<p><strong>SOMMAIRE</strong></p> <p><strong>M&eacute;thode</strong></p> <p><strong>R&eacute;sultats</strong></p> <p><strong>Discussion</strong></p> <p class="remerciements">&nbsp;</p> <p class="remerciements">Nous remercions &agrave; Silvia Krauth-Gruber pour son aide dans la construction du mat&eacute;riel et &agrave; Solveig Puim&eacute;an et &agrave; une personne anonyme pour leur aide dans le codage des donn&eacute;es de cette recherche.</p> <p class="texte">Les menaces soci&eacute;tales font d&eacute;sormais partie int&eacute;grante de notre vie quotidienne, notamment en raison de leur diffusion m&eacute;diatique &eacute;tendue. L&rsquo;actualit&eacute; sociale est riche en &eacute;v&eacute;nements dramatiques, inqui&eacute;tants, parfois pr&eacute;visibles, mais souvent inattendus&hellip; En effet, le moindre aspect de notre existence quotidienne nous fait ressentir une crainte li&eacute;e aux diff&eacute;rents &eacute;v&eacute;nements soci&eacute;taux embl&eacute;matiques ou aux diff&eacute;rents aspects de notre vie quotidienne qu&rsquo;aussi bien les m&eacute;dias que les individus qualifient de &laquo;&nbsp;menace&nbsp;&raquo;.</p> <p class="texte">Parmi les menaces contemporaines figurent les menaces pour la s&eacute;curit&eacute; comme les attaques terroristes ou les menaces &eacute;cologiques comme la pollution atmosph&eacute;rique qui asphyxie r&eacute;guli&egrave;rement les grandes villes. Les menaces &eacute;conomiques entravent l&rsquo;&eacute;quilibre des ressources financi&egrave;res qui pourrait &eacute;branler l&rsquo;&eacute;conomie mondiale par un effet domino. Les menaces technologiques d&eacute;coulent directement du progr&egrave;s scientifique et technique de notre soci&eacute;t&eacute;. S&rsquo;ajoutent &agrave; cela les menaces politiques comme les conflits g&eacute;opolitiques persistants. De plus, de nouvelles menaces se profilent dans notre soci&eacute;t&eacute;, telles que les nouveaux virus &agrave; l&rsquo;origine des pand&eacute;mies sanitaires de grande ampleur, les armes au potentiel de destruction massive &agrave; l&rsquo;&eacute;chelle plan&eacute;taire, ou encore le d&eacute;veloppement de l&rsquo;intelligence artificielle qui pourrait mettre en p&eacute;ril le libre arbitre de l&rsquo;humanit&eacute;.</p> <p class="texte">Quelle que soit l&rsquo;origine de diff&eacute;rents types de menaces soci&eacute;tales, que ce soit la nature ou l&rsquo;Homme, elles sont inh&eacute;rentes &agrave; la condition humaine. Ces &eacute;v&eacute;nements, quelles que soient leur origine ou leurs cons&eacute;quences, traduisent une rupture entre la configuration habituelle de l&rsquo;&eacute;tat du monde et les repr&eacute;sentations que les personnes se font du monde qui les entoure (Orfali, 2005). Cette situation de chaos, qu&rsquo;on pourrait qualifier &agrave; l&rsquo;instar de Karl Weick d&rsquo;&eacute;pisode &laquo;&nbsp;cosmologique&nbsp;&raquo;, renvoie &agrave; un bouleversement profond de notre univers. Ce qui rend ce type de situations dramatiques, c&rsquo;est que &laquo;&nbsp;&hellip; <em>le sens de ce qui se passe s&rsquo;effondre en m&ecirc;me temps que les moyens de reconstruire ce sens</em>&nbsp;&raquo; (Weick, 1993, p.&nbsp;633). Ainsi, la perception d&rsquo;une menace qui se construirait lors d&rsquo;une interaction entre un menac&eacute; et un mena&ccedil;ant (Caillaud, Bonnot, &amp; Drozda-Senkowska, 2017) serait &eacute;tay&eacute;e par les processus cognitifs et &eacute;motionnels qui sous-tendent l&rsquo;&eacute;laboration du sens.</p> <p class="texte">Toutefois, la construction sociale des menaces soci&eacute;tales serait &eacute;galement sous-tendue par d&rsquo;autres facteurs d&rsquo;influence comme les m&eacute;dias. Les m&eacute;dias au sens large du terme, c&rsquo;est-&agrave;-dire la presse, la t&eacute;l&eacute;vision, la radio ou encore Internet, font partie des vecteurs de transmission sociale, au m&ecirc;me titre que les mus&eacute;es, les institutions ou les diff&eacute;rents groupes sociaux (Haas, 2012). Selon Moscovici (1961/1976), la diffusion m&eacute;diatique fait r&eacute;f&eacute;rence &agrave; un syst&egrave;me ou une forme particuli&egrave;re de la communication &agrave; l&rsquo;origine de la transmission des messages sous la forme d&rsquo;un savoir commun destin&eacute; &agrave; &ecirc;tre partag&eacute;. Selon cette logique, les journaux pourraient &ecirc;tre envisag&eacute;s en tant que m&eacute;diateurs entre un objet ext&eacute;rieur, en l&rsquo;occurrence la menace soci&eacute;tale, et le public. Par cons&eacute;quent, chaque journal poss&egrave;de une strat&eacute;gie de communication qui lui est propre&nbsp;; cette strat&eacute;gie concerne le style linguistique ainsi que l&rsquo;id&eacute;ologie qui sous-tend la ligne &eacute;ditoriale (Gamson &amp; Modigliani, 1989). En effet, le langage peut &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; comme l&rsquo;instrument principal de construction sociale de la r&eacute;alit&eacute; car il est &agrave; l&rsquo;origine de l&rsquo;objectivation des connaissances concernant le monde. Or, le langage sous-tend l&rsquo;aboutissement &agrave; une forme de connaissance socialement distribu&eacute;e qui permet aux individus de partager la m&ecirc;me signification du monde (Berger &amp; Luckmann, 1966).</p> <p class="texte">La diffusion m&eacute;diatique, qui est avant tout factuelle, contribue &agrave; la construction d&rsquo;un &laquo;&nbsp;monde social imaginaire&nbsp;&raquo; (Rouquette, 1998, p.&nbsp;93) et par cons&eacute;quent ne peut &ecirc;tre envisag&eacute;e sans son rapport &agrave; l&rsquo;id&eacute;ologie. Par extension, la communication m&eacute;diatique ne peut &ecirc;tre appr&eacute;hend&eacute;e sans son rapport au pouvoir (Moscovici, 1961/1976), car elle est porteuse des discours politiques et institutionnels (Bonelli, 2010). Ainsi, chaque menace pour &ecirc;tre per&ccedil;ue en tant qu&rsquo;un probl&egrave;me collectif a besoin d&rsquo;&ecirc;tre port&eacute;e par le travail aussi bien politique que symbolique des agents sociaux (Bonelli, 2017) dont les m&eacute;dias font irr&eacute;vocablement partie. L&rsquo;id&eacute;ologie v&eacute;hicul&eacute;e par la communication m&eacute;diatique contribue &agrave; la construction de la pens&eacute;e sociale qui fait r&eacute;f&eacute;rence &agrave; la pens&eacute;e quotidienne des personnes lambda (Rouquette, 1973). En effet, la diffusion m&eacute;diatique est l&rsquo;un des facteurs qui contribuent aux processus de communication qui sous-tend la construction des repr&eacute;sentations sociales (Moscovici, 1961/1976). Elles sont &agrave; l&rsquo;origine des objets ou des situations que les personnes per&ccedil;oivent comme &eacute;tant des menaces soci&eacute;tales &agrave; une &eacute;poque donn&eacute;e.</p> <p class="texte">La diffusion m&eacute;diatique constitue &eacute;galement l&rsquo;un des canaux de communication qui contribuent aussi bien &agrave; l&rsquo;amplification qu&rsquo;&agrave; l&rsquo;att&eacute;nuation sociale de la perception que les personnes ont des menaces soci&eacute;tales (Kasperson <em>et&nbsp;al.</em>, 1988). L&rsquo;exposition m&eacute;diatique augmenterait ainsi d&rsquo;approximativement 15&nbsp;% la perception des divers risques par la population ayant acc&egrave;s aux m&eacute;dias par rapport &agrave; celle sans acc&egrave;s aux m&eacute;dias, et ceci ind&eacute;pendamment du niveau d&rsquo;&eacute;ducation (Kpanake, Chauvin &amp; Mullet, 2008). Il a &eacute;t&eacute; d&eacute;montr&eacute; que la presse &eacute;crite en particulier amplifie pour l&rsquo;actualit&eacute; locale le contenu de l&rsquo;information li&eacute;e &agrave; la peur, ce qui contribue &agrave; la formation d&rsquo;une r&eacute;alit&eacute; sociale per&ccedil;ue comme &eacute;tant davantage mena&ccedil;ante (Heath, 1984). La communication m&eacute;diatique v&eacute;hicule un type de discours choisi par la ligne &eacute;ditoriale de diff&eacute;rents journaux en s&rsquo;inscrivant dans un contexte social, culturel, &eacute;conomique et politique. Cela signifie que diff&eacute;rents types de journaux s&eacute;lectionnent un type de discours porteur d&rsquo;un type de connaissances particuli&egrave;res pour &ecirc;tre par la suite diffus&eacute;s au sein de la soci&eacute;t&eacute;. Les connaissances ainsi v&eacute;hicul&eacute;es sont interpr&eacute;t&eacute;es et font l&rsquo;objet d&rsquo;une appropriation par les acteurs sociaux, pour finir par correspondre aux diff&eacute;rentes logiques de la pens&eacute;e individuelle (Jovchelovitch, 2008). Par cons&eacute;quent, la diffusion m&eacute;diatique aurait un r&ocirc;le d&eacute;terminant en ce qui concerne la construction sociale de la r&eacute;alit&eacute; et des menaces soci&eacute;tales, par extension.</p> <p class="texte">Ainsi, l&rsquo;objectif principal de cette &eacute;tude est d&rsquo;examiner l&rsquo;existence d&rsquo;un lien &eacute;ventuel entre le classement des menaces soci&eacute;tales issues de l&rsquo;actualit&eacute; sociale, la presse &eacute;crite sp&eacute;cifiquement, et le classement des menaces contemporaines per&ccedil;ues par les personnes dans le contexte fran&ccedil;ais.</p> <h1 class="texte">M&eacute;thode</h1> <p class="texte">Les journaux qui rediffusent les informations confirm&eacute;es et v&eacute;rifi&eacute;es par l&rsquo;AFP (Agence France-Presse) sont consid&eacute;r&eacute;s comme des leaders d&rsquo;opinion dans le paysage m&eacute;diatique. Dans un premier temps, une base de donn&eacute;es des articles d&rsquo;actualit&eacute; issus de la presse &eacute;crite a &eacute;t&eacute; constitu&eacute;e. Il s&rsquo;agissait plus sp&eacute;cifiquement d&rsquo;un corpus d&rsquo;articles de journaux (<em>N</em>&nbsp;= 386) parus dans neuf quotidiens nationaux (Le Monde, Lib&eacute;ration, Figaro, France Soir, Les Echos, etc.)&nbsp;; le corpus a &eacute;t&eacute; construit &agrave; l&rsquo;aide de la base de donn&eacute;es Factiva. Des articles de journaux dont le titre et le premier paragraphe contenaient le mot &laquo;&nbsp;menace-s&nbsp;&raquo; ont &eacute;t&eacute; s&eacute;lectionn&eacute;s sur une p&eacute;riode de 18 mois, de janvier 2012 &agrave; septembre 2013. Les articles de journaux ont &eacute;t&eacute; lus plusieurs fois puis analys&eacute;s quant &agrave; leur contenu. Deux codeurs ind&eacute;pendants ont class&eacute; l&rsquo;ensemble des articles des journaux, &eacute;non&ccedil;ant des menaces soci&eacute;tales, en 7 diff&eacute;rentes cat&eacute;gories &agrave; l&rsquo;aide de la m&eacute;thode d&rsquo;analyse de contenu. Le coefficient de fid&eacute;lit&eacute; inter-codeurs<sup><a class="footnotecall" href="#ftn1" id="bodyftn1">1</a></sup> calcul&eacute; pour tous les items a atteint un niveau satisfaisant (.93).</p> <p class="texte">Ensuite, l&rsquo;objectif &eacute;tait d&rsquo;&eacute;laborer le classement des menaces soci&eacute;tales contemporaines per&ccedil;ues par les personnes dans le contexte fran&ccedil;ais, puis d&rsquo;examiner l&rsquo;existence &eacute;ventuelle d&rsquo;un lien entre le classement des menaces soci&eacute;tales &eacute;voqu&eacute;es par la presse &eacute;crite fran&ccedil;aise et le classement des menaces soci&eacute;tales per&ccedil;ues par les individus. Les participants (<em>N</em>&nbsp;= 52) &agrave; cette &eacute;tude men&eacute;e par questionnaire &eacute;taient les &eacute;tudiant-e-s en Licence de Psychologie (<em>M</em>&nbsp;= 21.37, <em>SD</em>&nbsp;= 4.02) &agrave; l&rsquo;Institut de Psychologie de l&rsquo;Universit&eacute; Paris Descartes. L&rsquo;&eacute;chantillon &eacute;tait compos&eacute; de 73.10&nbsp;% de femmes et de 26.90&nbsp;% d&rsquo;hommes. On a demand&eacute; aux participants de compl&eacute;ter par une t&acirc;che d&rsquo;association libre avec une contrainte de 10 &eacute;v&eacute;nements&nbsp;; ils avaient comme consigne de lister les &eacute;v&eacute;nements concrets ou les diff&eacute;rents domaines sources de menace et d&rsquo;inqui&eacute;tude pour eux.</p> <h1 class="texte">R&eacute;sultats</h1> <p class="texte">Les participants ont produit au total 199 &eacute;vocations li&eacute;es aux &eacute;v&eacute;nements soci&eacute;taux mena&ccedil;ants issus de l&rsquo;actualit&eacute; m&eacute;diatique lors de la t&acirc;che d&rsquo;association libre. La cat&eacute;gorisation des &eacute;vocations a &eacute;t&eacute; effectu&eacute;e sur la base de 7 cat&eacute;gories de menaces soci&eacute;tales qui ont &eacute;t&eacute; employ&eacute;es pour cat&eacute;goriser les articles de la presse &eacute;crite. Les &eacute;vocations des participants ont &eacute;t&eacute; cat&eacute;goris&eacute;es sur la base de similitude s&eacute;mantique des concepts &eacute;voqu&eacute;s (par ex., &laquo;&nbsp;la prise de pouvoir d&rsquo;un dictateur&nbsp;&raquo; &eacute;tait cat&eacute;goris&eacute; comme une menace li&eacute;e &agrave; la politique, &laquo;&nbsp;le terrorisme&nbsp;&raquo; a &eacute;t&eacute; cat&eacute;goris&eacute; comme une menace li&eacute;e &agrave; la s&eacute;curit&eacute;, etc.) &agrave; l&rsquo;aide de la m&eacute;thode d&rsquo;analyse de contenu. Les r&eacute;sultats en pourcentages du classement des menaces soci&eacute;tales per&ccedil;ues par les participants compar&eacute;s avec les r&eacute;sultats en pourcentages du classement des menaces soci&eacute;tales issues de la presse &eacute;crite fran&ccedil;aise sont repr&eacute;sent&eacute;s dans la figure&nbsp;1. Les principaux r&eacute;sultats indiquent que parmi les menaces soci&eacute;tales les plus fr&eacute;quemment &eacute;voqu&eacute;es par la presse &eacute;crite fran&ccedil;aise figurent les menaces li&eacute;es &agrave; l&rsquo;&eacute;conomie (34.20&nbsp;%), &agrave; la soci&eacute;t&eacute; et son fonctionnement (16.84&nbsp;%) et &agrave; l&rsquo;environnement (15.29&nbsp;%). Toutefois, parmi les menaces soci&eacute;tales qui ont &eacute;t&eacute; les plus fr&eacute;quemment &eacute;voqu&eacute;es par les participants figurent les menaces li&eacute;es &agrave; la s&eacute;curit&eacute; (37.19&nbsp;%), &agrave; la politique (21.11&nbsp;%) et &agrave; l&rsquo;environnement (13.57&nbsp;%). Le test d&rsquo;ind&eacute;pendance du Khi&sup2; a montr&eacute; que les fr&eacute;quences des cat&eacute;gories du classement des menaces soci&eacute;tales issues de la presse &eacute;crite fran&ccedil;aise et les fr&eacute;quences des cat&eacute;gories du classement des menaces soci&eacute;tales per&ccedil;ues par les participants et ne sont pas li&eacute;es, <em>&chi;&sup2;</em> (36, <em>N</em>&nbsp;= 7)&nbsp;= 42.01, <em>p</em>&nbsp;= .227. Ce r&eacute;sultat indique que la presse &eacute;crite ne contribuerait pas directement &agrave; la construction des principales cat&eacute;gories des menaces soci&eacute;tales per&ccedil;ues par les participants.</p> <p class="titreillustration">Figure&nbsp;1. Classement des menaces soci&eacute;tales issues de la presse &eacute;crite fran&ccedil;aise par comparaison avec le classement des menaces soci&eacute;tales per&ccedil;ues par les participants</p> <p style="margin-bottom: 11px; text-align: center;"><img height="340" src="https://www.numerev.com/img/ck_467_16_image55.png" width="650" /></p> <p style="margin-bottom: 11px; text-align: center;">&nbsp;</p> <h1 class="texte">Discussion</h1> <p class="texte">Cette recherche a apport&eacute; une contribution quant &agrave; l&rsquo;&eacute;laboration d&rsquo;un classement des principales cat&eacute;gories des menaces soci&eacute;tales issues de la presse &eacute;crite fran&ccedil;aise et des menaces soci&eacute;tales actuelles per&ccedil;ues par les individus dans le contexte fran&ccedil;ais. Comme nous l&rsquo;avons expos&eacute; dans l&rsquo;introduction, la perception d&rsquo;une menace se construirait lors d&rsquo;une interaction entre un menac&eacute; et un mena&ccedil;ant, qui r&eacute;f&egrave;re &agrave; une situation, &agrave; un groupe social ou &agrave; un individu (Caillaud, Bonnot, &amp; Drozda-Senkowska, 2017). Les m&eacute;dias sont &eacute;galement l&rsquo;un des vecteurs de transmission sociale (Haas, 2012) qui contribuent &agrave; la construction des menaces soci&eacute;tales. Toutefois, les principaux r&eacute;sultats de cette recherche sugg&egrave;rent qu&rsquo;il n&rsquo;y a pas de lien entre les fr&eacute;quences du classement des menaces soci&eacute;tales issues de la presse &eacute;crite fran&ccedil;aise et les fr&eacute;quences du classement des menaces soci&eacute;tales per&ccedil;ues par les participants. Cela signifie que la presse &eacute;crite fran&ccedil;aise ne contribuerait pas de fa&ccedil;on majoritaire &agrave; la construction des menaces soci&eacute;tales per&ccedil;ues par les personnes, alors m&ecirc;me que la presse &eacute;crite devrait avoir un r&ocirc;le d&eacute;terminant dans la formation des opinions (Hoffman, 2013) et des repr&eacute;sentations sociales des personnes (Moscovici, 1961/1976). Toutefois, ce type de conclusion serait &agrave; prendre avec pr&eacute;caution compte tenu du fait que l&rsquo;&eacute;chantillon des participants devrait &ecirc;tre davantage repr&eacute;sentatif de la population fran&ccedil;aise. De plus, la presse &eacute;crite constitue seulement l&rsquo;un des vecteurs possibles de la transmission sociale, parmi d&rsquo;autres vecteurs tels que les institutions et les diff&eacute;rents groupes sociaux (Haas, 2012) ou encore les discours des hommes politiques (Bonelli, 2017). Les diff&eacute;rentes menaces soci&eacute;tales sont utilis&eacute;es dans les discours des hommes politiques car la r&eacute;duction de la menace se situe directement au c&oelig;ur du travail politique (Arciszewski, 2004). Or, les diff&eacute;rentes menaces qui p&egrave;sent sur la collectivit&eacute;, allant des &eacute;pid&eacute;mies sanitaires et du changement climatique &agrave; l&rsquo;immigration et l&rsquo;effondrement des syst&egrave;mes politiques, remettent en question directement l&rsquo;ordre symbolique construit par l&rsquo;Etat (Bonelli, 2017).</p> <p class="texte">De plus, la perception d&rsquo;une menace serait le r&eacute;sultat des processus de construction sociale o&ugrave; interviennent diverses projections et imaginations ainsi que des situations v&eacute;cues, aussi bien au niveau individuel qu&rsquo;au niveau collectif (Jodelet, 2017). Les processus de construction sociale prennent d&rsquo;autant plus d&rsquo;importance que la menace pr&eacute;sente un caract&egrave;re flou, invisible et non palpable, comme c&rsquo;est le cas des menaces soci&eacute;tales actuelles telles que la crise &eacute;conomique, le r&eacute;chauffement climatique ou encore les ondes &eacute;manant de nos t&eacute;l&eacute;phones portables. Par cons&eacute;quent, en s&rsquo;inscrivant dans l&rsquo;approche de l&rsquo;interactionnisme symbolique (Mead, 1934/2015), il serait n&eacute;cessaire de prendre en consid&eacute;ration &eacute;galement la nature des processus d&rsquo;interactions sociales et leur r&ocirc;le dans les processus de construction sociale des menaces soci&eacute;tales. Or, la communication, aussi bien politique qu&rsquo;interpersonnelle, constitue l&rsquo;une des variables essentielles qui contribuent &agrave; la construction de la signification (<em>meaning</em>) que les personnes se font du monde qui les entoure.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn1" id="ftn1">1</a> Le coefficient de fid&eacute;lit&eacute; inter-codeurs, bas&eacute; sur le calcul de pourcentage d&rsquo;accord entre les deux codeurs, a &eacute;t&eacute; calcul&eacute; en divisant le nombre d&rsquo;accords entre les deux codeurs par le nombre total d&rsquo;&eacute;vocations.</p> <p class="bibliographie">Arciszewski,&nbsp;T. (2004). <em>La menace&nbsp;: sa perception, ses effets, son utilisation</em>. Th&egrave;se de doctorat. Paris, France&nbsp;: Universit&eacute; Paris Descartes.</p> <p class="bibliographie">Berger,&nbsp;P.&nbsp;L., &amp; Luckmann,&nbsp;T. (1966). <em>The Social Construction of Reality. A Treatise in the Sociology of Knowledge</em>. New York, US&nbsp;: Penguin Books.</p> <p class="bibliographie">Bonelli,&nbsp;L. (2010). <em>La France a peur&nbsp;: Une histoire sociale de l&rsquo;&laquo;&nbsp;ins&eacute;curit&eacute;&nbsp;&raquo;</em>. Paris, France&nbsp;: La D&eacute;couverte.</p> <p class="bibliographie">Bonelli,&nbsp;L. (2017). Entrepreneurs de cause et construction sociale des menaces. Dans&nbsp;S.&nbsp;Caillaud,&nbsp;V.&nbsp;Bonnot, et E.&nbsp;Drozda-Senkowska (dir.), <em>Menaces sociales et environnementales&nbsp;: repenser la soci&eacute;t&eacute; des risques</em> (pp.&nbsp;43‑55). Rennes, France&nbsp;: Presses Universitaires de Rennes.</p> <p class="bibliographie">Caillaud,&nbsp;S., Bonnot,&nbsp;V., &amp; Drozda-Senkowska,&nbsp;E. (2017). <em>Menaces sociales et environnementales&nbsp;: repenser la soci&eacute;t&eacute; des risques</em>, Rennes, France&nbsp;: Presses Universitaires de Rennes.</p> <p class="bibliographie">Gamson,&nbsp;W.&nbsp;A., &amp; Modigliani,&nbsp;A. (1989). Media discourse and public opinion on nuclear power. <em>American Journal of Sociology, 95</em>, 1‑37.</p> <p class="bibliographie">Haas,&nbsp;V. (2012). <em>Traces, silences, secrets. Une approche psychosociale de la m&eacute;moire et de l&rsquo;oubli collectifs</em>. Synth&egrave;se des travaux en vue de l&rsquo;obtention du dipl&ocirc;me d&rsquo;habilitation &agrave; diriger des recherches. Paris, France&nbsp;: Universit&eacute; Paris Descartes.</p> <p class="bibliographie">Heath,&nbsp;L. (1984). Impact of newspaper crime reports on fear of crime: Multimethodological investigation. <em>Journal of Personality and Social Psychology</em>, <em>47</em>(2), 263‑276. doi&nbsp;: <a href="https://www.doi.org/10.1037/0022-3514.47.2.263">10.1037/0022‑3514.47.2.263</a></p> <p class="bibliographie">Hoffman,&nbsp;L.&nbsp;H. (2013). When the world outside gets inside your head: The effects of media context on perceptions of public opinion. <em>Communication Research</em>, <em>40</em>(4), 463‑485. doi&nbsp;: <a href="https://www.doi.org/10.1177/0093650211435938">10.1177/0093650211435938</a></p> <p class="bibliographie">Jodelet,&nbsp;D. (2017). Les menaces&nbsp;: passer du mot au concept. Dans S.&nbsp;Caillaud,&nbsp;V. Bonnot, et E.&nbsp;Drozda-Senkowska (dir.), <em>Menaces sociales et environnementales&nbsp;: repenser la soci&eacute;t&eacute; des risques</em> (pp.&nbsp;17‑30). Rennes, France&nbsp;: Presses Universitaires de Rennes.</p> <p class="bibliographie">Jovchelovitch,&nbsp;S. (2008). The rehabilitation of common sense: Social representations, science and cognitive polyphasia. <em>Journal for The Theory of Social Behaviour</em>, <em>38</em>(4), 431‑448. doi&nbsp;: <a href="https://doi.org/10.1111/j.1468-5914.2008.00378.x">10.1111/j.1468‑5914.2008.00378.x</a></p> <p class="bibliographie">Kasperson,&nbsp;R.&nbsp;E., Renn,&nbsp;O., Slovic,&nbsp;P., Brown, H.&nbsp;S., Emel,&nbsp;J., Goble,&nbsp;R., &amp; ... Ratick,&nbsp;S. (1988). The social amplification of risk&nbsp;: A conceptual framework. <em>Risk Analysis</em>, <em>8</em>(2), 177‑187. doi&nbsp;: <a href="https://doi.org/10.1111/j.1539-6924.1988.tb01168.x">10.1111/j.1539‑6924.1988.tb01168.x</a></p> <p class="bibliographie">Kpanake,&nbsp;L., Chauvin,&nbsp;B., &amp; Mullet,&nbsp;E. (2008). Societal risk perception among African villagers without access to the media. <em>Risk Analysis</em>, <em>28</em>(1), 193‑202. doi&nbsp;: <a href="https://doi.org/10.1111/j.1539-6924.2008.01008.x">10.1111/j.1539‑6924.2008.01008.x</a></p> <p class="bibliographie">Mead,&nbsp;G.&nbsp;H. (1934/2015). <em>Mind, self &amp; society&nbsp;: from the standpoint of a social behaviorist</em>. Chicago, US: The University of Chicago Press.</p> <p class="bibliographie">Moscovici,&nbsp;S. (1961/1976). <em>La psychanalyse, son image et son publique</em>. Paris, France&nbsp;: PUF.</p> <p class="bibliographie">Orfali,&nbsp;B. (2005). <em>La soci&eacute;t&eacute; face aux &eacute;v&eacute;nements extraordinaires&nbsp;: Entre fascination et crainte</em>. Paris, France&nbsp;: Zagros.</p> <p class="bibliographie">Rouquette, M.‑L. (1973). La pens&eacute;e sociale. Dans S.&nbsp;Moscovici (dir.). <em>Introduction &agrave; la psychologie sociale </em>(Vol.&nbsp;2, pp.&nbsp;299‑327). Paris, France&nbsp;: Larousse.</p> <p class="bibliographie">Rouquette, M.&nbsp;L. (1998). <em>La communication sociale</em>. Paris, France&nbsp;: Dunod.</p> <p class="bibliographie">Weick, K.&nbsp;E. (1993). The collapse of Sensemaking in Organizations: The Mann Gulch Disaster. <em>Administrative Science Quarterly, 38</em>(4), 628‑652.</p>