<h2 style="text-align:center; text-indent:36pt"><span style="font-size:24pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="font-weight:bold"><a name="_Toc51249891"></a><a name="_Toc53582365"><span style="font-size:14.0pt"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">La lumi&egrave;re et l&rsquo;&eacute;clair&nbsp;: </span></span></a></span></span></span></h2> <h2 style="text-align:center; text-indent:36pt"><span style="font-size:24pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="font-weight:bold"><span style="font-size:14.0pt"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">les r&eacute;volutions occidentales modernes </span></span></span></span></span></h2> <h2 style="text-align:center; text-indent:36pt"><span style="font-size:24pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="font-weight:bold"><span style="font-size:14.0pt"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">et la transformation de la nature humaine</span></span></span></span></span></h2> <p align="center" style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p align="center" style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">ZHU Xueqin<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">[1]</span></span></span></span></span></a></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><i><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">La R&eacute;volution am&eacute;ricaine est soyeuse et persistante comme la lumi&egrave;re du jour. La R&eacute;volution fran&ccedil;aise ressemble &agrave; un &eacute;clair qui explose dans le noir avec des coups de tonnerre spectaculaires et des pluies intenses, elle bouleverse le vieux r&eacute;gime comme l&rsquo;&eacute;clair illumine tous les coins du monde, mais rapidement, tous se retrouvent dans le noir.</span></i></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">La Convention constitutionnelle de Philadelphie de 1787 marque la fin de la R&eacute;volution am&eacute;ricaine. Moins de deux ans plus tard, la R&eacute;volution fran&ccedil;aise &eacute;clate comme un &eacute;norme &eacute;clair d&eacute;chirant le ciel. Le d&eacute;but de la R&eacute;volution fran&ccedil;aise et la fin de la R&eacute;volution am&eacute;ricaine sont si proches qu&rsquo;on les a surnomm&eacute;es &laquo;&thinsp;les r&eacute;volutions jumelles&thinsp;&raquo;. Les connaissances historiques que les lecteurs chinois tirent des manuels scolaires vont dans le m&ecirc;me sens&nbsp;: ces deux r&eacute;volutions semblent avoir des liens consanguins. La question m&eacute;rite d&rsquo;&ecirc;tre pos&eacute;e pour plusieurs raisons. En premier lieu, on sait que le d&eacute;ficit budg&eacute;taire, qui est consid&eacute;r&eacute; comme l&rsquo;une des causes directes de la R&eacute;volution fran&ccedil;aise, &eacute;tait lui-m&ecirc;me la cons&eacute;quence de l&rsquo;aide apport&eacute;e &agrave; la R&eacute;volution am&eacute;ricaine. Les textes de la <i>D&eacute;claration des droits de l&rsquo;homme</i> et de la <i>D&eacute;claration d&rsquo;ind&eacute;pendance</i> sont r&eacute;dig&eacute;s de fa&ccedil;on analogue. Les leaders de ces deux r&eacute;volutions ont en commun d&rsquo;avoir voyag&eacute; entre les deux continents&nbsp;: Thomas Paine a particip&eacute; aux deux r&eacute;volutions, Lafayette a particip&eacute; &agrave; la lutte des Am&eacute;ricains contre l&rsquo;arm&eacute;e britannique, et c&rsquo;est lui qui apportera la cl&eacute; de la prison de la Bastille, saisie par les rebelles de Paris, au g&eacute;n&eacute;ral Washington lors de son retour aux &Eacute;tats-Unis, etc. Dans <i>Sister Revolutions: French Lightning, American Light</i> (1999), </span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">&eacute;tude</span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"> qui compare ces deux r&eacute;volutions, l&rsquo;universitaire am&eacute;ricaine Susan Dunn utilise &eacute;galement cette notion de &laquo;&thinsp;r&eacute;volutions s&oelig;urs (<i>Sister Revolutions</i>)&thinsp;&raquo;, tout en ajoutant un sous-titre,&nbsp;&laquo;&thinsp;L&rsquo;&eacute;clair fran&ccedil;ais et la lumi&egrave;re am&eacute;ricaine&thinsp;&raquo;, pour les diff&eacute;rencier. Les documents cit&eacute;s dans ce livre, y compris les prises de position, les journaux intimes et les conversations priv&eacute;es de l&rsquo;&eacute;poque, donnent une image inhabituelle de ces r&eacute;volutions qui risque de laisser les lecteurs chinois perplexes<a href="#_ftn2" name="_ftnref2" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">[2]</span></span></span></span></span></a>.</span></span></span></span></p> <h4>&nbsp;</h4> <h4><span style="font-size:12pt"><span style="break-after:avoid"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:normal"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">L&rsquo;union du despotisme et du libertinage aurait favoris&eacute; la R&eacute;volution</span></span></span></span></span></span></h4> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Les &Eacute;tats g&eacute;n&eacute;raux du royaume fran&ccedil;ais, assembl&eacute;e exceptionnelle comparable au Parlement du Royaume-Uni, n&rsquo;avaient pas &eacute;t&eacute; r&eacute;unis depuis plus de 160 ans. Si Louis XVI les convoque en 1789, c&rsquo;est dans le but de trouver une solution &agrave; la situation financi&egrave;re pr&eacute;occupante du pays. &Eacute;tant donn&eacute; que cette assembl&eacute;e ne s&rsquo;&eacute;tait pas r&eacute;unie depuis tr&egrave;s longtemps, personne ne se souvenait des d&eacute;tails du d&eacute;roulement, comme le nombre de repr&eacute;sentants par province, la fa&ccedil;on d&rsquo;&eacute;lire les repr&eacute;sentants et le processus de d&eacute;cision. Ainsi, m&ecirc;me Louis XVI, qui attendait beaucoup de cette r&eacute;union des &Eacute;tats g&eacute;n&eacute;raux, ne savait pas comment l&rsquo;organiser.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Un mois avant sa destitution, le cardinal &Eacute;tienne Charles de Lom&eacute;nie de Brienne eut une id&eacute;e, qui est peut-&ecirc;tre la plus singuli&egrave;re dans l&rsquo;histoire de la politique constitutionnelle&nbsp;: il conseilla au roi d&rsquo;inviter tous les &laquo;&thinsp;hommes de lettres&thinsp;&raquo; fran&ccedil;ais &agrave; participer &agrave; un concours portant sur l&rsquo;organisation de cette r&eacute;union&nbsp;: Fallait-il pr&eacute;voir une r&eacute;union &agrave; grande &eacute;chelle&nbsp;? Fallait-il s&eacute;parer les trois ordres&nbsp;? Les trois ordres disposeraient-ils de droits &eacute;gaux&nbsp;? etc. Brienne se souvenait de ce que le roi avait oubli&eacute;, mais il oubliait lui aussi un fait essentiel&nbsp;: les avantages de la France, par rapport aux autres pays europ&eacute;ens, ne r&eacute;sidaient pas dans son syst&egrave;me politique, mais dans la vitalit&eacute; de sa litt&eacute;rature et de la mondanit&eacute;. La France &eacute;tait plus riche en lettr&eacute;s qu&rsquo;en savants, car son cercle id&eacute;ologique provenait essentiellement de la sph&egrave;re de la critique litt&eacute;raire. Les raisons historiques de cette situation remontent au r&egrave;gne de Louis&nbsp;XIV. Afin de ruiner les nobles et d&rsquo;an&eacute;antir leurs ambitions, le roi Soleil les avait oblig&eacute;s &agrave; participer &agrave; la vie de la cour et donc &agrave; se consacrer &agrave; des activit&eacute;s superficielles telles que les ballets et les salons. Les lettr&eacute;s de l&rsquo;&eacute;poque les avaient suivis. Int&eacute;gr&eacute;s &agrave; la cour, ils fr&eacute;quentaient la classe sup&eacute;rieure et influenc&egrave;rent m&ecirc;me le roi et la reine. Les lettr&eacute;s pensaient &ecirc;tre en mesure de jouer un r&ocirc;le politique, tout en affirmant leur g&eacute;nie&nbsp; artistique. En fait, ils ne purent jamais acqu&eacute;rir une telle influence au sein de la monarchie. Cette illusion et leurs ambitions entra&icirc;n&egrave;rent leur insatisfaction. Malgr&eacute; les conseils d&rsquo;&Eacute;tienne Charles de Lom&eacute;nie de Brienne, les r&eacute;criminations des hommes de lettres prirent de l&rsquo;ampleur. En 1789, 2&thinsp;500&nbsp;pamphlets&nbsp;&eacute;taient empil&eacute;s sur le bureau de Louis&nbsp;XVI. Sur son lit de mort, Louis&nbsp;XV, son pr&eacute;d&eacute;cesseur et grand-p&egrave;re, avait pr&eacute;dit cette vague de contestation.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">&lrm;</span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Lorsque le barrage s&rsquo;effondre, les vannes sont toujours d&eacute;truites en premier. L&rsquo;union du despotisme et du libertinage&nbsp;(ou la pr&eacute;tendue gouvernance &eacute;clair&eacute;e)&nbsp;provoque souvent la r&eacute;volution. &Agrave; la veille de la R&eacute;volution fran&ccedil;aise, cette frivolit&eacute; &eacute;tait manifeste&nbsp;: la reine &eacute;tait m&ecirc;me intervenue pour faire jouer <i>Le Mariage de Figaro</i> &agrave; la cour. La monarchie autocratique et les lettr&eacute;s frivoles ont provoqu&eacute; la fin du r&eacute;gime, et les r&eacute;volutionnaires, qui ont h&eacute;rit&eacute; des tendances violentes de l&rsquo;Ancien R&eacute;gime, ont redoubl&eacute; ce d&eacute;sastre. Ce gouvernement autoritaire peut &ecirc;tre compar&eacute; &agrave; un p&egrave;re s&eacute;v&egrave;re et t&ecirc;tu, dont le fils, opprim&eacute; depuis longtemps, se venge par les m&ecirc;mes moyens appliqu&eacute;s plus durement encore.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Les cahiers de dol&eacute;ances, dont 60 000 environ subsistent, fournissent un &eacute;tat des lieux des probl&egrave;mes du pays qui a attir&eacute; l&rsquo;attention de Tocqueville. Selon lui, la lecture de ces cahiers montre que &laquo;&thinsp;l&rsquo;insatisfaction du peuple&thinsp;&raquo; &eacute;tait telle qu&rsquo;elle nourrissait la volont&eacute; de supprimer&nbsp;toutes&nbsp;les lois et&nbsp;de transformer tous&nbsp;les usages. La France traversait une crise sans pr&eacute;c&eacute;dent, creuset d&rsquo;une r&eacute;volution d&rsquo;une violence in&eacute;dite. Les hommes de lettres, priv&eacute;s de libert&eacute;, sont rest&eacute;s &laquo;&thinsp;ignorants et aveugles&thinsp;&raquo; s&rsquo;agissant des affaires&nbsp;politiques. Tandis que des responsables &acirc;g&eacute;s et conformistes &eacute;taient aux affaires, des jeunes, prometteurs mais inexp&eacute;riment&eacute;s, r&ecirc;vaient d&rsquo;une soci&eacute;t&eacute; utopique. Si les penseurs fran&ccedil;ais avaient pu tirer les enseignements de l&rsquo;exp&eacute;rience politique anglaise, c&rsquo;est-&agrave;-dire de l&rsquo;am&eacute;lioration progressive d&rsquo;un r&eacute;gime, ils n&rsquo;auraient pas eu &nbsp;besoin&nbsp;de se lancer dans une exp&eacute;rimentation in&eacute;dite. Malheureusement, l&rsquo;autocratie les a plac&eacute;s face &agrave; un dilemme entre deux extr&ecirc;mes&nbsp;: soit accepter enti&egrave;rement l&rsquo;Ancien R&eacute;gime arbitraire, soit le renverser. Bien entendu, les hommes de lettres fran&ccedil;ais ont choisi la seconde solution. </span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">L&rsquo;&eacute;poque de la construction du Palais de Versailles &eacute;tait loin et le peuple fran&ccedil;ais avait perdu sa confiance en l&rsquo;avenir. Les apports du mouvement des Lumi&egrave;res sont bien connus, et nous en b&eacute;n&eacute;ficions encore aujourd&rsquo;hui, mais, &agrave; l&rsquo;&eacute;poque, la culture des hommes de lettres s&rsquo;est maintenue. La civilisation de cour avait encourag&eacute; en leur sein la frivolit&eacute; et l&rsquo;arrogance, le syst&egrave;me autoritaire et ferm&eacute; limitait leur conscience &nbsp;politique. L&rsquo;une des origines de l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;homme de lettres en soci&eacute;t&eacute; est le bouffon du roi. La pr&eacute;tendue sagesse politique des hommes de lettres repose sur des habitudes superficielles. Le mod&egrave;le du sacerdoce est l&rsquo;autre origine de l&rsquo;intellectuel. Par cons&eacute;quent, prenant la place des pr&ecirc;tres, les lettr&eacute;s ont pris la responsabilit&eacute; d&rsquo;enseigner au peuple, tout en esp&eacute;rant inconsciemment &eacute;tablir un nouveau c&eacute;saropapisme. Dans cette nouvelle &egrave;re, les lettr&eacute;s sont devenus de nouveaux pr&ecirc;tres. Quoique n&rsquo;&eacute;tant pas d&rsquo;accord avec l&rsquo;ancien pouvoir religieux, ils voulaient &eacute;tablir un nouveau pouvoir religieux. En outre, la soci&eacute;t&eacute; fran&ccedil;aise se distinguait des autres par une caract&eacute;ristique&nbsp;: les hommes de lettres y jouissaient d&rsquo;un statut sup&eacute;rieur &agrave; celui des autres classes. &nbsp;Toute la soci&eacute;t&eacute; de l&rsquo;&eacute;poque prenait comme guides les lettr&eacute;s et le bon go&ucirc;t, tout en ignorant l&rsquo;industrie, le droit et la technologie. Le r&eacute;sultat est un certain m&eacute;pris des institutions, que l&rsquo;on rencontre aussi dans d&rsquo;autres pays du sud de l&rsquo;Europe, mais rarement au Royaume-Uni et en Am&eacute;rique du Nord. Dans les pays anglophones, le r&ocirc;le des hommes de lettres est reconnu, mais la classe correspondante n&rsquo;est pas consid&eacute;r&eacute;e comme sup&eacute;rieure aux autres. Le c&ocirc;t&eacute; positif des lettr&eacute;s est leur capacit&eacute; exceptionnelle &agrave; protester, mais leur c&ocirc;t&eacute; n&eacute;gatif est qu&rsquo;ils ne parviennent pas &agrave; cr&eacute;er un nouveau syst&egrave;me et une nouvelle culture politiques. En effet, la plupart d&rsquo;entre eux n&rsquo;ont pas la patience n&eacute;cessaire &agrave; un travail de r&eacute;forme radicale. Historiquement, une fois que la pression s&rsquo;est rel&acirc;ch&eacute;e, ils ont relanc&eacute; le mythe de l&rsquo;anarchisme, comme un astronaute qui s&rsquo;affranchirait de la gravit&eacute; en dansant et en essayant de d&eacute;crocher la lune dans le ciel. En entrant dans la vie politique, la plupart d&rsquo;entre eux ont reproduit l&rsquo;ancien syst&egrave;me au sein de la r&eacute;volution avant de suivre un nouveau roi apr&egrave;s le grand chaos. Leur attitude morale est comparable aux mouvements des tortues dans les eaux profondes. Bien avant la remise en cause du syst&egrave;me monarchique, les activit&eacute;s politiques des hommes de lettres oscillaient entre radicalisme et nihilisme. Parfois, les hommes de lettres transcendent les fronti&egrave;res des disciplines et utilisent la litt&eacute;rature pour s&rsquo;immiscer dans la politique. Ils ont promu leurs id&eacute;aux utopiques et les &laquo;&nbsp;Lumi&egrave;res litt&eacute;raires&thinsp;&raquo;. Lorsqu&rsquo;ils ont &eacute;t&eacute; r&eacute;prim&eacute;s par les forces politiques, ils se sont regroup&eacute;s dans un petit cercle de lettr&eacute;s, tout en conservant leur influence, et se sont concentr&eacute;s sur la cr&eacute;ation litt&eacute;raire ou la &laquo; pure litt&eacute;rature&thinsp;&raquo;. Les hommes de lettres sont fr&eacute;quemment consid&eacute;r&eacute;s, &agrave; tort, comme ceux qui pourront trouver des rem&egrave;des &agrave; la crise sociale. En r&eacute;alit&eacute;, ils font partie des causes des maladies de la soci&eacute;t&eacute;. L&rsquo;importance accrue des&nbsp;hommes&nbsp;de&nbsp;lettres&nbsp;est&nbsp;souvent&nbsp;un sympt&ocirc;me de probl&egrave;mes sociaux. Ils appellent ouvertement &agrave; la r&eacute;volution. Si elle ne se produit pas, leurs textes appartiendront n&eacute;anmoins &agrave; la litt&eacute;rature de l&rsquo;&eacute;poque. Si elle advient enfin, les plus radicaux de ces hommes de lettres commenceront par promettre la d&eacute;mocratie, avant d&rsquo;&eacute;liminer ceux qui s&rsquo;opposeront au nouveau r&eacute;gime. Pour finir, ils deviendront plus autoritaires que les monarques qui les ont pr&eacute;c&eacute;d&eacute;s.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Dans le sillage de la Renaissance italienne, l&rsquo;humanisme s&rsquo;est r&eacute;pandu en France. Les hommes de lettres fran&ccedil;ais, qui ont d&eacute;velopp&eacute; une confiance excessive en l&rsquo;homme, pensant &agrave; tort que la&nbsp;nature&nbsp;humaine&nbsp;&eacute;tait bonne, se sont imagin&eacute;s qu&rsquo;ils pourraient remplacer&nbsp;le syst&egrave;me social par un syst&egrave;me fond&eacute; uniquement sur la bont&eacute;&nbsp;humaine. Oubliant la face n&eacute;gative de la&nbsp;nature&nbsp;humaine, ils ont renonc&eacute; &agrave; la recherche de l&rsquo;&eacute;quilibre des pouvoirs et &agrave; l&rsquo;id&eacute;e&nbsp;d&rsquo;&laquo;&thinsp;utiliser le&nbsp;mal&nbsp;pour restreindre le&nbsp;mal&thinsp;&raquo;. Plus tard, ayant compris que la&nbsp;nature&nbsp;humaine&nbsp;n&rsquo;est&nbsp;pas&nbsp;enti&egrave;rement&nbsp;bonne, ils ont appel&eacute; &agrave; la r&eacute;volution dans l&rsquo;espoir de transformer l&rsquo;humanit&eacute;. La nature humaine &eacute;tant difficile &agrave; transformer, ils d&eacute;voil&egrave;rent ensuite un visage f&eacute;roce et finalement en opposition avec la nature humaine. Cette contradiction interne dans la conception que se faisaient les r&eacute;volutionnaires de la nature humaine s&rsquo;est manifest&eacute;e par des r&eacute;formes radicales au d&eacute;but de la Grande R&eacute;volution. Le 4 ao&ucirc;t 1789, les r&eacute;volutionnaires ont aboli tous les privil&egrave;ges f&eacute;odaux qui existaient depuis plus de mille ans. Dans la derni&egrave;re p&eacute;riode de la R&eacute;volution, cette contradiction concernant la nature humaine s&rsquo;est manifest&eacute;e par la Terreur et la suppression des libert&eacute;s fondamentales. De 1792 &agrave; 1793, 17&thinsp;000 personnes ont &eacute;t&eacute; guillotin&eacute;es.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; </span></span></span></span></p> <h4>&nbsp;</h4> <h4><span style="font-size:12pt"><span style="break-after:avoid"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:normal"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">La censure et les pratiques culturelles</span></span></span></span></span></span></h4> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Bien que les sciences naturelles modernes soient apparues &agrave; la m&ecirc;me &eacute;poque que le courant artistique connu sous le nom de Renaissance, les premi&egrave;res et le dernier sont assez discordants. L&rsquo;h&eacute;liocentrisme de Nicolas Copernic&nbsp;d&eacute;fie&nbsp;non seulement &nbsp;&nbsp;&nbsp;le g&eacute;ocentrisme de l&rsquo;&Eacute;glise, mais aussi&nbsp;l&rsquo;anthropocentrisme qui met l&rsquo;accent sur l&rsquo;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &ecirc;tre humain. La science provoque la col&egrave;re &agrave; la fois du pape, des monarques, et d&rsquo;hommes de lettres comme Dante.&nbsp;La&nbsp;science moderne&nbsp;est&nbsp;certainement une&nbsp;ennemie&nbsp;de l&rsquo;asc&eacute;tisme de l&rsquo;&Eacute;glise, mais&nbsp;aussi de l&rsquo;irr&eacute;ductible libertinage des humanistes. En effet, l&rsquo;&Eacute;glise et les humanistes partagent un m&ecirc;me paradigme&nbsp;: l&rsquo;&Eacute;glise promeut l&rsquo;asc&eacute;tisme en promettant le rachat aux yeux de Dieu &agrave; travers la Bible, les hommes de lettres promeuvent l&rsquo;h&eacute;donisme et la libert&eacute; &agrave; travers les Belles-lettres qui permettent la r&eacute;alisation de la r&eacute;demption, de la lib&eacute;ration et de la transformation dans le monde s&eacute;culier. Les carri&egrave;res des pr&ecirc;tres et des lettr&eacute;s sont parfois conflictuelles, mais, d&rsquo;un certain point de vue, elles se compl&egrave;tent. Elles ont en effet en commun de placer les &ecirc;tres humains au centre de l&rsquo;univers. Les sciences de la nature contestent pr&eacute;cis&eacute;ment cet anthropocentrisme et appliquent les m&ecirc;mes crit&egrave;res d&rsquo;objectivit&eacute; en d&eacute;crivant les hommes qu&rsquo;en d&eacute;crivant le reste de la nature. Lorsque cet &eacute;tat d&rsquo;esprit s&rsquo;est diffus&eacute; au Royaume-Uni, il a donn&eacute; naissance aux Lumi&egrave;res &eacute;cossaises. La pens&eacute;e politique de Hobbes est bas&eacute;e sur la g&eacute;om&eacute;trie plut&ocirc;t que sur la po&eacute;tique. Il part du principe qu&rsquo;il n&rsquo;est pas possible de faire confiance aux individus, et que les personnes au pouvoir sont encore moins fiables. Selon </span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">sa</span><span lang="FR-CA" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"> doctrine,</span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">&thinsp;le mouvement d&rsquo;expansion du pouvoir est comme le mouvement des objets dans le monde physique. Un pouvoir s&rsquo;&eacute;largit constamment jusqu&rsquo;&agrave; ce qu&rsquo;il rencontre un autre pouvoir. Par cons&eacute;quent, la division du pouvoir en plusieurs pouvoirs et l&rsquo;&eacute;quilibre de ces derniers sont indispensables. Sa pens&eacute;e est &eacute;videmment plus proche de celle de Copernic ou de Newton que de celle de Dante ou de P&eacute;trarque, plus proche de la physique et de la g&eacute;om&eacute;trie que des Belles-lettres. Hobbes &eacute;tudie ainsi la nature humaine en ignorant volontairement &laquo;&thinsp;la d&eacute;couverte de la nature humaine&thinsp;&raquo; de l&rsquo;autre c&ocirc;t&eacute; des Alpes. Selon lui, le 17<sup>e</sup> si&egrave;cle est le &laquo;&thinsp;si&egrave;cle de la g&eacute;om&eacute;trie&thinsp;&raquo;. Son chef-d&rsquo;&oelig;uvre, <i>L&eacute;viathan</i>, est un ouvrage politique construit sur la base de la g&eacute;om&eacute;trie. Ce n&rsquo;est pas tant une &eacute;tude de la nature humaine qu&rsquo;une r&eacute;flexion sur les &ecirc;tres humains d&rsquo;un point de vue g&eacute;om&eacute;trique. Consid&eacute;r&eacute;s comme les p&egrave;res de la th&eacute;orie politique, Hobbes et Rousseau adoptent des perspectives tr&egrave;s diff&eacute;rentes. L&rsquo;un poss&egrave;de les caract&eacute;ristiques de la glace, l&rsquo;autre celles de la flamme. L&rsquo;un adopte un point de vue g&eacute;om&eacute;trique, l&rsquo;autre&nbsp;un point de vue esth&eacute;tique. L&rsquo;un privil&eacute;gie la logique, l&rsquo;autre&nbsp;la po&eacute;tique. L&rsquo;un pense que l&rsquo;homme est&nbsp;naturellement&nbsp;mauvais, l&rsquo;autre&nbsp;d&eacute;clare qu&rsquo;il&nbsp;est&nbsp;naturellement&nbsp;bon. Le premier est plut&ocirc;t pessimiste&nbsp;: il&nbsp;ne se situe pas du c&ocirc;t&eacute; de l&rsquo;utopie et&nbsp;ne pr&eacute;tend ni sauver, ni lib&eacute;rer, ni transformer&nbsp;les&nbsp;gens, mais plut&ocirc;t &eacute;viter l&rsquo;enfer auquel conduisent pr&eacute;cis&eacute;ment ceux qui veulent sauver, transformer, modeler les autres. Rousseau, par contre, d&eacute;crit un monde utopique et m&egrave;ne l&rsquo;humanit&eacute; vers le d&eacute;sastre. Les pays anglophones pr&ocirc;nent la philosophie analytique, l&rsquo;empirisme, le positivisme, ainsi que la justice de proc&eacute;dure. Parall&egrave;lement, la culture europ&eacute;enne pr&eacute;f&egrave;re la philosophie transcendantale, l&rsquo;esth&eacute;tique et le fait que l&rsquo;homme habite le monde en po&egrave;te (&laquo;&thinsp;<i>Dichterisch&nbsp;wohnet&nbsp;der&nbsp;Mensch</i>&thinsp;&raquo;, H&ouml;lderlin). Ce d&eacute;saccord&nbsp;entre eux provient peut-&ecirc;tre de la divergence&nbsp;entre&nbsp;Hobbes et Rousseau.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Les historiens chinois utilisent le terme &laquo;&thinsp;les Lumi&egrave;res&thinsp;&raquo; pour d&eacute;crire ce qui s&rsquo;est pass&eacute; en France, et non pour d&eacute;crire ce qui s&rsquo;est pass&eacute; en Grande-Bretagne et en Am&eacute;rique du Nord. Cette diff&eacute;rence est-elle intentionnelle&thinsp;? Les d&eacute;clarations non intentionnelles r&eacute;v&egrave;lent plus souvent les intentions des int&eacute;ress&eacute;s que les discours d&eacute;lib&eacute;r&eacute;s. Avant la R&eacute;volution am&eacute;ricaine, seuls deux ou trois penseurs &eacute;taient assis autour de la chemin&eacute;e en &Eacute;cosse en parlant &agrave; voix basse. Il ne s&rsquo;agissait pas d&rsquo;un v&eacute;ritable &laquo;&thinsp;mouvement politique&thinsp;&raquo;, mais simplement d&rsquo;une &laquo;&thinsp;activit&eacute;&nbsp;politique&thinsp;&raquo;. En Am&eacute;rique, on n&rsquo;identifie presque aucune trace de discussion politique. En France, la situation &eacute;tait inverse&nbsp;: avant la R&eacute;volution, les discussions politiques &eacute;taient tr&egrave;s vives et beaucoup d&rsquo;acteurs influents y ont pris part. La r&eacute;volution politique fran&ccedil;aise s&rsquo;est effectu&eacute;e sur une p&eacute;riode relativement longue, si bien qu&rsquo;elle a touch&eacute; un grand nombre de personnes. En outre, sa dimension litt&eacute;raire favorisait le projet de transformer la nature humaine. En cela, elle m&eacute;rite vraiment le titre de &laquo;&thinsp;mouvement politique&thinsp;&raquo;. Compar&eacute;e &agrave; la grande et profonde r&eacute;volution sociale de la France, la transformation sociale am&eacute;ricaine ne comporte ni les Lumi&egrave;res ni la r&eacute;forme de l&rsquo;humanit&eacute;&thinsp;; quant &agrave; la Grande-Bretagne, elle a particip&eacute; &agrave; la diffusion des savoirs sans s&rsquo;engager non plus dans une r&eacute;forme de l&rsquo;humanit&eacute;. Malheureusement, les chercheurs ult&eacute;rieurs n&rsquo;ont pas suffisamment &eacute;tudi&eacute; ces clivages qui sont essentiels dans l&rsquo;analyse des changements sociaux de ces trois pays, et les chercheurs chinois ne s&rsquo;y sont pas assez int&eacute;ress&eacute;s. Ces interpr&eacute;tations, qui attribuaient toutes les r&eacute;alisations positives et n&eacute;gatives de la R&eacute;volution aux lettr&eacute;s ont certainement exag&eacute;r&eacute; leur r&ocirc;le. L&rsquo;erreur principale qui sous- tend cette th&egrave;se est le &laquo;&thinsp;d&eacute;terminisme culturel&thinsp;&raquo;. Mais il faut admettre que les auteurs et les textes des Lumi&egrave;res portent une part de responsabilit&eacute; dans le d&eacute;sastre profond et durable caus&eacute; par la R&eacute;volution fran&ccedil;aise. D&rsquo;ailleurs l&rsquo;introspection, qui caract&eacute;rise l&rsquo;esprit litt&eacute;raire, devrait d&eacute;plaire aux jeunes litt&eacute;raires chinois, qui constituent un groupe de personnes profond&eacute;ment touch&eacute;es par le mouvement du 4 mai. Depuis l&rsquo;&eacute;mergence de ce nouveau mouvement culturel, en 1919, la litt&eacute;rature et la philosophie fran&ccedil;aises (la seconde &eacute;tant elle-m&ecirc;me souvent consid&eacute;r&eacute;e comme litt&eacute;raire) constituent les mod&egrave;les culturels &eacute;trangers les plus influents en Chine. En effet, les &oelig;uvres de l&#39;&eacute;cole intellectuelle fran&ccedil;aise ont tendance &agrave; avoir un style de gauche et sont plus susceptibles de passer &agrave; travers le crible id&eacute;ologique du gouvernement chinois. Les intellectuels d&#39;autres genres n&#39;ont pas cette chance. Dans le m&ecirc;me temps, il existe une autre raison qui se combine avec les raisons &eacute;voqu&eacute;es pr&eacute;c&eacute;demment&nbsp;: en tant que destinataires, la fa&ccedil;on de penser des intellectuels chinois ressemble plus &agrave; celle des intellectuels fran&ccedil;ais qu&rsquo;&agrave; celle des intellectuels britanniques et am&eacute;ricains dont elle diff&egrave;re sensiblement. Par cons&eacute;quent, les id&eacute;es fran&ccedil;aises sont plus assimilables par les intellectuels chinois. En r&eacute;sum&eacute;, d&#39;une part, la pens&eacute;e fran&ccedil;aise est plus compatible avec l&rsquo;id&eacute;ologie du gouvernement chinois, et, d&#39;autre part, elle pr&eacute;sente, aux yeux des intellectuels chinois, des affinit&eacute;s avec leurs propres aspirations.</span></span></span></span></p> <h4>&nbsp;</h4> <h4><span style="font-size:12pt"><span style="break-after:avoid"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:normal"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">La litt&eacute;rature est un bon &eacute;peron qui fait s&rsquo;&eacute;lancer le cheval de la r&eacute;volution</span></span></span></span></span></span></h4> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">La litt&eacute;rature r&eacute;volutionnaire a pour effet de promouvoir la r&eacute;volution politique. Avec la promotion de la litt&eacute;rature r&eacute;volutionnaire, la port&eacute;e de la r&eacute;volution politique s&rsquo;&eacute;largit et son action se prolonge. La r&eacute;volution politique pourra ainsi s&#39;&eacute;tendre au domaine spirituel dans lequel se situe la litt&eacute;rature, et &agrave; la litt&eacute;rature elle-m&ecirc;me.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">La&nbsp;R&eacute;volution&nbsp;am&eacute;ricaine n&rsquo;a pas laiss&eacute; autant de traces litt&eacute;raires. Elle n&#39;a pas eu beaucoup de pr&eacute;tendue pr&eacute;paration litt&eacute;raire, &agrave; part un petit pamphlet, <i>Common Sense</i> (<i>Le&nbsp;Sens commun</i>)&nbsp;de Thomas Paine (1776), avant la&nbsp;R&eacute;volution, et une collection <i>The</i>&nbsp;<i>Federalist&nbsp;Papers</i>&nbsp;(<i>Le&nbsp;F&eacute;d&eacute;raliste</i>, 1787-1788) pendant la&nbsp;R&eacute;volution. D&rsquo;ailleurs ces textes ne rel&egrave;vent pas de la litt&eacute;rature r&eacute;volutionnaire. Le premier &eacute;tait une &oelig;uvre h&acirc;tive qui d&eacute;fendait l&rsquo;id&eacute;e que le lien affectif entre les colonies et l&rsquo;Angleterre n&rsquo;existait plus et que les Am&eacute;ricains devaient s&rsquo;en rendre compte et accepter la contradiction r&eacute;elle entre l&rsquo;Am&eacute;rique et l&rsquo;Angleterre afin d&rsquo;engager le mouvement d&rsquo;ind&eacute;pendance. Le second diffusait la propagande de la nouvelle constitution&nbsp;: il tentait de convaincre les citoyens de voter en faveur de la Constitution de 1787 en comparant les caract&eacute;ristiques des syst&egrave;mes politiques. Ces deux exemples d&eacute;montrent le caract&egrave;re (ou ce que les critiques appellent les <i>limites historiques</i>) de la politique am&eacute;ricaine&nbsp;: elle s&rsquo;en tient au domaine politique et ne s&rsquo;&eacute;tend pas aux autres champs. C&rsquo;est surtout vrai du second ouvrage<span style="color:black">, lequel, dans cette p&eacute;riode cruciale, ne parle&nbsp;ni de&nbsp;&laquo;&thinsp;la transformation du caract&egrave;re du&nbsp;peuple&thinsp;&raquo;,&nbsp;ni&nbsp;de &laquo;&thinsp;la conscience &eacute;thique du peuple&nbsp;&raquo;, ni&nbsp;de &laquo;&thinsp;la r&eacute;volution&nbsp;culturelle&thinsp;&raquo;. Faut-il consid&eacute;rer que les exigences morales des contemporains &eacute;taient si &eacute;lev&eacute;es que ces derniers n&rsquo;avaient plus besoin de se perfectionner&nbsp;? Bien s&ucirc;r que non.</span> <span style="color:black">Le peuple am&eacute;ricain du 18<sup>e</sup> si&egrave;cle n&rsquo;&eacute;tait pas plus</span> <span style="color:black">stupide que les autres nations r&eacute;volutionnaires. Il poss&eacute;dait sa propre litt&eacute;rature, mais sa</span> <span style="color:black">conscience litt&eacute;raire est venue plus tard. Pendant l&rsquo;&egrave;re coloniale, avant et apr&egrave;s la fondation des &Eacute;tats-Unis, la litt&eacute;rature am&eacute;ricaine &eacute;tait principalement constitu&eacute;e de correspondances priv&eacute;es</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> ayant une certaine valeur esth&eacute;tique</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Elle comportait aussi des &oelig;uvres</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">politico-morales. Cependant, contrairement &agrave; la France, ces discussions id&eacute;ologiques n&#39;ont pas eu l&#39;effet de promotion d&#39;une litt&eacute;rature r&eacute;volutionnaire, ni d&#39;une classe litt&eacute;raire ind&eacute;pendante, et elles n&#39;ont pas permis d&rsquo;approfondir la critique culturelle.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Ces &laquo;&nbsp;lacunes&nbsp;&raquo; peuvent &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute;es comme la preuve du caract&egrave;re transitoire de la R&eacute;volution am&eacute;ricaine, qui &eacute;tait avant tout une r&eacute;forme politique.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Par cons&eacute;quent, les institutions et les politiciens am&eacute;ricains n&rsquo;ont</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">aucune profondeur culturelle, et la plupart des pr&eacute;sidents am&eacute;ricains depuis la fin du 19<sup>e</sup> si&egrave;cle sont plus connus pour les scandales auxquels ils sont associ&eacute;s que pour leurs comp&eacute;tences litt&eacute;raires. Mais une telle conception de la politique pr&eacute;sente un avantage&nbsp;: il existe une s&eacute;paration entre la politique et les autres champs qui garantit que les activit&eacute;s de la premi&egrave;re n&rsquo;atteindront pas en profondeur les seconds. Luo Longji, homme politique et intellectuel chinois,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">d&eacute;fend l&rsquo;id&eacute;e qu&rsquo;il faut administrer les questions politiques et techniciser les questions administratives. Selon lui, un bon r&eacute;gime politique devrait restreindre son champ</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">d&rsquo;intervention.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Il ne devrait ni &eacute;tendre son pouvoir, &eacute;vitant ainsi le populisme, ni chercher &agrave; am&eacute;liorer la moralit&eacute;, ni tenter de r&eacute;aliser une utopie. Avant la constitution de 1787, les&nbsp;&Eacute;tats-Unis&nbsp;test&egrave;rent le r&eacute;gime de la conf&eacute;d&eacute;ration en 1781, tentative rat&eacute;e durant laquelle le syst&egrave;me administratif fut presque paralys&eacute;. En ayant &agrave; l&rsquo;esprit les r&eacute;volutions fran&ccedil;aise et chinoise on pourrait &ecirc;tre tent&eacute; d&rsquo;expliquer cet &eacute;chec par une cause ext&eacute;rieure &agrave; la politique, en l&rsquo;occurrence l&rsquo;&eacute;tat de la culture, ce qui revient &agrave; en tenir tous les Am&eacute;ricains pour responsables. De cette fa&ccedil;on, les p&egrave;res fondateurs des &Eacute;tats-Unis avaient suffisamment de raisons de croire que c&rsquo;&eacute;tait un &eacute;chec culturel du &agrave; la faiblesse morale du peuple. Ils avaient m&ecirc;me des raisons de&nbsp;critiquer&nbsp;les &Eacute;tats qui cherchent uniquement leurs propres&nbsp;int&eacute;r&ecirc;ts&nbsp;et ignorent l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t g&eacute;n&eacute;ral de toute l&rsquo;Am&eacute;rique. Ils auraient pu reprocher au peuple am&eacute;ricain d&rsquo;&ecirc;tre &eacute;go&iuml;ste, ou d&eacute;noncer les id&eacute;es p&eacute;rim&eacute;es des milices am&eacute;ricaines, favorables &agrave; la monarchie, paralysant leur action face &agrave; l&rsquo;Angleterre. Au lieu d&rsquo;une r&eacute;forme politique, les &eacute;lites nord-am&eacute;ricaines&nbsp;avaient&nbsp;toutes les&nbsp;raisons&nbsp;d&rsquo;organiser un d&eacute;bat sur la fa&ccedil;on de &laquo;&thinsp;transformer les m&oelig;urs du peuple&thinsp;&raquo; et de lancer la r&eacute;volution culturelle.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Cependant, marqu&eacute;s par une vision positiviste, les p&egrave;res fondateurs consid&eacute;raient que la politique concerne la soci&eacute;t&eacute; plut&ocirc;t que la culture.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">L&rsquo;&eacute;chec&nbsp;de la conf&eacute;d&eacute;ration en Am&eacute;rique du Nord &eacute;tait un&nbsp;&eacute;chec politique qui ne devait&nbsp;pas&nbsp;&ecirc;tre &eacute;tendu &agrave; un d&eacute;bat culturel. Les politiciens ne devraient donc&nbsp;pas&nbsp;se d&eacute;rober face &agrave; leurs&nbsp;propres responsabilit&eacute;s envers le peuple ou certaines de ses tendances. &Agrave; l&#39;&eacute;poque, les Am&eacute;ricains, en pleine crise, risquaient de faire fausse route, comme les Fran&ccedil;ais en 1793, et d&rsquo;entrer dans une guerre culturelle</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">qui remettrait en question la nature humaine, ambitionnerait de remodeler la morale et de transformer le statut de citoyen. En France, la r&eacute;volution politique&nbsp;est finalement devenue une&nbsp;r&eacute;volution&nbsp;sociale. Au cours de la deuxi&egrave;me ann&eacute;e de la R&eacute;publique, la&nbsp;r&eacute;volution&nbsp;sociale est devenue une&nbsp;r&eacute;volution&nbsp;culturelle. Mais &agrave; Philadelphie, aux &Eacute;tats-Unis, confront&eacute;s &agrave; une frustration similaire, les politiciens am&eacute;ricains ont adopt&eacute; une autre solution&nbsp;: cinquante-cinq personnes se sont isol&eacute;es pour aborder des questions institutionnelles et techniques. C&rsquo;&eacute;tait plut&ocirc;t une n&eacute;gociation&nbsp;entre&nbsp;avocats et industriels qu&rsquo;un d&eacute;bat&nbsp;entre&nbsp;des hommes de lettres. Ainsi est n&eacute;e la premi&egrave;re constitution &eacute;crite de l&rsquo;histoire humaine, soumise ensuite au vote des citoyens. En outre, les quarante millions de citoyens qui&nbsp;avaient&nbsp;le droit de&nbsp;vote n&rsquo;&eacute;taient qu&rsquo;un groupe d&rsquo;agriculteurs. Ils n&rsquo;avaient peut-&ecirc;tre lu que deux livres&nbsp;: <i>Common&nbsp;Sense</i>&nbsp;et la <i>Bible</i>. Le jour du scrutin a &eacute;t&eacute; fix&eacute; au premier mardi de novembre parce que les fermiers, devaient, d&rsquo;une part, pouvoir r&eacute;colter, et, d&rsquo;autre part, se rendre &agrave; l&rsquo;&eacute;glise le dimanche matin. Sachant qu&rsquo;il leur fallait souvent environ une journ&eacute;e pour atteindre le bureau de vote le plus proche, en partant le dimanche apr&egrave;s-midi, ils pourraient arriver &agrave; temps pour voter.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Tous les &eacute;lecteurs n&rsquo;&eacute;tant pas capables de lire, des grains de ma&iuml;s ont tenu lieu de bulletins de vote. Aux &Eacute;tats-Unis, le syst&egrave;me &eacute;lectoral a ainsi respect&eacute; le niveau limit&eacute; de connaissances des &eacute;lecteurs et les habitudes &laquo;&thinsp;n&eacute;fastes&thinsp;&raquo; li&eacute;es &agrave; leurs croyances religieuses. Loin d&#39;&ecirc;tre modernes, ces habitudes remontent au r&egrave;gne de l&#39;agriculture. Malgr&eacute; l&#39;&egrave;re industrielle, elles sont toujours en vigueur de nos jours. Les Am&eacute;ricains ont &eacute;lu quarante-trois&nbsp;pr&eacute;sidents, sans jamais changer la date des &eacute;lections. Au d&eacute;part, les &eacute;lecteurs n&rsquo;&eacute;taient rien d&rsquo;autre qu&rsquo;un groupe d&rsquo;illettr&eacute;s et de gentilshommes de la campagne. Aux yeux des Chinois, cela ne devrait pas fonctionner. Une v&eacute;ritable r&eacute;volution devrait &ecirc;tre dans un autre ordre&nbsp;: elle devrait s&rsquo;appuyer sur des r&eacute;volutionnaires &eacute;rudits sortis de l&rsquo;universit&eacute;, d&rsquo;abord pour vaincre le gentleman&nbsp;(Washington), puis pour &eacute;clairer le paysan&nbsp;(soul&egrave;vement de&nbsp;Shays) et transformer le caract&egrave;re national &agrave; travers la &laquo;&thinsp;nouvelle litt&eacute;rature&thinsp;&raquo;, car ce n&rsquo;est que gr&acirc;ce &agrave; un tel processus que les agriculteurs&nbsp;pourront&nbsp;s&rsquo;&eacute;veiller culturellement, tout en emp&ecirc;chant des arrivistes comme Hamilton de les tromper. Imaginons que les jeunes intellectuels chinois soient pass&eacute;s par Philadelphie en 1787,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">ils en seraient probablement repartis d&eacute;go&ucirc;t&eacute;s, consid&eacute;rant la Constitution am&eacute;ricaine comme une constitution rurale exhalant une odeur de ma&iuml;s et de foin du 18<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. Comment cette &laquo;&thinsp;constitution d&eacute;pass&eacute;e&thinsp;&raquo;, qui n&rsquo;a pas &eacute;t&eacute; r&eacute;&eacute;crite depuis deux cents ans, pourrait-elle poss&eacute;der une v&eacute;ritable &laquo;&thinsp;profondeur culturelle&thinsp;&raquo;&thinsp;? M&ecirc;me si elle en a une, ce n&rsquo;est rien d&rsquo;autre qu&rsquo;une pauvre culture rurale.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Seule la culture fran&ccedil;aise peut plaire aux lettr&eacute;s chinois.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">La culture chinoise et la culture fran&ccedil;aise sont s&oelig;urs dans un sens plus profond.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Bien qu&rsquo;elles aient des sources historiques diff&eacute;rentes, elles partagent</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">la m&ecirc;me tension interne sur le plan politique :</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">dans les deux cas, les facteurs qui d&eacute;terminent la vie politique ne sont</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">pas uniquement de nature politique, mais aussi de nature culturelle. Ces facteurs cl&eacute;s, qui se situent dans le domaine de la litt&eacute;rature et de l&#39;id&eacute;ologie,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">sont donc discut&eacute;s par les &eacute;crivains et les philosophes en fonction de principes esth&eacute;tiques. Selon Tocqueville, si les Fran&ccedil;ais de l&#39;&eacute;poque avaient eu l&#39;occasion de participer &agrave; la vie politique au niveau national ou m&ecirc;me au niveau r&eacute;gional, ils auraient &eacute;t&eacute; plus m&eacute;fiants &agrave; l&rsquo;&eacute;gard des th&egrave;ses</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">purement th&eacute;oriques. De cette fa&ccedil;on, ils ne seraient pas laiss&eacute; duper par les id&eacute;es abstraites des &eacute;crivains de l&#39;&eacute;poque. En &eacute;tudiant la raison de la d&eacute;connexion de la&nbsp;politique avec la pratique chez les intellectuels fran&ccedil;ais, Tocqueville&nbsp;a constat&eacute;&nbsp;qu&rsquo;ils&nbsp;avaient &eacute;t&eacute; exclus de la gestion concr&egrave;te de l&rsquo;&Eacute;tat. Obnubil&eacute;s par leurs th&egrave;ses et aveugl&eacute;s par leur approche litt&eacute;raire, ils&nbsp;n&rsquo;ont pas su penser les r&eacute;formes. La fin de la supr&eacute;matie de la monarchie fran&ccedil;aise</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">s&rsquo;explique par cette schizophr&eacute;nie interne. Opprim&eacute;s par l&rsquo;autocratie, les hommes de lettres&nbsp;ne pouvaient explorer la politique que&nbsp;dans la litt&eacute;rature et la philosophie.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">C&rsquo;est pourquoi les hommes de lettres ont constamment chercher les &laquo;&nbsp;racines culturelles&nbsp;&raquo; des erreurs politiques.</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Le comble, c&#39;est que le gouvernement a m&ecirc;me encourag&eacute; les concours sur des questions politiques.</span></span></span></span></span></p> <h4>&nbsp;</h4> <h4><span style="font-size:12pt"><span style="break-after:avoid"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:normal"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">La R&eacute;volution fran&ccedil;aise face aux r&eacute;volutionnaires nord-am&eacute;ricains</span></span></span></span></span></span></h4> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">La g&eacute;n&eacute;ration des dirigeants am&eacute;ricains de l&rsquo;Assembl&eacute;e constituante a assist&eacute; &agrave; la R&eacute;volution fran&ccedil;aise et certains de ses membres y ont m&ecirc;me particip&eacute;. La R&eacute;volution nord-am&eacute;ricaine</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">s&rsquo;est termin&eacute;e peu avant le d&eacute;marrage d&rsquo;une nouvelle r&eacute;volution, cette fois sur le continent europ&eacute;en. Les r&eacute;volutionnaires am&eacute;ricains &eacute;prouvaient un sentiment ambivalent &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de la R&eacute;volution fran&ccedil;aise&nbsp;: ils s&rsquo;en sentaient &agrave; la fois proches et &eacute;loign&eacute;s. Bient&ocirc;t elle les a inqui&eacute;t&eacute;s.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">La plupart des dirigeants de la guerre d&rsquo;Ind&eacute;pendance ont particip&eacute; &agrave; la Convention constitutionnelle qui a suivi. La s&eacute;ance qui a r&eacute;uni le plus grand nombre de participants, cinquante-cinq, a fourni une excellente base pour une analyse sociologique &agrave; l&rsquo;historien de gauche Beard. Selon lui, ces</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">repr&eacute;sentants &eacute;taient pour la plupart des industriels ou des avocats, mais aucun d&rsquo;entre eux n&rsquo;&eacute;tait sans emploi, contrairement &agrave; ces lettr&eacute;s ou ces philosophes qui pr&eacute;tendent avoir acc&egrave;s aux choses spirituelles.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Ces participants &eacute;taient d&eacute;termin&eacute;s par leurs origines, notamment leur perspective </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">bourgeoise renforc&eacute;e par leurs activit&eacute;s parlementaires avant la R&eacute;volution,</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> le &laquo;&thinsp;caract&egrave;re d&rsquo;homme d&rsquo;affaires&thinsp;&raquo; d&eacute;velopp&eacute; dans les activit&eacute;s &eacute;conomiques, ou encore </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">l</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">&#39;habitude vulgaire de calculer les int&eacute;r&ecirc;ts et de ne pas s&rsquo;engager totalement.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">&laquo;&thinsp;La retenue et la courtoisie&thinsp;&raquo; proviennent de la culture protestante,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">comme l&rsquo;&laquo;&thinsp;hypocrisie&thinsp;&raquo; au sein du Parlement britannique consistant &agrave; d&eacute;battre</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">sans attaquer directement l&rsquo;adversaire. En contraste avec cela, le d&eacute;bat parlementaire qui fit suite &agrave; la R&eacute;volution fran&ccedil;aise surprit les Am&eacute;ricains&nbsp;: des dizaines d&rsquo;orateurs rugissaient simultan&eacute;ment, les auditeurs hurlaient dans la salle tumultueuse. Le pr&eacute;sident de s&eacute;ance dut m&ecirc;me stipuler que seules quatre personnes &eacute;taient autoris&eacute;es &agrave; parler en m&ecirc;me temps. &Agrave; tout moment, les r&eacute;volutionnaires, impatient&eacute;s par la proc&eacute;dure d&eacute;mocratiques, pouvaient prendre le parti de relancer la r&eacute;volution dans la rue. Dans cette agitation, un groupe de &laquo;&thinsp;r&eacute;volutionnaires professionnels&thinsp;&raquo; &eacute;mergea. Cela d&eacute;passait l&rsquo;imagination des Am&eacute;ricains&nbsp;: ces r&eacute;volutionnaires professionnels, apparus au 18ᵉ si&egrave;cle en France, faisaient de l&rsquo;action r&eacute;volutionnaire leur activit&eacute; principale</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Apr&egrave;s avoir particip&eacute; &agrave; la R&eacute;volution fran&ccedil;aise, ils voulaient la prolonger et jouer un r&ocirc;le politique en y consacrant tout leur temps. &Agrave; moins d&rsquo;&ecirc;tre renvers&eacute;s par d&rsquo;autres, ils risquaient de s&rsquo;accrocher au pouvoir. De leur point de vue, la vie de Washington &eacute;tait s&ucirc;rement m&eacute;diocre et ennuyeuse&nbsp;: ce dernier &eacute;tait en effet retourn&eacute; dans sa ferme sur la rivi&egrave;re Potomac apr&egrave;s deux mandats de pr&eacute;sident et &eacute;tait r&eacute;apparu comme un capitaliste ordinaire. Le choix de Washington n&rsquo;&eacute;tait pas de revenir &agrave; une vie normale, mais de reprendre la vulgaire carri&egrave;re du capitaliste</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">, </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">conform&eacute;ment aux d&eacute;terminations sociologiques de sa situation personnelle.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Avant de </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">succ&eacute;der &agrave; </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Washington, John Adams a &eacute;t&eacute; ambassadeur des &Eacute;tats-Unis en France.</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Pendant la guerre de 1778 en Am&eacute;rique du Nord, dont le r&eacute;sultat &eacute;tait impr&eacute;visible, il a re&ccedil;u des hommes de lettres et des penseurs fran&ccedil;ais &agrave; Paris pour prendre connaissances des id&eacute;es litt&eacute;raires et philosophiques des Lumi&egrave;res.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Il a constat&eacute; qu&rsquo;ils laissaient libre cours &agrave; leur fantaisie sans rien conna&icirc;tre de la politique et des affaires gouvernementales<a href="#_ftn3" name="_ftnref3" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[3]</span></span></span></span></span></span></a>. Tandis que pour les lecteurs chinois des si&egrave;cles suivants ces c&eacute;l&egrave;bres hommes de lettres fran&ccedil;ais sont tr&egrave;s importants, aux yeux de ce h&eacute;ros r&eacute;volutionnaire am&eacute;ricain, il en allait tout autrement&nbsp;: il voyait en Turgot un politicien d&eacute;pourvu de jugement et d&rsquo;exp&eacute;rience, en Voltaire un &laquo;&nbsp;menteur&nbsp;&raquo;, en Rousseau un &laquo;&nbsp;coxcomb et un satyre&nbsp;&raquo;, en Condorcet &agrave; la fois un &laquo;&nbsp;charlatan et un imb&eacute;cile&nbsp;&raquo; [&laquo;&nbsp;a quack&nbsp;&raquo;, a &laquo;&nbsp;fool&nbsp;&raquo;], et en D&rsquo;Alembert un &laquo; pou&nbsp;&raquo; ou une &laquo;&nbsp;tique &raquo; [A &laquo;&nbsp;louse&nbsp;&raquo;, a &laquo;&nbsp;tick&nbsp;&raquo;]<span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"> <a href="#_ftn4" name="_ftnref4" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[4]</span></span></span></span></span></a></span>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Il craignait alors que la pr&eacute;dilection des Fran&ccedil;ais pour la th&eacute;orie ait des cons&eacute;quences d&eacute;sastreuses. &Agrave; ses yeux les abstractions politiques fantastiques de Turgot, en particulier la th&eacute;orie du gouvernement &laquo;&nbsp;un et indivisible&nbsp;&raquo;, &eacute;taient myst&eacute;rieuses et d&eacute;nu&eacute;es de sens<a href="#_ftn5" name="_ftnref5" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[5]</span></span></span></span></span></span></a>. Comme Condorcet, s&rsquo;il s&rsquo;en tenait au r&ocirc;le de philosophe, il ne serait pas nuisible, mais en tant que l&eacute;gislateur, il risquait de d&eacute;truire les vertus qu&rsquo;il avait poursuivies. Adams &eacute;tait particuli&egrave;rement hostile</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">&agrave; la th&egrave;se de Condorcet sur la perfectibilit&eacute; illimit&eacute;e de l&rsquo;homme,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">et il rejetait l&rsquo;id&eacute;e selon </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">laquelle</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> les intellectuels seraient les &laquo;&nbsp;bienfaiteurs &eacute;ternels&nbsp;&raquo; de l&rsquo;humanit&eacute;. Selon lui, la v&eacute;n&eacute;ration des grands hommes produisait une nouvelle mythologie, extr&ecirc;mement pernicieuse</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">dans laquelle les &ecirc;tres humains prennent la place de Dieu. Condorcet estime que les principes de la Constitution fran&ccedil;aise sont &laquo;&nbsp;plus purs,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">plus pr&eacute;cis, plus profonds&nbsp;&raquo; que ceux de la Constitution am&eacute;ricaine.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Adams a inscrit quatre exclamations dans la marge de cette page&nbsp;: &laquo;&nbsp;Pure! Accurate&nbsp;! Profound&nbsp;! Indeed&nbsp;!<a href="#_ftn6" name="_ftnref6" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[6]</span></span></span></span></span></span></a>&thinsp;&raquo;. Lui-m&ecirc;me r&eacute;volutionnaire, Adams a per&ccedil;u une atmosph&egrave;re singuli&egrave;re dans la R&eacute;volution fran&ccedil;aise&nbsp;: transpos&eacute;es dans le domaine politique, les valeurs esth&eacute;tiques, qui structuraient l&eacute;gitimement les Belles-lettres</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">risquaient de conduire &agrave; la dictature. La passion irresponsable ferait monter et descendre la lame de la guillotine, car dans le domaine politique, le go&ucirc;t pour la litt&eacute;rature et la soif de sang</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">peuvent &ecirc;tre proportionnels</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Morris &eacute;tait ambassadeur des &Eacute;tats-Unis &agrave; Paris lorsque la R&eacute;volution fran&ccedil;aise &eacute;clata.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Il eut&nbsp;le privil&egrave;ge de voir se r&eacute;aliser ce qu&rsquo;Adams avait pr&eacute;dit. &Agrave; l&rsquo;Assembl&eacute;e l&eacute;gislative de 1789, les aristocrates lib&eacute;raux eurent l&rsquo;occasion de d&eacute;battre de la r&eacute;forme des institutions, notamment</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">de la distinction entre le droit de vote et le droit d&rsquo;&ecirc;tre &eacute;lu, des diff&eacute;rentes pr&eacute;rogatives du pouvoir l&eacute;gislatif et du pouvoir judiciaire, des restrictions n&eacute;cessaires au pouvoir ex&eacute;cutif du roi pour emp&ecirc;cher la dictature, etc. Certains de ceux qui particip&egrave;rent &agrave; la discussion &eacute;taient des juges et leurs id&eacute;es sur la r&eacute;forme du syst&egrave;me &eacute;taient remarquables, mais la Grande R&eacute;volution</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">s&rsquo;est brutalement radicalis&eacute;e et ces participants talentueux ont&nbsp;d&ucirc; quitter l&rsquo;Assembl&eacute;e&nbsp;l&eacute;gislative avant de tenter de fuir Paris. Morris et Lafayette sont devenus des amis proches durant la R&eacute;volution. Le second pr&eacute;conisait que la R&eacute;volution fran&ccedil;aise poursuive l&rsquo;exp&eacute;rience de la&nbsp;R&eacute;volution&nbsp;am&eacute;ricaine, mais il ne put pas&nbsp;freiner</span></span>&nbsp;<span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">l&rsquo;emballement fr&eacute;n&eacute;tique des &eacute;v&eacute;nements politiques.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">En juin 1789, lors d&rsquo;un bal &agrave; Paris, les deux hommes eurent&nbsp;une conversation que Morris &eacute;voque dans son journal en ces termes&nbsp;: &laquo;&nbsp;j&rsquo;ai cherch&eacute; des occasions de lui dire que si les personnes du tiers-&eacute;tat adoptaient une approche&nbsp;douce, leur&nbsp;r&eacute;volution&nbsp;pourrait r&eacute;ussir, mais que si elles utilisaient la violence, la&nbsp;R&eacute;volution&nbsp;&eacute;chouerait&nbsp;&raquo;<a href="#_ftn7" name="_ftnref7" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[7]</span></span></span></span></span></span></a>. Dans une lettre &agrave; son ami am&eacute;ricain, Morris &eacute;crit&nbsp;:</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">&laquo;&nbsp;les Am&eacute;ricains n&rsquo;abandonnent pas l&rsquo;exp&eacute;rience constitutionnelle et les traditions politiques de la p&eacute;riode coloniale, les Fran&ccedil;ais, quant &agrave; eux, pr&eacute;f&egrave;rent suivre de pr&eacute;tendus g&eacute;nies plut&ocirc;t que la raison. Ils&nbsp;remplacent&nbsp;l&rsquo;exp&eacute;rience de leurs pr&eacute;d&eacute;cesseurs par l&rsquo;exp&eacute;rimentation, ils&nbsp;pr&eacute;f&egrave;rent&nbsp;la foudre aux rayons&nbsp;du soleil,&nbsp;ils&nbsp;sont donc condamn&eacute;s &agrave; rester dans l&rsquo;obscurit&eacute;<a href="#_ftn8" name="_ftnref8" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[8]</span></span></span></span></span></span></a>.&nbsp;&raquo;</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">La R&eacute;volution am&eacute;ricaine est soyeuse et persistante comme la lumi&egrave;re du jour. La R&eacute;volution fran&ccedil;aise ressemble &agrave; un &eacute;clair qui explose dans le noir avec des coups de tonnerre spectaculaires et des pluies intenses, elle bouleverse le vieux r&eacute;gime comme l&rsquo;&eacute;clair illumine tous les coins du monde, mais rapidement, tous se retrouvent dans le noir.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun">&nbsp;<span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Hamilton et Lafayette, qui avaient &agrave; peu pr&egrave;s le m&ecirc;me &acirc;ge, ont tous deux &eacute;t&eacute; des acteurs importants, proches de Washington, lors de la bataille de Valley Forge. Le premier, qui est l&rsquo;un des p&egrave;res fondateurs des &Eacute;tats-Unis, venant d&rsquo;une famille modeste, aurait eu de bonnes raisons de devenir populiste,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">mais il comprenait la relation profonde existant entre les acteurs politiques et la crise sociale, de sorte qu&rsquo;il devint &agrave; son tour l&rsquo;ennemi le plus acharn&eacute; du populisme. La nature humaine comprend &agrave; la fois le d&eacute;sir de pouvoir des humbles et la soif de pouvoir des nobles.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Tous les moyens de restreindre le pouvoir doivent viser le pouvoir lui-m&ecirc;me et non un groupe de personnes. Nous n&rsquo;avons aucune raison de nous m&eacute;fier de ceux qui abusent de leur pouvoir et de croire en m&ecirc;me temps que les autres n&rsquo;en feraient pas de m&ecirc;me s&rsquo;ils le d&eacute;tenaient. Hamilton, qui fut l&rsquo;un des principaux r&eacute;dacteurs de la Constitution de 1787, a &eacute;t&eacute; le premier critique de la R&eacute;volution fran&ccedil;aise, la r&eacute;volution s&oelig;ur par-del&agrave; l&rsquo;oc&eacute;an. Lorsque la situation a commenc&eacute; &agrave; s&rsquo;aggraver &agrave; Paris, il s&rsquo;est inqui&eacute;t&eacute; du r&ocirc;le des lettr&eacute;s et des philosophes dans cette &eacute;volution.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Ainsi &eacute;crit-il &agrave; Lafayette&nbsp;: &laquo;&thinsp;j&rsquo;ai peur des illusions de vos politiciens philosophes.&thinsp;&raquo; Selon lui, ces th&eacute;oriciens &eacute;taient d&eacute;connect&eacute;s de la r&eacute;alit&eacute;<a href="#_ftn9" name="_ftnref9" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[9]</span></span></span></span></span></span></a>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Comme Washington, il estime que la vertu essentielle du gouvernement est la capacit&eacute; de prendre des d&eacute;cisions, de d&eacute;lib&eacute;rer et d&rsquo;innover. Il attache &eacute;galement une grande importance &agrave; la continuit&eacute; du syst&egrave;me<a href="#_ftn10" name="_ftnref10" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[10]</span></span></span></span></span></span></a>. Selon lui, il serait plus dangereux de transf&eacute;rer le pouvoir &agrave; des lettr&eacute;s et des philosophes inexp&eacute;riment&eacute;s que de c&eacute;der le pouvoir &agrave; des empereurs autoritaire<a href="#_ftn11" name="_ftnref11" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[11]</span></span></span></span></span></span></a>.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Dans sa correspondance avec George Washington, Hamilton exprime son scepticisme &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de la temp&ecirc;te politique</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">touchant la France</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">, </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">car, selon lui, &laquo;&thinsp;les innovations prodigieuses&thinsp;&raquo; et &laquo;&thinsp;l&rsquo;agitation excessive&thinsp;&raquo; ne sont pas de bon augure pour l&rsquo;ordre et la sant&eacute; de la soci&eacute;t&eacute; fran&ccedil;aise<a href="#_ftn12" name="_ftnref12" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[12]</span></span></span></span></span></span></a>. Il &eacute;tait convaincu que le gouvernement avait davantage besoin d&rsquo;une base solide que des &eacute;motions d&eacute;brid&eacute;es des &eacute;crivains et des philosophes. Bien qu&rsquo;il ait &eacute;t&eacute; l&rsquo;un des concepteurs de la nouvelle constitution et du syst&egrave;me f&eacute;d&eacute;ral, il a toujours insist&eacute; sur le fait que &laquo;&thinsp;l&rsquo;exp&eacute;rience est le guide du jugement humain pour faire le moins d&rsquo;erreurs<a href="#_ftn13" name="_ftnref13" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[13]</span></span></span></span></span></span></a>&thinsp;&raquo;.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <h4><span style="font-size:12pt"><span style="break-after:avoid"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:normal"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Le carnaval r&eacute;volutionnaire et la r&eacute;forme constitutionnelle</span></span></span></span></span></span></h4> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Au d&eacute;but de la R&eacute;volution, les Fran&ccedil;ais consid&eacute;raient encore l&rsquo;Am&eacute;rique comme un r&eacute;gime pionnier. Mais, avec la radicalisation du mouvement r&eacute;volutionnaire, ils eurent de plus en plus de mal &agrave; supporter les habitudes vulgaires des Am&eacute;ricains. Gris&eacute;s par leurs grands id&eacute;aux, ils estim&egrave;rent bient&ocirc;t que Am&eacute;ricains devraient consid&eacute;rer la France comme leur sauveur.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Montmorency allait jusqu&rsquo;&agrave; dire&nbsp;: &laquo;&thinsp;Suivons l&rsquo;exemple des &Eacute;tats-Unis, ils ont donn&eacute; un grand exemple au nouvel h&eacute;misph&egrave;re, donnons-le &agrave; l&rsquo;univers<a href="#_ftn14" name="_ftnref14" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[14]</span></span></span></span></span></span></a> [&hellip;] &raquo;. Selon Condorcet, la r&eacute;volution am&eacute;ricaine n&rsquo;&eacute;tait qu&rsquo;une pr&eacute;paration &agrave; la R&eacute;volution fran&ccedil;aise, dont les principes seraient plus purs, plus pr&eacute;cis et plus profonds<a href="#_ftn15" name="_ftnref15" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[15]</span></span></span></span></span></span></a>. De son c&ocirc;t&eacute;, Dupont demande en 1788&nbsp;: &laquo;&thinsp;Pourquoi parler du meilleur syst&egrave;me existant&nbsp;? Pourquoi ne pas parler d&rsquo;un meilleur syst&egrave;me possible&nbsp;?&nbsp;&raquo;. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Beaucoup de gens r&ecirc;vaient de se d&eacute;barrasser compl&egrave;tement des traditions et de construire un gouvernement fond&eacute; que sur les v&eacute;rit&eacute;s des Lumi&egrave;res.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Rabaut de Saint-&Eacute;tienne d&eacute;clare ainsi fi&egrave;rement&nbsp;: &laquo;&thinsp;Nation fran&ccedil;aise, vous n&rsquo;&ecirc;tes pas faite pour recevoir l&rsquo;exemple, mais pour le donner<a href="#_ftn16" name="_ftnref16" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[16]</span></span></span></span></span></span></a>&raquo;</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Les dirigeants des jacobins estimaient que la France n&rsquo;avait plus besoin de se laisser guider par la R&eacute;volution am&eacute;ricaine. Louis Antoine Le&oacute;n de Saint-Just m&eacute;prisait le syst&egrave;me f&eacute;d&eacute;ral des &Eacute;tats-Unis. Il se moquait du fait que les &Eacute;tats-Unis n&rsquo;&eacute;taient pas du tout une r&eacute;publique, mais seulement un ensemble</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">fragment&eacute; de d&eacute;sesp&eacute;r&eacute;s<a href="#_ftn17" name="_ftnref17" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[17]</span></span></span></span></span></span></a>. Les plus satisfaits &eacute;taient les anarchistes. Le Prussien Bernard Guillaume Goltz a trouv&eacute; sa place dans la R&eacute;volution fran&ccedil;aise. Il affirmait &ecirc;tre un &laquo;&thinsp;repr&eacute;sentant humain&thinsp;&raquo; et d&eacute;clarait fi&egrave;rement que les &Eacute;tats-Unis enviaient en priv&eacute; le gouvernement fran&ccedil;ais, accusant les Am&eacute;ricains de manquer de perspicacit&eacute; &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de la politique fran&ccedil;aise<a href="#_ftn18" name="_ftnref18" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[18]</span></span></span></span></span></span></a>. Compar&eacute;s aux r&eacute;volutionnaires radicaux du continent europ&eacute;en qui critiquaient avec virulence l&rsquo;Ancien R&eacute;gime, les r&eacute;volutionnaires am&eacute;ricains &eacute;taient beaucoup plus discrets.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Jefferson et Madison ont m&ecirc;me admis que si le Parlement de Londres avait pu c&eacute;der quelques si&egrave;ges aux Am&eacute;ricains, la R&eacute;volution ne se serait pas produite<a href="#_ftn19" name="_ftnref19" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[19]</span></span></span></span></span></span></a>. Dans la D&eacute;claration d&rsquo;Ind&eacute;pendance, Jefferson souligne avec lucidit&eacute; que ce que les Am&eacute;ricains demandaient, c&rsquo;&eacute;tait seulement de recouvrer leurs droits et leurs libert&eacute;s d&eacute;truits par le Congr&egrave;s et George&nbsp;III. En d&rsquo;autres termes, la R&eacute;volution am&eacute;ricaine ne repr&eacute;sente rien de plus que la volont&eacute; des r&eacute;volutionnaires de retrouver leur &eacute;tat d&rsquo;origine. Ceci correspond &agrave; l&rsquo;&eacute;tymologie du mot &laquo;&thinsp;r&eacute;volution&thinsp;&raquo; dans sa signification astronomique&nbsp;: le corps c&eacute;leste se d&eacute;place autour du centre du cercle et se retrouve par la suite au point de d&eacute;part. <i>A contrario</i>, aux yeux des Fran&ccedil;ais,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">la r&eacute;volution ne consiste pas &agrave; revenir au point de d&eacute;part, mais &agrave; rompre avec le point de d&eacute;part. Le but de la R&eacute;volution fran&ccedil;aise, dans sa radicalit&eacute;,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">&eacute;tait de d&eacute;truire l&rsquo;Ancien R&eacute;gime afin de red&eacute;finir la structure politique, juridique et sociale du pays. Les r&eacute;volutionnaires esp&eacute;raient rompre compl&egrave;tement avec des milliers d&rsquo;ann&eacute;es d&rsquo;histoire.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Le point de vue britannique est proche de celui des Am&eacute;ricains</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">contre lesquels ils viennent de combattre. Outre les fameux discours publi&eacute;s par Edmund Burke, John Emerich Edward Dalberg-Acton a &eacute;galement d&eacute;clar&eacute;&nbsp;: &laquo;&thinsp;ce que la France a appris des Am&eacute;ricains, c&rsquo;est la th&eacute;orie de la r&eacute;volution, pas la th&eacute;orie du gouvernement. Ils ont appris le courage de rompre avec la tradition, mais ils n&rsquo;ont pas appris l&rsquo;art de b&acirc;tir<a href="#_ftn20" name="_ftnref20" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[20]</span></span></span></span></span></span></a>.&nbsp;&raquo; La r&eacute;volution est toujours plus facile que la r&eacute;forme, et la construction est un m&eacute;tier plus difficile que l&rsquo;art sc&eacute;nique. Le moteur de la &eacute;volution am&eacute;ricaine n&rsquo;est pas la croyance au pouvoir, mais la fid&eacute;lit&eacute; aux proc&eacute;dures rigoureuses et m&ecirc;me fastidieuses du Congr&egrave;s.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Il a fallu quelques mois aux Am&eacute;ricains pour entamer une discussion &agrave; l&rsquo;&eacute;chelle nationale et ils ont finalement r&eacute;dig&eacute; une constitution originale et la D&eacute;claration des droits. Aux yeux des Fran&ccedil;ais, pris dans l&rsquo;&eacute;lan d&rsquo;une r&eacute;volution violente, les Am&eacute;ricains paraissaient lents et disciplin&eacute;s. Comment le syst&egrave;me juridique peut-il limiter le pouvoir des individus &thinsp;? Lorsque la R&eacute;volution a rencontr&eacute; une r&eacute;sistance et a reflu&eacute;, Robespierre s&rsquo;est interrog&eacute; avec d&eacute;p&icirc;t&nbsp;: &laquo;&thinsp;mais le peuple&nbsp;! Quelle autre loi peut-il suivre, que la justice et la raison appuy&eacute;es de sa toute-puissance&thinsp;?&thinsp;&raquo;<a href="#_ftn21" name="_ftnref21" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[21]</span></span></span></span></span></span></a>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">La th&egrave;se de la &laquo;&thinsp;volont&eacute; g&eacute;n&eacute;rale&thinsp;&raquo; de Rousseau est devenue </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">le</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> mot d&rsquo;ordre de la grande R&eacute;volution. Emmanuel-Joseph Siey&egrave;s estime que le mot-cl&eacute; qui a fa&ccedil;onn&eacute; la politique r&eacute;volutionnaire et y devenu</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">un mantra pour la Nouvelle-France n&rsquo;est autre qu&rsquo;&laquo;&thinsp;uni&thinsp;&raquo;.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">&laquo;&thinsp;La France unifi&eacute;e et indivisible&thinsp;&raquo; fut le slogan le plus r&eacute;pandu durant la R&eacute;volution.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Cependant, cette unit&eacute; &eacute;tait aussi le but poursuivi par les trois derniers rois, y compris Louis XVI qui venait d&rsquo;&ecirc;tre d&eacute;capit&eacute;. L&rsquo;unit&eacute;, l&rsquo;ins&eacute;parabilit&eacute;, l&rsquo;innocence immacul&eacute;e, les qualit&eacute;s du roi mi-homme&nbsp;mi-dieu &eacute;taient d&eacute;sormais devenues les qualit&eacute;s du peuple r&eacute;volutionnaire.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Tuteur de Louis&nbsp;XIV et penseur, Bossuet avait enseign&eacute; &agrave; son &eacute;l&egrave;ve que tous les pays divis&eacute;s seront d&eacute;truits, car le seigneur est oppos&eacute; &agrave; la division<a href="#_ftn22" name="_ftnref22" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[22]</span></span></span></span></span></span></a>.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Siey&egrave;s, pour sa part, estimait que le corps du roi symbolisait un pays qui ne peut &ecirc;tre divis&eacute;.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">De m&ecirc;me, selon lui, tous les pays du monde devraient &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute;s comme indissociables<a href="#_ftn23" name="_ftnref23" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[23]</span></span></span></span></span></span></a>. Enfin, le jacobin Hydens a d&eacute;clar&eacute; qu&rsquo;il pr&eacute;f&eacute;rerait que 25 millions de Fran&ccedil;ais meurent un million de fois, plut&ocirc;t que de voir la R&eacute;publique d&eacute;truite une seule fois<a href="#_ftn24" name="_ftnref24" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[24]</span></span></span></span></span></span></a>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Le plaidoyer en faveur de l&rsquo;unit&eacute; du peuple ne garantit pas sa v&eacute;ritable r&eacute;alisation, et</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">il entra&icirc;ne toute la nation dans la fr&eacute;n&eacute;sie de la guerre civile, du dualisme et du manich&eacute;isme. La suite a &eacute;t&eacute; bien d&eacute;crite par Robert Roswell Palmer&nbsp;: un conflit entre &laquo;&thinsp;le peuple&thinsp;&raquo; et &laquo;&thinsp;le non-peuple&thinsp;&raquo;, &laquo;&thinsp;l&rsquo;&Eacute;tat&thinsp;&raquo; et &laquo;&thinsp;les traitres&thinsp;&raquo;. Cela conduit &agrave; former deux camps, celui des r&eacute;volutionnaires et des patriotes, et celui des ennemis et des tra&icirc;tres. Le peuple justicier s&rsquo;est uni pour exclure les contre-r&eacute;volutionnaires. Tocqueville a soulign&eacute; le c&ocirc;t&eacute; obscur</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">de l&rsquo;autoritarisme</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">durant cet &eacute;pisode. Selon lui, sous la pression de l&rsquo;unit&eacute;, les individus ont pr&eacute;f&eacute;r&eacute; garder le silence sur les mani&egrave;res normales d&rsquo;exprimer les d&eacute;saccords et de r&eacute;soudre les conflits<a href="#_ftn25" name="_ftnref25" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[25]</span></span></span></span></span></span></a>. Dans ce carnaval politique, les individus avaient le sentiment d&rsquo;&ecirc;tre au service de la cause r&eacute;volutionnaire et de lutter ensemble en tant que fr&egrave;res. Les d&eacute;saccords n&rsquo;y avaient pas leur place, car l&rsquo;heure &eacute;tait au consensus et il fallait les taire.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <h4><span style="font-size:12pt"><span style="break-after:avoid"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:normal"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">La R&eacute;volution nord-am&eacute;ricaine&nbsp;: reconna&icirc;tre la nature humaine et s&rsquo;adapter &agrave; elle<a href="#_ftn26" name="_ftnref26" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[26]</span></span></span></span></span></span></a></span></span></span></span></span></span></h4> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Madison a pos&eacute; la question suivante</span></span>&nbsp;<span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">: pouvons-nous &eacute;liminer compl&egrave;tement les diff&eacute;rences et les dissensions au sein de la soci&eacute;t&eacute;&thinsp;? Le pays peut-il &ecirc;tre vraiment unifi&eacute;&thinsp;? M&ecirc;me si un certain parti peut r&eacute;aliser une unit&eacute; en outrepassant les lois, ce choix est inacceptable. Ce serait sacrifier la libert&eacute;. Comprendre ce probl&egrave;me est pr&eacute;cis&eacute;ment l&rsquo;essence de la politique. Madison utilise une m&eacute;taphore pour illustrer son propos&nbsp;: la lutte entre les camps est essentielle &agrave; la libert&eacute;, comme l&rsquo;air est n&eacute;cessaire au feu. Or, la libert&eacute; donne naturellement naissance aux oppositions. Par cons&eacute;quent, l&rsquo;&eacute;limination des luttes politiques &eacute;liminera &eacute;galement la libert&eacute;, tout comme le feu s&rsquo;&eacute;teint apr&egrave;s que l&rsquo;air a &eacute;t&eacute; &eacute;vacu&eacute;<a href="#_ftn27" name="_ftnref27" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[27]</span></span></span></span></span></span></a>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Existe-t-il un autre moyen d&rsquo;atteindre l&rsquo;unit&eacute;&thinsp;? Non. Selon Madison, l&rsquo; unification n&rsquo;est qu&rsquo;un fantasme, existant seulement dans l&rsquo;esprit des th&eacute;oriciens. Seuls le sage retir&eacute; dans un monast&egrave;re pense que</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">tous les citoyens peuvent partager un m&ecirc;me point de vue, les m&ecirc;mes passions et les m&ecirc;mes int&eacute;r&ecirc;ts. Dans la vie r&eacute;elle, l&rsquo;unit&eacute; parfaite des int&eacute;r&ecirc;ts, des opinions et des passions ne peut se r&eacute;aliser<a href="#_ftn28" name="_ftnref28" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[28]</span></span></span></span></span></span></a>. Les d&eacute;saccords et les conflits sont impossibles &agrave; &eacute;viter, car les facteurs sous-jacents de la lutte des camps sont enracin&eacute;s dans la nature humaine<a href="#_ftn29" name="_ftnref29" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[29]</span></span></span></span></span></span></a>.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Ce n&rsquo;est pas la raison, mais la passion et les int&eacute;r&ecirc;ts personnels qui dominent constamment les affaires humaines. Madison &eacute;crit, dans le 55ᵉ chapitre de l&rsquo;<i>Anthologie des F&eacute;d&eacute;ralistes</i>&nbsp;:</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">&laquo;&nbsp;Dans tous les rassemblements, la passion prend in&eacute;vitablement la place de la raison. Si chaque citoyen ath&eacute;nien avait &eacute;t&eacute; un Socrate, cela n&rsquo;aurait pas emp&ecirc;ch&eacute; chaque assembl&eacute;e d&rsquo;&ecirc;tre une foule&nbsp;&raquo;.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Aux &Eacute;tats-Unis, les conflits politiques sont aussi fr&eacute;quents que les matchs de baseball ou les rassemblements urbains. Chaque fois qu&rsquo;il est confront&eacute; &agrave; des conflits aigus, le syst&egrave;me politique, au lieu d&rsquo;&ecirc;tre paralys&eacute;, devient plus dynamique. Lorsque Jefferson, Hamilton, Lincoln, Douglas, Roosevelt et Hoover n&rsquo;&eacute;taient pas d&rsquo;accord, ils b&eacute;n&eacute;ficiaient tous du droit de pr&eacute;senter leurs propres opinions et de les d&eacute;fendre<a href="#_ftn30" name="_ftnref30" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[30]</span></span></span></span></span></span></a>. Ainsi quand, en 1936, la politique novatrice de Franklin Roosevelt fut attaqu&eacute;e et injuri&eacute;e par des hommes d&rsquo;affaires et des banquiers, Roosevelt, devant la foule r&eacute;unie &agrave; Madison Square, se contenta de leur r&eacute;pondre&nbsp;: &laquo;&nbsp;Ils sont unanimes dans leur haine &agrave; mon &eacute;gard, et j&rsquo;accueille chaleureusement leur haine.&nbsp;&raquo;</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Le syst&egrave;me constitutionnel mis en place aux &Eacute;tats-Unis en 1787 n&rsquo;a pas compl&egrave;tement &eacute;limin&eacute; les conflits historiques, au contraire, il les a combin&eacute;s comme des facteurs traditionnels. Le pr&eacute;sident doit &ecirc;tre &eacute;lu d&eacute;mocratiquement, ce qui repr&eacute;sente la victoire de la d&eacute;mocratie, mais la concentration du pouvoir pr&eacute;sidentiel rappelle celui des chefs de tribu ou des monarques. Le Congr&egrave;s se compose de deux assembl&eacute;es&nbsp;: le S&eacute;nat,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">qui s&rsquo;apparente &agrave; un parlement noble, et la chambre des repr&eacute;sentants, qui ressemble &agrave; un parlement d&eacute;mocratique. Les juges de la Cour supr&ecirc;me n&rsquo;ont rien &agrave; voir avec le syst&egrave;me d&eacute;mocratique, ils sont nomm&eacute;s &agrave; vie par le pr&eacute;sident.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Il s&rsquo;agit simplement de l&rsquo;h&eacute;ritage du syst&egrave;me des anciens soldats romains. Le syst&egrave;me politique des &Eacute;tats-Unis repr&eacute;sente donc l&rsquo;unit&eacute; de la d&eacute;mocratie, de la politique aristocratique, de la politique des a&icirc;n&eacute;s et de la monarchie. M&eacute;lange de l&rsquo;esprit de la politique moderne avec celui de la politique ancienne, ce syst&egrave;me est une &laquo;&thinsp;r&eacute;publique composite&thinsp;&raquo;. Par contre, aux yeux des Fran&ccedil;ais, l&rsquo;esprit de la r&eacute;publique est le contraire de la monarchie. Les Fran&ccedil;ais estiment que la R&eacute;publique ne peut &ecirc;tre r&eacute;alis&eacute;e autrement que</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">par la d&eacute;mocratie directe, et que les droits parlementaires et le pouvoir administratif ne peuvent &ecirc;tre dissoci&eacute;s. La cons&eacute;quence en est que la R&eacute;volution fran&ccedil;aise s&rsquo;est transform&eacute;e en un coup de foudre, ce qui &eacute;tait totalement contraire au caract&egrave;re souple de la R&eacute;volution nord-am&eacute;ricaine, comparable au soleil d&rsquo;hiver. Dans la perspective de Rousseau et de la R&eacute;volution fran&ccedil;aise, si quelqu&rsquo;un n&rsquo;est pas d&rsquo;accord avec la volont&eacute; g&eacute;n&eacute;rale, &laquo;&nbsp;on le forcera d&rsquo;&ecirc;tre libre&nbsp;&raquo;. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Madison pense que la caract&eacute;ristique marquante de la R&eacute;volution am&eacute;ricaine est</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">de se conformer &agrave; la nature humaine, tout en reconnaissant son c&ocirc;t&eacute; sombre. Ayant contribu&eacute; &agrave; la cr&eacute;ation du gouvernement am&eacute;ricain, il a reconnu que le gouvernement n&rsquo;est qu&rsquo;une combinaison de passions qui ne serait pas n&eacute;cessaire si tous les individus &eacute;taient vertueux.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Il n&rsquo;a jamais cru aux id&eacute;aux politiques de nature utopique, et n&rsquo;a jamais essay&eacute; de transformer l&rsquo;humanit&eacute; comme l&rsquo;ont fait les Fran&ccedil;ais. Il ne croyait pas que le gouvernement puisse reposer sur le projet d&rsquo;am&eacute;liorer la nature humaine. La d&eacute;mocratie n&rsquo;est pas seulement li&eacute;e aux vertus humaines. Bien s&ucirc;r, l&rsquo;humanit&eacute; comporte une certaine id&eacute;e du bien, sinon, le remplacement de la dictature autoritaire par la d&eacute;mocratie ne serait pas un progr&egrave;s, et l&rsquo;humanisme n&rsquo;aurait aucune valeur, mais l&rsquo;humanit&eacute; a aussi un c&ocirc;t&eacute; sombre et la d&eacute;mocratie est &eacute;troitement li&eacute;e &agrave; cette dimension n&eacute;gative de la nature humaine.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">D&rsquo;une part, la politique d&eacute;mocratique s&rsquo;oppose aux abus de la monarchie, d&rsquo;autre part, elle s&rsquo;oppose &eacute;galement &agrave; la violence des r&eacute;volutionnaires.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Ce n&rsquo;est qu&rsquo;en comprenant la relation entre la d&eacute;mocratie et les diff&eacute;rents aspects</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">de la nature humaine que nous pourrons comprendre ce proverbe bien connu en Am&eacute;rique du Nord&nbsp;: &laquo;&thinsp;Puisque</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">la nature humaine est bonne, la d&eacute;mocratie est possible&thinsp;; puisque la nature humaine est mauvaise, la d&eacute;mocratie est un <i>must</i>.&thinsp;&raquo;</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Comme nous l&rsquo;avons dit pr&eacute;c&eacute;demment, bien que la France ait connu une grande r&eacute;volution, elle n&rsquo;a pas bien compris la nature humaine. Les Lumi&egrave;res, avant la R&eacute;volution, ont surestim&eacute; la bont&eacute; de l&rsquo;humanit&eacute; et sous-estim&eacute; sa perversit&eacute;. Ce n&rsquo;est qu&rsquo;en 1789, </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">l</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">orsque la nature humaine &eacute;go&iuml;ste s&rsquo;est manifest&eacute;e comme une r&eacute;sistance &agrave; la R&eacute;volution, que son c&ocirc;t&eacute; obscur s&rsquo;est r&eacute;v&eacute;l&eacute; d&rsquo;une mani&egrave;re cruelle. Sous l&rsquo;influence de la philosophie de la perfectibilit&eacute;, lorsque la R&eacute;volution a rencontr&eacute; des revers, les r&eacute;volutionnaires ont d&eacute;cid&eacute; de transformer la nature humaine, de cr&eacute;er de nouveaux &ecirc;tres humains. La relation entre la R&eacute;volution et l&rsquo;humanit&eacute; s&rsquo;est enti&egrave;rement transform&eacute;e</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">ce qui a conduit &agrave; ce paradoxe&nbsp;: les r&eacute;volutionnaires ont promis de lib&eacute;rer l&rsquo;humanit&eacute;, mais l&rsquo;humanit&eacute; lib&eacute;r&eacute;e s&rsquo;est dirig&eacute;e vers la contre-r&eacute;volution. Les r&eacute;volutionnaires ont alors d&eacute;clar&eacute; qu&rsquo;ils ne s&rsquo;agissait pas seulement de lib&eacute;rer les hommes, mais de les transformer.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">D&egrave;s lors, ils n&rsquo;avaient plus d&rsquo;autre choix que de poursuivre la R&eacute;volution. La R&eacute;volution a ainsi d&eacute;vor&eacute; ses propres &laquo;&thinsp;enfants&thinsp;&raquo;, pas uniquement les r&eacute;volutionnaires, mais le peuple dont la lib&eacute;ration &eacute;tait le but initial de la R&eacute;volution. La R&eacute;volution &eacute;tait, &agrave; l&rsquo;origine, destin&eacute;e &agrave; lib&eacute;rer l&rsquo;humanit&eacute;, mais en d&eacute;finitive, elle a fait de l&rsquo;humanit&eacute; son ennemie et a voulu la r&eacute;former de force.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Elle a renvers&eacute; son intention initiale, comme un python gigantesque qui se mord la queue. La d&eacute;mocratie est devenue antid&eacute;mocratique. Le noble esprit de la r&eacute;volution s&rsquo;est finalement laiss&eacute; entra&icirc;ner par les passions vulgaires. Si l&rsquo;on voulait donner un &eacute;quivalent fran&ccedil;ais du proverbe am&eacute;ricain, cela ressemblerait probablement &agrave; ceci&nbsp;: &laquo;&thinsp;Puisque la nature humaine est bonne, la r&eacute;volution est possible. Puisque la nature humaine est mauvaise, la r&eacute;volution doit continuer &eacute;ternellement.&nbsp;&raquo; Quand la r&eacute;volution s&rsquo;ach&egrave;vera-t-elle&thinsp;?</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Le point final sera le point de d&eacute;part lui-m&ecirc;me&nbsp;:</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">elle &eacute;tait faite pour l&rsquo;humanit&eacute;, et elle &eacute;tait condamn&eacute;e &agrave; &eacute;liminer la nature humaine.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Par cons&eacute;quent, la R&eacute;volution fran&ccedil;aise s&rsquo;est &eacute;gar&eacute;e.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Elle a d&ucirc; se poursuivre et a fini par nier son propre objectif. La R&eacute;volution s&rsquo;est transform&eacute;e en contre-r&eacute;volution et a ruin&eacute; tous ses fruits. Les contre-r&eacute;volutionnaires finirent par massacrer les r&eacute;volutionnaires. Ainsi s&rsquo;est achev&eacute;e la R&eacute;volution fran&ccedil;aise. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <h4><span style="font-size:12pt"><span style="break-after:avoid"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:normal"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">La plus petite r&eacute;volution est la meilleure r&eacute;volution</span></span></span></span></span></span></h4> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">La r&eacute;volution a-t-elle le droit de transformer l&rsquo;humanit&eacute;&thinsp;? La r&eacute;volution doit-elle &ecirc;tre limit&eacute;e ou illimit&eacute;e&thinsp;?</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Doit-elle s&rsquo;arr&ecirc;ter devant la nature humaine et le royaume spirituel humain, ou devrait-elle les transformer directement&thinsp;? La r&eacute;ponse &agrave; ces questions est ce qui diff&eacute;rencie fondamentalement les deux r&eacute;volutions jumelles. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Il existe deux strat&eacute;gies diff&eacute;rentes pour les Lumi&egrave;res, le <i>big-bang</i> ou la voie douce. Les Lumi&egrave;res n&rsquo;ont pas directement men&eacute; &agrave; la Grande R&eacute;volution, mais elles ont d&eacute;termin&eacute; sa forme. Les Lumi&egrave;res fran&ccedil;aises pr&eacute;supposaient qu&rsquo;il &eacute;tait possible de faire confiance &agrave; la nature humaine &agrave; condition qu&rsquo;elle soit &eacute;duqu&eacute;e, et que seule la transformation de l&rsquo;humanit&eacute; pouvait permettre de transformer la soci&eacute;t&eacute;. Une telle id&eacute;e a conduit &agrave; la perte de contr&ocirc;le du mouvement r&eacute;volutionnaire. Tout en d&eacute;truisant le c&eacute;saropaptisme de l&rsquo;Ancien R&eacute;gime, la R&eacute;volution en a introduit une nouvelle forme</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Les Lumi&egrave;res &eacute;cossaises ont diffus&eacute; le scepticisme, qui a m&ecirc;me vis&eacute; les Lumi&egrave;res elles-m&ecirc;mes. D&rsquo;une part, les penseurs &eacute;cossais remettaient en question la royaut&eacute; et, d&rsquo;autre part, ils limitaient la port&eacute;e de la r&eacute;volution. Par cons&eacute;quent, la R&eacute;volution britannique repr&eacute;sente une &laquo;&thinsp;r&eacute;volution limit&eacute;e&thinsp;&raquo;. Elle a pris fin en 1688, et m&ecirc;me si on l&rsquo;appelait la &laquo;&thinsp;r&eacute;volution glorieuse&thinsp;&raquo;, elle ne fut ni glorieuse ni vraiment r&eacute;volutionnaire. Ce qui ressort de cette r&eacute;volution, c&rsquo;est l&rsquo;esprit de compromis et la lucidit&eacute; &agrave; l&rsquo;&eacute;gard des contraintes qui p&egrave;sent sur la nature humaine.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Pour les &Eacute;tats-Unis, on ne peut pas parler de Lumi&egrave;res avant le mouvement ind&eacute;pendantiste. Sur le plan philosophique, le seul pr&eacute;suppos&eacute; que l&rsquo;on peut retenir, c&rsquo;est la reconnaissance de la nature humaine.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">On peut consid&eacute;rer que la R&eacute;volution am&eacute;ricaine a d&eacute;but&eacute; par une campagne civile contre les imp&ocirc;ts. En mars 1775, Patrick Henry lan&ccedil;a le slogan &laquo;&thinsp;donnez-moi la libert&eacute; ou donnez-moi la mort&nbsp;!&thinsp;&raquo;. Puis la r&eacute;volution s&rsquo;est r&eacute;pandue dans toutes ces colonies. Mais la v&eacute;ritable raison du mouvement ind&eacute;pendantiste am&eacute;ricain est en fait le conflit commercial entre le gouvernement central et les colonies</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">, </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">car le premier interdisait la contrebande, tandis que les secondes revendiquaient la libert&eacute; de commercer. Les pionniers de ce mouvement n&rsquo;&eacute;taient pas des &laquo;&thinsp;ing&eacute;nieurs de l&rsquo;humanit&eacute;&thinsp;&raquo;, comme Rousseau ou Robespierre, mais, pour plusieurs d&rsquo;entre eux, des brigands, actifs dans la contrebande de th&eacute;.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Ils noircissaient leurs joues et portaient des plumes, esp&eacute;rant ainsi faire accuser les Indiens &agrave; leur place. Ainsi d&eacute;buta la R&eacute;volution am&eacute;ricaine, de fa&ccedil;on &agrave; la fois enfantine et diabolique&nbsp;; enfantine parce qu&rsquo;elle &eacute;tait improvis&eacute;e et se faisait sans l&rsquo;appui des principes des Lumi&egrave;res philosophiques&nbsp;; diabolique, car le but de cette r&eacute;volution et de la Constitution n&rsquo;&eacute;tait pas de transformer la nature humaine, mais</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">de favoriser des projets financiers. Pour ces raisons, la R&eacute;volution am&eacute;ricaine</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">se caract&eacute;rise par une forme d&rsquo;autodiscipline et d&rsquo;autocritique. Une fois la r&eacute;volution accomplie, les Am&eacute;ricains ont imm&eacute;diatement interdit au nouveau gouvernement de limiter les libert&eacute;s. Kant remarque qu&rsquo;un morceau de bois incurv&eacute; ne</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">produit rien de droit. De la m&ecirc;me fa&ccedil;on, la R&eacute;volution am&eacute;ricaine ne pouvait pas r&eacute;aliser d&rsquo;utopie, mais elle pouvait emp&ecirc;cher d&rsquo;autres r&eacute;volutions. Malheureusement, en 1793, les r&eacute;volutionnaires fran&ccedil;ais n&rsquo;ont pas compris</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">que l&rsquo;ennemi implacable ne se trouvait pas dans les palais, dans l&rsquo;&Eacute;glise, &agrave; Versailles ou en Vend&eacute;e, mais dans le c&oelig;ur des gens ordinaires. L&rsquo;ennemi mortel de la r&eacute;volution est la sainte nature humaine pr&ocirc;n&eacute;e par les philosophes des Lumi&egrave;res. Or, la nature humaine est difficile &agrave; changer.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Nous pouvons promouvoir le savoir par l&rsquo;&eacute;ducation, limiter les abus dans les comportements et fixer des interdits par la religion et la loi, mais il est impossible de modifier l&rsquo;humanit&eacute; brutalement. Au d&eacute;but de la R&eacute;volution, la nature humaine semblait pouvoir s&rsquo;adapter au nouvel ordre, mais au fil du temps, elle a commenc&eacute; &agrave; r&eacute;sister</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">au changement. La nature humaine est t&ecirc;tue, elle ne peut accepter la transformation, ce qui est &eacute;videmment frustrant. N&eacute;anmoins, elle est souple et peut r&eacute;sister aux r&eacute;volutions, ce qui a de quoi nous consoler.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">La relation dialectique entre la r&eacute;volution moderne et la transformation de la nature humaine d&eacute;montre</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">qu&rsquo;une r&eacute;volution qui ne tente pas de transformer la nature humaine ne r&eacute;ussira pas forc&eacute;ment, mais qu&rsquo;une r&eacute;volution qui tente de transformer la nature humaine &eacute;chouera n&eacute;cessairement. Autrement dit, la r&eacute;volution est impuissante face &agrave; la nature humaine.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Le meilleur gouvernement est le plus petit gouvernement</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">, </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">et la meilleure r&eacute;volution est la plus petite r&eacute;volution.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Compar&eacute;e &agrave; la R&eacute;volution britannique, la R&eacute;volution am&eacute;ricaine peut &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute;e comme la plus petite. La R&eacute;volution am&eacute;ricaine fut purement politique&nbsp;: elle</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">n&rsquo;a touch&eacute; ni la soci&eacute;t&eacute; ni la culture. La R&eacute;volution britannique fut aussi une r&eacute;volution limit&eacute;e.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Les Britanniques ont lutt&eacute; pour la libert&eacute; religieuse et &eacute;conomique dans le contexte de l&rsquo;&eacute;poque, la r&eacute;forme religieuse de la famille royale &eacute;tant &eacute;troitement li&eacute;e &agrave; la r&eacute;forme &eacute;conomique civile. Il s&rsquo;agit en ce sens d&rsquo;une &laquo;&thinsp;semi-r&eacute;volution&thinsp;&raquo;. Apr&egrave;s 1688, le Royaume-Uni a adopt&eacute; une &laquo;&thinsp;loi de tol&eacute;rance&thinsp;&raquo; qui interdisait aux droits politiques d&rsquo;interf&eacute;rer avec le domaine spirituel. La r&eacute;volution religieuse a finalement &eacute;t&eacute; restreinte et n&rsquo;a pas engendr&eacute; de r&eacute;volution culturelle. La R&eacute;volution fran&ccedil;aise est la plus radicale, elle m&eacute;rite bien le nom de &laquo;&thinsp;Grande R&eacute;volution&thinsp;&raquo;.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Elle s&rsquo;est rapidement transform&eacute;e en r&eacute;volution sociale et en r&eacute;volution culturelle.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Ce bouleversement social a pris fin apr&egrave;s quelques ann&eacute;es. Lors du r&eacute;f&eacute;rendum de 1799, Napol&eacute;on est &eacute;lu premier Consul</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">avec 30&thinsp;001&thinsp;007 voix pour et 1&thinsp;562 contre.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Les Lumi&egrave;res et la grande R&eacute;volution eurent ainsi une fin ironique. La R&eacute;volution s&rsquo;achevait par une guerre, plus t&ocirc;t que la constitution am&eacute;ricaine de 1787. La France, inspir&eacute;e par les Lumi&egrave;res, laissait le champ libre &agrave; un nouvel empereur. Ce n&rsquo;est pas accidentel, car 50 ans plus tard, cela se reproduisit avec Napol&eacute;on III, autre membre de la famille Bonaparte. Apr&egrave;s la foudre, le monde retourne &agrave; l&rsquo;obscurit&eacute;. Apr&egrave;s un autre &eacute;clair, le monde retrouve une nouvelle fois l&rsquo;obscurit&eacute;.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Napol&eacute;on a utilis&eacute; ses canons pour disperser les masses r&eacute;volutionnaires, puis a ex&eacute;cut&eacute; l&rsquo;id&eacute;al r&eacute;volutionnaire fran&ccedil;ais &agrave; la ba&iuml;onnette, l&rsquo;abandonnant &agrave; d&rsquo;autres pays. Au m&ecirc;me moment, la R&eacute;volution am&eacute;ricaine s&rsquo;apaisait</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Les f&eacute;d&eacute;ralistes ont &eacute;t&eacute; &eacute;lus au gouvernement pour trois mandats cons&eacute;cutifs, avant d&rsquo;&ecirc;tre battus en 1800</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Le pouvoir a alors &eacute;t&eacute; transmis pacifiquement &agrave; l&rsquo;opposition. Deux partis politiques gouvernent depuis lors &agrave; tour de r&ocirc;le, et bien que le Parti d&eacute;mocrate et le Parti r&eacute;publicain soient constamment en conflit, ils m&eacute;ritent toujours leur nom et remplissent fid&egrave;lement leurs obligations d&eacute;mocratiques et r&eacute;publicaines. Pour la premi&egrave;re fois, l&rsquo;humanit&eacute; a r&eacute;alis&eacute; le transfert du pouvoir gouvernemental pacifiquement et d&eacute;mocratiquement au nom de la R&eacute;publique. Il n&rsquo;y a plus eu<b> </b>de r&eacute;volution en Am&eacute;rique du Nord. Les &Eacute;tats-Unis organisent des &eacute;lections pr&eacute;sidentielles tous les quatre ans et il existe m&ecirc;me des proc&eacute;dures pour mettre en accusation le pr&eacute;sident. Cela peut &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; comme une sorte de <i>r&eacute;volution</i>, mais par d&eacute;finition ce n&rsquo;est pas une r&eacute;volution, mais bien le contraire de la r&eacute;volution.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun">&nbsp;</span></span></span></p> <h4><span style="font-size:12pt"><span style="break-after:avoid"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:normal"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Le bon ordre et la bonne structure&nbsp;: la R&eacute;publique est le fondement de la d&eacute;mocratie</span></span></span></span></span></span></h4> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Contrairement &agrave; d&rsquo;autres p&egrave;res des &Eacute;tats-Unis, tels que Hamilton, Morris et Adams, le pr&eacute;sident Jefferson, qui a acc&eacute;d&eacute; &agrave; ses fonctions en 1800, avait une image tr&egrave;s positive de la R&eacute;volution fran&ccedil;aise.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Lorsqu&rsquo;il &eacute;tait ambassadeur en France, il rendait compte &agrave; ses correspondants am&eacute;ricains des &eacute;v&eacute;nements en cours &agrave; Paris et dans les provinces</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Son opinion &eacute;tait oppos&eacute;e &agrave;&nbsp;celles de Morris et d&rsquo;Adams. Ce qui se passait en France l&rsquo;enthousiasmait. Dans une lettre &agrave; Madison, il estime ainsi que le monde appartient aux personnes vivantes et qu&rsquo;une r&eacute;volution peut se produire une fois tous les vingt ans, voire tous les sept ou huit ans. Apr&egrave;s avoir lu cette lettre, Madison, inquiet, essaya de raisonner son compatriote de Virginie<a href="#_ftn31" name="_ftnref31" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[31]</span></span></span></span></span></span></a> en insistant sur deux points&nbsp;: premi&egrave;rement, il pensait qu&rsquo;il y avait une continuit&eacute; entre les deux g&eacute;n&eacute;rations&thinsp;; deuxi&egrave;mement, bien qu&rsquo;il ait r&eacute;dig&eacute; une proposition de Constitution f&eacute;d&eacute;rale, dans laquelle</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">il promouvait l&rsquo;id&eacute;e selon laquelle les citoyens avaient le droit de renverser un gouvernement corrompu<a href="#_ftn32" name="_ftnref32" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[32]</span></span></span></span></span></span></a>, il redoutait les r&eacute;volutions arbitraires<a href="#_ftn33" name="_ftnref33" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[33]</span></span></span></span></span></span></a>. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">&Agrave; cette &eacute;poque, Jefferson envisageait la R&eacute;volution am&eacute;ricaine comme la &laquo;&thinsp;lib&eacute;ration&thinsp;&raquo; de l&rsquo;humanit&eacute;. Il croyait que gr&acirc;ce &agrave; elle l&rsquo;avenir s&rsquo;offrait comme une page blanche. Les r&eacute;volutionnaires du 20<sup>e</sup> si&egrave;cle s&rsquo;en feront la m&ecirc;me id&eacute;e. Le concept de lib&eacute;ration de Jefferson est le m&ecirc;me que celui des Fran&ccedil;ais, lesquels mettaient l&rsquo;accent sur le processus de lib&eacute;ration plut&ocirc;t que sur la libert&eacute;. L&rsquo;&eacute;mancipation est une libert&eacute; illimit&eacute;e&nbsp;: une fois que notre propre libert&eacute; entre en conflit avec celle des autres, nous y renon&ccedil;ons. Ces id&eacute;es &eacute;taient contraires &agrave; son point de vue initial. Jefferson avait oubli&eacute; ses ann&eacute;es au Parlement, durant la p&eacute;riode coloniale,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">ainsi que ses efforts</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">pour r&eacute;unir les archives constitutionnelles et l&eacute;gislatives.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Auparavant, il admirait le syst&egrave;me constitutionnel britannique</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">, </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">il avait m&ecirc;me d&eacute;clar&eacute;, en 1776, que les Am&eacute;ricains esp&eacute;raient recouvrer les droits et libert&eacute;s dont George&nbsp;III les avait priv&eacute;s.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Madison est parvenu &agrave; convaincre Jefferson jusqu&rsquo;&agrave; un certain point. Par la suite, Jefferson a progressivement pr&eacute;f&eacute;r&eacute; des r&eacute;formes constitutionnelles p&eacute;riodiques &agrave; des r&eacute;volutions violentes<a href="#_ftn34" name="_ftnref34" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[34]</span></span></span></span></span></span></a>. C&rsquo;&eacute;tait aussi un politicien avis&eacute;. En 1787, alors qu&rsquo;il &eacute;tait diplomate &agrave; Paris, et que Hamilton et Madison tentaient de convaincre le public de voter pour la nouvelle constitution, Jefferson &eacute;crivit au gendre de John Adams et lui a sugg&eacute;ra d&rsquo;adopter la &laquo;&thinsp;strat&eacute;gie de Machiavel&thinsp;&raquo;&nbsp;: &laquo;&thinsp;si j&rsquo;&eacute;tais aux &Eacute;tats-Unis, je ferai campagne activement pour la Constitution jusqu&rsquo;&agrave; ce qu&rsquo;elle soit adopt&eacute;e par neuf &Eacute;tats, et alors j&rsquo;adopterai le parti inverse, afin de convaincre les quatre &Eacute;tats restants de ne pas la signer avant l&rsquo;adoption de la D&eacute;claration des droits<a href="#_ftn35" name="_ftnref35" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[35]</span></span></span></span></span></span></a><i>.</i>&raquo;</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Plut&ocirc;t que d&rsquo;y voir une version moderne de la strat&eacute;gie machiav&eacute;lienne, nous parlerons de <i>la strat&eacute;gie de Jefferson &agrave; Richmond</i>. Cela d&eacute;montre la profondeur de ce politicien, tout en illustrant la vie politique de l&rsquo;&eacute;poque. La strat&eacute;gie de Jef</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">f</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">erson</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">a d&eacute;termin&eacute; le syst&egrave;me bipartite des &Eacute;tats-Unis. Cela r&eacute;v&egrave;le &eacute;galement comment le madisonisme et le jeffersonisme</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">ont pris naissance et ont pu coexister dans le syst&egrave;me am&eacute;ricain. Jusqu&rsquo;&agrave; pr&eacute;sent, nous n&rsquo;avons pas trouv&eacute; de meilleure explication que celle qu&rsquo;il en a propos&eacute; lui-m&ecirc;me.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Pourquoi Jefferson a-t-il promu avec enthousiasme la Constitution, qu&rsquo;il voulait appliquer dans neuf &Eacute;tats, avant de s&rsquo;y opposer&thinsp;? Pourquoi n&rsquo;a-t-il pas pr&eacute;f&eacute;r&eacute; l&rsquo;ordre inverse&nbsp;: s&rsquo;opposer &agrave; la Constitution jusqu&rsquo;&agrave; ce que la<i> </i>D&eacute;claration des droits y ait &eacute;t&eacute; ajout&eacute;e, puis adopter la constitution dans les 13 &Eacute;tats&thinsp;? Cela illustre son sang-froid et sa grande intelligence.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Plus astucieux que ses partisans, il a compris une chose essentielle pour l&rsquo;histoire politique de la gauche&nbsp;: au niveau id&eacute;ologique, il est possible de d&eacute;truire et de reconstruire, mais au niveau institutionnel, il faut commencer par construire. Autrement dit, il faut &eacute;tablir un syst&egrave;me imparfait et amendable, et non suivre l&rsquo;exemple des Fran&ccedil;ais qui ont tent&eacute; d&rsquo;instaurer un syst&egrave;me parfait</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:#0070c0">. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Le syst&egrave;me cr&eacute;&eacute; par la Constitution de 1787 pouvait tol&eacute;rer la Constitution de 1793, par contre</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">la Constitution de 1793 &eacute;tait incompatible avec la Constitution de 1787. Ces deux ann&eacute;es d&eacute;limitent une s&eacute;quence chronologique essentielle et un processus irr&eacute;versible&nbsp;: le syst&egrave;me r&eacute;publicain en est le fondement, et la critique d&eacute;mocratique s&rsquo;y est d&eacute;velopp&eacute;e. Cette structure ne doit pas &ecirc;tre invers&eacute;e, sinon cela conduirait &agrave; la violence arbitraire. &nbsp;En 1793, Danton prit position, de fa&ccedil;on</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">r&eacute;publicaine, contre sur le syst&egrave;me de Robespierre&nbsp;: il y avait trop de sang dans la Seine. Danton fut &agrave; tour guillotin&eacute;. La mort attend celui qui &eacute;met une critique.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Comme toutes les personnes de bon sens, Jefferson admet cette v&eacute;rit&eacute;&nbsp;: ce n&rsquo;est qu&rsquo;en soutenant d&rsquo;abord un syst&egrave;me imparfait qu&rsquo;il est possible de mettre en place un gouvernement d&eacute;mocratique capable de tol&eacute;rer les critiques.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">La strat&eacute;gie de Jefferson a finalement permis d&rsquo;adopter la Constitution de 1787 en y ajoutant la <i>D&eacute;claration des droits</i>. Selon James Mac Gregor Burns, le gouvernement des &Eacute;tats-Unis est</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">hybride<a href="#_ftn36" name="_ftnref36" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[36]</span></span></span></span></span></span></a>&nbsp;: deux tendances contradictoires y coexistent et y fa&ccedil;onnent la vie politique. Cependant, la robustesse de la constitution fait que la tendance madisoniste domine constamment. Longtemps apr&egrave;s son accession au pouvoir, Jefferson d&eacute;clara que, bien qu&rsquo;il ait remport&eacute; les &eacute;lections, il s&rsquo;&eacute;tait trouv&eacute; limit&eacute; par le programme r&eacute;publicain du gouvernement de Madison. Sa pratique du pouvoir, notamment la r&eacute;pression des critiques et son attitude &agrave; l&rsquo;&eacute;gard des id&eacute;es populistes, lui ont valu la r&eacute;putation d&rsquo;&ecirc;tre de droite. Deux cents ans apr&egrave;s la fin</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">des r&eacute;volutions jumelles, en Am&eacute;rique du Nord et en France, les mouvements politiques de gauche, qui sont profond&eacute;ment influenc&eacute;s par la Constitution de 1793, ont progressivement renonc&eacute; au projet de renverser le syst&egrave;me, et ont fini par reconna&icirc;tre la l&eacute;gitimit&eacute; des programmes politiques existants. Leurs revendications r&eacute;volutionnaires sont progressivement devenues</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">celles de nouvelles restrictions, au nom de l&rsquo;&Eacute;tat-providence ou de l&rsquo;&eacute;cologie. La politique de gauche a ainsi trouv&eacute; un espace lui permettant de survivre. Par exemple, les partis sociaux-d&eacute;mocrates de la seconde Internationale ont renouvel&eacute; leurs programmes politiques dans les ann&eacute;es&nbsp;1960 et ont obtenu des r&eacute;sultats remarquables dans les pays europ&eacute;ens &agrave; la fin des ann&eacute;es&nbsp;1980. Ce qui est g&ecirc;nant, c&rsquo;est que pendant la guerre du Golfe et la crise du Kosovo, ces r&eacute;gimes dirig&eacute;s par les gauches europ&eacute;ennes ont tous adopt&eacute; une position belliciste, conform&eacute;ment &agrave; la politique du pr&eacute;sident Jefferson au cours de son mandat. Ils ont employ&eacute; sa strat&eacute;gie, et se sont retrouv&eacute;s face &agrave; la m&ecirc;me difficult&eacute;. Deux cents ans </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">plus tard</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">, la logique de la <i>strat&eacute;gie de Jefferson &agrave; Richmond</i> demeure toujours la m&ecirc;me.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">En outre, nous pouvons &eacute;galement faire une concession &agrave; tous les adeptes de Jefferson, admirateurs de la R&eacute;volution fran&ccedil;aise&nbsp;: il est vrai que la<i> </i>Constitution de 1793 s&rsquo;est appuy&eacute;e pendant deux cents ans sur les bases pos&eacute;es par la Constitution de 1787. Cependant, il faut souligner que la politique de gauche ne ressuscite pas, sous la m&ecirc;me forme, elle parasite le syst&egrave;me de son opposant. Ainsi subsistent les id&eacute;es de gauche. C&rsquo;est ce qui explique que les romantiques qui soutenaient la Constitution de 1793 trouvent encore un &eacute;cho aujourd&rsquo;hui. Ils ont simul&eacute;</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">la moralit&eacute; pour intimider les pr&eacute;tendus m&eacute;chants. D&rsquo;autres moyens sont &agrave; leur port&eacute;e, bien s&ucirc;r. Par exemple, si Robespierre &eacute;tait toujours en vie,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">la fonction qui lui conviendrait le mieux serait celle de professeur dans une universit&eacute; am&eacute;ricaine. Sa fa&ccedil;on d&rsquo;intervenir dans la vie politique ressemble &agrave; celle de Chomsky. Le Parti social-d&eacute;mocrate, qui proclamait jadis la r&eacute;volution, a finalement renonc&eacute; &agrave; la r&eacute;volution et a parasit&eacute; le programme institutionnelle de l&rsquo;opposant.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Comme la foudre, qui peut augmenter la temp&eacute;rature du soleil sans rien changer.</span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Prise isol&eacute;ment, la foudre ne peut que se perdre dans l&rsquo;obscurit&eacute;. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <h4><span style="font-size:12pt"><span style="break-after:avoid"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:normal"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Le cycle des r&eacute;volutions</span></span></span></span></span></span></h4> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Nous pouvons &agrave; pr&eacute;sent &eacute;largir notre r&eacute;flexion et d&eacute;passer le cas des r&eacute;volutions s&oelig;urs.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Les historiens am&eacute;ricains se plaignent souvent du fait que les manuels scolaires chinois donnent une image d&eacute;form&eacute;e de la R&eacute;volution am&eacute;ricaine. En privil&eacute;giant un point de vue oriental, les historiens chinois ont en effet d&eacute;crit la R&eacute;volution am&eacute;ricaine comme le pr&eacute;curseur des &laquo;&thinsp;r&eacute;volutions nationales asiatiques, africaines et am&eacute;ricaines&thinsp;&raquo;. Ils se sont limit&eacute;s &agrave; la guerre d&rsquo;Ind&eacute;pendance de 1775-1782, en n&eacute;gligeant l&rsquo;histoire de la Constitution de 1782 &agrave; 1787. De plus,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">selon certains historiens am&eacute;ricains,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">1787 est loin de marquer l&rsquo;ach&egrave;vement de cette r&eacute;volution, qui comporte</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">au total trois phases&nbsp;: 1) la guerre d&rsquo;Ind&eacute;pendance,&nbsp;2) les activit&eacute;s constitutionnelles, &nbsp;3) la p&eacute;riode de la Convention constitutionnelle de 1778 &agrave; l&rsquo;&eacute;lection de Jefferson en 1800, o&ugrave;, pour la premi&egrave;re fois, l&rsquo;humanit&eacute; r&eacute;alisa le transfert pacifique du pouvoir en place. Si l&rsquo;on s&rsquo;en tient &agrave; la premi&egrave;re phase, la R&eacute;volution am&eacute;ricaine n&rsquo;est pas une r&eacute;volution, mais d&rsquo;une guerre civile, une guerre s&eacute;paratiste entre une puissance coloniale et une colonie. On ne peut pas non plus y voir une guerre entre les immigrants et les Am&eacute;rindiens. Nous qualifions cette guerre de r&eacute;volution, principalement parce que les Am&eacute;ricains ont &eacute;galement conduit les deux autres phases apr&egrave;s la fin de la guerre civile, de 1778 &agrave; 1800. Or, pour bien comprendre ces deux phases, nous devons abandonner le cadre interpr&eacute;tatif du &laquo;&thinsp;mouvement de lib&eacute;ration des peuples d&rsquo;Asie, d&rsquo;Afrique et des &Eacute;tats-Unis&thinsp;&raquo;. Nous devons replacer l&rsquo;histoire occidentale dans le contexte occidental pour la comprendre. Tout comme les Orientaux s&rsquo;opposent &agrave; &laquo;&thinsp;l&rsquo;orientalisme&thinsp;&raquo; de l&rsquo;Occident, nous ne devons pas reproduire les m&ecirc;mes erreurs en utilisant notre paradigme &laquo;&thinsp;occidentaliste&thinsp;&raquo; pour comprendre ce qui se passe en Occident. En effet, cet &laquo;&thinsp;occidentalisme&thinsp;&raquo; n&rsquo;est pas seulement illusoire sur le plan id&eacute;ologique,</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">il l&rsquo;est aussi sur le plan historique, car il minore le r&ocirc;le de la R&eacute;volution am&eacute;ricaine et propose donc une narration orientale lacunaire.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">L&rsquo;&eacute;tude des principales diff&eacute;rences entre la R&eacute;volution am&eacute;ricaine et la R&eacute;volution fran&ccedil;aise peut nous aider &agrave; comprendre pleinement l&rsquo;histoire de la R&eacute;volution am&eacute;ricaine.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Cette diff&eacute;rence majeure n&rsquo;est pas due &agrave; l&rsquo;exag&eacute;ration intentionnelle des historiens.</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">La lutte secr&egrave;te entre les &Eacute;tats-Unis et la France a commenc&eacute; &agrave; partir de la fin du 18<sup>e</sup> si&egrave;cle. Les historiens qui pensent que la R&eacute;volution am&eacute;ricaine s&rsquo;est termin&eacute;e en 1787 et ceux qui pensent qu&rsquo;elle s&rsquo;est termin&eacute;e en 1800</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">s&rsquo;accordent sur une chose&nbsp;: le chant du coq gaulois a tent&eacute; de couvrir le son de la cornemuse &eacute;cossaise de Boston &agrave; Philadelphie. La concurrence entre ces deux tendances, fond&eacute;es respectivement sur la Constitution de 1787 et la Constitution de 1793, a dur&eacute; deux cents ans, jusqu&rsquo;&agrave; la fin de la Guerre froide. D&rsquo;apr&egrave;s les manuels chinois, la Guerre froide n&rsquo;a dur&eacute; que cinquante ans, mais, &agrave; nos yeux, la Guerre froide fut en fait le dernier temps d&rsquo;un processus historique beaucoup plus long allant de</span></span> <span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">la R&eacute;volution fran&ccedil;aise de 1789 &agrave; la chute de l&rsquo;Union sovi&eacute;tique en 1989, ensuite l&rsquo;enthousiasme r&eacute;volutionnaire aveugle a finalement pris fin&nbsp;: cela repr&eacute;sente exactement deux cents ans.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">&Agrave; la fin de cette p&eacute;riode, L&eacute;nine et Staline ont tous deux d&eacute;couvert la m&ecirc;me conception de la politique consistant &agrave; combiner l&rsquo;esprit am&eacute;ricain avec l&rsquo;esprit romantique fran&ccedil;ais. Malheureusement, cette synth&egrave;se n&rsquo;a concern&eacute; qu&rsquo;un petit nombre de cadres sup&eacute;rieurs russes. &Agrave; plus grande &eacute;chelle, les terribles concepts des &laquo;&thinsp;ing&eacute;nieurs de l&rsquo;&acirc;me&thinsp;&raquo; ont recouvert cette conception. Depuis que Pierre le Grand a introduit le fran&ccedil;ais dans la haute soci&eacute;t&eacute; russe, la Russie a &eacute;t&eacute; touch&eacute;e par la maladie mentale fran&ccedil;aise. La maladie russe fut donc la maladie fran&ccedil;aise.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Apr&egrave;s l&rsquo;enthousiasme destructeur des r&eacute;volutionnaires, il est temps de privil&eacute;gier un esprit constructif.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Nous qui avons v&eacute;cu au 20<sup>e</sup> si&egrave;cle, nous ne sommes toujours pas d&eacute;barrass&eacute;s de l&rsquo;influence de ce si&egrave;cle, et ces deux tendances seront continuellement pr&eacute;sentes en nous.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">L&rsquo;&eacute;clair de la r&eacute;volution est r&eacute;apparu maintes et maintes fois, et le 20<sup>e</sup> si&egrave;cle, dans lequel nous vivions il n&rsquo;y a pas si longtemps, &eacute;tait le produit de cet &eacute;clair.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p align="right" style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><i><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Texte traduit par LIU Xingchi</span></span></i></span></span></span></p> <p align="right" style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt">&nbsp;</p> <div>&nbsp; <hr align="left" size="1" width="33%" /> <div id="ftn1"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[1]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> [Zhu Xueqin est professeur au d&eacute;partement d&rsquo;histoire de l&rsquo;Universit&eacute; de Shanghai. Plut&ocirc;t lib&eacute;ral, il m&egrave;ne des recherches dans le domaine de l&rsquo;histoire de la pens&eacute;e sociale</span></span><span lang="FR-CA" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">. Ce texte, qui &eacute;tait initialement destin&eacute; &agrave; servir de pr&eacute;face &agrave; la traduction chinoise de l&rsquo;essai de Susan Dunn, </span></span><i><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Sister Revolutions: French Lightning, American Light</span></i><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"> (</span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">New York, Faber and Faber, </span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">1999)</span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">, r&eacute;alis&eacute;e par </span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Zhang Xiaogang,</span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> a finalement &eacute;t&eacute; publi&eacute; par </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Zhu Xueqin </span></span><span lang="FR-CA" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">en annexe de son ouvrage <i>La Destruction de l&rsquo;&eacute;tat moral id&eacute;al&nbsp;: de Rousseau &agrave; Robespierre</i> (</span></span><span lang="EN-US" style="font-family:SimSun"><span style="color:black">道德理想国的覆灭</span></span><span lang="FR-CA" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">:</span></span><span lang="EN-US" style="font-family:SimSun"><span style="color:black">从卢梭到罗伯斯庇尔</span></span><span lang="FR-CA" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">, Shanghai, &Eacute;ditions Sanlian de Shanghai </span></span><span lang="EN-US" style="font-family:SimSun"><span style="color:black">上海三联书店</span></span><span lang="FR-CA" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">, 2003), qui est principalement consacr&eacute; &agrave; la pens&eacute;es de Rousseau, &agrave; la R&eacute;volution fran&ccedil;aise et &agrave; l&rsquo;ultra-gauche chinoise. Notre traduction se base sur cette &eacute;dition. Parall&egrave;lement, le texte a aussi &eacute;t&eacute; publi&eacute; dans la revue chinoise <i>Culture de l&rsquo;Orient</i>, n&deg;6, 2003, p. 6-21].</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn2"> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">[2]</span></span></span></span></span></span></span></a><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"> [Dans la suite de ce texte, Zhu Xueqin s&rsquo;appuie tr&egrave;s largement sur l&rsquo;ouvrage de Susan Dunn, qu&rsquo;il traduit ou paraphrase, sans le pr&eacute;ciser, et dont il exploite la documentation, en reprenant aussi les r&eacute;f&eacute;rences bibliographiques. Nous signalons, en note, les principaux passages concern&eacute;s (Nous citons <i>Sister Revolutions</i>, d&rsquo;apr&egrave;s l&rsquo;&eacute;dition num&eacute;rique dat&eacute;e de 2011). La contribution personnelle de Zhu Xueqin consiste dans ce texte &agrave; interroger la fa&ccedil;on dont les Chinois peuvent comprendre et interpr&eacute;ter ces deux r&eacute;volutions. Il s&rsquo;agit en outre d&rsquo;une r&eacute;flexion politique sur la fa&ccedil;on dont les intellectuels chinois peuvent se positionner par rapport &agrave; l&rsquo;Occident et aux Lumi&egrave;res.] </span></span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn3"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[3]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Sur Adams et les philosophes, voir Zoltan Haraszti, <i>John Adams and the Prophets of Progress</i>, Cambridge Mass., Harvard University Press, 1952, p. 21 et 24. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn4"> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">[4]</span></span></span></span></span></span></span></a><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"> [<span style="color:black">P</span>our tout ce passage, voir S. Dunn, <i>op. cit</i>., p. 40-41]. </span></span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn5"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[5]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Adams to Jefferson, 13 July 1813, in Lester J. Cappon, ed., <i>The Adams &ndash; Jefferson Letters</i>, 2 vols. Chapel Hill : The University of North Carolina Press, 1959, vol. 2, p. 356. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[Tout ce passage suit de tr&egrave;s pr&egrave;s le texte de Susan Dunn qu&rsquo;il traduit ou paraphrase.]</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn6"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref6" name="_ftn6" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[6]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Concernant le point de vue d&rsquo;Adams sur Condorcet, voir Haraszti, <i>John Adams and the Prophets of Progress</i>, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 1952, p. 241, 242 et 256. [Tout ce passage suit de tr&egrave;s pr&egrave;s le texte de S. Dunn qu&rsquo;il traduit ou paraphrase].</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn7"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref7" name="_ftn7" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[7]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Morris, <i>A Diary of the French Revolution by Gouverneur Morris</i>, ed. Beatrix Davenport, 2 vols, 23 june 1789, vol. 1, p. 121, Boston, Houghton Mifflin, 1939.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn8"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref8" name="_ftn8" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[8]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Morris, Letter to William Short, 18 Septembre 1790, in <i>A Diary of the French Revolution by Gouverneur Morris</i>, ed. Beatrix Davenport, Boston, Houghton Mifflin, 1939, tome 1, p. 594.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn9"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref9" name="_ftn9" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[9]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Alexander Hamilton to Lafayette, 6 October 1789, in Harold C. Syrett, ed. <i>The Papers of Alexander Hamilton</i>, New York, Columbia University Press, 1962.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn10"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref10" name="_ftn10" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[10]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Alexandrer Hamilton, <i>The Federalist</i>, n&deg; 1, 3, New York, The Modern Library.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn11"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref11" name="_ftn11" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[11]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Hamilton, <i>The Federalist</i>, n&deg; 6, p. 29. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn12"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref12" name="_ftn12" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[12]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Hamilton to Washington, 15 September 1790, in Syrett, ed., <i>Hamilton Papers</i>, New York, Columbia University, Press, 1962. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[Pour tout ce passage, voir S. Dunn, p. 37]</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn13"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref13" name="_ftn13" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[13]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Hamilton, <i>The Federalist</i>, n&deg; 30. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn14"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref14" name="_ftn14" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[14]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Montmorency, s&eacute;ance du 1<sup>er</sup> ao&ucirc;t 1789, cit&eacute; par Lewis Rosenthal, <i>America and France</i>, p. 184, New Haven, Conn.,Yale University Press, 1990.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn15"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref15" name="_ftn15" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">[15]</span></span></span></span></span></span></a><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"> Condorcet, <i>Sketch for an Historical Picture of the Progress of the Human Mind</i>, trans. June Barraclough, Westport, Conn., Greenwood Press, 1979, p. 56, 58.</span></span></span></p> </div> <div id="ftn16"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref16" name="_ftn16" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[16]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Rabaut de Saint-&Eacute;tienne, 23 ao&ucirc;t 1789, cit&eacute; dans Rosenthal, <i>America and France</i>, p. 208, New Haven, Conn., Yale University Press, 1990.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn17"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref17" name="_ftn17" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[17]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Saint-Just, 15 May 1973, in Saint-Just,<i> &OElig;uvres completes</i>, &eacute;d. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">M. Duval, Paris, G&eacute;rard Lebovici, 1984, p. 444.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn18"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref18" name="_ftn18" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[18]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> S&eacute;ance du 30 April 1973, cit&eacute; par Rosenthal, <i>America and France</i>, p. 280, New Haven, Conn.,Yale University Press, 1990. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn19"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref19" name="_ftn19" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[19]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> John Dalberg-Acton, <i>Lectures on the French Revolution</i>, ed. John Neville Figgis, Londres, Macmillan, 1917, p. 26. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn20"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref20" name="_ftn20" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[20]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> John Dalberg-Acton, <i>Lectures on the French Revolution</i>, ed. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">John Neville Figgis, Londres, Macmillan, 1917, p. 26. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn21"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref21" name="_ftn21" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[21]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Robespierre, Discours du 3 d&eacute;cembre 1792, in Michael Walzer, ed. </span></span><i><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Regicide and Revolution: Speeches at the Trial of Louis XVI</span></span></i><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">, </span></span><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Cambridge, Cambridge University Press; 1974, p. 133.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn22"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref22" name="_ftn22" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">[22]</span></span></span></span></span></span></a> <span lang="FR-CA" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Bossuet, <i>Politique tir&eacute;e des propres paroles de l&rsquo;&eacute;criture sainte</i>, Gen&egrave;ve, Droz, 1967, tome 2, p. 54. </span></span></span></p> </div> <div id="ftn23"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref23" name="_ftn23" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">[23]</span></span></span></span></span></span></a> <span lang="FR-CA" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Sieyes, <i>Qu&rsquo;est-ce que le tiers &eacute;tat ?</i>, &eacute;d. </span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">Roberto Zapperi, Gen&egrave;ve, Droz, 1970, ch. 5, p. 183. </span></span></span></p> </div> <div id="ftn24"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref24" name="_ftn24" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">[24]</span></span></span></span></span></span></a><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"> Hydens, quoted by Debbasch, <i>Le Principe r&eacute;volutionnaire</i>, Paris, Economica, 1988, p. 203. </span></span></span></p> </div> <div id="ftn25"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref25" name="_ftn25" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[25]</span></span></span></span></span></span></span></span></a> <span lang="FR-CA" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Tocqueville, <i>L&rsquo;Ancien R&eacute;gime et la R&eacute;volution&nbsp;: Fragments et Notes in&eacute;dites sur la R&eacute;volution</i>, &eacute;d. </span></span><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">Andre Jardin, <i>&OElig;uvres compl&egrave;tes</i>, Paris, Gallimard, 1953, tome 2, p. 133.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn26"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:36pt; margin-bottom:8px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:SimSun"><a href="#_ftnref26" name="_ftn26" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif">[26]</span></span></span></span></span></span></span></a><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"> [Les deux premiers paragraphes sont une traduction du texte de S. Dunn, voir p. 51.] </span></span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn27"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref27" name="_ftn27" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[27]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Madison, &laquo; On reason and on factions &raquo;, <i>Federalist</i>, n&deg; 10, p. 55.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn28"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref28" name="_ftn28" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[28]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Madison, &laquo; Draft of a letter on majority governments, in the Mind of the Founder &raquo;,<i> in Sources of the Political Thought of James Madison</i>, 1833, ed. Marvin Meyers, Hanover, N. H.: University Press of New England, 1981, p. 415.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn29"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref29" name="_ftn29" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[29]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Madison, <i>Federalist</i>, n&deg; 10, p. 55.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn30"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref30" name="_ftn30" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[30]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Voir Edmund S. Morgan, &laquo;&nbsp;Conflict and Consensus in the American Revolution&nbsp;&raquo;, in <i>Essays on the American Revolution</i>, ed. Stephen G. Kurts and James H. Hutson. Chapel Hill : University of North Carolina Press for the Institute of Early American History and Culture, 1973, p. 39.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn31"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref31" name="_ftn31" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[31]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Madison to Jefferson</span></span><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">,</span></span><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> 4&nbsp; February 1790</span></span><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">,</span></span><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> in Robert A. Rutland et al., eds., <i>Madison Papers</i>, Charlottesville : University Press of Virginia, 1983, tome 13, p. 19-20. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn32"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref32" name="_ftn32" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[32]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Jonathan Elliot, ed., <i>The Debates in the Several State Convertions on the Adoption of the Federaliste Constitution</i>, Philadelphia, J. B. Lippincott, 1937, tome 3, p. 98. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn33"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref33" name="_ftn33" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[33]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Madison, <i>Federalist</i>, n&deg; 49, p. 329. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn34"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref34" name="_ftn34" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[34]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Jefferson to Samuel Kercheval, 12 July 1816, in <i>Jefferson Writings</i>, ed. Merrill Peterson, The Library of America, 1984, p. 1402.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn35"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref35" name="_ftn35" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[35]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> Jefferson to William S. Smith, 2 February 1788, in Julian P. Boyd, ed., <i>Jefferson Papers</i>, Princeton N. J., Princeton University, Press, 1958, tome 12, p. 558. [Voir S. Dunn, p. 119.]</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn36"> <p class="Footnote" style="text-indent:-14.2pt; text-align:justify; margin-top:8px; margin-bottom:8px"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;, serif"><a href="#_ftnref36" name="_ftn36" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black">[36]</span></span></span></span></span></span></span></span></a><span lang="EN-US" style="font-family:&quot;Arial&quot;,sans-serif"><span style="color:black"> James MacGregor Burns, <i>The Deadlock of Democracy</i>, Englewood Cliffs, N. J. Prentice Hall, 1963, p. 46. </span></span></span></span></p> </div> </div>