une sc&egrave;ne de vie quotidienne en p&eacute;riode de peste, autrement dit d&rsquo;innombrables cadavres d&rsquo;hommes, de femmes et d&rsquo;enfants transport&eacute;s jusqu&rsquo;&agrave; une fosse commune par des <i>monatti<sup>33</sup></i> par&eacute;s d&rsquo;un foulard autour du visage, allusion tr&egrave;s nette &agrave; la puanteur pestilentielle qui &eacute;mane des rues. La partie c&eacute;leste, qui rappelle les fresques de Lanfranco, b&eacute;n&eacute;ficie, quant &agrave; elle, d&rsquo;une palette chromatique plus chaude. Comme &agrave; son habitude, Preti parvient &agrave; assembler en une m&ecirc;me composition des &eacute;l&eacute;ments <i>a priori </i>antagonistes mais qui, dans cette synth&egrave;se pr&eacute;tienne si particuli&egrave;re, cohabitent harmonieusement.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">La direction baroquisante que semble prendre la peinture de Preti trouve une confirmation &eacute;vidente dans l&rsquo;exploitation de nouvelles influences, d&eacute;sormais ouvertement baroques. C&rsquo;est le cas du vif int&eacute;r&ecirc;t qu&rsquo;il porte &agrave; la statuaire berninienne qu&rsquo;il eut l&rsquo;occasion d&rsquo;admirer &agrave; Rome. Son splendide <i>Saint S&eacute;bastien</i> (v.1653-56, Naples, Museo di Capodimonte) est, &agrave; juste titre, l&rsquo;une de ses toiles les plus c&eacute;l&egrave;bres. Elle met en sc&egrave;ne le martyre du jeune et puissant soldat qui, li&eacute; &agrave; un tronc d&rsquo;arbre et d&eacute;pouill&eacute; de son armure, a le corps transperc&eacute; de fl&egrave;ches. Le v&eacute;ritable protagoniste de ce chef-d&rsquo;&oelig;uvre est le corps &eacute;burn&eacute;en de saint S&eacute;bastien, monumental et dynamique, qui surgit de l&rsquo;obscurit&eacute; gr&acirc;ce au tr&egrave;s caravagesque traitement de la lumi&egrave;re, qui contribue &agrave; le &ldquo;sculpter&rdquo; et &agrave; le mettre en valeur, pour le faire appara&icirc;tre dans toute sa puissance et sa magnificence. Le chromatisme, minimaliste, est typique de la p&eacute;riode napolitaine de Preti&nbsp;; les tons privil&eacute;gi&eacute;s sont sobres&nbsp;(gris, argent&eacute;s et beige). Il se d&eacute;gage de cette composition un d&eacute;pouillement et une sobri&eacute;t&eacute; que seule une impression de puissance h&eacute;ro&iuml;que vient contrebalancer. La virtuosit&eacute; dont fait preuve Mattia Preti dans le rendu de ce corps aussi vigoureux que sculptural d&eacute;coule de l&rsquo;&eacute;tude minutieuse qu&rsquo;il a faite de certaines &oelig;uvres du Bernin (1598-1680), et notamment de la <i>Fontaine des Quatre Fleuves</i> (1651, Rome, Piazza Navona). Preti est litt&eacute;ralement fascin&eacute; par l&rsquo;extraordinaire entreprise berninienne. D&egrave;s lors, il n&rsquo;est gu&egrave;re surprenant qu&rsquo;en son sculptural <i>Saint S&eacute;bastien</i> r&eacute;sonne l&rsquo;&eacute;cho du <i>Rio de la Plata</i>,&nbsp; du&nbsp; <i>Nil</i>, du <i>Gange</i> et du <i>Danube</i>. Toutefois, parall&egrave;lement &agrave; cette adh&eacute;sion de Preti &agrave; un langage baroque on ne peut plus contemporain, une autre tendance &ndash; r&eacute;currente chez l&rsquo;artiste &ndash; vient contrebalancer cet attrait pour la modernit&eacute;. &nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Comme nous l&rsquo;avons &eacute;voqu&eacute; pr&eacute;c&eacute;demment, alors qu&rsquo;il vit &agrave; Rome, entre les ann&eacute;es 1630 et les ann&eacute;es 1650, Mattia Preti a l&rsquo;occasion de v&eacute;rifier l&rsquo;attrait incroyable qu&rsquo;exercent sur l&rsquo;ensemble du milieu artistique les r&eacute;miniscences artistiques v&eacute;nitiennes (notamment chromatiques), inspir&eacute;es des grands ma&icirc;tres du<i> Cinquecento</i>. Ce courant n&eacute;ov&eacute;nitien contamine peu &agrave; peu toute la p&eacute;ninsule et Preti, &agrave; l&rsquo;instar de ses pairs, y succombe, &agrave; la diff&eacute;rence pr&egrave;s que le voyage qu&rsquo;il effectue &agrave; Venise dans les ann&eacute;es 1640 le bouleverse &agrave; un point tel que la passion qu&rsquo;il porte &agrave; ces artistes lagunaires ne s&rsquo;&eacute;teindra jamais. &Agrave; Naples, il ex&eacute;cute de nombreux tableaux d&rsquo;inspiration clairement n&eacute;ov&eacute;ron&eacute;sienne. Car le V&eacute;ron&egrave;se est sans doute, avec le Caravage et le Guerchin, l&rsquo;artiste qui l&rsquo;inspire le plus. Et c&rsquo;est le grand V&eacute;nitien dont il est le plus admiratif, m&ecirc;me si des r&eacute;f&eacute;rences titianesques<font color="#000032"><sup>34 </sup></font>et tintorettiennes<font color="#000120"><sup>35</sup></font> sont &eacute;galement &eacute;videntes dans son &oelig;uvre. Et alors que ses pairs adoptent le riche chromatisme n&eacute;ov&eacute;nitien, Preti, emport&eacute; par sa passion pour les V&eacute;nitiens, s&rsquo;inspire non seulement de leur palette chromatique (autrement dit de leurs tons chauds), mais aussi et surtout de leur sens de la mise en sc&egrave;ne et de leur th&eacute;&acirc;tralit&eacute;. Les choix artistiques de Preti, s&rsquo;ils peuvent sembler de prime abord&nbsp;dissonants si on les compare aux tendances en vogue &agrave; l&rsquo;&eacute;poque, n&rsquo;en sont pas moins l&rsquo;expression de sa curiosit&eacute; inn&eacute;e et de son &laquo;&nbsp;temp&eacute;rament d&rsquo;infatigable&nbsp; exp&eacute;rimentateur&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>36</sup></font>. D&rsquo;autre part, force est de constater que l&rsquo;alchimie entre les diff&eacute;rentes influences dont il se nourrit donne vie &agrave; des chefs-d&rsquo;&oelig;uvre qui m&eacute;riteraient d&rsquo;&ecirc;tre davantage connus. Fid&egrave;le &agrave; son temp&eacute;rament d&rsquo;artiste &ldquo;d&eacute;cal&eacute;&rdquo; et anachronique, Preti, lors de son s&eacute;jour &agrave; Naples, regarde en arri&egrave;re et rend hommage &agrave; ses a&icirc;n&eacute;s septentrionaux &ndash; tout en s&rsquo;adaptant &agrave; merveille aux exigences du milieu artistique napolitain &ndash;, donnant naissance &agrave; des &oelig;uvres particuli&egrave;rement int&eacute;ressantes.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">En ce qui concerne les go&ucirc;ts anachroniques du Calabrais, Claudio Strinati estime que &laquo; le fait d&rsquo;&ecirc;tre coh&eacute;rent avec un id&eacute;al figuratif qui avait d&eacute;j&agrave; vieilli au moment o&ugrave; il l&rsquo;adopta [&hellip;] fut [&hellip;] le p&ocirc;le qui orienta toute sa carri&egrave;re, et qui confirme de plus en plus, au cours des ann&eacute;es, sa position de supr&ecirc;me &ldquo;inactuel&rdquo;&nbsp;&raquo;<sup>37</sup></span><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">, soutenu dans cette observation par Giuliano Briganti qui &eacute;voque quant &agrave; lui &laquo;&nbsp;le caract&egrave;re hautement singulier, d&egrave;s ses d&eacute;buts, de la position de Preti [&hellip;]. Parce que ses amours picturales furent toujours r&eacute;trospectives, ses int&eacute;r&ecirc;ts &eacute;loign&eacute;s, souvent en opposition avec ceux de ses contemporains. On peut dire qu&rsquo;il resta, au fond, un artiste isol&eacute;. Le d&eacute;finir comme un &ldquo;provincial&rdquo; n&rsquo;aurait aucun sens, tant parce que de son temps les cultures &ldquo;provinciales&rdquo; &eacute;taient on ne peut plus vigoureuses et participaient activement &agrave; former le riche m&eacute;lange de la culture artistique de l&rsquo;Italie tout enti&egrave;re, que parce que sa culture, presque trop complexe, est exactement le contraire de cette d&eacute;finition. Il vaut mieux, &agrave; la limite, le qualifier de &ldquo;d&eacute;pays&eacute;&rdquo;&nbsp;&raquo;<sup>38</sup></span><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">. Preti, l&rsquo;inclassable, va d&eacute;sormais avoir recours &agrave; de nombreux &eacute;l&eacute;ments issus de l&rsquo;esth&eacute;tique v&eacute;ron&eacute;sienne, comme on peut l&rsquo;observer par exemple dans ses variations autour du th&egrave;me des &nbsp;&ldquo;banquets tragiques&rdquo;, qu&rsquo;il d&eacute;veloppe d&egrave;s sa p&eacute;riode romaine, mais dont il peint plusieurs versions lors de son s&eacute;jour parth&eacute;nop&eacute;en, dans la mesure o&ugrave; ils sont particuli&egrave;rement conformes &agrave; la sensibilit&eacute; artistique locale, qui a une pr&eacute;dilection pour les th&egrave;mes empreints de violence.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Le beau <i>Banquet d&rsquo;H&eacute;rode</i> (v. 1653-56, Toledo, Ohio, The Toledo Museum of Art), est th&eacute;matiquement inspir&eacute; de la c&eacute;l&egrave;bre &oelig;uvre &eacute;ponyme de Rubens (v.1640, Edimbourg, National Gallery of Scotland) qui fit sensation lors de son arriv&eacute;e &agrave; Naples, dans la collection du marchand flamand Gaspar Roomer, &agrave; tel point que tous les artistes de l&rsquo;&eacute;poque vinrent admirer son chromatisme &eacute;clatant, comme le raconte De Dominici. Le<i> Banquet d&rsquo;H&eacute;rode</i> de Preti (qui est, pour John T. Spike, &laquo;&nbsp;la toile la plus remarquable de cette p&eacute;riode&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>39</sup></font>), est, en revanche, une &oelig;uvre t&eacute;n&eacute;briste qui laisse difficilement &eacute;merger les figures de l&rsquo;obscurit&eacute;. La triade fatale au Baptiste, autrement dit H&eacute;rode (&agrave; droite), Salom&eacute;, sa fille (&agrave; gauche) et son &eacute;pouse H&eacute;rodiade (au centre de l&rsquo;espace pictural) sont tous trois figur&eacute;s au premier plan. &Agrave; l&rsquo;arri&egrave;re-plan, on devine plusieurs serviteurs qui contemplent, m&eacute;dus&eacute;s, la t&ecirc;te du Pr&eacute;curseur qu&rsquo;une tr&egrave;s jeune Salom&eacute; apporte, sur un plateau d&rsquo;argent. H&eacute;rodiade, qui semble tout droit sortie d&rsquo;une &oelig;uvre de V&eacute;ron&egrave;se et qui est une reprise &ndash; plus raffin&eacute;e &ndash; de la figure de Procn&eacute;, que Preti avait peint quelques ann&eacute;es auparavant (<i>La vengeance de Procn&eacute;</i>, v.1650-60, Carpi, Musei Civici), est la figure la plus visible de la composition, bien que son visage soit partiellement dans l&rsquo;ombre. Elle fixe, elle aussi, avec une impression de m&eacute;lancolie, le fun&egrave;bre troph&eacute;e que sa fille va poser sur la table, &laquo;&nbsp;comme s&rsquo;il s&rsquo;agissait d&rsquo;un autre plat du banquet&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>40</sup></font>. Le caract&egrave;re mondain de ce banquet tranche radicalement avec la vision terrifiante qui accompagne l&rsquo;entr&eacute;e de Salom&eacute; en sc&egrave;ne. Paradoxalement, il r&egrave;gne une atmosph&egrave;re paisible qu&rsquo;on ne retrouve pas dans les deux autres banquets - beaucoup plus agit&eacute;s - que nous allons &eacute;voquer.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Son <i>Banquet de Balthazar </i>(1660, Naples, Museo di Capodimonte) est une composition complexe dans laquelle Preti peut donner libre cours &agrave; sa brillante veine narrative. D&rsquo;innombrables convives entourent le fils de Nabuchodonosor au moment o&ugrave; il apprend que ses jours sont compt&eacute;s, lors du somptueux festin qu&rsquo;il donne. Les convives sont tr&egrave;s nombreux&nbsp;; parmi eux, on observe des femmes aux toilettes fastueuses et aux coiffures raffin&eacute;es, rehauss&eacute;es de bijoux et de perles, qui sont tr&egrave;s clairement inspir&eacute;es par les figures f&eacute;minines v&eacute;ron&eacute;siennes, titianesques et tintorettiennes, coiff&eacute;es &agrave; l&rsquo;identique<font color="#000120"><sup>41</sup></font>. D&rsquo;autre part, l&rsquo;organisation constitutive de l&rsquo;espace pictural est particuli&egrave;rement originale, puisque Preti pr&eacute;f&egrave;re, &agrave; la traditionnelle disposition horizontale, une composition en profondeur qui n&rsquo;est pas sans rappeler <i>Les Noces de Cana </i>du Tintoret (1561, Venise, Santa Maria della Salute). En r&eacute;sulte une impression de mouvement et d&rsquo;agitation continue, li&eacute;e autant &agrave; la convivialit&eacute; voulue par le festin qu&rsquo;&agrave; l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement divin qui vient le perturber. En ce qui concerne les d&eacute;cors architecturaux, l&agrave; aussi Preti a recours aux sc&eacute;nographies th&eacute;&acirc;trales qui ont fait la renomm&eacute;e du V&eacute;ron&egrave;se. Ces cadres grandioses sont particuli&egrave;rement bien adapt&eacute;s aux trag&eacute;dies qu&rsquo;ils rec&egrave;lent&nbsp;: son impressionnant <i>Banquet d&rsquo;Absalon</i> (1660, Naples, Museo di Capodimonte), qui renoue avec le t&eacute;n&eacute;brisme caravagesque, en est l&rsquo;exemple le plus significatif. Absalon donne un banquet auquel il convie Amnon, afin de le faire ex&eacute;cuter. Ce dernier a sali l&rsquo;honneur de Tamar, la s&oelig;ur d&rsquo;Absalon, en la violant, et Absalon entend la venger en faisant assassiner son bourreau. On assiste ici au moment le plus tragique du banquet&nbsp;; Preti, s&rsquo;inspirant des repr&eacute;sentations caravagesques les plus violentes, d&eacute;cide de figurer l&rsquo;instant m&ecirc;me de l&rsquo;assassinat. Alors que tout le monde est attabl&eacute; autour du festin, deux hommes, qui ont d&eacute;j&agrave; poignard&eacute; Amnon, s&rsquo;appr&ecirc;tent &agrave; lui porter le coup fatal. Son cou est en sang, lac&eacute;r&eacute; de coups de couteau. La lumi&egrave;re saccad&eacute;e vient percuter la gorge offerte d&rsquo;Amnon ainsi que la morphologie de ses ex&eacute;cuteurs&nbsp;; mais elle vient surtout se refl&eacute;ter dans le m&eacute;tal des armes tranchantes et mena&ccedil;antes qui s&rsquo;appr&ecirc;tent &agrave; achever le violeur. Au loin, la lumi&egrave;re du coucher de soleil met en valeur les colonnades d&rsquo;inspiration v&eacute;ron&eacute;sienne&nbsp;; cette&nbsp;&ldquo;sc&egrave;ne de th&eacute;&acirc;tre&rdquo; est l&rsquo;&eacute;crin id&eacute;al pour cette trag&eacute;die qui, comme le dit&nbsp; subtilement Wilhelm Rolfs, a tout d&rsquo;un &laquo; assassinat &agrave; la napolitaine lors d&rsquo;un banquet &agrave; la V&eacute;ron&egrave;se&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>42</sup></font>. Cette formule extr&ecirc;mement pertinente illustre parfaitement la tendance de Preti d&rsquo;allier en une m&ecirc;me &oelig;uvre des &eacute;l&eacute;ments culturels (dans leur acception la plus large) disparates&nbsp;; ex&eacute;cut&eacute;e lors de son s&eacute;jour napolitain &ndash; dans une capitale m&eacute;ridionale &agrave; la fois grandiose et solaire, violente et sombre &ndash;, et donc inspir&eacute;e &agrave; la fois de la culture de Naples et de celle, de prime abord plus raffin&eacute;e, de Venise, cette &oelig;uvre, comme le souligne Rolfs, rapproche deux cultures qu&rsquo;<i>a priori</i> tout oppose. C&rsquo;est la grande force de Preti. Claudio Strinati estime que &laquo;&nbsp;Preti traduisit la <i>manfrediana methodus</i> dans une dimension n&eacute;ov&eacute;ron&eacute;sienne qui lui venait de loin mais qu&rsquo;il sut activer et rendre fascinante et magnifique comme personne d&rsquo;autre&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>43</sup></font>. &nbsp; &nbsp; &nbsp; &nbsp;&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Peu avant son d&eacute;part pour Malte, Preti ex&eacute;cute un <i>Saint Georges &agrave; cheval</i> (ill. 10), clairement cr&eacute;&eacute; pour impressionner l&rsquo;Ordre de Malte (dont il fait partie depuis 1642), alors qu&rsquo;il s&rsquo;appr&ecirc;te &agrave; rejoindre l&rsquo;&icirc;le des Chevaliers. Saint Georges &ndash; qui incarne l&rsquo;id&eacute;al chevaleresque &ndash; est repr&eacute;sent&eacute; dans toute sa majest&eacute;, comme une figure triomphante de l&rsquo;id&eacute;ologie contrer&eacute;formiste. Son cheval<font color="#000120"><sup>44</sup></font> et lui ne forment presque qu&rsquo;une figure monumentale qui, avec l&rsquo;aide de Dieu &ndash; qui lui a envoy&eacute; ses &eacute;missaires &ndash; terrasse le mal. La lumi&egrave;re laisse de nombreuses zones d&rsquo;ombre, laissant parfois deviner de funestes d&eacute;tails (les ossements qui gisent &agrave; proximit&eacute; du dragon), mais elle met en exergue la blancheur immacul&eacute;e du cheval de saint Georges &ndash; qui a un r&ocirc;le de protagoniste, au m&ecirc;me titre que son cavalier &ndash;, ainsi que deux anges, l&rsquo;un qui lui montre du doigt l&rsquo;&eacute;tendard, et l&rsquo;autre, petit et potel&eacute;, qui porte la croix des Chevaliers de Saint-Jean. Le troisi&egrave;me <i>putto</i>, qui apporte l&rsquo;&eacute;tendard, a un visage peint en contre-jour typique de la po&eacute;tique pr&eacute;tienne. De par ses effets chromatiques particuli&egrave;rement intenses et brillants (l&rsquo;&eacute;tendard orange de l&rsquo;Ordre de Malte et la cape bleue, flottante, de saint Georges) et le paysage titianesque que l&rsquo;on devine dans le fond, cette toile fait explicitement r&eacute;f&eacute;rence au<i> Cinquecento</i> v&eacute;nitien. Selon De Dominici, ce <i>Saint Georges</i> h&eacute;ro&iuml;que et magistralement ex&eacute;cut&eacute; aurait suscit&eacute; bien des jalousies dans le milieu artistique napolitain. Et cette attitude triomphante du saint, accompagn&eacute;e des attributs traditionnels de l&rsquo;Ordre de Malte, conf&egrave;re &agrave; ce chef-d&rsquo;&oelig;uvre une dimension all&eacute;gorique &eacute;voquant la victoire des Chevaliers de l&rsquo;Ordre sur les ennemis Turcs (ces derniers les avaient chass&eacute;s de Rhodes, o&ugrave; se trouvait auparavant le si&egrave;ge de leur institution, les poussant ainsi &agrave; s&rsquo;installer &agrave; Malte, en 1530). </span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204131626-3.jpeg" style="width: 378px; height: 500px;" /><br /> <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:10.0pt">10. Mattia Preti, <i>Saint Georges &agrave; cheval</i>, v. 1659, La Valette, Co-Cath&eacute;drale Saint-Jean</span></span></span></p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Il existe un autre <i>Saint Georges</i> remarquable, peint par Preti une quinzaine d&rsquo;ann&eacute;es plus tard (ill. 11), qui met en sc&egrave;ne le saint apr&egrave;s sa victoire sur le dragon. &nbsp;Descendu de son cheval &ndash; qui appara&icirc;t cependant toujours &agrave; ses c&ocirc;t&eacute;s &ndash;, il pose un pied, avec une force retenue, sur le monstre d&eacute;capit&eacute; &agrave; ses pieds<font color="#000120"><sup>45</sup></font>. Un ange fac&eacute;tieux, assis sur le destrier, porte la lance du saint, tandis que deux autres <i>putti</i> lui apportent les attributs de son martyre, la palme et la couronne.</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align: center; text-indent: 35.45pt;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204131800-4.jpeg" style="width: 380px; height: 499px;" /><br /> <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:10.0pt">11.</span></span></span><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:10.0pt">Mattia Preti, <i>Saint Georges</i>, 1676-78, Victoria (Gozo), Coll&eacute;giale de Saint Georges</span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Les ann&eacute;es napolitaines voient la po&eacute;tique de Preti s&rsquo;&eacute;panouir et s&rsquo;enrichir des suggestions issues du milieu artistique local&nbsp;; le beau <i>Martyre de sainte Catherine</i> (ill. 12), qui remonte &agrave; la m&ecirc;me p&eacute;riode que le <i>Saint Georges &agrave; cheval</i>, r&eacute;v&egrave;le ainsi de forts accents stanzionesques<font color="#000120"><sup>46</sup></font>. Sainte Catherine, plac&eacute;e en position centrale et sur&eacute;lev&eacute;e par rapport aux&nbsp; personnages qui se pressent pour assister &agrave; son martyre, est percut&eacute;e par un faisceau lumineux qui fait irruption par le bas, comme pour &eacute;clairer l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement, figur&eacute; comme une sc&egrave;ne de th&eacute;&acirc;tre. Le puissant et mena&ccedil;ant bourreau &ndash; d&rsquo;ascendance rib&eacute;resque &ndash;, qui a d&eacute;j&agrave; d&eacute;gain&eacute; son &eacute;p&eacute;e, s&rsquo;appr&ecirc;te &agrave; d&eacute;capiter la jeune femme, qui avait r&eacute;sist&eacute; au supplice de la roue, sur laquelle elle est appuy&eacute;e. M&eacute;lancolique et digne, elle l&egrave;ve les yeux au ciel, o&ugrave; deux angelots virevoltant lui apportent sa couronne, tandis que deux autres anges scrutent la sc&egrave;ne, &agrave; demi cach&eacute;s derri&egrave;re les colonnes d&rsquo;un temple antique. L&agrave; encore les r&eacute;miniscences v&eacute;ron&eacute;siennes affleurent, dans ce d&eacute;cor grandiose autant que dans la figure du jeune homme noir situ&eacute; au bas de l&rsquo;estrade sacrificielle, &agrave; gauche, effar&eacute; par ce qui se passe sous ses yeux.</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align: center; text-indent: 35.45pt;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204131959-5.jpeg" style="width: 360px; height: 549px;" /><br /> <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:10.0pt">12. Mattia Preti, <i>Martyre de sainte Catherine</i>, v. 1659, La Valette, &Eacute;glise Sainte-Catherine de la Langue d&rsquo;Italie</span></span></span></p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">L&rsquo;arriv&eacute;e de Preti &agrave; Naples et la terrible peste de 1656 ont profond&eacute;ment chang&eacute; la <i>Scuola napoletana</i>, qui, &agrave; partir des ann&eacute;es 1660, s&rsquo;&eacute;loigne du caravagisme &ndash; qui, dans la cit&eacute; parth&eacute;nop&eacute;enne, &eacute;tait rest&eacute; une force vive de la peinture jusqu&rsquo;alors, contrairement aux autres centres artistiques qui l&rsquo;avaient d&eacute;laiss&eacute; depuis les ann&eacute;es 1625-30 &ndash; et se tourne vers le baroque. Malgr&eacute; ses succ&egrave;s napolitains, autrement dit ses innombrables commandes aussi bien priv&eacute;es que publiques (il est sollicit&eacute; par les plus grands collectionneurs priv&eacute;s, de m&ecirc;me que par les ordres religieux, comme en atteste la prestigieuse commande de dix toiles pour le transept et la nef de l&rsquo;&eacute;glise San Pietro a Majella<font color="#000120"><sup>47</sup></font>) et la reconnaissance officielle (les fresques pour les portes de la ville), Preti part pour Malte. On a beaucoup &eacute;voqu&eacute; la rivalit&eacute; entre lui et Luca Giordano, de m&ecirc;me que les jalousies suscit&eacute;es par ses succ&egrave;s dans la capitale du vice-royaume pour justifier son d&eacute;part, mais, comme le sugg&egrave;re John T. Spike, il se pourrait que Preti, insatisfait des r&eacute;mun&eacute;rations inversement proportionnelles &agrave; l&rsquo;incroyable somme de travail qu&rsquo;il fournit<sup>48</sup>, ait pens&eacute; qu&rsquo;il serait mieux trait&eacute; ailleurs.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">&Agrave; Malte, son style grandiose (sa &laquo; mani&egrave;re triomphante &raquo;<font color="#000120"><sup>49</sup></font>, comme la d&eacute;finit Keith Sciberras) lui permet de transformer profond&eacute;ment le visage de l&rsquo;&icirc;le. Il ne souffre d&rsquo;aucune rivalit&eacute;&nbsp;et l&rsquo;&eacute;clectisme de sa peinture correspond parfaitement &agrave; la vocation cosmopolite de Malte. En revanche, Preti, qui avait atteint le sommet de son art lors de son s&eacute;jour napolitain entre 1653 et 1660, se trouve d&eacute;sormais &eacute;loign&eacute; des grands centres artistiques et donc, par extension, des derniers courants en vogue en Italie. Il n&rsquo;&eacute;chappe donc pas &agrave; une certaine cristallisation de son langage, et il subit cet isolement artistique forc&eacute; en exploitant sa po&eacute;tique, d&eacute;sormais immuable. Seule son utilisation des couleurs change brusquement vers le milieu des ann&eacute;es 1670. Il renonce progressivement au chromatisme n&eacute;ov&eacute;nitien riche et vari&eacute; (les couleurs brillantes, comme l&rsquo;orange, le jaune et le bleu se rar&eacute;fient), sa palette se restreint et s&rsquo;assombrit&nbsp;; Preti revient au t&eacute;n&eacute;brisme<font color="#000120"><sup>50</sup></font>. &Agrave; l&rsquo;instar de bon nombre de ses pairs, plus Preti avance en &acirc;ge, plus son art, d&eacute;pouill&eacute; de tout artifice, se fait introspectif, comme en t&eacute;moigne son &eacute;mouvant<i> Christ &agrave; la colonne </i>(1685-90, La Valette, National Museum of Fine Arts), qui, de par sa religiosit&eacute; exacerb&eacute;e empreinte de d&eacute;sespoir, est une v&eacute;ritable m&eacute;ditation sur la mort.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Tenu, par les Statuts de l&rsquo;Ordre, de r&eacute;sider sur l&rsquo;&icirc;le, Preti ne s&rsquo;en &eacute;loigne, de mani&egrave;re exceptionnelle, que lors du d&eacute;c&egrave;s de son fr&egrave;re Gregorio en 1672. On sait, par ses &eacute;changes &eacute;pistolaires avec Don Antonio Ruffo, que Preti se sentait en quelque sorte prisonnier de l&rsquo;Ordre, et qu&rsquo;il vivait mal le fait de ne plus pouvoir voyager et, de surcro&icirc;t, d&rsquo;&ecirc;tre faiblement r&eacute;mun&eacute;r&eacute;<font color="#000120"><sup>51</sup></font>. Pendant ses quatre d&eacute;cennies maltaises, il ex&eacute;cute de nombreuses &oelig;uvres pour des collectionneurs italiens, ainsi que pour des &eacute;glises siennoises<font color="#000120"><sup>52</sup></font>. Et, toujours li&eacute; &agrave; son village d&rsquo;origine, il peint, entre 1680 et 1690, de nombreuses toiles qu&rsquo;il envoie &agrave; Taverna, pour les &eacute;glises de Santa Barbara, de San Giovanni Battista et de San Domenico.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Preti, en vieillissant &ndash; et apr&egrave;s avoir eu une carri&egrave;re exemplaire et triomphale &ndash; souhaite clairement laisser son empreinte &agrave; Taverna. Parmi les compositions qui y sont conserv&eacute;es, on compte plusieurs chefs-d&rsquo;&oelig;uvre, dont l&rsquo;impressionnant et <i>Christ foudroyant</i> (ill. 13) et son testament pictural, <i>Le pr&ecirc;che de saint Jean-Baptiste</i> (ill. 14). Dans son terrible <i>Christ foudroyant</i>, &eacute;galement appel&eacute; <i>La vision de saint Dominique</i>, on observe le saint agenouill&eacute; dans la partie inf&eacute;rieure de l&rsquo;espace pictural, &agrave; proximit&eacute; d&rsquo;un chien qui tient une bougie dans sa gueule. Saint Dominique, qui tente d&rsquo;interc&eacute;der aupr&egrave;s du Christ pour obtenir le pardon pour les hommes, contemple, d&eacute;sol&eacute;, l&rsquo;ire christique, que la Vierge tente de calmer. La partie c&eacute;leste, au chromatisme solaire, refl&egrave;te l&rsquo;&eacute;nergie d&eacute;ploy&eacute;e par ce Christ athl&eacute;tique, accompagnant son geste vengeur et mena&ccedil;ant&nbsp;; ce dernier, assis sur des nuages gris, de funeste augure, tient dans sa main droite des &eacute;clairs enflamm&eacute;s qu&rsquo;il s&rsquo;appr&ecirc;te &agrave; lancer sur la Terre. Pour Giuseppe Valentino<font color="#000120"><sup>53</sup></font>, dans cette &oelig;uvre Preti est proche des &laquo;&nbsp;valeurs &eacute;mouvantes, des effets de crainte et d&rsquo;&eacute;merveillement, du<i> Jugement</i> de Michel-Ange&nbsp;&raquo;<font color="#000120"><sup>54</sup></font>. </span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align: center; text-indent: 35.45pt;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204132417-6.jpeg" style="width: 380px; height: 594px;" /><br /> <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span style="font-size:10.0pt">13. Mattia Preti, <i>La vision de saint Dominique </i>(ou <i>Christ foudroyant</i>), v. 1681, Taverna, Chiesa di San Domenico&nbsp; Archivio Museo Civico di Taverna.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Quant &agrave; son<i> Pr&ecirc;che de saint Jean-Baptiste </i>(ill. 14), il occupe une place &agrave; part dans la carri&egrave;re du Ma&icirc;tre, notamment parce qu&rsquo;il aurait &eacute;t&eacute; effectu&eacute; &agrave; Taverna, o&ugrave; Preti aurait eu l&rsquo;occasion de se rendre apr&egrave;s avoir assist&eacute; aux obs&egrave;ques de son fr&egrave;re Gregorio, mort &agrave; Rome le 25 janvier 1672. </span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align: center; text-indent: 35.45pt;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_393_13_image-20200204132546-7.jpeg" style="width: 380px; height: 534px;" /><br /> <span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span style="font-size:10.0pt">14. Mattia Preti, <i>Le pr&ecirc;che de saint Jean-Baptiste</i>, v. 1672, Taverna, Chiesa di San Domenico&nbsp; </span></span></span></p> <p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span roman="" style="font-family:"><span lang="FR" style="font-size:10.0pt">Archivio Museo Civico di Taverna</span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">L&rsquo;artiste a ins&eacute;r&eacute;, aux pieds de saint Jean-Baptiste, son autoportrait, tourn&eacute; vers l&rsquo;observateur. La main sur le c&oelig;ur, il met ici en exergue sa d&eacute;votion &agrave; l&rsquo;encontre du Pr&eacute;curseur, saint patron des Chevaliers de l&rsquo;Ordre de Malte. Saint Jean-Baptiste, figur&eacute; au centre de l&rsquo;espace pictural, est percut&eacute; par la lumi&egrave;re qui met en valeur son corps puissant&nbsp;; il d&eacute;signe un <i>putto</i>, situ&eacute; dans la partie sup&eacute;rieure, qui tient un cartouche sur lequel est inscrit <i>poenitentia</i>. Sur la droite se trouve l&rsquo;&eacute;ternel compagnon du Baptiste, l&rsquo;agneau, que caresse un angelot souriant. Preti, quant &agrave; lui, se pr&eacute;sente en tant que peintre et chevalier (il porte l&rsquo;habit de l&rsquo;Ordre de Malte), puisqu&rsquo;il tient dans sa main un pinceau et une &eacute;p&eacute;e&nbsp;; il r&eacute;affirme ainsi son identit&eacute; (artistique et sociale), et le prestige acquis gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;Ordre de Malte. Pour Giuseppe Valentino, &laquo;&nbsp;on peut imaginer que Preti, n&rsquo;a, par respect, repris contact avec sa patrie qu&rsquo;apr&egrave;s la mort de son fr&egrave;re a&icirc;n&eacute; et premier ma&icirc;tre&nbsp;[&hellip;] Il n&rsquo;est pas &eacute;vident de mesurer totalement l&rsquo;impact que le tableau eut dans l&rsquo;&eacute;glise des nobles de Taverna&nbsp;; il est difficile d&rsquo;appr&eacute;hender compl&egrave;tement les multiples significations historiques, sociales, politiques et culturelles qui d&eacute;coul&egrave;rent de cette &ldquo;pr&eacute;sence&rdquo; en effigie. [&hellip;] Il y a donc beaucoup d&rsquo;&eacute;l&eacute;ments qui concourent &agrave; augmenter la valeur et le caract&egrave;re exceptionnel de cette &oelig;uvre, qui, dans son genre, compte sans doute parmi les plus significatives de l&rsquo;art italien du XVIIe si&egrave;cle, en plus d&rsquo;&ecirc;tre consid&eacute;r&eacute;e, pour ses multiples acceptions humaines et historiques, le chef-d&rsquo;&oelig;uvre absolu du Chevalier Mattia Preti &raquo;<font color="#000120"><sup>55</sup></font>.</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Ce peintre au style unique d&eacute;veloppe, au fil de ses quelques soixante ann&eacute;es de carri&egrave;re, une po&eacute;tique &agrave; part, qui fait de lui l&rsquo;un des grands peintres du<i> Seicento</i>. Il reste toutefois m&eacute;connu, m&ecirc;me si l&rsquo;on observe, notamment &agrave; l&rsquo;occasion des c&eacute;l&eacute;brations relatives au Quatri&egrave;me centenaire de sa naissance (qui ont eu lieu en 2013), un int&eacute;r&ecirc;t croissant pour cet artiste incroyablement prolifique, cultiv&eacute;, versatile et polyvalent. Parall&egrave;lement &agrave; sa carri&egrave;re de peintre, et de par son immense culture artistique, Preti est &eacute;galement tr&egrave;s pris&eacute; par les collectionneurs, auxquels il prodigue de tr&egrave;s bons conseils. En ce qui concerne son &eacute;clectisme pictural, nous savons que Preti a clairement l&rsquo;ambition d&rsquo;inventer un style original, en se d&eacute;marquant de ses illustres pr&eacute;d&eacute;cesseurs&nbsp;; il souhaite que les id&eacute;es (iconographiques, constitutives, artistiques) dont il a la paternit&eacute; soient consid&eacute;r&eacute;es comme telles, autrement dit comme des inventions originales qu&rsquo;il ne doit qu&rsquo;&agrave; lui-m&ecirc;me<font color="#000120"><sup>56</sup></font>. Ainsi, cette ambition lui permet d&rsquo;assumer pleinement son temp&eacute;rament artistique &ldquo;&oelig;cum&eacute;nique&rdquo; et discontinu qui le pousse &agrave; s&rsquo;inspirer de bon nombre de ses contemporains, &agrave; passer d&rsquo;un style &agrave; l&rsquo;autre, et &agrave; aller sans cesse &agrave; contre-courant des modes artistiques en vogue &agrave; son &eacute;poque&nbsp;; souvent qualifi&eacute;, &agrave; juste titre, de &ldquo;supr&ecirc;me inactuel&rdquo; ou&nbsp; d&rsquo;&ldquo;isol&eacute;&rdquo;, il a la particularit&eacute; d&rsquo;&ecirc;tre toujours en d&eacute;calage avec la r&eacute;alit&eacute; artistique contemporaine, en ayant recours &agrave; des langages figuratifs alors d&eacute;pass&eacute;s.&nbsp;</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt"><span roman="" style="font-family:"><span georgia="" lang="FR" style="font-family:">Les destins de Preti et de Naples &ndash; cit&eacute; qui fait de lui un peintre de premier ordre &ndash; sont concordants&nbsp;; en effet, le Calabrais trahit une v&eacute;ritable sensibilit&eacute; napolitaine puisqu&rsquo;&agrave; l&rsquo;&eacute;poque o&ugrave; il y vit, dans les ann&eacute;es 1650, la cit&eacute; parth&eacute;nop&eacute;enne, toujours fid&egrave;le &agrave; la po&eacute;tique caravagesque, t&eacute;moigne d&rsquo;une adh&eacute;sion pour le moins timide au Baroque (qui triomphe alors partout ailleurs depuis une trentaine d&rsquo;ann&eacute;es). Preti va donc servir de trait d&rsquo;union entre la fin de l&rsquo;&egrave;re naturaliste et l&rsquo;av&egrave;nement du courant majeur du XVIIe si&egrave;cle dans ce centre quelque peu r&eacute;fractaire, tout en ne reniant jamais, lui non plus, sa sensibilit&eacute; originelle caravagesque. N&eacute; en 1613, soit trois ans apr&egrave;s la mort du Caravage, il sera son dernier &eacute;pigone, m&ecirc;me s&rsquo;il pr&eacute;sente, toute sa vie durant, plusieurs facettes d&rsquo;une m&ecirc;me po&eacute;tique originale, inattendue et inclassable.</span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:35.45pt">&nbsp;</p> <div>&nbsp; <hr align="left" size="1" width="33%" /> <div id="ftn1"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">1.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Autrement dit relatif au langage de Michelangelo Merisi, dit Le Caravage.</span></span></p> </div> <div id="ftn2"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">2. <span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:">La<i> Manfrediana Methodus</i> (et par extension le caravagisme dit &ldquo;manfr&eacute;dien&rdquo;) est un courant interne au Caravagisme qui s&rsquo;inspire de la po&eacute;tique de Bartolomeo Manfredi (1582-1622). Les peintres issus du cercle manfr&eacute;dien privil&eacute;gient les sc&egrave;nes de genre (sc&egrave;nes de taverne, concerts, joueurs, sc&egrave;nes de Bonne Aventure&hellip;).&nbsp; &nbsp;</span></span></p> </div> <div id="ftn3"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">3.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Vittorio SGARBI, &ldquo;Arte e vita fra il pennello e la spada&rdquo;, in Vittorio SGARBI &amp; Keith SCIBERRAS (a cura di), <i>Il Cavalier Calabrese. Mattia Preti tra Caravaggio e Luca Giordano</i>, Silvana Editoriale, Cinisello Balsamo, 2013, p. 11.</span></span></p> </div> <div id="ftn4"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">4.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Toutefois, Mattia Preti serait peut-&ecirc;tre arriv&eacute; bien plus t&ocirc;t dans la cit&eacute; papale. Rossella Vodret pense avoir identifi&eacute; les fr&egrave;res Preti (dans le recensement de l&rsquo;&eacute;glise romaine de San Lorenzo in Lucina, remontant &agrave; la P&acirc;ques de 1624), en les personnes de &ldquo;Gregorio dello Prete napolitano&rdquo; et &ldquo;Matthia pittore&rdquo; (Cf. Rossella VODRET, &ldquo;Gregorio dello Prete a Roma nel 1624&rdquo;, in Rossella VODRET &amp; Giorgio LEONE (a cura di),<i> Gregorio Preti calabrese (1603-1672), un problema aperto</i>, Silvana Editoriale, Cinisello Balsamo, 2004, pp. 21-24.</span></span></p> </div> <div id="ftn5"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><font color="#000120" size="2">5.</font><font size="2"><span roman="" style="font-family:"> Giuseppe VALENTINO, in Giuseppe VALENTINO &amp; Sandro DEBONO (a cura di), <i>Mattia Preti 1613-2013. Della Fede e Umanit&agrave;</i>, Abramo Editore, Catanzaro, 2013, p. 84. </span></font></p> </div> <div id="ftn6"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">6. <span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:">Claudio STRINATI, &ldquo;Gregorio e Mattia Preti nell&rsquo;ambiente romano&rdquo;, in Giorgio CERAUDO, Luigi SPEZZAFERRO &amp; Claudio STRINATI (a cura di), <i>Mattia Preti. Il Cavalier Calabrese</i>, Electa Napoli, 1999, p. 23.</span></span></p> </div> <div id="ftn7"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">7.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> En octobre 1642, il re&ccedil;oit l&rsquo;investiture au grade de Chevalier d&rsquo;Ob&eacute;dience Magistrale de l&rsquo;Ordre de Saint-Jean et, en 1661, il est &eacute;lev&eacute; au grade de Chevalier de Gr&acirc;ce Magistrale.</span></span></p> </div> <div id="ftn8"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">8.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> &laquo;&nbsp;En 1630, le caravagisme, en tant que mouvement, &eacute;tait mort et enterr&eacute;&nbsp;&raquo;, John T. SPIKE (paraphrasant Richard&nbsp; Spear),&nbsp;&ldquo;La carriera pittorica di Mattia Preti&rdquo;, in Erminia CORACE (a cura di), <i>Mattia Preti</i>, Fratelli Palombi Editori, Roma, 1989, p. 19.</span></span></p> </div> <div id="ftn9"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">9.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> En mati&egrave;re d&rsquo;art sacr&eacute;, Mattia Preti met, tout au long de sa carri&egrave;re, sa capacit&eacute; cr&eacute;ative au service de la Contre-R&eacute;forme. Ce n&rsquo;est d&rsquo;ailleurs pas un hasard si Giuseppe Cosentino le consid&egrave;re comme &laquo;&nbsp;le peintre du Texte Sacr&eacute;&nbsp;&raquo;. Giuseppe COSENTINO, <i>La storia della salvezza nei dipinti di Mattia Preti</i>, Calabria Letteraria Editrice, Soveria Mannelli, 2006, p. 53.&nbsp;</span></span></p> </div> <div id="ftn10"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">10.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Brigitte DAPR&Agrave;, in Brigitte DAPR&Agrave; (a cura di), <i>Micco Spadaro. Napoli ai tempi di Masaniello</i>, Electa Napoli, 2002, p. 70.</span></span></p> </div> <div id="ftn11"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">11.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Claudio STRINATI, &ldquo;Gregorio e Matti Preti nell&rsquo;ambiente romano&rdquo;, in Giorgio CERAUDO, Luigi SPEZZAFERRO &amp; Claudio STRINATI, <i>Mattia Preti. Il Cavalier Calabrese</i>, <i>op.cit.</i>, p. 25.</span></span></p> </div> <div id="ftn12"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">12.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Mariella UTILI, in Luigi SPEZZAFERRO (a cura di), <i>Caravaggio e l&rsquo;Europa. </i><i>Da Caravaggio a Mattia Preti</i>, Skira, Milano, 2005, p. 478. </span></span></p> </div> <div id="ftn13"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">13.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> La plupart des ex&eacute;g&egrave;tes pr&eacute;tiens estiment &ndash; malgr&eacute; l&rsquo;absence de documents &ndash; qu&rsquo;apr&egrave;s avoir quitt&eacute; Taverna et avant d&rsquo;arriver &agrave; Rome, Preti se serait arr&ecirc;t&eacute; &agrave; Naples, o&ugrave; r&eacute;sidait son oncle, m&eacute;decin, Mario Schipani.&nbsp; </span></span></p> </div> <div id="ftn14"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">14.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Mariella UTILI, in Mariella UTILI (a cura di), <i>Mattia Preti tra Roma, Napoli e Malta</i>, Electa Napoli, 2003, p. 108.</span></span></p> </div> <div id="ftn15"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">15.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Nous pouvons par exemple constater les similitudes stylistiques et chromatiques avec les &oelig;uvres du Guerchin <i>Samson captur&eacute; par les Philistins</i> (1619, New York, The Metropolitan Museum of Art) ou <i>Herminie retrouve Tancr&egrave;de</i> (1618-19, Rome, Galleria Doria Pamphili).</span></span></p> </div> <div id="ftn16"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">16.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Keith SCIBERRAS, &ldquo;Life and work&rdquo;, in Keith SCIBERRAS, <i>Mattia Preti. </i><i>The triumphant manner</i>, Midsea Books, 2012, p. 15.</span></span></p> </div> <div id="ftn17"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">17.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Ce n&rsquo;est pas un hasard si son beau <i>Miracle de saint Pantal&eacute;on </i>(v. 1640, Collection particuli&egrave;re), qui fut command&eacute; &agrave; Preti par l&rsquo;&eacute;glise romaine de San Pantaleo alle Scuole Pie, est consid&eacute;r&eacute; par John T. Spike comme &laquo; le dernier retable caravagesque &agrave; &ecirc;tre &eacute;rig&eacute; dans une &eacute;glise romaine&nbsp;&raquo;. John T. SPIKE, &ldquo;La carriera pittorica di Mattia Preti&rdquo;, in Erminia CORACE (a cura di), <i>Mattia Preti</i>, <i>op.cit.</i>, 1989.&nbsp;</span></span></p> </div> <div id="ftn18"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">18.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Leur int&eacute;ressante <i>R&eacute;union de musiciens avec une sc&egrave;ne de bonne aventure </i>(Gregorio et Mattia Preti, 1630-33, Turin, Accademia Albertina di Belle Arti), qui peut &ecirc;tre interpr&eacute;t&eacute;e comme une All&eacute;gorie des cinq sens, est un parfait exemple de leurs &ldquo;concerts monumentaux&rdquo;. Typique de la po&eacute;tique caravagesco-manfr&eacute;dienne, elle reprend &eacute;galement des &eacute;l&eacute;ments tir&eacute;s de la<i> Bonne Aventure</i> de Simon Vouet (1617, Rome, Galleria Nazionale d&rsquo;Arte Antica di Palazzo Barberini).</span></span></p> </div> <div id="ftn19"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">19.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Voir, par exemple, <i>Judith</i> (1653-54, Naples, Museo di Capodimonte),<i> Le Christ et la Canan&eacute;enne</i> (v.1656, Stuttgart, Staatsgalerie), <i>Le martyre de sainte Catherine</i> (1661-66, La Valette, National Museum of Fine Arts) ou <i>Lucr&egrave;ce</i> (v. 1670, Collection particuli&egrave;re).</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">20.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Mariella UTILI, &ldquo;Mattia Preti, caravaggesco sui generis&rdquo;, in Luigi SPEZZAFERRO (a cura di), <i>Caravaggio e l&rsquo;Europa. </i><i>Da Caravaggio a Mattia Preti</i>, <i>op.cit.</i>, p. 117.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">21<font color="#000050" size="2">.</font><font size="2"><span roman="" style="font-family:"> A partir de 1621, deux <i>Bacchanales </i>de Titien rejoignent la collection du cardinal Ludovisi&nbsp;; c&rsquo;est le d&eacute;but de la fi&egrave;vre n&eacute;ov&eacute;nitienne qui contamine tout le milieu artistique romain. Le<i> Triomphe de Sil&egrave;ne </i>de Preti (v. 1635, Tours, Mus&eacute;e des Beaux-Arts), ainsi que <i>Mo&iuml;se sur le mont Sina&iuml; </i>(v.1635, Montpellier, Mus&eacute;e Fabre) illustrent son int&eacute;r&ecirc;t pour la po&eacute;tique titianesque. Au vu du d&eacute;sint&eacute;r&ecirc;t total de Preti pour la peinture de paysage, elles comptent parmi les tr&egrave;s rares tableaux de Preti dont les sc&egrave;nes se d&eacute;roulent dans des paysages naturels (elles furent d&rsquo;ailleurs erron&eacute;ment attribu&eacute;es &agrave; Poussin jusqu&rsquo;en 1943).&nbsp;&nbsp; </span></font></p> </div> <div id="ftn22"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">22.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Comme nous le prouve son <i>Saint Andr&eacute;</i> (v. 1643, Lucerna, Hofkirche).</span></span></p> </div> <div id="ftn23"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">23.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Mariella UTILI, &ldquo;Mattia Preti, caravaggesco sui generis&rdquo;, in Luigi SPEZZAFERRO (a cura di), <i>Caravaggio e l&rsquo;Europa. Da Caravaggio a Mattia Preti</i>,<i> op.cit.</i>, p.119.</span></span></p> </div> <div id="ftn24"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">24.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> John T. SPIKE, &ldquo;La carriera pittorica di Mattia Preti&rdquo;, in Erminia Corace (a cura di), <i>Mattia Preti</i>, <i>op.cit.</i>, p. 21.</span></span></p> </div> <div id="ftn25"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">25.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Pour Guendalina Serafinelli, il ne s&rsquo;agit pas d&rsquo;un Christ<i> Salvator Mundi </i>mais de &laquo;&nbsp;l&rsquo;iconographie du Sang du R&eacute;dempteur&nbsp;&raquo;, dans la mesure o&ugrave; &laquo;&nbsp;cette face de l&rsquo;&eacute;tendard pr&eacute;sente la figure du Christ comme victime sacrificielle qui r&eacute;pand son sang en r&eacute;mission des p&eacute;ch&eacute;s pour &eacute;tablir la nouvelle alliance entre Dieu et le peuple des croyants&nbsp;&raquo; (Guendalina SERAFINELLI, &ldquo;Mattia Preti a Roma negli anni quaranta e cinquanta del Seicento&rdquo;, in Vittorio SGARBI &amp; Keith SCIBERRAS (a cura di), <i>Il Cavalier Calabrese. Mattia preti tra Caravaggio e Luca Giordano</i>, <i>op. cit.</i>, p. 39 et 42). </span></span></p> </div> <div id="ftn26"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">26.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Marina CELLINI, in Stefano ZUFFI (a cura di), <i>La Pittura in Italia. </i><i>Il Seicento</i>, Electa, Milano, 2001, p. 772.</span></span></p> </div> <div id="ftn27"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">27.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> L&rsquo;&eacute;glise &eacute;tait originellement appel&eacute;e Santa Maria del Carmine, mais elle fut rebaptis&eacute;e en 1768. Preti ex&eacute;cuta donc ses fresques pour l&rsquo;&eacute;glise du Carmine, et non de San Biagio.</span></span></p> </div> <div id="ftn28"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">28.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Mariella UTILI, &ldquo;Lo &lsquo;Stile plasticoluminoso&rsquo;, eclettico, di Mattia Preti&rdquo;, in Mariella UTILI (a cura di), <i>Mattia Preti tra Roma, Napoli e Malta</i>, <i>op.cit.</i>, p. 56.</span></span></p> </div> <div id="ftn29"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">29.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> La <i>Scuola Napoletana</i>, qui voit le jour apr&egrave;s le premier s&eacute;jour napolitain du Caravage, est inspir&eacute;e par la derni&egrave;re p&eacute;riode du Ma&icirc;tre, faite d&rsquo;introspection, de d&eacute;sespoir, de d&eacute;pouillement et de th&eacute;matiques &agrave; forte intensit&eacute; tragique.</span></span></p> </div> <div id="ftn30"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">30. <span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:">Comme nous le rappelle John T. Spike, &laquo;&nbsp;Les sujets qui tournent autour d&rsquo;affaires de m&oelig;urs &agrave; cons&eacute;quences tragiques int&eacute;ressent Preti au plus haut point, si bien que les variations sur le th&egrave;me de la d&eacute;capitation d&rsquo;Holopherne par Judith sont devenues une de ses sp&eacute;cialit&eacute;s&nbsp;&raquo;, John T. SPIKE, &ldquo;La Thomyris de Mattia Preti. Une trag&eacute;die de la vengeance dans le go&ucirc;t de S&eacute;n&egrave;que&rdquo;, in <i>La Revue du Louvre et des Mus&eacute;es de France</i>, R&eacute;union des Mus&eacute;es Nationaux, Paris, 5, 2004, p. 60.</span></span></p> </div> <div id="ftn31"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">31.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> John T. SPIKE, <i>A Taste for angels. Neapolitan painting in North America 1650-1750</i>, New Haven, 1987, p. 99.</span></span></p> </div> <div id="ftn32"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">32.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> John T. SPIKE, in John T. SPIKE, <i>A brush with passion. Mattia Preti (1613-1699)</i>, Muscarelle Museum of Art - Centro Di, Florence, 2013, p. 42.</span></span></p> </div> <div id="ftn33"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">33.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> En Italie, il existe une terminologie particuli&egrave;re pour d&eacute;signer le fossoyeur charg&eacute; de s&rsquo;occuper des pestif&eacute;r&eacute;s d&eacute;funts; il s&rsquo;agit du <i>monatto </i>qui, aux XVIe et XVIIe si&egrave;cles, &eacute;tait pr&eacute;pos&eacute; au transport des malades et &agrave; l&rsquo;enterrement des morts en p&eacute;riode de peste.</span></span></p> </div> <div id="ftn34"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">34.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Outre les deux toiles de jeunesse qui font &eacute;chos aux Bacchanales titianesques, on per&ccedil;oit cette influence par exemple dans sa belle <i>Adoration des Mages</i> (1653, Wells-Next-The-Sea, The Earl of Leicester and Trustees of the Holkham Estate) dont le chromatisme chaud s&rsquo;inspire de celui de Titien, ou dans son <i>Banquet de Balthazar</i> (1660, Naples, Museo di Capodimonte) qui a des analogies avec le tr&egrave;s sombre <i>Martyre de saint Laurent</i> de Titien&nbsp;(v.1551-59, Venise, Chiesa dei Gesuiti). Mais ce sont surtout les retables des ma&icirc;tres-autels des &eacute;glises maltaises, tels que <i>La Vierge &agrave; l&rsquo;Enfant avec les saints Pierre, Nicolas et l&rsquo;Archange Rapha&euml;l </i>(v. 1665, Lija, Tal-Mirakli Church) et<i> La Vierge &agrave; l&rsquo;Enfant avec saint Jean-Baptiste et saint Antoine abb&eacute; </i>(1663-64, Rabat, Saint Anthony Church), directement inspir&eacute;es par la somptueuse <i>Pala Pesaro </i>de Titien (1519-26, Venise, Santa Maria Gloriosa dei Frari), notamment dans leur composition sc&eacute;nique, avec le tr&ocirc;ne marial sur&eacute;lev&eacute; et d&eacute;plac&eacute; vers la droite. La figure de la Vierge de Lija est un hommage explicite &agrave; la &ldquo;Madone Pesaro&rdquo; titianesque.</span></span></p> </div> <div id="ftn35"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">35.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> La mobilit&eacute; des effets lumineux de certaines &oelig;uvres de Preti fait &eacute;galement r&eacute;f&eacute;rence au luminisme du Tintoret.</span></span></p> </div> <div id="ftn36"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">36.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Raffaello CAUSA, &ldquo;La pittura del Seicento a Napoli dal naturalismo al barocco&rdquo;, in Raffaello CAUSA (a cura di), <i>Storia di Napoli</i>, Societ&agrave; Editrice Storia di Napoli, Napoli, 1972, p. 951.</span></span></p> </div> <div id="ftn37"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">37. <span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:">Claudio STRINATI, &ldquo;Gregorio e Mattia Preti nell&rsquo;ambiente romano&rdquo;, in Giorgio CERAUDO, Luigi SPEZZAFERRO &amp; Claudio STRINATI, <i>Mattia Preti. Il Cavalier Calabrese</i>, <i>op.cit.</i>, p. 23.</span></span></p> </div> <div id="ftn38"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">38. <span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:">Giuliano BRIGANTI, &ldquo;Mattia Preti, i seicentofili e gli snobs&rdquo;, in <i>Paragone</i>, II, 1951, 15, p. 49.</span></span></p> </div> <div id="ftn39"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">39.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> John T. SPIKE, &ldquo;La carriera pittorica di Mattia Preti&rdquo;, in Erminia CORACE (a cura di), <i>Mattia Preti</i>, <i>op.cit.</i>, p. 29.</span></span></p> </div> <div id="ftn40"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">40.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> John T. SPIKE, in John T. SPIKE, <i>A brush with passion. </i><i>Mattia Preti (1613-1699)</i>, <i>op.cit.</i>, p. 36.</span></span></p> </div> <div id="ftn41"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">41.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Voir par exemple&nbsp;: V&eacute;ron&egrave;se, <i>La Jeunesse et la Vieillesse</i> (v. 1553, Venise, Palazzo Ducale), Titien, <i>V&eacute;nus et Adonis</i> (1554, Madrid, Museo del Prado), Tintoret, <i>Saint Georges, saint Louis et la princesse</i> (1552, Venise, Gallerie dell&rsquo;Accademia).&nbsp; </span></span></p> </div> <div id="ftn42"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">42.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Wilhelm ROLFS, <i>Geschichte der Malerei Neapels</i>, E. Seemann, Leipzig, 1910, cit&eacute; dans Mariella UTILI (a cura di), <i>Mattia Preti tra Roma, Napoli e Malta</i>, <i>op.cit</i>., p. 174. </span></span></p> </div> <div id="ftn43"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">43.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Claudio STRINATI, &ldquo;Gregorio e Mattia Preti nell&rsquo;ambiente romano&rdquo;, in Giorgio CERAUDO, Luigi SPEZZAFERRO &amp; Claudio STRINATI, <i>Mattia Preti. Il Cavalier Calabrese</i>, <i>op.cit</i>., p. 25.</span></span></p> </div> <div id="ftn44"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">44.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> &Agrave; l&rsquo;instar de tous les chevaux peints par Preti, ce cheval monumental, avec son regard humanis&eacute; et na&iuml;f, appara&icirc;t plus mani&eacute;riste que naturaliste. Et ressemble &agrave; s&rsquo;y m&eacute;prendre aux chevaux peints par V&eacute;ron&egrave;se (voir par exemple V&eacute;ron&egrave;se,<i> Le Martyre de saint Georges</i>, V&eacute;rone, San Giorgio in Braida).</span></span></p> </div> <div id="ftn45"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">45.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Cette figure h&eacute;ro&iuml;que de saint est reprise pour figurer L&rsquo;Archange Saint Michel dans la <i>Vierge des Anges </i>(v. 1676-80, Taverna, Museo Civico). </span></span></p> </div> <div id="ftn46"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">46. <font size="2"><span roman="" style="font-family:">Massimo Stanzione (1585-1656) est, avec Ribera (dont il se d&eacute;marque par son style classicisant), le chef de file de la peinture napolitaine jusqu&rsquo;au milieu des ann&eacute;es 1650.</span></font></p> </div> <div id="ftn47"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">47.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Les deux audacieux cycles de toiles sont consacr&eacute;s aux histoires de Sainte Catherine d&rsquo;Alexandrie (transept) et aux histoires de saint C&eacute;lestin (nef). La production napolitaine de Giovanni Lanfranco (notamment dans la Chapelle du Tr&eacute;sor de la Cath&eacute;drale de Naples et &agrave; la Chartreuse de San Martino) n&rsquo;est pas &eacute;trang&egrave;re aux r&eacute;sultats obtenus par Preti &agrave; San Pietro a Majella qui, pour Roberto Longhi, serait l&rsquo;&eacute;quivalent baroque des <i>Chambres </i>vaticanes de Rapha&euml;l. </span></span></p> </div> <div id="ftn48"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">48.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> &laquo; Son exp&eacute;rience &agrave; San Pietro a Majella lui a apport&eacute; la conviction qu&rsquo;&agrave; Naples il serait mort &eacute;puis&eacute;, mais pas riche&nbsp;&raquo;, John T. SPIKE, &ldquo;La carriera pittorica di Mattia Preti&rdquo;, in Erminia CORACE (a cura di), <i>Mattia Preti</i>, <i>op. cit.</i>,&nbsp;p. 32</span></span></p> </div> <div id="ftn49"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">49<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Keith SCIBERRAS, <i>Mattia Preti. The triumphant manner</i>, <i>op.cit.</i></span></span></p> </div> <div id="ftn50"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">50. <span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:">Voir par exemple<i> Le retour de l&rsquo;Enfant Prodigue</i> (v. 1679, Reggio Calabria, Museo Civico), <i>Le Martyre de saint Laurent</i> (1689, Birgu, &Eacute;glise de Saint-Laurent) ou<i> Les saints C&ocirc;me et Damien</i> (1698, La Valette, Mus&eacute;e de Saint-Jean).</span></span></p> </div> <div id="ftn51"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">51.&nbsp;<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Dans une lettre de mars 1669, Preti compare l&rsquo;autoritarisme de l&rsquo;Ordre &agrave; une v&eacute;ritable &laquo; tyrannie &raquo;, et se plaint d&rsquo;&ecirc;tre r&eacute;duit &agrave; la mis&egrave;re faute de revenus convenables.</span></span></p> </div> <div id="ftn52"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">52.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Il ex&eacute;cute, pour l&rsquo;&eacute;glise San Domenico de Sienne, <i>La canonisation de sainte Catherine de Sienne</i> (1672-73), et pour la cath&eacute;drale de Sienne <i>Le pr&ecirc;che de saint Bernardin de Sienne</i> (1673-74).</span></span></p> </div> <div id="ftn53"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">53.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Giuseppe Valentino, qui conna&icirc;t particuli&egrave;rement bien la vie et l&rsquo;&oelig;uvre de Mattia Preti, est le Directeur du Museo Civico de Taverna.</span></span></p> </div> <div id="ftn54"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">54.<span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:"> Giuseppe VALENTINO, in Vittorio SGARBI (a cura di), <i>Mattia Preti</i>, Rubbettino, Soveria Mannelli, 2013, p. 340.</span></span></p> </div> <div id="ftn55"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">55. <span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:">Giuseppe VALENTINO, in Giuseppe VALENTINO &amp; Sandro DEBONO (a cura di),<i> Mattia Preti 1613-2013. Della fede e umanit&agrave;</i>, <i>op.cit.</i>, p. 176-178.</span></span></p> </div> <div id="ftn56"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify">56. <span style="font-size:10pt"><span roman="" style="font-family:">&Agrave; ce propos, lire sa lettre &agrave; Don Antonio Ruffo, dat&eacute;e du 27 f&eacute;vrier 1665, in Vincenzo RUFFO, &ldquo;Galleria Ruffo nel secolo XVII in Messina&rdquo;, in <i>Bollettino d&rsquo;arte</i>, X, 1916, p. 256. </span></span></p> </div> </div>