<p align="center" style="text-align:center; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><b><i><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Les ann&eacute;es insulaires </span></span></i></b><b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">de Philippe Le Guilloux et <i>La Carte et le Territoire</i> de Michel Houellebecq&nbsp;: &nbsp;une &eacute;criture du vacillement des normes &eacute;thiques dans l&rsquo;art contemporain</span></span></b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&nbsp;<b> </b></span></span></span></span></span></p> <p><em>Kouakou Marcel Diby est docteur &egrave;s lettres et assistant &agrave; l&#39;universit&eacute; Peleforo Gon Coulibaly &agrave; Korkhogo en C&ocirc;te d&#39;Ivoire&nbsp;&nbsp;</em></p> <p>&nbsp;</p> <h2 style="text-align: justify; margin-bottom: 11px;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Introduction</span></span></b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Au nom des principes d&rsquo;&eacute;volution, de d&eacute;veloppement, d&rsquo;ouverture des m&oelig;urs et des esprits, les structures soci&eacute;tales contemporaines se sont fonci&egrave;rement d&eacute;natur&eacute;es, au point de mettre &agrave; mal de traditionnels &eacute;quilibres. Dans le domaine de l&rsquo;art, par exemple, de nouvelles dispositions validant une esth&eacute;tisation du monde induisent la mise en place d&rsquo;un v&eacute;ritable march&eacute; r&eacute;gie par des principes capitalistes. &nbsp;L&rsquo;art, tel que pratiqu&eacute; aujourd&rsquo;hui, s&rsquo;organise autour de toute une institutionnalisation dans laquelle s&rsquo;int&egrave;grent des figures interm&eacute;diaires comme&nbsp;: le galeriste, les commissaires d&rsquo;exposition, les instances mus&eacute;ales, les attach&eacute;s de presse, etc&hellip; Si tous ces acteurs pr&eacute;cit&eacute;s participent au bouleversement et au d&eacute;veloppement des domaines de l&rsquo;art, il se cr&eacute;e l&rsquo;&eacute;mergence et la l&eacute;gitimation d&rsquo;une mani&egrave;re particuli&egrave;re de pratiquer l&rsquo;art qui rompt avec les amarres et usages du pass&eacute;. Les politiques de l&rsquo;art se red&eacute;finissent au contact du politique, ce qui am&egrave;ne &agrave; questionner la valeur actuelle des normes &eacute;thiques traditionnelles qui ont, de tout temps, r&eacute;gi le domaine de l&rsquo;art. Si des penseurs comme Gilles Deleuze (2002) ont pu lire, dans l&rsquo;&oelig;uvre de grands artistes comme Francis Bacon, les lin&eacute;aments d&rsquo;une logique de la sensation propre &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art, aujourd&rsquo;hui, en investissant les domaines du politique et du mercantilisme &eacute;conomique, l&rsquo;art se d&eacute;tache de cette logique normative traditionnelle pour embrasser les id&eacute;aux d&rsquo;une esth&eacute;tisation &laquo;&nbsp;anormative&nbsp;&raquo; du monde. La pens&eacute;e capitaliste inscrit d&eacute;sormais l&rsquo;art dans un r&eacute;gime de type entrepreneurial dans lequel les productions artistiques s&rsquo;allient aux logiques &eacute;conomiques. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Les fictions litt&eacute;raires contemporaines font l&rsquo;effort de traduire, par le truchement de divers dispositifs d&rsquo;&eacute;criture, ces transmutations sp&eacute;cifiques &agrave; l&rsquo;image et &agrave; l&rsquo;imaginaire artistique. L&rsquo;activit&eacute; artistique, par sa transposition au sein de l&rsquo;univers fictionnel, se pose comme le lieu d&rsquo;un questionnement de la notion de normes &eacute;thique et du devenir artistique. La norme du d&eacute;veloppement implique une rupture d&rsquo;avec des pratiques culturelles pass&eacute;es. Cette norme, pass&eacute;e sous le regard critique du romancier, dans le cas des pratiques mercantilistes et politiques inh&eacute;rentes &agrave; l&rsquo;art contemporain, permet d&rsquo;interroger les inconv&eacute;nients d&rsquo;un progr&egrave;s d&eacute;cadent. Si tout l&rsquo;art r&eacute;side dans le fait de desserrer les valves de la sensation (Deleuze cite par Heyvaerts</span></span>, 2016)<span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">, la norme de la gadgetisation et de la standardisation d&eacute;velopp&eacute;e dans les pratiques artistiques sont de nature &agrave; d&eacute;sacraliser l&rsquo;objet d&rsquo;art. &Agrave; cette allure, pourrions-nous avoir des &oelig;uvres d&rsquo;art de la qualit&eacute; d&rsquo;une <i>Joconde</i> comme h&eacute;ritage d&rsquo;un capital culturel et artistique pour les g&eacute;n&eacute;rations futures ? &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Ainsi, en investissant le domaine de l&rsquo;art par le prisme de la fiction litt&eacute;raire, l&rsquo;&eacute;criture met en place un discours th&eacute;orique ax&eacute; sur les normes cens&eacute;es r&eacute;gir les domaines de l&rsquo;art contemporain. Au-del&agrave; de cette exposition, se lit une analyse re&eacute;valuative de ces nouvelles normes. Aujourd&rsquo;hui, les puissances financi&egrave;res, au d&eacute;triment d&rsquo;un r&eacute;el &eacute;panouissement de l&rsquo;artiste et de son art, au nom d&rsquo;une logique marchande mercantiliste, mettent en place de nouvelles normes qui d&eacute;truisent les &eacute;ternelles normes harmonieuses. Si les nouvelles normes de l&rsquo;art font de l&#39;objet d&#39;art un accessoire de riche, pr&eacute;texte d&#39;exposition d&#39;une puissance financi&egrave;re, cette nouvelle donne se doit d&rsquo;&ecirc;tre r&eacute;gie par des principes &eacute;thiques m&eacute;lioratifs. Ce qui ne semble pas &ecirc;tre le cas vu que la logique marchande port&eacute;e par la recherche du gain inscrit l&#39;objet d&#39;art dans le sillage des objets susceptibles d&#39;&ecirc;tre frapp&eacute;s d&rsquo;obsolescence programm&eacute;e. Ainsi, la vis&eacute;e de ce texte s&#39;inscrit dans le sens d&#39;un d&eacute;veloppement harmonieux et durable, &agrave; la fois &eacute;conomique et artistique du domaine de l&#39;art contemporain.&nbsp; En effet, selon l&rsquo;hypoth&egrave;se de base formul&eacute;e, Houellebecq et Le Guillou, lorsqu&rsquo;ils proposent, &agrave; travers une exp&eacute;rience immersive, une exposition panoramique de la vorace r&eacute;alit&eacute; du monde de l&rsquo;art contemporain, de la solitude et l&rsquo;inefficacit&eacute; de l&rsquo;artiste face &agrave; la force destructrice de l&rsquo;argent et des politiques, c&#39;est justement pour proposer une r&eacute;habilitation du domaine de l&#39;art contemporain. En pratique, on se chargera de lire, dans le d&eacute;veloppement de ce travail qui prend pour corpus <i>La carte et le territoire</i> et <i>Les ann&eacute;es insulaires, </i>les dispositifs et modalit&eacute; de r&eacute;alisation d&rsquo;une &eacute;criture du vacillement des normes &eacute;thiques inh&eacute;rentes de l&rsquo;activit&eacute; artistico-culturelle contemporaine. </span></span></span></span></span></p> <h2 style="text-align: justify; text-indent: -14.2pt; margin-bottom: 11px; margin-left: 48px;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">1. </span></span></b><b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">La tradition du portrait&nbsp;: pr&eacute;texte d&rsquo;une immersion dans le monde l&rsquo;art&nbsp; &nbsp;</span></span></b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Michel Houellebecq et Philippe Le Guillou s&rsquo;inscrivent dans le sillage de ces auteurs qui revitalisent la litt&eacute;rature en l&rsquo;ouvrant aux factuels artistique, politique, philosophique et sociologique. Ces deux romanciers sont &agrave; l&rsquo;origine des proses qui font une immersion, avec une douceur et une po&eacute;sie, un go&ucirc;t des mots et de belles &oelig;uvres, dans l&rsquo;histoire de l&rsquo;art et des politiques artistiques contemporaines. Ils assument une &eacute;rudition et un classicisme, tout en figurant un monde de la politique, de la cr&eacute;ation et de l&rsquo;art dans ses manifestations pr&eacute;gnantes et modernes. La posture &eacute;pist&eacute;mologique adopt&eacute;e dans le cadre de ces fictions permet de lire un mouvement plus ample qui m&egrave;ne les Sciences humaines &agrave; venir chercher dans l&rsquo;histoire des id&eacute;es politiques et artistiques une source &agrave; leur propre &laquo; revitalisation &raquo;, et qui en retour permet &agrave; celle-ci d&rsquo;&eacute;tendre &laquo; ses fronti&egrave;res en cr&eacute;ant de nouveaux domaines &raquo; (N. Arambasin, 2007, p. 45) en litt&eacute;rature. Ainsi, au spectacle distant d&rsquo;une soci&eacute;t&eacute; en repr&eacute;sentation, les textes de Houellebecq et Le Guillou opposent une multitude de v&eacute;cus saisis &agrave; vif dans l&rsquo;art, imm&eacute;diat, d&eacute;routant, qui engage la r&eacute;alit&eacute; tout enti&egrave;re dans ses formes et normes positives et n&eacute;gatives. C&rsquo;est donc &agrave; partir de ce paradigme que ces deux textes retranscrivent l&rsquo;ic&ocirc;ne picturale et artistique pour atteindre une efficacit&eacute; symbolique perdue par l&rsquo;art, et ce, au sein de la fiction romanesque. On y lit valablement la mise en sc&egrave;ne d&rsquo;une hyperconsommation esth&eacute;tis&eacute;e qui transparait par le truchement de divers dispositifs scripturaires et transm&eacute;diatiques.&nbsp; </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Dans l&rsquo;&eacute;criture &eacute;labor&eacute;e par Houellebecq comme celle &eacute;labor&eacute;e par Le Guillou, l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art est envisag&eacute;e sous son angle technique, avec une contamination de la narration par un lexique sp&eacute;cialis&eacute;. Consid&eacute;r&eacute; en tant que &laquo; fabrique &raquo; du r&eacute;cit, il intervient comme une mod&eacute;lisation de l&rsquo;appr&eacute;hension et du traitement de la mati&egrave;re artistique narrative, comme un sch&egrave;me structurel de mise en relation, d&rsquo;immersion de deux domaines repr&eacute;sentationnels diff&eacute;rents. En effet, en faisant usage des proc&eacute;d&eacute;s de l&rsquo;inter (l&rsquo;interpicturalit&eacute;, la transpicturalit&eacute;&hellip;)<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" style="color:#0563c1; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:106%"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">[1]</span></span></span></span></span></a> pour traiter de la question des portraits dans l&rsquo;art contemporain, l&rsquo;&eacute;crivain fait de son texte le lieu d&rsquo;une d&eacute;couverte de la r&eacute;alit&eacute; de ce genre &agrave; notre &eacute;poque. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Nos deux auteurs transposent, dans une op&eacute;ration de change, des savoirs et un savoir-faire emprunt&eacute; aux artistes dans le cadre de leurs narrations factuelles : &laquo; Transposer une &oelig;uvre d&rsquo;art en un texte verbal revient &agrave; en reconstituer le sens en cr&eacute;ant un signe qui s&rsquo;inspire des codes et des conventions d&rsquo;un syst&egrave;me litt&eacute;raire (et pas seulement linguistique) &eacute;quivalent au syst&egrave;me artistique qui fonctionne en peinture. &raquo;. Le mode citationnel peut dans certains cas s&rsquo;approfondir en exercice de style o&ugrave; l&rsquo;&eacute;crivain se livre &agrave; un jeu stylistique avec l&rsquo;influence iconique qu&rsquo;il essaie de mimer dans une moindre mesure. Il s&rsquo;agit concr&egrave;tement d&rsquo;adopter le vocabulaire, le style et le ton sp&eacute;cifique &agrave; l&rsquo;art des images, et ce, en vue de corroborer un mim&eacute;tisme formel et stylistique. Dans le cas de notre texte, ce dispositif de traitement de la chose artistique se cristallise dans la description ekphrastique. &Agrave; ce propos, selon Sylvie Thorel-Cailleteau, la description en g&eacute;n&eacute;ral, mais plus particuli&egrave;rement la description d&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art constitue &laquo; un lieu privil&eacute;gi&eacute; de l&rsquo;exposition des savoirs &raquo; (S. Thorel-Cailleteau, 2011, p. 27). La description d&eacute;taill&eacute;e de l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art serait alors le moyen le plus efficace pour d&eacute;livrer un savoir iconographique du sp&eacute;cialiste. C&#39;est le cas avec cet extrait&nbsp;:</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Dans Michel Houellebecq, &eacute;crivain &raquo;, souligne la plupart des historiens d&rsquo;art, Jed Martin rompt avec cette pratique des fonds r&eacute;alistes qui caract&eacute;risent l&rsquo;ensemble de son &oelig;uvre tout au long de la p&eacute;riode des &laquo; m&eacute;tiers &raquo;. Il rompt difficilement, et on sent que cette rupture lui co&ucirc;te beaucoup d&rsquo;effort, qu&rsquo;il s&rsquo;efforce par diff&eacute;rents artifices de maintenir autant que faire se peut l&rsquo;illusion du fond r&eacute;aliste possible. Dans le tableau, Houellebecq est debout face au bureau recouvert de feuilles &eacute;crites ou demi-&eacute;crites.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Derri&egrave;re lui, &agrave; distance une distance qu&rsquo;on peut &eacute;valuer &agrave; cinq m&egrave;tres, le mur blanc est enti&egrave;rement tapiss&eacute; de feuilles manuscrites coll&eacute;es les unes contre les autres, sans moindre interstice. Ironiquement, soulignent les historiens de l&rsquo;art, Jed Martin semble dans son travail accorder une &eacute;norme importance au texte, se polariser sur le texte d&eacute;tach&eacute; de toute r&eacute;f&eacute;rence r&eacute;elle. Or, tous les historiens de la litt&eacute;rature le confirment, si Houellebecq aimait au cours de sa phase de travail punaiser les murs de sa chambre avec diff&eacute;rents documents, il s&rsquo;agissait le plus souvent de photos, repr&eacute;sentant les endroits o&ugrave; les sc&egrave;nes de ses romans ; et rarement de sc&egrave;nes &eacute;crites ou demi-&eacute;crites. (M. Houellebecq, 2010, p. </span><span class="fontstyle01" style="font-family:TimesNewRoman, serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:normal"><span style="font-style:normal">179- 180</span></span></span></span><span new="" roman="" style="font-family:" times="">)</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Pur tableau fictif venu tout droit de l&rsquo;esprit de Houellebecq l&rsquo;&eacute;crivain, le portrait d&eacute;crit ici est celui de Houellebecq le personnage et critique d&rsquo;art de circonstance. Celui-ci est si bien d&eacute;crit que le lecteur peut ais&eacute;ment se le repr&eacute;senter. Mais la transmission du savoir iconographique ne s&rsquo;arr&ecirc;te pas &agrave; la simple description du tableau, elle s&rsquo;enrichit de commentaire de sp&eacute;cialiste servant de glose d&rsquo;ex&eacute;cution, d&rsquo;interpr&eacute;tation symbolique des &eacute;l&eacute;ments repr&eacute;sent&eacute;s. Cette approche de l&rsquo;image, qui fait droit &agrave; l&rsquo;imagination et &agrave; l&rsquo;&eacute;motion, ne rel&egrave;ve pas seulement de la sp&eacute;culation rh&eacute;torique, mais favorise l&rsquo;exposition d&rsquo;un savoir de l&rsquo;art comme cela se lit dans l&rsquo;insistance de la r&eacute;f&eacute;rence &agrave; l&rsquo;historien de l&rsquo;art. Ainsi, l&rsquo;auteur mobilise une grande &eacute;rudition et t&eacute;moigne d&rsquo;une connaissance approfondie du monde de l&rsquo;art, de son histoire et de ses th&eacute;ories. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">De son c&ocirc;t&eacute;, Le Guillou offre une totale immersion dans le monde de l&rsquo;art et du politique par le d&eacute;tour repr&eacute;sentationnel du portrait politique. Le relationnel d&eacute;ploy&eacute; entre art et politique mis en sc&egrave;ne dans le cadre de ce texte passe d&rsquo;abord par un usage particulier de la repr&eacute;sentation du pouvoir politique sous le pinceau du peintre. Au sein de r&eacute;cit litt&eacute;raire, on rep&egrave;re une forme de transposition de l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art avec une d&eacute;multiplication des portraits d&rsquo;apparat, ceux de Georges Pompidou en particulier, consid&eacute;r&eacute;e comme &laquo;&nbsp;le prince des modernes&nbsp;&raquo;. Par ces descriptions artistiques de l&rsquo;homme d&rsquo;&Eacute;tat et du pouvoir, il s&rsquo;agit pour l&rsquo;&eacute;criture romanesque d&rsquo;exp&eacute;rimenter la description d&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art entretenue par la figure rh&eacute;torique de l&rsquo;ekphrasis. Ici, la d&eacute;marche ekphrastique permet de r&eacute;v&eacute;ler une force symbolique qui rappelle ce que Luis Marin analyse dans nomme le portrait du roi. Pour rappel, </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Dans la th&eacute;orie des arts &agrave; l&rsquo;&eacute;poque moderne, le portrait du roi a un statut singulier : en tant que portrait, il d&eacute;pend du dictat de la ressemblance au mod&egrave;le naturel, qui l&rsquo;&eacute;loigne de la noble qu&ecirc;te de l&rsquo;id&eacute;al, mais en tant que repr&eacute;sentation du souverain, donc d&rsquo;un personnage hors norme &agrave; la perfection incomparable, il a vocation d&rsquo;&ecirc;tre un chef-d&rsquo;&oelig;uvre. De ce fait, le portrait du roi &eacute;chappe, du moins dans la litt&eacute;rature encomiastique, au discr&eacute;dit qui frappe progressivement le genre du portrait et aboutit &agrave; son d&eacute;classement dans la hi&eacute;rarchie artistique &eacute;tablie au cours du XVIIe si&egrave;cle. (Atonio Pinelli et all., 2012)</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">L&rsquo;image du pr&eacute;sident Pompidou, transpos&eacute;e dans le cadre de la fiction, donne lieu &agrave; une reconstitution, &agrave; la fois en tant que portrait et repr&eacute;sentation du souverain, de l&rsquo;identit&eacute; r&eacute;elle et profonde de cet homme d&rsquo;&Eacute;tat amoureux de la vie, cet homme dont l&rsquo;&eacute;picurisme se r&eacute;v&egrave;le dans le portrait &agrave; l&rsquo;&eacute;charpe bleu Klein :</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Angoisse. Ce n&rsquo;est pas le pr&eacute;sident que j&rsquo;ai peint. C&rsquo;est un Fran&ccedil;ais d&rsquo;origine paysanne, arriv&eacute; au sommet de la puissance, un galeriste, un banquier, rondouillard et moderne, avec son &eacute;charpe bleue Klein. On sent l&rsquo;&eacute;picurien, le jouisseur qui sait s&rsquo;entourer de bonnes choses, tableaux, ch&egrave;res, cigares, sans oublier les amis. J&rsquo;ai indiqu&eacute; &agrave; Mlle N&eacute;grel que le premier portrait &eacute;tait pet. Un envoy&eacute; de l&rsquo;&Eacute;lys&eacute;e doit venir. (Le Guillou, 2015, p. 49)</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Ce tableau peint des mains de Kerros rend compte de la r&eacute;alit&eacute; d&rsquo;un homme port&eacute; sur les plaisirs simples de la vie. Cette premi&egrave;re image du pr&eacute;sident semble tenir toute une partie du r&eacute;cit. Elle met justement l&rsquo;accent sur la force picturale qui permet de lire la satisfaction, le bonheur dans les traits d&rsquo;un personnage. Ce portrait d&eacute;livre dans une moindre mesure la sagesse &eacute;picurienne qui propose de d&eacute;livrer le personnage de l&rsquo;angoisse, de le mettre &agrave; l&rsquo;abri du danger et de la souffrance pour lui procurer paix, &eacute;quilibre et harmonie n&eacute;cessaires &agrave; la gestion des hommes.&nbsp; Dans la France moderne, le pouvoir ne saurait &ecirc;tre aux mains des despotes, mais plut&ocirc;t des hommes des fois amoureux et respectueux de la vie humaine.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Dans la d&eacute;marche adopt&eacute;e par Houellebecq et Le Guillou, les ekphrasis des portraits de grands hommes sont li&eacute;es &agrave; certains st&eacute;r&eacute;otypes, autrement dit &agrave; des valeurs culturelles implicites. Cette disposition s&rsquo;inspire du constat de Georges Molini&eacute; quand il &eacute;crit que l&rsquo;ekphrasis est &laquo; une indexation de la valeur de la culture, ce qui est typiquement rh&eacute;torique &raquo; (G. Molini&eacute;, 1997, p. 20). On y trouve, en effet, un des principes de base de la rh&eacute;torique qui consiste &agrave; rendre vivant, par le moyen des mots, une r&eacute;alit&eacute; fid&egrave;le dans l&rsquo;univers fictionnel. &Agrave; en croire Bernard Vouiloux, l&rsquo;art pictural &agrave; travers l&rsquo;image informe en un autre sens encore : elle mod&egrave;le, elle donne forme &agrave; des d&eacute;sirs, provoque des effets, d&eacute;clenche des r&eacute;actions [&hellip;] elle est au service de multiples fa&ccedil;ons de vendre : de vendre des politiques [&hellip;] de vendre des produits qui formeront l&rsquo;horizon ultime de toute politique : la communication par l&rsquo;image r&eacute;unit les deux domaines du politique et de l&rsquo;&eacute;conomique (B. Vouiloux, 2018, pp. 11-12). Si cette politisation de l&rsquo;art permet de cantonner l&rsquo;activisme artistique dans un seul et unique sens, d&rsquo;un autre c&ocirc;t&eacute; l&rsquo;art et la pr&eacute;sence d&rsquo;artistes autour d&rsquo;hommes de pouvoir donnent acc&egrave;s &agrave; une mani&egrave;re d&rsquo;esth&eacute;tiser le pouvoir, de porter le pouvoir, d&rsquo;embellir le pouvoir. Il constitue &eacute;galement, parfois, un outil de propagande. La tradition des portraits d&rsquo;apparat perp&eacute;tr&eacute;e dans le roman, par la transposition symbolique de diverses repr&eacute;sentations politiques comme analys&eacute;e en amont, constitue la manifestation patente de cette non-innocence de l&rsquo;art. De toute &eacute;vidence, l&rsquo;art ne saurait &ecirc;tre innocent s&rsquo;il doit sa promotion au m&eacute;c&eacute;nat sous ses diverses formes. Il r&eacute;pond toujours &agrave; un d&eacute;sir politique, qu&rsquo;il soit pro pouvoir ou pro pl&egrave;be. Mais ici la tendance semble &ecirc;tre plus favorable aux politiques.</span></span> <span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Dans leur qu&ecirc;te de splendeur et de gloire, les pouvoirs politiques se font repr&eacute;senter de tout temps. L&rsquo;histoire du portrait politique est parall&egrave;le &agrave; celle du pouvoir d&rsquo;autant plus que depuis que l&rsquo;homme s&rsquo;est constitu&eacute; en soci&eacute;t&eacute; politique et a d&eacute;velopp&eacute; une parfaite ma&icirc;trise de l&rsquo;art de la repr&eacute;sentation, il excelle dans la constitution d&rsquo;effigie de ceux qui le gouvernent.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:36pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">En somme, dans ces deux textes, le genre pictural du portrait est &laquo; l&rsquo;occasion de c&eacute;l&eacute;brer l&rsquo;int&eacute;grit&eacute; personnalis&eacute;e de grands hommes, personnage public ou homme de pouvoir : mise en pose, qui repr&eacute;sente l&rsquo;image d&eacute;finitivement offerte au seuil de l&rsquo;immortalit&eacute;, th&eacute;&acirc;tre proclamant les vertus civiques, militaires, politiques ou nobiliaires du seigneur. &raquo; (P. Lardellier, 1997, p. 28). Les personnalit&eacute;s repr&eacute;sent&eacute;es sont des mod&egrave;les absolus de l&rsquo;extr&ecirc;me concentration morale n&eacute;cessaire &agrave; la gestion des affaires et des hommes. Le dispositif pictural du portrait, en permettant l&rsquo;ostentation des attributs du pouvoir et de la richesse, autorise une forme d&rsquo;exhibition au-devant de l&rsquo;histoire. Tout comme dans des figurations symboliques r&eacute;elles, les portraits fictionnels sont tout autant des arch&eacute;types de la repr&eacute;sentation symbolique du pouvoir, de la fortune et de la grandeur. Utilisant l&rsquo;effet de r&eacute;alit&eacute; propre &agrave; l&rsquo;image analogique, ces diff&eacute;rentes effigies au sein de la di&eacute;g&egrave;se ont pour premi&egrave;re fonction d&rsquo;&ecirc;tre vues, admir&eacute;es et reproduites. L&rsquo;&eacute;criture de Houellebecq et Le Guillou construit de la sorte des portraits qui gardent autant qu&rsquo;ils regardent les membres de la communaut&eacute;, mais aussi les peintres dont ils constituent l&rsquo;&eacute;manation du g&eacute;nie artistique. Le dispositif fictionnel de l&rsquo;&eacute;crivain conserve la finalit&eacute; de toute ic&ocirc;ne politique ; celle qui consiste &agrave; incarner l&rsquo;image pour la politiser, l&rsquo;emplir de la pr&eacute;sence active du pouvoir et de fortune. Ce qui lui permet, au m&ecirc;me titre que le dispositif r&eacute;el du peintre, d&rsquo;acc&eacute;der &agrave; une ubiquit&eacute; symbolique. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">La repr&eacute;sentation du pouvoir (politique et &eacute;conomique), telle qu&rsquo;elle nous est donn&eacute;e dans ces deux textes, corrobore une forme d&rsquo;esth&eacute;tisation de la vorace r&eacute;alit&eacute; du monde contemporain qui participe valablement de la d&eacute;naturation du noble art pictural. Si la symbolique de cette communication entre art et &eacute;criture constitue le socle de l&rsquo;intrigue de ces textes, elle permet l&rsquo;&eacute;tablissement d&rsquo;un discours sur la d&eacute;cadente r&eacute;alit&eacute; que cache le d&eacute;veloppement de l&rsquo;art contemporain sous l&rsquo;&eacute;gide du capitalisme mercantiliste.</span></span></span></span></span></p> <h2 style="text-align: justify; text-indent: -14.2pt; margin-bottom: 11px; margin-left: 48px;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">2- </span></span></b><b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Description de la r&eacute;alit&eacute; normative de l&rsquo;art : le r&eacute;alisme contemporain &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre </span></span></b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&Agrave; l&rsquo;&egrave;re contemporaine, tout se passe comme si l&rsquo;optique dans laquelle le genre romanesque observe le monde et le donne &agrave; voir avait consid&eacute;rablement &eacute;volu&eacute; vers la repr&eacute;sentation plus r&eacute;aliste que le r&eacute;el en lui-m&ecirc;me. Ce changement paradigmatique intervient dans la litt&eacute;rature sous l&rsquo;impulsion de l&rsquo;hypermodernit&eacute;, mais aussi sous celle d&rsquo;une s&eacute;rie de facteurs conjugu&eacute;s et diff&eacute;rents selon chaque culture. Parmi ces facteurs, on peut noter entre autres l&rsquo;&eacute;volution des arts, l&rsquo;environnement litt&eacute;raire, mais aussi les mutations historiques, sociologiques, suivant les troubles sociopolitiques d&egrave;s la fin des ann&eacute;es. Avec <i>La carte et le territoire</i> et <i>Les ann&eacute;es insulaires</i>, on rel&egrave;ve que la r&eacute;f&eacute;rence au domaine de l&rsquo;art, notamment avec des artistes confirm&eacute;s comme narrateur, constitue un ancrage r&eacute;aliste important. Ces deux textes mettent &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre une prise de conscience par les auteurs et les artistes repr&eacute;sent&eacute;s de la situation historique du moment. Prise de conscience qui accompagne le mouvement m&ecirc;me de civilisation. En cela, ils s&rsquo;inscrivent dans le sillage d&rsquo;une litt&eacute;rature r&eacute;aliste qui, de base, se con&ccedil;oit comme le mode d&rsquo;expression par lequel l&rsquo;&eacute;crivain assume et traduit la primaut&eacute; des valeurs plus ou moins positives du monde dans lequel il vit. Les textes se d&eacute;ploient sur la base d&rsquo;une description exacerb&eacute;e de la r&eacute;alit&eacute; v&eacute;cue au quotidien, en l&rsquo;occurrence les paysages familiers de l&rsquo;art, les comportements de l&rsquo;homme contemporain en rapport avec le monde moderne. Cette quotidiennet&eacute;, en tant que sujet r&eacute;aliste, se saisit non seulement dans sa r&eacute;alit&eacute; individuelle, mais aussi dans son rapport avec la diversit&eacute; et la structuration des milieux sociaux. Le but est de rendre compte du monde de l&rsquo;art par le biais de la repr&eacute;sentation de ses manifestations v&eacute;rifiables et de sa logique apparente. L&rsquo;univers artistique repr&eacute;sent&eacute; est g&eacute;n&eacute;ralement per&ccedil;u par le prisme du regard d&rsquo;un peintre ou d&rsquo;un narrateur qui fait acc&eacute;der la peinture &agrave; un second niveau de coh&eacute;rence. D&egrave;s lors, elle n&rsquo;est plus exclusivement objet de la repr&eacute;sentation narrative, mais aussi objet de discours.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Concr&egrave;tement, si Michel Houellebecq et Phillipe Le Guillou ont portraitur&eacute; un grand nombre d&rsquo;artistes dans leurs &oelig;uvres, il d&eacute;coule de ces transpositions de l&rsquo;image de l&rsquo;artiste un discours m&eacute;talitt&eacute;raire sur le processus de l&rsquo;&eacute;criture, de la peinture, des genres litt&eacute;raires et artistiques, sur le style et ses rapports avec les m&eacute;tiers d&rsquo;&eacute;crivain et de peintre. Ce dispositif discursif de m&eacute;talitt&eacute;rarisation en contexte fictionnel se mat&eacute;rialise valablement dans nos deux textes &eacute;tudi&eacute;s ici. Ils donnent, de fait, lieu &agrave; ce que nous identifions comme discours th&eacute;orique symbolisant une forme de r&eacute;alisme. &Agrave; l&rsquo;instar des ouvrages th&eacute;oriques de r&eacute;f&eacute;rences, ces romans d&eacute;veloppent de v&eacute;ritables th&eacute;ories de l&rsquo;art. Il y est question, en effet, d&rsquo;une r&eacute;flexion th&eacute;orique sur la cr&eacute;ation en g&eacute;n&eacute;ral, ce qui fait de ces textes de v&eacute;ritables arts po&eacute;tiques. Les artistes, Jed Martin et Kerros, parlent depuis une marge solitaire et sont pourvus d&rsquo;un don pr&eacute;cieux : la distance critique par rapport &agrave; leurs cr&eacute;ations artistiques.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Pour le compte sp&eacute;cifique de <i>La Carte et le territoire</i>, le discours th&eacute;orique qui plonge le r&eacute;cit dans cette forte aura critique se met en place &agrave; partir de la demande formul&eacute;e, &agrave; Houellebecq, par le peintre Jed. Celle-ci avait pour objet la r&eacute;daction, par l&rsquo;&eacute;crivain, d&rsquo;une pr&eacute;face pour son catalogue de vente. Houellebecq accepte, parce que beaucoup d&rsquo;&eacute;crivains avant lui ont &eacute;crit sur des peintres. Il livre une analyse exhaustive de la production artistique tr&egrave;s vari&eacute;e de Jed Martin qu&rsquo;il loue notamment parce que selon l&rsquo;auteur fran&ccedil;ais ses tableaux &laquo; m&ecirc;me s&rsquo;ils repr&eacute;sentent des &ecirc;tres humains, ont quelque chose de g&eacute;n&eacute;ral, je dirais, qui va au-del&agrave; de l&rsquo;anecdote &raquo; (M. Houellebecq, 2010, p. 175). Sabine van Wesemael inscrit les propos tenus dans son article &laquo; Penser la narrativit&eacute; contemporaine : La Carte et le territoire, formidable autoportrait de l&rsquo;&eacute;crivain Michel Houellebecq &raquo; (S. Wesemael, 2018) dans ce sens. Pour elle, aux yeux de l&rsquo;auteur de <i>Soumission</i>, la s&eacute;rie des &laquo; compositions d&rsquo;entreprise &raquo; et celle des &laquo; m&eacute;tiers simples &raquo; rel&egrave;vent d&rsquo;un photor&eacute;alisme qui consiste &agrave; &eacute;tablir un &eacute;tat g&eacute;n&eacute;ral de la r&eacute;alit&eacute; sociale. Il s&rsquo;agit de dire le monde dans ses composantes, ses forces actives. Ce commentaire de l&rsquo;&eacute;crivain est en phase avec l&rsquo;id&eacute;e et la d&eacute;marche du peintre. Celui-ci entend, &laquo; d&rsquo;un tableau &agrave; l&rsquo;autre [&hellip; essayer] de construire un espace artificiel, symbolique, o&ugrave; [il] puisse repr&eacute;senter des situations qui aient un sens pour le groupe &raquo; (M. Houellebecq, 2010, p. 168). L&rsquo;ambition de Jed n&rsquo;est pas d&rsquo;attraper le d&eacute;tail ou de s&rsquo;attarder sur le pittoresque, mais de chercher la structure. Chez l&rsquo;auteur lui-m&ecirc;me, les r&eacute;flexions th&eacute;oriques sont un mat&eacute;riau romanesque comme un autre. Il interrompt sans cesse le r&eacute;cit des &eacute;v&eacute;nements pour des digressions sur l&rsquo;art, sur la condition humaine, sur notre soci&eacute;t&eacute; capitaliste moderne et ainsi de suite. &Agrave; travers l&rsquo;analyse des &oelig;uvres de Jed Martin, Houellebecq exprime sa conception de l&rsquo;art, mais aussi sa propre po&eacute;tique litt&eacute;raire. Cette th&eacute;orie qu&rsquo;il expose tiendrait dans une forme de d&eacute;nonciation du capitaliste artistique.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Le rapport critique au r&eacute;el dont il est question ici se met en place sur la base d&rsquo;une ostentation de la propension au mercantiliste qui contamine les domaines de l&rsquo;art contemporain. C&rsquo;est ainsi que se lit la logique marchande qui tient le roman de bout en bout. La r&eacute;f&eacute;rence au domaine de l&rsquo;art est un dispositif essentiel de <i>La carte et le territoire</i>, le discours critique construit &agrave; partir des arts photographique et pictural donne &agrave; voir une volont&eacute; du romancier de traiter d&rsquo;une &eacute;pineuse question dans la r&eacute;alit&eacute; artistique contemporaine. Celle-ci met en &eacute;vidence une &eacute;volution artistique &agrave; partir de nombreux discours et commentaires issus des m&eacute;dias et des critiques d&rsquo;art. Autour de tels discours se noue une v&eacute;ritable conspiration collective &ndash; ce que Baudrillard nomme le complot de l&rsquo;art (J. Baudrillard, 1970, p. 160) &ndash; qui se r&eacute;v&egrave;le &agrave; la faveur d&rsquo;un monde o&ugrave; tout se pense en termes de comp&eacute;tition et de march&eacute;, de rentabilit&eacute; et de performance, o&ugrave; le succ&egrave;s en termes de march&eacute; remplace toutes les th&eacute;ories. Il est &eacute;vident, dans ces conditions, que l&rsquo;art contemporain, dans son pacte avec le diable (donc les contraintes du march&eacute;), n&rsquo;a pu &eacute;chapper au processus de d&eacute;territorialisation et de d&eacute;sorientation. (C. Dedomon, 2015)</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Le dispositif r&eacute;aliste est encore plus renforc&eacute; avec la fable artistico-politique, <i>Les ann&eacute;es insulaires. </i>&Agrave; son tour<i>, </i>Philippe Le Guillou augmente le coefficient r&eacute;aliste de son texte par une r&eacute;f&eacute;rence directe &agrave; la r&eacute;alit&eacute; historique de la France moderne en s&rsquo;appuyant sur d&rsquo;authentiques documents. Par la transposition d&rsquo;un certain nombre de donn&eacute;es historiques, le texte aborde la totalit&eacute; concr&egrave;te des ann&eacute;es Pompidou en France. Dans sa constitution, le r&eacute;cit suit ainsi cette querelle qui na&icirc;t de la transformation profonde que Pompidou impose &agrave; la France, et plus particuli&egrave;rement &agrave; sa capitale. &Agrave; partir d&rsquo;un jeu po&eacute;tique bien &eacute;labor&eacute;e, la narration est ponctu&eacute;e d&rsquo;&eacute;v&egrave;nements historiques majeurs ainsi que de faits divers largement relay&eacute;es par la presse qui rendent palpable l&rsquo;atmosph&egrave;re de ce septennat abr&eacute;g&eacute; : l&rsquo;affaire Gabrielle Russier, ce professeur qui se suicide apr&egrave;s avoir eu une aventure avec l&rsquo;un de ses &eacute;l&egrave;ves, la destruction des Halles de Paris, l&rsquo;exposition 72/72&hellip; Ce que peint la langue foisonnante de Philippe Le Guillou dans ce livre, c&rsquo;est au fond un monde qui craint de s&rsquo;effondrer sous les coups de boutoir de la modernit&eacute;. Dans une interview accord&eacute;e au journal <i>LA P&Eacute;NICHE</i>, Le Guillou r&eacute;v&egrave;le cette port&eacute;e documentaire &agrave; travers deux r&eacute;ponses r&eacute;sumant les conditions de r&eacute;daction de l&rsquo;ouvrage :</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Oui, un peintre qui peint un homme, mais dans des paysages. Le lot o&ugrave; Pompidou avait une maison et puis la Bretagne. C&rsquo;est tr&egrave;s r&eacute;el et c&rsquo;est tr&egrave;s invent&eacute;, comme d&rsquo;ailleurs beaucoup de choses dans ce livre. D&rsquo;ailleurs, beaucoup de propos qui sont tenus dans le roman par le pr&eacute;sident Pompidou l&rsquo;ont &eacute;t&eacute; r&eacute;ellement. &Eacute;videmment, c&rsquo;est un roman, il y a quelques &eacute;l&eacute;ments invent&eacute;s par moi, mais dans l&rsquo;ensemble c&rsquo;est un travail d&rsquo;information importante. [&hellip;] Je n&rsquo;avais pas de plan, j&rsquo;avais la chronologie de l&rsquo;histoire. Je voulais suivre la confrontation entre ce peintre imaginaire et d&eacute;rouler en filigrane l&rsquo;histoire du quinquennat de Pompidou. Et donc entretemps il y avait des jalons qui allaient appara&icirc;tre, l&rsquo;affaire Gabrielle Russier, l&rsquo;ex&eacute;cution de Buffet et Bontemps, en 1971 la destruction des pavillons de Baltard, l&rsquo;exposition 72/72, d&rsquo;une certaine fa&ccedil;on c&rsquo;&eacute;tait assez facile &agrave; &eacute;crire, parce que j&rsquo;avais des sortes de pilotis qui structuraient la fiction.<a href="#_ftn2" name="_ftnref2" style="color:#0563c1; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:11.0pt"><span style="line-height:106%"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">[2]</span></span></span></span></span></a></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">En rapport avec le r&eacute;alisme du texte, l&rsquo;histoire d&eacute;bute avec le portrait &laquo; chromo-brejnevien &raquo; de Pompidou, la photo officielle de Georges Pompidou. Une forme d&rsquo;image de propagande qui contraste avec la r&eacute;alit&eacute; d&rsquo;un pr&eacute;sident assez proche des Fran&ccedil;ais, un pr&eacute;sident qui n&rsquo;est pas du tout un pr&eacute;sident lointain, qui aime un peu la vie de famille, qui aime la bagnole, qui est un pr&eacute;sident de la modernit&eacute;, que les personnages contestataires du roman appellent le &laquo; prince des modernes &raquo; comme l&rsquo;avance Le Guillou lui-m&ecirc;me. Le r&eacute;cit offre en r&eacute;sum&eacute;, par une forme de narration r&eacute;trospective ponctu&eacute;e par des commentaires du peintre, une repr&eacute;sentation r&eacute;aliste de la pr&eacute;sidence d&rsquo;un homme d&rsquo;&Eacute;tat incompris, et ce, en mettant l&rsquo;accent sur l&rsquo;ambivalence de ce choix de gouvernance en terme esth&eacute;tique. On assiste dans la mat&eacute;rialit&eacute; du texte &agrave; des digressions anachroniques dont le projet tient dans la justification de certains choix politiques en lien avec le conservatisme et le classicisme d&rsquo;un pr&eacute;sident dont le septennat est port&eacute; sur la modernit&eacute; dans l&rsquo;art et l&rsquo;architecture.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Ainsi, loin de dissimuler ces strates d&rsquo;h&eacute;t&eacute;rog&eacute;n&eacute;it&eacute;, ces narrations documentaires picturales les revendiquent, sans toutefois se laisser gagner par le chaos, car elles s&rsquo;inscrivent dans un mouvement de cartographie cognitive du monde, qui pourrait d&eacute;crire leur syntaxe propre. Confront&eacute; &agrave; l&rsquo;embrouillement et &agrave; l&rsquo;h&eacute;t&eacute;rog&eacute;n&eacute;it&eacute; du monde contemporain, le r&eacute;alisme traditionnel, avec sa dimension totalisante, est devenu d&eacute;suet. Ce qui explique que chaque texte analys&eacute; en amont entretienne une forme particuli&egrave;re de r&eacute;alisme : nous sommes donc loin de ce r&eacute;alisme totalisant qui caract&eacute;rise l&rsquo;esth&eacute;tique romanesque du XIXe si&egrave;cle. Ainsi, on pourrait retenir que les r&eacute;cits d&rsquo;art offrent &agrave; la lecture diverses formes d&rsquo;un r&eacute;alisme actualis&eacute;. Celles-ci peuvent &ecirc;tre r&eacute;sum&eacute;es dans &laquo; des r&eacute;alismes pr&eacute;caires, paradoxaux, subversifs et m&ecirc;me spectraux, ou des &eacute;critures du r&eacute;el abordant le r&eacute;el par touches, par fragments ou par des instantan&eacute;s &raquo; (L. Ruffel, 2012) avec &agrave; la fois une investiture des domaines du savoir artistique comme cela s&rsquo;est vu dans le chapitre pr&eacute;c&eacute;dent. Un retour &agrave; un r&eacute;alisme traditionnel semble peu probable dans cette perspective.</span></span></span></span></span></p> <h2 style="text-align: justify; text-indent: -14.2pt; margin-bottom: 11px; margin-left: 48px;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">3- </span></span></b><b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Au-del&agrave; des normes du capitalisme artiste&nbsp;: plaidoyer pour un d&eacute;veloppement harmonieux de l&rsquo;art contemporain</span></span></b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">La sociabilit&eacute; artistique pr&eacute;side &agrave; l&rsquo;&eacute;rection d&rsquo;un discours th&eacute;orique lisant l&rsquo;art &agrave; l&rsquo;aune de la r&eacute;alit&eacute; du savoir de la soci&eacute;t&eacute;. C&rsquo;est ainsi que dans <i>La Carte et le territoire</i> et <i>Les ann&eacute;es insulaires</i>, Michel Houellebecq et Philipe Le Guillou, &agrave; leur mani&egrave;re, peuvent afficher, &agrave; partir d&rsquo;une critique de l&rsquo;art contemporain, la crainte d&rsquo;une perte de l&rsquo;authenticit&eacute; et l&rsquo;immixtion du politique affectant le temps pr&eacute;sent et la multiplication des simulacres qui gouvernent le monde de l&rsquo;art. Dans un discours critique magistralement tiss&eacute;, les romanciers t&eacute;moignent de la nostalgie d&rsquo;une parole v&eacute;ridique au-del&agrave; des discours pr&eacute;fabriqu&eacute;s qui manifestent de la crainte d&rsquo;une obsolescence programm&eacute;e de l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art. Pour eux, en effet, le monde contemporain appara&icirc;t comme inauthentique, fait d&rsquo;images, de mises en sc&egrave;ne, de clich&eacute;s et par cons&eacute;quent de vanit&eacute;s. &laquo; Nous sommes des produits culturels &raquo; (M. Houellebecq. 2010, p. 123), dit Houellebecq &agrave; Jed qui dans son tableau repr&eacute;sentant Jef Koons et Damien Hirst s&rsquo;inspire d&rsquo;une photographie publicitaire pour la d&eacute;coration de la chambre. L&rsquo;authentique et l&rsquo;inauthentique semblent indissolublement li&eacute;s comme c&rsquo;est le cas avec la dichotomie observable entre les insulaires traditionalistes et les modernes de l&rsquo;air Pompidou chez Phillipe Le Guillou. &Agrave; ce propos, dans <i>L&rsquo;esth&eacute;tisation du monde</i>, Gilles Lipovetsky et Jean Serroy se prononcent sur la question et, par la m&ecirc;me occasion, tirent la sonnette d&rsquo;alarme en confirmant cette d&eacute;valuation du beau artistique &agrave; &laquo;&nbsp;l&rsquo;&acirc;ge du capitalisme artiste&nbsp;&raquo;&nbsp;:</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Par sa pr&eacute;sence, l&rsquo;&oelig;uvre est d&rsquo;abord unique et poss&egrave;de une valeur cultuelle. Avec la reproduction, on va passer d&rsquo;une valeur cultuelle &agrave; une valeur d&rsquo;exposition. Notre rapport aux &oelig;uvres change donc. Hegel, dans l&rsquo;Esth&eacute;tique, avait d&eacute;j&agrave; annonc&eacute; cette transformation en nous disant que &laquo; l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art, dans sa destination supr&ecirc;me est une chose du pass&eacute; &raquo;, formule que l&rsquo;on r&eacute;sume souvent, au risque de faire un contresens par &laquo; l&rsquo;art est mort &raquo;. Hegel ne nous dit pas simplement que l&rsquo;art est mort, il nous dit que l&rsquo;art est pour nous quelque chose du pass&eacute;, &laquo; du moins dans sa destination supr&ecirc;me &raquo;. (W. Benjamin, 2000)</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Ce propos interpelle &agrave; bien des &eacute;gards, et le constat est sans appel&nbsp;: la logique marchande secr&egrave;te qu&rsquo;on pourrait qualifier de culture du business, s&rsquo;ancre profond&eacute;ment dans les sph&egrave;res culturelles au point de faire dispara&icirc;tre la valeur culturelle et cultuelle de l&rsquo;objet d&rsquo;art. L&rsquo;aspect artisanal et authentique, dans le r&eacute;gime fictionnel, laisse place &agrave; ceux de la &laquo; gadg&eacute;tisation &raquo; et de la marchandisation des objets d&rsquo;art. la surench&egrave;re sp&eacute;culative sur la valeur &eacute;conomique de l&rsquo;objet d&rsquo;art et les formes contemporaines de m&eacute;c&eacute;nats qui en d&eacute;coule soul&egrave;ve sans conteste la question du devenir artiste. En effet, dans les textes de Houellebecq et Le Guillou, si l&rsquo;&eacute;vidence de la r&eacute;f&eacute;rence &agrave; l&rsquo;image de l&rsquo;&laquo; artiste &raquo; semble relever d&rsquo;un truisme (les deux personnages principaux, Jed Kartins et Kerros sont des artistes confirm&eacute;s), c&rsquo;est justement pour souligner les vacillements, les incertitudes et&nbsp; les &eacute;carts de cette noble profession. On pourrait lire une invite &agrave; consid&eacute;rer une &eacute;volution artistique construite sur fond d&rsquo;ironie&nbsp;: le m&eacute;tier perd de sa superbe au contact du politique et des int&eacute;r&ecirc;ts mercantilistes. De telles inflexions conduisent assur&eacute;ment au proc&egrave;s de l&rsquo;hypercapitalisme artiste. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Au m&ecirc;me titre que la logique marchande exacerbe les in&eacute;galit&eacute;s et provoque des catastrophes &eacute;cologiques majeures, on assiste &agrave; une destruction de l&rsquo;artiste, une destitution de son caract&egrave;re d&eacute;miurge. Cette dynamique donne lieu &agrave; un an&eacute;antissement des capacit&eacute;s intellectuelles et morales, affectives et esth&eacute;tiques des individus. Une telle position rejoint celle de Gilles Lipovetsky et Jean Seroy pour qui le capitalisme appara&icirc;t comme un rouleau compresseur ne respectant aucune tradition, ne v&eacute;n&eacute;rant aucun principe sup&eacute;rieur, qu&rsquo;il soit &eacute;thique, culturel ou &eacute;cologique.&nbsp; C&rsquo;est un syst&egrave;me command&eacute; par un imp&eacute;ratif de profit n&rsquo;ayant d&rsquo;autres fins que lui-m&ecirc;me (G. Lipovetsky et J. Seroy, 2013). </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Dans <i>La Carte et le territoire</i>, l&rsquo;art, &agrave; la fois traditionnel et contemporain, fonctionne dans la fiction &agrave; partir d&rsquo;un discours th&eacute;orique. Le cas particulier de l&rsquo;&oelig;uvre de Houellebecq se d&eacute;ploie sur la base de la d&eacute;nonciation d&rsquo;une logique de l&rsquo;accumulation, du spectaculaire, et du commercial. Tout tient dans ces termes :</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Dans sa rage d&rsquo;innovation, [l&rsquo;art contemporain] dissout tous ses rep&egrave;res classiques, perd son statut transcendant et appara&icirc;t comme une activit&eacute; livr&eacute;e &agrave; l&rsquo;escalade du &laquo; n&rsquo;importe quoi &raquo;, du gadget, de l&rsquo;objet kitsch. Au bord de l&rsquo;imposture, l&rsquo;art contemporain soul&egrave;ve la question du devenir artiste dans un environnement o&ugrave; le succ&egrave;s en termes de march&eacute; rel&egrave;ve d&rsquo;un certain nombre de facteurs. (C. Dedomon, 2015) </span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Si donc sous la plume de Houellebecq on peut d&eacute;couvrir un discours th&eacute;orique sur l&rsquo;art digne des essais de sociologie, des ouvrages de r&eacute;f&eacute;rence de l&rsquo;histoire de l&rsquo;art, ces connaissances appellent &agrave; l&rsquo;int&eacute;gration d&rsquo;une &eacute;thique assurant un d&eacute;veloppement harmonieux. Dans le d&eacute;ploiement de ce qui se voit comme d&eacute;veloppement harmonieux de l&rsquo;&eacute;conomie de l&rsquo;art, Michel Houellebecq ne se contente pas de critiquer le capitalisme artiste et ses myst&egrave;res. Il va bien au-del&agrave; en proposant de revenir aux formes perdues, aux rep&egrave;res classiques, &agrave; l&rsquo;id&eacute;e de groupe pour permettre &agrave; l&rsquo;Art de quitter le cycle infernal de la soci&eacute;t&eacute; de consommation ou de la logique marchande. On sent chez lui une v&eacute;ritable fascination pour le vieux monde, l&rsquo;ordre ancien. Il y a une vraie nostalgie, une sensation de perte dans le passage de l&rsquo;art traditionnel &agrave; l&rsquo;art moderne et contemporain. Pris donc dans sa logique &eacute;conomique telle que repr&eacute;sent&eacute;e dans <i>La Carte et le territoire</i>, l&rsquo;art contemporain illustre les graves d&eacute;rives d&rsquo;une soci&eacute;t&eacute; hypercapitaliste qui s&rsquo;inscrit en porte &agrave; faux avec la logique d&rsquo;un r&eacute;el d&eacute;veloppement&nbsp;; celui qui favorise un &eacute;panouissement des formes harmonieuses, qui accorde une pr&eacute;gnance au charme et &agrave; l&rsquo;agr&eacute;ment de la vie en soci&eacute;t&eacute; et qui donne lieu &agrave; un enrichissement des existences.&nbsp; </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Ce m&ecirc;me sentiment nostalgique est observable dans <i>Les ann&eacute;es insulaires</i> avec plus d&rsquo;acuit&eacute;. &nbsp;Si chez Le Guillou la peinture se fait depuis un certain temps continuation de la politique, cela permet de poser la r&eacute;flexion critique sur les dissensus internes li&eacute;s &agrave; la propension exag&eacute;r&eacute;e de modernisation dans les arts et l&rsquo;architecture. Cela tient, en contexte fictionnel, dans la mise en sc&egrave;ne du hiatus continuel et perp&eacute;tuel entre conservatisme et modernisme dans l&rsquo;&eacute;dification des politiques artistiques et architecturales. Dans le cadre de ce texte, le discours critique tenu par Le Guillou tente assid&ucirc;ment de figurer un partage du sensible afin de repr&eacute;senter les nouvelles configurations du paysage politico-artistique. Ce qui conf&egrave;re un volet r&eacute;solument &eacute;thique &agrave; son &eacute;criture fictionnelle et sert de finalit&eacute; &agrave; la fois au discours sur l&rsquo;esth&eacute;tique qu&rsquo;aux discours sur le politique. Un ordre est profond&eacute;ment boulevers&eacute; par l&rsquo;&eacute;volution, remettant en cause la d&eacute;coupe conventionnelle du sensible. Pour Jacque Ranci&egrave;re qui travaille sur cette question, &laquo; le partage du sensible, c&rsquo;est la fa&ccedil;on dont les formes d&rsquo;inclusion et d&rsquo;exclusion qui d&eacute;finissent la participation &agrave; une vie commune sont d&rsquo;abord configur&eacute;es au sein m&ecirc;me de l&rsquo;exp&eacute;rience sensible de la vie. &raquo; (J. Ranci&egrave;re, 2000, p. 12). La fiction de Le Guillou reprend ici le concept en formulant une d&eacute;coupe au sein des grandes cat&eacute;gories sensibles. Avec le progr&egrave;s et le changement, le partage du sensible se modifie et diff&eacute;rentes marginalit&eacute;s se constituent au sein des groupes jusque-l&agrave; &eacute;tanches.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Dans <i>Les ann&eacute;es insulaires</i>, le topos de mat&eacute;rialisation du changement prend tout son sens avec la transposition des r&eacute;els desseins politico-esth&eacute;tiques de la gouvernance de Pompidou. Le changement auquel sont r&eacute;fractaires les &laquo; insulaires &raquo; contestataires semble se cristalliser dans l&rsquo;&oelig;uvre monumentale r&eacute;alis&eacute;e par Agam :</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">C&rsquo;&eacute;tait l&rsquo;antichambre d&rsquo;Agam, la chambre-tableau dans laquelle le pr&eacute;sident malade venait s&rsquo;abriter et m&eacute;diter. Elle &eacute;tait l&agrave; maintenant, au sommet de l&rsquo;immense alambic qu&rsquo;il avait r&ecirc;v&eacute; et qu&rsquo;il n&rsquo;avait jamais vu. Le successeur, croyais-je me souvenir, n&rsquo;en avait plus voulu. L&rsquo;&eacute;motion ne me quittait pas : tout m&rsquo;excitait, les parois de transacryl, le jeu des lamelles flamboyantes, le rituel japonais, tous ces pieds qui marchaient sans chaussures sur le beau tapis des Gobelins, tous ces orants, ces contemplateurs, parmi lesquels le jeune chevelu aux chaussettes vert d&rsquo;eau, entr&eacute; l&agrave;, dans le tableau comme l&rsquo;aurait dit le concepteur des lieux, dans le salon d&rsquo;Agam qui &eacute;tait certainement une des r&eacute;alisations les plus belles que cette &eacute;poque e&ucirc;t os&eacute;es. (P. Le Guillou, 2014, p. 32)</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Dans le r&eacute;cit, le salon d&rsquo;Agam est l&rsquo;&oelig;uvre principale du projet esth&eacute;tique du pr&eacute;sident Pompidou. Cette &oelig;uvre subliminale s&rsquo;inscrit dans une longue s&eacute;rie de recherche sur l&rsquo;art en mouvement, cet art dit cin&eacute;tique qui consacre une symphonie visuelle comme finalit&eacute; de l&rsquo;art moderne. Si cette &oelig;uvre tombe en disgr&acirc;ce apr&egrave;s la mort de Pompidou, c&rsquo;est justement parce qu&rsquo;elle est profond&eacute;ment li&eacute;e &agrave; la m&eacute;tamorphose de Paris. Les temps changent &agrave; l&rsquo;image de ces 900 nuances de couleurs qui la composent. Dans son exp&eacute;rimentation, le spectateur est amen&eacute; &agrave; r&eacute;fl&eacute;chir sur la mobilit&eacute; infinie du temps et l&rsquo;infinie des possibilit&eacute;s visuelles : ce qui existe n&rsquo;est pas forc&eacute;ment visible et les images invisibles sont innombrables. Elle mat&eacute;rialise la perte des valeurs spirituelles sp&eacute;cifiques &agrave; l&rsquo;&eacute;poque et fait entrer la culture de plain-pied dans la modernit&eacute;. Il faut dire qu&rsquo;un nouveau partage entre art et politique se dessine dans l&rsquo;espace des temps modernes. La modernit&eacute; recouvre en fait un nouveau r&eacute;gime de productions artistiques, ce que Ranci&egrave;re nomme le r&eacute;gime esth&eacute;tique de l&rsquo;art, et qu&rsquo;il distingue du r&eacute;gime &eacute;thique de l&rsquo;art et du r&eacute;gime repr&eacute;sentatif de l&rsquo;art (J. Ranci&egrave;re, 2000). Dans cette dynamique, tout changement rel&egrave;verait d&rsquo;abord d&rsquo;une volont&eacute; politique radicale. Admettant ainsi, valablement, l&rsquo;exclusion de certaines cat&eacute;gories r&eacute;fractaires aux nouvelles dispositions dans la mesure o&ugrave; celle-ci ne semble pas visiblement consciente des enjeux contemporains.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">En somme, pour Houllebecq et Le Guilou, si le modernisme capitaliste, dans lequel est englu&eacute; le monde de l&rsquo;art, est capable d&rsquo;accroitre les richesses, de produire et de diffuser les biens de toutes sortes par un d&eacute;veloppement &eacute;conomique et esth&eacute;tique av&eacute;r&eacute;, cette &eacute;volution passe par des crises &eacute;conomiques et sociales profondes susceptibles de conduire &agrave; un r&eacute;chauffement d&eacute;vastateur du climat de l&rsquo;art.&nbsp;: il est &eacute;vident que &laquo;&nbsp;L&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art reproduite techniquement et reproductible[ comme l&rsquo;implique l&rsquo;hypercapitalisme mercantiliste] a perdu son aura&nbsp;&raquo; (Lypovestki et seroy, 2013). Cette aura mystique consubstantielle &agrave; l&rsquo;art est perdue dans un monde liquide o&ugrave; rien ne prend le temps de se fixer selon zigmun Bauman (2013). Ce qui fait naitre, chez nos auteurs, une v&eacute;ritable nostalgie qui d&eacute;montre la n&eacute;cessit&eacute; de trouver un &eacute;quilibre dans la folle course de l&rsquo;homme vers cette modernit&eacute; &agrave; connotation mercantiliste r&eacute;gi par le pouvoir de l&rsquo;argent. </span></span></span></span></span></p> <h2 style="text-align: justify; margin-bottom: 11px;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Conclusion </span></span></b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">La m&eacute;ditation de ces auteurs sur l&rsquo;image artistique (le portrait), dans sa dimension rh&eacute;torique, nous invite &agrave; consid&eacute;rer le lien sp&eacute;cifique qui s&rsquo;&eacute;tablit entre l&rsquo;&eacute;criture litt&eacute;raire et le monde de l&rsquo;art. Il s&rsquo;agit de voir l&rsquo;intrication profonde entre ces deux r&eacute;gimes s&eacute;miotiques ; le texte fait l&rsquo;image et l&rsquo;image fait le texte. Autant l&rsquo;art s&rsquo;investit du savoir de la litt&eacute;rature pour repr&eacute;senter l&rsquo;&eacute;crivain, l&rsquo;&eacute;crivain de son c&ocirc;t&eacute; charge sont texte et le d&eacute;ploie &agrave; partir des savoirs et des savoir-faire du peintre. Ainsi, la forte diffusion de l&rsquo;art aujourd&rsquo;hui favorise l&rsquo;&eacute;largissement de l&rsquo;horizon d&rsquo;attente. On assiste &agrave; une transfiguration du banal qui permet de red&eacute;finir et caract&eacute;riser, par la m&ecirc;me occasion, le paradigme de l&rsquo;art contemporain. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&Agrave; scruter la r&eacute;alit&eacute; du monde contemporain, l&rsquo;&eacute;criture fictionnelle r&eacute;v&egrave;le que l&rsquo;art perd son aura mystique et sacr&eacute;e. La divine crainte que l&rsquo;art suscitait autrefois, en effet, a fait place &agrave; un gout aseptique, fade qui &eacute;mane d&rsquo;une transfiguration exag&eacute;r&eacute;e du banal. L&rsquo;objet artistique comporte une structure intentionnelle qui la diff&eacute;rentie de l&rsquo;objet non artistique. De cette intentionnalit&eacute; et cette repr&eacute;sentation d&eacute;coule la n&eacute;cessit&eacute; d&rsquo;une interpr&eacute;tation qui devient constituante de l&rsquo;&oelig;uvre elle-m&ecirc;me. L&rsquo;identit&eacute; de l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art a une nature &eacute;minemment historique et tisse un lien intime avec &laquo;&nbsp;l&rsquo;ambiance th&eacute;orique &raquo; sp&eacute;cifique &agrave; chaque &eacute;poque.&nbsp; Ainsi, si l&rsquo;art contemporain trouve une forme d&rsquo;&eacute;panouissement dans le sillage du de l&rsquo;hypercapitalisme mercantiliste. Les artistes, comme c&rsquo;est le cas avec Jed Martins et Keross, deviennent des stars &eacute;panouies financi&egrave;rement. Cet &eacute;panouissement mat&eacute;riel se d&eacute;ploie au d&eacute;triment de l&rsquo;&eacute;panouissement artistique. L&rsquo;artiste au contact de l&rsquo;argent et du pouvoir perd son &acirc;me, sa magie. Il est d&eacute;pouill&eacute; de son authenticit&eacute; (Jed et Kerros) et se soumet au pouvoir de l&rsquo;argent et des m&eacute;c&egrave;nes politiques qui l&eacute;gitiment leur action et agenda culturel par la caution de l&rsquo;artiste. Ce qui am&egrave;ne &agrave; questionner le devenir artistique &agrave; l&rsquo;aune de la norme de l&rsquo;engagement de l&rsquo;artiste d&rsquo;aujourd&rsquo;hui pour de nobles causes.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px">&nbsp;</p> <p align="center" style="text-align:center; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">BIBLIOGRAPHIE</span></span></b></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">ARAMBASIN Nella, 2007, <i>Litt&eacute;rature contemporaine et histoire de l&rsquo;art : r&eacute;cits d&rsquo;une r&eacute;&eacute;valuation</i>. Gen&egrave;ve&nbsp;: Droz.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">BAUDRILLARD Jean, 1970, <i>La soci&eacute;t&eacute; de consommation</i>. Paris&nbsp;: Deno&euml;l. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">BAUMAN Zigmun, 2013, La<i> vie liquide</i>, Paris, Fayard</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">BENJAMIN Walter, &laquo;&nbsp;L&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art &agrave; l&rsquo;&eacute;poque de sa reproductibilit&eacute; technique&nbsp;&raquo;, <i>&OElig;uvre III</i>, Paris, Gallimard, 2000, pp. 268-316. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">DEDOMON, Claude, &laquo; L&rsquo;art contemporain face &agrave; la logique marchande dans <i>La carte et le territoire</i> de Michel Houellebecq &raquo;, in <i>Revue italienne d&rsquo;&eacute;tudes fran&ccedil;aises</i> [En ligne], 5 | 2015, mis en ligne le 15 d&eacute;cembre 2015, consult&eacute; le 15 d&eacute;cembre 2015. URL : http://rief.revues.org/1046.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">DELEUZE Gilles, 2002, <i>Francis Bacon. Logique de la sensation</i>. Paris : Seuil.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">HEYVAERTS Catherine, 2016, &laquo; Deleuze ; Faire respirer la vie figurative en soi ; Le Diagramme comme d&eacute;figuration des clich&eacute;s dans la Logique de la sensation de Gilles Deleuze &raquo;. <i>Philopsis</i>. Juin 2016 http://www.philopsis.fr. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:" timesnewroman=""><span style="color:black">HOUELLEBECQ Michel, 2010, <i>La carte et le territoire</i>. Paris : Flammarion, </span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">LARDELLIER Pascal, 1997, &laquo; L&rsquo;image incarn&eacute;e, une g&eacute;n&eacute;alogie du portrait politique &raquo;, in Mei &laquo; M&eacute;diation et Information &raquo; n&deg;7, pp. 26-42</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">LE GUILLOU Philippe, 2014, <i>Les ann&eacute;es insulaires</i>. Paris&nbsp;: Gallimard.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">LIPOVETSKY Gilles et SERROY Jean, 2013, <i>L&#39;esth&eacute;tisation du monde. Vivre &agrave; l&#39;&acirc;ge du capitalisme artiste</i>, Paris, &Eacute;d. Gallimard, </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">LOUVEL Liliane, 1998, <i>L&rsquo;&oelig;il du texte</i>, <a name="_Hlk172117688">Toulouse, P.U. du Mirail</a>. &nbsp;</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">MOLINIE Georges, 1997, <i>Dictionnaire de rh&eacute;torique</i>, Paris, Le Livre de Poche.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">PINELLI Antonio et alli, &laquo;&nbsp;Le portrait du roi : entre art, histoire, anthropologie et s&eacute;miologie&nbsp;&raquo;,&nbsp; <i>Perspective</i> [Online], 1 | 2012, Online erschienen am: 30 Dezember 2013, abgerufen am 01 Juli 2024. URL: http://journals.openedition.org/perspective/423; DOI: https://doi.org/10.4000/perspective.423</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">RANCIERE Jacque, 2000, <i>Le partage du sensible</i>, Paris, La fabrique. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">RUFFEL Lionel, 2012, &laquo; Un r&eacute;alisme contemporain : les narrations documentaires &raquo;, in <i>Litt&eacute;rature</i> 2012/2 (n&deg;166), pp. 13 &agrave; 25</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">THOREL-CAILLETEAU Sylvie, 2011, <i>Fictions du savoir, savoirs de la fiction</i>. Paris&nbsp;: PUF.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">VAN WESEMAEL Sabine &laquo; PENSER LA NARRATIVIT&Eacute; CONTEMPORAINE : <i>La Carte et le territoire</i>, formidable autoportrait de l&rsquo;&eacute;crivain Michel Houellebecq &raquo;, in <i>RELIEF</i> &ndash; Revue &eacute;lectronique de litt&eacute;rature fran&ccedil;aise 12 (1), 2018, p. 68-85 DOI: doi.org/10.18352/relief.989 ISSN: 1873-5045 &ndash; URL: www.revue-relief.org</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:106%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">VOUILLOUX Bernard, 2018, <i>Image et m&eacute;dium. Sur une hypoth&egrave;se de Pascal Quignard</i>. Paris&nbsp;: Les belles Lettres.</span></span></span></span></span></p> <div>&nbsp; <hr align="left" size="1" width="33%" /> <div id="ftn1"> <p class="MsoFootnoteText"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1" style="color:#0563c1; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:106%"><span calibri="" style="font-family:">[1]</span></span></span></span></span></a> On lira &agrave; profit <span style="font-family:" timesnewroman=""><span style="color:black">Liliane Louvel, 1998, &nbsp;<i>L&rsquo;&oelig;il du texte,</i></span></span> <span style="font-family:" timesnewroman=""><span style="color:black">Toulouse, P.U. du Mirail.<i> </i>&nbsp;pour plus de precisions sur ces notions.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn2"> <p class="MsoFootnoteText"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2" style="color:#0563c1; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:106%"><span calibri="" style="font-family:">[2]</span></span></span></span></span></a> Voir &laquo; LE MAG&rsquo;, LITT&Eacute;RATURE &raquo; LE MAG &ndash; Pompidou, Paris et modernit&eacute; : rencontre avec Philippe Le Guillou, &eacute;crivain. 19 f&eacute;vrier 2014, <a href="https://www.lapeniche.net/pompidou-paris-et-modernite-rencontre-avec-philippe-le-guillou-ecrivain/" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">https://www.lapeniche.net/pompidou-paris-et-modernite-rencontre-avec-philippe-le-guillou-ecrivain/</a> </span></span></p> </div> </div>