<p class="texte" dir="ltr">La revue par les pairs, en anglais Peer-Reviewing, désigne le processus d'expertise de l'ensemble des articles scientifiques depuis des décennies, processus au bout duquel l'auteur peut donc être publié ... ou mourir en paix (&quot;publish or perish&quot;). Relevé par Michel Roland, l'article &quot;Open-peer review and collaboration&quot; vient apporter une nouvelle pierre au si sensible dossier : &quot;Faut-il tuer le pair ?&quot;. Formulé autrement, il s'agit de savoir si  - au regard du contexte actuel d'auto-archivage, d'open-access et de nouveaux modes de publication en général - le peer-reviewing a ou non vocation a demeurer le modèle unique du circuit de &quot;validation&quot; des connaissances scientifiques. Petite revue des &quot;pour&quot; et des &quot;contre&quot;.<br />Que reproche-t-on au Peer-reviewing ?</p><ul class="listlevel1WW8Num27"><li><p class="puces" dir="ltr">les experts sont anonymes ce qui favorise leur désengagement : ils s'y mettent au dernier moment, ils ne respectent pas forcément la &quot;checklist&quot; d'évaluation (quand elle existe) </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">les femmes acceptent trois fois plus de manuscrits que les hommes et/mais les femmes sont nettement minoritaires dans les comités d'évaluation </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">les pairs en question sont souvent moins &quot;experts&quot; sur le sujet que l'auteur de l'article </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">des logiques de carrière, institutionnelles et personnelles sont souvent présentes, les auteurs &quot;seniors&quot; ayant ainsi parfois tendance à sous-évaluer le travail de jeunes équipes ou auteurs au profit d'autres seniors (et je ne vous parle même pas des mesquineries et autres animosités personnelles qui - comme dans tout groupe humain - se font évidemment jour, tant il est vrai que &quot;l'anonymat&quot; des articles évalués n'empêche souvent en rien d'identifier leur auteur.) </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">le processus d'évaluation est looooooong, très long (entre 6 mois et 2 ans, parfois plus) </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">il est également coûteux (frais d'édition, de secrétariat, etc ...) </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">il ne joue pas son rôle de filtre (la plupart des articles refusés finissent par être publiés par d'autres revues, et pas nécessairement moins &quot;prestigieuses&quot;) </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">il est inefficace qualitativement (on a ainsi montré que les &quot;experts&quot; étaient le plus souvent incapables de repérer les erreurs volontairement introduites dans des articles bidonnés pour les besoins du test) </p></li></ul><p class="texte" dir="ltr">Bon ... devant cette charge en règle, quels sont les modèles alternatifs dont on dispose aujourd'hui ?</p><ul class="listlevel1WW8Num27"><li><p class="puces" dir="ltr">Modèle fermé : on pousse jusqu'au bout la logique d'anonymat des articles : non seulement on ne donne pas le nom de l'auteur mais on anonymise aussi toutes les références de l'article et de sa bibliographie à des institutions et/ou à d'autres articles du même auteur : non seulement c'est infaisable, mais en plus cela ôte évidemment des éléments essentiels à l'expertise elle-même. Donc on perd sur les 2 tableaux. Modèle perdant-perdant. </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">Modèle semi-ouvert : on lève l'anonymat des pairs : les auteurs savent qui les évalue. On parle alors d'« open peer-review ». Et ça marche puisqu'on note que dans ce cadre : </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">on critique moins, ou à tout le moins les critiques sont argumentées, </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">les commentaires sont souvent plus approfondis, plus argumentés et plus courtois </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">Ils (les pairs toujours) sont ainsi incités à décliner l’évaluation quand ils ne s’estiment pas compétents </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">Les jugements abusifs plus facilement repérés. </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">Le travail des experts s’en trouve in fine valorisé et bénéficie de plus de crédit </p></li><li><p class="puces" dir="ltr">Donc ... tout le monde est content, et on est sur du gagnant-gagnant. </p></li></ul><p class="texte" dir="ltr">Nombre de revues (ou groupements de revues) ont d'ailleurs fait ce choix : BMJ (British Medical Journal ), BiomedCentral, MJA (Medical Journal of Australia ) et d'autres ...</p><ul class="listlevel1WW8Num27"><li><p class="puces" dir="ltr">Modèle ouvert : le plus radical, le plus novateur. Donc le plus intéressant. Et donc le plus critiqué. On ne se contente plus de lever l'anonymat des pairs, mais on autorise les “lecteurs” à intervenir dans le processus en déposant leurs commentaires sur des articles soumis à  publication. On parle alors de “commentary-based peer-review” ou de  “peer-commenting”. Trois manières de mettre en place un &quot;Peer-commentary&quot; : commentaires AVANT, APRES ou A LA PLACE de la revue par les pairs. Pour autant, il ne s'agit pas de sombrer dans un extrémisme candide : c'est la co-existence des deux modèles (Peer-commentary puis peer-reviewing ou l’inverse) qui est intéressante et novatrice, l’initiative de la décision de publication restant dans chaque cas aux experts. </p></li></ul><p class="texte" dir="ltr">Le &quot;Journal of Interactive Media in Education&quot; combine pré et post-commentary. Le journal &quot;Electronic Transactions on Artificial Intelligence&quot; a lui décidé d’ouvrir aux lecteurs le processus de revue par les pairs. Quant à &quot;Psycoloquy&quot;  ou &quot;JIME&quot;, le choix s’est porté sur l’ouverture aux commentaires après le processus de Peer-Reviewing.</p><p class="texte" dir="ltr">Alors ... le complexe d'Oedipe ravagera-t-il le petit monde de la recherche ?</p><p class="texte" dir="ltr">Nota Bene : Les faits relatés ci-dessus ne sont pas le produit de mon imagination malade mais le résultat d'un travail d'expertise qui trouvera peut-être un aboutissement dans une &quot;vraie&quot; publication (enfin si je trouve le temps et si elle est acceptée par mes pairs ;-), lequel travail doit énormément à la mini-bibliographie suivante : </p><p class="bibliographie" dir="ltr">Harnad Stevan, 2000. &quot;The Invisible Hand of Peer Review&quot;. En ligne. </p><p class="bibliographie" dir="ltr">Piolat A and Vauclair J, &quot;Le processus d’expertise éditoriale avant et avec Internet&quot;, &quot;Pratiques psychologiques&quot;, Vol 10 n°3, pp. 255-272, 2004. En ligne. </p><p class="bibliographie" dir="ltr">Jefferson T, Demicheli V. &quot;Are guidelines for peer-reviewing economic evaluations necessary? A survey of current editorial practice.&quot; Health Econ. 1995 Sep-Oct; 4(5):383-8. </p><p class="bibliographie" dir="ltr">Stern David, &quot;Open access or differential pricing for journals:&quot; Online Vol. 29 No. 2 — Mar/Apr 2005. En ligne.</p>