<p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><strong>Les artistes italiens face &agrave; la Grande Guerre</strong></span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:right"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Marco falceri, CRISES <a name="_Hlk504748860">&ndash;</a> EA 4424, Universit&eacute; Paul-Val&eacute;ry (Montpellier)</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><strong>Pr&eacute;misses historiques et questions de m&eacute;thode&nbsp; </strong></span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Voir et penser les images de l&rsquo;art face &agrave; Grande Guerre n&eacute;cessite un effort de compr&eacute;hension, ainsi qu&rsquo;une r&eacute;flexion sur leur statut testimonial. Les singularit&eacute;s d&rsquo;un &eacute;v&eacute;nement fondateur de l&rsquo;histoire contemporaine am&egrave;nent &agrave; s&rsquo;interroger sur les sp&eacute;cificit&eacute;s formelles, techniques et stylistiques des images. Selon une approche moins iconographique que cartographique et statistique, nous &eacute;tudierons les pratiques et les mani&egrave;res de la cr&eacute;ation artistique en temps de guerre, au but de relever par quels moyens et dans quels espaces se situent les exp&eacute;riences combattantes des artistes italiens. En r&egrave;gle g&eacute;n&eacute;rale, ils sont mobilis&eacute;s ou s&rsquo;engagent comme volontaires sur le front occidental du sud, pendant quarante-deux mois, entre fin mai 1915 et d&eacute;but novembre 1918. &Agrave; l&rsquo;exception de quelques rares cas d&rsquo;artistes italiens transplant&eacute;s &agrave; l&rsquo;&eacute;tranger qui s&rsquo;enr&ocirc;lent dans l&rsquo;arm&eacute;e fran&ccedil;aise, ils ne combattent pas sur les fronts franco-allemand ou orientalo-prussien, au nord, mais sur les lignes du front italo-autrichien, lequel s&rsquo;&eacute;tend entre les Alpes orientales et l&rsquo;aire c&ocirc;ti&egrave;re de la p&eacute;ninsule balkanique.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Tout d&rsquo;abord, nous faisons un choix d&rsquo;ordre m&eacute;thodologique entre les artistes que nous identifions comme des &laquo;&nbsp;combattants&nbsp;&raquo;, lesquels par leurs &oelig;uvres restituent les r&eacute;alit&eacute;s du conflit auquel participent, et ceux qui s&rsquo;en inspirent seulement en tant que th&egrave;me ou motif iconographique. Seuls les premiers montrent les sc&egrave;nes r&eacute;elles et symboliques de la guerre&nbsp;moderne et industrielle, alors que les seconds en font uniquement une interpr&eacute;tation filtr&eacute;e, voire une abstraction conceptuelle. Ainsi, dans quelles circonstances sociales et &agrave; travers quelles po&eacute;tiques visuelles les arts de l&rsquo;image t&eacute;moignent-ils de l&rsquo;exp&eacute;rience combattante&nbsp;? L&rsquo;interrogation du statut de la cr&eacute;ation artistique en temps de guerre exige une &eacute;tude engag&eacute;e au double sens historique et heuristique du terme, puisqu&rsquo;images m&eacute;canis&eacute;es et &oelig;uvres d&rsquo;art peuvent constituer des t&eacute;moignages de l&rsquo;exp&eacute;rience v&eacute;cue, de l&rsquo;exp&eacute;rience agie et subie, mais aussi les preuves d&rsquo;interactions et d&rsquo;actes de r&eacute;sistance dont la valeur est tout &agrave; la fois esth&eacute;tique et politique. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Comme dans les autres pays du monde occidental, nous constatons en Italie avant 1914 la pr&eacute;sence de milieux culturels &agrave; caract&egrave;re polycentrique et de regroupements artistiques &agrave; vocation transnationale. Les principaux centres institutionnels sont les &eacute;coles des Beaux-arts, d&rsquo;Arts appliqu&eacute;s et d&eacute;coratifs, mais surtout la Biennale de Venise. Inaugur&eacute;e en 1895, la Biennale constitue le premier centre vou&eacute; enti&egrave;rement aux expositions d&rsquo;art contemporain, organis&eacute;es selon la logique des pavillons nationaux &agrave; l&rsquo;instar des foires et des expositions universelles. En ce qui concerne les groupes artistiques, il faut mentionner en premier lieu le Futurisme, le principal mouvement de l&rsquo;avant-garde artistique italienne fond&eacute; en 1909 par l&rsquo;&eacute;crivain et intellectuel Filippo Tommaso Marinetti. On le sait, la naissance du Futurisme italien correspond &agrave; la souscription collective du manifeste, un document r&eacute;dig&eacute; par Marinetti en langue fran&ccedil;aise et publi&eacute; en premi&egrave;re page sur le quotidien <em>Le Figaro </em>le 20 f&eacute;vrier 1909, dont le fameux article num&eacute;ro neuf d&eacute;clare :&nbsp;&laquo;&nbsp;Nous voulons glorifier la guerre &ndash; seule hygi&egrave;ne du monde &ndash; le militarisme, le patriotisme, le geste destructeur des anarchistes, les belles id&eacute;es qui tuent, et le m&eacute;pris de la femme&nbsp;&raquo; <a href="#_ftn1" name="_ftnref1" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[1]</span></span></a>. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">D&egrave;s 1910, les artistes visuels, les &eacute;crivains et les musiciens r&eacute;unis autour de Marinetti publient &agrave; peu pr&egrave;s deux cents ouvrages, manifestes et textes cr&eacute;atifs, o&ugrave; le motif de l&rsquo;apologie du conflit arm&eacute; va de pair avec la lutte contre le pass&eacute;isme&nbsp;et l&rsquo;exaltation de la jeunesse virile et cr&eacute;atrice. La glorification de la guerre moderne, &agrave; la fois concr&egrave;te et imaginaire, domine th&eacute;matiquement le discours du manifeste fondateur, et rev&ecirc;t non seulement une valeur intrins&egrave;que d&rsquo;ordre esth&eacute;tique et &eacute;pist&eacute;mologique, en tant que &laquo;&nbsp;guerre des id&eacute;es&nbsp;&raquo;&nbsp;con&ccedil;ue au sens vitaliste de Nietzsche ou spiritualiste de Bergson, mais &eacute;galement une valeur extrins&egrave;que qui devient ex&eacute;g&eacute;tique lorsqu&rsquo;on interpr&egrave;te les &oelig;uvres&nbsp;: le mot <em>guerre</em> exprimerait ainsi, dans le lexique futuriste, l&rsquo;intention commune de b&acirc;tir, sur les tribunes du politique tout autant que sur les champs de bataille, un projet &agrave; son tour progressiste et expansionniste, en vue d&rsquo;&eacute;largir les fronti&egrave;res nationales en parachevant ainsi le processus d&rsquo;unification italienne&nbsp;entam&eacute; en 1861, par l&rsquo;occupation et la conqu&ecirc;te des villes de Trento, Bolzano, Trieste et Gorizia. Au niveau g&eacute;opolitique, les futuristes se proposent d&rsquo;atteindre une nouvelle configuration de la soci&eacute;t&eacute; italienne, d&eacute;livr&eacute;e du poids d&rsquo;institutions s&eacute;culaires comme l&rsquo;acad&eacute;mie, la monarchie parlementaire et l&rsquo;&eacute;glise, en souhaitant un &eacute;largissement des fronti&egrave;res linguistiques et culturelles du pays vers le nord-est. Marinetti s&rsquo;engage en 1912 pour le quotidien fran&ccedil;ais <em>L&rsquo;Intransigeant</em> comme reporter dans la guerre italo-turque. Depuis l&rsquo;&eacute;t&eacute; 1914, la d&eacute;claration de guerre de l&rsquo;Allemagne &agrave; la France ravive toujours davantage l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t des artistes d&rsquo;avant-garde pour le combat et la lutte sociale. Ainsi Marinetti et ses compagnons encouragent les soul&egrave;vements des &eacute;tudiants et des travailleurs interventionnistes &agrave; Milan, en organisant des manifestations patriotiques lorsqu&rsquo;ils publient des manifestes sur la revue <em>Lacerba </em>(1913-1915). </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">&Agrave; travers ces prises de position politiques radicales en faveur de l&rsquo;interventionnisme, parfois d&eacute;bouch&eacute;es en arrestations, et qui r&eacute;clament une n&eacute;cessit&eacute; de rupture avec le pouvoir monarchique et les trait&eacute;s des alliances g&eacute;ostrat&eacute;giques et diplomatiques, on peut noter l&rsquo;&eacute;mergence d&rsquo;un comportement ainsi que d&rsquo;un message de caract&egrave;re &eacute;litiste. Si &agrave; l&rsquo;entr&eacute;e de l&rsquo;Italie en guerre, les futuristes br&ucirc;lent et d&eacute;chirent les drapeaux autrichiens en criant contre leurs compatriotes pass&eacute;istes &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur des th&eacute;&acirc;tres et dans les places italiennes, puis partagent dans la revue <em>L&rsquo;Italia Futurista</em> (1916-1918) la contestation de l&rsquo;h&eacute;g&eacute;monie culturelle des empires centraux<a href="#_ftn2" name="_ftnref2" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[2]</span></span></a>, en revanche ils poursuivent d&egrave;s 1929 un travail d&rsquo;historicisation de la mouvance en participant &agrave; l&rsquo;entreprise de l&rsquo;encyclop&eacute;die italienne promue par l&rsquo;acad&eacute;mie du r&eacute;gime fasciste et, d&egrave;s 1926, aux expositions du pavillon national de la Biennale.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Mais outre les futuristes, on reconna&icirc;t aussi en Italie la pr&eacute;sence de regroupements artistiques mineurs et moins consacr&eacute;s. Alors que les centres de rayonnement du Futurisme restent principalement les villes de Milan, o&ugrave; &oelig;uvrent Marinetti et les peintres Umberto Boccioni et Carlo Carr&agrave;, de Paris, o&ugrave; depuis 1906 Gino Severini r&eacute;side de mani&egrave;re stable, et de Rome, o&ugrave; op&egrave;re dans son atelier le doyen du groupe Giacomo Balla, ces regroupements d&rsquo;artistes visuels sont actifs notamment &agrave; Florence, Venise, Bologne et Ferrare. &Agrave; ce propos, les historiens de l&rsquo;art moderne et contemporain parlent d&rsquo; &laquo;&nbsp;expressionnisme italien&nbsp;&raquo; et de &laquo;&nbsp;peinture m&eacute;taphysique&nbsp;&raquo;<a href="#_ftn3" name="_ftnref3" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[3]</span></span></a>. Voici comment se configurent les trois sc&egrave;nes principales de la cartographie g&eacute;opolitique des avant-gardes artistiques italiennes &agrave; la veille du premier conflit mondial. Ces tendances c&ocirc;toient et d&eacute;fient les organisations d&rsquo;artistes et d&rsquo;illustrateurs issus des Beaux-arts. Si les futuristes occupent sans doute la premi&egrave;re place, en organisant conf&eacute;rences et expositions individuelles et collectives &agrave; Paris comme &agrave; Berlin, &agrave; Londres comme en Russie, en m&ecirc;me temps s&rsquo;affirment des groupes et des mouvements mineurs, mais n&eacute;anmoins connect&eacute;s au r&eacute;seau international des avant-gardes historiques&nbsp;: il s&rsquo;agit d&rsquo;artistes qui naissent presque tous autour des ann&eacute;es 1880-1890, lesquels appartiennent &agrave; la m&ecirc;me g&eacute;n&eacute;ration que les futuristes, bien qu&rsquo;ils se fassent les porte-parole&nbsp;d&rsquo;autres po&eacute;tiques visuelles, qui ne s&rsquo;expriment pas seulement au nom de l&rsquo;avenir, mais aussi de l&rsquo;angoisse existentielle ou de l&rsquo;ac&eacute;die morale. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Les expressionnistes italiens n&rsquo;auront pas eu, &agrave; l&rsquo;instar de ce que soutient le critique et historien de l&rsquo;art contemporain Renato Barilli, leur propre texte programmatique ou un manifeste fondateur<a href="#_ftn4" name="_ftnref4" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[4]</span></span></a>. Cependant, ces artistes qui sont pour la plupart sortis sans dipl&ocirc;me des &eacute;coles des Beaux-arts se r&eacute;unissent autour de mus&eacute;es ou de galeries, publient leurs &eacute;crits dans les revues d&rsquo;opinion. Ils exposent durant les ann&eacute;es 1910 &agrave; Venise, non &agrave; la Biennale parce que souvent ils ne sont pas admis, mais &agrave; Ca&rsquo; Pesaro, aupr&egrave;s le palais de la fondation Bevilacqua-La Masa, o&ugrave; ils sont soutenus par des jeunes critiques d&rsquo;art tels que Nino Barbantini, Gino Damerini et Vittorio Pica, ou m&ecirc;me &agrave; Florence, l&agrave; o&ugrave; ils trouvent l&rsquo;appui d&rsquo;&eacute;crivains et philosophes aupr&egrave;s des r&eacute;dactions des revues culturelles, telles que <em>Leonardo</em> (1903-1907) de Giovanni Papini ou <em>La Voce </em>(1908-1916) de Papini et Giuseppe Prezzolini. Quant &agrave; la&nbsp;peinture m&eacute;taphysique, elle a &eacute;t&eacute; con&ccedil;ue dans la m&ecirc;me p&eacute;riode &agrave; Florence par l&rsquo;artiste d&rsquo;origine grecque Giorgio De Chirico, pr&eacute;sent&eacute;e &agrave; Paris entre 1912 et 1913 au Salon d&rsquo;Automne, enfin th&eacute;matis&eacute;e avec des articles publi&eacute;s dans la revue de l&rsquo;&eacute;diteur Mario Broglio, <em>Valori Plastici</em> (1918-1922), qui alors est engag&eacute; dans une r&eacute;&eacute;valuation critique et id&eacute;ologique des &laquo;&nbsp;classiques&nbsp;&raquo; de l&rsquo;art moderne. D&rsquo;autres artistes peuvent s&rsquo;inscrire dans ce mouvement, parmi lesquels Carlo Carr&agrave;, Mario Sironi, Felice Casorati, Filippo De Pisis et Giorgio Morandi, qui &agrave; la diff&eacute;rence de De Chirico proviennent ou transitent presque tous du Futurisme. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><strong>1. La mobilisation g&eacute;n&eacute;rale </strong></span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Nous pourrions d&eacute;signer le premier conflit mondial comme l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement qui a fait &eacute;clater la culture visuelle des avant-gardes &laquo;&nbsp;historiques&nbsp;&raquo;. Faisant partie du Futurisme ou pas, la plupart des artistes italiens sont mobilis&eacute;s ou s&rsquo;engagent comme volontaires dans l&rsquo;arm&eacute;e. Parmi les cubistes, les fauves et les surr&eacute;alistes fran&ccedil;ais, Georges Braque, Andr&eacute; Derain, Fernand L&eacute;ger, Andr&eacute; Masson et les deux fr&egrave;res Jacques Villon et Raymond Duchamp-Villon combattent au front. Il en va de m&ecirc;me pour les Britanniques, les Am&eacute;ricains et les Canadiens, parmi lesquels Wyndham Lewis, David Bomberg et Christopher Nevinson s&rsquo;engagent dans les corps exp&eacute;ditionnaires, tous issus du Vorticisme. En Allemagne et en Autriche-Hongrie, un nombre consid&eacute;rable d&rsquo;artistes combattent au front, comme les expressionnistes Otto Dix, Max Ernst, L&aacute;szl&oacute; Moholy-Nagy et Oskar Kokoschka. En Russie, o&ugrave; les avant-gardes des ann&eacute;es 1910 s&rsquo;appellent Cube-futurisme&nbsp;dans les arts plastiques et Constructivisme&nbsp;en architecture, Kazimir Malevitch, Michail Larionov, Pavel Filonov et Vladimir Burliuk sont envoy&eacute;s sur le front oriental, en Pologne et en Roumanie. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">En ce qui concerne les circonstances de l&rsquo;enr&ocirc;lement des artistes italiens, pour la majorit&eacute; signent leur engagement volontaire dans l&rsquo;arm&eacute;e de terre, entre fin mai 1915 et l&rsquo;automne 1916. Nombre d&rsquo;entre eux s&rsquo;enr&ocirc;lent aussi dans la marine, dans l&rsquo;aviation ou dans la Croix-Rouge. Cela ne veut pas dire, comme peut le sugg&eacute;rer une lecture simplificatrice des faits militaires, qu&rsquo;ils aient d&ucirc; affronter le conflit de mani&egrave;re h&eacute;ro&iuml;que, en empoignant les armes pour se lancer dans le combat au corps-&agrave;-corps. &Agrave; l&rsquo;inverse, face &agrave; la puissance de feu de l&rsquo;artillerie, qui &agrave; l&rsquo;&eacute;poque se modernise avec les chars et les armes chimiques, les soldats de l&rsquo;arm&eacute;e de terre et en particulier les fantassins constituent la part majoritaire des victimes sur les champs de bataille. Sur un &eacute;chantillonnage de quarante-sept trajectoires biographiques &eacute;tudi&eacute;es, hormis quelques pilotes et marins, presque tous int&egrave;grent, lors de la mobilisation g&eacute;n&eacute;rale, dans les r&eacute;giments d&rsquo;infanterie, avec un &acirc;ge moyen qui se situe entre vingt-huit et trente-deux ans, et selon deux modalit&eacute;s d&rsquo;affectation distinctes&nbsp;: d&rsquo;une part, il y a les soldats ou les officiers qui s&rsquo;engagent volontairement&nbsp;; et d&rsquo;autre part, ceux qui sont mobilis&eacute;s en tant que soldats de classe puisqu&rsquo;en service actif pour le contingent ou, car ils ont effectu&eacute; le service militaire. Fin mai 1915, les futuristes italiens (Filippo Tommaso Marinetti, Umberto Boccioni, Antonio Sant&rsquo;Elia, Mario Sironi, Achille Funi, Carlo Erba, Anselmo Bucci, Luigi Russolo et Ugo Piatti) s&rsquo;engagent volontaires tous ensemble dans le bataillon <em>V.C.A.</em> (Volontaires Cyclistes et Automobilistes), puis en d&eacute;cembre sont r&eacute;form&eacute;s ou remobilis&eacute;s aupr&egrave;s d&rsquo;autres unit&eacute;s combattantes. D&rsquo;autres artistes, parmi lesquels certains sont quasiment m&eacute;connus des histoires g&eacute;n&eacute;rales de l&rsquo;art, s&rsquo;enr&ocirc;lent comme volontaires ou sont mobilis&eacute;s dans les r&eacute;giments des alpins, des bersagliers, des carabiniers, ou m&ecirc;me dans le corps d&rsquo;&eacute;lite des <em>arditi</em>.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">D&egrave;s lors, il nous faut ajouter d&rsquo;autres donn&eacute;es relatives &agrave; l&rsquo;enr&ocirc;lement des artistes. Nous avons constat&eacute; qu&rsquo;ils sont mobilis&eacute;s, pour la plupart, au sein des unit&eacute;s d&rsquo;infanterie et deuxi&egrave;mement d&rsquo;artillerie. Or, certains d&rsquo;entre eux entament aussi une progression dans leur carri&egrave;re militaire, en obtenant les grades de sergent, sous-lieutenant et lieutenant. Lorsqu&rsquo;ils re&ccedil;oivent une promotion de rang ou une mutation d&rsquo;emploi, en rejoignant ainsi un poste moins expos&eacute; face au danger, ils peuvent trouver une place dans les bureaux de la propagande, dans les fabriques de munitions ou dans les industries du camouflage militaire, &agrave; moins qu&rsquo;ils n&rsquo;&oelig;uvrent comme peintres-reporter dans les missions organis&eacute;es par l&rsquo;&eacute;tat-major<a href="#_ftn5" name="_ftnref5" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[5]</span></span></a>. Depuis novembre 1917, &agrave; la suite de la d&eacute;faite italienne lors de la bataille de Caporetto, les dessinateurs les plus ing&eacute;nieux et vou&eacute;s &agrave; la caricature, tels que le peintre et &eacute;crivain Ardengo Soffici et le futuriste penchant vers l&rsquo;expressionnisme Mario Sironi, sont employ&eacute;s comme directeurs artistiques dans les r&eacute;dactions des journaux de tranch&eacute;e<a href="#_ftn6" name="_ftnref6" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[6]</span></span></a>. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Les enqu&ecirc;tes relatives &agrave; l&rsquo;exp&eacute;rience collective des futuristes ont &eacute;t&eacute; r&eacute;cemment entreprises par les artistes &laquo;&nbsp;plasticiens&nbsp;&raquo; Dario Bellini et Roberto Floreani et le critique d&rsquo;art Luigi Sansone. &Agrave; la d&eacute;claration de guerre de l&rsquo;Italie &agrave; l&rsquo;Autriche-Hongrie et &agrave; l&rsquo;Allemagne, ils s&rsquo;enr&ocirc;lent dans le 32<sup>e</sup> bataillon motoris&eacute; &laquo;&nbsp;Volontaires Cyclistes et Automobilistes&nbsp;&raquo; (<em>V.C.A.</em>), une unit&eacute; paramilitaire de l&rsquo;infanterie, en signant leur engagement au bureau de recrutement de Milan<a href="#_ftn7" name="_ftnref7" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[7]</span></span></a>. Le 21 juillet, le bataillon part pour rejoindre le front occidental o&ugrave; il re&ccedil;oit le 12 octobre l&rsquo;ordre d&rsquo;offensive. Plus tard, le 14 octobre, les soldats atteignent les tranch&eacute;es en montant en premi&egrave;re ligne et y restent jusqu&rsquo;au 25 octobre, en passant au total onze jours sous le feu, dans la localit&eacute; de montagne de Dosso Casina, situ&eacute;e &agrave; pic sur le lac de Garda, sur le mont Baldo, dans la r&eacute;gion du Trentino Alto-Adige. Le quotidien sportif national<em> La Gazzetta dello Sport</em> ainsi que l&rsquo;hebdomadaire <em>La Domenica del Corriere</em> documentent cette exp&eacute;rience, &agrave; travers la publication de t&eacute;moignages et de photographies<a href="#_ftn8" name="_ftnref8" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[8]</span></span></a>. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Durant la p&eacute;riode pass&eacute;e dans la caserne de Gallarate (Milan), entre le 31 mai et le 20 juillet 1915, le groupe organise deux soir&eacute;es au th&eacute;&acirc;tre communal (<em>Teatro Condominio</em>), non loin de leur caserne. Il s&rsquo;agit de spectacles au b&eacute;n&eacute;fice des familles de soldats mobilis&eacute;s organis&eacute;s par la Croix-Rouge, qui ont eu lieu les 5 et 14 juillet. Entre les exercices de tir et les courses &agrave; v&eacute;lo, les futuristes d&eacute;dient leur temps aux activit&eacute;s cr&eacute;atives, pour ne pas dire r&eacute;cr&eacute;atives<em>. </em>Une photographie (Fig. 1) du groupe publi&eacute;e par Luigi Sansone t&eacute;moigne de l&rsquo;un de ces moments vou&eacute;s &agrave; la pratique picturale<a href="#_ftn9" name="_ftnref9" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[9]</span></span></a>. Les futuristes, parmi lesquels le peintre Carlo Erba qui figure au centre de la salle, debout, ont con&ccedil;u et r&eacute;alis&eacute;, gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;aide d&rsquo;amateurs dont un gar&ccedil;on qui regarde fi&egrave;rement vers l&rsquo;objectif de l&rsquo;appareil, en tenant un pinceau &agrave; la main, deux frises picturales qui fusionnent inscriptions et figurations simultan&eacute;istes, o&ugrave; l&rsquo;on aper&ccedil;oit les portraits caricaturaux des officiers du bataillon, une bicyclette et des &eacute;tendards de la Croix-Rouge qui se multiplient &agrave; la verticale. Que l&rsquo;inscription du num&eacute;ro huit et du nom propre de Marinetti fasse directement allusion au point du manifeste du futurisme &laquo;&nbsp;Nous sommes sur le promontoire extr&ecirc;me des si&egrave;cles&nbsp;!... (&hellip;)&nbsp;&raquo;<a href="#_ftn10" name="_ftnref10" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[10]</span></span></a>&nbsp;? Nous pouvons seulement en avancer l&rsquo;hypoth&egrave;se. Pour autant, dans une lettre de Marinetti dat&eacute;e du 5 juillet 1915, envoy&eacute;e au po&egrave;te suisse initiateur du mouvement Dada, Hugo Ball, on peut entendre les &eacute;chos d&rsquo;un moment d&rsquo;&eacute;change et de ferveur cr&eacute;atrice au sein de la mouvance, qui &eacute;claire les dimensions g&eacute;ographiques autant que g&eacute;opolitiques des avant-gardes artistiques de l&rsquo;&eacute;poque : </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt">Mon cher confr&egrave;re, </span></span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt">Voici des po&eacute;sies futuristes parmi les plus avanc&eacute;es. Nous ne pouvons pas vous donner des vers libres, &eacute;tant donn&eacute; que le vers libre n&rsquo;a plus aujourd&rsquo;hui raison d&rsquo;&ecirc;tre pour nous. Je vous envoie donc des mots en libert&eacute;, d&rsquo;un lyrisme absolu, d&eacute;livr&eacute; de toute prosodie et de toute syntaxe. Je tiens absolument &agrave; ce que le futurisme soit repr&eacute;sent&eacute; dans votre int&eacute;ressante anthologie par des &oelig;uvres vraiment futuristes<a href="#_ftn11" name="_ftnref11" title=""><span style="font-size:11.0pt"><span style="color:black">[11]</span></span></a>. </span></span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">L&rsquo;air du temps, selon Marinetti et ses compagnons, favorise l&rsquo;exp&eacute;rimentation autant visuelle que verbale d&rsquo;un &laquo;&nbsp;lyrisme absolu&nbsp;&raquo;, mais sans se soumettre aux contraintes mat&eacute;rielles de la m&eacute;trique classique (<em>m&eacute;tron</em>) ou recourir aux licences modernistes du vers-librisme (<em>rythmos</em>). De ce fait, l&rsquo;embrasement du conflit permet aux futuristes de rejouer a fortiori les th&egrave;mes originaux des sons et des bruits en peinture, comme en musique et en litt&eacute;rature. Ainsi, dans cet &eacute;change intellectuel avec le futur fondateur du Dada&iuml;sme zurichois, Marinetti commence &agrave; envisager le projet de composer une anthologie collective des &laquo;&nbsp;mots en libert&eacute; &raquo;, qui para&icirc;tra seulement en 1919<a href="#_ftn12" name="_ftnref12" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[12]</span></span></a>, &agrave; la suite de publications individuelles dans les revues. Pour le groupe des futuristes italiens, la mobilisation g&eacute;n&eacute;rale se pr&eacute;sente d&rsquo;une part comme l&rsquo;occasion de confirmer les prises de position politiques en faveur de l&rsquo;interventionnisme, et d&rsquo;autre part comme la chance de poursuivre une nouvelle promotion de la mouvance en termes commerciaux. Mais plut&ocirc;t que de faire de la propagande par les images, ils se donnent une ligne &eacute;ditoriale novatrice selon une exigence d&rsquo;autopromotion du mouvement. Le conflit est aussi une affaire de design<em> </em>commercial, graphique et publicitaire<a href="#_ftn13" name="_ftnref13" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[13]</span></span></a>.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Un portrait-photo de Marinetti en soldat et de l&rsquo;excentrique po&egrave;te &laquo;&nbsp;national&nbsp;&raquo; Gabriele D&rsquo;Annunzio, pris entre septembre et octobre 1915 sur le front, constitue un t&eacute;moignage fascinant de la veille des combats auxquels les futuristes prennent part<a href="#_ftn14" name="_ftnref14" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[14]</span></span></a>. Dans cette photographie rest&eacute;e in&eacute;dite &agrave; l&rsquo;&eacute;poque, on reconna&icirc;t entre les deux personnalit&eacute;s comme un lien de filiation, de r&eacute;ciprocit&eacute;, mais aussi de proximit&eacute; distante, voire de subordination selon la logique de la hi&eacute;rarchie militaire. Ils sont pris en pose debout et, derri&egrave;re eux, nous pouvons entrevoir un campement militaire en haute montagne, avec tentes et murets. Marinetti pose en tant que soldat ordinaire d&rsquo;infanterie, habill&eacute; en uniforme et b&eacute;ret, lorsque D&rsquo;Annunzio appara&icirc;t comme le visiteur extraordinaire de la tranch&eacute;e, en smoking noir, canne et chapeau. Ne s&rsquo;agit-il pas d&rsquo;un rapport de subordination &agrave; la fois militaire et social&nbsp;? Nous pouvons en douter puisque, au-del&agrave; des poses et des connotations vestimentaires des protagonistes, il faut observer derri&egrave;re eux la pr&eacute;sence d&rsquo;un jeune berger de montagne au chapeau, lequel n&rsquo;est autre qu&rsquo;un figurant, assis sur un muret avec ses chaussures en bois et ses v&ecirc;tements us&eacute;s. En revanche, nous ne savons pas pr&eacute;cis&eacute;ment s&rsquo;il s&rsquo;agit de quelqu&rsquo;un faisant partie de l&rsquo;entourage des hommes de troupe, ou bien de quelque membre de la troupe d&rsquo;op&eacute;rateurs cin&eacute;-photographiques qui suivent le bataillon. La jambe et le pied droit de D&rsquo;Annunzio reposent sur une pierre de construction et en obstruent la vision, lorsque le berger s&rsquo;avance en regardant vers l&rsquo;objectif de l&rsquo;appareil. Ainsi, il s&rsquo;interpose entre les deux personnages qui figurent au premier plan, en &eacute;voquant les hommes ordinaires qui combattent pour l&rsquo;arm&eacute;e italienne, pour la plupart des paysans et des ouvriers, alors que Marinetti et notamment D&rsquo;Annunzio embl&eacute;matisent l&rsquo;engagement des artistes et des intellectuels publiquement consacr&eacute;s. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Les activit&eacute;s des artistes dans les casernes et dans les unit&eacute;s de garnison sont encore peu &eacute;tudi&eacute;es, alors que les sc&egrave;nes de la camaraderie restituent le temps du quotidien avant m&ecirc;me que celui de la mythologie guerri&egrave;re. Par ailleurs, dans ces territoires et b&acirc;timents &eacute;tatiques qui aujourd&rsquo;hui se trouvent souvent d&eacute;saffect&eacute;s, avec des murs fissur&eacute;s et des charpentes obsolescentes, les soldats font face &agrave; la discipline et connaissent tr&egrave;s souvent pour la premi&egrave;re fois le dispositif et la hi&eacute;rarchie militaire. Or, les &oelig;uvres d&rsquo;art comme les images m&eacute;canis&eacute;es, notamment celles de la photographie, en &eacute;tant des objets sociaux&nbsp;qui demandent &agrave; &ecirc;tre identifi&eacute;s et interpr&eacute;t&eacute;s, peuvent toutefois nous permettre la restitution des exp&eacute;riences que les hommes ont v&eacute;cues en franchissant ces espaces tr&egrave;s souvent confin&eacute;s aux marges de notre existence quotidienne. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Par exemple, nous avons r&eacute;cemment red&eacute;couvert, &agrave; Vicence, &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur de l&rsquo;ancien monast&egrave;re b&eacute;n&eacute;dictin de Saint-Sylvestre, devenu une caserne des alpins &agrave; la fin du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, des fresques de Gino Rossi qui datent de la p&eacute;riode de son enr&ocirc;lement militaire. Rossi est un peintre expressionniste n&eacute; &agrave; Venise qui, en janvier 1916, s&rsquo;engage volontaire comme soldat d&rsquo;infanterie &agrave; l&rsquo;&acirc;ge de trente-deux ans. Au cours des travaux de restauration de l&rsquo;ancienne caserne ont r&eacute;apparu, en dessous de la couche de cr&eacute;pi du mur de la vieille sacristie, ses fresques dont l&rsquo;&eacute;tat de conservation semble malgr&eacute; tout &laquo;&nbsp;d&eacute;finitivement compromis&nbsp;&raquo; <a href="#_ftn15" name="_ftnref15" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[15]</span></span></a>. En effet, on ne voit pas une distinction nette entre les trac&eacute;s des figures et le fond, puisque la poussi&egrave;re et le vernis recouvrent en grande partie l&rsquo;espace de la composition picturale. Il s&rsquo;agit d&rsquo;une sc&egrave;ne de bal dans laquelle un soldat et une femme virevoltent en s&rsquo;embrassant. &Agrave; c&ocirc;t&eacute;, un soldat joue de la clarinette et un second de la guitare. En d&eacute;pit de l&rsquo;&eacute;tat pr&eacute;caire de conservation de la fresque, la douceur de la sc&egrave;ne est frappante&nbsp;: lorsque le soldat jouant de la clarinette est assoupi, avec la t&ecirc;te inclin&eacute;e et les yeux ferm&eacute;s, son compagnon se jette sur la femme pour l&rsquo;embrasser, &agrave; tel point qu&rsquo;il para&icirc;t perdre l&rsquo;&eacute;quilibre ainsi que son b&eacute;ret. Apr&egrave;s avoir pass&eacute; une p&eacute;riode de service dans les casernes &agrave; V&eacute;rone et &agrave; Vicence, Rossi prend part depuis 1917 aux combats dans la bataille de l&rsquo;Isonzo, quand il est fait prisonnier et d&eacute;port&eacute; dans un camp &agrave; Rastatt (Bade-Wurtemberg), en Allemagne. Lib&eacute;r&eacute; apr&egrave;s l&rsquo;armistice, il retourne &agrave; Ciano del Montello (Tr&eacute;vise) o&ugrave; il retrouve son atelier d&eacute;moli et la plupart de ses &oelig;uvres dispers&eacute;es.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Lorenzo Viani, peintre et &eacute;crivain expressionniste n&eacute; &agrave; Viareggio (Lucques), s&rsquo;engage volontaire comme artilleur le 26 juillet 1916, &agrave; l&rsquo;&acirc;ge de trente-quatre ans. Il peint avant de se rendre au front <em>La caserne de Saint-Benin</em> (1916, huile sur carton, collection priv&eacute;e) (Fig. 2), une composition de sc&egrave;nes burlesques qui se d&eacute;roulent dans les vieilles casernes du port de G&ecirc;nes. Ces &eacute;difices n&rsquo;existent plus, car ils ont &eacute;t&eacute; d&eacute;truits en 1930, dans le cadre de travaux publics pour le renouvellement du quartier portuaire. Dans ce tableau qui fusionne inscriptions et figurations, on remarque en haut une sc&eacute;nette qui se d&eacute;roule en plein air, dans la cour de la caserne, o&ugrave; les soldats sont au garde &agrave; vous ou au repos face &agrave; leurs officiers&nbsp;; et en bas, on aper&ccedil;oit quatre sc&eacute;nettes distinctes qui nous montrent les divers endroits situ&eacute;s &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur de la caserne&nbsp;: l&rsquo;infirmerie, le bureau administratif de la compagnie, la cantine, o&ugrave; le chef de cuisine distribue le repas contenu dans une grande marmite, enfin la grande salle du dortoir, o&ugrave; les soldats dorment dans leurs lits align&eacute;s le long du mur. Viani offre une description de cette caserne aussi bien dans le conte <em>Le chiavi nel pozzo</em><a href="#_ftn16" name="_ftnref16" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[16]</span></span></a>. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Les futuristes ne sont pas les seuls artistes visuels impliqu&eacute;s sur la sc&egrave;ne de la mobilisation. Les peintres et les sculpteurs dits &laquo;&nbsp;expressionnistes&nbsp;&raquo; s&rsquo;enr&ocirc;lent aussi, alors que Giorgio De Chirico et Carlo Carr&agrave;, les deux m&eacute;taphysiciens par antonomase, s&rsquo;engagent comme volontaires dans un r&eacute;giment de r&eacute;serve (32&deg; RI), en accomplissant leur service militaire dans un h&ocirc;pital &agrave; l&rsquo;arri&egrave;re, dans la campagne de Ferrare. Entre 1916 et 1917, pendant le s&eacute;jour de Villa Seminario, De Chirico ach&egrave;ve une s&eacute;rie de toiles qu&rsquo;il d&eacute;nomme &laquo;&nbsp;int&eacute;rieurs m&eacute;taphysiques&nbsp;&raquo;<a href="#_ftn17" name="_ftnref17" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[17]</span></span></a>, tandis que Carr&agrave; d&eacute;clare en avoir r&eacute;alis&eacute; quatre intitul&eacute;es <em>Solitude</em>, <em>Chambre enchant&eacute;e</em>, <em>M&egrave;re et fils</em> et <em>Muse m&eacute;taphysique</em><a href="#_ftn18" name="_ftnref18" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[18]</span></span></a><em>. </em>Or, si nous comparons <em>La m&eacute;lancolie du d&eacute;part</em> (1916, huile sur toile) et <em>La muse m&eacute;taphysique</em> (1917, huile sur toile, Pinacoth&egrave;que de Brera, Milan), dans ces tableaux &laquo;&nbsp;pr&eacute;surr&eacute;alistes&nbsp;&raquo; rencontrons seulement de r&eacute;f&eacute;rences conceptuelles &agrave; la guerre (cartes, vexilles, cocardes, etc.). </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><strong>2. La guerre et l&rsquo;apr&egrave;s-guerre</strong></span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">D&egrave;s lors, il nous faut revenir sur les exp&eacute;riences des combats des futuristes sur le mont Baldo, dans la localit&eacute; Dosso Casina, entre le 14 et le 25 octobre 1915. Le but de l&rsquo;op&eacute;ration assign&eacute;e au bataillon est d&rsquo;atteindre les troupes des alpins en premi&egrave;re ligne, en soutien dans une man&oelig;uvre plus large, dans le cadre de la troisi&egrave;me bataille de l&rsquo;Isonzo, une s&eacute;rie d&rsquo;offensives sur le front italo-autrichien qui se terminent avec l&rsquo;avanc&eacute;e de l&rsquo;arm&eacute;e austro-hongroise. Les correspondances et les journaux intimes de Boccioni et de Marinetti, comme les souvenirs des hommes ordinaires du r&eacute;giment, &eacute;voquent &agrave; plusieurs reprises la difficult&eacute; d&rsquo;accomplir cette op&eacute;ration de raccord<a href="#_ftn19" name="_ftnref19" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[19]</span></span></a>. Face aux contingences de la &laquo;&nbsp;guerre de tranch&eacute;es&nbsp;&raquo; sur le front de montagne, o&ugrave; les combats impliquent des d&eacute;placements organis&eacute;s en altitude, des exp&eacute;ditions rapides de reconnaissance vers les forts ennemis, des tirs crois&eacute;s et des perforations de parois rocheuses afin de faire exploser les mines, mais aussi, des marches alourdies par le fardeau des &eacute;quipements et de fortes amplitudes thermiques entre le jour et la nuit, les futuristes restituent leurs exp&eacute;riences individuelles et collectives.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Dans les pages de son journal intime, Marinetti ex&eacute;cute une s&eacute;rie de dessins pr&eacute;paratoires qui peuvent &ecirc;tre mis en confrontation avec la planche illustr&eacute;e <em>Bataille &agrave; 9 &eacute;tages </em>(1915-1916, encre sur papier, Mart, Rovereto-Trente), publi&eacute;e dans l&rsquo;ouvrage collectif de 1919, le premier recueil anthologique des &laquo;&nbsp;mots en libert&eacute;s &raquo;<a href="#_ftn20" name="_ftnref20" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[20]</span></span></a> (Fig. 3). Pour sugg&eacute;rer le sens de verticalit&eacute; ainsi que la stratification g&eacute;ologique de la montagne, il la r&eacute;duit &agrave; des traits lin&eacute;aires &eacute;l&eacute;mentaires et jusqu&rsquo;aux signes minimaux du langage alphanum&eacute;rique, y compris les profils des soldats qui se transforment en chiffres (6/9) et en st&eacute;nogrammes (+/-). C&rsquo;est pourquoi selon lui le paysage des champs de bataille ne demande plus d&rsquo;assumer une prise de vue<em> </em>para-photographique ou une perspective<em> </em>picturale, par exemple, celle de la peinture traditionnelle de sc&egrave;nes de batailles. Au contraire, avec les &laquo;&nbsp;batailles de mat&eacute;riels&nbsp;&raquo; le paysage perdrait-il, une fois pour toutes, son aura esth&eacute;tique et culturelle de panorama ou de <em>veduta</em>. La planche de Marinetti exemplifie et r&eacute;sume la foisonnante production d&rsquo;&oelig;uvres futuristes au sujet iconographique du combat moderne, m&eacute;canique et industriel : assauts, charges, bombardements, explosions, etc. Il s&rsquo;agit pour l&rsquo;essentiel de croquis parmi lesquels <em>Composition de bataille</em> de Boccioni (1915, encre sur papier, collection priv&eacute;e), dessins et peintures, dont <em>Souvenir de la hutte de l&rsquo;oncle Tom </em>(1916-1918, huile sur toile, <em>idem</em>) de Anselmo Bucci et <em>Impression de bombardement nocturne</em> de Luigi Russolo (1926, huile sur toile, Pinacoth&egrave;que de Portogruaro, Venise). Et, si l&rsquo;on consid&egrave;re un autre th&eacute;&acirc;tre op&eacute;rationnel du front italo-autrichien, la zone du Col di Lana (Vicence), il faut ajouter &agrave; ce corpus iconographique <em>Paysage de bruits de guerre </em>de Fortunato Depero (1915, encre sur papier, Mart, Rovereto-Trente) et <em>Bombardement &agrave; Sasso Stria</em> de Gerardo Dottori (1916, huile sur toile, collection priv&eacute;e), qui reprennent le motif de l&rsquo;explosion aussi durant l&rsquo;apr&egrave;s-guerre, lorsqu&rsquo;en Italie se v&eacute;rifie une &eacute;trange cohabitation et une fascinante connivence entre le Futurisme d&eacute;sormais r&eacute;pandu dans toutes les provinces et les tendances esth&eacute;tiques du &laquo;&nbsp;retour &agrave; l&rsquo;ordre&nbsp;&raquo;<a href="#_ftn21" name="_ftnref21" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[21]</span></span></a>. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Dans le tableau de Russolo (Fig. 4), expos&eacute; en 1926 &agrave; la Biennale de Venise, les lignes droites et les courbes indiquent, selon une mani&egrave;re simultan&eacute;iste, les lumi&egrave;res et les bruits des explosions de shrapnels et grenades lors d&rsquo;un bombardement nocturne. Au centre de la composition, recroquevill&eacute;s dans une tranch&eacute;e situ&eacute;e au sommet d&rsquo;une montagne, trois fantassins guettent sur le vallon. Malgr&eacute; le titre de ce tableau, &eacute;voque l&rsquo;imm&eacute;diatet&eacute; des &laquo;&nbsp;impressions&nbsp;&raquo;, l&rsquo;artiste restitue l&rsquo;exp&eacute;rience poly-sensorielle du front seulement huit ans apr&egrave;s sa d&eacute;mobilisation. Il s&rsquo;agit d&rsquo;un souvenir de son exp&eacute;rience v&eacute;cue, pr&eacute;sent&eacute; dans le cadre d&rsquo;une exposition collective et internationale. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Aussi, si l&rsquo;on s&rsquo;arr&ecirc;te &agrave; examiner l&rsquo;&oelig;uvre de Achille Funi<em>, Portrait comm&eacute;moratif de Roberto Sarfatti</em> (1918, huile sur toile, collection priv&eacute;e), le fils mort &agrave; la guerre de l&rsquo;intellectuelle Margherita Sarfatti, les vestiges classiques des ruines d&rsquo;un autel romain le long du sentier de montagne &eacute;voquent une dimension m&eacute;morielle. Certes, en symbolisant aussi bien une temporalit&eacute; paradoxale. Ex&eacute;cut&eacute; pour une commande priv&eacute;e &agrave; la fin de la guerre, le tableau constitue moins un portrait de troupe qu&rsquo;une sc&egrave;ne de deuil, o&ugrave; les connotations environnementales du paysage r&eacute;invent&eacute; du fondu ne sont que les montagnes sur lesquelles Funi avait servi dans l&rsquo;arm&eacute;e, d&rsquo;abord engag&eacute; comme volontaire avec le groupe des futuristes, puis remobilis&eacute; comme lieutenant dans un r&eacute;giment de bersagliers.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Dans l&rsquo;imm&eacute;diat apr&egrave;s-guerre, &agrave; la suite de la victoire italienne et au moment de la formation des groupes r&eacute;actionnaires du <em>squadrismo </em>fasciste, qui constituent le germe pour la future naissance du parti totalitaire, m&ecirc;me les artistes en sont impliqu&eacute;s&nbsp;: Marinetti, Sironi, Funi, Russolo, Piatti, etc., &agrave; l&rsquo;instar de D&rsquo;Annunzio qui exhorte les masses &agrave; la discipline &agrave; travers la rh&eacute;torique de la &laquo;&nbsp;victoire mutil&eacute;e&nbsp;&raquo;, se trouvent en d&eacute;saccord avec les dispositions normatives du trait&eacute; de Versailles. Ainsi, ils prennent part aux parades des milices du parti &agrave; Milan, en mars 1919, o&ugrave; l&rsquo;on assiste soudain &agrave; la confluence des v&eacute;t&eacute;rans de guerre dans les rituels des &eacute;lites politiques de droite. D&rsquo;autre part, ne sont pas absents les &eacute;lans et les adh&eacute;sions des artistes comme des intellectuels &agrave; la gauche r&eacute;volutionnaire, anarchiste, communiste et internationaliste. Il faut donc accepter cette oscillation du go&ucirc;t, entre consensus et dissensus des choix, inh&eacute;rente et constitutive aux productions culturelles du contexte sociopolitique de l&rsquo;Entre-deux-guerres, marqu&eacute; par les extraditions, les exils et la r&eacute;pression op&eacute;r&eacute;e par la censure gouvernementale du r&eacute;gime fasciste<a href="#_ftn22" name="_ftnref22" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[22]</span></span></a>. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">Une &oelig;uvre qui comme celle de Funi s&rsquo;inscrit dans le contexte du &laquo;&nbsp;retour &agrave; l&rsquo;ordre&nbsp;&raquo; est <em>Le journal de guerre </em>(1922, huile sur toile, collection priv&eacute;e) d&rsquo;Albano Vitturi. En 1916, il est proche du Futurisme et s&rsquo;engage comme volontaire dans l&rsquo;infanterie, &agrave; l&rsquo;&acirc;ge de vingt-huit ans, lorsqu&rsquo;il est envoy&eacute; sur le front balkanique et participe &agrave; la campagne de Serbie. Dans ce portrait, la m&egrave;re de l&rsquo;artiste ferme les yeux, en consultant le carnet intime de dessins ex&eacute;cut&eacute;s au front par son fils, tandis qu&rsquo;en dehors de la pi&egrave;ce nous pouvons discerner, en raccourci panoramique &agrave; travers le dispositif d&rsquo;encadrement de la fen&ecirc;tre, le paysage reconstruit de la campagne italienne avec ses typiques closeries agricoles. Comme dans le cas vu pr&eacute;c&eacute;demment, il s&rsquo;agit d&rsquo;une composition savante, dont on peut relever des r&eacute;f&eacute;rences th&eacute;matiques et stylistiques &agrave; l&rsquo;art moderne, mais aussi &agrave; l&rsquo;espace prospectif de la peinture italienne du Quattrocento. Le rapprochement de ces deux &oelig;uvres exemplifie l&rsquo;ambivalence de th&egrave;mes dans les deux principales tendances esth&eacute;tiques du &laquo;&nbsp;retour &agrave; l&rsquo;ordre&nbsp;&raquo; italien&nbsp;: l&rsquo;une est vou&eacute;e &agrave; la c&eacute;l&eacute;bration &eacute;pique et monumentale des anciens combattants face &agrave; l&rsquo;industrialisation et &agrave; la nouvelle urbanisation, dont des critiques d&rsquo;art tels que Sarfatti et Massimo Bontempelli et les artistes du groupe &laquo;&nbsp;<em>Novecento</em>&nbsp;&raquo; en sont les principaux promoteurs, tandis que l&rsquo;autre pose son emphase sur l&rsquo;exaltation idyllique de la campagne rurale et du terroir.&nbsp;</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><strong>Conclusion</strong></span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black">En conclusion, dans les &oelig;uvres d&rsquo;art qui c&eacute;l&egrave;brent ou tout simplement &eacute;voquent la m&eacute;moire du conflit, les formes du souvenir ne sont pas illimit&eacute;es en raison du fait que l&rsquo;exp&eacute;rience combattante resterait chiffr&eacute;e, cod&eacute;e, c&rsquo;est-&agrave;-dire illisible et intraduisible. En capturant et en stimulant la r&eacute;flexivit&eacute;, les t&eacute;moignages artistiques des soldats demeurent au contraire variables et multiples. Pour autant, ils ne constituent pas des moments ni des sc&egrave;nes r&eacute;ductibles, par accumulation ou par juxtaposition, &agrave; une imagerie mentale ou spirituelle de la nation en armes. L&rsquo;analyse des t&eacute;moignages visuels des &eacute;v&eacute;nements de l&rsquo;histoire contemporaine comporte une d&eacute;marche interdisciplinaire, &agrave; la fois anthropologique et philologique, qui est n&eacute;cessaire pour effectuer un remontage des sc&egrave;nes sociales, des pratiques et des exp&eacute;riences sensibles, &agrave; travers l&rsquo;encha&icirc;nement de plusieurs r&eacute;gimes de temporalit&eacute;. Un temps qui se d&eacute;ploie dans la continuit&eacute; de l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement, et un autre qui est marqu&eacute; par la reconstruction d&rsquo;une paix difficile, avec ses cons&eacute;quences politiques et parfois pol&eacute;miques &agrave; long terme.</span></span></span></p> <div>&nbsp; <hr /> <div id="ftn1"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[1]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Giovanni lista, <em>Le futurisme. Textes et manifestes (1909-1944)</em>, Ceyz&eacute;rieu, &Eacute;ditions Champ Vallon, 2015, p. 87-92. Cf. aussi, Filippo Tommaso marinetti, <em>Teoria e invenzione futurista</em>, &eacute;dition &eacute;tablie par Luciano De Maria, Milan, I Meridiani Mondadori, 1996 (1968). </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn2"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[2]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cf. Filippo Tommaso marinetti, &laquo;&nbsp;Contro Vienna e contro Berlino&nbsp;&raquo;, <em>L&rsquo;Italia Futurista</em>, vol. 1, n. 4, Florence, 25 juillet 1916. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn3"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[3]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cf. sur l&rsquo; &laquo;&nbsp;expressionnisme italien&nbsp;&raquo;, Renato barilli (s. d.), <em>L&rsquo;espressionismo italiano</em>, Turin, Fabbri, 1990. Marzia ratti et Alessandra belluomini pucci (s. d.), <em>L&rsquo;urlo dell&rsquo;immagine. La grafica dell&rsquo;espressionismo italiano</em>, Turin/New York, Allemandi &amp; Co., 2014. Et sur la &laquo;&nbsp;peinture m&eacute;taphysique&nbsp;&raquo;, Maurizio calvesi, <em>La metafisica schiarita. Da De Chirico a Carr&agrave;, da Morandi a Savinio</em>, Milan, Feltrinelli, 1982. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn4"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[4]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Les op&eacute;rations d&rsquo;&eacute;valuation critique de l&rsquo; &laquo;&nbsp;expressionnisme italien&nbsp;&raquo; qui ont &eacute;t&eacute; effectu&eacute;es &agrave; travers les expositions artistiques dirig&eacute;es par Renato Barilli ont &eacute;t&eacute; fortement mises en discussion, mais sans toutefois faire r&eacute;f&eacute;rence aux publications monographiques de l&rsquo;auteur, qui traitent l&rsquo;expressionnisme italien comme cat&eacute;gorie historique et r&eacute;flexive et non pas comme une notion sp&eacute;culative du march&eacute; de l&rsquo;art. &Agrave; ce propos, l&rsquo;historien de l&rsquo;art et encyclop&eacute;diste Giorgio Di Genova avance ses r&eacute;serves par rapport &agrave; l&rsquo;usage de la cat&eacute;gorie stylistique. Cf. Giorgio di genova, <em>Storia dell&rsquo;arte italiana del&rsquo;900</em>, VII volumes, Bologne, Bora, 1981-2010, p. 141. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn5"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[5]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; La tradition de la peinture d&rsquo;histoire militaire se d&eacute;veloppe en Italie &agrave; partir de l&rsquo;&eacute;t&eacute; 1916, avec les missions des artistes visuels qui visitent de mani&egrave;re passag&egrave;re le front occidental et balkanique. Cette pratique se diffuse sous le gouvernement de Paolo Boselli (18 juin 1916-30 octobre 1917), par la r&eacute;alisation d&rsquo;&oelig;uvres d&rsquo;art &eacute;tiquet&eacute;es lors des expositions et diffus&eacute;es par la presse en tant que &laquo;&nbsp;impressions de guerre&nbsp;&raquo;. Cf. notamment Marco pizzo (s. d.), <em>Pittori-soldato della Grande Guerra</em>, Rome, Istituto per la storia del Risorgimento italiano, Gangemi, 2005. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn6"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref6" name="_ftn6" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[6]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Les journaux de tranch&eacute;e&nbsp;datent de l&rsquo;institution du &laquo;&nbsp;Servizio P&nbsp;&raquo; (<em>Service P</em>), en mars 1918. Il s&rsquo;agit d&rsquo;une organisation militaire et gouvernementale destin&eacute;e &agrave; la vigilance sur le territoire et au contr&ocirc;le de la propagande officielle de l&rsquo;arm&eacute;e. Soffici est le directeur du journal satirique <em>La Ghirba. Giornale dei soldati della V armata</em> (1918), o&ugrave; publient des clich&eacute;s de leurs &oelig;uvres Carlo Carr&agrave; et Giorgio De Chirico, lorsque Sironi codirige avec l&rsquo;&eacute;crivain Massimo Bontempelli le journal de tranch&eacute;e <em>Il Montello. Quindicinale dei soldati del Medio Piave</em> (1918). Cf. notamment Mario isnenghi, <em>I giornali di trincea (1915-1918)</em>, Turin, Einaudi, 1977. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn7"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref7" name="_ftn7" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[7]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Le bataillon <em>V.C.A.</em> (<em>Battaglione lombardo volontari ciclisti et automobilisti</em>) &eacute;tait une milice d&eacute;pendante du Minist&egrave;re de la Guerre (1908-1915), institu&eacute;e afin de rassembler les soldats volontaires de la r&eacute;gion Lombardie. Il s&rsquo;agit de la seule milice paramilitaire de volontaires italiens, pour la plupart anarchistes, interventionnistes et irr&eacute;dentistes qui s&rsquo;unissent aux r&eacute;giments des Alpins, quoique pendant une p&eacute;riode relativement br&egrave;ve. Cf. les contributions artistiques et autobiographiques de Roberto floreani<em>, I Futuristi e la Grande Guerra</em>, Pasian di Prato (Udine), Campanotto Editore, 2014. Dario bellini (s. d.), <em>Con Boccioni a Dosso Casina. Le immagini e i testi dei futuristi in battaglia</em>, Rovereto (Trente), Nicolodi Editore, 2006. Et notamment, Luigi sansone (s. d.), <em>I futuristi del Battaglione Volontari Ciclisti Automobilisti</em>, Milan, Mazzotta, 2010. Id. (s. d.), <em>Futuristi a Dosso Casina</em>, Milan, Mazzotta, 2008. Id. (s. d.), <em>Patriottismo futurista. Il Battaglione Lombardo volontari ciclisti automobilisti</em>, Milan, Mazzotta, 2007. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn8"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref8" name="_ftn8" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[8]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Luigi sansone (s. d.), <em>op. cit.</em>, p. 11-36 (2008).</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn9"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref9" name="_ftn9" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[9]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; <em>Ibid.</em>, p. 45.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn10"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref10" name="_ftn10" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[10]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Giovanni lista, <em>op. cit</em>. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn11"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref11" name="_ftn11" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[11]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Giovanni lista, <em>Filippo Tommaso Marinetti. L&rsquo;anarchiste du futurisme</em>, Paris, S&eacute;guier, 1995, p. 214. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn12"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref12" name="_ftn12" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[12]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cf. Filippo Tommaso marinetti (s. d.), <em>Les mots en libert&eacute; futuristes</em>, Milan, Edizioni di Poesia, 1919. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn13"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref13" name="_ftn13" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[13]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cf. notamment, Giovanni lista, <em>L&rsquo;art postal futuriste</em>, Paris, Jean-Michel Place, 1979. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn14"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref14" name="_ftn14" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[14]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Luigi sansone (s. d.), <em>op. cit.</em>, p. 57 (2010).</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn15"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref15" name="_ftn15" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[15]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cf. l&rsquo;article de Silvio lacasella, &laquo;&nbsp;San Silvestro, Gino Rossi dipinse qui&nbsp;&raquo;, <em>Il Giornale di Vicenza</em>, 11 mars 2014. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn16"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref16" name="_ftn16" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[16]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Lorenzo viani, <em>Le chiavi nel pozzo</em>, Florence, Vallecchi, 1935, p. 285-297. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn17"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref17" name="_ftn17" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[17]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cf. Giorgio de chirico, <em>M&eacute;moires</em>, trad. fran&ccedil;aise par Marin Tassilit, Paris, &Eacute;ditions Flammarion, 2009 (1962), p. 106.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn18"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref18" name="_ftn18" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[18]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cf. Carlo carr&agrave;, <em>L&rsquo;&eacute;clat des choses ordinaires. Ma vie, po&egrave;mes, causeries sur Giotto, Paolo Uccello constructeur</em>, trad. fran&ccedil;aise par J&eacute;r&ocirc;me Picon, Paris, &Eacute;ditions Images Modernes, 2005, p. 148. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn19"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref19" name="_ftn19" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[19]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cf. Umberto boccioni, <em>Diari</em>, Milan, Abscondita, 2013. Et notamment, Filippo Tommaso marinetti, <em>Taccuini (1915-1921)</em>, Bologne, Il Mulino, 1987. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn20"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref20" name="_ftn20" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[20]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Filippo Tommaso marinetti (s. d.), <em>op. cit. </em>(1919). </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn21"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref21" name="_ftn21" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[21]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cf. sur les formules critiques du &laquo;&nbsp;second futurisme&nbsp;&raquo; et du &laquo;&nbsp;retour &agrave; l&rsquo;ordre&nbsp;&raquo; dans les ann&eacute;es 1920-1930, Guido bartorelli, <em>Numeri innamorati. Sintesi e dinamiche del secondo futurismo</em>, Turin, Testo &amp; Immagine, 2001. Fabio benzi, <em>Arte in Italia tra le due guerre</em>, Turin, Bollati &amp; Boringhieri, 2013. Nicola zito, <em>Il ritorno all&rsquo;ordine. Pittura tra recupero e antimodernismo</em>, Bari, Wip, 2013. </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn22"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria,serif"><span style="color:black"><a href="#_ftnref22" name="_ftn22" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="color:black">[22]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cf. &agrave; ce propos, Giovanni lista, <em>Arte e politica. Il futurismo di sinistra in Italia</em>, Milan, Multhipla, 1980. Claudia salaris, <em>Alla festa della rivoluzione. Artisti e libertari con D&rsquo;Annunzio a Fiume</em>, Bologne, Il Mulino, 2002. </span></span></span></span></p> </div> </div>