<p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="color:#222222">Quand parler c&rsquo;est ne pas dire</span></b></span></span></span></p> <p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="color:#222222">‒ le pouvoir et sa langue de bois ‒</span></b></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:115%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><b><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Constantin Salavastru </span></span></b><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">est professeur de logique, rh&eacute;torique et th&eacute;orie de l&rsquo;argumentation &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; &laquo;Al.I.Cuza&raquo; de Iassy (Roumanie). Il est directeur du S&eacute;minaire de logique discursive, th&eacute;orie de l&rsquo;argumentation et rh&eacute;torique et de la revue Argumentum. Livres&nbsp; en fran&ccedil;ais&nbsp;: <i>Rh&eacute;torique et politique </i></span></span><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Symbol">-</span></span><i><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""> le pouvoir du discours et le discours du pouvoir</span></span></i><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">, Paris, L&rsquo;Harmattan, 2004&nbsp;; <i>Logique</i>,<i> argumentation</i>,<i> interpr&eacute;tation</i>, Paris,&nbsp; L&rsquo;Harmattan, 2007&nbsp;; <i>Essai sur la probl&eacute;matologie philosophique</i>, Paris, L&rsquo;Harmattan, 2010&nbsp;; <i>Argumentation et d&eacute;bats publics</i>, Paris, PUF, 2011&nbsp;; <i>Cinq &eacute;tudes sur la rh&eacute;torique cic&eacute;ronienne</i>, Paris, L&rsquo;Harmattan, 2013&nbsp;; </span></span><i><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Quand philosopher</span></span></i><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">, <i>c</i>&rsquo;<i>est questionner</i>, Revue internationale de philosophie, 4-2020/volume 74/n<sup>o</sup> 294, Bruxelles : De Boeck Sup&eacute;rieur, 2020.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px">&nbsp;</p> <h2 style="font-style:italic;"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span new="" roman="" style="font-family:" times="">1. Nous et le pouvoir</span></b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Tout ce qui se passe autour de nous ‒ plus loin ou plus pr&egrave;s ‒ est g&eacute;n&eacute;r&eacute;, entretenu ou influenc&eacute; par le <i>pouvoir</i>&nbsp;! Peu importe si nous avons la prise de conscience de ce conditionnement qui peut parfois se manifester d&rsquo;une fa&ccedil;on mal&eacute;fique. Nous voulons refl&eacute;ter, dans les lignes ci-dessous, les distorsions support&eacute;es par le langage, lorsqu&rsquo;il est mis au service du pouvoir&nbsp;: ses int&eacute;r&ecirc;ts, ses aspirations, ses id&eacute;aux. Une seule forme de ces distorsions est retenue&nbsp;: la <i>langue de bois</i>. </span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&nbsp;Qu&rsquo;est-ce que le pouvoir&nbsp;? Recourons &agrave; une d&eacute;finition d&eacute;j&agrave; classique, formul&eacute;e par Robert Dahl dans son &eacute;tude <i>The Concept of Power</i> [1957, 201-215]&nbsp;: &laquo;&nbsp;A a pouvoir sur B s&rsquo;il peut d&eacute;terminer B de faire une action que ce dernier ne ferait pas sans l&rsquo;action de A&nbsp;&raquo; [Dahl 1957, 202-203]. Le maire a introduit une nouvelle taxe. Les habitants de la ville la payent. &Eacute;videmment, de leur propre volont&eacute;, ils ne payeraient pas. Un acte de pouvoir est &agrave; l&rsquo;origine de ce comportement. Tels exemples peuvent &ecirc;tre multipli&eacute;s. Max Weber a soulign&eacute;, d&rsquo;une fa&ccedil;on tout &agrave; fait suggestive, que le pouvoir c&rsquo;est &laquo;&nbsp;le triomphe de la volont&eacute;&nbsp;&raquo; contre toute r&eacute;sistance et tout adversaire [Weber 1995, 95].</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Le pouvoir est une pr&eacute;sence dominatrice. Il est, &eacute;galement, une chose quotidienne. Quelques traits expliquent cette situation. Le premier&nbsp;: <i>tout dynamisme de la soci&eacute;t&eacute; peut &ecirc;tre expliqu&eacute; seulement&nbsp; par l</i>&rsquo;<i>appel &agrave; la relation de pouvoir</i>. Les normes de la soci&eacute;t&eacute; d&eacute;voilent &agrave; l&rsquo;individu ce qu&rsquo;il est obligatoire, ce qu&rsquo;il est permis et ce qu&rsquo;il est interdit de faire. La <i>punition</i>, acte de pouvoir, oblige l&rsquo;individu de faire ce qui est obligatoire et de ne pas faire ce qui est interdit. La dynamique du pouvoir imprime une certaine dynamique &agrave; la soci&eacute;t&eacute; [Salavastru 2004, 144-145]. Le deuxi&egrave;me&nbsp;: <i>le pouvoir met son empreinte sur tous les &eacute;l&eacute;ments structuraux de la soci&eacute;t&eacute;</i>. Les hi&eacute;rarchies de pouvoir montrent clairement le degr&eacute; de l&rsquo;influence du pouvoir sur l&rsquo;engrenage social et sur ses composantes principales. Au sommet de cette hi&eacute;rarchie est plac&eacute; le <i>pouvoir politique</i>. Toutes les autres d&eacute;pendent, en degr&eacute;s diff&eacute;rents, de ce pouvoir. Au long du temps, la place du pouvoir politique a balanc&eacute; en fonction de la forme de gestion du pouvoir: <i>d&eacute;mocratie</i>, &nbsp;<i>totalitarisme</i>, <i>anarchie</i>. &nbsp;En se r&eacute;f&eacute;rant &agrave; l&rsquo;incarnation du pouvoir qui est l&rsquo;&Eacute;tat, Tocqueville consid&egrave;re qu&rsquo;il est &laquo;&nbsp;la cause premi&egrave;re de la plupart des lois, des coutumes et des id&eacute;es qui r&egrave;glent la conduite des nations&nbsp;; ce qu&rsquo;il ne produit pas, il le modifie&nbsp;&raquo; [Tocqueville 1981, 107].</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Le troisi&egrave;me&nbsp;: <i>tous les grands &eacute;v&eacute;nements du monde portent la marque du pouvoir</i>. Soit qu&rsquo;il les a d&eacute;clench&eacute;, soit qu&rsquo;il les a entretenu, soit qu&rsquo;il les a d&eacute;velopp&eacute;, le pouvoir a eu le savoir-faire de profiter de tels &eacute;v&eacute;nements pour satisfaire ses int&eacute;r&ecirc;ts. Ses traces sont bien visibles. Un exemple&nbsp;: la <i>guerre</i>. Elle a incarn&eacute; le d&eacute;sir des leaders politiques d&rsquo;obtenir plus de pouvoir. </span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Le quatri&egrave;me&nbsp;: <i>rien ne semble &agrave; g&eacute;n&eacute;rer</i> <i>des passions si puissantes aussi que le pouvoir</i>. Aussi passionnelle est la bataille pour gagner une mairie locale comme la concurrence pour arriver &agrave; la pr&eacute;sidence d&rsquo;une r&eacute;publique.&nbsp;L&rsquo;enthousiasme, le d&eacute;sir, le courage, la g&eacute;n&eacute;rosit&eacute;, l&rsquo;amour, l&rsquo;orgueil, l&rsquo;&eacute;mulation, l&rsquo;espoir, la joie, la piti&eacute;, l&rsquo;admiration, la l&acirc;chet&eacute;, l&rsquo;estime, le d&eacute;gout sont mis au travail pour arriver au statut de vainqueur. </span></span></span></span></p> <h2 style="font-style:italic;"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">2. Qu&rsquo;est-ce que la langue de bois&nbsp;?</span></span></b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">La <i>langue de bois</i> constitue une opportunit&eacute; pour montrer comment le langage accompagne toujours une <i>topographie du pouvoir</i> en habillant rapidement les v&ecirc;tements qui conviennent &agrave; un r&eacute;gime de pouvoir. Orwell, par son roman <i>1984</i>, a fait plus que tous les th&eacute;oriciens pour imposer et d&eacute;voiler la r&eacute;alit&eacute; cach&eacute;e sous le syntagme &laquo;&nbsp;langue de bois&nbsp;&raquo;&nbsp;: un verbiage abondant et r&eacute;p&eacute;titif qui ne dit rien d&rsquo;important sur une r&eacute;alit&eacute; mais qui cr&eacute;e l&rsquo;impression que tout est bien fond&eacute; et bien connu par l&rsquo;auditoire qui le re&ccedil;oit.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">On veut remarquer, tout d&rsquo;abord, que la r&eacute;alit&eacute; de la langue de bois<i> est une pr&eacute;sence ancienne </i>dans l&rsquo;engrenage de la soci&eacute;t&eacute;. L&rsquo;&eacute;poque moderne l&rsquo;a seulement consacr&eacute; du point de vue th&eacute;orique. Les recherches r&eacute;centes montrent clairement les avatars et les formes particuli&egrave;res de la langue de bois tout au long de l&rsquo;histoire. Ensuite, il faut admettre que <i>la langue de bois est pr&eacute;sente dans plusieurs domaines</i>, au-del&agrave; du politique avec lequel elle est d&rsquo;habitude associ&eacute;e. Un bon exemple est la langue des fonctionnaires des institutions europ&eacute;ennes.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Notre point de d&eacute;part pour la compr&eacute;hension du concept de langue de bois est la d&eacute;finition propos&eacute;e par Christian Delporte dans son &eacute;tude historique d&eacute;di&eacute; &agrave; cette r&eacute;alit&eacute; : </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span style="color:#222222">&laquo;&nbsp;On pourrait d&eacute;finir la langue de bois comme un ensemble de proc&eacute;d&eacute;s qui, par les artifices d&eacute;ploy&eacute;s, visent &agrave; dissimuler la pens&eacute;e de celui qui y recourt pour mieux influencer et contr&ocirc;ler celle des autres&nbsp;&raquo; [Delporte 2011, 10]. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">En compl&eacute;tant les suggestions de cette d&eacute;finition, Delporte admet que le discours qui concr&eacute;tise la langue de bois est &laquo;&nbsp;convenu, g&eacute;n&eacute;ralisant, pr&eacute;fabriqu&eacute;, d&eacute;connect&eacute; de la r&eacute;alit&eacute;&nbsp;&raquo;. Les proc&eacute;d&eacute;es qu&rsquo;il utilise vise la reconstruction du r&eacute;el, &laquo;&nbsp;r&eacute;p&eacute;tant inlassablement les m&ecirc;mes mots et formules st&eacute;r&eacute;otypes, les m&ecirc;mes lieux communs, les m&ecirc;mes termes abstraits&nbsp;&raquo;. &Eacute;galement, les formules rh&eacute;toriques diverses sont mises &agrave; servir ses intentions manipulatrices (&laquo;&nbsp;questions purement rh&eacute;toriques&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;des euph&eacute;mismes &agrave; foison&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;des m&eacute;taphores vides de sens&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;des comparaisons vagues&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;des tautologies&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;des formules impersonnelles&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;des mots chocs&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;des mots f&eacute;tiches&nbsp;&raquo;) [Delporte 2010, 10]. Quelques remarques ci-dessous pourraient &eacute;clairer le concept de langue de bois et, &eacute;galement, faire plus visible son lien avec la nature du pouvoir, ses transformations en fonction de l&rsquo;individu ou du r&eacute;gime qui est au pouvoir. </span></span></span></span></span></p> <h2 style="font-style:italic;"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">3. Tracer le contour du r&eacute;gime et du leader</span></span></b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">La langue de bois est un <i>dispositif discursif bien d&eacute;limit&eacute;</i> qu&rsquo;un individu ou un r&eacute;gime de pouvoir construisent pour exprimer leurs pens&eacute;es, leurs id&eacute;es, leurs intentions et leurs projets. Elle permet au r&eacute;cepteur avis&eacute; de d&eacute;couvrir, sur le fondement de sa langue de bois, le leader politique (ou le leadership politique du r&eacute;gime) qui la repr&eacute;sente. Arr&ecirc;tons-nous&nbsp; &agrave; la s&eacute;quence ci-dessous&nbsp;:</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span style="color:#222222">&laquo;&nbsp;L&eacute;nine avait enseign&eacute; que l&rsquo;usage de la violence &eacute;tait justifi&eacute; par la r&eacute;sistance des classes exploitantes mais il parlait &agrave; ce moment-l&agrave; de l&rsquo;&eacute;poque o&ugrave; les classes exploitantes existaient et &eacute;taient puissantes. Mais d&egrave;s que la situation politique dans le pays s&rsquo;&eacute;tait am&eacute;lior&eacute;e, L&eacute;nine avait donn&eacute; des instructions pour mettre fin &agrave; la terreur de masse et abolir la peine de mort. Staline s&rsquo;&eacute;tait &eacute;cart&eacute; de ces principes. La terreur &eacute;tait en effet dirig&eacute;e contre les travailleurs honn&ecirc;tes du Parti&nbsp;; on inventait &agrave; leur &eacute;gard des fausses accusations, diffamatoires et absurdes. [...]. Pourquoi les membres du Comit&eacute; central ne se sont-ils pas oppos&eacute;s quand il &eacute;tait encore temps&nbsp;? Au d&eacute;but, un grand nombre d&rsquo;entre eux avait soutenu activement Staline parce que c&rsquo;&eacute;tait l&rsquo;un des marxistes les plus forts. Apr&egrave;s la mort de L&eacute;nine, Staline avait activement combattu contre les ennemis du l&eacute;ninisme. C&rsquo;&eacute;tait une lutte indispensable. Mais plus tard, Staline commen&ccedil;a &agrave; lutter contre les honn&ecirc;tes citoyens sovi&eacute;tiques.&nbsp;&raquo; [Nikita Khrouchtchev, <i>Discours secret au XX<sup>e</sup> Congr&egrave;s du PCUS</i>, le 25 f&eacute;vrier 1956&nbsp;; dans&nbsp;: Williams 2009, 56-57].</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Le lecteur avis&eacute; identifie rapidement que ces fragments de discours appartiennent &agrave; la langue de bois sp&eacute;cifique du r&eacute;gime totalitaire sovi&eacute;tique. Le discours de Nikita Khrouchtchev, prononc&eacute; dans un cercle restreint du leadership sovi&eacute;tique, d&eacute;nonce le culte de la personnalit&eacute; de Staline. Quelques proc&eacute;dures linguistiques fixent, au moins du point de vue de la forme discursive, les marques d&rsquo;une langue de bois typique &agrave; ce r&eacute;gime&nbsp;: l&rsquo;invocation du <i>nom du p&egrave;re de la r&eacute;volution</i> bolchevique, point obligatoire de r&eacute;f&eacute;rence et crit&egrave;re supr&ecirc;me d&rsquo;&eacute;valuation des membres du parti (&laquo;&nbsp;L&eacute;nine avait enseign&eacute;...&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;L&eacute;nine avait donn&eacute; des instructions...&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Staline avait activement combattu contre les ennemis du l&eacute;ninisme&nbsp;&raquo;), les <i>formules id&eacute;ologiques</i> qui dominent toute la propagande du r&eacute;gime (&laquo;&nbsp;la violence&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;la r&eacute;sistance&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;les classes exploitantes&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;la terreur de masse&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;la situation politique&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;les travailleurs&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;fausses accusations&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;les marxistes&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;le l&eacute;ninisme&nbsp;&raquo;), les <i>interrogations rh&eacute;toriques</i>, des vraies accusations et cris d&rsquo;indignation (&laquo;&nbsp;Pourquoi les membres du Comit&eacute; central ne se sont-ils pas oppos&eacute;s quand il &eacute;tait encore temps&nbsp;?&nbsp;&raquo;). Nous sommes devant une&nbsp; &laquo;&nbsp;sovietlangue&nbsp;&raquo; qui est &laquo;&nbsp;un filtre implacable qui vise &agrave; conformer la r&eacute;alit&eacute; &agrave; l&rsquo;id&eacute;ologie.&nbsp;&raquo; [Delporte 2011, 61]. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">&Agrave; c&ocirc;t&eacute; du r&eacute;gime, cette langue nous aide &agrave; reconna&icirc;tre l&rsquo;homme (&laquo;&nbsp;le leader&nbsp;&raquo;). Soit les s&eacute;quences ci-dessous&nbsp;:</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span style="color:#222222">&laquo;&nbsp;Vous nous condamnez, nous, Fran&ccedil;ais, &agrave; les garder chez nous, alors qu&rsquo;il existe dans notre droit ‒ et vous &ecirc;tes avocat ‒ non seulement des doubles mais des triples et des quadruples peines... Et je ne trouve personnellement pas anormal que quelqu&rsquo;un qui est venu chez nous, tr&egrave;s souvent de fa&ccedil;on ill&eacute;gale, et qui a commis un crime ou un d&eacute;lit, puisse &ecirc;tre en dehors de la peine qu&rsquo;il doit subir et qu&rsquo;il ne subit pas... [...]. Il semble que les gens ne vous int&eacute;ressent, pr&eacute;cis&eacute;ment, que dans la mesure o&ugrave; ils sont &eacute;trangers. Vous pratiquez, comme votre gouvernement, d&rsquo;ailleurs, la pr&eacute;f&eacute;rence &eacute;trang&egrave;re. Et &ccedil;a, je crois que c&rsquo;est ce qui insupporte les Fran&ccedil;ais qui se rendent compte que non seulement ils ne sont pas chez eux... [...]. Vous avez parl&eacute; du racisme antimusulman, du racisme antijuif, du racisme antinoir, il n&rsquo;y a qu&rsquo;une forme de racisme dont vous n&rsquo;avez pas parl&eacute; et qui est malheureusement pratiqu&eacute; chez nous, c&rsquo;est le racisme antifran&ccedil;ais, celui dont se sentent victimes des millions de nos compatriotes qui ne comprennent pas que ce qui a &eacute;t&eacute; fait pendant des ann&eacute;es et des ann&eacute;es, depuis Mathusalem, comme vous dites, dans ce pays, et qui est une somme de sacrifices, de travail, d&rsquo;&eacute;pargne, eh bien tout cela est dilapid&eacute;, gaspill&eacute;. (<i>Il dresse l</i>&rsquo;<i>index et ponctue ses propos du doigt</i>). Car je fais... je vous lance une accusation directe&nbsp;: vous &ecirc;tes, au poste que vous occupez, directement responsable de l&rsquo;aggravation du nombre des immigr&eacute;s dans notre pays. Chaque ann&eacute;e, votre politique laisse ou fait rentrer dans notre pays 500.000 immigr&eacute;s suppl&eacute;mentaires.&nbsp;&raquo; [&laquo;100 minutes pour convaincre&raquo;, <i>Confrontation t&eacute;l&eacute;vis&eacute;e entre Jean-Marie Le Pen et Nicolas Sarkozy</i>, France 2, 20 novembre 2003&nbsp;; dans&nbsp;: Delporte 2012, 350-351&nbsp;; 352-353&nbsp;; 357].</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Quelqu&rsquo;un qui vit et conna&icirc;t la vie politique fran&ccedil;aise des derniers trois d&eacute;cennies peut d&eacute;couvrir facilement dans ces fragments la voix impossible &agrave; confondre du repr&eacute;sentant typique de l&rsquo;extr&ecirc;me droite fran&ccedil;aise. Dans le contenu et dans ses formes d&rsquo;expression, une langue de bois se configure rapidement avec des caract&eacute;ristiques individuelles et personnelles (la &laquo;&nbsp;penlangue&nbsp;&raquo;&nbsp;!) qui retiennent l&rsquo;attention. Du point de vue du contenu, quelques th&egrave;mes pr&eacute;f&eacute;r&eacute;s de Jean-Marie Le Pen, r&eacute;p&eacute;t&eacute;s dans toutes ses interventions : la <i>France doit &ecirc;tre des fran&ccedil;ais </i>(&laquo;&nbsp;je crois que c&rsquo;est ce qui insupporte les Fran&ccedil;ais qui se rendent compte que non seulement ils ne sont pas chez eux&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;vous n&rsquo;avez pas parl&eacute; et qui est malheureusement pratiqu&eacute; chez nous, c&rsquo;est le racisme antifran&ccedil;ais, celui dont se sentent victimes des millions de nos compatriotes&nbsp;&raquo;), l&rsquo;<i>&eacute;tranger</i>,<i> le grand p&eacute;ril pour les fran&ccedil;ais </i>(&laquo;&nbsp;vous &ecirc;tes, au poste que vous occupez, directement responsable de l&rsquo;aggravation du nombre des immigr&eacute;s dans notre pays&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;Chaque ann&eacute;e, votre politique laisse ou fait rentrer dans notre pays 500.000 immigr&eacute;s suppl&eacute;mentaires&nbsp;&raquo;), le <i>nationalisme</i> qui doit dominer la politique<i> </i>(&laquo;&nbsp;Vous pratiquez, comme votre gouvernement, d&rsquo;ailleurs, la pr&eacute;f&eacute;rence &eacute;trang&egrave;re&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;c&rsquo;est le racisme antifran&ccedil;ais, celui dont se sentent victimes des millions de nos compatriotes...&nbsp;&raquo;</span></span><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:#222222">). </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Du point de vue de la forme expressive, rien n&rsquo;est oubli&eacute; s&rsquo;il peut augmenter une id&eacute;e, un sentiment, une passion&nbsp;: les <i>&eacute;pith&egrave;tes </i>(&laquo;&nbsp;pr&eacute;f&eacute;rence &eacute;trang&egrave;re&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;quadruples peines&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;fa&ccedil;on ill&eacute;gale&nbsp;&raquo;), l&rsquo;<i>oxymore </i>(&laquo;&nbsp;racisme antifran&ccedil;ais&nbsp;&raquo;), l&rsquo;<i>apostrophe </i>(&laquo;&nbsp;Vous nous condamnez, nous, Fran&ccedil;ais...&nbsp;&raquo;), l&rsquo;<i>hyperbole </i>(&laquo;&nbsp;celui dont se sentent victimes des millions de nos compatriotes&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;pendant des ann&eacute;es et des ann&eacute;es, depuis Mathusalem&nbsp;&raquo;), les <i>affirmations non-falsifiables </i>(&laquo;&nbsp;je ne trouve personnellement pas anormal que quelqu&rsquo;un qui est venu chez nous, tr&egrave;s souvent de fa&ccedil;on ill&eacute;gale...&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;qui est une somme de sacrifices, de travail, d&rsquo;&eacute;pargne, eh bien tout cela est dilapid&eacute;, gaspill&eacute;&nbsp;&raquo;), les <i>clich&eacute;s </i>(l&rsquo;image obsessive de l&rsquo;&eacute;tranger qui est coupable de tout ce qui est mal en France). Un m&eacute;lange d&rsquo;id&eacute;es et de mots qui laisse derri&egrave;re elle les traces bien visibles d&rsquo;une langue de bois sp&eacute;cifique. </span></span></span></span></span></p> <h2 style="font-style:italic;"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">4. Dissimuler les pens&eacute;es et les intentions</span></span></b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">La <i>langue de bois c</i>&rsquo;<i>est un moyen subtil et efficace de dissimuler les id&eacute;es</i>,<i> les projets</i>, <i>les directions r&eacute;elles d</i>&rsquo;<i>action du pouvoir</i>. Les leaders du pouvoir ne peuvent pas dire toujours directement ce qu&rsquo;ils veulent faire. Il y a des choses qui doivent rester cach&eacute;es, parce qu&rsquo;elles peuvent toucher d&rsquo;une fa&ccedil;on n&eacute;gative les sensibilit&eacute;s de l&rsquo;opinion publique. &Agrave; ces cas, la langue de bois entre en action. Par ses formules et ses clich&eacute;s qui ne disent rien concr&egrave;tement, elle peut s&rsquo;inscrire dans la &laquo;&nbsp;correction politique&nbsp;&raquo; si ch&egrave;re aux politiciens de nos jours. &Agrave; ces conditions, la langue de bois s&rsquo;associe &agrave; une affirmation plus g&eacute;n&eacute;rale&nbsp;: la langue est donn&eacute;e &agrave; l&rsquo;homme pour cacher ses pens&eacute;es&nbsp;! </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Il est possible &laquo;&nbsp;de conformer la r&eacute;alit&eacute; &agrave; l&rsquo;id&eacute;ologie&nbsp;&raquo;&nbsp;&agrave; l&rsquo;aide de la langue de bois par l&rsquo;interm&eacute;diaire de la dissimulation. La langue de bois est &eacute;difi&eacute;e sur le fondement d&rsquo;une <i>rationalit&eacute; pragmatique</i>&nbsp;: elle doit servir un certain but du pouvoir. L&rsquo;acte de dissimuler est plac&eacute; au centre de cette pragmatique qui vise l&rsquo;action efficace. Passons aux illustrations qui peuvent nous soutenir. &Eacute;coutons quelques fragments des deux discours de Hitler&nbsp;[Montefiore 2010, 82-83&nbsp;; 85].</span></span> <span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Analysons pas &agrave; pas ses paroles et confrontons-les avec la r&eacute;alit&eacute; d&eacute;j&agrave; bien connue. Soit la premi&egrave;re s&eacute;quence&nbsp;:</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span style="color:#222222">&laquo;&nbsp;Au cours de ces derni&egrave;res ann&eacute;es, j&rsquo;ai r&eacute;ellement men&eacute; une politique de paix bas&eacute;e sur des faits concrets. J&rsquo;ai abord&eacute; tous les probl&egrave;mes apparemment insolubles avec la ferme intention de les r&eacute;soudre de mani&egrave;re pacifique, m&ecirc;me lorsque les renonciations plus ou moins importantes consenties pour l&rsquo;Allemagne faisaient planer un danger sur notre pays&nbsp;&raquo;.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Les affirmations ci-dessus sont tout &agrave; fait choquantes pour le lecteur d&rsquo;aujourd&rsquo;hui&nbsp;: Hitler, l&rsquo;apologue de la paix&nbsp;! Or, on sait que sa politique, d&rsquo;un bout &agrave; l&rsquo;autre, a vis&eacute; la guerre. Ses gestes et ses actes pratiques indiquent une telle attitude belliqueuse. Les affirmations qu&rsquo;il est un &laquo;&nbsp;homme de la paix&nbsp;&raquo; et qu&rsquo;il a essay&eacute; de r&eacute;soudre &laquo;&nbsp;les probl&egrave;mes apparemment insolubles&nbsp;&raquo; d&rsquo;une &laquo;&nbsp;mani&egrave;re pacifiste&nbsp;&raquo;&nbsp;expriment un mensonge &laquo;&nbsp;plus grand que le si&egrave;cle&nbsp;&raquo;&nbsp;! Leur but&nbsp;: camoufler les vraies intentions de Hitler qui ont eu des cons&eacute;quences tragiques pour le monde entier. La derni&egrave;re affirmation exprime le cynisme du personnage&nbsp;: certaines concessions faites pour r&eacute;soudre ces &laquo;&nbsp;probl&egrave;mes apparemment insolubles&nbsp;&raquo; ont pour cons&eacute;quence &laquo;&nbsp;un danger sur notre pays&nbsp;&raquo;.&nbsp;Or, l&rsquo;Allemagne, au moins jusqu&rsquo;au d&eacute;clenchement de la guerre, a eu seulement des avantages par rapport &agrave; tous les autres pays. Une langue de bois qui dissimule les pens&eacute;es du dictateur. Quelques &laquo;&nbsp;mots-clich&eacute;s&nbsp;&raquo; articulent cette forme d&rsquo;une telle langue&nbsp;: &laquo;&nbsp;paix&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;faits concrets&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;probl&egrave;mes insolubles&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;renonciations&nbsp;&raquo;. La deuxi&egrave;me s&eacute;quence est encore plus illustrative&nbsp;:</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span style="color:#222222">&laquo;&nbsp;Le probl&egrave;me le plus ardu auquel j&rsquo;ai &eacute;t&eacute; confront&eacute; est la relation qui existe entre l&rsquo;Allemagne et la Pologne. Le sentiment d&rsquo;&ecirc;tre des &laquo;ennemis h&eacute;r&eacute;ditaires&raquo; mena&ccedil;ait de s&rsquo;emparer de notre peuple et du peuple polonais. Ce que j&rsquo;ai voulu &eacute;viter. Je sais parfaitement que je n&rsquo;aurais pas r&eacute;ussi si la Pologne &agrave; cette &eacute;poque avait eu une constitution d&eacute;mocratique car ces d&eacute;mocraties qui nous inondent de phrases vantant la paix sont les premi&egrave;res &agrave; faire la guerre, assoiff&eacute;es de sang&nbsp;&raquo;.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Elle d&eacute;voile une &laquo;&nbsp;id&eacute;e-fixe&nbsp;&raquo; de Hitler&nbsp;: le &laquo;&nbsp;probl&egrave;me polonais&nbsp;&raquo;. Il veut r&eacute;soudre ce probl&egrave;me d&rsquo;une &laquo;&nbsp;mani&egrave;re pacifiste&nbsp;&raquo;. Mais il ne peut pas &agrave; cause de la d&eacute;mocratie polonaise qui l&rsquo;emp&ecirc;che&nbsp;: &laquo;&nbsp;ces d&eacute;mocraties qui nous inondent de phrases vantant la paix sont les premi&egrave;res &agrave; faire la guerre, assoiff&eacute;es de sang&nbsp;&raquo;. Mais, on conna&icirc;t l&rsquo;attitude de Hitler par rapport &agrave; la Pologne&nbsp;: le 1<sup>er</sup> septembre 1939 Hitler attaque la Pologne et d&eacute;clenche la deuxi&egrave;me guerre&nbsp;! &Agrave; cette s&eacute;quence interviennent d&rsquo;autres formules&nbsp;: &laquo;&nbsp;ennemis h&eacute;r&eacute;ditaires&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;d&eacute;mocratie&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;paix&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;guerre&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;sang&nbsp;&raquo;. La troisi&egrave;me s&eacute;quence c&rsquo;est un d&eacute;fi du bon sens&nbsp;:</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span style="color:#222222">&laquo;&nbsp;Je remercie M. Chamberlain pour tous les efforts qu&rsquo;il a faits. Je lui ai assur&eacute; que le peuple allemand ne d&eacute;sire rien d&rsquo;autre que la paix mais je lui ai &eacute;galement dit que je ne peux pas reculer les limites de ma patience. Je lui ai &eacute;galement assur&eacute;, et je r&eacute;p&egrave;te en ces lieu et place, que, lorsque ce probl&egrave;me sera r&eacute;gl&eacute;, l&rsquo;Allemagne ne r&eacute;clamera pas d&rsquo;autre territoire en Europe&nbsp;&raquo;.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Il s&rsquo;agit de la r&eacute;gion sud&egrave;te et les cons&eacute;quences de l&rsquo;accord de Munich (le 30 septembre 1938). Hitler a tromp&eacute; les bonnes intentions de ses partenaires (Chamberlain et Daladier). L&rsquo;histoire a prouv&eacute; que ses promesses sont sans valeur&nbsp;: il a attaqu&eacute; et a occup&eacute; une bonne partie de la Pologne, a attaqu&eacute; la Russie, a d&eacute;clench&eacute; la guerre contre la France. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Le processus de dissimulation par l&rsquo;interm&eacute;diaire de la langue de bois <i>est pr&eacute;sent toujours et partout dans les confrontations politiques</i>, d&rsquo;une fa&ccedil;on infiniment visible entre les grands leaders. &Agrave; l&rsquo;exemple d&rsquo;Hitler on peut ajouter d&rsquo;autres aussi illustratifs&nbsp;: les discours de Staline, ceux de ses successeurs (Khrouchtchev et Brejnev), les discours de Ceausescu et de sa propagande (Roumanie), ceux de Castro (Cuba) ou de Mao (Chine). Dans tous les cas, les traces de la dissimulation sont faciles &agrave; identifier.</span></span></span></span></span></p> <h2 style="font-style:italic;"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">5. M&eacute;langer coupablement les preuves</span></span></b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">La langue de bois est une construction discursive qui<i> engage un arsenal de ressources</i> <i>d</i>&rsquo;<i>argumentation </i>capables de se manifester comme une int&eacute;gralit&eacute;. Elle r&eacute;clame une certaine <i>virtuosit&eacute; dans l</i>&rsquo;<i>utilisation des ressources d</i>&rsquo;<i>expression</i> qui peut valoriser au maximum l&rsquo;argumentation. Les leaders qui sont les b&eacute;n&eacute;ficiaires de telles habilet&eacute;s ont un atout puissant dans les confrontations avec les adversaires. Un seul exemple&nbsp;: la langue de bois des p&egrave;res du socialisme est fond&eacute;e sur des moyens d&rsquo;expression &eacute;clatants, incitants, flamboyants qui font leurs id&eacute;es vivantes et captivantes. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Du point de vue argumentatif, le support de la langue de bois c&rsquo;est <i>un composite d</i>&rsquo;<i>arguments r&eacute;els</i>,<i> arguments apparents et arguments faux</i> [Salavastru 2010, 111-123] en dosages diff&eacute;rents qui rendent impossible la distinction entre ce qui est vrai et ce qui est faux, ce qui est valide et ce qui n&rsquo;est pas. Or, forc&eacute;ment, c&rsquo;est le but d&rsquo;une langue de bois. Soit la s&eacute;quence&nbsp;:</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span style="color:#222222">&laquo;&nbsp;Notre&nbsp; &Eacute;tat est une dictature d&eacute;mocratique populaire... Quelles sont les fonctions de cette dictature&nbsp;? Sa premi&egrave;re fonction consiste &agrave; r&eacute;primer, &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur du pays, les classes et les groupes r&eacute;actionnaires... c&rsquo;est-&agrave;-dire celle de r&eacute;soudre les contradictions entre nous et l&rsquo;ennemi et les contradictions au sein du peuple... Quelques millions d&rsquo;intellectuels qui &eacute;taient autrefois au service de l&rsquo;ancienne soci&eacute;t&eacute; sont pass&eacute; maintenant &agrave; servir la nouvelle... La Chine a besoin du plus grand nombre possible d&rsquo;intellectuels pour mener &agrave; bien la tache gigantesque de la construction du socialisme... [...]. M&ecirc;me si beaucoup d&rsquo;intellectuels ont fait des progr&egrave;s, ils ne doivent pas en profiter pour se sentier remplis d&rsquo;autosatisfaction. Pour satisfaire pleinement les exigences de la nouvelle soci&eacute;t&eacute; et pour s&rsquo;unir &agrave; la classe ouvri&egrave;re et aux paysans, il faut qu&rsquo;ils continuent leur r&eacute;&eacute;ducation et qu&rsquo;ils abandonnent progressivement leur conception bourgeoise du monde pour adopter celle prol&eacute;taire, communiste... On a pu voir ces derniers temps une baisse dans le travail politique et id&eacute;ologique parmi les intellectuels... Pour affronter cette tendance il est absolument n&eacute;cessaire &agrave; l&rsquo;heure actuelle de renforcer notre travail id&eacute;ologique et politique... Ne pas avoir une orientation politique correcte c&rsquo;est comme ne pas avoir une &acirc;me.&nbsp;&raquo; [Mao Zedong, <i>Discours &agrave; la XI<sup>e</sup> session de la Conf&eacute;rence supr&ecirc;me de l</i>&rsquo;<i>&Eacute;tat</i>, P&eacute;kin, le 27 f&eacute;vrier 1957&nbsp;; dans&nbsp;: Williams 2014, 66-67].</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Nous sommes devant une langue de bois typique du r&eacute;gime totalitaire communiste qui contient tous les ingr&eacute;dients sp&eacute;cifiques pour reconna&icirc;tre le pouvoir et l&rsquo;individu qui est son porteur. Quelques formules discursives clich&eacute;es expriment les &laquo;&nbsp;marques ext&eacute;rieures&nbsp;&raquo; de cette langue&nbsp;: &laquo;&nbsp;classes r&eacute;actionnaires&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;ancienne soci&eacute;t&eacute;&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;nouvelle soci&eacute;t&eacute;&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;construction du socialisme&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;autosatisfaction&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;classe ouvri&egrave;re&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;r&eacute;&eacute;ducation&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;conception bourgeoise&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;travail politique et id&eacute;ologique&nbsp;&raquo;. Analysons ses arguments. L&rsquo;affirmation &laquo;&nbsp;Notre &Eacute;tat est une dictature d&eacute;mocratique populaire&nbsp;&raquo; est porteuse d&rsquo;un <i>argument faux</i>. Elle exprime une <i>contradiction dans les termes</i> qui ne peuvent jamais g&eacute;n&eacute;rer une proposition vraie&nbsp;! En t&ecirc;te de la langue de bois du &laquo;&nbsp;grand timonier&nbsp;&raquo; c&rsquo;est possible&nbsp;! Ce qui est plus bizarre pour une rationalit&eacute; normale, c&rsquo;est le fait que, par une <i>r&eacute;p&eacute;tition obsessionnelle</i>, cette affirmation paradoxale finit par faire carri&egrave;re comme une v&eacute;rit&eacute; incontestable. Pour cela, le syntagme circule sans probl&egrave;mes dans la plupart des documents officiels et des discours des leaders politiques du r&eacute;gime. L&rsquo;&eacute;nonce &laquo;&nbsp;La fonction premi&egrave;re de cette dictature consiste &agrave; r&eacute;primer les classes et les groupes r&eacute;actionnaires&nbsp;&raquo; met en circulation un <i>argument r&eacute;el</i>. Vraiment, tous les r&eacute;gimes communistes ont assum&eacute; pour but essentiel la r&eacute;pression des adversaires politiques. Un autre <i>argument r&eacute;el</i> est contenu dans l&rsquo;affirmation&nbsp;: &laquo;&nbsp;La Chine a besoin du plus grand nombre possible d&rsquo;intellectuels pour mener &agrave; bien la tache gigantesque de la construction du socialisme&nbsp;&raquo;. C&rsquo;est une banalit&eacute;&nbsp;! Mais, la phrase&nbsp;: &laquo;&nbsp;Pour affronter cette tendance il est absolument n&eacute;cessaire &agrave; l&rsquo;heure actuelle de renforcer notre travail id&eacute;ologique et politique&nbsp;&raquo; illustre un <i>argument apparent&nbsp;</i>: il n&rsquo;y a pas un lien direct de conditionnement entre le travail id&eacute;ologique et la persistance des conceptions bourgeoises&nbsp;! La langue de bois dit qu&rsquo;un tel conditionnement existe&nbsp;!</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Ce m&eacute;lange coupable entre les arguments r&eacute;els, les arguments apparents et les arguments faux<i> constitue une dominante de la langue de bois</i>. Hitler exprime un argument r&eacute;el lorsqu&rsquo;il affirme que l&rsquo;Allemagne a souffert d&rsquo;une injustice &agrave; la fin de la guerre lors du trait&eacute; de Versailles, mais il passe dans l&rsquo;espace d&rsquo;un argument faux lorsqu&rsquo;il affirme que la Pologne a attaqu&eacute; l&rsquo;Allemagne au 1<sup>er</sup> septembre 1939. &Eacute;galement, il est le porteur d&rsquo;un argument apparent lorsqu&rsquo;il justifie l&rsquo;impossibilit&eacute; d&rsquo;un accord avec la Pologne en invoquant... la d&eacute;mocratie polonaise&nbsp;! Marx est en possession d&rsquo;un argument r&eacute;el dans son raisonnement concentr&eacute; dans la formule&nbsp;: &laquo;&nbsp;Travailleurs de tous les pays, unissez-vous&nbsp;!&nbsp;&raquo;&nbsp;: (p<sub>1</sub>)&nbsp;: Si les forces politiques sont unies, alors le succ&egrave;s est facile &agrave; obtenir&nbsp;; (p<sub>2</sub>)&nbsp;: Les travailleurs doivent s&rsquo;unifier&nbsp;; donc&nbsp;: (c) : Les travailleurs vont obtenir le succ&egrave;s dans leur lutte politique. Mais le m&ecirc;me philosophe utilise un argument apparent lorsqu&rsquo;il met en circulation la formule&nbsp;: &laquo;&nbsp;La religion est l&rsquo;opium du peuple&nbsp;&raquo; et un argument faux dans l&rsquo;affirmation&nbsp;: &laquo;&nbsp;L&rsquo;histoire de toute soci&eacute;t&eacute; jusqu&rsquo;&agrave; nos jours n&rsquo;a &eacute;t&eacute; que l&rsquo;histoire de la lutte de classe&nbsp;&raquo;. </span></span></span></span></span></p> <h2 style="font-style:italic;"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; <b>6. Combiner d&rsquo;une fa&ccedil;on int&eacute;ress&eacute;e les techniques&nbsp; </b></span></span></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:#222222">Quant aux techniques d&rsquo;argumentation, on constate, &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur d&rsquo;une langue de bois, une vraie <i>complicit&eacute; d</i>&rsquo;<i>int&eacute;r&ecirc;t entre les techniques valides et les techniques sophistiques</i>. &Agrave; ce cas, la confusion entre ce qui est valide et ce qui ne l&rsquo;est pas est facilit&eacute; par une certaine ressemblance entre les deux instances du raisonnement. En ce cas, l&rsquo;esprit commun n&rsquo;est pas capable de faire la diff&eacute;rence et assume ce qui n&rsquo;est pas valide comme valide. C&rsquo;est un probl&egrave;me de sp&eacute;cialiste&nbsp;! Voil&agrave; ci-dessous un d&eacute;coupage significatif :</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;Un roi d&eacute;tr&ocirc;n&eacute;, dans la r&eacute;publique, n&rsquo;est bon qu&rsquo;&agrave; deux usages : ou &agrave; troubler la tranquillit&eacute; de l&rsquo;&eacute;tat et &agrave; &eacute;branler la libert&eacute; ; ou &agrave; affermir l&rsquo;une et l&rsquo;autre. [...]. Donc, pr&eacute;senter &agrave; l&rsquo;univers son crime, comme un probl&egrave;me ; sa cause, comme l&rsquo;objet de la discussion la plus imposante [...] mettre une distance incommensurable, entre le seul souvenir de ce qu&rsquo;il f&ucirc;t, et la dignit&eacute; d&rsquo;un citoyen ; [...]. Louis a &eacute;t&eacute; d&eacute;tr&ocirc;n&eacute; par ses crimes; Louis d&eacute;non&ccedil;oit le peuple fran&ccedil;ais, comme rebelle ; il a appel&eacute;, pour le ch&acirc;tier, les arm&eacute;es des tyrans, ses confr&egrave;res; la victoire et le peuple ont d&eacute;cid&eacute; que lui seul &eacute;toit rebelle; Louis ne peut donc &ecirc;tre jug&eacute;; il est d&eacute;j&agrave; jug&eacute;. Il est condamn&eacute;...&nbsp;&raquo; [Maximilien Robespierre, <i>Sur le jugement de Louis XVI</i>, dans&nbsp;: Robespierre 1958, 121].</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">La s&eacute;quence concentre en elle-m&ecirc;me ce que dit tout discours&nbsp;: &laquo;&nbsp;Le roi doit &ecirc;tre condamn&eacute; sans &ecirc;tre jug&eacute;&nbsp;&raquo;. La soutenance de cette th&egrave;se est justifi&eacute;e &agrave; l&rsquo;aide des arguments ci-dessous&nbsp;:</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">(a<sub>1</sub>)&nbsp;: Louis XVI est un roi d&eacute;tr&ocirc;n&eacute;&nbsp;;</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">(a<sub>2</sub>)&nbsp;: Il peut &laquo;&nbsp;troubler la tranquillit&eacute; de l&rsquo;&eacute;tat&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;&eacute;branler la libert&eacute;&nbsp;&raquo;&nbsp;;</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">(a<sub>3</sub>)&nbsp;: Pr&eacute;senter ses crimes c&rsquo;est un attentat &agrave; la dignit&eacute; d&rsquo;un citoyen&nbsp;;</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">(a<sub>4</sub>)&nbsp;: Louis a d&eacute;nonc&eacute; le peuple comme rebelle&nbsp;;</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">(a<sub>5</sub>)&nbsp;: &laquo;&nbsp;il a appel&eacute;s arm&eacute;es des tyrans contre le peuple&nbsp;&raquo;&nbsp;;</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">(a<sub>6</sub>)&nbsp;: &laquo;&nbsp;la victoire et le peuple ont d&eacute;cid&eacute; que lui seul &eacute;tait rebelle&nbsp;&raquo;.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Une analyse de ces moyens de preuve montre qu&rsquo;aucun d&rsquo;eux n&rsquo;est en mesure de soutenir la th&egrave;se&nbsp;: (a<sub>1</sub>) est une preuve vraie qui n&rsquo;a pas un lien de conditionnement avec la th&egrave;se&nbsp;; (a<sub>2</sub>) indique une ambigu&iuml;t&eacute; al&eacute;thique et de conditionnement&nbsp;; (a<sub>3</sub>) exprime plut&ocirc;t un clich&eacute; de la r&eacute;volution sans valeur argumentative&nbsp;; (a<sub>4</sub>) et (a<sub>5</sub>) sont des arguments r&eacute;els mais pour la punition du roi par l&rsquo;interm&eacute;diaire d&rsquo;un jugement&nbsp;; enfin, (a<sub>6</sub>) exprime une opinion qui est domin&eacute;e par la&nbsp; &nbsp;subjectivit&eacute;. En ce cas, une question revient d&rsquo;une fa&ccedil;on pressante&nbsp;: pourquoi Robespierre utilise-il ces moyens de preuve&nbsp;?&nbsp; La r&eacute;ponse est simple&nbsp;: pour minimaliser, pour disqualifier, pour discr&eacute;diter la position du roi&nbsp;! Un homme discr&eacute;dit&eacute;, fusse-t-il m&ecirc;me roi, est infiniment plus vuln&eacute;rable&nbsp;!</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Cette technique est porteuse d&rsquo;une argumentation sophistique qui s&rsquo;appelle le <i>sophisme de la caricature</i> ou le <i>sophisme de la repr&eacute;sentation fausse</i>. Parfois, pour &ecirc;tre plus suggestifs, certains auteurs l&rsquo;ont nomm&eacute; le <i>sophisme de l</i>&rsquo;<i>homme de paille </i>(&laquo;&nbsp;straw man&nbsp;&raquo;, en anglais) [Bouquiaux et Leclercq 2009, 134]. Les combattants politiques recourent souvent &agrave; de telles armes dures pour d&eacute;truire leurs adversaires. Christopher W. Tindale place cette technique dans la classe des <i>sophismes de la diversion </i>(&laquo;&nbsp;fallacies of diversion&nbsp;&raquo;) [Tindale 2007, 19-28], ce qui convient d&rsquo;une fa&ccedil;on excellente aux intentions manipulatrices d&rsquo;une langue de bois.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:21.3pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">De plus, on peut remarquer que l&rsquo;argument (a<sub>6</sub>) contient en lui-m&ecirc;me un sophisme bien connu&nbsp;: <i>ad populum</i>. Pour justifier que le roi doit &ecirc;tre puni sans &ecirc;tre jug&eacute;, Robespierre vient avec un argument impossible pour l&rsquo;esprit logique&nbsp;: le peuple l&rsquo;a d&eacute;j&agrave; condamn&eacute;&nbsp;! La premi&egrave;re question&nbsp;: qui a d&eacute;termin&eacute; l&rsquo;opinion du peuple&nbsp;? La deuxi&egrave;me&nbsp;: qui peut appr&eacute;cier que cette opinion soit correcte&nbsp;? Au niveau du populisme et de la d&eacute;magogie&nbsp; du pouvoir totalitaire, une telle technique est rencontr&eacute;e &agrave; chaque pas et, souvent, son influence est d&eacute;cisive. </span></span><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Certains auteurs ont remarqu&eacute; que &laquo;&nbsp;c&rsquo;est l&rsquo;instrument assum&eacute; par tout d&eacute;magogue ou propagandiste lorsqu&rsquo;ils essaient de mobiliser le sentiment public&nbsp;&raquo; [Copi et Cohen et McMahon 2014, 112]. Fond&eacute;e sur &laquo;&nbsp;les &eacute;motions et l&rsquo;enthousiasme de la foule&nbsp;&raquo;, cette technique a une illustration parfaite&nbsp;: Adolf Hitler [Hurley 2015, 112]. </span></span><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">En g&eacute;n&eacute;ral, elle est vue plusieurs fois comme une expression de la commodit&eacute; quotidienne de l&rsquo;homme [Salavastru 2011, 239-240].</span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Une deuxi&egrave;me illustration est extraite de la pens&eacute;e des p&egrave;res du socialisme. &Eacute;coutons le fragment ci-dessous&nbsp;:</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;[...] les moyens de production et d&rsquo;&eacute;change servant de base &agrave; l&rsquo;&eacute;volution bourgeoise furent cr&eacute;&eacute;s dans le sein de la soci&eacute;t&eacute; f&eacute;odale. &Agrave; un certain degr&eacute; du d&eacute;veloppement de ces moyens de production et d&rsquo;&eacute;change, les conditions dans lesquelles la soci&eacute;t&eacute; f&eacute;odale produisait et &eacute;changeait ses produits [...] cess&egrave;rent de correspondre aux nouvelles forces productives. Ils entravaient la production au lieu de la d&eacute;velopper. Ils se transform&egrave;rent en autant de cha&icirc;nes. Il fallait briser ces cha&icirc;nes. On les brisa. &Agrave; la place s&rsquo;&eacute;leva la libre concurrence [...] avec la domination &eacute;conomique et politique de la classe bourgeoise. Sous nos yeux il se produit un ph&eacute;nom&egrave;ne analogue. La soci&eacute;t&eacute; bourgeoise moderne, qui a mis en mouvement de si puissants moyens de production et d&rsquo;&eacute;change, ressemble au magicien qui ne sait plus dominer les puissances infernales qu&rsquo;il a &eacute;voqu&eacute;es. Depuis trente ans au moins, l&rsquo;histoire de l&rsquo;industrie et du commerce n&rsquo;est que l&rsquo;histoire de la r&eacute;volte des forces productives contre les rapports de propri&eacute;t&eacute; [...]. Il suffit de mentionner les crises commerciales qui, par leur retour p&eacute;riodique, mettent de plus en plus en question l&rsquo;existence de la soci&eacute;t&eacute; bourgeoise. [...]. Et pourquoi ? Parce que la soci&eacute;t&eacute; a trop de civilisation, trop de moyens de subsistance, trop d&rsquo;industrie, trop de commerce. Les forces productives dont elle dispose ne favorisent plus le d&eacute;veloppement des conditions de la propri&eacute;t&eacute; bourgeoise&nbsp;; au contraire, elles sont devenues trop puissantes pour ces conditions qui se tournent en entraves&nbsp;; et toutes les fois que les forces productives sociales s&rsquo;affranchissent de ces entraves, elles pr&eacute;cipitent dans le d&eacute;sordre la soci&eacute;t&eacute; tout enti&egrave;re et menacent l&rsquo;existence de la propri&eacute;t&eacute; bourgeoise. Le syst&egrave;me bourgeois est devenu trop &eacute;troit pour contenir les richesses cr&eacute;&eacute;es dans son sein.&nbsp;&raquo; [Marx et Engels 1983, 34-35].</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Les auteurs soutiennent la th&egrave;se&nbsp;: &laquo;&nbsp;La soci&eacute;t&eacute; capitaliste va &ecirc;tre remplac&eacute;e par la soci&eacute;t&eacute; socialiste&nbsp;&raquo;. La justification de la th&egrave;se est la suivante&nbsp;: &laquo;&nbsp;La soci&eacute;t&eacute; capitaliste a remplac&eacute;e elle-m&ecirc;me la soci&eacute;t&eacute; f&eacute;odale&nbsp;&raquo;. La raison de cette justification&nbsp;est concr&eacute;tis&eacute;e dans certaines similitudes entre le d&eacute;veloppement interne du f&eacute;odalisme et du capitalisme. Par cons&eacute;quent, s&rsquo;il y a des similitudes entre les deux soci&eacute;t&eacute;s, alors leurs cons&eacute;quences devraient &ecirc;tre ressemblantes. On peut d&eacute;couvrir une argumentation <i>fond&eacute;e sur l</i>&rsquo;<i>analogie</i>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Mais m&ecirc;me le bon sens peut identifier quelques asp&eacute;rit&eacute;s d&rsquo;ordre rationnel dans l&rsquo;utilisation de cette technique. La premi&egrave;re&nbsp;: malgr&eacute; ces similitudes, les deux soci&eacute;t&eacute;s ont des <i>diff&eacute;rences de nature</i> qui sont &eacute;lud&eacute;es. La deuxi&egrave;me&nbsp;: les aspects similaires <i>ne sont pas essentiels</i> comme r&eacute;clame la correction de cette technique. La troisi&egrave;me&nbsp;: il y a un <i>doute g&eacute;n&eacute;ral</i> en ce qui concerne le bon fonctionnement de l&rsquo;analogie &agrave; l&rsquo;aune de l&rsquo;escalier de l&rsquo;histoire. Des raisons suffisantes pour conclure que l&rsquo;argumentation est sophistique&nbsp;: elle contient un <i>sophisme de la fausse analogie</i>. Normalement, la parution d&rsquo;un tel sophisme est li&eacute;e &agrave; l&rsquo;incapacit&eacute; de satisfaire certaine exigences d&rsquo;une bonne analogie [Johnson 2007, 258]. D&rsquo;ailleurs, le temps a infirm&eacute; ces pr&eacute;dictions et a prouv&eacute; que le socialisme n&rsquo;a &eacute;t&eacute; qu&rsquo;un moment &eacute;pisodique et tragique de l&rsquo;escalier de l&rsquo;histoire du monde.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Nous ne voulons pas augmenter les illustrations bien qu&rsquo;elles peuvent &ecirc;tre trouv&eacute;es d&rsquo;abondance. On veut souligner que ces techniques sophistiques actionnent en combinaison avec celles valides (aucun discours ne peut pas &ecirc;tre fond&eacute; seulement sur les sophismes) en pond&eacute;rations diff&eacute;rentes, toujours fluctuantes, en fonction d&rsquo;intention, d&rsquo;auditoire, du contexte.</span></span></span></span></p> <h2 style="font-style:italic;"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span new="" roman="" style="font-family:" times="">7. Un court bilan</span></b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:14.2pt; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">La langue de bois, notre &laquo;&nbsp;&eacute;tude de cas&nbsp;&raquo; &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur du rapport entre le pouvoir et le langage, d&eacute;voile, au moins par ces quelques s&eacute;quences discursives, cette &laquo;&nbsp;accommodation&nbsp;&raquo; permanente du langage aux besoins, aux int&eacute;r&ecirc;ts, aux aspirations du pouvoir. Bernard Henri-L&eacute;vi a insist&eacute; sur cette relation tout &agrave; fait sp&eacute;ciale&nbsp;:</span></span></span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;Il y a un rapport manifeste entre la forme du pouvoir et la figure de la langue, entre les d&eacute;crets du Prince et le trope de la phrase. A-t-on jamais fait l&rsquo;analyse de tout ce que le latin de Cic&eacute;ron devait &agrave; ces grandes man&oelig;uvres de pouvoir qui furent les batailles romaines&nbsp;? [...]. Le discours n&rsquo;est peut-&ecirc;tre pas, comme le voulait Aristote, ce lieu neutre et pacifi&eacute; o&ugrave; se disent les affrontements&nbsp;[...]. Il est bel et bien <i>du </i>pouvoir, <i>la forme m&ecirc;me </i>du pouvoir, tout <i>p&eacute;tri du pouvoir</i> jusque dans les formes les plus discr&egrave;tes des tours de sa rh&eacute;torique&nbsp;&raquo; [L&eacute;vy 1977, 48-49].</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Le pouvoir est-il int&eacute;ress&eacute; de camoufler ses intentions r&eacute;elles&nbsp;? La dissimulation par l&rsquo;interm&eacute;diaire du discours est &agrave; sa disposition&nbsp;! D&eacute;sire-il tromper le r&eacute;cepteur en ce qui concerne le fondement de ses affirmations&nbsp;? Une combinaison des arguments r&eacute;els et apparents, des techniques valides et sophistiques sont &agrave; utiliser. Parfois ces artifices de pens&eacute;e et de langage ne peuvent pas r&eacute;ussir. Mais, plusieurs fois, ils arrivent facilement &agrave; leur but. C&rsquo;est le triomphe de la langue de bois. </span></span></span></span></p> <p align="center" style="text-align:center; text-indent:21.3pt"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:#222222">Bibliographie</span></span></b></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">BOUQUIAUX, Laurence et LECLERCQ, Bruno. (2009). <i>Logique formelle et argumentation</i>. Bruxelles : De Boeck.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">COPI, Irving M. et COHEN, Carl et McMAHON, Kenneth, <i>Introduction to Logic</i>. Fourteenth Edition. Edinburgh : Pearson Education Limited.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">DAHL, Robert A. (1957). The Concept of Power. <span style="background:white"><span style="color:#222222">Systems Research and Behavioral Science. </span></span></span></span><span style="font-size:9.0pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:#222222">2(3), 201-215.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:#222222">DELPORTE, Christian. (2011). <i>Une histoire de la langue de bois</i>. Paris : Flammarion.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span style="color:#222222">DELPORTE, Christian (pr&eacute;sent&eacute;s par). (2012). <i>Les grands d&eacute;bats politiques. Ces &eacute;missions qui ont fait l</i>&rsquo;<i>opinion</i>. Paris&nbsp;: Champs Classiques, Flammarion et Ina &Eacute;ditions.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:#222222">HURLEY, Patrick J. (2015). <i>A Concise Introduction to Logic</i>. Twelfth Edition. Australia, Brazil, ... : Cengage Learning.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:#222222">JOHNSON, Robert M. (2007). <i>A Logic Book. Fundamentals of Reasoning. </i>Fifth Edition. </span></span></span></span><span style="font-size:9.0pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:#222222">Australia, Brazil, ... : Thomson, Wadsworth.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">L</span></span><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&Eacute;</span></span><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">VI, Bernard-Henri. (1977). <i>La barbarie &agrave; visage humain</i>. Paris&nbsp;: Grasset.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">MARX, Karl et&nbsp; ENGELS, Friedrich. (1983). <i>Manifeste du Parti communiste</i>. Paris&nbsp;: &Eacute;ditions Champ Libre.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span style="color:#222222">MONTEFIORE, Simon Sebag (pr&eacute;sentation de). (2010). <i>Ces grands discours qui ont chang&eacute; le monde. De J&eacute;sus &agrave; Obama</i>. Paris&nbsp;: Dunod.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">ROBESPIERRE, Maximilien. (1958).<i> &OElig;uvres</i>. Tome IX. <i>Discours</i>. Paris&nbsp;: PUF.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">SALAVASTRU, Constantin. (2004). <i>Rh&eacute;torique et politique</i>. <i>Le pouvoir du discours et le discours du pouvoir</i>. Paris&nbsp;: L&rsquo;Harmattan.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">SALAVASTRU, Constantin. (2010). <i>Petit trait&eacute; d</i>&rsquo;<i>art oratoire </i>(en roumain). 2<sup>e</sup> &eacute;dition. Iassy&nbsp;: &Eacute;ditions de l&rsquo;Universit&eacute; &ldquo;Al.I.Cuza&ldquo;.</span></span></span></span></span><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:115%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">SALAVASTRU, Constantin. (2011). <i>Argumentation et d&eacute;bats publics</i>. Paris&nbsp;: PUF.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">TINDALE, Christopher W. (2007). <i>Fallacies and Argument Appraisal</i>. Cambridge, New York, Melbourne,... : Cambridge University Press.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">TOCQUEVILLE, Alexis de. </span></span><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">(1981). <i>De la d&eacute;mocratie en Am&eacute;rique</i>, I. Paris&nbsp;: Garnier-Flammarion.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">WEBER, Max. (1995). <i>Economie et soci&eacute;t&eacute;</i>. 1. Paris&nbsp;: Pocket.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:14px"><span style="font-size:12pt"><span style="background:white"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:#222222">WILLIAMS, Hywel, (2009).<i> Ces discours qui ont chang&eacute; le monde moderne</i>. Novarra (Italie)&nbsp;: &Eacute;ditions White Star.</span></span></span></span></span></span></span></p>