<p class="texte"><strong>DOSSIER : L&#39;AVENIR DE LA DEMOCRATIE</strong></p> <p class="texte"><em>Fran&ccedil;oise Massart-Pi&eacute;rard est professeur &eacute;m&eacute;rite de l&rsquo;Universit&eacute; Catholique de Louvain docteur en sciences politiques et sociales&nbsp;(UCL). Elle a dirig&eacute; l&rsquo;Unit&eacute; des Relations internationales du D&eacute;partement des sciences politiques et sociales&nbsp;(UCL). Ses publications portent sur l&rsquo;Europe des R&eacute;gions, la politique ext&eacute;rieure des entit&eacute;s f&eacute;d&eacute;r&eacute;es, les paradiplomatie et protodiplomatie, les espaces culturels et linguistiques internationaux (la Francophonie, en particulier). Elle est l&rsquo;auteur, entre autres, de L&rsquo;Europe en tous ses Etats&nbsp;: entre mythe et contrainte communautaire&nbsp;?</em></p> <p class="texte"><strong>SOMMAIRE</strong></p> <p><strong>La d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;: poids politique et faiblesse d&rsquo;un slogan venu d&rsquo;en haut</strong></p> <p>La d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne, une question en continuel devenir</p> <p>&laquo;&nbsp;La d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;&raquo;&nbsp;: une expression pour quelle(s) signification(s)&nbsp;?</p> <p>Le d&eacute;ficit d&eacute;mocratique, un d&eacute;ficit de d&eacute;mocratie cognitive</p> <p>Des d&eacute;nominations de l&rsquo;Europe en construction et de leurs connotations</p> <p>Biais s&eacute;mantiques et biais cognitifs</p> <p>L&rsquo;ombre de tabous</p> <p>Confusions</p> <p>Abus de langage&nbsp;?</p> <p>Empreintes&nbsp;: prisme &eacute;tatique et d&eacute;pendance au sentier fonctionnaliste</p> <p>Le prisme &eacute;tatique&nbsp;: l&rsquo;illusion de savoir</p> <p>La d&eacute;pendance au sentier fonctionnaliste</p> <p><strong>La d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne par le bas&nbsp;: opinions et comportements des citoyens de l&rsquo;Union</strong></p> <p>Evolution des opinions relatives &agrave; la d&eacute;mocratie</p> <p>Dimension cognitive de la citoyennet&eacute;</p> <p>Les comportements politiques</p> <p>L&rsquo;abstentionnisme, un signal fort</p> <p>Des raisons de l&rsquo;abstentionnisme aux &eacute;lections europ&eacute;ennes</p> <p>D&eacute;ficit d&rsquo;information, d&eacute;faillance de la communication et biais m&eacute;diatique</p> <p>Opacit&eacute; des enjeux et incoh&eacute;rence des objectifs poursuivis</p> <p>Le poids de la culture politique nationale&nbsp;</p> <p>De la culture civique des citoyens de l&rsquo;Union</p> <p>L&rsquo;&laquo;&nbsp;eurod&eacute;mocratie&nbsp;&raquo; aujourd&rsquo;hui</p> <p>L&rsquo;&eacute;tat des demandes envers l&rsquo;Union</p> <p>Conclusion&nbsp;: &laquo;&nbsp;Changer l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;&raquo;&nbsp;?</p> <p class="texte">L&rsquo;Union europ&eacute;enne, par les mots utilis&eacute;s et les expressions (l&rsquo;eurojargon) qu&rsquo;elle cr&eacute;e, pr&eacute;sente une apparence trompeuse. Nombreux sont ceux qui font illusion et compliquent d&egrave;s lors sa compr&eacute;hension par celui qui porte le nom de citoyen de l&rsquo;Union europ&eacute;enne avec pour cons&eacute;quence la mont&eacute;e d&rsquo;un recul vis &agrave; vis d&rsquo;elle. Ce recul, malgr&eacute; le discours, malgr&eacute; les r&eacute;visions de Trait&eacute;s en faveur de l&rsquo;institution d&rsquo;une citoyennet&eacute; europ&eacute;enne, ne r&eacute;gresse pas. Et les oppositions &agrave; l&rsquo;Union europ&eacute;enne prennent actuellement une forme inqui&eacute;tante.</p> <p class="texte">La difficult&eacute; d&rsquo;assurer la d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne tient pour partie &agrave; des raisons qui sont d&rsquo;ordre s&eacute;mantique. Parler sans cesse de &laquo;&nbsp;L&rsquo;Europe proche des citoyens&nbsp;&raquo; au point d&rsquo;en faire un slogan ne suffit pas. Des biais linguistiques et cognitifs s&rsquo;interposent entre l&rsquo;Union europ&eacute;enne et ses citoyens. Ces biais fragilisent sa l&eacute;gitimit&eacute;. Le prisme &eacute;tatique reste tr&egrave;s pr&eacute;sent aupr&egrave;s des ressortissants de l&rsquo;Union europ&eacute;enne tandis que les interf&eacute;rences entre l&rsquo;Union europ&eacute;enne et les Etats membres se multiplient. Ces donnes affectent la visibilit&eacute; de l&rsquo;identit&eacute; europ&eacute;enne et la perception de son fonctionnement. La complication d&rsquo;&ecirc;tre citoyen de l&rsquo;Union europ&eacute;enne peut &ecirc;tre expliqu&eacute;e par le vocabulaire utilis&eacute; par cette Organisation. Bien souvent il ne correspond que peu ou pas &agrave; la r&eacute;alit&eacute; qu&rsquo;il est cens&eacute; couvrir. Or, les mots ont un poids. Ils peuvent avoir un poids politique et provoquer des biais cognitifs. La fluidit&eacute; du temps assortissant le processus d&rsquo;int&eacute;gration -un processus toujours en devenir dont ni la fin ni la finalit&eacute; ne sont pr&eacute;cis&eacute;es dans les textes officiels- est un facteur qui renforce l&rsquo;inconfort des citoyens de l&rsquo;Union europ&eacute;enne en tant que citoyens. L&rsquo;impact de ces particularit&eacute;s sur la compr&eacute;hension de la construction europ&eacute;enne -&agrave; laquelle les media ne contribuent pas-, l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t qui lui est port&eacute;, le soutien qui lui est donn&eacute;, sera v&eacute;rifi&eacute; &agrave; partir de l&rsquo;analyse de sondages d&rsquo;opinion pour d&eacute;gager, dans l&rsquo;&eacute;tat actuel des connaissances, les tendances de la d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;ennes et de son devenir.</p> <h1 class="texte">La d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;: poids politique et faiblesse d&rsquo;un slogan venu d&rsquo;en haut</h1> <h2 class="texte">La d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne, une question en continuel devenir</h2> <p class="texte">L&rsquo;inqui&eacute;tude &agrave; propos de l&rsquo;avenir de l&rsquo;Union europ&eacute;enne grandit. Les critiques s&rsquo;amoncellent. Les annonces pr&eacute;disant son &eacute;clatement ou sa fin se multiplient.<strong> </strong>L&rsquo;Union europ&eacute;enne doit faire face &agrave; la mont&eacute;e de l&rsquo;euroscepticisme.&nbsp;Lors des &eacute;lections europ&eacute;ennes de mai 2019, le refrain des partis politiques &agrave; propos d&rsquo;une Europe diff&eacute;rente s&rsquo;est fait entendre. Il fait recette sans que, le plus souvent, soit d&eacute;finie de mani&egrave;re pr&eacute;cise cette autre Europe que l&rsquo;on &eacute;voque. Trop de clarification &agrave; son propos risquerait sans doute de porter ombrage &agrave; la repr&eacute;sentation que chacun en a. L&rsquo;Europe a longtemps rev&ecirc;tu une dimension mythique. Elle suscitait l&rsquo;attrait. Elle a d&rsquo;abord eu l&rsquo;image d&rsquo;une demi-d&eacute;esse. Puis le mythe de l&rsquo;Europe du grand march&eacute; -&nbsp;baptis&eacute; Europe 92&nbsp;- a suscit&eacute; l&rsquo;engouement en Europe et a, avec L&rsquo;Acte unique europ&eacute;en, lanc&eacute; un mouvement favorable &agrave; l&rsquo;int&eacute;gration dans d&rsquo;autres r&eacute;gions du monde. L&rsquo;une des deux faces du mythe, &agrave; savoir l&rsquo;attraction s&rsquo;est alors manifest&eacute;e. Un recul a eu lieu lors de la confrontation du mythe &agrave; la r&eacute;alit&eacute; du Trait&eacute; de Maastricht. Le d&eacute;senchantement voire la r&eacute;pulsion, autre face du mythe, est d&eacute;sormais pr&eacute;sente chez certains et pour des raisons souvent diverses. Jusqu&rsquo;aux ratifications de ce Trait&eacute; sur l&rsquo;Union europ&eacute;enne les opinions publiques &eacute;taient largement rest&eacute;es en retrait du processus d&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe. Avec lui, l&rsquo;enthousiasme provoqu&eacute; par le &laquo;&nbsp;march&eacute; unique&nbsp;&raquo; s&rsquo;effondre. Il fait place &agrave; la m&eacute;fiance &agrave; l&rsquo;&eacute;gard des Institutions communautaires, au repli sur les identit&eacute;s nationales, &agrave; la peur de voir s&rsquo;effacer la souverainet&eacute; nationale. Ce, jusqu&rsquo;au risque de remettre en cause le projet d&rsquo;Union europ&eacute;enne alors que l&rsquo;Acte Unique europ&eacute;en l&rsquo;ayant pr&eacute;c&eacute;d&eacute; et qui portait essentiellement sur le volet &eacute;conomique et commercial de l&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe avait &eacute;t&eacute; soutenu. La preuve est ainsi apport&eacute;e avec le Trait&eacute; sign&eacute; &agrave; Maastricht que les Europ&eacute;ens n&rsquo;&eacute;taient pas pr&ecirc;ts &agrave; se lancer dans une nouvelle aventure commune&nbsp;- de dimension politique cette fois- au sein d&rsquo;une Organisation rebaptis&eacute;e &laquo;&nbsp;Union europ&eacute;enne&nbsp;&raquo;.</p> <p class="texte">L&rsquo;adoption du Trait&eacute; de Maastricht qui exigeait sa ratification par les parlements nationaux aurait d&ucirc; porter &agrave; l&rsquo;agenda un d&eacute;bat sur l&rsquo;orientation du projet &agrave; r&eacute;aliser, sa signification, ainsi que sur la nature de l&rsquo;entit&eacute; &agrave; fonder. Cette opportunit&eacute; n&rsquo;a pu &ecirc;tre exploit&eacute;e en raison de la complexit&eacute; du Trait&eacute; dont la lecture &eacute;tait difficilement accessible aux non sp&eacute;cialistes. Intervient alors un ph&eacute;nom&egrave;ne d&eacute;tect&eacute; dans d&rsquo;autres circonstances, encore. L&rsquo;opinion se montre, pour cette raison, davantage sensible aux arguments des d&eacute;tracteurs. Plus tard, le rejet du <a href="http://www.touteleurope.fr/fr/organisation/droit-communautaire/les-traites/presentation/traite-etablissant-une-constitution-pour-l-europe-2004.html">Trait&eacute; &eacute;tablissant une &laquo;&nbsp;Constitution&nbsp;&raquo; pour l&rsquo;Europe</a> en 2005 par les Fran&ccedil;ais et les N&eacute;erlandais montre, &agrave; l&rsquo;&eacute;chelle nationale, le maintien du recul du soutien &agrave; une Europe politique plus int&eacute;gr&eacute;e. Actuellement de nouvelles ruptures de nature politique sautent aux yeux. Elles portent le nom&nbsp;de retrait (Brexit, Frexit), de nationalisme, de populisme, de protectionnisme. L&rsquo;Union europ&eacute;enne devient pour un nombre croissant de ses citoyens, de leurs repr&eacute;sentants et de leurs gouvernements la cause de bien des maux. Elle joue &agrave; certains &eacute;gards le r&ocirc;le de paratonnerre, cet instrument qui capte les foudres&nbsp;: celles dues &agrave; ce qui se passe au-dessus d&rsquo;elle (la mondialisation), &agrave; ce qui se passe &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur d&rsquo;elle-m&ecirc;me au sein des Etats, des Nations, des Etats-Nations.&nbsp;N&eacute;anmoins, actuellement, le soutien &agrave; l&#39;Union &eacute;conomique et mon&eacute;taire ainsi que le soutien en faveur de l&#39;euro demeurent &agrave; un niveau historiquement &eacute;lev&eacute;. Selon la derni&egrave;re enqu&ecirc;te eurobarom&egrave;tre avant les &eacute;lections europ&eacute;ennes de 2019, trois quarts des r&eacute;pondants (74&nbsp;%) dans la zone euro soutiennent la monnaie europ&eacute;enne, appr&eacute;ci&eacute;e &eacute;galement parce qu&rsquo;elle repr&eacute;sente un facteur d&rsquo;identit&eacute; de l&rsquo;Europe. La composante &eacute;conomique et mon&eacute;taire de l&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe reste largement appr&eacute;ci&eacute;e malgr&eacute; les &eacute;volutions qu&rsquo;elle a connues.</p> <p class="texte">Deux sujets pouss&eacute;s par ce contexte ont r&eacute;&eacute;merg&eacute; dans le d&eacute;bat public &agrave; l&rsquo;approche des &eacute;lections europ&eacute;ennes, celui de la d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne et, en lien avec lui, celui des failles du processus de construction de l&rsquo;Europe sur le plan cognitif. Concernant le premier, un &laquo;&nbsp;Manifeste pour la d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Europe&nbsp;&raquo; publi&eacute; dans le Monde a &eacute;t&eacute; mis en ligne le 9 d&eacute;cembre 2018 par un collectif de plus de 120 intellectuels<sup><a class="footnotecall" href="#ftn1" id="bodyftn1">1</a></sup>avec l&rsquo;espoir que la cr&eacute;ation de nouvelles institutions -&nbsp;plus d&eacute;mocratiques&nbsp;&ndash; permettra de renouer avec les citoyens europ&eacute;ens et d&rsquo;enrayer la progression des populismes en Europe. Un ouvrage titr&eacute;&nbsp;&laquo;&nbsp;Pour un Trait&eacute; de d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Europe&nbsp;&raquo; et publi&eacute; en ao&ucirc;t 2017 l&rsquo;a pr&eacute;c&eacute;d&eacute; dans le but d&eacute;clar&eacute; de&nbsp;&laquo;&nbsp;contenir le d&eacute;ferlement de la vague populiste qui risque de balayer nos d&eacute;mocraties&nbsp;?<sup><a class="footnotecall" href="#ftn2" id="bodyftn2">2</a></sup>&hellip;et &laquo;&nbsp;pr&eacute;venir l&rsquo;&eacute;clatement de l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;?&nbsp;&raquo;. Le Manifeste reprend la proposition de lancer un &laquo;&nbsp;Trait&eacute; de d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Europe&nbsp;&raquo; et d&rsquo;ainsi ouvrir un d&eacute;bat sur le d&eacute;ficit d&eacute;mocratique de l&rsquo;UE. Quant au second sujet, &agrave; savoir l&rsquo;introduction d&rsquo;une approche s&eacute;mantique du processus d&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe, il prend lui aussi de l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t en raison du creusage de la distance entre les Europ&eacute;ens et l&rsquo;Union malgr&eacute; l&rsquo;accroissement des pouvoirs du Parlement europ&eacute;en et l&rsquo;institution d&rsquo;une citoyennet&eacute; de l&rsquo;Union&nbsp;: Le Parlement europ&eacute;en a vu s&rsquo;&eacute;largir les domaines dans lesquels il peut exercer un pouvoir de cod&eacute;cision avec le Conseil. Aussi, a-t-il abandonn&eacute; un r&ocirc;le d&rsquo;assembl&eacute;e consultative au profit de celui de col&eacute;gislateur. Le Trait&eacute; de Lisbonne a encore renforc&eacute; ses pouvoirs. Il a obtenu une influence politique dans la d&eacute;signation de la Commission et de son pr&eacute;sident. Par ailleurs l&rsquo;initiative citoyenne europ&eacute;enne a &eacute;t&eacute; institu&eacute;e. Pour davantage de transparence, certaines sessions du Conseil (des Ministres) ont &eacute;t&eacute; rendues publiques afin de mieux informer les citoyens europ&eacute;ens. La d&eacute;saffection vis-&agrave;-vis de l&rsquo;Europe s&rsquo;est pourtant &agrave; nouveau exprim&eacute;e dans la faible participation aux &eacute;lections europ&eacute;ennes<strong> </strong>du 23 au 26 mai 2019 dans les 28 Etats Membres de l&rsquo;Union&nbsp;: 50,95&nbsp;% des &eacute;lecteurs se sont rendus aux urnes.<strong> </strong>Pour comprendre ce paradoxe, des causes d&rsquo;une autre nature que les solutions pr&eacute;sent&eacute;es dans les textes officiels doivent &ecirc;tre recherch&eacute;es&hellip;Le d&eacute;calage entre le renforcement incessant du processus de l&eacute;gitimation formelle conf&eacute;r&eacute;e par les Trait&eacute;s au Parlement europ&eacute;en et la mani&egrave;re dont les avanc&eacute;es offertes sont saisies par les Europ&eacute;ens pose question.</p> <h2 class="texte">&laquo;&nbsp;La d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;&raquo;&nbsp;: une expression pour quelle(s) signification(s)&nbsp;?</h2> <p class="texte">Un vice s&eacute;mantique persistant explique le manque de lisibilit&eacute; de la construction de l&rsquo;Europe. L&rsquo;Union europ&eacute;enne semble n&rsquo;avoir pas compris que &laquo;&nbsp;&hellip;le poids des mots conserve toute son importance dans un monde de plus en plus ouvert et mondialis&eacute;, o&ugrave; ils d&eacute;signent une r&eacute;alit&eacute; et font, parfois m&ecirc;me, la r&eacute;alit&eacute;.&nbsp;&raquo;<sup><a class="footnotecall" href="#ftn3" id="bodyftn3">3</a></sup>Pour le politologue, la d&eacute;mocratisation est comprise comme &laquo;&nbsp;un moyen de faire pression contre les pouvoirs institu&eacute;s&nbsp;&raquo;. Le terme renvoie &agrave; l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;un processus de partage des pouvoirs<sup><a class="footnotecall" href="#ftn4" id="bodyftn4">4</a></sup>. Dans le langage de l&rsquo;Union europ&eacute;enne,&nbsp;le terme &laquo;&nbsp;d&eacute;mocratisation&nbsp;&raquo; laisse entendre que l&rsquo;Union n&rsquo;est pas encore d&eacute;mocratique. Elle souffre d&rsquo;un d&eacute;ficit d&eacute;mocratique.<strong> </strong>Cette expression veut rendre compte d&rsquo;un manque de l&eacute;gitimit&eacute; d&eacute;mocratique de l&rsquo;Union. Le d&eacute;ficit d&eacute;mocratique est une formule qui a fourni aux Institutions europ&eacute;ennes un argument de poids pour obtenir le renforcement de leur l&eacute;gitimit&eacute;. Il ne faut gu&egrave;re pourtant confondre l&eacute;gitimit&eacute; et l&eacute;gitimation.&nbsp;&laquo;&nbsp;Les proc&eacute;dures de l&eacute;gitimation nous renseignent davantage(&hellip;) sur les repr&eacute;sentations que les dirigeants et leurs interlocuteurs habituels ont des fondements de la l&eacute;gitimit&eacute;, que sur les &laquo;&nbsp;raisons&nbsp;&raquo; pour lesquelles les groupes et les individus consentent effectivement &agrave; l&rsquo;exercice d&rsquo;un pouvoir politique et leur donnent leur soutien&nbsp;&raquo;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn5" id="bodyftn5">5</a></sup>Le Parlement europ&eacute;en, auteur du discours sur le d&eacute;ficit d&eacute;mocratique de l&rsquo;Union, l&rsquo;utilise pour obtenir des pouvoirs accrus et augmenter sa l&eacute;gitimit&eacute;<sup><a class="footnotecall" href="#ftn6" id="bodyftn6">6</a></sup>.Il est parvenu &agrave; imposer cette expression. L&rsquo;assimilation de la l&eacute;gitimit&eacute; d&eacute;mocratique au formalisme parlementariste l&rsquo;a servi &agrave; cette fin.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn7" id="bodyftn7">7</a></sup> O.&nbsp;Costa et N.&nbsp;Brack confirment la recherche constante du Parlement europ&eacute;en d&rsquo;intensifier son influence au sein du r&eacute;gime europ&eacute;en. Il a proc&eacute;d&eacute; &agrave; des r&eacute;formes r&eacute;guli&egrave;res de son r&egrave;glement pour ce faire. Cette initiative a pour r&eacute;sultat de diminuer la libert&eacute; d&rsquo;action des eurod&eacute;put&eacute;s. Le Parlement europ&eacute;en a d&egrave;s lors perdu en repr&eacute;sentativit&eacute;. Il rencontre aussi plus de difficult&eacute; &agrave; faciliter la lisibilit&eacute;, par les citoyens, des enjeux de la construction europ&eacute;enne.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn8" id="bodyftn8">8</a></sup> La d&eacute;marche du Parlement europ&eacute;en reste confin&eacute;e &agrave; l&rsquo;&eacute;chelle europ&eacute;enne en vue d&rsquo;op&eacute;rer une redistribution des pouvoirs entre les Institutions de l&rsquo;Union. Le difficile acc&egrave;s des citoyens &agrave; ces Institutions et la complication du syst&egrave;me politique europ&eacute;en qu&rsquo;ils ont du mal &agrave; saisir ne sont pas pris en compte. La d&eacute;mocratisation telle que d&eacute;finie en science politique est ignor&eacute;e dans ce jeu de pouvoir.</p> <h2 class="texte">Le d&eacute;ficit d&eacute;mocratique, un d&eacute;ficit de d&eacute;mocratie cognitive</h2> <p class="texte">Le d&eacute;ficit d&eacute;mocratique explique-t-il les critiques renouvel&eacute;es &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;? Les critiques sont souvent analys&eacute;es &ndash;&nbsp;ce, &agrave; juste titre&nbsp;&ndash; sous l&rsquo;angle du fonctionnement institutionnel. La complexit&eacute; de l&rsquo;architecture de l&rsquo;Union constitue certes une vraie difficult&eacute; pour le citoyen qui ne sait dire exactement qui fait quoi, qui est responsable de quoi, comment sont prises les d&eacute;cisions, quels sont les voies d&rsquo;acc&egrave;s &agrave; cette Organisation, comment les utiliser. Il s&rsquo;agit l&agrave; d&rsquo;un facteur non n&eacute;gligeable d&#39;abstention lors des &eacute;lections europ&eacute;ennes. J.‑L.&nbsp;Quermonne relevait en 2001 d&eacute;j&agrave; le manque de transparence du processus de d&eacute;cision, l&rsquo;h&eacute;g&eacute;monie exerc&eacute;e par les gouvernements nationaux et leurs administrations au d&eacute;triment du Parlement europ&eacute;en, le vide laiss&eacute; sur la sc&egrave;ne politique par l&rsquo;absence de gouvernement europ&eacute;en<sup><a class="footnotecall" href="#ftn9" id="bodyftn9">9</a></sup>. Ces lacunes n&rsquo;ont pas disparu. Aujourd&rsquo;hui encore, malgr&eacute; la r&eacute;vision des Trait&eacute;s,&nbsp;le citoyen europ&eacute;en a tendance &agrave; ignorer ce qu&rsquo;il est en droit de comprendre, en droit d&rsquo;attendre de l&rsquo;Union, en droit d&rsquo;esp&eacute;rer de la pr&eacute;sence des Etats &agrave; ce niveau. Il m&eacute;connait la mani&egrave;re de faire entendre sa voix face aux lobbys qui c&ocirc;toient les instances europ&eacute;ennes avec l&rsquo;espoir de les influencer. Plus fondamental encore, le citoyen europ&eacute;en n&rsquo;a d&rsquo;autre possibilit&eacute; que de poursuivre sa route sans avoir connaissance de l&rsquo;identit&eacute; de l&rsquo;Union en tant que communaut&eacute; politique dont il est un membre. Les sp&eacute;cialistes en &eacute;tudes europ&eacute;ennes ont, eux aussi, des difficult&eacute;s &agrave; se prononcer au sujet du futur de l&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe. Les Hauts responsables europ&eacute;ens sont-ils davantage capables de d&eacute;finir la construction europ&eacute;enne&nbsp;? On peut en douter. La question de l&rsquo;&eacute;tablissement de la nature de l&rsquo;Union europ&eacute;enne reste en suspens. Un handicap suppl&eacute;mentaire pour le citoyen de l&rsquo;Union provient d&rsquo;un probl&egrave;me de temps qui &agrave; son tour multiplie les incertitudes et, par cons&eacute;quent s&egrave;me ou l&rsquo;incr&eacute;dulit&eacute; ou la m&eacute;fiance ou l&rsquo;indiff&eacute;rence. Tout d&rsquo;abord, point capital, la dur&eacute;e du processus est impr&eacute;cis&eacute;e et sa d&eacute;finition sans cesse report&eacute;e. L&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe repose sur un projet mis &agrave; l&rsquo;agenda depuis plus de soixante ans mais son issue reste inconnue. La r&eacute;alisation d&rsquo;une union sans cesse plus proche entre les peuples europ&eacute;ens est projet&eacute;e de Trait&eacute; en Trait&eacute;. La construction europ&eacute;enne qui se trouve en devenir permanent entra&icirc;ne une crise de repr&eacute;sentation. C.&nbsp;Belot a mis en &eacute;vidence le fait que la &laquo;&nbsp;faible connaissance des actions de l&rsquo;Union dans le pr&eacute;sent, et de leur perception de son incompl&eacute;tude comme syst&egrave;me politique&nbsp;&ndash; les citoyens l&rsquo;&eacute;valuent avant tout en r&eacute;f&eacute;rence au futur, et plus particuli&egrave;rement en fonction de la capacit&eacute; qu&rsquo;ils lui reconnaissent &agrave; refl&eacute;ter l&rsquo;avenir ce qu&rsquo;ils souhaitent qu&rsquo;elle soit&nbsp;...Leurs opinions &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de l&rsquo;Union europ&eacute;enne d&eacute;coulent pour partie de la fa&ccedil;on dont ils envisagent l&rsquo;avenir&nbsp;&raquo;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn10" id="bodyftn10">10</a></sup></p> <p class="texte">Les conditions de la d&eacute;mocratie cognitive sont la transparence et l&rsquo;intelligibilit&eacute;. Yves Delahaye, explique &agrave; propos de &laquo;&nbsp;l&rsquo;Europe qui se dit et se veut d&eacute;mocratique&nbsp;&raquo; que &laquo;&nbsp;L&rsquo;une des conditions de la d&eacute;mocratie, c&rsquo;est ce qu&rsquo;un de nos hommes d&rsquo;Etat a appel&eacute; le &lsquo;parler vrai&rsquo;&hellip;..il y a parler vrai lorsque les mots sous les mots vont dans le m&ecirc;me sens que le texte apparent&nbsp;&raquo;. Il existe comme le dit cet auteur, plusieurs niveaux de texte&nbsp;: le texte lisible &laquo;&nbsp;o&ugrave; se trouve exprim&eacute;e la qu&ecirc;te apparente de l&rsquo;auteur&nbsp;&raquo; et sous lequel est r&eacute;v&eacute;l&eacute;e une qu&ecirc;te plus profonde, une qu&ecirc;te d&rsquo;identit&eacute;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn11" id="bodyftn11">11</a></sup> Le manque de transparence tout comme le reproche adress&eacute; &agrave; l&rsquo;Union d&rsquo;&ecirc;tre technocratique, par cons&eacute;quent, pourraient bien &ecirc;tre d&ucirc; &agrave; une d&eacute;fectuosit&eacute; d&rsquo;ordre s&eacute;mantique. Une prise de conscience de l&rsquo;importance du verbe se manifeste. La correspondance de la s&eacute;mantique utilis&eacute;e avec les concepts invoqu&eacute;s est de plus en plus souvent r&eacute;clam&eacute;e. Plus encore, la conviction existe que l&rsquo;avenir d&eacute;mocratique de l&rsquo;Union europ&eacute;enne d&eacute;pend&nbsp;des concepts qui sont construits &agrave; bon escient ou non.</p> <p class="texte">Le Conseil de l&rsquo;Union europ&eacute;enne, dans sa r&eacute;solution du 8 juin 1993, demandait d&rsquo;&eacute;viter l&rsquo;emploi abusif du &laquo;&nbsp;jargon communautaire&nbsp;&raquo;. De son c&ocirc;t&eacute;, la Commission europ&eacute;enne par la voix de son commissaire charg&eacute; de l&rsquo;information s&rsquo;insurgeait contre celui-ci. Il ne manque pas d&rsquo;exemples prouvant l&rsquo;&eacute;cart entre les v&oelig;ux et la r&eacute;alit&eacute;. La proc&eacute;dure baptis&eacute;e &laquo;&nbsp;spitzenkandidat&nbsp;&raquo; est venue enrichir encore, il y a peu, la gamme des mots appartenant au vocabulaire europ&eacute;en. Au tableau du d&eacute;ficit de d&eacute;mocratie cognitive, l&rsquo;impasse ne peut &ecirc;tre faite &agrave; propos de l&rsquo;exigence de rendre le droit compr&eacute;hensible. L&rsquo;intelligibilit&eacute; des lois et des Trait&eacute;s internationaux est devenue un principe fondamental de droit contemporain. Le non-respect de ce crit&egrave;re permet d&rsquo;invalider les lois qui n&rsquo;y r&eacute;pondent pas. Cette exigence rattrape l&rsquo;Union europ&eacute;enne mais pour quelle effectivit&eacute;&nbsp;? Si la qualit&eacute; ex-post de l&rsquo;intelligibilit&eacute; de la loi int&eacute;resse les autorit&eacute;s charg&eacute;es d&#39;appliquer la loi, la &laquo;&nbsp;qualit&eacute;&nbsp;&raquo; ex ante concerne l&#39;information du citoyen sur la l&eacute;gislation en vigueur. Ph. Malaurie fait valoir que l&rsquo;intelligibilit&eacute; des lois s&rsquo;impose &agrave; tout le droit&nbsp;: constitution, trait&eacute;s internationaux, d&eacute;cisions judiciaire, actes administratifs, actes publics et priv&eacute;. On mesure alors &agrave; quel point, elle s&rsquo;applique &agrave; l&rsquo;Union europ&eacute;enne. Il n&rsquo;a de mots assez durs pour incriminer le fait d&rsquo;outrepasser cette obligation&nbsp;: l&rsquo;obscurit&eacute; des lois rend le droit impr&eacute;visible, le transforme en instrument de l&rsquo;arbitraire, un moyen d&rsquo;en terminer avec l&rsquo;&eacute;tat de droit.&nbsp;&laquo;&nbsp;Seule la loi claire, simple, compr&eacute;hensible de tous peut &ecirc;tre efficace et assurer ce que l&rsquo;on peut attendre du droit&nbsp;: la justice, la pr&eacute;visibilit&eacute;, la s&eacute;curit&eacute;, le bien-&ecirc;tre, la paix et peut-&ecirc;tre le bonheur&nbsp;&raquo;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn12" id="bodyftn12">12</a></sup></p> <h2 class="texte">Des d&eacute;nominations de l&rsquo;Europe en construction et de leurs connotations</h2> <p class="texte">Les mots ont du poids. Ils peuvent avoir une influence se r&eacute;percutant sur la compr&eacute;hension des citoyens de l&rsquo;Union, leurs opinions et leurs comportements, leurs engagements. Lorsque le mot &laquo;&nbsp;Europe&nbsp;&raquo; est prononc&eacute;, le locuteur laisse libre cours &agrave; son imagination, &agrave; ses convictions ou &agrave; son pouvoir de persuasion. L&rsquo;image d&rsquo;une Europe communautaire, id&eacute;ale &agrave; ses yeux, surgit. Y.&nbsp;Delahaye constate que &laquo;&nbsp;Europe et &laquo;&nbsp;Europ&eacute;ens utilis&eacute;s pour d&eacute;signer une construction restreinte ont &eacute;t&eacute; progressivement vid&eacute;s de leur charge s&eacute;mantique. C&rsquo;est, dit-il, &agrave; cela que conduit l&rsquo;abus de sens. Ainsi les mots d&eacute;signant l&rsquo;Europe sont de plus en plus creux, de plus en plus vides, au point qu&rsquo;ils peuvent dans le corps d&rsquo;un texte dire n&rsquo;importe quoi&nbsp;&raquo;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn13" id="bodyftn13">13</a></sup> Cette analyse est confirm&eacute;e pr&egrave;s de 20 ans plus tard dans le cadre d&rsquo;une recherche sur les connotations li&eacute;es aux d&eacute;nominations propos&eacute;es pour l&rsquo;Europe en construction. L&rsquo;inintelligibilit&eacute; des Institutions europ&eacute;ennes de m&ecirc;me que la m&eacute;connaissance de leur fonctionnement ne sont pas les seuls facteurs expliquant le regard n&eacute;gatif port&eacute; sur l&rsquo;Union europ&eacute;enne. Les Institutions europ&eacute;ennes sont mal comprises parce qu&rsquo;elles sont incorrectement nomm&eacute;es. De plus, la d&eacute;nomination attribu&eacute;e &agrave; l&rsquo;entit&eacute; europ&eacute;enne &agrave; venir change, ce qui constitue pour le citoyen europ&eacute;en un facteur d&rsquo;incertitude suppl&eacute;mentaire.<strong> </strong>Les mots sont porteurs de connotations qui peuvent diff&eacute;rer d&rsquo;un individu &agrave; l&rsquo;autre, d&rsquo;un groupe &agrave; l&rsquo;autre, d&rsquo;un Etat &agrave; l&rsquo;autre. Aussi, les d&eacute;nominations attribu&eacute;es &agrave; l&rsquo;objet non identifi&eacute; (OBNI) qu&rsquo;est l&rsquo;Europe en formation ne sont pas neutres. Les d&eacute;nominations &laquo;&nbsp;Etats-Unis d&rsquo;Europe&nbsp;&raquo;,&nbsp;&laquo;&nbsp;Communaut&eacute;&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;Union&nbsp;&raquo; ont &eacute;t&eacute; test&eacute;es du point de vue de leurs connotations, autrement dit leurs significations affectives ou intellectuelles. Il importait de savoir si elles comportent les m&ecirc;mes risques de malentendu que cela est le cas pour le &laquo;&nbsp;f&eacute;d&eacute;ralisme&nbsp;&raquo;, le &laquo;&nbsp;f&nbsp;word&nbsp;&raquo; (le mot parait tellement horrible &agrave; Margaret Tatcher qu&rsquo;il ne peut &ecirc;tre prononc&eacute;) ou un risque d&rsquo;incompr&eacute;hension comme la &laquo;&nbsp;subsidiarit&eacute;&nbsp;&raquo; l&rsquo;a &eacute;t&eacute;. Il ressort que l&rsquo;Id&eacute;e des Etats-Unis d&rsquo;Europe a &eacute;t&eacute; largement soutenue entre 1970 et 1987. Une large majorit&eacute; de personnes (70&nbsp;% des interrog&eacute;s en moyenne pond&eacute;r&eacute;e se sont d&eacute;clar&eacute;es favorables &agrave; &laquo;&nbsp;l&rsquo;&eacute;volution du March&eacute; commun vers la formation politique des &laquo;&nbsp;Etats-Unis d&rsquo;Europe&nbsp;&raquo;. Les Europ&eacute;ens interrog&eacute;s &eacute;taient donc d&rsquo;accord avec la strat&eacute;gie des P&egrave;res fondateurs de l&rsquo;Europe. Ils acceptaient l&rsquo;effet d&rsquo;engrenage menant de la sph&egrave;re &eacute;conomique &agrave; la sph&egrave;re politique. L&rsquo;Union europ&eacute;enne n&rsquo;avait pas encore vu le jour durant cette p&eacute;riode. Il n&rsquo;&eacute;tait pas encore mis fin &agrave; la Guerre froide. Cette expression a aujourd&rsquo;hui quasi disparu dans le d&eacute;bat public de la classe politique fait remarquer Dr. habil Karlheinz Reif, alors Chef du &laquo;&nbsp;Sondages, Recherches, Analyses&nbsp;&raquo; de la Commission de la CE, &agrave; Bruxelles. Les connotations induites par l&rsquo;id&eacute;e des futurs Etats-Unis d&rsquo;Europe,&nbsp;avaient &agrave; l&rsquo;&eacute;poque deux composantes&nbsp;principales&nbsp;: l&rsquo;une internationale, l&rsquo;autre &eacute;conomico-sociale. La composante internationale&nbsp;renvoie &agrave; l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une troisi&egrave;me force vis-&agrave;-vis des superpuissances et le rattrapage des Etats-Unis en mati&egrave;re de recherche. L&rsquo;analyse des r&eacute;sultats laisse entrevoir une corr&eacute;lation entre les Etats-Unis d&rsquo;Europe et les efforts pour unifier l&rsquo;Europe occidentale. Le mur de Berlin n&rsquo;&eacute;tait pas tomb&eacute; et le mouvement de mondialisation tel que v&eacute;cu actuellement n&rsquo;existait pas encore. La composante &eacute;conomico-sociale manifeste l&rsquo;espoir d&rsquo;une justice sociale plus d&eacute;velopp&eacute;e ainsi que celui d&rsquo;un niveau de vie &laquo;&nbsp;probablement meilleur&nbsp;&raquo;. Karlheinz Reif observe que ni la perspective d&rsquo;une vie plus ch&egrave;re, ni le risque de ch&ocirc;mage plus &eacute;lev&eacute;, ni la perte d&rsquo;identit&eacute; n&rsquo;&eacute;taient associ&eacute;s &agrave; l&rsquo;image des futurs Etats-Unis d&rsquo;Europe. Cette image est li&eacute;e &agrave; une attitude politique. Elle manifeste la pr&eacute;sence d&rsquo;un europ&eacute;anisme relativement fort voire &laquo;&nbsp;supranational&nbsp;&raquo;. La situation internationale est un d&eacute;terminant des connotations pr&eacute;valant avant 1989. Son changement provoque l&rsquo;&eacute;volution de la signification des expressions retenues et du soutien qui leur est donn&eacute;. De fait, en 1992, dans le contexte de l&rsquo;adoption du Trait&eacute; de Maastricht qui apporte une composante politique &agrave; la construction de l&rsquo;Europe, le nom Etats-Unis d&rsquo;Europe est celui qui a, le plus souvent, &eacute;t&eacute; rejet&eacute; pour qualifier l&rsquo;Europe unie &agrave; venir. Il en fut ainsi dans onze pays sur douze. L&rsquo;Allemagne s&rsquo;opposait davantage &agrave; l&rsquo;expression&nbsp;&laquo;&nbsp;Union des Nations europ&eacute;ennes&nbsp;&raquo;. Les concepts d&rsquo;une &laquo;&nbsp;Europe Unie, d&rsquo;Union europ&eacute;enne, de Communaut&eacute; europ&eacute;enne sont plus proches les uns des autres que celui &laquo;&nbsp;Etats-Unis d&rsquo;Europe&nbsp;&raquo;. Le concept de &laquo;&nbsp;Communaut&eacute;&nbsp;&raquo; est le plus familier pour l&rsquo;opinion d&rsquo;un grand nombre de pays. Le choix en faveur de cette appellation &eacute;tait net dans l&rsquo;opinion de huit pays tandis que la France et la Gr&egrave;ce choisissaient &laquo;&nbsp;Union&nbsp;&raquo;, un concept qui, historiquement parlant, ne leur &eacute;tait pas &eacute;tranger. Au Grand-Duch&eacute; du Luxembourg et en Italie, le public &eacute;tait divis&eacute;. Les connotations des concepts de &laquo;&nbsp;Communaut&eacute; europ&eacute;enne&nbsp;&raquo; et d&rsquo;une &laquo;&nbsp;Union europ&eacute;enne&nbsp;&raquo; qui ont &eacute;t&eacute; r&eacute;v&eacute;l&eacute;es par le moyen de questions ouvertes laissent appara&icirc;tre des particularit&eacute;s nationales dans les types de r&eacute;ponse donn&eacute;es. La diff&eacute;rence des &laquo;&nbsp;climats d&rsquo;opinion&nbsp;&raquo; est manifeste.</p> <p class="texte">L&rsquo;enqu&ecirc;te<sup><a class="footnotecall" href="#ftn14" id="bodyftn14">14</a></sup> de juin 1992 affichait d&eacute;j&agrave;, dans le cadre de l&rsquo;Europe des Douze, l&rsquo;insuffisance de l&rsquo;information sur l&rsquo;Europe. La revendication d&rsquo;en savoir plus sur l&rsquo;Union europ&eacute;enne est toujours forte plus de 25 ans apr&egrave;s. Dans chaque pays une majorit&eacute; importante se d&eacute;gageait en faveur de la Communaut&eacute; europ&eacute;enne &agrave; laquelle ils restaient attach&eacute;s. Toutefois, les sondages effectu&eacute;s &agrave; ce moment montrent les risques de rejet. K.&nbsp;Reif les attribuent &agrave; la faible implication des citoyens voire d&rsquo;une large partie de la classe politique.&nbsp;&raquo;. Et ce, tant au niveau cognitif, qu&rsquo;au niveau affectif et qu&rsquo;au niveau de la participation politique&nbsp;&raquo;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn15" id="bodyftn15">15</a></sup> Le rappel des connotations relatives aux d&eacute;nominations attribu&eacute;es &agrave; l&rsquo;Europe en construction devait permettre de v&eacute;rifier la solidit&eacute; de ses repr&eacute;sentations qu&rsquo;une constance des propos tenus confirmerait. L&rsquo;influence de la conjoncture internationale appelle &agrave; mod&eacute;rer cette attente.</p> <h2 class="texte">Biais s&eacute;mantiques et biais cognitifs</h2> <p class="texte">Les biais cognitifs trouvent bien des occasions &agrave; se manifester dans le cadre de l&rsquo;Europe en construction. Les occasions de percevoir celle-ci &agrave; travers des associations d&rsquo;id&eacute;es, des souvenirs, des exp&eacute;riences pass&eacute;es &ndash;&nbsp;en raison d&rsquo;un &eacute;cart entre la s&eacute;mantique et la r&eacute;alit&eacute; v&eacute;cue&nbsp;&ndash; ne manquent pas. Citoyens et dirigeants de l&rsquo;Union europ&eacute;enne sont quotidiennement confront&eacute;s au risque de subir les biais cognitifs qui en d&eacute;coulent et de devoir endosser leurs cons&eacute;quences pour la d&eacute;mocratie. Il arrive que ces biais soient produits par d&rsquo;autres parmi lesquels les biais s&eacute;mantiques. Ou le vocabulaire de l&rsquo;Union sert un discours d&rsquo;expert et devient technocratique. Les Organisations internationales parmi lesquelles l&rsquo;Union europ&eacute;enne diffusent un &laquo;&nbsp;discours expert&nbsp;&raquo; au d&eacute;triment du discours politique. Cette tendance occulte les tensions et conflits inh&eacute;rents &agrave; la vie politique d&eacute;mocratique.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn16" id="bodyftn16">16</a></sup> Ou le vocabulaire de l&rsquo;Union s&rsquo;appuie sur des logiques diff&eacute;rentes voire contradictoires. Pour satisfaire aux exigences d&rsquo;une n&eacute;gociation diplomatique, des mots largement inconnus du grand public sont introduits. Ils ont l&rsquo;avantage d&rsquo;avoir une apparence de neutralit&eacute;. Tel est le cas de celui de subsidiarit&eacute;. Il s&rsquo;agit l&agrave; d&rsquo;un mot &agrave; sens oppos&eacute;s. Pour les uns il emp&ecirc;che que l&rsquo;Union europ&eacute;enne s&rsquo;occupe de mati&egrave;res pour lesquelles elle n&rsquo;a pas re&ccedil;u de comp&eacute;tence. L&rsquo;introduction de la subsidiarit&eacute; dans le trait&eacute; de Maastricht permet pour les eurosceptiques de &laquo;&nbsp;renationaliser&nbsp;&raquo; partiellement l&rsquo;Europe communautaire. Pour les autres, elle garantit la progression de l&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe dans la mesure o&ugrave; &laquo;&nbsp;les effets de l&rsquo;action envisag&eacute;e ne permettent pas aux autorit&eacute;s nationales ou r&eacute;gionales de mieux r&eacute;aliser ces objectifs&nbsp;&raquo;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn17" id="bodyftn17">17</a></sup> Les mots &agrave; double sens permettent de concilier des points de vue difficilement conciliables et de permettre &agrave; chacun d&rsquo;en retirer la signification qui lui convient.<strong> </strong>Viennent s&rsquo;ajouter les<strong> </strong>tabous, confusions, abus de langage qui portent sur des sujets centraux&nbsp;: la nature de l&rsquo;Union europ&eacute;enne, la citoyennet&eacute;&hellip; Les exemples qui suivent en apportent une preuve.</p> <h3 class="texte">L&rsquo;ombre de tabous</h3> <p class="texte">La formule de J.&nbsp;Delors suivant laquelle la construction europ&eacute;enne a cette sp&eacute;cificit&eacute; d&rsquo;&ecirc;tre&nbsp;&laquo;&nbsp;un objet non identifi&eacute;&nbsp;&raquo; (OBNI) est souvent reprise tant elle convient aujourd&rsquo;hui encore. Surgit alors la question du rapport entre l&rsquo;Union europ&eacute;enne &ndash;&nbsp;qui dit &eacute;tablir une citoyennet&eacute; europ&eacute;enne&nbsp;&ndash; et le citoyen. Il peut para&icirc;tre surr&eacute;aliste d&rsquo;&ecirc;tre le citoyen d&rsquo;un objet non identifi&eacute;. Le pr&eacute;tendu citoyen peut-il s&rsquo;attacher &agrave; un objet non identifi&eacute;&nbsp;? Le peut-il quand appara&icirc;t un mauvais usage des mots s&rsquo;y rapportant&nbsp;? J.‑L.&nbsp;Quermonne est r&eacute;cemment revenu sur la question de la nature politique et juridique de la construction europ&eacute;enne apr&egrave;s le Trait&eacute; de Lisbonne. Il explique l&rsquo;incertitude prolong&eacute;e &agrave; son propos par le <em>tabou</em> qui frappe le f&eacute;d&eacute;ralisme dans l&rsquo;espace europ&eacute;en au point d&rsquo;en occulter toute tentative s&eacute;rieuse pour en d&eacute;celer le sens. Les f&eacute;d&eacute;ralistes ont une vision plus th&eacute;orique de l&rsquo;organisation de l&rsquo;Europe future que les fonctionnalises et n&eacute;o-fonctionnalistes qui se fixent des objectifs plus limit&eacute;s et sectoriels. La m&eacute;thode pr&eacute;conis&eacute;e par J.&nbsp;Monnet est plus proche de ces derniers, bien que la construction de l&rsquo;Europe soit envisag&eacute;e dans la perspective d&rsquo;une f&eacute;d&eacute;ration europ&eacute;enne, le but lointain. Le passage dans le projet des accords de Maastricht sur la vocation et la finalit&eacute; f&eacute;d&eacute;rale de l&rsquo;Union europ&eacute;enne a d&ucirc;, en raison des pressions danoise et britannique &ecirc;tre remplac&eacute; par la formule &laquo;&nbsp;union sans cesse plus &eacute;troite entre les peuples europ&eacute;ens&nbsp;&raquo;, une formule qui ne donnait pas satisfaction aux autres d&eacute;l&eacute;gations. Ce pourquoi, le concept de subsidiarit&eacute; a &eacute;t&eacute; propos&eacute; pour permettre de relancer le d&eacute;bat. Ce concept &eacute;tait peu connu. Il avait l&rsquo;avantage diplomatique de pouvoir &ecirc;tre interpr&eacute;t&eacute; de mani&egrave;re contradictoire. En r&eacute;alit&eacute;, son d&eacute;faut &eacute;tait de cr&eacute;er la confusion. D&rsquo;autres tabous sont pr&eacute;sents qui portent sur le r&eacute;gime politique l&rsquo;Union. Paradoxalement, le cadre institutionnel de l&rsquo;Europe &eacute;volue vers le mod&egrave;le parlementaire tout en refusant de formuler cette orientation.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn18" id="bodyftn18">18</a></sup></p> <h3 class="texte">Confusions</h3> <p class="texte">Concernant &laquo;&nbsp;Europe du citoyen&nbsp;&raquo;, cela est vrai &eacute;galement pour d&rsquo;autres sujets, l&rsquo;emploi du terme exact n&rsquo;est pas de mise. L&rsquo;expression sert &agrave; qualifier des situations tr&egrave;s diff&eacute;rentes&nbsp;: tant&ocirc;t elle couvre des symboles, tant&ocirc;t l&rsquo;Europe du quotidien, tant&ocirc;t des droits civils et politiques. En 1985, il est fait un amalgame entre &laquo;&nbsp;Europe des citoyens&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;Europe du quotidien&nbsp;&raquo;.L&rsquo;expression &laquo;&nbsp;Europe du citoyen&nbsp;&raquo; a laiss&eacute; croire que l&rsquo;Europe &eacute;tait capable de r&eacute;pondre aux attentes quotidiennes des particuliers. D&egrave;s lors un nombre important de p&eacute;titions introduites au Parlement europ&eacute;en ont d&ucirc; &ecirc;tre class&eacute;es irrecevables parce qu&rsquo;elles touchaient &agrave; des mati&egrave;res ne relevant pas de la comp&eacute;tence de la Communaut&eacute; europ&eacute;enne. La preuve est ainsi apport&eacute;e de &laquo;&nbsp;la m&eacute;connaissance de la nature exacte des Communaut&eacute;s europ&eacute;ennes, des attentes vari&eacute;es et nombreuses des citoyens &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de l&rsquo;Europe, patrie de l&rsquo;espoir, alors que les Communaut&eacute;s europ&eacute;ennes, dont l&rsquo;origine est contractuelle, ne peuvent r&eacute;pondre qu&rsquo;aux sollicitations s&rsquo;inscrivant dans le cadre des Trait&eacute;s constitutifs&nbsp;&raquo;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn19" id="bodyftn19">19</a></sup></p> <h3 class="texte">Abus de langage&nbsp;?</h3> <p class="texte">Barroche &eacute;pingle &agrave; propos de la citoyennet&eacute; de l&rsquo;Union europ&eacute;enne le risque de se heurter&nbsp;&laquo;&nbsp;aux pi&egrave;ges de la port&eacute;e symbolique des mots. Recourir au vocabulaire de la citoyennet&eacute;, prononcer le mot &laquo;&nbsp;citoyennet&eacute;, c&rsquo;est, dit-il, comme croire en sa puissance performative, c&rsquo;est mobiliser tout un imaginaire d&rsquo;&eacute;galit&eacute; et de d&eacute;mocratie, lequel se situe en profond d&eacute;calage avec la r&eacute;alit&eacute; pr&eacute;sente de l&rsquo;int&eacute;gration&nbsp;&raquo;. A cet &eacute;gard, C.&nbsp;Wihtol de Wendel observe que la citoyennet&eacute; europ&eacute;enne bouscule bien des d&eacute;finitions classiques de la citoyennet&eacute;. Elles sont d&rsquo;ordinaire fond&eacute;es sur une obligation mutuelle entre le citoyen et l&rsquo;Etat. La citoyennet&eacute; implique des droits et des devoirs. La citoyennet&eacute; de l&rsquo;Union comprend peu de devoirs. O.&nbsp;Duhamel parle d&rsquo;abus de langage&nbsp;: &laquo;&nbsp;Evoquer une citoyennet&eacute; europ&eacute;enne parce qu&rsquo;un N&eacute;erlandais r&eacute;sidant de longue date dans le Gers y voterait aux &eacute;lections municipales constitue peut-&ecirc;tre un premier pas mais ressemble bien &agrave; un abus de langage&nbsp;&raquo;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn20" id="bodyftn20">20</a></sup></p> <p class="texte">Le recours &agrave; l&rsquo;anticipation est un proc&eacute;d&eacute; qui n&rsquo;est pas rare. Il est d&eacute;routant. L&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe telle qu&rsquo;elle se construit est un projet sans un pass&eacute;. Il est enti&egrave;rement tourn&eacute; vers l&rsquo;avenir. Des politiques sont qualifi&eacute;es de communes alors qu&rsquo;elles ne le sont pas (encore&nbsp;?). Cr&eacute;&eacute;e par le Trait&eacute; de Maastricht instituant l&rsquo;Union europ&eacute;enne (1992), la Politique &eacute;trang&egrave;re et de s&eacute;curit&eacute; commune (PESC) couvre l&rsquo;ensemble des domaines de la politique &eacute;trang&egrave;re en ce compris l&#39;ensemble des questions relatives &agrave; la s&eacute;curit&eacute; de l&#39;Union, y compris&nbsp;&laquo;&nbsp;<em>la d&eacute;finition progressive d&#39;une politique de d&eacute;fense commune, qui peut conduire &agrave; une d&eacute;fense commune&nbsp;&raquo; (c&rsquo;est nous qui soulignons)</em>. La Politique europ&eacute;enne de s&eacute;curit&eacute; et de d&eacute;fense de l&rsquo;Union europ&eacute;enne (PESD) a &eacute;t&eacute; rebaptis&eacute;e Politique europ&eacute;enne de s&eacute;curit&eacute; et de d&eacute;fense commune (PSDC) par le Trait&eacute; de Lisbonne dans le but de souligner l&rsquo;objectif de d&eacute;fense commune. Toutefois, les limites impos&eacute;es &agrave; son caract&egrave;re commun ne sont pas anodines. Le Trait&eacute; de Lisbonne lui offre plus de moyens. Il accro&icirc;t la coh&eacute;rence de la PSDC. Mais l&rsquo;unanimit&eacute; est maintenue dans ce domaine et l&rsquo;adoption d&rsquo;actes l&eacute;gislatifs reste exclue (art. 24 TUE). Ce m&ecirc;me article stipule que la politique de l&rsquo;Union en la mati&egrave;re n&rsquo;affecte pas le caract&egrave;re sp&eacute;cifique des politiques de d&eacute;fense des &Eacute;tats membres et respecte leurs obligations &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de l&rsquo;OTAN.&nbsp;Le Trait&eacute; de Lisbonne rappelle que la PSDC &ldquo;inclut la d&eacute;finition progressive d&rsquo;une politique de d&eacute;fense commune de l&rsquo;Union&rdquo; (art.&nbsp;42&nbsp;TUE). Celle-ci conduira &agrave; une d&eacute;fense commune lorsque le Conseil europ&eacute;en, statuant &agrave; l&rsquo;unanimit&eacute;, en aura d&eacute;cid&eacute; ainsi. Ainsi le caract&egrave;re intergouvernemental de cette politique destin&eacute;e &agrave; &ecirc;tre commune ne peut-il &eacute;chapper &agrave; personne.</p> <p class="texte">Le projet d&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe provoque chez les gouvernants un ph&eacute;nom&egrave;ne de dissonance cognitive en raison des liens entre int&eacute;gration &eacute;conomique et int&eacute;gration politique, d&rsquo;une part. Parce que l&rsquo;int&eacute;gration politique heurte les souverainet&eacute;s nationales. Les dirigeants nationaux n&rsquo;ont d&egrave;s lors d&rsquo;autre choix que de modifier les &eacute;l&eacute;ments en jeu&nbsp;: dire oui &agrave; L&rsquo;Europe non &agrave; tel ou tel nouveau projet d&rsquo;int&eacute;gration. Une autre solution consiste &agrave; opposer souverainet&eacute; th&eacute;orique et souverainet&eacute; effective et de compenser la perte de certaines parts de la souverainet&eacute; de l&rsquo;Etat par l&rsquo;exercice de la souverainet&eacute; en commun.</p> <p class="texte">La s&eacute;mantique peut &ecirc;tre utilis&eacute;e &agrave; des fins strat&eacute;giques. Il arrive qu&rsquo;un discours contradictoire ou un revirement de position soit expliqu&eacute; aux &eacute;lecteurs &agrave; des fins strat&eacute;giques par une b&eacute;vue quant &agrave; la signification des mots utilis&eacute;s. Ainsi, par exemple, le Rassemblement national (RN) apr&egrave;s avoir abandonn&eacute; son choix de se retirer de l&rsquo;Union europ&eacute;enne, parle de vouloir en faire une <em>&laquo;&nbsp;Alliance europ&eacute;enne des nations&nbsp;&raquo; fond&eacute;e sur</em> une coop&eacute;ration entre Etats et non plus sur des Institutions supranationales. Par cette r&eacute;orientation le RN entend apporter la preuve qu&rsquo;il ne s&rsquo;oppose pas &agrave; l&rsquo;Europe. Pour justifier ce changement de position, Marine Le Pen d&eacute;clara en novembre&nbsp;2017&nbsp;: <em>&laquo;&nbsp;Nous sommes europ&eacute;ens, pas antieurop&eacute;ens, m&ecirc;me si nous avons entretenu cette id&eacute;e par maladresse s&eacute;mantique.&nbsp;&raquo;</em><sup><em><a class="footnotecall" href="#ftn21" id="bodyftn21">21</a></em></sup></p> <h2 class="texte">Empreintes&nbsp;: prisme &eacute;tatique et d&eacute;pendance au sentier fonctionnaliste</h2> <h3 class="texte">Le prisme &eacute;tatique&nbsp;: l&rsquo;illusion de savoir</h3> <p class="texte">Dans le pr&eacute;liminaire de &laquo;&nbsp;L&rsquo;Europe pr&eacute;dite. La signification des mots&nbsp;&raquo; paru &agrave; la suite des ratifications du Trait&eacute; sur l&rsquo;Union europ&eacute;enne &ndash;&nbsp;baptis&eacute; &laquo;&nbsp;Trait&eacute; de Maastricht&nbsp;&raquo;&nbsp;&ndash; le diplomate, Y.&nbsp;Delahaye, s&rsquo;exprimant en tant que s&eacute;mioticien, observait que&nbsp;&laquo;&nbsp;le mod&egrave;le sur lequel les Institutions europ&eacute;ennes sont calqu&eacute;es&hellip;n&rsquo;est autre que celui de l&rsquo;Etat&nbsp;&raquo;<sup><a class="footnotecall" href="#ftn22" id="bodyftn22">22</a></sup>. Ainsi, se glisse chez le citoyen europ&eacute;en l&#39;<em>illusion de savoir.</em> L&rsquo;Union europ&eacute;enne est jug&eacute;e &agrave; tort &agrave; l&rsquo;aune de ce qu&rsquo;est un Etat pour le citoyen qui r&eacute;agira conform&eacute;ment &agrave; ce qu&rsquo;il en connait avec pour cons&eacute;quence de ne pas saisir les avantages de la construction europ&eacute;enne en tant que telle et de ne pas pouvoir prendre la mesure de l&rsquo;&eacute;cart existant entre elle et le mod&egrave;le &eacute;tatique. L&rsquo;illusion de la compr&eacute;hension de l&rsquo;Union europ&eacute;enne conforte le sentiment chez le citoyen de la validit&eacute; de son jugement. Or, les citoyens se disent de plus en plus souvent comp&eacute;tents pour exprimer des opinions &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de l&rsquo;Union europ&eacute;enne.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn23" id="bodyftn23">23</a></sup> L&rsquo;illusion de savoir peut provenir du fait que, dans l&rsquo;ensemble, les textes en provenance des organes de l&rsquo;Union utilisent peu de mots ou d&rsquo;expressions n&rsquo;appartenant pas au langage courant, selon K. van Steenbergen membre du Service de traduction de la Commission europ&eacute;enne.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn24" id="bodyftn24">24</a></sup> Ils sont n&eacute;anmoins, pr&eacute;cise-t-il, l&rsquo;objet d&rsquo;un glissement de sens, d&rsquo;une extension ou d&rsquo;un &laquo;&nbsp;d&eacute;tournement de mots&nbsp;&raquo;&nbsp;: commission, conseil, comitologie, espace, proc&eacute;dure du filet&hellip; L&rsquo;eurojargon ou &laquo;&nbsp;les choses dites par l&rsquo;Union europ&eacute;ennes le sont &agrave; un niveau d&rsquo;abstraction tr&egrave;s &eacute;lev&eacute;, les applications concr&egrave;tes &eacute;tant laiss&eacute;es aux niveaux inf&eacute;rieurs. La combinaison de ces deux &eacute;l&eacute;ments&nbsp;(&hellip;) para&icirc;t susceptible de donner parfois des r&eacute;sultats difficilement intelligibles pour le citoyen moyen&nbsp;&raquo;<sup><a class="footnotecall" href="#ftn25" id="bodyftn25">25</a></sup>Le vocabulaire institutionnel utilis&eacute; &agrave; propos de l&rsquo;Union europ&eacute;enne est peu conforme aux signifi&eacute;s. Des textes officiels utilisent un langage connu mais sp&eacute;cifique au cadre &eacute;tatique. Le mim&eacute;tisme institutionnel avec l&rsquo;Etat est fort pr&eacute;sent au sein du processus d&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe. Sans doute a-t-il pour origine lointaine le<strong> </strong>rapport &eacute;troit &ndash;&nbsp;perceptible du point de vue historique&nbsp;&ndash; entre l&rsquo;Etat et l&rsquo;Europe que F.&nbsp;Foret (re)pr&eacute;sente comme &laquo;&nbsp;deux arbres enracin&eacute;s dans un m&ecirc;me terreau, dans un ouvrage r&eacute;cent qui a pour titre &laquo;&nbsp;De l&rsquo;Etat &agrave; l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;&raquo;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn26" id="bodyftn26">26</a></sup> La transposition de termes relevant du registre &eacute;tatique &agrave; la construction europ&eacute;enne entra&icirc;ne un biais cognitif de type mn&eacute;sique reposant sur la m&eacute;moire de l&rsquo;omnipr&eacute;sence de l&rsquo;Etat souverain en interne et &agrave; l&rsquo;international. Or, en r&eacute;alit&eacute;, ni les Communaut&eacute;s europ&eacute;enne ni l&rsquo;Union europ&eacute;enne ne sont assimilables &agrave; un Etat ou &agrave; un super-Etat. La conf&eacute;d&eacute;ration d&rsquo;Etats, l&rsquo;Etat f&eacute;d&eacute;ral et le f&eacute;d&eacute;ralisme intergouvernemental sont des formules qui paraissent d&eacute;pass&eacute;es aux yeux des analystes qui prennent en compte l&rsquo;&eacute;volution du processus d&rsquo;int&eacute;gration.</p> <p class="texte">L&rsquo;empreinte de l&rsquo;Etat-nation marque tout particuli&egrave;rement la citoyennet&eacute; europ&eacute;enne. &laquo;&nbsp;Le lien entre la citoyennet&eacute; et l&rsquo;Etat est intime, il est m&ecirc;me constitutif&nbsp;&raquo;, rappelle B.&nbsp;Badie.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn27" id="bodyftn27">27</a></sup> Le citoyen europ&eacute;en socialis&eacute; &agrave; la r&egrave;gle de la s&eacute;paration des pouvoirs au sein de l&rsquo;Etat d&eacute;mocratique se trouve, &agrave; l&rsquo;&eacute;chelle de l&rsquo;Europe, face &agrave; la dispersion des pouvoirs entre plusieurs instances.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn28" id="bodyftn28">28</a></sup> Ce n&rsquo;est qu&rsquo;un exemple. &laquo;&nbsp;L&rsquo;Union europ&eacute;enne est ainsi faite, qu&rsquo;elle ne renvoie &agrave; rien dans son fonctionnement, &agrave; ce qu&rsquo;un Europ&eacute;en conna&icirc;t des institutions nationales&nbsp;&raquo;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn29" id="bodyftn29">29</a></sup> La &laquo;&nbsp;logique d&rsquo;extrapolation&nbsp;&raquo; rend compte du ph&eacute;nom&egrave;ne selon lequel les citoyens fondent leur confiance sur l&rsquo;Union europ&eacute;enne en fonction de substituts parmi lesquels la confiance dans des institutions nationales plus famili&egrave;res. Le risque d&rsquo;avoir une vision biais&eacute;e de l&rsquo;Union europ&eacute;enne est r&eacute;el. Il se produit au d&eacute;pend de ce que devrait &ecirc;tre l&rsquo;exercice de la citoyennet&eacute;. Celui-ci est entrav&eacute; de 2 mani&egrave;res. D&rsquo;une part, parce que les Trait&eacute;s &ndash;&nbsp;pour r&eacute;pondre aux pressions des gouvernants peu pr&ecirc;ts &agrave; c&eacute;der &agrave; l&rsquo;Union une identit&eacute; politique propre&nbsp;&ndash; abordent de mani&egrave;re limitative la citoyennet&eacute; de l&rsquo;Union, ce qui ne permet pas d&rsquo;en avoir une repr&eacute;sentation r&eacute;elle. La citoyennet&eacute; de l&rsquo;Union se trouve en concurrence avec les citoyennet&eacute;s nationales pratiqu&eacute;es de longue date. D&rsquo;autre part, parce que les citoyens qualifi&eacute;s d&rsquo;europ&eacute;ens&nbsp;&ndash; pour des raisons d&rsquo;ordre cognitif li&eacute;es &agrave; leur culture politique, &agrave; leur socialisation dans le cadre de l&rsquo;Etat, &agrave; leur faible connaissance de l&rsquo;UE et de ses rouages, n&rsquo;entrent que partiellement dans la phase sup&eacute;rieure du processus d&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe par un proc&eacute;d&eacute; de politisation &agrave; son niveau.</p> <h3 class="texte">La d&eacute;pendance au sentier fonctionnaliste</h3> <p class="texte">L&rsquo;utilisation d&rsquo;un langage technocratique tient &agrave; plusieurs facteurs&nbsp;: les mati&egrave;res trait&eacute;es, la strat&eacute;gie d&lsquo;int&eacute;gration adopt&eacute;e, le n&eacute;o-fonctionnalisme et la nature&nbsp;supranationale de la Communaut&eacute;. Cela &eacute;tant, la Commission europ&eacute;enne &eacute;vite de recourir au vocabulaire politique. Il heurte les opposants &agrave; l&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;Europe. En raison de sa d&eacute;pendance au sentier fonctionnaliste l&rsquo;Union h&eacute;rite d&rsquo;un vocabulaire sans affinit&eacute; avec le mod&egrave;le de l&rsquo;Etat. L&rsquo;appellation &laquo;&nbsp;commission&nbsp;&raquo; &ndash;&nbsp;que l&rsquo;on retrouve dans le cadre des Communaut&eacute;s europ&eacute;ennes&nbsp;&ndash; et existe aujourd&rsquo;hui encore dans le cadre de l&rsquo;Union europ&eacute;enne pour d&eacute;signer la &laquo;&nbsp;Commission europ&eacute;enne&nbsp;&raquo;&nbsp;&ndash; pr&eacute;sentait l&rsquo;avantage d&rsquo;&eacute;carter la discussion &agrave; propos de la notion de gouvernement. L&rsquo;Europe communautaire en &eacute;tait priv&eacute;e. Il n&rsquo;existe toujours pas de gouvernement pour ce qui concerne l&rsquo;Union. Ce qui est d&rsquo;ailleurs d&eacute;nonc&eacute; pour &ecirc;tre une des causes du d&eacute;ficit d&eacute;mocratique de l&rsquo;Union. C&rsquo;&eacute;tait &agrave; l&rsquo;&eacute;poque du lancement de la construction europ&eacute;enne l&rsquo;&eacute;tablissement d&rsquo;un ex&eacute;cutif qui &eacute;tait vis&eacute;. Notons qu&rsquo;en mati&egrave;re administrative, &laquo;&nbsp;commission&nbsp;&raquo; &eacute;voque un organisme &agrave; qui l&#39;on d&eacute;l&egrave;gue une charge officielle pour un temps d&eacute;termin&eacute;. Cet organisme peut avoir un r&ocirc;le consultatif ou de prise de d&eacute;cision.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn30" id="bodyftn30">30</a></sup></p> <p class="texte">La repr&eacute;sentation de l&rsquo;Etat est peu compatible avec celle d&rsquo;un pouvoir technocratique ressenti comme un &eacute;pouvantail. La l&eacute;gitimit&eacute; de la Commission europ&eacute;enne repose sur un pouvoir d&rsquo;expertise per&ccedil;u comme se substituant &agrave; la l&eacute;gitimit&eacute; des Etats. Il en est ressorti l&rsquo;image d&rsquo;un&nbsp;&laquo;&nbsp;pouvoir anonyme qualifi&eacute; par son lieu d&rsquo;implantation&nbsp;: Bruxelles&nbsp;&raquo;.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn31" id="bodyftn31">31</a></sup> J.‑L.&nbsp;Quermonne parle d&rsquo;illusion derri&egrave;re laquelle se cacheraient les chefs d&rsquo;Etat et de gouvernement et qui constituerait &laquo;&nbsp;une atteinte permanente &agrave; la souverainet&eacute; des Etats&nbsp;&raquo;. La l&eacute;gitimit&eacute; technocratique de la Commission a servi &agrave; fonder une autre critique encore, celle de l&rsquo;apparition d&rsquo;un pouvoir apolitique responsable du d&eacute;ficit d&eacute;mocratique.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn32" id="bodyftn32">32</a></sup> N&eacute;anmoins, les citoyens de l&rsquo;Union, en majorit&eacute;, se dit b&eacute;n&eacute;ficiaire de l&rsquo;adh&eacute;sion de leur pays &agrave; l&rsquo;Union. L&rsquo;approche utilitariste de l&rsquo;Union progresse. Il existe une corr&eacute;lation importante entre la prosp&eacute;rit&eacute; d&rsquo;un pays et la satisfaction de ses citoyens vis-&agrave;-vis de l&rsquo;appartenance europ&eacute;enne. Le concept de libre circulation des personnes a &eacute;volu&eacute; depuis son installation. Dans le Trait&eacute; instituant la Communaut&eacute; &eacute;conomique europ&eacute;enne, il se limitait &agrave; la libre circulation des travailleurs et &agrave; la libert&eacute; d&rsquo;&rsquo;&eacute;tablissement. Il &eacute;tait format&eacute; par la n&eacute;cessit&eacute; d&rsquo;instaurer le March&eacute; commun. Avec le Trait&eacute; de Maastricht qui formalise la citoyennet&eacute; europ&eacute;enne, le droit pour les citoyens de l&rsquo;UE de circuler librement et de s&eacute;journer sur le territoire des Etats membres de l&rsquo;Union est reconnu. Le Trait&eacute; de Lisbonne confirme ce droit et l&rsquo;ancre dans les dispositions g&eacute;n&eacute;rales de ce qui est intitul&eacute; &laquo;&nbsp;espace de libert&eacute; et justice&nbsp;&raquo;, une expression qui, en soit, est peu claire. Derni&egrave;rement, la &laquo;&nbsp;libre circulation des personnes, des biens et des services au sein de l&#39;UE&nbsp;&raquo; et la &laquo;&nbsp;paix entre les &Eacute;tats membres de l&#39;UE&nbsp;&raquo; sont per&ccedil;ues comme &eacute;tant les r&eacute;sultats les plus positifs de l&#39;UE, et ce pour 58&nbsp;% et 54&nbsp;% des Europ&eacute;ens respectivement.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn33" id="bodyftn33">33</a></sup> La conjoncture influence grandement les sentiments des Europ&eacute;ens &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de l&rsquo;Union europ&eacute;enne. La crise &eacute;conomique et financi&egrave;re de 2008 a confirm&eacute; le sentiment d&rsquo;attachement &agrave; l&rsquo;Etat. Cette opinion reste majoritaire. N&eacute;anmoins, la concertation entre Etats membres est souhait&eacute;e en situation de crise. Entre 2009 et 2014, l&rsquo;UE a &eacute;t&eacute; consid&eacute;r&eacute;e par les Europ&eacute;ens comme l&rsquo;acteur le plus &agrave; m&ecirc;me d&rsquo;agir efficacement face aux cons&eacute;quences de la crise financi&egrave;re et &eacute;conomique. Malgr&eacute; ses lacunes et ses faiblesses, la citoyennet&eacute; de l&rsquo;Union permet le rapprochement des Europ&eacute;ens entre eux gr&acirc;ce au volet transnational li&eacute; au droit &agrave; la libre circulation des personnes. En 2018, la libre circulation est appr&eacute;ci&eacute;e par 56&nbsp;% des Europ&eacute;ens qui la place ainsi en t&ecirc;te devant la paix.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn34" id="bodyftn34">34</a></sup> Toutefois, l&rsquo;enqu&ecirc;te Eurobarom&egrave;tre r&eacute;alis&eacute;e en septembre 2011 montre &agrave; ce moment un essoufflement des opinions favorables &agrave; l&rsquo;int&eacute;gration des march&eacute;s. La crise &eacute;conomique de 2008 l&rsquo;explique sans doute. D&egrave;s lors, une majorit&eacute; critique se d&eacute;gage&nbsp;: 62&nbsp;% des personnes interrog&eacute;es croient que le Grand March&eacute; ne profite qu&rsquo;aux grandes entreprises&nbsp;; 51&nbsp;% qu&rsquo;il d&eacute;t&eacute;riore les conditions de travail&nbsp;; 53&nbsp;% qu&rsquo;il pr&eacute;sente peu d&rsquo;avantages pour les personnes d&eacute;favoris&eacute;es. Les migratoires ext&eacute;rieures et la perspective de futurs &eacute;largissements attisent les craintes de dumping social. La libert&eacute; de circuler librement est en cons&eacute;quence mise sous pression.</p> <h1 class="texte">La d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne par le bas&nbsp;: opinions et comportements des citoyens de l&rsquo;Union</h1> <h2 class="texte">Evolution des opinions relatives &agrave; la d&eacute;mocratie</h2> <p class="texte">Le respect de la d&eacute;mocratie, des droits de l&rsquo;homme et de l&rsquo;&Eacute;tat de droit vient en t&ecirc;te des atouts de l&rsquo;Europe dans la moiti&eacute; des &Eacute;tats-membres (la plupart de l&rsquo;Europe du Nord et des pays fondateurs). Selon le rapport de synth&egrave;se des contributions des Etats-membres provenant des consultations citoyennes europ&eacute;ennes organis&eacute;es en 2018<a href="http://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-14535-2018-INIT/fr/pdf"> </a>, la valeur de l&rsquo;appartenance à l&rsquo;UE et les avantages qui en sont tir&eacute;s sont &eacute;pingl&eacute;s. Toutefois, l&rsquo;absence d&rsquo;une vision et d&rsquo;une direction claires sont soulign&eacute;s. Des r&eacute;formes &agrave; ce sujet sont demand&eacute;es.&nbsp;La transparence devrait &ecirc;tre renforc&eacute;e autour des comp&eacute;tences respectives des Etats membres et de l&rsquo;Union pour lever toute m&eacute;fiance envers l&rsquo;UE.</p> <p class="texte">Eurobarom&egrave;tre apprend, dans sa derni&egrave;re &eacute;tude intitul&eacute;e &laquo;&nbsp;Un an avant les &eacute;lections europ&eacute;ennes de 2019&nbsp;&raquo; que 62&nbsp;% des citoyens europ&eacute;ens consid&egrave;rent l&rsquo;adh&eacute;sion &agrave; l&rsquo;Union europ&eacute;enne comme une bonne chose. La majorit&eacute; des personnes interrog&eacute;es sont satisfaites du fonctionnement de la d&eacute;mocratie dans leur pays (55&nbsp;%) et dans l&rsquo;Union (46&nbsp;%). Les r&eacute;ponses diff&egrave;rent suivants les pays. Des r&eacute;pondants de certains pays sont plus satisfaits du fonctionnement de la d&eacute;mocratie dans l&rsquo;Union que dans leur propre pays mais les citoyens de certains grands &Eacute;tats membres semblent bien moins satisfaits du fonctionnement de la d&eacute;mocratie dans l&rsquo;Union. Cela appara&icirc;t encore plus clairement lorsque le niveau de satisfaction &agrave; l&rsquo;&eacute;gard du fonctionnement de la d&eacute;mocratie est mis en parall&egrave;le avec le PIB par habitant des pays ainsi que leur taux de ch&ocirc;mage actuel.</p> <p class="texte">Entre 2013 et 2018, plus de 70&nbsp;nouveaux partis et alliances politiques ont vu le jour dans les &Eacute;tats membres de l&rsquo;Union. Il en est qui protestent contre la classe politique en place. Selon la m&ecirc;me enqu&ecirc;te de 2018, 56&nbsp;% des Europ&eacute;ens pensent que des changements sont n&eacute;cessaires et qu&rsquo;ils peuvent &ecirc;tre initi&eacute;s par les nouveaux partis &eacute;mergents. 38&nbsp;% des personnes interrog&eacute;es pensent le contraire. Elles sont 70&nbsp;% &agrave; consid&eacute;rer que l&rsquo;opposition &agrave; quelque chose ne suffit pas &agrave; elle seule et n&rsquo;est pas de nature &agrave; apporter une am&eacute;lioration. Cependant, 56&nbsp;% des sond&eacute;s font confiance aux nouveaux partis et mouvements pour induire de r&eacute;els changements. Ils sont 53&nbsp;% &agrave; penser que ces partis et mouvements pourraient &eacute;laborer des solutions plus efficaces que la classe politique en place.</p> <h3 class="texte">Dimension cognitive de la citoyennet&eacute;</h3> <p class="texte">L&rsquo;Eurobarom&egrave;tre de 2013 sur la citoyennet&eacute; europ&eacute;enne confirme que les Europ&eacute;ens ont en g&eacute;n&eacute;ral connaissance de leurs droits. Cela &eacute;tant, ils ne sont pas en mesure d&rsquo;en saisir les implications&nbsp;: seuls 36&nbsp;% pensent &ecirc;tre bien inform&eacute;s par rapport &agrave; la citoyennet&eacute; et les droits qu&rsquo;elle accorde. Cependant, seuls 24&nbsp;% des interview&eacute;s connaissent les moyens qui leur permettent de faire respecter leurs droits en cas de violations. &Agrave; un an des &eacute;lections europ&eacute;ennes, une enqu&ecirc;te se penche sur les sentiments des citoyens &agrave; l&rsquo;&eacute;gard du vote. Les raisons civiques &ndash;&nbsp;par exemple, &laquo;&nbsp;le devoir de citoyen&nbsp;&raquo;&nbsp;&ndash; sont cit&eacute;es en premier lieu lorsque les personnes interrog&eacute;es sont invit&eacute;es &agrave; dire pourquoi elles pensent que les Europ&eacute;ens se rendront aux urnes. Une grande majorit&eacute; cependant consid&egrave;re que les &eacute;lecteurs s&rsquo;abstiendront ou parce qu&rsquo;ils ont le sentiment que leur vote sera inutile, qu&rsquo;ils n&rsquo;auront pas de capacit&eacute; d&rsquo;influence (&laquo;&nbsp;ils pensent que leur vote ne changera rien&nbsp;&raquo;) ou par manque de confiance dans le syst&egrave;me politique ou par d&eacute;sint&eacute;r&ecirc;t, de mani&egrave;re g&eacute;n&eacute;rale, pour la politique ou les &eacute;lections. Le manque d&rsquo;informations est &eacute;galement un &eacute;l&eacute;ment &agrave; prendre en consid&eacute;ration. L&rsquo;activit&eacute; du Parlement europ&eacute;en, pour lequel les Europ&eacute;ens sont appel&eacute;s &agrave; voter entre le 26 et le 29 mai 2009 n&rsquo;est pas clairement per&ccedil;ue. Seuls 32&nbsp;% des Europ&eacute;ens en ont une perception positive, 21&nbsp;% en ont une perception n&eacute;gative tandis que 43&nbsp;% n&rsquo;ont pas d&rsquo;avis sur la question &agrave; ce sujet.</p> <h2 class="texte">Les comportements politiques</h2> <h3 class="texte">L&rsquo;abstentionnisme, un signal fort</h3> <p class="texte">La premi&egrave;re &eacute;lection europ&eacute;enne au suffrage universel direct qui s&#39;est tenue en 1979 a attir&eacute; 62&nbsp;% des &eacute;lecteurs inscrits. Depuis, la baisse du taux de participation est syst&eacute;matique &agrave; l&#39;&eacute;chelle de l&#39;UE. Elle se stabilise &agrave; pr&egrave;s de 43&nbsp;% en 2009 et 2014. Les citoyens n&eacute;gligent les &eacute;lections, s&#39;ils <em>&quot;</em>ont le sentiment que c&#39;est compliqu&eacute;, que &ccedil;a ne va pas avoir d&#39;impact sur eux<em>&quot;, </em>r&eacute;sume Mathieu Gallard.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn35" id="bodyftn35">35</a></sup> L&#39;abstention aux europ&eacute;ennes t&eacute;moignerait d&#39;un d&eacute;sint&eacute;r&ecirc;t pour ses politiques et ses institutions jug&eacute;es complexes et lointaines plus que d&rsquo;un rejet.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn36" id="bodyftn36">36</a></sup> L&rsquo;origine de l&rsquo;abstention aux &eacute;lections europ&eacute;ennes serait donc d&rsquo;origine cognitive. En d&eacute;mocratie, la culture civique n&eacute;cessite de conna&icirc;tre le syst&egrave;me politique &ndash;&nbsp;ses acteurs, ses r&egrave;gles du jeu, sa structure&nbsp;&ndash;. Or, l&rsquo;extr&ecirc;me complexit&eacute; du syst&egrave;me politique de l&rsquo;Union reste sans cesse d&eacute;nonc&eacute;e. Le Parlement europ&eacute;en &eacute;volue au sein d&#39;une architecture europ&eacute;enne<em> </em>extr&ecirc;mement complexe. Il est quasi impossible pour un n&eacute;ophyte de se retrouver dans ce labyrinthe tandis que le Parlement europ&eacute;en n&rsquo;offre que peu de rep&egrave;res tant qui de plus ne peut offrir de rep&egrave;res tant il se diff&eacute;rencie d&rsquo;un parlement national. Alors que des l&eacute;gislatives peuvent provoquer une v&eacute;ritable alternance, les &eacute;lections europ&eacute;ennes renouvellent le Parlement europ&eacute;en mais ne bousculent que marginalement les orientations politiques de l&#39;UE.&nbsp;Le Trait&eacute; de Maastricht a offert de nombreux acc&egrave;s du citoyen &agrave; L&rsquo;Union europ&eacute;enne (m&eacute;diateur, p&eacute;tition, acc&egrave;s aux documents, &hellip;). Ils sont essaim&eacute;s et n&rsquo;offrent au citoyen que peu de moyens.</p> <h3 class="texte">Des raisons de l&rsquo;abstentionnisme aux &eacute;lections europ&eacute;ennes</h3> <p class="texte">L&rsquo;abstentionnisme aux &eacute;lections europ&eacute;ennes &agrave; plusieurs origines. Parmi celles souvent &eacute;voqu&eacute;es figurent la d&eacute;faillance de l&rsquo;information et de la communication, l&rsquo;opacit&eacute; des enjeux port&eacute;s &agrave; l&rsquo;agenda, le poids de l&rsquo;histoire et de la culture politique nationale, l&rsquo;incoh&eacute;rence des objectifs poursuivis par l&rsquo;Union.</p> <h3 class="texte">D&eacute;ficit d&rsquo;information, d&eacute;faillance de la communication et biais m&eacute;diatique</h3> <p class="texte">Quand l&rsquo;illusion de savoir quitte le citoyen pour un ensemble de raisons li&eacute;es &agrave; l&rsquo;incompr&eacute;hension provenant d&rsquo;un d&eacute;faut de communication et d&rsquo;information, les attitudes, comportement, repr&eacute;sentations et opinions se transforment au point d&rsquo;amener un manque d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t et de produire, par cons&eacute;quent, un degr&eacute; particuli&egrave;rement &eacute;lev&eacute; d&rsquo;abstentions. Ce dont rend compte la participation aux &eacute;lections europ&eacute;ennes. Selon une enqu&ecirc;te Eurobarom&egrave;tre 68, 81&nbsp;% des Fran&ccedil;ais se disent mal inform&eacute;s sur les affaires europ&eacute;ennes. L&rsquo;information et la couverture m&eacute;diatique p&egrave;sent fortement sur la d&eacute;cision d&rsquo;aller voter. L&rsquo;oubli de la date des &eacute;lections europ&eacute;ennes est un facteur important d&rsquo;abstention aux europ&eacute;ennes. Seuls 32&nbsp;% des citoyens savent en 2018 quand auront lieu ces &eacute;lections. Pour nombre de citoyens de l&rsquo;Union, les &eacute;lections nationales pr&eacute;sentent plus d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;ts que les &eacute;lections europ&eacute;ennes. Le public europ&eacute;en reste mal inform&eacute; sur la construction europ&eacute;enne. Les media ont &agrave; cet &eacute;gard leur part de responsabilit&eacute;. Seules les crises, les &eacute;v&egrave;nements saillants, les &eacute;checs temporaires font l&rsquo;objet qui font les gros titres de la presse &eacute;crite et mobilisent la presse audiovisuelle en raison de leur caract&egrave;re sensationnel. Les informations qui cependant devraient toucher de pr&egrave;s les Europ&eacute;ens sont n&eacute;glig&eacute;es alors qu&rsquo;elles influencent leur quotidien. Toutefois, la difficult&eacute; d&rsquo;y avoir acc&egrave;s participe du manque de communication &agrave; leur sujet. L&rsquo;euroscepticisme s&rsquo;explique en partie par le r&ocirc;le jou&eacute; par les media qui ont tendance au vu de la complexit&eacute; de l&rsquo;Union europ&eacute;enne &agrave; retenir les informations n&eacute;gatives sur l&rsquo;Union europ&eacute;enne qui frappera davantage les auditeurs et les lecteurs. Cette attitude est soup&ccedil;onn&eacute;e d&rsquo;impacter la connaissance de l&rsquo;Union ainsi que de renforcer le soutien aux partis eurosceptiques.</p> <h3 class="texte">Opacit&eacute; des enjeux et incoh&eacute;rence des objectifs poursuivis</h3> <p class="texte">Le taux de participation &eacute;lectorale d&eacute;pend du degr&eacute; de clart&eacute; des<strong> </strong>enjeux de l&#39;&eacute;lection. Le vote est initialement conditionn&eacute; par la compr&eacute;hensibilit&eacute; de ceux-ci. Or, pour ce qui concerne les &eacute;lections europ&eacute;ennes, les enjeux politiques sont peu perceptibles. Ils apparaissent distants. Les &eacute;lections locales et nationales ont l&rsquo;avantage d&rsquo;offrir une proximit&eacute; plus grande du citoyen. Le sentiment d&#39;&ecirc;tre concern&eacute; par ce qui se joue est &eacute;galement un facteur qui d&eacute;termine la participation &agrave; un scrutin. Quand l&rsquo;&eacute;lecteur pense &ecirc;tre incapable de peser sur les d&eacute;cisions &agrave; venir, il ressent l&rsquo;inutilit&eacute; de son vote. Parmi les raisons qui poussent les citoyens de l&rsquo;Union &agrave; ne pas aller voter figure &ndash;&nbsp;selon l&rsquo;Eurobarom&egrave;tre pr&eacute;c&eacute;dant les derni&egrave;res &eacute;lections europ&eacute;ennes&nbsp;&ndash; la conviction de l&rsquo;inutilit&eacute; du vote&nbsp;: 60&nbsp;% des &eacute;lecteurs (moyenne europ&eacute;enne) ont&nbsp;la certitude que leur vote ne changera rien. Il existe des diff&eacute;rences entre sous-r&eacute;gions europ&eacute;ennes. Les citoyens du sud de l&rsquo;Europe, ainsi que ceux des pays baltes estiment que leurs voix ne comptent pas au sein de l&rsquo;Union. Le sentiment est invers&eacute; dans le nord du continent o&ugrave; on estime &ecirc;tre entendu. Par ailleurs, relativement &agrave; la confusion des enjeux, l&rsquo;examen du discours institutionnel europ&eacute;en sur l&rsquo;espace judiciaire europ&eacute;en fait voir qu&rsquo;il s&rsquo;agit d&rsquo;un discours circulaire qui m&ecirc;le obsession s&eacute;curitaire et respect de la d&eacute;mocratie&nbsp;&laquo;&nbsp;sans trancher entre les valeurs&nbsp;&raquo;<sup><a class="footnotecall" href="#ftn37" id="bodyftn37">37</a></sup>.</p> <h3 class="texte">Le poids de la culture politique nationale&nbsp;</h3> <p class="texte">De mani&egrave;re g&eacute;n&eacute;rale, la d&eacute;mocratie repr&eacute;sentative au sein du Parlement europ&eacute;en en s&rsquo;appuyant sur des groupes politiques transnationaux renforce l&rsquo;impression de l&rsquo;&eacute;tranget&eacute; du scrutin europ&eacute;en et souligne la distance entre le v&eacute;cu au niveau national et les r&egrave;gles en vigueur au niveau de l&rsquo;Union. M&ecirc;me si dans tous les Etats membres de l&rsquo;Union europ&eacute;enne peu d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t est consacr&eacute; aux &eacute;lections europ&eacute;ennes, le taux d&rsquo;abstention varie fortement de pays &agrave; pays et par sous-r&eacute;gions. Les Membres de l&rsquo;Europe de l&rsquo;Est sont particuli&egrave;rement touch&eacute;s par ce ph&eacute;nom&egrave;ne. Un clivage de ce type apparait en RFA entre sa partie Ouest et sa partie Est.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn38" id="bodyftn38">38</a></sup> Les orientations prises refl&egrave;tent elles aussi, une diff&eacute;rence entre elles. La culture politique est un facteur explicatif des &eacute;carts entre Membres de l&rsquo;Union europ&eacute;enne. La tendance &agrave; l&rsquo;abstentionnisme s&rsquo;inscrit dans un mouvement g&eacute;n&eacute;ral de m&eacute;fiance envers le syst&egrave;me politique de la part de Europ&eacute;ens de l&rsquo;UE (48&nbsp;%). Elle r&eacute;sulte&nbsp;aussi d&rsquo;un d&eacute;sint&eacute;r&ecirc;t pour la politique et les &eacute;lections en g&eacute;n&eacute;ral (43&nbsp;%). La m&eacute;fiance est la plus forte en Italie et au Royaume-Uni. Le sud de l&rsquo;Europe est dans l&rsquo;ensemble plus sceptique.</p> <h2 class="texte">De la culture civique des citoyens de l&rsquo;Union</h2> <p class="texte">Almond et Verba ont cherch&eacute; &agrave; comprendre &agrave; partir d&rsquo;une enqu&ecirc;te par sondage la diff&eacute;rence de r&eacute;sistance du syst&egrave;me d&eacute;mocratique entre diff&eacute;rents pays au cours du XX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn39" id="bodyftn39">39</a></sup> Ils ont identifi&eacute; trois types de culture civique&nbsp;: la culture paroissiale, la culture de suj&eacute;tion, la culture de participation. Si on les rapproche de la situation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne, des traits de la culture de suj&eacute;tion se d&eacute;gagent. Mise &agrave; part la connaissance du syst&egrave;me politique la caract&eacute;risant&nbsp;&ndash;, l&rsquo;existence d&rsquo;attitudes de passivit&eacute; &agrave; son &eacute;gard ainsi que le sentiment de son &eacute;loignement et de sa sup&eacute;riorit&eacute; seraient &eacute;pingl&eacute;s. L &rsquo;Union europ&eacute;enne apparait aussi comme source de bienfaits. Une majorit&eacute; de personnes interrog&eacute;es reconnait que l&rsquo;appartenance &agrave; l&rsquo;Union europ&eacute;enne est une bonne chose pour leur pays. La culture de participation qui implique connaissance et adh&eacute;sion au syst&egrave;me politique mais aussi des attitudes d&rsquo;engagement dans le fonctionnement de ce syst&egrave;me par la voie de la participation politique (&eacute;lections, recours au m&eacute;diateur, p&eacute;titions, plaintes&hellip;) laisse &agrave; d&eacute;sirer &agrave; l&rsquo;&eacute;chelon de l&rsquo;Union europ&eacute;enne. Le nombre de p&eacute;titions reste peu &eacute;lev&eacute;. Ce mode d&rsquo;acc&egrave;s &agrave; l&rsquo;Union europ&eacute;enne est saisi par des groupes organis&eacute;s et des cat&eacute;gories socio-culturelles sup&eacute;rieures.</p> <p class="texte">Ramen&eacute;e aux crit&egrave;res que sont les dimensions de la culture civique selon Almond et Verba, l&rsquo;enqu&ecirc;te pr&eacute;c&eacute;dant les &eacute;lections europ&eacute;ennes de 2019 permet d&rsquo;observer qu&rsquo;il s&rsquo;agit l&agrave; d&rsquo;un concept &ndash;&nbsp;qui quoique con&ccedil;u pour &ecirc;tre appliqu&eacute; dans le cadre national&nbsp;&ndash; peut &eacute;clairer la question de la faiblesse de l&rsquo;Union europ&eacute;enne en tant que <em>communaut&eacute; politique</em> (c&lsquo;est nous qui soulignons) approch&eacute;e sous l&rsquo;angle de la d&eacute;mocratie. Ces auteurs ont retenu trois composantes de la culture civique&nbsp;: Les composantes cognitives (les connaissances, ce que l&rsquo;on sait ou ce que l&rsquo;on croit savoir sur les institutions politiques, leur fonctionnement, sur les dirigeants politiques, etc.).Les r&eacute;sultats &agrave; cet &eacute;gard sont peu encourageants en ce qui concerne l&rsquo;Union europ&eacute;enne en tant que d&eacute;mocratie. Les citoyens de l&rsquo;Union r&eacute;clament plus d&rsquo;informations. Les composantes affectives (situ&eacute;es au-del&agrave; du jugement rationnel jouent des sentiments d&rsquo;attirance ou de r&eacute;pulsion, de sympathie ou d&rsquo;antipathie, d&rsquo;admiration ou de m&eacute;pris &agrave; l&rsquo;&eacute;gard des hommes politiques, des organisations, des courants de pens&eacute;e, etc.). La composante &eacute;valuative est perceptible au travers du jugement sur la valeur d&eacute;mocratique de l&rsquo;Union. Elle est pass&eacute;e de 43&nbsp;% en mars 2017 &agrave; 46&nbsp;% en mars 2018. Cette progression est probablement &agrave; attribuer au syst&egrave;me de &laquo;&nbsp;spitzenkandidat&nbsp;&raquo; per&ccedil;u comme un progr&egrave;s sur les plans de la d&eacute;mocratie (61&nbsp;%) et de la transparence (63&nbsp;%).<em>&nbsp;</em>Le terme <em>&laquo;&nbsp;</em>spitzenkandidaten<em>&nbsp;&raquo;</em>, emprunt&eacute; &agrave; l&rsquo;allemand, d&eacute;signe les candidats des partis europ&eacute;ens qui briguent la pr&eacute;sidence de la Commission europ&eacute;enne. Le pr&eacute;sident de la Commission europ&eacute;enne &eacute;tait pr&eacute;c&eacute;demment d&eacute;sign&eacute; directement par le Conseil europ&eacute;en o&ugrave; si&egrave;gent les chefs d&rsquo;Etat et de gouvernement des Etats membres. Le choix se faisait &agrave; huis clos. Le Trait&eacute; de Lisbonne (2007), en son article&nbsp;17, a sp&eacute;cifi&eacute; que le Conseil europ&eacute;en<em> &laquo;&nbsp;doit tenir compte des &eacute;lections au Parlement europ&eacute;en&nbsp;&raquo;</em> lorsqu&rsquo;il d&eacute;signe le pr&eacute;sident de la Commission europ&eacute;enne. Pour 60&nbsp;% des Europ&eacute;ens le syst&egrave;me du &laquo;&nbsp;spitzenkandidaten&nbsp;&raquo; accroit la l&eacute;gitimit&eacute; de la Commission europ&eacute;enne. Il aurait pour effet de pousser plus de la moiti&eacute; des &eacute;lecteurs &agrave; aller aux urnes. Il offre l&rsquo;avantage de mettre un visage&nbsp;sur &laquo;&nbsp;Bruxelles&nbsp;&raquo;. Les interview&eacute;s sont 70&nbsp;% &agrave; exprimer le souhait de voir ce syst&egrave;me assorti d&rsquo;un d&eacute;bat sur l&rsquo;avenir de l&rsquo;UE. Les jugements n&eacute;gatifs atteignent toutefois les 42&nbsp;% en mars 2018. Pour ces personnes &laquo;&nbsp;l&rsquo;Union n&rsquo;est pas sur la bonne voie&nbsp;&raquo;. Le syst&egrave;me de &laquo;&nbsp;spitzenkandidat&nbsp;&raquo; n&rsquo;a pas &eacute;t&eacute; repris en 2019.En 2014, le Parlement europ&eacute;en &eacute;tait parvenu &agrave; imposer ce syst&egrave;me. Il s&rsquo;accordait ainsi un pouvoir non explicitement pr&eacute;vu dans les Trait&eacute;s. Mais qui symboliquement pouvait permettre de percevoir l&rsquo;av&egrave;nement d&rsquo;une Commission europ&eacute;enne moins technocratique. Les man&oelig;uvres politiciennes des chefs d&rsquo;Etat et de gouvernement dont les nominations aux plus hauts postes des Institutions de l&rsquo;Union ont fait l&rsquo;objet ces derniers jours de longues discussions ont de quoi d&eacute;senchanter les citoyens de l&rsquo;Union qui se sont pr&eacute;sent&eacute;s aux urnes croyant ainsi pouvoir &ndash;&nbsp;quoiqu&rsquo;indirectement&nbsp;&ndash; inciter les dirigeants &agrave; un fonctionnement davantage d&eacute;mocratique de l&rsquo;Union. Le retour en arri&egrave;re n&rsquo;est pas qu&rsquo;une impression. La participation politique d&eacute;finie par Ph.&nbsp;Braud comme &laquo;&nbsp;ensemble des activit&eacute;s, individuelles ou collectives, susceptibles de donner aux gouvern&eacute;s une influence sur le fonctionnement du syst&egrave;me politique&nbsp;&raquo; se trouve franchement contrecarr&eacute;e. L&rsquo;exercice de la d&eacute;mocratie &agrave; partir du bas n&rsquo;est pas encore au go&ucirc;t des Etats. Les rapports de force entre le Conseil europ&eacute;en et le Parlement europ&eacute;en &agrave; propos de la Pr&eacute;sidence de la Commission europ&eacute;enne, Institution supranationale et obligatoirement ind&eacute;pendante des Etats membres a fait rejaillir la tension au sujet de la l&eacute;gitimit&eacute; d&eacute;mocratique de l&rsquo;Institution directement &eacute;lue par les citoyens et celle r&eacute;unissant des gouvernants des Etats membres arriv&eacute;s au pouvoir &agrave; l&rsquo;issue d&rsquo;&eacute;lections l&eacute;gislatives organis&eacute;es dans le cadre national.</p> <h2 class="texte">L&rsquo;&laquo;&nbsp;eurod&eacute;mocratie&nbsp;&raquo; aujourd&rsquo;hui</h2> <p class="texte"><a href="http://www.europarl.europa.eu/pdf/eurobarometre/2018/oneyearbefore2019/one_year_before_ee2019_fr_fr.pdf">L&#39;enqu&ecirc;te</a> <span style="text-decoration:underline;">faite pour le Parlement europ&eacute;en en 2018</span> r&eacute;v&eacute;lait que les nouvelles formations politiques ont le vent en poupe. 56&nbsp;% des citoyens pensent qu&#39;un changement de l&#39;Union est n&eacute;cessaire. 53&nbsp;% des personnes interrog&eacute;es jugent que les nouveaux partis, souvent populistes, sont les mieux plac&eacute;s pour faire aboutir cette transformation. L&#39;arriv&eacute;e au pouvoir en Italie de mouvements eurosceptiques avertissait de la d&eacute;ception des Europ&eacute;ens.</p> <h3 class="texte">L&rsquo;&eacute;tat des demandes envers l&rsquo;Union</h3> <p class="texte">Pour une majorit&eacute; de citoyens europ&eacute;ens l&#39;Europe est la mieux plac&eacute;e pour r&eacute;pondre &agrave; des<strong> </strong>enjeux internationaux, tels que l&#39;instabilit&eacute; croissante dans le monde arabe, l&#39;influence accrue de la Russie et de la Chine, ou le Brexit et l&#39;&eacute;lection de Donald Trump. L&rsquo;intervention de l&rsquo;Europe est &eacute;galement sollicit&eacute;e pour faire face &agrave; des probl&egrave;mes de dimension transnationale et prendre en consid&eacute;ration des enjeux globaux. 80&nbsp;% des citoyens pensent que l&#39;UE devrait agir davantage dans la lutte contre le terrorisme (80&nbsp;%), le ch&ocirc;mage (78&nbsp;%), la protection de l&#39;environnement (75&nbsp;%) et la lutte contre la fraude fiscale (74&nbsp;%). Les pr&eacute;occupations premi&egrave;res des Europ&eacute;ens varient de pays &agrave; pays. Ici encore le facteur situationnel influence grandement les pr&eacute;f&eacute;rences nationales.</p> <p class="texte">Plusieurs enqu&ecirc;tes Eurobarom&egrave;tre et rapports sur les Consultations citoyennes europ&eacute;ennes ont eu lieu en 2018.Elles fournissent des indicateurs sur l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;esprit des Europ&eacute;ens &agrave; la veille des prochaines &eacute;lections europ&eacute;ennes.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn40" id="bodyftn40">40</a></sup> Encore faut-il rester prudents quant aux r&eacute;sultats des entretiens. Il existerait un biais concernant le processus. Selon les analyses de la Commission nationale de d&eacute;bat public (CNDP), le public eurosceptique, qu&rsquo;il soit d&rsquo;extr&ecirc;me-droite, d&rsquo;extr&ecirc;me-gauche ou des autres partis s&rsquo;est tr&egrave;s peu d&eacute;plac&eacute;. Aussi, les options retenues par les diff&eacute;rentes consultations sont globalement tr&egrave;s pro-europ&eacute;ennes. Le Brexit pourrait avoir influenc&eacute; les r&eacute;sultats du dernier sondage Eurobarom&egrave;tre. Les Europ&eacute;ens interrog&eacute;s semblent prendre conscience des enjeux relatifs au prochain scrutin europ&eacute;en, m&ecirc;me s&rsquo;il n&rsquo;est pas s&ucirc;r qu&rsquo;ils soient entendus quant &agrave; leurs attentes.<sup><a class="footnotecall" href="#ftn41" id="bodyftn41">41</a></sup>Les Europ&eacute;ens consult&eacute;s pensent qu&rsquo;une meilleure information sur l&rsquo;UE et sur son impact dans la vie quotidienne des citoyens est de nature &agrave; accro&icirc;tre l&rsquo;inclination &agrave; se d&eacute;placer pour aller voter. Ce facteur est plac&eacute; en t&ecirc;te avec 43&nbsp;%. Pour la premi&egrave;re fois depuis le printemps 2010, le sentiment d&rsquo;&ecirc;tre citoyen de l&rsquo;Union europ&eacute;enne est partag&eacute; par une majorit&eacute; de citoyens dans tous les &Eacute;tats membres. 70&nbsp;% des Europ&eacute;ens se sentent citoyens de l&#39;UE. Dans 15 &Eacute;tats membres, une majorit&eacute; de r&eacute;pondants ont confiance dans l&#39;UE&nbsp;; 40&nbsp;% des Europ&eacute;ens ont une image positive de l&#39;UE ,37&nbsp;% portent un regard neutre et seuls 21&nbsp;% ont une image n&eacute;gative. C&#39;est le cas dans 15 &Eacute;tats membres, les pourcentages enregistr&eacute;s les plus importants se trouvent en Irlande (64&nbsp;%), en Bulgarie et au Portugal (56&nbsp;% dans les deux cas), ainsi qu&#39;au Luxembourg (54&nbsp;%). La confiance dans l&#39;UE reste plus &eacute;lev&eacute;e que celle dans les gouvernements ou parlements nationaux. 42&nbsp;% des Europ&eacute;ens ont confiance dans l&#39;Union europ&eacute;enne tandis que 34&nbsp;% d&#39;entre eux ont confiance dans leur parlement et gouvernement nationaux. Une majorit&eacute; d&#39;Europ&eacute;ens se disent<strong> </strong>optimistes quant &agrave; l&#39;avenir de l&#39;UE<strong> </strong>(58&nbsp;%, +1). C&#39;est le cas dans tous les &Eacute;tats membres, sauf deux&nbsp;: en Gr&egrave;ce (o&ugrave;, malgr&eacute; un regain d&#39;optimisme de 5&nbsp;points de pourcentage, 53&nbsp;% des citoyens se disent &laquo;&nbsp;pessimistes&nbsp;&raquo;, contre 42&nbsp;% qui se disent &laquo;&nbsp;optimistes&nbsp;&raquo; et au Royaume-Uni (48&nbsp;%, contre 43&nbsp;%).Par rapport au printemps 2014, un plus grand nombre de citoyens estiment avoir b&eacute;n&eacute;fici&eacute; des initiatives cl&eacute;s de l&#39;Union telles que l&#39;absence de contr&ocirc;les aux fronti&egrave;res ou la r&eacute;duction de ces contr&ocirc;les lorsqu&#39;ils se rendent &agrave; l&#39;&eacute;tranger (53&nbsp;%, +1), la r&eacute;duction du co&ucirc;t des appels lors de l&#39;utilisation d&#39;un t&eacute;l&eacute;phone portable dans un autre pays de l&#39;UE (48&nbsp;%, +14), des droits du consommateur renforc&eacute;s lors de l&#39;achat de produits ou de services dans un autre pays de l&#39;UE (37&nbsp;%, +13) ou une am&eacute;lioration des droits des passagers dans le transport a&eacute;rien (34&nbsp;%, +12).La dimension transnationale de l&rsquo;Union continue d&rsquo;&ecirc;tre appr&eacute;ci&eacute;e. Elle d&eacute;colle. Les priorit&eacute;s que la Commission s&#39;est fix&eacute;es b&eacute;n&eacute;ficient d&#39;un large soutien. La libre circulation est pr&eacute;conis&eacute;e par 82&nbsp;% des r&eacute;pondants (+1). La politique de d&eacute;fense et de s&eacute;curit&eacute; commune est appr&eacute;ci&eacute;e par 75&nbsp;% (pourcentage inchang&eacute;). Une majorit&eacute; de 71&nbsp;% a exprim&eacute; son soutien &agrave; la politique commerciale de l&rsquo;Union. Cette politique n&rsquo;avait pas fait l&rsquo;objet d&rsquo;un sondage pr&eacute;c&eacute;demment.</p> <h1 class="texte">Conclusion&nbsp;: &laquo;&nbsp;Changer l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;&raquo;&nbsp;?</h1> <p class="texte">Au plus le temps passe au plus se d&eacute;gage l&rsquo;impression que le processus de d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union v&eacute;g&egrave;te dans ce que l&rsquo;on pourrait qualifier de &laquo;&nbsp;d&eacute;j&agrave; connu&nbsp;&raquo;. Connu le discours officiel, connues les opinions publiques &agrave; ce propos, connues les attentes des citoyens de l&rsquo;Union, connues les explications rendant compte de l&rsquo;origine des cons&eacute;quences engendr&eacute;es par l&rsquo;allongement de la distance entre L&rsquo;Union europ&eacute;enne &ndash;&nbsp;ses Institutions, ses politiques, ses responsables, son mode de fonctionnement, son jargon&nbsp;&ndash; et les Europ&eacute;ens d&eacute;sireux de changement.</p> <p class="texte">La mont&eacute;e des populismes en Europe, celle de l&rsquo;ultranationalisme, celle du protectionnisme, celle de l&rsquo;euroscepticisme, la tentation du retrait, du repli sur soi, du s&eacute;paratisme et des ind&eacute;pendantismes tracent les contours d&rsquo;un avenir p&eacute;rilleux. Ce contexte charg&eacute; offre peut-&ecirc;tre une occasion d&rsquo;ouvrir la voie aux r&eacute;orientations qui s&rsquo;imposent. Le temps de l&rsquo;exclusivit&eacute; de la verticalit&eacute; des d&eacute;cisions est contest&eacute;. Les Europ&eacute;ens de l&rsquo;Union veulent &ecirc;tre entendus, inform&eacute;s, influents. Le temps du refuge des dirigeants derri&egrave;re des barri&egrave;res inattendues, inconnues, cach&eacute;es par un jeu de complexification institutionnelle, d&eacute;cisionnelle ainsi que par des strat&eacute;gies langagi&egrave;res compliquant ou alt&eacute;rant la compr&eacute;hension n&rsquo;est plus (ou moins) accept&eacute;.</p> <p class="texte">La d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne a vu le jour pouss&eacute;e sous la contrainte de devoir rapprocher d&rsquo;elle son citoyen. Le foss&eacute; s&rsquo;agrandissait entre l&rsquo;Europe d&rsquo;en haut et celle d&rsquo;en bas. Cette contrainte se heurte au projet d&rsquo;int&eacute;gration fonctionnelle qui a proc&eacute;d&eacute; &agrave; l&rsquo;organisation dite &laquo;&nbsp;communautaire&nbsp;&raquo; et s&rsquo;appuyait sur le proc&eacute;d&eacute; de l&rsquo;engrenage. La strat&eacute;gie adopt&eacute;e par les P&egrave;res fondateurs de cette Europe a &eacute;t&eacute; qualifi&eacute;e de &laquo;&nbsp;strat&eacute;gie f&eacute;d&eacute;rale camoufl&eacute;e&nbsp;&raquo;. D&egrave;s le d&eacute;part, la nature de l&rsquo;Europe &agrave; construire &eacute;tait difficilement d&eacute;finissable. S&eacute;duisante parce que pr&eacute;sent&eacute;e comme &eacute;tant &laquo;&nbsp;communautaire&nbsp;&raquo;, effrayante pour certains parce que gouvern&eacute;e par un processus d&rsquo;engrenage, parce qu&rsquo;aussi pressentie comme &eacute;tant de nature f&eacute;d&eacute;rale. La tension entre le projet n&eacute;o-fonctionnaliste qui fonde l&rsquo;Europe institutionalis&eacute;e et l&rsquo;exigence de d&eacute;mocratiser l&rsquo;Europe &ndash;&nbsp;ce qui n&rsquo;&eacute;tait pas pr&eacute;vu&nbsp;&ndash; explique la mani&egrave;re dont les gouvernants traitent la question du d&eacute;ficit d&eacute;mocratique de l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;: y r&eacute;pondre tout en ne s&rsquo;&eacute;cartant pas trop du sentier trac&eacute; &agrave; l&rsquo;origine. Ils proc&eacute;deront par petites touches, &agrave; petits pas, &agrave; coups de pinceau successifs. Le rapport Tindemans sur l&rsquo;Europe des citoyens met l&rsquo;accent sur la protection de quelques droits pas toujours significatifs puisque les droits de vote ou d&rsquo;&eacute;ligibilit&eacute; ne figurent pas au programme. Les suggestions faites au Sommet de Fontainebleau (1984) s&rsquo;en tiennent &agrave; la cr&eacute;ation de quelques instruments symboliques (hymne, constitution d&rsquo;&eacute;quipes sportives&hellip;). Le Trait&eacute; de Maastricht &eacute;tablit en 1992 une citoyennet&eacute; de l&rsquo;Union mais sa conception &eacute;triqu&eacute;e et une certaine d&eacute;pendance vis-&agrave;-vis des Etats d&eacute;voilent le peu d&rsquo;enthousiasme des gouvernants. Les droits importants de la citoyennet&eacute; sont en effet &agrave; faire valoir vis-&agrave;-vis de l&rsquo;Etat. La contradiction entre l&rsquo;Europe r&ecirc;v&eacute;e &ndash;&nbsp;l&rsquo;Europe communautaire&nbsp;&ndash; et l&rsquo;Europe technocratique des P&egrave;res fondateurs, la tension entre la supranationalit&eacute; et la persistance de l&rsquo;Etat, communaut&eacute; politique forte d&rsquo;un long pass&eacute; et imprimant son prisme au prix d&rsquo;un p&eacute;nible d&eacute;chiffrage de la construction de l&rsquo;Europe et les dissonances cognitives qui en r&eacute;sultent ont entra&icirc;n&eacute; le recours au proc&eacute;d&eacute; du brouillage&nbsp;:technicit&eacute; des expressions, ambigu&iuml;t&eacute; des mots des textes officiels, incertitudes du langage utilis&eacute; dans ces m&ecirc;mes textes, rappel de termes attractifs d&eacute;formant la perception de la r&eacute;alit&eacute;. Ce cocktail emp&ecirc;che le citoyen de saisir le sens du processus en cours et de ses composantes amplifiant ainsi le d&eacute;ficit d&eacute;mocratique qui se pare d&rsquo;un d&eacute;ficit cognitif. Le discours officiel invoquant le citoyen est critiqu&eacute; pour avoir &eacute;t&eacute; utilis&eacute; aux fins de bloquer tout progr&egrave;s de l&rsquo;int&eacute;gration europ&eacute;enne. L&#39;appellation <em>&laquo;&nbsp;</em>citoyennet&eacute; de l&#39;Union&nbsp;&raquo; fut retenue mais avec de nombreuses restrictions pour ce qui concerne sa pratique.</p> <p class="texte">Le succ&egrave;s de la formule&nbsp;&laquo;&nbsp;d&eacute;ficit d&eacute;mocratique&nbsp;&raquo; cr&eacute;&eacute;e par le Parlement europ&eacute;en montre que les mots peuvent peser quand ils prennent racine dans un terreau familier&nbsp;:la parlementarisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne a profit&eacute; au Parlement europ&eacute;en qui obtiendra un pouvoir de cod&eacute;cision sans toutefois pouvoir s&rsquo;&eacute;riger en institution l&eacute;gislative &agrave; part enti&egrave;re. En r&eacute;alit&eacute;, la d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne reste partielle, elle demeure dans un entre-deux d&ucirc; &agrave; la sp&eacute;cificit&eacute; de L&rsquo;Union europ&eacute;enne d&rsquo;une part, au mod&egrave;le connu de la citoyennet&eacute; au sein de l&rsquo;Etat.la d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Europe conforte la position du Parlement europ&eacute;en au sein du syst&egrave;me institutionnel europ&eacute;en, elle ne descend pas jusqu&rsquo;au citoyen sans lequel il n&rsquo;y a pas de d&eacute;mocratie. La d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union n&rsquo;a pas la qualit&eacute; d&rsquo;un projet pour l&rsquo;Union. Elle ne correspond ni &agrave; une intention, ni &agrave; une v&eacute;ritable r&eacute;solution ni &agrave; un dessein. Le d&eacute;tachement des citoyens de l&rsquo;Union europ&eacute;enne en r&eacute;sulte. L&rsquo;&eacute;pisode politicien autour de la d&eacute;signation du Pr&eacute;sident de la Commission europ&eacute;enne ainsi que le rejet par les chefs d&rsquo;Etat et de gouvernement de la proc&eacute;dure du spitzenkandidat &ndash;&nbsp;pourtant tr&egrave;s appr&eacute;ci&eacute; par les citoyens de l&rsquo;Union&nbsp;&ndash; ne le d&eacute;mentiront pas.</p> <p class="texte">Quelques probabilit&eacute;s semblent n&eacute;anmoins se profiler. Elles concernent la nature de l&rsquo;Union europ&eacute;enne, le rapport du citoyen &agrave; la d&eacute;mocratie cognitive, le ressort de son appr&eacute;ciation de l&rsquo;Union, son rapport aux formes de participation politique. La reconnaissance de la place de l&rsquo;Etat au sein du syst&egrave;me institutionnel de l&rsquo;Union, l&rsquo;orientation de la nature de cette derni&egrave;re vers la constitution d&rsquo;une &laquo;&nbsp;F&eacute;d&eacute;ration d&rsquo;Etats-nations&nbsp;&raquo;, imagin&eacute;e en son temps par J.&nbsp;Delors fait du chemin. Elle respecte les Nations. La formule a l&rsquo;avantage de dissocier le sens attribu&eacute; &agrave; f&eacute;d&eacute;ralisme et le sens &agrave; donner &agrave; f&eacute;d&eacute;ration qui doit &ecirc;tre banalis&eacute; puisque ce dernier s&rsquo;applique &agrave; d&rsquo;autres types d&rsquo;association que celle relevant de l&rsquo;Etat. La F&eacute;d&eacute;ration d&rsquo;Etats-nations ne produit pas un Etat f&eacute;d&eacute;ral europ&eacute;en. Le sentiment chez le citoyen europ&eacute;en qu&rsquo;il est comp&eacute;tent pour &eacute;mettre des opinions &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de l&rsquo;Union europ&eacute;enne. Il est incessamment revendiqu&eacute; de recevoir plus d&rsquo;information et de b&eacute;n&eacute;ficier de davantage de communication &agrave; son sujet. Les sondages d&rsquo;opinion indiquent que les opinions et attitudes des Europ&eacute;ens sont fortement conditionn&eacute;s par la &laquo;&nbsp;logique de mobilisation cognitive&nbsp;&raquo; pr&eacute;sent&eacute;e par R.&nbsp;Inglehart et J.‑J.&nbsp;Rabier. Elle consiste selon leurs propres termes &agrave; la &laquo;&nbsp;possession des comp&eacute;tences cognitives qui facilitent le traitement des informations concernant les objets politiques lointains&nbsp;&raquo;. L&rsquo;approche utilitariste de l&rsquo;Union europ&eacute;enne branch&eacute;e sur des demandes sectorielles et cat&eacute;gorielles s&rsquo;impose. Le nombre particuli&egrave;rement important de partis politiques s&rsquo;&eacute;tant pr&eacute;sent&eacute;s aux &eacute;lections de mai 2019 conforte ce jugement. Les formes de citoyennet&eacute; europ&eacute;enne qui se situent au-del&agrave; de la logique &eacute;lective attirent l&rsquo;&eacute;lecteur europ&eacute;en. Toutefois le manque de connaissance des rouages de l&rsquo;Union europ&eacute;enne et de son fonctionnement constituent &agrave; cet &eacute;gard un handicap majeur.</p> <p class="texte">Reste l&rsquo;enjeu de la d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Union europ&eacute;enne, celui de surmonter l&rsquo;ensemble des difficult&eacute;s auxquelles sont confront&eacute;s les Europ&eacute;ens de l&rsquo;Union afin de lui permettre d&rsquo;affirmer son &laquo;&nbsp;&ecirc;tre europ&eacute;en&nbsp;&raquo;, celui qui prend part &agrave; la construction de l&rsquo;Europe, une Europe qui ne r&eacute;sistera que si elle est une Europe non pas seulement pour les Europ&eacute;ens mais v&eacute;ritablement l&rsquo;Europe attendue par les citoyens, une Europe avec les citoyens. La route sera longue, difficile, compliqu&eacute;e. A moins qu&rsquo;une forte exp&eacute;rience, une conjoncture particuli&egrave;re, une crise profonde, une situation nouvelle ne jouent le r&ocirc;le d&rsquo;acc&eacute;l&eacute;rateur. Les mouvements qui, actuellement, secouent l&rsquo;Union europ&eacute;enne auront-ils une incidence sur sa d&eacute;mocratisation&nbsp;? Celle-ci trouvera-t-elle &agrave; terme les conditions de son plein accomplissement, dans le respect de la singularit&eacute; de l&rsquo;entit&eacute; &agrave; laquelle elle s&rsquo;adresse, le ciment d&rsquo;une union sans cesse plus &eacute;troite des peuples et des citoyens de l&rsquo;Europe.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn1" id="ftn1">1</a> Le Soir Plus, &laquo;&nbsp;Manifeste pour la d&eacute;mocratisation de l&rsquo;Europe&nbsp;&raquo;,10.12.2018</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn2" id="ftn2">2</a> L&rsquo;ouvrage de 2017 &eacute;tait co-sign&eacute; par St&eacute;phanie Hennette, Thomas Piketty, Guillaume Sacriste et Antoine Vauchez (&eacute;galement auteurs du Manifeste de d&eacute;cembre 2018</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn3" id="ftn3">3</a> Sophie G&eacute;rardin, Taurillon, 19 novembre 2008. https://www.taurillon.org/manque-de-lisibilite-des-institutions-europeennes-un-vice-se...</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn4" id="ftn4">4</a> P. Braud, <em>Science politique.&nbsp;La d&eacute;mocratie, </em>Paris, Editions du Seuil, 1993, p.&nbsp;93</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn5" id="ftn5">5</a> J.L Lagroye, <em>Sociologie politique</em>, Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences politiques et Dalloz, 2<sup>&egrave;me</sup> &eacute;dition, 1993, p.&nbsp;396</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn6" id="ftn6">6</a> Fr. Massart-Pi&eacute;rard,&nbsp;&laquo;&nbsp;Strat&eacute;gies et jeux de l&eacute;gitimation au sein du syst&egrave;me institutionnel de l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;&raquo;, <em>Annales d&rsquo;Etudes europ&eacute;ennes de l&rsquo;Universit&eacute; catholique de Louvain</em>, volume 8,2005-2006, pp.&nbsp;69-104</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn7" id="ftn7">7</a> Fr. Massart- Pi&eacute;rard, &laquo;&nbsp;Le Parlement europ&eacute;en&nbsp;: l&rsquo;irr&eacute;sistible mouvement de conqu&ecirc;te des pouvoirs&nbsp;&raquo;, <em>RIPC</em>, volume 16,2009, n&deg;&nbsp;4, pp.&nbsp;545-557</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn8" id="ftn8">8</a> N. Brack et O. Costa,&nbsp;&laquo;&nbsp;Parlement europ&eacute;en&nbsp;: une d&eacute;mocratie dilu&eacute;e&nbsp;&raquo;.Publi&eacute; le 30 Avril 2018 dans <a href="https://www.iee-ulb.eu/blog/academique/">Acad&eacute;mique</a><em>, </em><a href="https://www.iee-ulb.eu/blog/actualites/">Actualit&eacute;s</a></p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn9" id="ftn9">9</a> Viii J-L. Quermonne, <em>L&rsquo;Europe en qu&ecirc;te de l&eacute;gitimit&eacute;</em>, Paris, Presses de Sciences Po, 2001, p.&nbsp;27</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn10" id="ftn10">10</a> C. Belot,&nbsp;&laquo;&nbsp;Les logiques sociologiques de soutien au processus d&rsquo;int&eacute;gration europ&eacute;enne&nbsp;&raquo;, <em>RIPC</em>, vol.&nbsp;9, n&deg;&nbsp;1, printemps 2002</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn11" id="ftn11">11</a> Idem</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn12" id="ftn12">12</a> Ph. Malaurie,&nbsp;&laquo;&nbsp;L&rsquo;intelligibilit&eacute; des lois&nbsp;&raquo;, <em>Pouvoirs</em>, vol.&nbsp;3, n&deg;&nbsp;114, p.&nbsp;131</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn13" id="ftn13">13</a> Y.&nbsp;Delahaye, <em>L&rsquo;Europe sous les mots</em>, Paris, Payot, 1979, p.&nbsp;159</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn14" id="ftn14">14</a> Eurobarom&egrave;tre Flash 8, janvier 1992</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn15" id="ftn15">15</a> K. Reif, op.cit, p.&nbsp;30</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn16" id="ftn16">16</a> Cusso et Gobin,&nbsp;&laquo;&nbsp;Dossier des mots&nbsp;&raquo;, <em>Les langages du politique</em>, n&deg;&nbsp;88,2008</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn17" id="ftn17">17</a> J. Delors, <em>Le nouveau concert europ&eacute;en</em>, Paris, Odile Jacob, 1992, p.&nbsp;175</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn18" id="ftn18">18</a> O. Costa, F. Saint Martin, <em>Le Parlement europ&eacute;en,</em> La Documentation fran&ccedil;aise<em>, Coll. Reflexe Europe, 2011</em></p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn19" id="ftn19">19</a> Fr. Massart, <em>L&rsquo;Europe en tous ses Etats. Entre mythe et contrainte communautaire,</em> Louvain-la-Neuve, Academia-Bruylant, 1993, p.&nbsp;146</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn20" id="ftn20">20</a> O. Duhamel, <em>Les d&eacute;mocraties. R&eacute;gimes, histoire, exigences</em>, Paris, Seuil, Science politique, 1993, p.&nbsp;345</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn21" id="ftn21">21</a> Le Monde,&nbsp;&laquo;&nbsp;Europ&eacute;ennes&nbsp;: comment le Rassemblement national a abandonn&eacute; l&rsquo;id&eacute;e du Frexit. Depuis les &eacute;lections de 2014, le parti de Marine Le Pen a d&eacute;laiss&eacute; l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une sortie de l&rsquo;Union europ&eacute;enne et de la zone euro, pr&eacute;f&eacute;rant la piste d&rsquo;une refonte par l&rsquo;int&eacute;rieur. Par D<a href="https://www.lemonde.fr/signataires/damien-cottin/">amien Cottin</a>, Publi&eacute; le 15 mai 2019</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn22" id="ftn22">22</a> Y. Delahaye,&nbsp;&laquo;&nbsp;Visions d&rsquo;Europe&nbsp;&raquo; dans Fr. Massart-Pi&eacute;rard, (sous la dir. de),<em> L&rsquo;Europe pr&eacute;dite.la signification des mots</em>, Louvain-la-Neuve, Acad&eacute;mia-Erasme S.A, 1994, p.&nbsp;11</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn23" id="ftn23">23</a> C. Belot, op.cit. p.&nbsp;28</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn24" id="ftn24">24</a> K. van Steenbergen,&nbsp;&laquo;&nbsp;Y a-t-il un eurojargon&nbsp;?&nbsp;&raquo;, dans Fr. Massart et S. Vogeleer (sous la dir.de), <em>Barri&egrave;res insoup&ccedil;onn&eacute;es de l&rsquo;Europe sans fronti&egrave;res,</em> Louvain-la-Neuve, Bruylant-Academia, 1995, p.&nbsp;98</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn25" id="ftn25">25</a> K. van Steenbergen, idem</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn26" id="ftn26">26</a> F. Foret, <em>De l&rsquo;Etat &agrave; l&rsquo;Union europ&eacute;enne</em>, Bruxelles, Edition de l&rsquo;Universit&eacute; de Bruxelles, 2015</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn27" id="ftn27">27</a> B. Badie,&nbsp;&laquo;&nbsp;Citoyens au -del&agrave; de l&rsquo;Etat&nbsp;&raquo;, dans<em> Le citoyen</em> (sous la dir. de B. Badie, P. Perrineau), Paris, Presses de Sciences Po, 2000, p.&nbsp;21</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn28" id="ftn28">28</a> idem</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn29" id="ftn29">29</a> <a href="https://www.taurillon.org/manque-de-lisibilite-des-institutions-europeennes-un-vice-semantique">https://www.taurillon.org/manque-de-lisibilite-des-institutions-europeennes-un-vice-semantique</a></p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn30" id="ftn30">30</a> Dictionnaire La Toupie</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn31" id="ftn31">31</a> J.-L. Quermonne, <em>L&rsquo;Europe en qu&ecirc;te de l&eacute;gitimit&eacute;, </em>Paris, Presses de Sciences Po, 2001, pp.&nbsp;20-21</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn32" id="ftn32">32</a> Idem&nbsp;</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn33" id="ftn33">33</a> Eurobarom&egrave;tre du 25 mai 2018</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn34" id="ftn34">34</a> Eurobarom&egrave;tre</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn35" id="ftn35">35</a> https://www.touteleurope.eu/.../elections-europeennes-2019-tout-comprendre.html</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn36" id="ftn36">36</a> M. Gallard cit&eacute; par Justine Daniel dans Toute l&rsquo;Europe,&nbsp;&laquo;&nbsp;Europ&eacute;ennes&nbsp;: pourquoi l&#39;abstention est-elle si forte&nbsp;? Actualit&eacute; 18.04.2019</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn37" id="ftn37">37</a> C. Gobin et J-Cl Deroubaix, &laquo;&nbsp;L&rsquo;analyse du discours des organisations internationales. Un vaste champ encore peu explor&eacute;&nbsp;&raquo;, Mots. Les langages du politique [Online], 94&nbsp;|&nbsp;2010, Online since 06 November 2012, connection on 21 May 2019. URL&nbsp;: <a href="http://journals.openedition.org/mots/19872">http://journals.openedition.org/mots/19872</a></p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn38" id="ftn38">38</a> P.<em> </em>Magnette, <em>La citoyennet&eacute; europ&eacute;enne</em> Bruxelles, &Eacute;d.de l&#39;Universit&eacute; de Bruxelles, coll. &laquo;&nbsp;&Eacute;tudes europ&eacute;ennes&nbsp;&raquo;, 1999</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn39" id="ftn39">39</a> <a href="https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Gabriel_Almond&amp;oldid=115160811"><span lang="en" xml:lang="en">G.&nbsp;Almond</span></a><span lang="en" xml:lang="en"> et </span><a href="https://en.wikipedia.org/w/index.php?title=Sidney_Verba&amp;oldid=678259998"><span lang="en" xml:lang="en">Sidney&nbsp;Verba</span></a><span lang="en" xml:lang="en"> (dir.), </span><a href="https://books.google.ca/books/about/The_Civic_culture_revisited.html?id=dAoWAAAAIAAJ&amp;redir_esc=y"><span lang="en" xml:lang="en">The Civic Culture Revisited: an analytic study</span></a><span lang="en" xml:lang="en">, Little Brown, 1980.</span></p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn40" id="ftn40">40</a> M. Malherbe, &laquo;&nbsp;Elections europ&eacute;ennes&nbsp;: quel est l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;esprit de Europ&eacute;ens&nbsp;&raquo; publi&eacute; le 7 janvier 2019</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn41" id="ftn41">41</a> Eurobarom&egrave;tre 477 &laquo;&nbsp;D&eacute;mocratie et &eacute;lections&nbsp;&raquo;</p> <p class="bibliographie">B.&nbsp;Badie,&nbsp;P.&nbsp;Perrineau (sous la dir. de),<em> Le citoyen,</em> Paris, Presses de Sciences Po, 2000</p> <p class="bibliographie">C.&nbsp;Belot,&nbsp;&laquo;&nbsp;Les logiques sociologiques de soutien au processus d&rsquo;int&eacute;gration europ&eacute;enne&nbsp;&raquo;, <em>RIPC</em>, vol.&nbsp;9, n&deg;&nbsp;1, printemps 2002</p> <p class="bibliographie">P.&nbsp;Braud, <em>La d&eacute;mocratie politique</em>, Paris, Editions du Seuil, 2003</p> <p class="bibliographie">Cusso et Gobin,&nbsp;&laquo;&nbsp;Dossier des mots&nbsp;&raquo;, <em>Les langages du politique</em>, n&deg;&nbsp;88, 2008</p> <p class="bibliographie">Y.&nbsp;Delahaye, <em>L&rsquo;Europe sous les mots</em>, Paris, Payot, 1979</p> <p class="bibliographie">O.&nbsp;Costa,&nbsp;F.&nbsp;Saint Martin, <em>Le Parlement europ&eacute;en,</em> La Documentation fran&ccedil;aise<em>, Coll. Reflexe Europe, 2011</em></p> <p class="bibliographie">O.&nbsp;Costa<em>,&nbsp;&laquo;&nbsp;</em>Comment &eacute;valuer le Parlement europ&eacute;en et ses membres&nbsp;?&nbsp;&raquo;, ch.6, dans<em> Que fait l&rsquo;&rsquo;Europe&nbsp;? </em>Paris, Presses de Sciences Po, 2009</p> <p class="bibliographie">J.&nbsp;Delors, <em>Le nouveau concert europ&eacute;en</em>, Paris, Odile Jacob, 1992</p> <p class="bibliographie">O.&nbsp;Duhamel, <em>Les d&eacute;mocraties. R&eacute;gimes, histoire, exigences</em>, Paris, Seuil, Science politique, 1993</p> <p class="bibliographie">M.&nbsp;Gaille, <em>Le citoyen</em>, Paris, Flammarion, 1998</p> <p class="bibliographie">J.L Lagroye, <em>Sociologie politique</em>, Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences politiques et Dalloz, 2<sup>&egrave;me</sup> &eacute;dition, 1993,</p> <p class="bibliographie">P.&nbsp;Magnette, <em>La citoyennet&eacute; europ&eacute;enne</em> Bruxelles, &Eacute;d.de l&#39;Universit&eacute; de Bruxelles, coll. &laquo;&nbsp;&Eacute;tudes europ&eacute;ennes&nbsp;&raquo;, 1999</p> <p class="bibliographie">P.&nbsp;Magnette, <em>L&rsquo;Europe, l&rsquo;Etat et la d&eacute;mocratie, </em>Bruxelles, Editions Complexe<em>, 2000</em></p> <p class="bibliographie">Ph. Malaurie,&nbsp;&laquo;&nbsp;L&rsquo;intelligibilit&eacute; des lois&nbsp;&raquo;, <em>Pouvoirs</em>, vol.&nbsp;3, n&deg;&nbsp;114</p> <p class="bibliographie">Fr. Massart,&nbsp;&laquo;&nbsp;Strat&eacute;gies et jeux de l&eacute;gitimation au sein du syst&egrave;me institutionnel de l&rsquo;Union europ&eacute;enne&nbsp;&raquo;, <em>Annales d&rsquo;Etudes europ&eacute;ennes de l&rsquo;Universit&eacute; catholique de Louvain</em>, volume 8,2005-2006</p> <p class="bibliographie">Fr. Massart, L&rsquo;Europe en tous ses &eacute;tats. Entre mythe et contrainte communautaire, Louvain-la-Neuve, Academia-Bruylant, 1993</p> <p class="bibliographie">Fr. Massart, &laquo;&nbsp;Le Parlement europ&eacute;en&nbsp;: l&rsquo;irr&eacute;sistible mouvement de conqu&ecirc;te des pouvoirs&nbsp;&raquo;, <em>RIPC</em>, volume 16,2009, n&deg;&nbsp;4</p> <p class="bibliographie">Fr. Massart, (sous la dir.de),<em>&nbsp;L&rsquo;Europe pr&eacute;dite.la signification des mots</em>, Louvain-la-Neuve, Acad&eacute;mia-Erasme, 1994</p> <p class="bibliographie">Fr. Massart et S&nbsp;; Svetlana Vogeleer (sous la dir.de), <em>Barri&egrave;res insoup&ccedil;onn&eacute;es de l&rsquo;Europe sans fronti&egrave;res, </em>Louvain-la-Neuve, Bruylant-Academia, 1995</p> <p class="bibliographie">J-L Quermonne, <em>L&rsquo;Europe en qu&ecirc;te de l&eacute;gitimit&eacute;</em>, Paris, Presses de Sciences Po, 2001</p> <p class="bibliographie">J-L Quermonne,&nbsp;&laquo;&nbsp;La F&eacute;d&eacute;ration d&rsquo;Etats-Nations&nbsp;:&nbsp;concept ou contradiction&nbsp;?&nbsp;Revue fran&ccedil;aise de droit constitutionnel, vol.&nbsp;4, n&deg;&nbsp;84,2010, p.&nbsp;677-692</p> <p class="bibliographie"><em>Revue Internationale de Politique compar&eacute;e</em>, vol.&nbsp;9, n&deg;&nbsp;1, Bruxelles, De Boeck &sect; Larcier S.A., 2002</p> <p class="bibliographie">G.&nbsp;Richard-Nihoul, Pour une F&eacute;d&eacute;ration d&rsquo;Etats-Nations. La vision de J.&nbsp;Delors revisit&eacute;e, Bruxelles, Larcier, avril 2012</p> <p class="bibliographie">M.&nbsp;Tel&ograve;,&nbsp;&laquo;&nbsp;L&rsquo;impact du processus d&rsquo;int&eacute;gration europ&eacute;enne sur la d&eacute;mocratie interne aux Etats membres&nbsp;&raquo; dans C.&nbsp;Gobin et B.&nbsp;Rihoux (ed.), <em>La d&eacute;mocratie dans tous ses &eacute;tats, </em>Louvain-la-Neuve Bruylant-Academia, 2000</p>