<h2>Entretien avec David Mallen, &laquo;Historien local&raquo;</h2> <h3>Par Fran&ccedil;ois Perea</h3> <p>Les discours constitutifs de la m&eacute;moire collective sont vari&eacute;s et h&eacute;t&eacute;rog&egrave;nes; ils se font &eacute;cho dans l&rsquo;espace social, produits par de nombreux &eacute;nonciateurs. Ces derniers peuvent &ecirc;tre des t&eacute;moins directs ou indirects (des descendants par exemple) des r&eacute;fugi&eacute;s de la Retirada, des chercheurs institutionnels (dont de nombreux articles du pr&eacute;sent num&eacute;ro constituent les productions), des acteurs de la m&eacute;moire (tels les archivistes ou les personnels des m&eacute;moriaux), etc. De nombreux passionn&eacute;s consacrent par ailleurs &ndash; et cela est particulier vrai sur le sujet de cet exil espagnol &ndash; un temps inestimable &agrave; r&eacute;aliser un patient travail de collecte documentaire et &agrave; en rendre compte. Ils r&eacute;alisent souvent ce travail m&eacute;ticuleux qui permet de retrouver trace des personnes et des &eacute;v&eacute;nements en r&eacute;unissant des documents parfois oubli&eacute;s chez des particuliers et participent &agrave; la construction de la m&eacute;moire. Nous avons voulu, dans ce num&eacute;ro, ouvrir le champ de la publication &agrave; l&rsquo;un d&rsquo;entre eux afin donner un exemple de leur activit&eacute; dans la construction de cet &eacute;difice complexe m&eacute;morial.</p> <p>David Mallen est ce que l&rsquo;on appelle parfois un &laquo;historien local&raquo;: il ne s&rsquo;agit pas l&agrave; de sa profession mais d&rsquo;une passion qu&rsquo;il exerce sur son temps libre, le conduisant &agrave; collecter documents et t&eacute;moignages sur l&rsquo;histoire de la ville d&rsquo;Agde (H&eacute;rault, France) o&ugrave; il habite, et &agrave; partager le fruit de cette activit&eacute; sous des formes diverses. Cette d&eacute;marche amatrice et &eacute;clair&eacute;e n&rsquo;exclut pas la rigueur et le d&eacute;ploiement d&rsquo;une approche qui s&rsquo;est d&eacute;velopp&eacute;e au fil du temps, que David Mallen d&eacute;crit telle une &laquo;enqu&ecirc;te polici&egrave;re&raquo;. Son but: faire surgir des traces des &eacute;v&eacute;nements pass&eacute;s pour les organiser en m&eacute;moire. Il partage et commente ici une partie de sa collection relative au camp d&rsquo;Agde (auquel Virginie Gascon consacre un article dans ce num&eacute;ro) et &agrave; la pr&eacute;sence des r&eacute;fugi&eacute;s espagnols dans cette ville.</p> <p>En pr&eacute;ambule, il r&eacute;pond &agrave; quelques questions qui permettent de cerner son positionnement, comme historien local et comme descendant de la Retirada.</p> <h3>David Mallen, pouvez-vous vous pr&eacute;senter et nous expliquer ce qui vous semble motiver chez vous cet int&eacute;r&ecirc;t pour le Retirada?</h3> <p>Originaire d&#39;Agde, je suis anim&eacute; depuis toujours par un vif int&eacute;r&ecirc;t pour l&#39;histoire de ma ville qui poss&egrave;de un pass&eacute; unique, ainsi que par une grande passion pour l&#39;Histoire, en particulier pour la p&eacute;riode de la Seconde Guerre mondiale, qui m&#39;a &eacute;t&eacute; transmise par mes anc&ecirc;tres, en particulier mes deux grands-p&egrave;res.</p> <p>Il s&rsquo;agit bien d&rsquo;une passion ancr&eacute;e dans la m&eacute;moire familiale et les r&eacute;cits que j&rsquo;ai pu entendre dans ma jeunesse.</p> <p>Mon grand-p&egrave;re paternel Pascal Mallen (n&eacute; le 15 f&eacute;vrier 1913 &agrave; Barcelone) a, avant de partir d&eacute;finitivement pour la France, effectu&eacute; &agrave; l&rsquo;&acirc;ge de 21 ans son devoir de citoyen espagnol en r&eacute;alisant son service militaire en Espagne. Il servira au 22&egrave;me R&eacute;giment d&#39;infanterie de G&eacute;rone de 1934 &agrave; 1936. Lorsque la guerre d&#39;Espagne (ou&laquo;guerre civile&raquo; espagnole) commence en juillet 1936, il prend la d&eacute;cision de fuir cette guerre et de partir en France avec ses parents. A son arriv&eacute;e, il demande la nationalit&eacute; fran&ccedil;aise qu&rsquo;il obtiendra en 1937. Appel&eacute; pour faire son service national fran&ccedil;ais, il fait donc ses classes en novembre 1939 &agrave; B&eacute;ziers, &agrave; la caserne Duguesclin. Malheureusement, la France entre en guerre avec l&#39;Allemagne et il est envoy&eacute; au front le 5 mai 1940 comme mitrailleur, dans le 126 r&eacute;giment d&rsquo;infanterie, comme 2<sup>&egrave;me</sup> classe. Le 13 juin 1940, ce r&eacute;giment combat dans la r&eacute;gion d&rsquo;&Eacute;pernay situ&eacute;e dans la partie ouest du d&eacute;partement de la Marne, en Champagne-Ardenne. Lors d&rsquo;un repli &agrave; l&rsquo;arriv&eacute;e de l&rsquo;ennemi, il est bless&eacute;. J&rsquo;ai souvenir de son r&eacute;cit: &laquo; j&rsquo;ai couru &agrave; travers champs et j&rsquo;entendais les tron&ccedil;onneuses allemandes (mitrailleuses de type Mg42) cracher les balles et couper l&rsquo;herbe devant moi comme une faucille quand tout &agrave; coup un obus explosa: j&rsquo;ai senti une d&eacute;chirure au mollet gauche &raquo;. Le mollet sectionn&eacute; par un &eacute;clat d&rsquo;obus, il fut prisonnier d&egrave;s le lendemain et transf&eacute;r&eacute; &agrave; l&rsquo;h&ocirc;pital de transit des prisonniers de guerre fran&ccedil;ais &agrave; Laon le 18 juin. Il en sortira le 27 ao&ucirc;t 1940 pour partir en captivit&eacute; en Allemagne comme prisonnier de guerre dans au Stalag IXA &agrave; Ziegenhain, en Allemagne. Il y restera 5 ans jusqu&#39;&agrave; la lib&eacute;ration en avril 1945 par l&rsquo;arm&eacute;e am&eacute;ricaine, sous le matricule 47479, dans le Kommando 1083.</p> <p>Mon grand-p&egrave;re maternel, Joaquim Falo, a aussi &eacute;t&eacute; t&eacute;moin de cette p&eacute;riode marquante. N&eacute; &agrave; Barcelone le 9 juin 1908, R&eacute;publicain et Catalan dans l&#39;&acirc;me, il passera et r&eacute;ussira en d&eacute;cembre 1937 le concours de la Guardies del Cos de Seguretat de Catalunya (Grup uniformat), la Police urbaine. Il exercera cette profession jusqu&#39;&agrave; la chute de Barcelone, dernier bastion des R&eacute;publicains. La guerre civile touche &agrave; sa fin jetant sur les routes de nombreux vaincus. Barcelone c&egrave;de devant l&#39;avanc&eacute;e franquiste le 26 janvier 1939. Les Catalans et les r&eacute;fugi&eacute;s venus de toute l&#39;Espagne n&#39;ont plus pour horizon que la fronti&egrave;re fran&ccedil;aise, ultime espoir d&#39;&eacute;chapper &agrave; la r&eacute;pression et au joug du Caudillo. C&#39;est pour mon grand-p&egrave;re la retraite, la Retirada. C&#39;est le chemin de l&#39;exode &agrave; travers les Pyr&eacute;n&eacute;es, le passage par le Perthus d&eacute;but f&eacute;vrier puis l&rsquo;internement dans un premier temps au camp d&#39;Argel&egrave;s, puis au camp d&#39;Agde en 1939. Il s&#39;engagera volontaire dans la 94<sup>&egrave;me</sup> compagnie de travailleurs du camp num&eacute;ro 3 pour effectuer des travaux d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t g&eacute;n&eacute;ral en remplacement du Service militaire. Il sera envoy&eacute; aux travaux de la ligne Maginot jusqu&#39;&agrave; la d&eacute;b&acirc;cle de mai 1940, puis cach&eacute; par les FFI &agrave; la Grand-Combe dans les C&eacute;vennes.</p> <p>Ces deux grands-p&egrave;res ont fait na&icirc;tre en moi cette passion pour la p&eacute;riode allant de 1939 &agrave; 1945, &agrave; travers les diff&eacute;rents r&eacute;cits et les exp&eacute;riences qu&#39;ils m&#39;ont racont&eacute;s lorsque j&rsquo;&eacute;tais adolescent. Ils m&#39;ont donn&eacute; cette envie d&#39;aller plus loin sur le sujet, de savoir, de comprendre ce que ma g&eacute;n&eacute;ration ignore souvent de ses racines, personnelles et historiques.</p> <h3>Vous consacrez beaucoup de temps &agrave; ces recherches et cela constitue quasiment une seconde activit&eacute;, &agrave; c&ocirc;t&eacute; de votre investissement professionnel qui est sans rapport. En quoi cela consiste-t-elle?</h3> <p>Mon approche de l&#39;histoire locale est &agrave; la fois rigoureuse et passionn&eacute;e. Elle s&rsquo;est construite au cours du temps, et repose en grande partie sur la recherche de documents dans les archives municipales, r&eacute;gionales, nationales et &eacute;trang&egrave;res. J&rsquo;organise ensuite ce qui sera le socle de mon travail qui consiste &agrave; reconstruite le plus fid&egrave;lement possible les faits &agrave; partir de ces documents et de mon propre fond photographique, riche de plus de 25.000 photos et documents. Je r&eacute;alise par ailleurs des collectes de t&eacute;moignages, urgentes car les acteurs sont &acirc;g&eacute;s.</p> <p>Ce travail doit &ecirc;tre partag&eacute;, transmis. Cela m&rsquo;a conduit &agrave; l&rsquo;&eacute;criture de nombreux articles historiques dans la presse locale et de deux livres sur l&#39;histoire de la ville d&#39;Agde, que j&rsquo;ai &eacute;dit&eacute;: <em>Agde sous l&#39;Occupation allemande 1942-1944</em> en 2014 (r&eacute;&eacute;dition augment&eacute;e en 2018) et <em>Le ch&acirc;teau Laurens sous l&#39;Occupation allemande 1942-1944</em>, en 2024.</p> <p>Je donne par ailleurs des conf&eacute;rences et participe r&eacute;guli&egrave;rement &agrave; des animations touristiques, des expositions et des comm&eacute;morations.</p> <p>En 2009, j&rsquo;ai fond&eacute; une association d&#39;histoire locale &ndash; <em>Agde histoire 39-45</em> &ndash; qui a pour but la recherche, l&#39;inventaire, l&#39;&eacute;tude et la sauvegarde du patrimoine arch&eacute;ologique et historique agathois pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans ce cadre, nous avons restaur&eacute; en 2013, un bunker-infirmerie de type 638 &agrave; Agde, sur la plage de la Tamarissi&egrave;re. Ce site, unique dans le Sud de la France, est depuis devenu un mus&eacute;e, exposant au public les multiples facettes de la Seconde Guerre mondiale. Il a accueilli plus de 100.000 visiteurs. En 2023, nous avons engag&eacute; la restauration d&#39;un second bunker (de commandement de type 610) afin de poursuivre le travail de pr&eacute;servation de l&#39;histoire collective. En 2024, un nouveau bunker sera am&eacute;nag&eacute; en caf&eacute;-patrimoine: je souhaite qu&rsquo;y soient organis&eacute;es des conf&eacute;rences mensuelles qui accueilleront auteurs et historiens. Nous pr&eacute;voyons &eacute;galement d&rsquo;y installer une biblioth&egrave;que ouverte aux visiteurs. Sur ce site, nous installons &eacute;galement des panneaux didactiques qui pr&eacute;sentent les bunkers du site de la Tamarissi&egrave;re &agrave; Agde et organisons des visites du site complet sur lequel, d&rsquo;ailleurs, des r&eacute;fugi&eacute;s du camp ont &eacute;t&eacute; amen&eacute; &agrave; travailler.</p> <h2>2. Quelques aspects du &laquo;camp des Catalans&raquo;</h2> <h3>Par David Mallen</h3> <p>Au c&oelig;ur de l&#39;H&eacute;rault, le camp d&#39;Agde a marqu&eacute; l&#39;histoire de la r&eacute;gion en &eacute;tant le th&eacute;&acirc;tre de trag&eacute;dies humaines de grande ampleur durant la premi&egrave;re moiti&eacute; du XXe si&egrave;cle. Accueillant entre 1939 et 1943 des r&eacute;fugi&eacute;s de la guerre d&#39;Espagne, ses murs ont vu d&eacute;filer des dizaines de milliers d&#39;individus, victimes des bouleversements politiques et sociaux d&rsquo;alors. Ferm&eacute; &agrave; la Lib&eacute;ration, le camp s&#39;est progressivement effac&eacute; du paysage, laissant derri&egrave;re lui des traces m&eacute;morielles dispers&eacute;es. Photographies jaunies, cartes postales oubli&eacute;es, documents administratifs... Ces fragments du pass&eacute;, souvent retrouv&eacute;s par hasard, constituent aujourd&#39;hui des t&eacute;moignages pr&eacute;cieux de la vie quotidienne dans le camp.</p> <p>Loin d&#39;&ecirc;tre de simples vestiges du pass&eacute;, les documents li&eacute;s au camp d&#39;Agde constituent des t&eacute;moignages pr&eacute;cieux, des fragments de m&eacute;moires qui permettent de reconstituer une histoire complexe et souvent occult&eacute;e. Ces archives, dispers&eacute;es et parfois anonymes, livrent des indices pr&eacute;cieux sur la vie quotidienne des intern&eacute;s, leurs espoirs, leurs peurs et leurs luttes pour la survie. Ce travail de collecte et de valorisation des archives du camp d&#39;Agde s&#39;inscrit dans une d&eacute;marche r&eacute;solue de m&eacute;moire vive. Il s&#39;agit de redonner sens &agrave; ces documents &eacute;pars, de les relier entre eux et de les replacer dans leur contexte historique. En croisant les regards individuels et les r&eacute;cits collectifs, l&#39;objectif est de dresser un tableau nuanc&eacute; et multidimensionnel de l&#39;exp&eacute;rience concentrationnaire &agrave; Agde.</p> <p>L&#39;agencement de ces fragments ob&eacute;it &agrave; une logique chronologique et th&eacute;matique, retra&ccedil;ant les diff&eacute;rentes &eacute;tapes de l&#39;existence du camp, de sa cr&eacute;ation &agrave; sa fermeture. Chaque document est ainsi mis en perspective, &eacute;clairant les conditions de vie des intern&eacute;s, leurs activit&eacute;s, leurs espoirs et leurs d&eacute;sespoirs.</p> <p>Au-del&agrave; de la simple reconstitution historique, cette d&eacute;marche s&#39;inscrit dans une r&eacute;flexion sur la m&eacute;moire et sa construction. Comment &eacute;crire l&#39;histoire d&#39;un lieu marqu&eacute; par la souffrance et l&#39;exclusion ? Comment donner voix &agrave; ceux qui n&#39;en ont plus ? Comment faire dialoguer des m&eacute;moires parfois antagonistes ?</p> <p>C&#39;est &agrave; travers ces fragments, t&eacute;moins silencieux d&#39;un pass&eacute; douloureux, que nous tenterons d&#39;apporter des &eacute;l&eacute;ments de r&eacute;ponse &agrave; ces questions. En reconstituant le puzzle de la vie dans le camp d&#39;Agde, nous esp&eacute;rons contribuer &agrave; une meilleure compr&eacute;hension de cette p&eacute;riode sombre de l&#39;histoire et &agrave; la pr&eacute;servation de sa m&eacute;moire.</p> <h3>2.1. Contexte historique, arriv&eacute;e des r&eacute;fugi&eacute;s espagnols et cr&eacute;ation du camp</h3> <p>En 1939, la paisible cit&eacute; d&rsquo;Agde, forte de 9 000 habitants, voit son quotidien boulevers&eacute; par l&#39;arriv&eacute;e massive d&rsquo;Espagnols fuyant la guerre civile. Face &agrave; l&#39;urgence, les autorit&eacute;s militaires d&eacute;cident d&#39;y construire un camp destin&eacute; &agrave; accueillir les r&eacute;fugi&eacute;s. Il a &eacute;t&eacute; b&acirc;ti sur une trentaine d&rsquo;hectares, afin d&rsquo;accueillir quelques 25000 hommes, pour la plupart des combattants r&eacute;publicains en provenance d&rsquo;autres camps.</p> <p>D&egrave;s le 28 f&eacute;vrier, les premiers r&eacute;fugi&eacute;s affluent et participent &agrave; l&#39;&eacute;dification du camp sous la direction du g&eacute;n&eacute;ral M&eacute;nard, charg&eacute; de coordonner l&#39;action des autorit&eacute;s militaires et civiles pour les questions relatives aux r&eacute;fugi&eacute;s espagnols.</p> <p>Le 3 f&eacute;vrier 1939, Jules Chambodut, du 4e r&eacute;giment d&#39;infanterie - 4e bataillon, &eacute;crit une carte postale &agrave; ses parents du camp d&#39;Agde : &laquo; Nous sommes ici que pour prendre la garde [...] Je ne sais encore pour combien de temps on n&rsquo;est ici ni m&ecirc;me ce que la p&eacute;riode durera, personne ne nous en parle [...] Nous avons peut-&ecirc;tre 15 &agrave; 20 milles r&eacute;fugi&eacute;s et tous les jours, ils en arrivent davantage &raquo;. <strong>(document 1)</strong>.</p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image1.jpg" style="width: 600px; height: 900px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 1 : </strong>Carte postale du 3 avril 1939 &eacute;crite par le soldat J. Chambodut &agrave; ses parents<sup><a href="#_ftn1">[1]</a></sup>.</em></p> <p>Dans un article paru dans <em>Le Petit M&eacute;ridional </em>du 28 f&eacute;vrier 1939, il est &eacute;crit :&laquo; L&rsquo;arriv&eacute;e d&rsquo;un premier convoi de 320 r&eacute;fugi&eacute;s espagnols venant du camp de Saint-Cyprien, pr&egrave;s de Perpignan, certainement choisis parmi ceux poss&eacute;dant un m&eacute;tier. Ils sont employ&eacute;s au montage des baraques, aplanissement du terrain et tous autres travaux d&#39;am&eacute;nagements. Ce groupement est momentan&eacute;ment log&eacute; sous des tentes, marabouts. Pour la plupart Madril&egrave;nes, des Andalous, des Catalans, toute r&eacute;gions d&#39;Espagne sont pr&eacute;sent&eacute;es &raquo;. <strong>(documents 2 et 3)</strong>.</p> <p>En mai, les travaux s&#39;ach&egrave;vent et le camp est appel&eacute; &laquo;camp des Catalans&raquo; en raison de la majorit&eacute; d&#39;origine des intern&eacute;s.</p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image2.jpg" style="width: 600px; height: 771px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 2 :</strong> La cr&eacute;ation d&#39;un camp de concentration pour les r&eacute;fugi&eacute;s espagnols &agrave; Agde journal Le Petit M&eacute;ridional, article du 05 mars 1939.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image3.jpg" style="width: 600px; height: 738px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 3 </strong>: Suite de l&#39;article du journal Le Petit M&eacute;ridional du 05 mars 1939.</em></p> <p>&nbsp;</p> <h3>2.2. La vie quotidienne au camp d&#39;Agde</h3> <p>Le camp d&#39;Agde se composait de 250 baraquements construits en bois et en t&ocirc;le ondul&eacute;e. La plupart &eacute;taient destin&eacute;s aux r&eacute;fugi&eacute;s, tandis que les autres servaient &agrave; l&#39;intendance, &agrave; l&#39;infirmerie, aux douches et aux toilettes. Les conditions de vie y &eacute;taient rudimentaires, les r&eacute;fugi&eacute;s dormant sur des matelas de paille pos&eacute;s &agrave; m&ecirc;me le sol, remplac&eacute;s plus tard par des liti&egrave;res qu&#39;ils fabriquaient eux-m&ecirc;mes <strong>(photos 4, 5 et 6)</strong>.</p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image4.jpg" style="width: 500px; height: 310px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photo 4:</strong> Vue sur la Caserne Mirabel et l&#39;entr&eacute;e du camp d&#39;Agde.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image5.jpg" style="width: 500px; height: 328px;" /></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photo 5 : </strong>Au premier plan les lavoirs et les baraquements du camp d&#39;Agde.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image6.jpg" style="width: 500px; height: 342px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photo 6: </strong>Vue sur les baraquements du camp d&#39;Agde.</em></p> <p>Avec les premiers baraquements, apparaissent les lavoirs. Non, on ne se lave pas &agrave; l&#39;eau courante ni &agrave; l&#39;eau potable, cela aurait &eacute;t&eacute; un luxe. Les lavoirs ont toujours &eacute;t&eacute; un bon endroit pour combattre le cafard et... la salet&eacute;. Le temps consacr&eacute; &agrave; laver, m&ecirc;me s&#39;il s&#39;agissait toujours d&#39;un m&ecirc;me chiffon, permettait de passer un moment en parlant avec les uns et les autres <strong>(photo 7, 8 et 9)</strong>.</p> <p>L&#39;approvisionnement en eau des r&eacute;fugi&eacute;s provenait de sources multiples, parmi lesquelles l&#39;eau de la ville et celle de puits de qualit&eacute; m&eacute;diocre en p&eacute;riph&eacute;rie du camp. L&#39;utilisation de cette eau contamin&eacute;e pour la pr&eacute;paration des repas a favoris&eacute; la prolif&eacute;ration de maladies graves, en particulier la dysenterie. La d&eacute;pendance &agrave; des sources d&#39;eau insalubres a &eacute;t&eacute; exacerb&eacute;e par l&#39;insuffisance de l&#39;eau de la ville contraignaient les autorit&eacute;s &agrave; recourir &agrave; des livraisons par camions-citernes de l&#39;arm&eacute;e r&eacute;publicaine. Cependant, ces livraisons s&#39;av&eacute;raient insuffisantes pour subvenir aux besoins vitaux des r&eacute;fugi&eacute;s, les exposant davantage aux risques de maladies et de d&eacute;c&egrave;s.</p> <p>Malgr&eacute; ces conditions difficiles, le camp d&#39;Agde offrait un environnement bien meilleur que d&#39;autres camps de l&#39;&eacute;poque. Les r&eacute;fugi&eacute;s s&#39;organis&egrave;rent et mirent en place divers groupes et activit&eacute;s, tels que des troupes de th&eacute;&acirc;tre, des clubs de lecture, des &eacute;quipes sportives et des chorales. Des cours de langue et d&#39;histoire &eacute;taient &eacute;galement dispens&eacute;s.</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image7.jpg" style="width: 500px; height: 700px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photo 7:</strong> Enrique For&egrave;s et Pepe au lavoir du camp d&#39;Agde ao&ucirc;t 1939.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image8.jpg" style="width: 500px; height: 693px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photo 8:</strong> Pepe et Enrique For&egrave;s posent devant un des baraquements du camp d&#39;Agde.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image9.jpg" style="width: 500px; height: 678px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photo 9: </strong>Pepe pose devant un des baraquements du camp, en arri&egrave;re-plan gauche, on aper&ccedil;oit la Caserne Mirabel.</em></p> <h3>2.3. L&#39;inqui&eacute;tude de la population fran&ccedil;aise et des &eacute;lus locaux face &agrave; l&#39;arriv&eacute;e massive des clandestins</h3> <p>Dans l&#39;article du journal <em>L&#39;Eclair </em>du 4 mars 1939, nous pouvons lire :&laquo; La gravit&eacute; du probl&egrave;me des r&eacute;fugi&eacute;s [...]Un danger qui menace insidieusement la s&eacute;curit&eacute; de la France [...] D&eacute;j&agrave; une grosse quantit&eacute; d&#39;Espagnols est install&eacute;e et s&#39;infiltre peu &agrave; peu dans la population. Il y a une infiltration occulte qui s&#39;est produite et se continue d&#39;ind&eacute;sirables qui se cachent chez leurs compatriotes d&eacute;j&agrave; install&eacute;s ici&raquo;.</p> <p>Le maire de B&eacute;ziers, M. Albertini d&eacute;clare de son c&ocirc;t&eacute; : &laquo;Une invasion clandestine [...] Nous abritons d&eacute;j&agrave; plus de 400 r&eacute;fugi&eacute;s clandestins ; il en arrive une bonne vingtaine par jour et la pr&eacute;sence ind&eacute;sirables, qui presque tous sont des anarchistes, nous menace des perspectives assez d&eacute;cevantes quant &agrave; l&#39;influence d&eacute;sastreuse de ces pros&eacute;lytes farouches sur les 25.000 Espagnols qui composent le tiers de la population biterroise&raquo;.</p> <p>Albertini n&#39;est pas seul &agrave; partager cette inqui&eacute;tude, le Maire d&#39;Agde, M. F&eacute;lix, d&eacute;clare : &laquo; l&#39;arriv&eacute;e massive des r&eacute;fugi&eacute;s &agrave; Agde m&#39;appara&icirc;t comme une v&eacute;ritable calamit&eacute; [...] et pose d&eacute;j&agrave; des probl&egrave;mes aigus de l&#39;alimentation en eau potable [...] 25.000 miliciens qui, tous les soirs, viendront par petits groupes s&#39;entretenir avec leurs 2500 compatriotes communistes de la ville de la n&eacute;cessit&eacute; d&#39;intervenir en faveur de Madrid, ou plus prosa&iuml;quement, des mesures &agrave; envisager pour renforcer d&#39;&eacute;l&eacute;ments nouveaux la petite arm&eacute;e locale de Moscou&raquo;.</p> <p>Le Maire de Bessan, M. Gleises, ne craint pas de dire :&laquo;Plus d&#39;une centaine de miliciens ont depuis quelques jours trouv&eacute; chez leurs compatriotes de la ville un asile qu&#39;ils esp&egrave;rent d&eacute;finitif [...] Il en viendra d&#39;autres, soyez en s&ucirc;r. Je vous laisse &agrave; penser ce que sera dans quelques ann&eacute;es ce petit village, et je me demande quel drapeau flottera au fronton de sa mairie quand ces nouveaux messieurs auront pris les commandes&raquo;. <strong>(documents 10,11 et 12)</strong>.</p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image10.jpg" style="width: 600px; height: 805px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 10:</strong> Une inqui&eacute;tude justifi&eacute;e article du journal L&#39;&eacute;clair du 4 mars 1939.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image11.jpg" style="width: 600px; height: 775px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 11:</strong> Un danger public article du journal </em>L&#39;&eacute;clair<em> du 8 mars 1939.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image12.jpg" style="width: 600px; height: 850px;" /></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 12:</strong> Article du Journal </em>Gringoire<em> du 9 mars 1939.</em></p> <p>Le 20 avril 1939, un d&eacute;p&ocirc;t d&#39;armes est d&eacute;couvert au camp d&#39;Agde. L&#39;<em>&Eacute;clair </em>du 21 avril 1939 relate les faits :&laquo; Dans le camp num&eacute;ro 1, baraque G.3, les gardes mobiles ont trouv&eacute;s dis pistolets, huit chargeurs, deux parabellums, des cartouches et un poignard. &Agrave; qui et &agrave; quoi &eacute;taient destin&eacute;es ces armes ?&raquo;.</p> <p>Huit jours plus tard, un milicien suspect est arr&ecirc;t&eacute; au camp. Dans son &eacute;dition du 28 avril 1939, le journal pr&eacute;cise: &laquo;Cet individu, qui fait par ailleurs l&#39;objet d&#39;une inculpation pour meurtre, serait un personnage dangereux investi de la confiance de groupes politiques d&#39;extr&ecirc;me gauche&raquo;. <strong>(photos 13 et 14)</strong>.</p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image13.jpg" style="width: 600px; height: 749px;" /></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 13:</strong> Un d&eacute;p&ocirc;t d&#39;armes est d&eacute;couvert au camp d&#39;Agde article du journal </em>L&#39;&eacute;clair<em> du 21 avril 1939.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image14.jpg" style="width: 600px; height: 760px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 14: </strong>Au camp de r&eacute;fugi&eacute;s d&#39;Agde, un milicien suspect est arr&ecirc;t&eacute; article du journal </em>L&#39;&eacute;clair <em>du 28 avril 1939.</em></p> <p>&nbsp;</p> <h3>2.4. L&#39;&eacute;dification du camp s&#39;av&egrave;re dommageable pour certains r&eacute;sidents d&#39;Agde. <strong>L&#39;affaire Dusfour cristallise des tensions.</strong></h3> <p>Le champ de man&oelig;uvres d&#39;Agde d&rsquo;une superficie de dix-huit hectares est toutefois jug&eacute; insuffisant par les autorit&eacute;s militaires en cons&eacute;quence de quoi, elles r&eacute;quisitionnent les terrains avoisinants pour atteindre trente hectares.</p> <p>Plusieurs familles agathoises verront ainsi leurs terrains r&eacute;quisitionn&eacute;s, &agrave; l&#39;exemple de Joseph Dusfour propri&eacute;taire de plusieurs terrains r&eacute;quisitionn&eacute;s dont domaine de Rigaud. M. Dusfour prendra connaissance de l&#39;installation d&#39;un camp de miliciens espagnols &agrave; Agde le 2 mars 1939 en lisant le journal <em>L&#39;Eclair </em><strong>(photo 15)</strong>.</p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image15.jpg" style="width: 600px; height: 673px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 15: </strong>Installation d&#39;un camp de miliciens espagnols &agrave; Agde article du journal </em>L&#39;&eacute;clair<em> du 2 mars 1939.</em></p> <p>D&egrave;s le lendemain matin, le 3 mars 1939, il &eacute;crit un courrier en recommand&eacute; au Maire d&#39;Agde : &laquo;J&#39;ai &eacute;t&eacute; d&eacute;sagr&eacute;ablement surpris en constatant ce matin que depuis 48 heures un camp pour loger les r&eacute;fugi&eacute;s avait &eacute;t&eacute; install&eacute; sur un terrain m&#39;appartenant et faisant partie du domaine de Rigaud. Sont pr&eacute;sents sur le terrain : cuisines, des camions espagnols, parc &agrave; moutons, des marabouts, des miliciens, des tirailleurs s&eacute;n&eacute;galais, de la garde mobile. Ce camp a &eacute;t&eacute; entour&eacute; de barbel&eacute;s et son acc&egrave;s m&#39;a &eacute;t&eacute; interdit &raquo;. <strong>(Document 16, photos 17 et 18)</strong></p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image16.jpg" style="width: 600px; height: 734px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 16:</strong> Lettre de J. DUSFOUR au Maire d&#39;Agde du 3 mars 1939.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image17.png" style="width: 500px; height: 338px;" /></p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image18.jpg" style="width: 500px; height: 348px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photos 17 et 18:</strong> Travaux d&#39;empierrement des futures rues du camp.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image19.jpg" style="width: 500px; height: 397px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photo 19:</strong> Travaux d&#39;empierrement des futures rues du camp.</em></p> <p>Dusfour prendra soin d&#39;envoyer cette m&ecirc;me lettre recommand&eacute;e au Lieutenant-Colonel du g&eacute;nie commandant le camp de r&eacute;fugi&eacute;s espagnols d&#39;Agde et au r&eacute;dacteur en chef du journal <em>L&#39;Eclair</em> pour d&eacute;noncer cette r&eacute;quisition, L&#39;article para&icirc;tra en page 4 du journal le 5 mars 1939 <strong>(document 20)</strong>.</p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image20.jpg" style="width: 600px; height: 790px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 20: </strong>A propos des r&eacute;fugi&eacute;s espagnols, article du journal </em>L&#39;&eacute;clair<em> du 5 mars 1939.</em></p> <p>Ce m&ecirc;me jour, le 3 mars 1939, M. Dusfour fera dresser un proc&egrave;s-verbal de constat de ces faits &agrave; l&#39;huissier Henri Bonnefoy <strong>(documents 21, 22, photo 23 et document 24).</strong></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image21.jpg" style="width: 600px; height: 805px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 21: </strong>Proces-Verbal de Constat de l&#39;huissier BONNEFOY du 3 mars 1939.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image221.png" style="width: 600px; height: 849px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 22 :</strong> Plan des parcelles de M. Dusfour.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image23.png" style="width: 600px; height: 746px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photo 23:</strong> Vue a&eacute;rienne des parcelles de M. Dusfour.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image24.png" style="width: 600px; height: 825px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 24:</strong> Derni&egrave;re page du Proc&egrave;s-Verbal de Constat de l&#39;huissier Bonnefoy du 3 mars 1939.</em></p> <p>En r&eacute;ponse &agrave; cette lettre Jean F&eacute;lix, maire d&rsquo;Agde, dit qu&#39;il n&rsquo;aurait pas &eacute;t&eacute; avis&eacute; avant la cr&eacute;ation du camp. Il se d&eacute;fend : &laquo;J&rsquo;ai eu connaissance du projet d&rsquo;installation du camp des r&eacute;fugi&eacute;s le jour m&ecirc;me de l&rsquo;arriv&eacute;e des premi&egrave;res formations militaires [...] Au cours d&rsquo;une rencontre [...] &agrave; la mairie avec un officier du G&eacute;nie venu consulter le plan cadastral&raquo;. Il s&rsquo;agit du Colonel D&eacute;sert qui est &agrave; l&rsquo;origine des contrats de location <strong>(document 25)</strong>.</p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image25.png" style="width: 600px; height: 771px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 25:</strong> Lettre du Maire d&#39;Agde du Maire Felix &agrave; M. Dusfour.</em></p> <p>Le 20 mars 1939, le pr&eacute;fet Antoine Monis adresse une lettre de r&eacute;quisition de parcelles &agrave; Louis Dusfour, concernant l&#39;&eacute;tablissement d&#39;un camp de miliciens espagnols dans la commune d&#39;Agde <strong>(document 26</strong>).</p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image26.png" style="width: 600px; height: 796px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 26:</strong> Lettre du Pr&eacute;fet de l&#39;H&eacute;rault A. Monis &agrave; M. Dusfour du 20 mars 1939 concernant la r&eacute;quisition des parcelles 1939.</em></p> <p>Le 23 mars 1939, l&#39;acte du pr&eacute;fet est notifi&eacute; en mairie d&#39;Agde sur ordre du Maire et son secr&eacute;taire <strong>(document 27)</strong>.</p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image27.png" style="width: 600px; height: 770px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 27:</strong> Acte de notification d&#39;un arr&ecirc;t&eacute; de la commune d&#39;Agde du 23 mars 1939.</em></p> <p>Le 30 mars 1939, le g&eacute;n&eacute;ral Menard, charg&eacute; de coordonner l&#39;action des autorit&eacute;s militaires et civiles pour les questions relatives aux r&eacute;fugi&eacute;s espagnols &eacute;crit en r&eacute;ponse &agrave; la lettre du 7 mars &agrave; M. Dufour : &laquo;J&#39;ai l&#39;honneur de vous faire conna&icirc;tre que l&#39;importance du camp de miliciens &agrave; r&eacute;aliser &agrave; Agde exige en effet l&#39;occupation des parcelles bordant le terrain militaire, la superficie de celui-ci ne permettant pas l&#39;implantation de la totalit&eacute; du camp. J&#39;ajoute qu&#39;afin de vous faciliter l&#39;acc&egrave;s de votre propri&eacute;t&eacute;, le commandant du camp d&rsquo;Agde Zwilling vous remettra sur votre demande un &laquo;Laisser passer permanent&raquo; qui vous permettra de circuler sans &ecirc;tre inqui&eacute;t&eacute; par les sentinelles&raquo;. <strong>(document 28, 29 et 30)</strong>.</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image28.png" style="width: 600px; height: 931px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 28:</strong> Lettre du G&eacute;n&eacute;ral Menard du 30 mars 1939 concernant l&#39;occupation des parcelles de M. Dusfour.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image29.png" style="width: 600px; height: 870px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 29:</strong> Suite de la lettre du G&eacute;n&eacute;ral M&eacute;nard.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image30.png" style="width: 500px; height: 377px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Document 30:</strong> Laissez-passer permanent du Camp d&#39;Agde attribu&eacute; &agrave; M. Dusfour sign&eacute; par le commandant du camp d&#39;Agde.</em></p> <p>Malgr&eacute; le laissez-passer, M. Dusfour adresse un courrier au Maire d&#39;Agde le 11 ao&ucirc;t 1939 pour lui signaler les faits suivants :&laquo; Nous avons &eacute;t&eacute; interpell&eacute;s par un lieutenant de la Garde Mobile appartenant, je crois au peloton s&eacute;dentaire &agrave; Agde, qui nous a trait&eacute;s, comme si nous n&#39;&eacute;tions rien moins que des vagabonds. Il pr&eacute;tendait que nous nous trouvions au milieu du camp.</p> <p>Il s&#39;opposait &agrave; ce que nous continuions notre route me mena&ccedil;ant si j&#39;insistais de me faire arr&ecirc;ter en sa qualit&eacute; &laquo;d&#39;officier de Police judiciaire&raquo;, dresser contravention et amener au camp&raquo;. <strong>(document 31)</strong>.</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image31.png" style="width: 600px; height: 759px;" /></p> <p style="text-align: center;"><strong>Document 31: </strong>Lettre de M. Dusfour au Maire d&#39;Agde en date du 12 ao&ucirc;t 1939.</p> <p>L&#39;affaire Dusfour et les tensions politiques qu&#39;elle illustre font partie de l&#39;histoire complexe et parfois douloureuse de l&#39;accueil des r&eacute;fugi&eacute;s en France. Il est important de se souvenir de ces &eacute;v&eacute;nements et de comprendre les enjeux politiques et sociaux qu&#39;ils soul&egrave;vent.</p> <h3>2.5. Les artistes catalans dans la salle des Mariages de l&#39;ancien H&ocirc;tel de ville</h3> <p>M&ecirc;me si le r&egrave;glement du Camp pr&eacute;voit des journ&eacute;es rythm&eacute;es par des horaires fixes (hymne au drapeau tricolore, d&eacute;signation du personnel de corv&eacute;e, repas, lessives, visites au parloir, d&eacute;fil&eacute; le dimanche soir&hellip;) les r&eacute;fugi&eacute;s ont beaucoup de temps libre. Pour tromper l&rsquo;ennui, ils organisent des activit&eacute;s sportives, ludiques et culturelles. C&rsquo;est ainsi que durant l&rsquo;&eacute;t&eacute;, les artistes du Camp organisent une exposition artistique au cours de laquelle le peintre Cadena, assist&eacute; des peintres Barba et Sola, du ferronnier d&rsquo;art Clavell et du sculpteur Tarrac, sont remarqu&eacute;s pour la qualit&eacute; de leurs travaux. Sur demande de la municipalit&eacute;, ils acceptent de mettre leur talent au service de la ville d&rsquo;Agde. La commande qui leur est propos&eacute;e les met en joie : ils ont carte blanche pour d&eacute;corer la salle des mariages de l&rsquo;H&ocirc;tel de Ville. Situ&eacute;e au premier &eacute;tage d&rsquo;un superbe b&acirc;timent de style renaissance dans le centre-ville, la salle est tr&egrave;s grande et tr&egrave;s bien &eacute;clair&eacute;e gr&acirc;ce &agrave; de grandes fen&ecirc;tres &agrave; meneaux. Ils vont pouvoir laisser libre cours &agrave; leur imagination et &agrave; leur sens artistique&hellip; et &eacute;chapper ainsi pendant quelque temps &agrave; la lourdeur de leur environnement carc&eacute;ral. Chacun dans son domaine, ils se mettent au travail et s&rsquo;attachent &agrave; l&rsquo;embellissement de la salle.</p> <p>L&rsquo;art catalan s&rsquo;infiltre dans la ville. Ainsi, en 1941, le peintre Barba en 1941 offre au Maire de la ville une nature morte <strong>(photos 32 et 33)</strong>.</p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image32.jpg" style="width: 500px; height: 416px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photo 32 :</strong> Nature morte aux raisins r&eacute;alis&eacute; par le peintre Catalan Barba</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image33.jpg" style="width: 500px; height: 225px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photo 33:</strong> Signature de l&#39;artiste Barba.</em></p> <h3>2.6. Agde sous l&#39;occupation allemande (1942-1944) et le d&eacute;mant&egrave;lement du camp d&rsquo;Agde</h3> <p>Apr&egrave;s le d&eacute;barquement alli&eacute; en Afrique du Nord, le 08 novembre 1942, l&rsquo;Allemagne hitl&eacute;rienne d&eacute;cide d&rsquo;occuper la zone libre, rompant ainsi avec les conditions d&rsquo;armistice.</p> <p>Agde, ville c&ocirc;ti&egrave;re, est occup&eacute;e par les troupes allemandes le 12 novembre 1942 au soir. Le commissaire de Police d&rsquo;Agde, dans un rapport adress&eacute; &agrave; l&rsquo;intendant r&eacute;gional de police, affirme ainsi que les troupes d&rsquo;op&eacute;rations &laquo; terminologie officielle de Vichy donn&eacute; aux unit&eacute;s de la Wehrmacht en Zone sud ce afin d&rsquo;&eacute;viter l&rsquo;amalgame de la pr&eacute;sence non-hostile de cette arm&eacute;e &eacute;trang&egrave;re &agrave; une force militaire d&rsquo;occupation &raquo;, sont arriv&eacute;es ce jour le 12 novembre &agrave; 17 h 45 en provenance de B&eacute;ziers.</p> <p>Afin de se pr&eacute;munir de tout d&eacute;barquement alli&eacute;, l&#39;arm&eacute;e allemande (la Wehrmacht) y r&eacute;alisa un vaste ensemble d&rsquo;ouvrages d&eacute;fensifs, le S&uuml;dwall, lerempartou &laquo;&laquo;mur du sud. Con&ccedil;u pour &ecirc;tre sur le Mittelmeerk&uuml;stenfront (le front c&ocirc;tier m&eacute;diterran&eacute;en), cet &eacute;quivalent du fameux mur de l&rsquo;Atlantique s&rsquo;&eacute;tendait de la fronti&egrave;re espagnole &agrave; la fronti&egrave;re italienne.</p> <p>R&eacute;utilisant et renfor&ccedil;ant pour cela les anciennes fortifications fran&ccedil;aises de Port-Vendres, S&egrave;te, Marseille, Toulon&hellip; l&rsquo;arm&eacute;e allemande fortifia &eacute;galement les vastes espaces interm&eacute;diaires &agrave; l&#39;image de l&#39;ensemble des points d&#39;appuis d&#39;Agde (le st&uuml;tzpunktgruppe) o&ugrave; pouvaient survenir les forces d&rsquo;invasion venues attaquer le flanc m&eacute;ridional de la forteresse Europe (Festung Europa).</p> <p>De vastes quantit&eacute;s de b&eacute;ton, &eacute;quivalant &agrave; des dizaines de milliers de m&egrave;tres cube, ainsi que des dizaines de milliers d&#39;obstacles maritimes et terrestres et des centaines de milliers de mines ont &eacute;t&eacute; coul&eacute;s ou install&eacute;s entre Cerb&egrave;re et Menton.</p> <p>Afin de r&eacute;aliser ce programme de fortifications, un grand nombre d&#39;unit&eacute;s sp&eacute;cialis&eacute;es se relaieront sur place pour la construction de bunkers, telles que le R.A.D, les festungs pioniere ou l&#39;organisation TODT (OT).</p> <p>Cette derni&egrave;re, s&#39;occupant de la zone agathoise, &eacute;tait un groupe de g&eacute;nie civil et militaire de l&#39;Allemagne, portant le nom de Fritz Todt, un ing&eacute;nieur qui cr&eacute;era l&#39;organisation et la dirigera jusqu&#39;&agrave; sa mort en 1942. On doit aussi &agrave; ce personnage important de l&#39;Allemagne d&#39;avant-guerre le r&eacute;seau autoroutier allemand &eacute;galement les bunkers de la ligne Siegfried.</p> <p>Cette main d&#39;&oelig;uvre devait loger au plus pr&egrave;s des lieux de fortifications. C&#39;est pour cela qu&#39;un camp nomm&eacute; &laquo;Camp de l&#39;organisation TODT&raquo; fut cr&eacute;&eacute; au lieu-dit de &laquo;Notre-Dame de l&#39;Agenouillade&raquo; et s&rsquo;&eacute;tendait jusqu&rsquo;&agrave; l&#39;emplacement de l&#39;ancienne carri&egrave;re de basalte.</p> <p>Ce camp avait une superficie approximative de 7,5 ha et une capacit&eacute; d&#39;h&eacute;bergement de 800 ouvriers.</p> <p>Le camp d&#39;Agde ayant cess&eacute; ses fonctions, les Allemands entreprennent son d&eacute;mant&egrave;lement entre mai et fin septembre 1943. Cette op&eacute;ration vise &agrave; r&eacute;cup&eacute;rer des mat&eacute;riaux de construction dans un contexte de p&eacute;nurie. Au total, 10 baraquements seront construits &agrave; partir des &eacute;l&eacute;ments r&eacute;cup&eacute;r&eacute;s.</p> <p>Apr&egrave;s le d&eacute;part des forces d&#39;occupation &agrave; la fin du mois d&#39;ao&ucirc;t 1944, les vestiges encore debout du camp d&#39;Agde ont &eacute;t&eacute; d&eacute;truits sans laisser de trace <strong>(photo 34)</strong>.</p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_6_26_image34.jpg" style="width: 500px; height: 296px;" /></p> <p style="text-align: center;"><em><strong>Photo 34:</strong> Photo prise par un Allemand de la destruction des baraquements du camp d&#39;Agde annotation septembre 1939.</em></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <h2><strong>3. Bibliographie</strong></h2> <p>Gascon, V., (2019), <em>Agde 1939-1942 Un camp aux portes de le Ville</em>, Archives Municipales d&#39;Agde.</p> <p>Camp d&rsquo;Agde, textes de l&rsquo;AMCA du 12 septembre 2013, actes de conf&eacute;rences, Agde, Association pour la M&eacute;moire du Camp d&rsquo;Agde, 2013.</p> <p>Carrasco, J., (1984), <em>Album souvenir de l&#39;exil r&eacute;publicain espagnol en France</em>, Assoc. des auteurs auto&eacute;dit&eacute;s.</p> <p>Mallen, D., (2020) (2<sup>&egrave;me</sup> &eacute;d.), <em>Agde sous l&rsquo;Occupation Allemande 1942-1944</em>, 112 p.</p> <h2>4. Notes</h2> <p><a href="#_ftnref1">[1]</a> Toutes les illustrations de cet article: Fonds priv&eacute; David Mallen.</p>