<p><strong>Abstract&nbsp;:&nbsp;</strong>&nbsp;Email overload is an important challenge in today&#39;s organizations. This article presents the results of a qualitative study aiming to examine the difficulties resulting from the use of email in the workplace. To propose ways of theoretical and practical solution to the feeling of overload resulting from the use of messaging systems, an analysis of organizational semiotics concepts is performed. Overall, the study shows that the need to effectively manage email tasks is leading employees to implement workaround strategies to circumvent the shortcomings of messaging systems. Based on these findings, a novel approach to human-computer interaction is discussed, in which the technical analysis of interaction is enriched with a pragmatic perspective.</p> <p><strong>Keywords&nbsp;:</strong>&nbsp;Email Management, Email Overload, Organisational Semiotics, Systemic&nbsp;Semiotic Workpractice&nbsp;Framework, Qualitative Study</p> <p>&nbsp;</p> <h2>INTRODUCTION&nbsp;</h2> <p>Malgr&eacute; un vaste corpus de recherche, la surcharge du courriel demeure un d&eacute;fi de taille pour les travailleurs du savoir (Alberts, 2013; McMurtry, 2014; Kalman et Ravid, 2015). En contexte organisationnel, la surcharge du courriel est d&eacute;finie comme le fait de recevoir un grand nombre de messages quotidiennement, dont une partie se r&eacute;v&egrave;le non pertinente pour un employ&eacute;, ce qui a pour cons&eacute;quence d&rsquo;&eacute;lever son stress et d&rsquo;affecter sa productivit&eacute; (Whittaker et Sidner, 1996). Le concept de surcharge du courriel inclut aussi le fait que ce m&eacute;dia de communication s&rsquo;est lentement transform&eacute; en un &laquo;&nbsp;habitat&nbsp;&raquo;, un lieu virtuel utilis&eacute; pour des fonctions qui d&eacute;passent celles des simples &eacute;changes d&rsquo;information asynchrones (Ducheneaut et Bellotti, 2001). Ainsi, malgr&eacute; la sophistication des syst&egrave;mes de messagerie actuels, il appara&icirc;t que ces derniers ne parviennent pas &agrave; soutenir ad&eacute;quatement la vari&eacute;t&eacute; des t&acirc;ches de leurs utilisateurs (Sz&oacute;stek, 2011; Dolata, Jeners et Prinz, 2013; de Souza&nbsp;<i>et al</i>., 2013).</p> <p>De mani&egrave;re g&eacute;n&eacute;rale, l&rsquo;exemple du courriel r&eacute;v&egrave;le les difficult&eacute;s qu&rsquo;un usager rencontre lorsqu&rsquo;il d&eacute;sire accomplir ses pratiques de travail &agrave; l&rsquo;aide des technologies. Depuis une trentaine d&rsquo;ann&eacute;es, les sp&eacute;cialistes de l&rsquo;interaction humain-ordinateur (IHO) ont vis&eacute; un perfectionnement constant des syst&egrave;mes informatiques. On a vu l&rsquo;&eacute;mergence du concept d&rsquo;utilisabilit&eacute; pour d&eacute;finir la &laquo;&nbsp;qualit&eacute; d&#39;un mat&eacute;riel ou d&#39;un logiciel qui est facile et agr&eacute;able &agrave; utiliser et &agrave; comprendre, m&ecirc;me par quelqu&#39;un qui a peu de connaissances en informatique&nbsp;&raquo; (OQLF, 2013&nbsp;: [en ligne]). Pourtant, si les tests d&rsquo;utilisabilit&eacute; ont fait leurs preuves dans l&rsquo;am&eacute;lioration des pratiques d&rsquo;interaction avec les syst&egrave;mes, leurs r&eacute;sultats ne permettent pas de pallier pleinement les besoins qui surgissent en situation de travail r&eacute;el (Bastien, 2010; Humayoun&nbsp;<i>et al</i>., 2012).</p> <p>On peut attribuer ces limites en partie au fait que la recherche sur l&rsquo;IHO a longtemps prioris&eacute; une am&eacute;lioration des fonctionnalit&eacute;s des syst&egrave;mes &agrave; partir de mod&egrave;les g&eacute;n&eacute;riques d&rsquo;usagers. L&rsquo;attention pr&ecirc;t&eacute;e aux aspects fonctionnels des interfaces, avec la navigation comme d&eacute;placement physique dans un espace, s&rsquo;est faite au d&eacute;triment des aspects s&eacute;mantiques et pragmatiques de l&rsquo;information pr&eacute;sent&eacute;e (c&rsquo;est-&agrave;-dire, comment elle est interpr&eacute;t&eacute;e en contexte) (Dillon, 2004, 2008). Dans le vaste corpus d&rsquo;&eacute;tudes portant sur l&rsquo;interaction humain-ordinateur, l&rsquo;axe de recherche sur l&rsquo;interaction usager-texte demeure effectivement peu explor&eacute; (Toms, 2002; Marchionini, 2008).</p> <p>C&rsquo;est ici que la s&eacute;miotique comme technique &laquo;&nbsp;qui r&eacute;ussit &agrave; d&eacute;crire le fonctionnement de la communication et de la signification&nbsp;&raquo; (Eco, 1988&nbsp;: 23) rev&ecirc;t un potentiel ind&eacute;niable pour la recherche sur l&rsquo;interaction humain-ordinateur. On a vu r&eacute;cemment l&rsquo;&eacute;mergence de la s&eacute;miotique organisationnelle comme discipline qui applique les th&eacute;ories du signe &agrave; l&rsquo;analyse des probl&eacute;matiques relevant des syst&egrave;mes d&rsquo;information dans les organisations (Liu, 2001; Stamper, 2001; Gazendam et Liu, 2005; Liu et Li, 2015). Au sein de ce courant, le&nbsp;<i>Cadre de la s&eacute;miotique syst&eacute;mique pour l&rsquo;&eacute;tude des pratiques de travail</i>&nbsp;(CSS) (traduction libre de&nbsp;<i>Systemic Semiotic Workpractice Framew</i>ork) propose une approche th&eacute;orique et pratique pour analyser les probl&eacute;matiques associ&eacute;es aux pratiques de travail r&eacute;alis&eacute;es &agrave; l&rsquo;aide des technologies en vue de leur apporter solution (Clarke 2000, 2001a, 2001b, 2001c, 2005). &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;</p> <h2><a id="t2"></a>OBJECTIF DE LA RECHERCHE</h2> <p>Cette recherche a pour objectif de mieux comprendre les difficult&eacute;s inh&eacute;rentes &agrave; l&rsquo;utilisation du courriel en milieu de travail en vue de proposer des pistes de solution th&eacute;orique et pratique au sentiment de surcharge qui d&eacute;coule de son utilisation. Ce faisant, les concepts s&eacute;miotiques emprunt&eacute;s au CSS sont mis en perspective, puisqu&rsquo;ils permettent d&rsquo;enrichir l&rsquo;analyse technique des pratiques d&rsquo;interaction avec le syst&egrave;me de messagerie d&rsquo;une perspective s&eacute;mantique et pragmatique au sein de laquelle un employ&eacute; interpr&egrave;te&nbsp;<i>activement</i>&nbsp;un texte afin de r&eacute;aliser ses t&acirc;ches de travail en contexte.<b>&nbsp;</b></p> <h2><a id="t3"></a>RECENSION DES &Eacute;CRITS</h2> <p>Le Cadre de la s&eacute;miotique syst&eacute;mique pour l&rsquo;&eacute;tude des pratiques de travail (CSS) emprunte ses concepts &agrave; la s&eacute;miotique syst&eacute;mique (Fawcett, 2000), &agrave; la s&eacute;miotique sociale (Halliday, 1978; Bakhtine dans Todorov, 1984; Ventola, 1987; Hodge et Kress, 1988) et &agrave; la linguistique syst&eacute;mique fonctionnelle (Martin, 1992; Eggins, 1994). &nbsp;Envisag&eacute; comme le produit des pratiques de travail en contexte, le texte constitue la pierre angulaire de cette approche.&nbsp;La figure 1 met en &eacute;vidence les relations qui existent entre le texte, le discours et le sujet social, au c&oelig;ur du CSS.</p> <h3>Le texte comme produit des t&acirc;ches de travail</h3> <p>Au c&oelig;ur du mod&egrave;le, le texte est envisag&eacute; &agrave; la fois comme la mat&eacute;rialisation d&rsquo;un syst&egrave;me de signes et l&rsquo;endroit o&ugrave; ces signes sont reproduits et ren&eacute;goci&eacute;s (Hodge et Kress, 1988&nbsp;: 6). Suivant cette perspective, le texte est l&rsquo;unit&eacute; s&eacute;miotique op&eacute;rationnelle du langage constituant de ce fait l&rsquo;unit&eacute; d&rsquo;analyse privil&eacute;gi&eacute;e des t&acirc;ches r&eacute;alis&eacute;es par les membres d&rsquo;une organisation (Clarke, 2000&nbsp;: 59). La s&eacute;miotique syst&eacute;mique stipule que les textes et leurs contextes organisationnels sont indissociables, puisque les organisations sont constamment r&eacute;ifi&eacute;es et reproduites dans les textes&nbsp;qui en justifient l&rsquo;existence (Clarke, 2001c). Plusieurs textes correspondent g&eacute;n&eacute;ralement &agrave; une pratique de travail (Clarke, 2000). Puisque chaque action r&eacute;alis&eacute;e en contexte organisationnel implique l&rsquo;usage du langage, le texte est &eacute;galement envisag&eacute; comme un &laquo;&nbsp;exemple d&rsquo;acte de communication r&eacute;alis&eacute; et d&eacute;fini en contexte &raquo;, tributaire du discours au sein duquel il s&rsquo;inscrit (Clarke, 2005&nbsp;: 244, traduction libre). Pour les concepteurs de syst&egrave;mes, l&rsquo;analyse des textes organisationnels permet de comprendre comment les employ&eacute;s utilisent, contournent et actualisent les fonctionnalit&eacute;s pr&eacute;vues au d&eacute;part.</p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img alt="2017 revue alberts1" src="https://numerev.com/images/revue-cossi/images/images-revue/2017-revue-alberts1.png" style="width: 500px; height: 420px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em>Figure 1. Relations entre texte, discours et sujet social<br /> (Clarke, 2000&nbsp;: 64, traduction libre)</em></p> <h3>Le discours comme syst&egrave;me de valeurs et de r&egrave;gles organisationnelles<b>&nbsp;</b></h3> <p>Le discours est d&eacute;crit comme une mise en fonctionnement de la langue en contexte qui refl&egrave;te les lois, les permissions et les interdits r&eacute;gulant les actions individuelles et collectives (Kress, 1985&nbsp;: 6-7). Cette fonction r&eacute;gulatrice du discours se refl&egrave;te dans la structure du langage et dans son organisation sous forme de textes (Clarke, 2000&nbsp;: 58). Par exemple, le discours juridique comprend des textes tels que les lois, les ordonnances, les d&eacute;crets, les avis, etc. Prenant part au discours, les genres et autres conventions sont utilis&eacute;s pour permettre au lecteur de comprendre les textes, en facilitant ainsi la r&eacute;alisation des pratiques de travail (Clarke, 2001c). En milieu de travail, la pr&eacute;sence du discours se refl&egrave;te dans la culture organisationnelle qui r&eacute;git le syst&egrave;me de valeurs et de r&egrave;gles. Ainsi, il appara&icirc;t que les membres d&rsquo;une organisation sont engag&eacute;s &agrave; leurs d&eacute;pens dans cette culture qui gouverne leurs modes de production et leurs actions (Clarke, 2000&nbsp;: 5). Pourtant, si le discours influence la&nbsp; production des textes, en aucune fa&ccedil;on il n&rsquo;oblige le lecteur &agrave; y adh&eacute;rer. Cette assertion est illustr&eacute;e &agrave; l&rsquo;aide du concept de &laquo;&nbsp;sujet social&nbsp;&raquo; qui jette un &eacute;clairage nouveau sur les pratiques de contournement qui r&eacute;sultent de l&rsquo;usage des technologies.</p> <h3>L&rsquo;employ&eacute; comme sujet social</h3> <p>Selon Bakhtine (cit&eacute; par Clarke, 2000), le langage et la pens&eacute;e sont intrins&egrave;quement li&eacute;s: le langage ne peut exister sans la pens&eacute;e, la pens&eacute;e ne peut exister sans le langage, le langage et la pens&eacute;e sont des &eacute;l&eacute;ments sociaux, et non pas individuels. Suivant le CSS, chaque individu au sein d&rsquo;une organisation est envisag&eacute; comme un sujet social, inconsciemment investi des caract&eacute;ristiques de son milieu. Dans ce contexte, la notion de &laquo;&nbsp;subjectivit&eacute; sociale&nbsp;&raquo;<i>&nbsp;</i>fait &eacute;tat du paradoxe qui existe entre le d&eacute;terminisme social qui s&rsquo;impose au sujet lors de l&rsquo;interpr&eacute;tation d&rsquo;un discours et son pouvoir d&rsquo;en modifier le sens par des actes linguistiques individuels (Kress, 1996&nbsp;: 299).</p> <p>Chaque sujet social adopte une double position par rapport &agrave; un m&ecirc;me discours&nbsp;: la position de lecture et la position du sujet. La position de lecture&nbsp;fait r&eacute;f&eacute;rence &agrave; la position dominante adopt&eacute;e par les membres d&rsquo;une communaut&eacute; pour interpr&eacute;ter un texte (Clarke, 2000, 2001c). En acceptant la position de lecture, un sujet social adh&egrave;re aux conventions qui se pr&eacute;sentent &agrave; lui (Clarke, 2000&nbsp;: 61). Un sujet qui accepte la position de lecture est un sujet coop&eacute;ratif alors qu&rsquo;un sujet qui r&eacute;siste &agrave; la position de lecture est un sujet r&eacute;fractaire. Cette libert&eacute; d&rsquo;adh&eacute;rer aux discours v&eacute;hicul&eacute;s dans un texte, ou de les rejeter, r&eacute;f&egrave;re aux &laquo;&nbsp;positions du sujet&nbsp;&raquo; (figure 1). Ce concept fait r&eacute;f&eacute;rence aux multiples interpr&eacute;tations possibles d&rsquo;un m&ecirc;me discours par les membres d&rsquo;une communaut&eacute;, qui n&eacute;gocient sans cesse le sens des textes&nbsp;ainsi que &laquo;&nbsp;la construction et la reconstruction textuelle des discours d&rsquo;une organisation &raquo; (Hodge et Kress, 1988&nbsp;: 6, traduction libre). Pour la s&eacute;miotique sociale, l&rsquo;adoption de l&#39;arrangement typique des &eacute;tapes correspondant &agrave; une pratique de travail int&eacute;gr&eacute;e dans un syst&egrave;me signifie que l&rsquo;usager adh&egrave;re &agrave; la position de lecture dominante de la fonctionnalit&eacute; du syst&egrave;me. En adoptant la position de lecture dominante, les utilisateurs se conforment &agrave; ces discours qui correspondent &agrave; des &laquo;&nbsp;instance monologiques ou int&eacute;grationnistes de l&#39;utilisation des syst&egrave;mes&nbsp;&raquo; (Clarke, 2001c, [en ligne], traduction libre).</p> <p>Plusieurs auteurs ont appliqu&eacute; les concepts emprunt&eacute;s &agrave; la s&eacute;miotique syst&eacute;mique pour mieux comprendre les m&eacute;canismes d&rsquo;interaction d&rsquo;une communaut&eacute; d&rsquo;usagers avec les technologies (voir par exemple, Gazendam (2001) et Djonov (2007)). Dans cette &eacute;tude des pratiques d&rsquo;interaction avec le courriel, la s&eacute;miotique syst&eacute;mique &eacute;taye d&rsquo;abord l&rsquo;interpr&eacute;tation des r&eacute;sultats en offrant un point de vue macro sur les d&eacute;fis menant au sentiment de surcharge, point de vue qui sera d&eacute;crit dans cet article. La s&eacute;miotique syst&eacute;mique a &eacute;galement rendu possible l&#39;analyse micro des activit&eacute;s d&rsquo;interaction avec le courriel, laquelle a ensuite sugg&eacute;r&eacute;&nbsp;certaines fonctions d&#39;assistance aux t&acirc;ches r&eacute;alis&eacute;es par le biais des syst&egrave;mes de messagerie (voir Alberts et Forest, 2012).</p> <h2><a id="t4"></a>M&Eacute;THODES</h2> <p>L&rsquo;examen des difficult&eacute;s inh&eacute;rentes &agrave; l&rsquo;utilisation du courriel en milieu de travail a eu lieu dans le cadre d&rsquo;une th&egrave;se de doctorat men&eacute;e au sein de deux administrations publiques, une organisation municipale et une institution f&eacute;d&eacute;rale canadiennes (Alberts, 2009). L&rsquo;&eacute;tude visait un examen minutieux des pratiques d&rsquo;interaction avec les textes &eacute;lectroniques et de l&rsquo;utilisation du concept de genres documentaires par les employ&eacute;s. Il est rapidement apparu que le courriel constituait le c&oelig;ur de ces pratiques, et c&rsquo;est sur cette dimension que se concentrent les r&eacute;sultats pr&eacute;sent&eacute;s dans cet article. L&rsquo;&eacute;chantillon &eacute;tait constitu&eacute; de dix-sept gestionnaires et de dix-sept secr&eacute;taires (n=34). Les deux tiers des participants (n=22) pr&eacute;sentaient plus de vingt ann&eacute;es d&rsquo;exp&eacute;rience de travail dans des postes similaires.&nbsp;Une grande partie des r&eacute;pondants se consid&eacute;raient &agrave; un niveau avanc&eacute; dans l&rsquo;&eacute;valuation personnelle de leur aptitude &agrave; utiliser les outils informatiques (n=22) alors que les autres ont estim&eacute; avoir un niveau d&eacute;butant ou interm&eacute;diaire.</p> <p>Dans cette &eacute;tude, la triangulation de trois modes de collecte de donn&eacute;es a fourni des indications pr&eacute;cieuses sur l&rsquo;utilisation quotidienne des syst&egrave;mes par les gestionnaires et les adjointes administratives. Afin d&rsquo;obtenir une perspective globale sur la fa&ccedil;on dont les employ&eacute;s produisent, utilisent et partagent les textes dans les environnements num&eacute;riques de travail, des entrevues semi-dirig&eacute;es ont d&#39;abord &eacute;t&eacute; men&eacute;es. Un guide d&rsquo;entrevue comprenant dix-huit questions ouvertes organis&eacute;es en cinq sections a &eacute;t&eacute; employ&eacute; pour examiner&nbsp;: (1) la situation de travail de chaque participant, (2) les pratiques informationnelles et les textes utilis&eacute;s, (3) les genres documentaires, (4) les d&eacute;fis li&eacute;s &agrave; l&#39;utilisation des technologies, et (5) les attentes pour am&eacute;liorer les syst&egrave;mes utilis&eacute;s. Les entrevues ont dur&eacute; en moyenne une heure et demie. Elles ont &eacute;t&eacute; enregistr&eacute;es avec le consentement des participants et retranscrites &agrave; des fins d&rsquo;analyse.</p> <p>Pour compl&eacute;ter et valider ces r&eacute;sultats, chaque participant a tenu un journal de bord pendant une journ&eacute;e de travail. Les participants y ont consign&eacute; les t&acirc;ches impliquant le recours &agrave; des syst&egrave;mes informatiques, les difficult&eacute;s rencontr&eacute;es avec ces syst&egrave;mes, les textes utilis&eacute;s ainsi que leurs genres documentaires. Pour assurer la qualit&eacute; des donn&eacute;es enregistr&eacute;es par les participants, un gabarit de journal de bord a &eacute;t&eacute; remis &agrave; chacun. Des entrevues de cl&ocirc;ture ont &eacute;t&eacute; men&eacute;es le jour subs&eacute;quent &agrave; la tenue du journal de bord. Au cours de ces entrevues, chaque entr&eacute;e de journal a &eacute;t&eacute; examin&eacute;e afin d&rsquo;en valider la pr&eacute;cision. Ces entrevues ont dur&eacute; environ quarante-cinq minutes. Elles ont &eacute;galement &eacute;t&eacute; enregistr&eacute;es et retranscrites &agrave; des fins d&#39;analyse.</p> <h2><a id="t5"></a>ANALYSE</h2> <p>Trente-quatre entrevues semi-dirig&eacute;es, trente journaux de bord, trente entrevues de cl&ocirc;ture r&eacute;alis&eacute;es lors de la remise des journaux de bord ont &eacute;t&eacute; collig&eacute;s. Les r&eacute;sultats furent analys&eacute;s &agrave; l&rsquo;aide d&rsquo;une strat&eacute;gie d&rsquo;analyse de contenu qualitative selon l&rsquo;approche pr&eacute;conis&eacute;e par Patton (2002) et Miles et Huberman (2003). Cette approche se fonde sur le d&eacute;veloppement d&rsquo;un cadre d&rsquo;analyse commun et sur l&rsquo;utilisation de codes pour identifier les th&egrave;mes r&eacute;currents parmi les sources de donn&eacute;es h&eacute;t&eacute;rog&egrave;nes. &nbsp;Un sch&eacute;ma de codage fut d&eacute;velopp&eacute; &agrave; l&rsquo;aide d&rsquo;un logiciel d&rsquo;analyse qualitative suivant sept phases successives&nbsp;: (1) analyse pr&eacute;liminaire des entrevues et des journaux de bord au cours d&rsquo;un pr&eacute;-test ; (2) analyse des journaux de bord avec cr&eacute;ation d&rsquo;un guide de codification ; (3) analyse des entrevues de cl&ocirc;ture ; (4) r&eacute;vision et restructuration du sch&eacute;ma de codage ; (5) analyse de 15 entrevues semi-dirig&eacute;es ; (6) r&eacute;vision du sch&eacute;ma de codage ; (7) analyse de la deuxi&egrave;me partie des entrevues semi-dirig&eacute;es. Une portion des r&eacute;sultats obtenus, qui offrent un portrait des difficult&eacute;s inh&eacute;rentes &agrave; l&rsquo;utilisation du courriel en milieu de travail, est pr&eacute;sent&eacute;e au point suivant.</p> <h2><a id="t6"></a>R&Eacute;SULTATS<b>&nbsp;</b></h2> <p>Dans cette &eacute;tude, tous les participants interrog&eacute;s ont affirm&eacute; avec conviction que le courriel a acquis une importance cruciale au cours de leurs pratiques de travail. Des expressions telles que &laquo;&nbsp;c&rsquo;est devenu fondamental&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;on ne pourrait plus s&rsquo;en passer&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;tout passe maintenant par l&agrave;&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;c&rsquo;est incontournable&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;c&rsquo;est un outil de tous les instants&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;&ccedil;a r&eacute;volutionne la terre&nbsp;&raquo; ont &eacute;t&eacute; employ&eacute;es pour d&eacute;crire la port&eacute;e du courriel dans les administrations &eacute;tudi&eacute;es. En contrepartie, il appara&icirc;t que le courriel est, selon un cadre, &laquo;&nbsp;en train de devenir victime de son succ&egrave;s&nbsp;&raquo; (A-5). Si plusieurs soulignent que le courriel a un impact positif sur leur travail, certains se demandent si les inconv&eacute;nients ne sont pas, au bout du compte, plus importants. La surcharge du courriel est ainsi une difficult&eacute; de taille. Elle se manifeste par le sentiment de ne plus pouvoir garder le contr&ocirc;le sur la gestion du courriel et, au fait que &laquo;&nbsp;tu ne viens pas &agrave; bout de reprendre le dessus&nbsp;&raquo; (A-6). Dans les donn&eacute;es collig&eacute;es, on mentionne quatre familles de facteurs &agrave; la base du sentiment de surcharge. Ces facteurs, ainsi que leurs principales causes, sont r&eacute;sum&eacute;s &agrave; la figure 2.</p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img alt="2017 revue alberts2" src="https://numerev.com/images/revue-cossi/images/images-revue/2017-revue-alberts2.png" style="width: 500px; height: 538px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em>Figure 2. Facteurs associ&eacute;s &agrave; la surcharge du courriel</em></p> <p><b>&nbsp;</b></p> <h3>Stress associ&eacute; au volume d&rsquo;information</h3> <p>Le stress associ&eacute; au volume d&rsquo;information re&ccedil;ue quotidiennement est attribuable &agrave; cinq causes que nous d&eacute;crivons aux points suivants&nbsp;: (1) la quantit&eacute; ; (2) le mauvais ciblage ; (3) les pi&egrave;ces jointes ; (4) les fils de discussion et (5) l&rsquo;effet de propagation.&nbsp;&nbsp;</p> <p><i>(1) Quantit&eacute;&nbsp;:</i>&nbsp;Les participants se plaignent de la quantit&eacute; de courriels re&ccedil;us quotidiennement. Des termes tels que &laquo;&nbsp;overload&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;enfer&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;insens&eacute;&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;infernal&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;lourd&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;long&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;inond&eacute;&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;free-for-all&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;fl&eacute;au&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;&eacute;pouvantable&nbsp;&raquo;, et &laquo;&nbsp;&eacute;pid&eacute;mie&nbsp;&raquo; sont utilis&eacute;s pour qualifier le volume du courriel qui, selon certains, ne cesse de s&rsquo;accro&icirc;tre. En moyenne, les cadres re&ccedil;oivent plus de cinquante messages quotidiennement, ce nombre pouvant atteindre deux cents dans certains cas. La citation suivante refl&egrave;te l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exasp&eacute;ration de certains cadres, qui vont parfois jusqu&rsquo;&agrave; ne plus tenir compte du courriel, au lieu de perdre du temps &agrave; essayer de filtrer les messages pertinents. Ces cadres tiennent pour acquis qu&rsquo;en cas d&rsquo;urgence, l&rsquo;int&eacute;ress&eacute; se pr&eacute;sentera en personne ou utilisera le t&eacute;l&eacute;phone&nbsp;:&nbsp;&nbsp;&nbsp;</p> <blockquote> <p>&laquo;&nbsp;&Ccedil;a n&rsquo;a plus de pertinence, puis t&#39;as plus de temps de t&#39;en occuper, fait que t&#39;es mieux de pas le regarder, puis de pas t&#39;en faire avec &ccedil;a.&nbsp;&raquo; (A-5, cadre, entrevue semi-dirig&eacute;e)</p> </blockquote> <p>Pour les secr&eacute;taires qui doivent g&eacute;rer non seulement leurs messages &ndash; une trentaine en moyenne par jour &ndash; mais aussi ceux des cadres, la lourdeur de la t&acirc;che est incontestable&nbsp;:</p> <blockquote> <p>&laquo;&nbsp;Et nous aussi les&nbsp;<i>emails</i>, c&#39;est &ccedil;a, c&#39;est continuel. Je pourrais vous dire l&agrave;, dans une journ&eacute;e je ne pourrais que r&eacute;pondre aux&nbsp;<i>emails</i>.&nbsp;&raquo; (BS-36, secr&eacute;taire, entrevue semi-dirig&eacute;e)</p> </blockquote> <p><i>&nbsp;(2) Mauvais ciblage&nbsp;</i>: Li&eacute; &agrave; la quantit&eacute; de messages re&ccedil;us, le mauvais ciblage est une cause de stress importante. Un cadre affirme que 50% &agrave; 70% des messages qu&rsquo;il re&ccedil;oit quotidiennement ne devraient jamais lui parvenir (B-35). L&rsquo;ins&eacute;curit&eacute; des employ&eacute;s, qui envoient une quantit&eacute; importante de messages en copie conforme &agrave; leur patron, est &eacute;voqu&eacute;e pour expliquer le mauvais ciblage. La r&eacute;ception d&rsquo;une grande quantit&eacute; de communiqu&eacute;s internes constitue &eacute;galement une perte de temps importante. Le commentaire v&eacute;h&eacute;ment de ce cadre r&eacute;v&egrave;le l&rsquo;ampleur du probl&egrave;me, auquel on peut associer des co&ucirc;ts importants au niveau organisationnel&nbsp;:</p> <blockquote> <p>&laquo;&nbsp;L&agrave; tu regardes &ccedil;a, on est &agrave; peu pr&egrave;s trois cents qui a re&ccedil;u &ccedil;a. [&hellip;] Toute la gang en m&ecirc;me temps&hellip; tu dis christie on est trois cents personnes &agrave; avoir perdu une demi-heure !&nbsp;&raquo; (A-6, cadre, entrevue semi-dirig&eacute;e)</p> </blockquote> <p>Finalement, on &eacute;voque &agrave; quelques reprises le pourriel, ph&eacute;nom&egrave;ne encore d&rsquo;actualit&eacute; malgr&eacute; des solutions de filtrage de plus en plus sophistiqu&eacute;es.</p> <p><i>(3) Pr&eacute;sence de pi&egrave;ces jointes :</i>&nbsp;Le stress est &eacute;galement attribuable &agrave; la pr&eacute;sence de pi&egrave;ces jointes. Quatre cadres soulignent les difficult&eacute;s rencontr&eacute;es pour g&eacute;rer les messages qui contiennent parfois jusqu&rsquo;&agrave; une vingtaine de documents attach&eacute;s. On &eacute;voque alors le temps requis pour t&eacute;l&eacute;charger tous les textes, la n&eacute;cessit&eacute; de devoir parfois les imprimer, ainsi que les efforts requis pour les lire dans un d&eacute;lai raisonnable.</p> <p><i>(4) Longueur des fils de discussion</i>&nbsp;: La pr&eacute;sence de fils de discussion, dont la longueur peut parfois atteindre plusieurs pages est &eacute;galement une cause de stress. Certains r&eacute;pondants expliquent avoir d&eacute;velopp&eacute; des techniques de lecture, &laquo;&nbsp;&agrave; l&rsquo;envers&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;de haut en bas jusque &ccedil;a fasse sens&nbsp;&raquo; ou &laquo;&nbsp;comparative&nbsp;&raquo; pour tenter de gagner du temps. L&rsquo;exemple suivant met en relief les difficult&eacute;s encourues par le traitement des fils de discussion. Ici, une secr&eacute;taire traite les messages &agrave; l&rsquo;intention de son patron, en les imprimant pour pouvoir les classer par piles de t&acirc;ches et pour en souligner les faits importants &agrave; l&rsquo;aide d&rsquo;un marqueur. Cette pratique de gestion am&egrave;ne les messages &agrave; &ecirc;tre trait&eacute;s &agrave; deux reprises, une premi&egrave;re fois pas la secr&eacute;taire, puis par son patron&nbsp;:</p> <blockquote> <p>&laquo; Si elle [le patron] a trente-cinq &agrave; quarante&nbsp;<i>emails</i>, il y en a peut-&ecirc;tre douze qui sont des&nbsp;<i>threads</i>&nbsp;de quatre pages. Donc, si je les imprime tous [&hellip;] &ccedil;a fait une pile qu&#39;elle doit lire. Puis moi, il faut que je lise tout. Donc, &agrave; chaque soir, chaque fin de la journ&eacute;e c&#39;est comme si j&#39;ai lu un livre de cent quarante pages &agrave; chaque jour !&nbsp;&raquo; (ZS-3, secr&eacute;taire, entrevue de cl&ocirc;ture).</p> </blockquote> <p><i>(5) Effet de propagation :</i>&nbsp;Un dernier facteur qui aggrave la surcharge du courriel est l&rsquo;effet de propagation que l&rsquo;on souligne &agrave; trois reprises. Si, par nature, le courriel offre la possibilit&eacute; de pouvoir communiquer avec plusieurs destinataires dans un seul envoi, cette qualit&eacute; contribue en m&ecirc;me temps &agrave; la multiplication des messages. Les secr&eacute;taires, dont le r&ocirc;le de coordination comprend la planification d&rsquo;agenda et la prise de rendez-vous, sont susceptibles d&rsquo;&ecirc;tre davantage touch&eacute;es par ce ph&eacute;nom&egrave;ne : &laquo;&nbsp;Tu envoies un courriel &agrave; cinq personnes. Les cinq personnes te r&eacute;pondent. Mais pas sur le m&ecirc;me courriel&nbsp;&raquo; (ZS-4, secr&eacute;taire, entrevue semi-dirig&eacute;e).</p> <h3>Lourdeur du suivi des t&acirc;ches</h3> <p>On observe aussi plusieurs difficult&eacute;s induites par la lourdeur du suivi des t&acirc;ches g&eacute;n&eacute;r&eacute;es par le courriel. Plus qu&rsquo;un simple outil de communication, le courriel est envisag&eacute; par les r&eacute;pondants comme une &laquo;&nbsp;nouvelle m&eacute;thode de travailler&nbsp;&raquo;, un &laquo;&nbsp;outil pratique&nbsp;&raquo; permettant la &laquo;&nbsp;planification du jour&nbsp;&raquo;. &Agrave; ce sujet, un cadre affirme que sa journ&eacute;e de travail est orchestr&eacute;e en fonction du courriel (Z-2). Pour la majorit&eacute; des r&eacute;pondants, ouvrir la bo&icirc;te de courriel constitue la premi&egrave;re chose qu&rsquo;ils font le matin. La bo&icirc;te de r&eacute;ception est devenue un outil permettant de g&eacute;rer les t&acirc;ches en instance. &nbsp;</p> <p><i>(1) Difficult&eacute;s &agrave; filtrer ce qui est pertinent&nbsp;</i>: Pour parvenir &agrave; g&eacute;rer ces t&acirc;ches, plus de la moiti&eacute; des participants impriment, dans l&rsquo;int&eacute;gralit&eacute; ou en partie, les courriels re&ccedil;us sur une base quotidienne. Pour un cadre (B-26), imprimer les courriels lui permet &laquo;&nbsp;de faire une distinction entre ceux qui sont prioritaires et ceux qui ne le sont pas&nbsp;&raquo;. Ce ph&eacute;nom&egrave;ne nous am&egrave;ne &agrave; observer avec plus d&rsquo;attention les difficult&eacute;s rencontr&eacute;es lorsqu&rsquo;il s&rsquo;agit de g&eacute;rer les t&acirc;ches g&eacute;n&eacute;r&eacute;es par le courriel &agrave; l&rsquo;aide des logiciels de messagerie utilis&eacute;s dans les administrations (MS Outlook<sup>MD</sup>&nbsp;et Lotus Notes<sup>MD</sup>). Puisque ceux-ci ne&nbsp;permettent pas d&rsquo;effectuer un suivi efficace des t&acirc;ches en instance, les r&eacute;pondants ont mis en place des pratiques individuelles pour mieux organiser leur travail au quotidien. Ces pratiques font notamment appel &agrave; des strat&eacute;gies de contournement des fonctionnalit&eacute;s offertes par les syst&egrave;mes de messagerie&nbsp;telles qu&rsquo;utiliser l&rsquo;indicateur &laquo;&nbsp;non lu&nbsp;&raquo; pour ne pas perdre un message pour lequel une t&acirc;che est &agrave; effectuer (Z-1) ou bien ne pas classer un message jusqu&rsquo;&agrave; la compl&eacute;tion de la t&acirc;che (Z-2).</p> <p><i>(2) Coordination et partage du suivi des t&acirc;ches&nbsp;</i>: Les pratiques de suivi des t&acirc;ches sont fr&eacute;quemment partag&eacute;es entre les cadres et leurs secr&eacute;taires. Dans notre &eacute;chantillon, vingt-six cadres et secr&eacute;taires doivent collaborer quotidiennement dans la gestion du courriel. Les pratiques collectives de gestion du courriel consistent principalement, pour les secr&eacute;taires, &agrave; d&eacute;tecter les actions et les priorit&eacute;s dans les messages re&ccedil;us par les cadres. Le niveau d&rsquo;engagement des secr&eacute;taires varie en fonction des exigences des cadres&nbsp;: tri du courriel par type d&rsquo;action et par priorit&eacute;, r&eacute;ponse &agrave; certains messages, impression des pi&egrave;ces jointes et des messages importants, confirmation des rendez-vous, m&eacute;nage de la bo&icirc;te de courriel, etc.&nbsp;</p> <p>Plusieurs difficult&eacute;s d&eacute;coulent du besoin qu&rsquo;ont les cadres de partager la gestion quotidienne de leur courriel. Tout d&rsquo;abord, quatre cadres soulignent le d&eacute;fi consistant &agrave; &laquo;&nbsp;trouver la bonne fa&ccedil;on de faire&nbsp;&raquo; qui serait &laquo;&nbsp;vraiment optimale&nbsp;&raquo;. Un cadre mentionne par exemple que l&rsquo;importance d&rsquo;un message n&rsquo;est pas toujours &eacute;valu&eacute;e de la m&ecirc;me mani&egrave;re, m&ecirc;me si l&rsquo;exp&eacute;rience d&rsquo;une secr&eacute;taire permet de r&eacute;duire cette difficult&eacute;. Un autre cadre exprime ses h&eacute;sitations lorsqu&rsquo;il s&rsquo;agit de donner acc&egrave;s &agrave; ses informations personnelles. La confidentialit&eacute; de certaines donn&eacute;es et la pr&eacute;sence de courriels de nature sociale (rendez-vous personnels, blagues) sont alors &eacute;voqu&eacute;es.</p> <p>L&rsquo;inad&eacute;quation des interfaces des syst&egrave;mes de messagerie est &eacute;galement une cause des difficult&eacute;s rencontr&eacute;es par les secr&eacute;taires dans le suivi partag&eacute; du courriel. Par exemple, le fait d&rsquo;acc&eacute;der &agrave; des syst&egrave;mes de messagerie distincts occasionne la duplication de certains messages, la contrainte de devoir alternativement entrer dans diff&eacute;rents comptes de messagerie et la pr&eacute;sence de certaines erreurs de compatibilit&eacute; entre les comptes. Les limites pr&eacute;c&eacute;demment cit&eacute;es am&egrave;nent plusieurs participants &agrave; &eacute;laborer des strat&eacute;gies de partage reposant sur une impression massive des messages afin de les trier dans des chemises. Plusieurs r&eacute;pondants soulignent le gaspillage du papier r&eacute;sultant de cette strat&eacute;gie, qui soul&egrave;ve &eacute;galement des interrogations sur le gain effectif en termes de temps et de productivit&eacute;.</p> <h3>Pression psychologique<b>&nbsp;</b></h3> <p>La troisi&egrave;me famille de difficult&eacute;s provient de la pression psychologique exerc&eacute;e par le courriel. Sur treize occurrences relev&eacute;es dans les entrevues, on remarque que douze affectent les cadres. Un cadre souligne ainsi que le courriel est &laquo; la partie la moins agr&eacute;able de la&nbsp;<i>job&nbsp;</i>&raquo; (B-16). Il ajoute que le dimanche soir, il pense au courriel en se disant qu&rsquo;il passera probablement sa matin&eacute;e du lendemain &agrave; g&eacute;rer ses messages. Un autre cadre affirme &laquo;&nbsp;se sentir esclave&nbsp;&raquo; de son syst&egrave;me de messagerie (B-34).</p> <p>On &eacute;voque &agrave; maintes reprises le fait que le courriel engendre beaucoup de travail, auquel s&rsquo;ajoute la pression de devoir performer suivant des d&eacute;lais raccourcis. La surcharge provoque un sentiment d&rsquo;ins&eacute;curit&eacute;, la peur de passer &agrave; c&ocirc;t&eacute; d&rsquo;une information essentielle :</p> <blockquote> <p>&laquo;&nbsp;On en re&ccedil;oit tellement qu&#39;&agrave; un moment donn&eacute;, on a toujours peur qu&rsquo;il y ait quelque chose qui nous &eacute;chappe. Donc on va perdre beaucoup de temps &agrave; lire des choses qui ne sont pas pertinentes.&nbsp;&raquo; (A-5, cadre, entrevue semi-dirig&eacute;e)</p> </blockquote> <p>La pression psychologique exerc&eacute;e par le courriel vient &eacute;galement du fait que les employ&eacute;s sont constamment interrompus par l&rsquo;arriv&eacute;e de nouveaux messages, &laquo;&nbsp;parce que l&agrave; &ccedil;a&nbsp;<i>flashe</i>&nbsp;en bas ou &ccedil;a crie &agrave; chaque fois&nbsp;&raquo; (A-10). Peut-&ecirc;tre justement par peur de passer &agrave; c&ocirc;t&eacute; de quelque chose d&rsquo;important, plusieurs r&eacute;pondants utilisent des options qui signalent l&rsquo;arriv&eacute;e de nouveaux messages. Un cadre souligne &agrave; cet effet le risque &laquo;&nbsp;de faire beaucoup de coq-&agrave;-l&rsquo;&acirc;ne&nbsp;&raquo;, d&rsquo;o&ugrave; l&rsquo;importance d&rsquo;acqu&eacute;rir suffisamment d&rsquo;autodiscipline dans la gestion de ses courriels (F-5).</p> <h6>Difficult&eacute;s proc&eacute;durales de l&rsquo;archivage et du classement</h6> <p>La derni&egrave;re famille de facteurs qui causent le sentiment de surcharge a trait aux difficult&eacute;s proc&eacute;durales de l&rsquo;archivage des messages. Seuls responsables de la gestion du courriel, confront&eacute;s au manque de normes et de proc&eacute;dures, les employ&eacute;s doivent mettre en place leurs propres strat&eacute;gies d&rsquo;organisation des messages. Sur cette question, plusieurs d&eacute;noncent le manque de temps et le manque de m&eacute;thode comme sources de difficult&eacute;s&nbsp;:</p> <blockquote> <p>&nbsp;&laquo;&nbsp;Moi, j&rsquo;ai beaucoup de difficult&eacute; avec &ccedil;a. Un&nbsp;: &ccedil;a prend du temps. Deux&nbsp;: de bien traiter l&rsquo;information puis de l&rsquo;envoyer &agrave; la bonne place, puis te souvenir que celui-l&agrave;, m&ecirc;me s&rsquo;il y avait trois histoires dedans ou trois th&egrave;mes, tu l&rsquo;as envoy&eacute; dans lui plut&ocirc;t que l&rsquo;autre.&nbsp;&raquo; (Z-1, cadre, entrevue semi-dirig&eacute;e)</p> </blockquote> <p>Ainsi, il semble y avoir trois &eacute;coles de pens&eacute;e lorsqu&rsquo;il s&rsquo;agit d&rsquo;organiser les messages&nbsp;: ceux qui mettent en place de laborieux syst&egrave;mes de dossiers, ceux qui suppriment la majorit&eacute; des messages re&ccedil;us au fur et &agrave; mesure, et ceux qui se fient sur les outils de recherche pour rep&eacute;rer un message&nbsp;<i>a posteriori</i>. En aucun cas les messages ne sont pris en charge par un syst&egrave;me archivistique officiel, ce qui pourtant permettrait de rationaliser les pratiques de travail tout en assurant la p&eacute;rennit&eacute; de l&rsquo;information.</p> <p>Plus pr&eacute;cis&eacute;ment, la pr&eacute;servation des pi&egrave;ces jointes est &eacute;galement une source de difficult&eacute;s qui contribue &agrave; la lourdeur des pratiques de gestion. Ne sachant que faire avec les documents joints aux messages, les r&eacute;pondants mentionnent &agrave; deux reprises la duplication des pratiques de sauvegarde. Par s&eacute;curit&eacute;, on pr&eacute;f&egrave;re pr&eacute;server une copie des documents joints dans les archives du syst&egrave;me de messagerie, en les sauvegardant &eacute;galement sur l&rsquo;espace de travail personnel ou sur le serveur partag&eacute;. Finalement, le manque d&rsquo;espace de stockage est &eacute;galement envisag&eacute; comme une source de difficult&eacute;s au cours des pratiques de gestion du courriel, souvent caus&eacute; par la pr&eacute;sence de pi&egrave;ces jointes &laquo;&nbsp;trop lourdes&nbsp;&raquo;. &Agrave; quatre reprises, les participants soulignent l&rsquo;irritation provoqu&eacute;e par une bo&icirc;te de courriel &laquo;&nbsp;pleine&nbsp;&raquo;. Interrompus dans leur travail, les employ&eacute;s doivent alors proc&eacute;der &agrave; un &laquo;&nbsp;m&eacute;nage&nbsp;&raquo;.</p> <h2><a id="t7"></a>DISCUSSION<b>&nbsp;</b></h2> <p>De mani&egrave;re g&eacute;n&eacute;rale, l&rsquo;&eacute;tude a d&eacute;montr&eacute; que le courriel constitue le c&oelig;ur des activit&eacute;s de tous les employ&eacute;s, un syst&egrave;me qui permet de centraliser les t&acirc;ches &agrave; effectuer au quotidien. Pourtant, le suivi des t&acirc;ches, sur une base individuelle ou collective, n&eacute;cessite la mise en place de strat&eacute;gies complexes de contournement, parce que les besoins r&eacute;els sont mal soutenus par les syst&egrave;mes de messagerie actuels. Ces pratiques de contournement nous am&egrave;nent &agrave; concevoir une nouvelle approche de l&rsquo;interaction humain-ordinateur, au sein de laquelle l&rsquo;analyse technique des pratiques d&rsquo;interaction avec un syst&egrave;me est enrichie d&rsquo;une dimension pragmatique. &Agrave; cette pragmatique de l&rsquo;interaction s&rsquo;ajoute une red&eacute;finition du concept d&rsquo;usager comme &laquo;&nbsp;sujet social&nbsp;&raquo; qui ren&eacute;gocie sans cesse le sens des discours qui s&rsquo;imposent &agrave; lui (Clarke, 2000). Ces deux perspectives qui empruntent leurs assises &agrave; la s&eacute;miotique organisationnelle sont examin&eacute;es aux points suivants.</p> <h3>Pragmatique de la lecture-interaction</h3> <p>L&rsquo;&eacute;tude des pratiques d&rsquo;interaction avec le courriel permet de constater un fait important. En contexte de travail, les employ&eacute;s ne lisent pas un texte dans le seul but de le lire, et n&rsquo;utilisent surtout pas un syst&egrave;me suivant l&rsquo;objectif d&rsquo;interagir avec son interface. Ce qui importe davantage, c&rsquo;est la t&acirc;che &agrave; accomplir. Cette observation,&nbsp;<i>a priori</i>&nbsp;simpliste, fait &eacute;cho aux propos de Dillon (2000, 2004, 2008) qui d&eacute;nonce les limites du paradigme traditionnel de l&rsquo;interaction humain-ordinateur. Selon l&rsquo;auteur, la recherche dans ce domaine, qui se fonde principalement sur des tests d&rsquo;utilisateurs, donne priorit&eacute; &agrave; l&rsquo;am&eacute;lioration des syst&egrave;mes en fonction des caract&eacute;ristiques physiques des interfaces, au d&eacute;triment du sens du texte.</p> <p>C&rsquo;est ici qu&rsquo;une approche s&eacute;miotique s&rsquo;av&egrave;re pertinente, car l&rsquo;interaction avec un syst&egrave;me ne constitue pas seulement un processus de manipulation de ses fonctionnalit&eacute;s, mais est &eacute;galement fond&eacute;e sur un processus d&rsquo;interpr&eacute;tation du discours. De mani&egrave;re naturelle, l&rsquo;humain fait sens de son environnement, et c&rsquo;est gr&acirc;ce au langage qu&rsquo;il peut le faire (Clarke, 2000, 2001c). L&rsquo;interaction avec un texte &eacute;lectronique correspond &agrave; un acte linguistique, comprenant une dimension technique (manipulation de l&rsquo;interface) ainsi qu&rsquo;une dimension s&eacute;mantico-pragmatique (compr&eacute;hension du discours en contexte de travail).&nbsp;La dimension pragmatique de la lecture-interaction concerne ainsi la capacit&eacute; qu&rsquo;ont les usagers-lecteurs &agrave; utiliser les textes pour communiquer, en fonction des besoins issus de leurs environnements.</p> <p>Au niveau pragmatique, il est possible d&rsquo;envisager la contribution active du texte durant le processus de communication entre un auteur et un lecteur. Par le biais du langage, le texte permet non seulement de v&eacute;hiculer un message porteur de sens ; il comporte des indications relatives au r&ocirc;le adopt&eacute; par le locuteur et les actes que ce locuteur tente d&rsquo;accomplir (Austin, 1970). Si le suivi des t&acirc;ches en instance constitue le c&oelig;ur des pratiques d&rsquo;interaction avec le courriel, ces pratiques sont mal soutenues par les syst&egrave;mes de messagerie utilis&eacute;s dans les administrations.&nbsp; Une approche telle que le CSS qui place le texte et sa contribution active au centre de l&rsquo;analyse favorise le d&eacute;veloppement de fonctionnalit&eacute;s mieux adapt&eacute;es aux besoins des utilisateurs.</p> <p>En effet, plus de la moiti&eacute; des participants impriment, dans l&rsquo;int&eacute;gralit&eacute; ou en partie, les courriels re&ccedil;us sur une base quotidienne, pour faciliter la gestion de leurs t&acirc;ches. Malgr&eacute; les lacunes des syst&egrave;mes de messagerie, les employ&eacute;s sont proactifs en mettant en place diff&eacute;rentes strat&eacute;gies de contournement leur permettant de r&eacute;aliser leur travail&nbsp;: utilisation d&eacute;tourn&eacute;e des fonctionnalit&eacute;s de marquage des messages, impression et organisation spatiale du courriel sur le bureau ou dans des classeurs suivant leur priorit&eacute; et leur d&eacute;l&eacute;gation, soulignage des mots-cl&eacute;s importants &agrave; l&rsquo;aide d&rsquo;un marqueur, envoi de messages &agrave; soi-m&ecirc;me &agrave; titre d&rsquo;aide-m&eacute;moire, etc. Ces pratiques de contournement enrichissent la conception traditionnelle de l&rsquo;usager du domaine de l&rsquo;IHO &agrave; l&rsquo;aide du concept de &laquo;&nbsp;sujet social&nbsp;&raquo; emprunt&eacute; au cadre s&eacute;miotique de Rodney Clarke.</p> <h3>L&rsquo;usager comme&nbsp;<em>sujet social</em></h3> <p>Dillon (2004, 2008) stipule que les &eacute;tudes traditionnelles relevant du domaine de l&rsquo;interaction humain-ordinateur (IHO) visent g&eacute;n&eacute;ralement &agrave; d&eacute;montrer la pertinence empirique d&rsquo;un syst&egrave;me, plut&ocirc;t qu&rsquo;&agrave; comprendre ses facteurs de succ&egrave;s. L&rsquo;auteur sugg&egrave;re que la recherche sur l&rsquo;utilisabilit&eacute; doit acc&eacute;der &agrave; une nouvelle phase de maturit&eacute;, bas&eacute;e sur l&rsquo;<i>autonomisation</i>&nbsp;des utilisateurs. Traduction du concept &ldquo;users&rsquo;&nbsp;<i>empowerment</i>&rdquo;, l&rsquo;autonomisation est envisag&eacute;e comme un &laquo;&nbsp;processus par lequel les utilisateurs de produits, de services ou de technologies acqui&egrave;rent la ma&icirc;trise des moyens qui leur permettent de mieux les utiliser et d&#39;en tirer le meilleur parti. &raquo; (OQLF, 2013&nbsp;: [en ligne]). Cette d&eacute;finition privil&eacute;gie le point de vue des employ&eacute;s en fonction des actions qu&rsquo;ils d&eacute;sirent accomplir. Elle r&eacute;fute les m&eacute;thodes traditionnelles recourant aux mod&egrave;les g&eacute;n&eacute;riques d&rsquo;usagers, d&eacute;velopp&eacute;es dans le but de pallier les &laquo; faiblesses &raquo; des diff&eacute;rents profils d&rsquo;utilisateurs.</p> <p>Du point de vue des concepteurs des syst&egrave;mes, la rigidit&eacute; vise pourtant &agrave; limiter les erreurs lors de l&rsquo;accomplissement d&rsquo;une t&acirc;che. Mais pour l&rsquo;usager, ce balisage informatique des pratiques de travail contraint la r&eacute;alisation de certaines t&acirc;ches, surtout lorsqu&rsquo;elles ne sont pas conformes aux pratiques initialement pr&eacute;vues par les concepteurs. La normalisation du travail des employ&eacute;s dans les syst&egrave;mes, en fonction de bonnes pratiques &agrave; suivre, provoque ainsi un d&eacute;calage entre la conception th&eacute;orique des syst&egrave;mes organisationnels et leur utilisation r&eacute;elle au quotidien. De mani&egrave;re g&eacute;n&eacute;rale, on constate qu&rsquo;un syst&egrave;me fond&eacute; sur un mod&egrave;le commun de proc&eacute;dures et de t&acirc;ches ne permet pas de r&eacute;pondre aux sp&eacute;cificit&eacute;s locales qui se manifestent en situation de travail r&eacute;el, constat &eacute;galement &eacute;nonc&eacute; par Spinuzzi (2003, 2013, 2015).</p> <p>Tel qu&rsquo;envisag&eacute; par Clarke (2000), l&rsquo;usager est r&eacute;alit&eacute; un&nbsp;<i>sujet social</i>, qui n&rsquo;est pas victime des syst&egrave;mes puisqu&rsquo;il ren&eacute;gocie constamment leur sens en fonction de ses objectifs personnels, en demeurant libre d&rsquo;accepter ou de rejeter le discours qui s&rsquo;impose &agrave; lui. Dans l&rsquo;&eacute;tude, et ce malgr&eacute; l&rsquo;observation de difficult&eacute;s li&eacute;es &agrave; l&rsquo;usage des syst&egrave;mes de messagerie, les employ&eacute;s n&rsquo;expriment pas de besoins sp&eacute;cifiques lorsqu&rsquo;on leur demande quelles fonctionnalit&eacute;s ils aimeraient voir ajout&eacute;es. Loin d&rsquo;&ecirc;tre un signe de passivit&eacute;, il appara&icirc;t au contraire que l&rsquo;employ&eacute; est un sujet social dynamique, qui s&rsquo;approprie les fonctionnalit&eacute;s des syst&egrave;mes en cr&eacute;ant des solutions sur mesure. Maurel (2006&nbsp;: 238), qui avait &eacute;galement constat&eacute; le recours &agrave; des &laquo;&nbsp;syst&egrave;mes personnels&nbsp;&raquo; en contexte municipal, souligne l&rsquo;importance &laquo;&nbsp;d&rsquo;examiner la question de l&rsquo;int&eacute;gration des composantes individuelles aux syst&egrave;mes formels g&eacute;r&eacute;s centralement&nbsp;&raquo;.</p> <h2><b><a id="t8"></a>CONCLUSION</b></h2> <p>Le Cadre de la s&eacute;miotique syst&eacute;mique pour l&rsquo;&eacute;tude des pratiques de travail offre une approche plus dynamique du traditionnel &laquo;&nbsp;usager&nbsp;&raquo;, comme source d&rsquo;interpr&eacute;tation des discours v&eacute;hicul&eacute;s dans les textes. L&rsquo;usager est ici un sujet social qui a le pouvoir de transformer les conventions (Kress, 1996&nbsp;: 310-311). Cette vision d&rsquo;un sujet proactif est utile lorsqu&rsquo;il s&rsquo;agit de comprendre les types de difficult&eacute;s rencontr&eacute;es en cours d&rsquo;interaction avec un syst&egrave;me et les actions entreprises pour ren&eacute;gocier leurs usages (Clarke, 2000). Selon Spinuzzi (2003&nbsp;: 3), la conception traditionnelle dans le domaine de l&rsquo;IHO du concepteur de syst&egrave;me &laquo;&nbsp;h&eacute;ro&iuml;que&nbsp;&raquo; visant &agrave; sauver l&rsquo;usager &laquo;&nbsp;victime&nbsp;&raquo; de l&rsquo;emprise d&rsquo;un syst&egrave;me tyrannique est aujourd&rsquo;hui obsol&egrave;te. Les pratiques de travail en contexte, les moyens mis en place pour contourner la rigidit&eacute; des syst&egrave;mes, les innovations individuelles et collectives ne peuvent &ecirc;tre envisag&eacute;s comme les sympt&ocirc;mes d&rsquo;un &laquo;&nbsp;mal &raquo; qu&rsquo;il importe de gu&eacute;rir, mais comme une source de renseignements pr&eacute;cieux sur les moyens de donner plus de pouvoir aux utilisateurs.<b>&nbsp;</b></p> <h2><b><a id="t9"></a>BIBLIOGRAPHIE</b></h2> <p>Alberts, I. (2009).&nbsp;<i>Exploitation des genres de textes pour assister les pratiques textuelles dans les environnements num&eacute;riques de travail: le cas du courriel chez des cadres et des secr&eacute;taires dans une municipalit&eacute; et une administration f&eacute;d&eacute;rale canadiennes</i>. Th&egrave;se de doctorat. Montr&eacute;al: Universit&eacute; de Montr&eacute;al.</p> <p>Alberts, I. (2013). Challenges of information system use by knowledge workers: The email productivity paradox.&nbsp;<i>Proceedings of the American Society for Information Science and Technology</i>,&nbsp;<i>50</i>(1), 1-10.</p> <p>Alberts, I., &amp; Forest, D. (2012). Email pragmatics and automatic classification: A study in the organizational context.&nbsp;<i>Journal of the American Society for Information Science and Technology</i>,&nbsp;<i>63</i>(5), 904-922.</p> <p>Austin, J. L. (1970).&nbsp;&nbsp;<i>Quand dire, c&#39;est faire</i>. Paris: &Eacute;ditions du Seuil.</p> <p>Bastien, J. C. (2010). Usability testing: A review of some methodological and technical aspects of the method.&nbsp;<i>International journal of medical informatics</i>,&nbsp;<i>79</i>(4), e18-e23.</p> <p>Clarke, R. J. (2000).&nbsp;<i>An information system in its organisational contexts: A systemic semiotic longitudinal case study</i>. Th&egrave;se de doctorat. Australia: University of Wollongong.</p> <p>Clarke, R. J. (2001a). Organisational semiosis: Integration and separation between system features and workpractices.&nbsp;<i>Australian journal of information systems</i>, 8(2), 103-114.</p> <p>Clarke, R. J. (2001b). Studies in organisational semiotics: An introduction.&nbsp;<i>Australian journal of information systems</i>, 8(2), 75-82.</p> <p>Clarke, R. J. (2001c). Social semiotic contributions to the systemic semiotic workpractice framework. [En ligne]. Adresse Url:&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;<a href="http://ro.uow.edu.au/cgi/viewcontent.cgi?article=1507&amp;context=buspapers">http://ro.uow.edu.au/cgi/viewcontent.cgi?article=1507&amp;context=buspapers</a>&nbsp;(Page consult&eacute;e le: 2016/11/25).</p> <p>Clarke, R. J. (2005). Workpractice theory as a foundation for is research: A systemic semiotic perspective.&nbsp;<i>Proceedings of action in language, organisations, and information systems</i>,&nbsp;Limerick, Ireland, 15-16 mars,&nbsp;243-247.</p> <p>Dillon, A. (2000). Spatial‐semantics: How users derive shape from information space.&nbsp;<i>Journal of the American Society for Information Science</i>,&nbsp;<i>51</i>(6), 521-528.</p> <p>Dillon, A. (2004).&nbsp;<i>Designing usable electronic text: Ergonomic aspects of human information usage</i>. CRC Press.</p> <p>Dillon, A. (2008). Why information has shape.&nbsp;<i>Bulletin of the American Society for Information Science and Technology</i>,&nbsp;<i>34</i>(5), 17-19.</p> <p>Dolata, M., Jeners, N., &amp; Prinz, W. (2013). Semi-automatic tagging for email. &nbsp;<i>ECSCW 2013 Adjunct Proceedings of the 13th European Conference on Computer Supported Cooperative Work</i>, Paphos, Cyprus, dates du congr&egrave;s &agrave; ajouter, &nbsp;27- 32.&nbsp;</p> <p>Djonov, E. (2007). Website hierarchy and the interaction between content organization, webpage and navigation design: A systemic functional hypermedia discourse analysis perspective.&nbsp;<i>Information Design Journal</i>,&nbsp;<i>15</i>(2), 144-162.</p> <p>Ducheneaut, N., &amp; Bellotti, V. (2001). E-mail as habitat: An exploration of embedded personal information management.&nbsp;<i>interactions</i>,&nbsp;<i>8</i>(5), 30-38.</p> <p>Eco, U. (1988).&nbsp;&nbsp;<i>Le signe: histoire et analyse d&#39;un concept</i>. Bruxelles: Labor.</p> <p>Eggins, S. (1994).&nbsp;&nbsp;<i>An introduction to systemic functional linguistics</i>. London ; New York: Pinter Publishers.</p> <p>Fawcett, R. P. (2000).&nbsp;<i>A theory of syntax for systemic functional linguistics&nbsp;</i>(Vol. 206). Philadelphia : John Benjamins Publishing.</p> <p>Gazendam, H. W. (2001). Semiotics, virtual organisations, and information systems.&nbsp;<i>Information, Organisation and Technology, 1</i>, 1-48.</p> <p>Gazendam, H., &amp; Liu, K. (2005). The evolution of organisational semiotics.&nbsp;In Filipe, J., &amp; Liu, K. (Eds.)<i>. Studies in organisational semiotics,&nbsp;</i>Dordrecht: Kluwer Academic Publishers.</p> <p>Halliday, M. A. K. (1978).&nbsp;&nbsp;<i>Language as social semiotic: The social interpretation of language and meaning</i>. London: E. Arnold.</p> <p>Hodge, R.; Kress, G. R. (1988).&nbsp;&nbsp;<i>Social semiotics</i>. Ithaca : ornell University Press.</p> <p>Humayoun, S. R., Poggi, A., Catarci, T., &amp; Dix, A. (2012). Task-based user-system interaction.&nbsp;<i>KI-K&uuml;nstliche Intelligenz</i>,&nbsp;<i>26</i>(2), 141-149.</p> <p>Kalman, Y. M., &amp; Ravid, G. (2015). Filing, piling, and everything in between: The dynamics of E‐mail inbox management.&nbsp;<i>Journal of the Association for Information Science and Technology</i>,&nbsp;<i>66</i>(12), 2540-2552.</p> <p>Kress, G. (1985).&nbsp;&nbsp;<i>Linguistic processes in sociocultural practice</i>. Victoria: Deakin University Press.</p> <p>Kress, G. (1996). Social processes and linguistic change: Time and history in language. Cobey, P., &eacute;d.&nbsp;<i>The communication reader</i>. London ; New York: Routledge, 299-313.</p> <p>Liu, K. (Ed.). (2001).&nbsp;<i>Information, organisation and technology: Studies in organisational semiotics</i>&nbsp;(Vol. 1). Springer Science &amp; Business Media.</p> <p>Liu, K., &amp; Li, W. (2015).&nbsp;<i>Organisational semiotics for business informatics</i>. Routledge.</p> <p>Marchionini, G. (2008). Human-information interaction research and development.&nbsp;<i>Library &amp; Information Science Research</i>,&nbsp;<i>30</i>(3), 165-174.</p> <p>Martin, J. R. (1992).&nbsp;<i>English text: System and structure</i>. Philadelphia: John Benjamins Pub. Co.</p> <p>Maurel, D. (2006).&nbsp;<i>Les cadres interm&eacute;diaires et l&#39;information: mod&eacute;lisation des comportements informationnels de cadres interm&eacute;diaires d&#39;une municipalit&eacute; en transformation</i>. Th&egrave;se de doctorat. Montr&eacute;al: Universit&eacute; de Montr&eacute;al.</p> <p>McMurtry, K. (2014). Managing email overload in the workplace.&nbsp;<i>Performance Improvement</i>,&nbsp;<i>53</i>(7), 31-37.</p> <p>Miles, M. B.; Huberman, A. M. (2003).&nbsp;&nbsp;<i>Analyse des donn&eacute;es qualitatives</i>. 2e &eacute;d.&nbsp;Paris: De Boeck Universit&eacute;.</p> <p>Office qu&eacute;b&eacute;cois de la langue fran&ccedil;aise (OQLF). (2013).&nbsp;<i>Grand dictionnaire terminologique</i>. [En ligne]. Adresse Url:&nbsp;<a href="http://www.granddictionnaire.com/">http://www.granddictionnaire.com</a>&nbsp;(Page consult&eacute;e le: 2016/11/06).</p> <p>Patton, M. Q. (2002).&nbsp;&nbsp;<i>Qualitative research &amp; evaluation methods</i>. 3e &eacute;d. Thousand Oaks, California: Sage Publications.</p> <p>de Souza et al. (2013). Convergent location-based messaging: Design for the future email ecosystem.&nbsp;<i>Proceedings of the 25th Australian Computer-Human Interaction Conference: Augmentation, Application, Innovation, Collaboration&nbsp;</i>(pp. 423-424). ACM.</p> <p>Spinuzzi, C. (2003).&nbsp;&nbsp;<i>Tracing genres through organizations: A sociocultural approach to information design</i>. Cambridge, MA: MIT Press.</p> <p>Spinuzzi,&nbsp;C.&nbsp;(2013)&nbsp;<i>Topsight: A&nbsp;guide to studying, diagnosing, and fixing information flow in organizations</i>.&nbsp;Austin:&nbsp;Amazon CreateSpace.</p> <p>Spinuzzi,&nbsp;C.&nbsp;(2015).&nbsp;<i>All&nbsp;edge: Inside the new workplace networks</i>. Chicago: University&nbsp;of Chicago&nbsp;Press.</p> <p>Stamper, R. K. (2001). Organisational semiotics: Informatics without the computer?. In&nbsp;<i>Information, organisation and technology</i>&nbsp;(115-171). Springer US.</p> <p>Sz&oacute;stek, A. M. (2011). &lsquo;Dealing with my emails&rsquo;: Latent user needs in email management.&nbsp;<i>Computers in Human Behavior</i>,&nbsp;<i>27</i>(2), 723-729.</p> <p>Todorov, T. (1984).&nbsp;&nbsp;<i>Mikhail Bakhtin: The dialogic principle</i>. Minneapolis: University of Minnesota Press.</p> <p>Toms, E. G. (2002). Information interaction: Providing a framework for information architecture.&nbsp;<i>Journal of the American Society for Information Science and Technology</i>,&nbsp;<i>53</i>(10), 855-862.</p> <p>Ventola, E. (1987).&nbsp;&nbsp;<i>The structure of social interaction: A systemic approach to the semiotics of service encounters</i>. London: F. Pinter.</p> <p>Whittaker, S., &amp; Sidner, C. (1996, April). Email overload: Exploring personal information management of email. &nbsp;<i>Proceedings of the SIGCHI conference on Human factors in computing systems</i>&nbsp;(276-283). ACM.</p>