<h3>Abstract</h3> <p>Written in two very different contexts, the novels&nbsp;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>&nbsp;by Bernard B. Dadi&eacute; and&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;</em>&nbsp;by Gauz both activate the notion of exoticism, but in a very specific way: we discover in these texts a kind of internal exoticism which shows to the European reader his own society in a different point of view. The spectacular aspect of exoticism is distanced by a parody of ethnographic discourse, combined with the use of a satirical mode.</p> <h2>Keywords<br /> &nbsp;</h2> <p>exoticism, Bernard B. Dadi&eacute;, Gauz, satire, Un N&egrave;gre &agrave; Paris, Debout-pay&eacute;, ethnography</p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <p>Les deux ouvrages que l&rsquo;on se propose d&rsquo;analyser dans cet article,&nbsp;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>&nbsp;de Bernard Bilin Dadi&eacute; et&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;</em>&nbsp;de Gauz (nom d&rsquo;auteur d&rsquo;Armand Patrick Gbaka-Br&eacute;d&eacute;), ont &eacute;t&eacute; &eacute;crits &agrave; des p&eacute;riodes assez &eacute;loign&eacute;es l&rsquo;une de l&rsquo;autre, et il peut initialement sembler difficile d&rsquo;envisager des parall&egrave;les entre deux &eacute;crivains de g&eacute;n&eacute;rations si dissemblables. La notion d&rsquo;exotisme ne doit pas r&eacute;sonner de la m&ecirc;me mani&egrave;re pour un livre publi&eacute; en 1959 et un autre en 2014, m&ecirc;me &agrave; les lire comme deux ouvrages postcoloniaux. Pourtant, ces deux r&eacute;cits d&eacute;ploient &agrave; notre sens, dans des contextes diff&eacute;rents, des strat&eacute;gies comparables dans leur mani&egrave;re de se confronter &agrave; la notion d&rsquo;exotisme. On examinera dans quelle mesure on peut voir cet exotisme &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre dans les deux romans, comment il est mis en tension avec le discours ethnographique et comment il est mis &agrave; distance par la satire.</p> <h2>1. L&rsquo;exotisme dans&nbsp;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris&nbsp;</em>et&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;</em><br /> &nbsp;</h2> <p><em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>, paru en 1959, est un roman de Bernard Bilin Dadi&eacute;. Comme son titre l&rsquo;indique, il s&rsquo;agit du r&eacute;cit d&rsquo;un voyage fictif d&rsquo;un Africain dans la capitale fran&ccedil;aise. Bernard B. Dadi&eacute; s&rsquo;&eacute;tait jusqu&rsquo;&agrave; ce livre surtout illustr&eacute; dans son traitement d&rsquo;une mati&egrave;re africaine, &agrave; travers des po&egrave;mes, des contes ou des textes relevant d&rsquo;autres genres narratifs&nbsp;<a href="#_ftn1" name="_ftnref1">[1]</a>. Son &oelig;uvre participe &agrave; cette &eacute;poque d&rsquo;un effort de r&eacute;appropriation du discours sur l&rsquo;Afrique, alors que la colonisation a donn&eacute; aux &eacute;crits europ&eacute;ens une &laquo;&nbsp;pr&eacute;rogative&nbsp;&raquo; en ce domaine, qui s&rsquo;est notamment manifest&eacute;e par la constitution d&rsquo;une biblioth&egrave;que de discours de voyage, comme l&rsquo;a montr&eacute; Bernard Mouralis&nbsp;<a href="#_ftn2" name="_ftnref2">[2]</a>. Dans cet effort, &agrave; la production de discours exprimant un point de vue endog&egrave;ne sur le continent (les contes et r&eacute;cits), s&rsquo;ajoute dans l&rsquo;&oelig;uvre de Bernard B. Dadi&eacute; cette relation d&rsquo;un voyage en France. Ainsi, apr&egrave;s s&rsquo;&ecirc;tre positionn&eacute; comme un &eacute;crivain capable de produire un discours sur &laquo;&nbsp;sa&nbsp;&raquo; culture, Dadi&eacute; fait-il la d&eacute;monstration de sa capacit&eacute; &agrave; inverser le voyage, &agrave; produire, tout comme les Europ&eacute;ens l&rsquo;ont fait pour l&rsquo;Afrique, un discours sur &laquo;&nbsp;l&rsquo;autre&nbsp;&raquo; culture&nbsp;<a href="#_ftn3" name="_ftnref3">[3]</a>.&nbsp;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>&nbsp;entre donc en tension avec l&rsquo;exotisme. Si, &agrave; la suite de Jean-Marc Moura, on consid&egrave;re ce dernier comme &laquo;&nbsp;le rapport cognitif d&rsquo;une soci&eacute;t&eacute; &agrave; son autre&nbsp;<a href="#_ftn4" name="_ftnref4">[4]</a>&nbsp;&raquo;, alors&nbsp;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>&nbsp;entre bien dans cette cat&eacute;gorie. Mais en m&ecirc;me temps, cette notion d&rsquo;exotisme repose sur l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une alt&eacute;rit&eacute;, qui est pourtant d&eacute;construite dans l&rsquo;ouvrage&nbsp;par le principe m&ecirc;me de l&rsquo;inversion du voyage&nbsp;: puisque le narrateur de Dadi&eacute; adopte une attitude europ&eacute;enne, celle d&rsquo;un certain type de voyageur, il ne se caract&eacute;rise par son alt&eacute;rit&eacute; qu&rsquo;en surface&nbsp;; en profondeur, c&rsquo;est le m&ecirc;me qui appara&icirc;t, de mani&egrave;re transgressive ou subversive.</p> <p><em>Debout-pay&eacute;</em>&nbsp;de Gauz, publi&eacute; en 2014, semble &agrave; des lieues de cette strat&eacute;gie. Le roman est centr&eacute; sur des personnages de migrants occupant des postes de vigiles &agrave; Paris dans des magasins de grandes enseignes. Le voyage est de nouveau pr&eacute;sent, de m&ecirc;me que la question de l&rsquo;interculturalit&eacute;. Mais l&rsquo;exotisme semble un horizon absent&nbsp;: apparemment, il s&rsquo;agit moins d&rsquo;inverser le voyage de connaissance europ&eacute;en que de proposer une image litt&eacute;raire, ludique, de la soci&eacute;t&eacute; fran&ccedil;aise. Cependant, la notion d&rsquo;exotisme pourrait &ecirc;tre de nouveau convoqu&eacute;e &agrave; propos du livre de Gauz, selon deux interpr&eacute;tations du terme.</p> <p>Tout d&rsquo;abord, le roman comporte bien une dimension de cet ordre, dans la mesure o&ugrave; il convie le lecteur &agrave; devenir le spectateur d&rsquo;une situation qui lui est &eacute;trang&egrave;re. L&rsquo;exotisme de&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;</em>&nbsp;repose alors sur un &eacute;loignement au &laquo;&nbsp;caract&egrave;re &eacute;trange, bizarre, s&eacute;duisant ou r&eacute;pugnant, bref&nbsp;<em>spectaculaire&nbsp;</em><a href="#_ftn5" name="_ftnref5">[5]</a><sup>&nbsp;</sup>&raquo; mais cependant paradoxal, puisqu&rsquo;il s&rsquo;enracine dans la figure du vigile, c&rsquo;est-&agrave;-dire dans un r&ocirc;le social extr&ecirc;mement pr&eacute;sent dans la vie quotidienne des lecteurs europ&eacute;ens. D&rsquo;une certaine mani&egrave;re, le roman activerait une forme d&rsquo;exotisme interne, mais celui-ci prend tout son sens dans son articulation &agrave; un exotisme externe (si l&rsquo;on ose cette redondance), puisque l&rsquo;histoire des vigiles permet d&rsquo;esquisser celle des migrations subsahariennes en France.</p> <p>Par cons&eacute;quent, on peut donc lire Gauz &agrave; l&rsquo;aune de la notion d&rsquo;&laquo;&nbsp;exotisme postcolonial&nbsp;&raquo; th&eacute;oris&eacute;e par Graham Huggan. Selon Claire Ducournau, ce concept permet de &laquo;&nbsp;comprendre comment des marges culturelles postcoloniales prennent une valeur marchande, en adoptant une forme exotique&nbsp;<a href="#_ftn6" name="_ftnref6">[6]</a>&nbsp;&raquo;. Faire entendre des voix ext&eacute;rieures au canon litt&eacute;raire, et plus largement marginales par rapport aux repr&eacute;sentations sociales dominantes, peut ainsi devenir un argument commercial pour la diffusion des &oelig;uvres. Or c&rsquo;est bien cette marginalit&eacute; qui est mise en avant dans la m&eacute;diatisation du roman de Gauz. Ainsi&nbsp;des articles du&nbsp;<em>Point&nbsp;</em>et de&nbsp;<em>Lib&eacute;ration</em>, par exemple, qui lui sont consacr&eacute;s, mettent en avant d&egrave;s leur titre la figure du vigile et insistent sur l&rsquo;origine ivoirienne du romancier&nbsp;<a href="#_ftn7" name="_ftnref7">[7]</a>. Si le roman traite d&rsquo;une r&eacute;alit&eacute; fran&ccedil;aise, il le fait en l&rsquo;exotisant,&nbsp;dans la mesure o&ugrave; il montre au lecteur un monde qu&rsquo;il ignore et qui est li&eacute; &agrave; cette autre r&eacute;alit&eacute; qu&rsquo;est l&rsquo;espace africain. Mais comme chez Dadi&eacute;, cette alt&eacute;rit&eacute; est rendue probl&eacute;matique, puisque les fronti&egrave;res entre l&rsquo;espace d&eacute;crit par le livre et celui dans lequel &eacute;volue le lecteur ne sont plus aussi nettement distinctes&nbsp;: plut&ocirc;t qu&rsquo;un autre monde, il s&rsquo;agit de donner &agrave; lire le m&ecirc;me monde, mais diff&eacute;remment.</p> <p>Dans un tel contexte, la notion de lecture est donc essentielle. Selon Mar Garcia, l&rsquo;exotisme doit d&rsquo;abord se comprendre comme un processus au cours duquel on soumet &laquo;&nbsp;un contenu, une repr&eacute;sentation &agrave; une double op&eacute;ration de d&eacute;-contextualisation et de re-contextualisation&nbsp;<a href="#_ftn8" name="_ftnref8">[8]</a>&nbsp;&raquo;. Le lecteur consid&egrave;re une repr&eacute;sentation comme exotique parce qu&rsquo;elle lui est pr&eacute;sent&eacute;e comme non famili&egrave;re. Les deux &eacute;crivains travaillent ainsi &agrave; exotiser leurs textes. Programmant leur lecture sous cet angle, ils poussent le lecteur &agrave; regarder Paris comme un lieu spectaculairement &eacute;trange.</p> <h2>2. Exotisme et discours scientifique&nbsp;: la dimension ethnographique des textes<br /> &nbsp;</h2> <p>Le cadre &eacute;pistolaire du roman de Bernard Bilin Dadi&eacute; et la d&eacute;construction de l&rsquo;intrigue en sayn&egrave;tes&nbsp;<a href="#_ftn9" name="_ftnref9">[9]</a>&nbsp;rappellent le travail des voyages imaginaires des philosophes du XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle qui, tel Montesquieu dans les&nbsp;<em>Lettres persanes&nbsp;</em><a href="#_ftn10" name="_ftnref10">[10]</a>, s&rsquo;amusaient &agrave; concevoir et &eacute;voquer la France depuis un regard totalement ext&eacute;rieur. Cependant, lorsqu&rsquo;il &eacute;tablit un parall&egrave;le entre le texte de Dadi&eacute; et celui de Montesquieu, Romuald Fonkoua, sp&eacute;cialiste des litt&eacute;ratures francophones, s&rsquo;en sert pour faire &eacute;merger la dimension ethnographique d&rsquo;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>. Selon lui en effet, l&rsquo;une des vis&eacute;es affich&eacute;es du roman, du moins pour son narrateur, est la production d&rsquo;un savoir&nbsp;: &laquo;&nbsp;Le h&eacute;ros de Dadi&eacute; d&eacute;crit le r&eacute;el europ&eacute;en dans le but d&rsquo;instruire et non de plaire&nbsp;<a href="#_ftn11" name="_ftnref11">[11]</a>.&nbsp;&raquo; Dadi&eacute; s&rsquo;&eacute;loigne ainsi du mod&egrave;le exotique fondamental de la &laquo;&nbsp;relation de voyage&nbsp;&raquo;, qui tend certes &agrave; &laquo;&nbsp;l&rsquo;exacte description des lieux&nbsp;&raquo;, mais prend une &laquo;&nbsp;forme autobiographique&nbsp;&raquo;, selon Jean-Marc Moura&nbsp;<a href="#_ftn12" name="_ftnref12">[12]</a>. Le texte est bien &eacute;crit &agrave; la premi&egrave;re personne et, dans sa dimension &eacute;pistolaire, se pr&eacute;sente bien comme le r&eacute;cit du p&eacute;riple de son narrateur, Bertin Tanho&eacute;, &agrave; Paris. Le roman prendrait donc les atours de l&rsquo;autobiographie, ce que le travail de Nicole Vincileoni a soulign&eacute; en y rep&eacute;rant les traces de la biographie de Dadi&eacute; lui-m&ecirc;me&nbsp;<a href="#_ftn13" name="_ftnref13">[13]</a>.</p> <p>Cependant, d&egrave;s l&rsquo;ouverture du livre, le narrateur &eacute;chappe &agrave; toute caract&eacute;risation. Il affirme, rapportant les propos de ses proches lui reprochant ce manque de caract&egrave;re, &laquo;&nbsp;Moi je n&rsquo;ai ni avanc&eacute; ni recul&eacute;&nbsp;: Chrysalide&nbsp;! Kyste&nbsp;? Je ne sais. Les amis me le diront encore&nbsp;<a href="#_ftn14" name="_ftnref14">[14]</a>.&nbsp;&raquo; Ce n&rsquo;est donc pas la personnalit&eacute; du narrateur, pas plus que son p&eacute;riple qui importe au lecteur. &Agrave; la fin du texte, il n&rsquo;a pas progress&eacute;&nbsp;: il d&eacute;plore n&rsquo;avoir pas pu &laquo;&nbsp;tout voir&nbsp;&raquo; de Paris et se d&eacute;clare &laquo;&nbsp;pris&nbsp;&raquo; par la capitale fran&ccedil;aise&nbsp;<a href="#_ftn15" name="_ftnref15">[15]</a>. Le narrateur n&rsquo;est qu&rsquo;un simple observateur. Suivant une sorte d&rsquo;id&eacute;al-type de la recherche ethnographique, il s&rsquo;efface au profit de son terrain. Certes le r&eacute;cit est bien celui d&rsquo;un d&eacute;paysement&nbsp;<a href="#_ftn16" name="_ftnref16">[16]</a>, qui repose sur l&rsquo;&eacute;cart entre l&rsquo;univers familier du &laquo;&nbsp;N&egrave;gre&nbsp;&raquo; et Paris&nbsp;; mais le narrateur n&rsquo;est que l&rsquo;interpr&egrave;te de cette comparaison syst&eacute;matique plut&ocirc;t qu&rsquo;il ne se laisse marquer par elle.</p> <p>Ainsi, l&rsquo;un des chapitres d&eacute;bute en ces termes&nbsp;:</p> <blockquote> <p>Je pensais qu&rsquo;aujourd&rsquo;hui dimanche, les gens se reposeraient pour ob&eacute;ir aux pr&eacute;ceptes de leur &eacute;glise, comme nous ob&eacute;issons &agrave; ceux de nos f&eacute;ticheurs lorsqu&rsquo;ils nous disent que lundi et vendredi sont jours de repos. S&rsquo;ils se l&egrave;vent tard, c&rsquo;est pour imm&eacute;diatement aller aux affaires&nbsp;<a href="#_ftn17" name="_ftnref17">[17]</a>.</p> </blockquote> <p>Le narrateur est bien pr&eacute;sent &agrave; l&rsquo;attaque du paragraphe, mais sa seule fonction semble &ecirc;tre celle d&rsquo;un connecteur&nbsp;: il met en relation deux ensembles plus vastes, celui du &laquo;&nbsp;ils&nbsp;&raquo; et celui du &laquo;&nbsp;nous&nbsp;&raquo;. Il pose une hypoth&egrave;se en fonction d&rsquo;une logique qu&rsquo;il fonde sur les coutumes de sa communaut&eacute;, pour la voir achopper sur une autre logique. La d&eacute;marche est d&rsquo;ordre quasi-scientifique, distanci&eacute;e et objective. Le &laquo;&nbsp;je&nbsp;&raquo; n&rsquo;est que l&rsquo;herm&eacute;neute de cette science sociale qu&rsquo;est l&rsquo;ethnographie et il se met d&rsquo;abord en sc&egrave;ne pour mettre en perspective son terrain avec son univers de r&eacute;f&eacute;rence. Certes, le narrateur est &eacute;tonn&eacute; des m&oelig;urs parisiennes, mais c&rsquo;est un &eacute;tonnement neutre. En effet, il n&rsquo;est jamais fait r&eacute;f&eacute;rence aux cons&eacute;quences que ces &eacute;carts culturels pourraient avoir sur sa trajectoire. Bertin Tanho&eacute; n&rsquo;est pas affect&eacute; par la vie parisienne parce qu&rsquo;il n&rsquo;en est pas un acteur mais un simple observateur. L&rsquo;enjeu du texte n&rsquo;est plus le voyage, compris &agrave; la suite de Vincent Debaene comme &laquo;&nbsp;exp&eacute;rience singuli&egrave;re et priv&eacute;e par laquelle un sujet fait l&rsquo;&eacute;preuve de l&rsquo;&eacute;tranget&eacute;&nbsp;<a href="#_ftn18" name="_ftnref18">[18]</a>&nbsp;&raquo;, mais se situe dans la description d&rsquo;un espace observ&eacute;. Le &laquo;&nbsp;N&egrave;gre&nbsp;&raquo; de Dadi&eacute; n&rsquo;est pas pris comme les Persans de Montesquieu dans des difficult&eacute;s &agrave; d&eacute;couvrir Paris, ni dans des intrigues de s&eacute;rail&nbsp;; il est &agrave; peine un personnage, plut&ocirc;t le simple connecteur, certes imaginaire, fictionnel, de deux univers.</p> <p>On trouve un proc&eacute;d&eacute; similaire dans&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;&nbsp;</em>de Gauz. Selon Zo&eacute; Courtois,</p> <blockquote> <p>L&rsquo;&eacute;criture de&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;</em>&nbsp;peut &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute;e comme une ethnographie des hommes mondialis&eacute;s, men&eacute;e par des hommes de terrain que sont les vigiles. C&rsquo;est une ethnographie (et non une ethnologie) sans ethnologue et presque totalement objective, puisque l&rsquo;observation n&rsquo;est conditionn&eacute;e que par deux traits personnels de l&rsquo;observateur (mais peut-&ecirc;tre est-ce d&eacute;j&agrave; trop)&nbsp;: il est vigile, et il est noir&nbsp;<a href="#_ftn19" name="_ftnref19">[19]</a>.</p> </blockquote> <p>En effet le roman fait alterner deux formes de texte. Tout d&rsquo;abord, une fresque romanesque fait suivre au lecteur les personnages de Kassoum et Ossiri, deux vigiles qui, dans les liens qu&rsquo;ils entretiennent avec des personnages plus vieux, dessinent une histoire des migrations subsahariennes &agrave; Paris. Mais ces moments narratifs sont entrecoup&eacute;s par des s&eacute;ries de remarques, qui prennent la forme d&rsquo;aphorismes, li&eacute;es &agrave; un magasin. Le lecteur devine en l&rsquo;observateur un vigile noir, sans qu&rsquo;aucun trait narratif ne permette de voir dans l&rsquo;&eacute;nonciateur l&rsquo;un des personnages de l&rsquo;intrigue. Le texte tend alors &agrave; la v&eacute;rit&eacute; g&eacute;n&eacute;rale, le pr&eacute;sent de l&rsquo;indicatif prend une valeur gnomique et les d&eacute;terminants renvoient &agrave; des g&eacute;n&eacute;ralit&eacute;s. Les titres des aphorismes font par ailleurs appara&icirc;tre des termes scientifiques&nbsp;: il est question de la &laquo;&nbsp;loi du sac &agrave; main&nbsp;&raquo;, de &laquo;&nbsp;l&rsquo;axiome de Camaieu&nbsp;<a href="#_ftn20" name="_ftnref20">[20]</a>&nbsp;&raquo; ou de la &laquo;&nbsp;th&eacute;orie du d&eacute;sir capillaire&nbsp;<a href="#_ftn21" name="_ftnref21">[21]</a>&nbsp;&raquo;. L&rsquo;auteur manie aussi des chiffres, par exemple lorsqu&rsquo;il fait appara&icirc;tre le prix de certains articles des magasins, donnant ainsi l&rsquo;apparence de la pr&eacute;cision math&eacute;matique &agrave; son texte&nbsp;<a href="#_ftn22" name="_ftnref22">[22]</a>. &Agrave; travers toutes ces strat&eacute;gies, l&rsquo;observateur s&rsquo;efface derri&egrave;re son terrain. De ce fait, comme dans&nbsp;<em>Un n&egrave;gre &agrave; Paris</em>, l&rsquo;exotisme est sap&eacute;&nbsp;; il ne trouve m&ecirc;me plus de relais dans l&rsquo;&eacute;tonnement du personnage.</p> <p>Le texte mime la pr&eacute;cision scientifique, mais c&rsquo;est justement cette pr&eacute;cision, appliqu&eacute;e &agrave; des objets de la vie quotidienne qui semblent relever de l&rsquo;insignifiance sociale, qui cr&eacute;e un effet d&rsquo;&eacute;tranget&eacute;. Les dimanches matin, comme dans le texte de Bernard Dadi&eacute;, ou le prix des jeans chez Camaieu, comme dans celui de Gauz, deviennent objets d&rsquo;&eacute;tonnement pour le lecteur, non parce qu&rsquo;ils apparaissent comme des &eacute;tranget&eacute;s &agrave; ses yeux, mais parce qu&rsquo;ils sont saisis &agrave; travers un regard qui les objective et leur conf&egrave;re une importance singuli&egrave;re et nouvelle.</p> <h2>3. Le jeu de la satire<br /> &nbsp;</h2> <p>Le lecteur a bien s&ucirc;r sous les yeux des textes de fiction. Il n&rsquo;est pas amen&eacute; &agrave; y chercher un savoir positif sur une r&eacute;alit&eacute; sociale. Il entre plut&ocirc;t dans un jeu, qui repose sur le d&eacute;calage apport&eacute; par l&rsquo;humour que comportent les textes. En ceci,&nbsp;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>&nbsp;et&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;</em>&nbsp;se rapprochent de ce que Mireille Rosello appelle &laquo;&nbsp;ethnolitt&eacute;rature&nbsp;&raquo;, qu&rsquo;elle d&eacute;crit comme la &laquo;&nbsp;survie ambigu&euml; d&rsquo;un texte qui existe pour dire sa propre inexistence scientifique&nbsp;<a href="#_ftn23" name="_ftnref23">[23]</a>&nbsp;&raquo;. Les deux r&eacute;cits suscitent une &eacute;tranget&eacute; dans le quotidien, un exotisme interne, non pas en repr&eacute;sentant uniquement une confrontation, mais en construisant une objectivit&eacute; par l&rsquo;emprunt &agrave; des textes scientifiques. Cependant, ni Bernard B. Dadi&eacute; ni Gauz ne se font r&eacute;ellement ethnographes&nbsp;; ils se livrent tous deux plut&ocirc;t &agrave; la parodie de ce discours, c&rsquo;est-&agrave;-dire, pour reprendre les termes de Daniel Sangsue, &agrave; la &laquo;&nbsp;<em>transformation ludique, comique ou satirique</em>&nbsp;<a href="#_ftn24" name="_ftnref24">[24]</a>&nbsp;&raquo; du discours ethnographique.</p> <p>Ainsi, lorsque Bertin Tanho&eacute;, le narrateur d&rsquo;<em>Un n&egrave;gre &agrave; Paris</em>, constate que &laquo;&nbsp;la consommation de sel dans ce pays est effrayante&nbsp;<a href="#_ftn25" name="_ftnref25">[25]</a>&nbsp;&raquo;, il semble bien observer une coutume alimentaire, suivant une des traditions de l&rsquo;enqu&ecirc;te ethnographique&nbsp;; il le fait encore par le biais d&rsquo;une comparaison avec les Aoul&eacute;, peuple sans doute plus familier &agrave; son interlocuteur &eacute;pistolaire. Mais tr&egrave;s vite le lecteur comprend qu&rsquo;il ne s&rsquo;agit pas de cuisine, mais bien de langage&nbsp;: cette consommation de sel est une mani&egrave;re pour l&rsquo;auteur de jouer avec l&rsquo;expression populaire &laquo;&nbsp;mettre son grain de sel&nbsp;&raquo;&nbsp;; le texte parle de l&rsquo;art de la conversation et le romancier illustre qu&rsquo;il ma&icirc;trise cet art de la pointe, de la r&eacute;partie sal&eacute;e, dans son travail parodique.</p> <p>De m&ecirc;me, la scientificit&eacute; affich&eacute;e du texte de Gauz est d&rsquo;abord l&rsquo;objet d&rsquo;un d&eacute;tournement. Ainsi, parmi diff&eacute;rents proc&eacute;d&eacute;s parodiques, il utilise tr&egrave;s souvent des acronymes, ciblant une tendance des textes scientifiques &agrave; faire r&eacute;f&eacute;rence &agrave; des organismes ou &agrave; des concepts dont le nom est complexe en les abr&eacute;geant. Mais ces acronymes sont bien &eacute;videmment fantaisistes. Le vigile est ainsi nomm&eacute; le MIB, &laquo;&nbsp;le Man In Black&nbsp;<a href="#_ftn26" name="_ftnref26">[26]</a>&nbsp;&raquo;. La parodie est d&rsquo;autant plus pouss&eacute;e que l&rsquo;expression est anglaise, clin d&rsquo;&oelig;il possible &agrave; la pr&eacute;sence de plus en plus forte de cette langue dans les discours scientifiques. Mais surtout, le jeu s&rsquo;&eacute;tablit par l&rsquo;&eacute;cart qui existe entre l&rsquo;abstraction attendue pour le r&eacute;f&eacute;rent de l&rsquo;acronyme scientifique et le caract&egrave;re tr&egrave;s concret de celui, fictionnel, utilis&eacute; dans le roman. Plus encore, Gauz joue ici avec la &laquo;&nbsp;culture de masse&nbsp;&raquo;, puisque cette abr&eacute;viation renvoie au titre d&rsquo;une com&eacute;die hollywoodienne de Barry Sonnenfeld, qui met en sc&egrave;ne des agents de services de l&rsquo;immigration particuliers, puisqu&rsquo;ils surveillent les flux d&rsquo;extra-terrestres sur Terre. Dans le roman, l&rsquo;image est renvers&eacute;e&nbsp;: celui qui surveille est aussi le migrant.</p> <p>Les deux romanciers parodient le texte scientifique en le traitant sur un mode satirique. En effet, la satire t&eacute;moigne selon Sophie Duval et Jean-Pierre Sa&iuml;dah d&rsquo;une &laquo;&nbsp;irr&eacute;ductible libert&eacute; qui lui a permis de se moquer des fronti&egrave;res nettement balis&eacute;es du cadastre g&eacute;n&eacute;rique&nbsp;<a href="#_ftn27" name="_ftnref27">[27]</a>&nbsp;&raquo;. Deux traits r&eacute;currents de la forme satirique semblent en effet caract&eacute;riser les textes de Bernard B. Dadi&eacute; et de Gauz&nbsp;: la d&eacute;liaison et le rapport aux normes.</p> <p>Tout d&rsquo;abord, la satire&nbsp;&ndash;&nbsp;et c&rsquo;est l&agrave; l&rsquo;une des caract&eacute;ristiques qui lui ont permis de s&rsquo;instiller en une multitude de genres litt&eacute;raires&nbsp;&ndash;&nbsp;repose sur la fragmentation et la d&eacute;liaison&nbsp;: l&rsquo;intrigue qu&rsquo;elle met en place &laquo;&nbsp;vise au d&eacute;sordre et &agrave; l&rsquo;&eacute;miettement&nbsp;<a href="#_ftn28" name="_ftnref28">[28]</a>&nbsp;&raquo;. Or, on retrouve cet aspect dans&nbsp;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>. Le r&eacute;cit n&rsquo;a en quelque sorte pas d&rsquo;intrigue. Il s&rsquo;&eacute;crit sur le mode de la fl&acirc;nerie dans la ville, s&rsquo;arr&ecirc;tant parfois sur ses d&eacute;sagr&eacute;ments, non sans r&eacute;miniscence de la sixi&egrave;me satire de Boileau&nbsp;<a href="#_ftn29" name="_ftnref29">[29]</a>. Ainsi, le narrateur passe d&rsquo;une r&eacute;flexion g&eacute;n&eacute;rale sur les Parisiens &agrave; une anecdote sur le pourboire. Puis viendront des observations sur la coutume de porter une alliance, sur le signe de croix &agrave; l&rsquo;&eacute;glise, suivies d&rsquo;une description des c&eacute;r&eacute;monies du 14 juillet&nbsp;<a href="#_ftn30" name="_ftnref30">[30]</a>. Tout cela est expos&eacute; sans lien apparent&nbsp;&ndash; sinon en renvoyant implicitement, pour le lecteur, &agrave; l&rsquo;id&eacute;e de c&eacute;r&eacute;monial et &agrave; la th&eacute;&acirc;tralit&eacute; que le satiriste se donne pour but de r&eacute;v&eacute;ler au c&oelig;ur de la vie sociale, dans sa d&eacute;nonciation de l&rsquo;hypocrisie qui y r&egrave;gne&nbsp;<a href="#_ftn31" name="_ftnref31">[31]</a>. Il en va de m&ecirc;me pour les aphorismes de&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;.&nbsp;</em>Tous portent un titre mais leur succession ne pr&eacute;sente aucun ordre, sinon qu&rsquo;ils sont r&eacute;unis en fonction du lieu, du terrain sur lequel ils portent&nbsp;&ndash; en l&rsquo;occurrence, le magasin o&ugrave; travaille le vigile &eacute;nonciateur. Des &eacute;nonc&eacute;s tr&egrave;s g&eacute;n&eacute;raux succ&egrave;dent &agrave; des anecdotes dont est tir&eacute;e, explicitement ou non, une conclusion &agrave; port&eacute;e plus large. Ici encore le lien est dans la th&eacute;&acirc;tralit&eacute;. Tout d&rsquo;abord, les magasins auxquels il est fait r&eacute;f&eacute;rence sont des enseignes de mode et de parfumerie&nbsp;: le roman est d&rsquo;abord celui de costumes sociaux. Et lorsque la voix narrative d&eacute;crit les r&eacute;actions &agrave; la sonnerie du portique de s&eacute;curit&eacute;, elle proc&egrave;de &agrave; une typologie en fonction des nationalit&eacute;s&nbsp;<a href="#_ftn32" name="_ftnref32">[32]</a>. &Agrave; chacune correspond une gestuelle, un comportement, comme sur une sc&egrave;ne de th&eacute;&acirc;tre o&ugrave; un type de personnage se signale par son attitude.</p> <p>Car les deux textes de Bernard B. Dadi&eacute; et Gauz se r&eacute;f&egrave;rent sans cesse &agrave; une norme. Comme ces textes visent malgr&eacute; tout &agrave; dire quelque chose du monde, ils sont ancr&eacute;s dans un contexte. Leur dimension satirique provient de cet ancrage. En effet, selon Bernd Renner, la satire &laquo;&nbsp;s&rsquo;adapte [&hellip;] constamment &agrave; de nouvelles circonstances politiques, sociales et litt&eacute;raires qui, &agrave; leur tour, lui fournissent sa forme, sa mati&egrave;re et donc sa raison d&rsquo;&ecirc;tre&nbsp;<a href="#_ftn33" name="_ftnref33">[33]</a>&nbsp;&raquo;&nbsp;; elle est inform&eacute;e par un certain &eacute;tat de la soci&eacute;t&eacute;, elle est model&eacute;e par le discours social et ses normes.</p> <p>Les critiques sur la satire font cependant &eacute;merger, sch&eacute;matiquement, deux grandes mani&egrave;res de consid&eacute;rer ce rapport &agrave; la norme. Pour les uns, celle-ci est pr&eacute;sente parce que le satiriste endosse l&rsquo;ethos d&rsquo;un homme face &agrave; un&nbsp;<em>mundus inversus</em>&nbsp;o&ugrave; les valeurs de r&eacute;f&eacute;rence ont perdu de leur sens&nbsp;<a href="#_ftn34" name="_ftnref34">[34]</a>. D&rsquo;une certaine mani&egrave;re, le satiriste se confronterait en ce cas &agrave; un exotisme interne, mais qui lui serait insupportable. On retrouverait l&agrave; une certaine attitude face &agrave; l&rsquo;exotisme, qui selon Jean-Marc Moura peut devenir &laquo;&nbsp;un redoutable obstacle &agrave; toute intelligence de ce qui est diff&eacute;rent&nbsp;<a href="#_ftn35" name="_ftnref35">[35]</a>&nbsp;&raquo;. Pour les autres, le satiriste peut au contraire mettre en question l&rsquo;existence m&ecirc;me des normes. &Eacute;tudiant la satire telle qu&rsquo;elle appara&icirc;t dans la litt&eacute;rature allemande du XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, Vanessa Pietrasik montre que l&rsquo;id&eacute;e de norme finit par appara&icirc;tre au fil du temps &laquo;&nbsp;comme une notion imp&eacute;rialiste car elle niait les diff&eacute;rences et refusait l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;&nbsp;&raquo;, face &agrave; laquelle &laquo;&nbsp;les satiristes devaient renoncer &agrave; tenir un discours normatif&nbsp;<a href="#_ftn36" name="_ftnref36">[36]</a>&nbsp;&raquo;. Pascal Engel plaide lui aussi pour une lecture ouverte du rapport du satiriste aux normes&nbsp;: &laquo;&nbsp;Le satiriste n&rsquo;est pas un r&eacute;aliste quant &agrave; l&rsquo;existence des normes, mais un sceptique&nbsp;; il n&rsquo;y croit pas, et s&rsquo;il peut les d&eacute;signer, c&rsquo;est de mani&egrave;re purement ironique&nbsp;<a href="#_ftn37" name="_ftnref37">[37]</a>.&nbsp;&raquo;</p> <p>C&rsquo;est pourquoi, selon Bernd Renner, le r&ocirc;le du lecteur est si important dans la rh&eacute;torique satiriste&nbsp;<a href="#_ftn38" name="_ftnref38">[38]</a>. Il lui revient de faire l&rsquo;herm&eacute;neutique du texte et d&rsquo;en construire le sens diss&eacute;min&eacute; en diff&eacute;rentes figures d&rsquo;inversion et d&rsquo;ironie. Cet aspect est d&rsquo;autant plus important pour la satire telle qu&rsquo;elle appara&icirc;t dans des r&eacute;cits postcoloniaux. En effet, comme l&rsquo;indique John Clement Ball, ces textes ne reposent pas sur la construction d&rsquo;une cible essentialis&eacute;e, mais proc&egrave;dent d&rsquo;une forme de &laquo;&nbsp;multidirectionnalit&eacute; satirique&nbsp;<a href="#_ftn39" name="_ftnref39">[39]</a>&nbsp;&raquo;. Il s&rsquo;agit moins de viser un groupe en particulier&nbsp;&ndash;&nbsp;ni bien s&ucirc;r un individu&nbsp;&ndash;&nbsp;que de s&rsquo;attaquer &agrave; des repr&eacute;sentations construites dans un imaginaire social complexe.</p> <p>Ainsi, le propos du vigile de Gauz sur les r&eacute;actions &agrave; la sonnerie du portique de s&eacute;curit&eacute; semble bien reposer sur des normes, d&eacute;finies par un imaginaire des peuples&nbsp;; mais en r&eacute;alit&eacute;, l&rsquo;auteur joue ici avec ironie de cet imaginaire. En effet, le passage se conclut par une attitude totalement singuli&egrave;re&nbsp;: &laquo;&nbsp;Un jour, un homme s&rsquo;est carr&eacute;ment &eacute;vanoui. Il n&rsquo;a pas pu donner sa nationalit&eacute;&nbsp;<a href="#_ftn40" name="_ftnref40">[40]</a>.&nbsp;&raquo; Ironiquement, cet exemple d&eacute;truit les r&egrave;gles pr&eacute;c&eacute;demment &eacute;nonc&eacute;es en cr&eacute;ant la possibilit&eacute; d&rsquo;une &eacute;chapp&eacute;e, en dehors des normes et du langage&nbsp;; cette derni&egrave;re phrase relativise toute la th&eacute;orie des nationalit&eacute;s &eacute;labor&eacute;e pr&eacute;c&eacute;demment, en d&eacute;non&ccedil;ant son caract&egrave;re ludique de fiction, de r&eacute;alit&eacute; purement langagi&egrave;re. De m&ecirc;me, apr&egrave;s son passage en revue des rites parisien, le narrateur d&rsquo;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>&nbsp;d&eacute;clare&nbsp;: &laquo;&nbsp;Des hommes qui regardent la vie avec des yeux tout diff&eacute;rents des n&ocirc;tres, mais qui nous rejoignent cependant sur de nombreuses positions&nbsp;<a href="#_ftn41" name="_ftnref41">[41]</a>.&nbsp;&raquo; Les normes sont relatives, et le propos satirique permet justement d&rsquo;en souligner, &agrave; travers leur th&eacute;&acirc;tralit&eacute;, la dimension fictionnelle, c&rsquo;est-&agrave;-dire le fait qu&rsquo;elle repose avant tout sur des artifices et des conventions de langage.</p> <h2>4. Conclusion<br /> &nbsp;</h2> <p>V&eacute;ronique Porra &eacute;tablit une distinction entre d&rsquo;une part une tendance, &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre chez des &eacute;crivains postcoloniaux, &agrave; mettre en sc&egrave;ne un ancrage identitaire dans un terrain culturel et linguistique, ce au risque de &laquo;&nbsp;l&rsquo;exotisme postcolonial&nbsp;&raquo;, et d&rsquo;autre part un ensemble de processus de parodie et de d&eacute;sancrages identitaires, utilis&eacute;s par ceux qui visent &agrave; se soustraire &agrave; l&rsquo;injonction exotique &agrave; la diff&eacute;rence, de fa&ccedil;on &agrave; revendiquer une forme d&rsquo;universalit&eacute; de l&rsquo;&eacute;crivain&nbsp;<a href="#_ftn42" name="_ftnref42">[42]</a>. Mar Garcia et Claire Ducournau ont pu montrer que ce second type de strat&eacute;gie n&rsquo;&eacute;tait pas n&eacute;cessairement exempt d&rsquo;une possible lecture exotique des livres&nbsp;<a href="#_ftn43" name="_ftnref43">[43]</a>. Il nous semble qu&rsquo;on peut expliquer cette divergence de lecture en rapprochant les textes et les strat&eacute;gies qu&rsquo;ils mettent en &oelig;uvre. Bernard B. Dadi&eacute; appartient &agrave; une g&eacute;n&eacute;ration de militants anticoloniaux&nbsp;: il cherche &agrave; valoriser l&rsquo;Afrique en jouant sur les attentes d&rsquo;exotisme des lecteurs. Gauz est un &eacute;crivain marqu&eacute; par les logiques contemporaines de mondialisation et son roman s&rsquo;inscrit ainsi dans les reconfigurations modernes de l&rsquo;exotisme, au sein d&rsquo;un champ litt&eacute;raire qui lui aussi se mondialise. L&rsquo;un comme l&rsquo;autre construisent pourtant leur fiction sur un exotisme conscient et r&eacute;flexif. Plut&ocirc;t que de r&eacute;f&eacute;rer directement &agrave; la r&eacute;alit&eacute;, en r&eacute;alistes, ils confrontent sur un mode satirique une esth&eacute;tique exotique &agrave; un discours scientifique&nbsp;; ils se jouent ainsi des normes et d&eacute;construisent une certaine repr&eacute;sentation de l&rsquo;ailleurs.</p> <p>L&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;, condition premi&egrave;re de l&rsquo;exotisme, appara&icirc;t dans les deux romans comme une fiction. Elle est d&rsquo;abord &eacute;labor&eacute;e dans des discours. Elle est cette norme avec lesquels les deux textes jouent, sans la contester radicalement ni l&rsquo;affirmer d&eacute;finitivement. Finalement, elle n&rsquo;est qu&rsquo;un outil pour l&rsquo;imagination du narrateur d&rsquo;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>, Bertin Tanho&eacute;, qui livre une vision tout &agrave; fait singuli&egrave;re de la capitale &agrave; son interlocuteur &eacute;pistolaire&nbsp;; elle ne prend sens dans&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;</em>&nbsp;qu&rsquo;en regard des parcours singuliers des deux personnages, Ossiri et Kassoum. Dans ces deux romans qui semblent prendre en charge des identit&eacute;s collectives&nbsp;&ndash;&nbsp;celles des Africains et des Parisiens chez Dadi&eacute;, la mosa&iuml;que des identit&eacute;s culturelles &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre dans les communaut&eacute;s migrantes en France chez Gauz&nbsp;&ndash;,&nbsp;c&rsquo;est en r&eacute;alit&eacute; &agrave; la construction d&rsquo;identit&eacute;s individuelles que renvoient ironiquement l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;. Les personnages se dessinent dans le creux des discours collectifs, dans l&rsquo;&eacute;nonciation d&rsquo;une parole qui &eacute;chappe &agrave; l&rsquo;exotisme pour entrer dans une relation de communication avec le lecteur, relation ludique que l&rsquo;on sait &ecirc;tre d&rsquo;une hypocrite fraternit&eacute; depuis Baudelaire&nbsp;<a href="#_ftn44" name="_ftnref44">[44]</a>. En cherchant l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; dans le texte, une alt&eacute;rit&eacute; mise en sc&egrave;ne par l&rsquo;&eacute;crivain &agrave; son intention, le lecteur ne peut que reconna&icirc;tre un univers familier, se reconna&icirc;tre lui-m&ecirc;me dans le miroir que le r&eacute;cit lui tend.</p> <h2><strong>Notes</strong><br /> &nbsp;</h2> <p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1">[1]</a>&nbsp;Bernard B. Dadi&eacute;,&nbsp;<em>Afrique debout&nbsp;!</em>, Paris, Seghers, 1950&nbsp;;&nbsp;<em>L&eacute;gendes africaines</em>, Paris, Seghers, 1954&nbsp;;&nbsp;<em>Le Pagne noir</em>, Paris, Pr&eacute;sence africaine, 1955&nbsp;;&nbsp;<em>Climbi&eacute;</em>, Paris, Seghers, 1956.</p> <p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2">[2]</a>&nbsp;Bernard Mouralis, &laquo;&nbsp;Le m&ecirc;me et l&rsquo;autre. R&eacute;flexions sur la repr&eacute;sentation du voyage dans quelques &oelig;uvres africaines&nbsp;&raquo;, dans<em>&nbsp;Litt&eacute;ratures postcoloniales et repr&eacute;sentations de l&rsquo;ailleurs. Afrique, Cara&iuml;bes, Canada</em>, Jean Bessi&egrave;re et Jean-Marc Moura (dir.), Paris, Honor&eacute; Champion, 1999, p.&nbsp;13.</p> <p><a href="#_ftnref3" name="_ftn3">[3]</a>&nbsp;Romuald Fonkoua, &laquo;&nbsp;Le &ldquo;voyage &agrave; l&rsquo;envers&rdquo;. Essai sur le discours des voyageurs n&egrave;gres en France&nbsp;&raquo;, dans Romuald Fonkoua (dir.),&nbsp;<em>Les Discours de voyage. Afrique, Antilles</em>, Paris, Karthala, 1998, p.&nbsp;117-118.</p> <p><a href="#_ftnref4" name="_ftn4">[4]</a>&nbsp;Jean-Marc Moura,&nbsp;<em>La Litt&eacute;rature des lointains. Histoire de l&rsquo;exotisme europ&eacute;en au XX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>, Paris, Honor&eacute; Champion, 1998, p.&nbsp;37.</p> <p><a href="#_ftnref5" name="_ftn5">[5]</a>&nbsp;<em>Ibid.</em>, p.&nbsp;24.</p> <p><a href="#_ftnref6" name="_ftn6">[6]</a>&nbsp;Claire Ducournau, &laquo;&nbsp;L&rsquo;exotisme postcolonial par Graham Huggan. Pr&eacute;sentation&nbsp;&raquo;, dans<em>&nbsp;Postcolonial Studies&nbsp;: modes d&rsquo;emploi</em>, Collectif &laquo;&nbsp;Write back&nbsp;&raquo; (dir.), Lyon, Presses universitaires de Lyon, 2013, p.&nbsp;282.</p> <p><a href="#_ftnref7" name="_ftn7">[7]</a>&nbsp;Marion Cocquet, &laquo;&nbsp;Noirs, donc vigiles&nbsp;: les th&eacute;or&egrave;mes de Gauz&nbsp;&raquo;,&nbsp;<a href="http://www.lepoint.fr/culture/noirs-donc-vigiles-les-theoremes-de-gauz-06-10-2014-1869705_3.php"><em>Le Point</em>, 06/10/2014</a>,&nbsp;<a href="http://www.lepoint.fr/culture/noirs-donc-vigiles-les-theoremes-de-gauz-06-10-2014-1869705_3.php">http://www.lepoint.fr/culture/noirs-donc-vigiles-les-theoremes-de-gauz-06-10-2014-1869705_3.php</a>, consult&eacute; le 19/11/2016&nbsp;; Claire Devarrieux, &laquo;&nbsp;Gauz&nbsp;: veni, vidi, vigile&nbsp;&raquo;,&nbsp;<a href="http://next.liberation.fr/livres/2014/09/17/gauz-veni-vidi-vigile_1102604"><em>Lib&eacute;ration</em>, 17/09/2014</a>,&nbsp;<a href="http://next.liberation.fr/livres/2014/09/17/gauz-veni-vidi-vigile_1102604">http://next.liberation.fr/livres/2014/09/17/gauz-veni-vidi-vigile_1102604</a>, consult&eacute; le 19/11/2016.</p> <p><a href="#_ftnref8" name="_ftn8">[8]</a>&nbsp;Mar Garcia, &laquo;&nbsp;Postures (post)exotiques&nbsp;: &ldquo;R&eacute;veiller les vieux d&eacute;mons de l&rsquo;exotisme&rdquo;&nbsp;&raquo;, dans Anthony Mangeon (dir.),&nbsp;<em>Postures postcoloniales. Domaines africains et antillais</em>, Paris / Montpellier, Karthala / MSH-M, 2012, p.&nbsp;276.</p> <p><a href="#_ftnref9" name="_ftn9">[9]</a>&nbsp;Sur ce point, voir Claire L. Dehon,&nbsp;<em>Le roman en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire. Une nouvelle griotique</em>, New York, Peter Lang, 2014, p.&nbsp;44.</p> <p><a href="#_ftnref10" name="_ftn10">[10]</a>&nbsp;Montesquieu,&nbsp;<em>Lettres persanes&nbsp;</em>(1721), Paris, LGF, &laquo;&nbsp;Le Livre de Poche&nbsp;&raquo;, 1995.</p> <p><a href="#_ftnref11" name="_ftn11">[11]</a>&nbsp;Romuald Fonkoua, &laquo;&nbsp;Le &ldquo;voyage &agrave; l&rsquo;envers&rdquo;&nbsp;&raquo;, art. cit., p.&nbsp;136.</p> <p><a href="#_ftnref12" name="_ftn12">[12]</a>&nbsp;Jean-Marc Moura,&nbsp;<em>La Litt&eacute;rature des lointains</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;56.</p> <p><a href="#_ftnref13" name="_ftn13">[13]</a>&nbsp;Nicole Vincileoni,&nbsp;<em>Comprendre l&rsquo;&oelig;uvre de B.B. Dadi&eacute;</em>, Issy-les-Moulineaux, Les classiques africains, 1986, p.&nbsp;148-150.</p> <p><a href="#_ftnref14" name="_ftn14">[14]</a>&nbsp;Bernard B. Dadi&eacute;,&nbsp;<em>Un n&egrave;gre &agrave; Paris</em>&nbsp;(1959), Paris, Pr&eacute;sence africaine, 1984, p.&nbsp;14.</p> <p><a href="#_ftnref15" name="_ftn15">[15]</a>&nbsp;<em>Ibid.</em>, p.&nbsp;216-217.</p> <p><a href="#_ftnref16" name="_ftn16">[16]</a>&nbsp;Sur le r&ocirc;le du terrain et du d&eacute;paysement en ethnologie et en litt&eacute;rature, voir Alban Bensa &amp; Fran&ccedil;ois Pouillon, &laquo;&nbsp;Introduction. La le&ccedil;on d&rsquo;ethnographie des grands &eacute;crivains&nbsp;&raquo;, dans Alban Bensa &amp; Fran&ccedil;ois Pouillon (dir.),&nbsp;<em>Terrains d&rsquo;&eacute;crivains. Litt&eacute;rature et ethnographie</em>, Toulouse, Anacharsis, 2012, p.&nbsp;10-11.</p> <p><a href="#_ftnref17" name="_ftn17">[17]</a>&nbsp;Bernard B. Dadi&eacute;,&nbsp;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;61.</p> <p><a href="#_ftnref18" name="_ftn18">[18]</a>&nbsp;Vincent Debaene,&nbsp;<em>L&rsquo;Adieu au voyage</em>, Paris, Gallimard, &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que des sciences humaines&nbsp;&raquo;, 2010, p.&nbsp;212.</p> <p><a href="#_ftnref19" name="_ftn19">[19]</a>&nbsp;Zo&eacute; Courtois,&nbsp;<em>Mesurer po&eacute;tiquement le monde. Fictions contemporaines d&rsquo;expression fran&ccedil;aise et mondialisation chez In Koli Jean Bofane, Gauz, Fiston Mwanza Mujila</em>, M&eacute;moire de Master 2 &laquo;&nbsp;Th&eacute;orie de la litt&eacute;rature&nbsp;&raquo;, dirig&eacute; par Romuald Fonkoua, Universit&eacute; Paris-Sorbonne / ENS / EHESS, 2016, p.&nbsp;59-60.</p> <p><a href="#_ftnref20" name="_ftn20">[20]</a>&nbsp;Gauz,&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;&nbsp;</em>(2014), Paris, LGF, coll. &laquo;&nbsp;Le Livre de Poche&nbsp;&raquo;, 2015, p.&nbsp;26.</p> <p><a href="#_ftnref21" name="_ftn21">[21]</a>&nbsp;<em>Ibid.</em>, p.&nbsp;32.</p> <p><a href="#_ftnref22" name="_ftn22">[22]</a>&nbsp;<em>Ibid.</em>, p.&nbsp;29.</p> <p><a href="#_ftnref23" name="_ftn23">[23]</a>&nbsp;Mireille Rosello, &laquo;&nbsp;Ethnolitt&eacute;rature&nbsp;: survie de l&rsquo;ethnographe ou du romancier&nbsp;?&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Romance notes</em>, vol. 50, n&ordm;<sup>&nbsp;</sup>1, 2010, p.&nbsp;133.</p> <p><a href="#_ftnref24" name="_ftn24">[24]</a>&nbsp;Daniel Sangsue,&nbsp;<em>La Relation parodique</em>, Paris, Jos&eacute; Corti, 2007, p.&nbsp;104. C&rsquo;est l&rsquo;auteur qui souligne.</p> <p><a href="#_ftnref25" name="_ftn25">[25]</a>&nbsp;Bernard B. Dadi&eacute;,&nbsp;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;91.</p> <p><a href="#_ftnref26" name="_ftn26">[26]</a>&nbsp;Gauz,&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;77.</p> <p><a href="#_ftnref27" name="_ftn27">[27]</a>&nbsp;Sophie Duval &amp; Jean-Pierre Sa&iuml;dah, &laquo;&nbsp;Avant-propos&nbsp;&raquo;, dans Sophie Duval et Jean-Pierre Sa&iuml;dah (dir.), &laquo;&nbsp;Mauvais genre. La satire litt&eacute;raire moderne&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Modernit&eacute;s</em>, n&deg;&nbsp;27, 2008, p.&nbsp;9.</p> <p><a href="#_ftnref28" name="_ftn28">[28]</a>&nbsp;Sophie Duval &amp; Marc Martinez,&nbsp;<em>La Satire</em>, Paris, Armand Colin, coll. &laquo;&nbsp;U&nbsp;&raquo;, 2000, p.&nbsp;231.</p> <p><a href="#_ftnref29" name="_ftn29">[29]</a>&nbsp;Nicolas Boileau,&nbsp;<em>Satires, Ep&icirc;tres, Art po&eacute;tique</em>, Paris, Gallimard, coll. &laquo;&nbsp;Po&eacute;sie&nbsp;&raquo;, 1985, p.&nbsp;90-91. Le texte original est paru en 1666 (v.&nbsp;<em>ibid.</em>, p.&nbsp;266).</p> <p><a href="#_ftnref30" name="_ftn30">[30]</a>&nbsp;Bernard B. Dadi&eacute;,&nbsp;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;140-144.</p> <p><a href="#_ftnref31" name="_ftn31">[31]</a>&nbsp;Sophie Duval &amp; Marc Martinez,&nbsp;<em>La Satire</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;224.</p> <p><a href="#_ftnref32" name="_ftn32">[32]</a>&nbsp;Gauz,&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;97-98.</p> <p><a href="#_ftnref33" name="_ftn33">[33]</a>&nbsp;Bernd Renner, &laquo;&nbsp;Avant-propos&nbsp;&raquo;, dans Bernd Renner (dir.),&nbsp;<em>La Satire dans tous ses &eacute;tats</em>, Gen&egrave;ve, Droz, 2009, p.&nbsp;15.</p> <p><a href="#_ftnref34" name="_ftn34">[34]</a>&nbsp;Sophie Duval &amp; Marc Martinez,&nbsp;<em>La Satire</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;201-202.</p> <p><a href="#_ftnref35" name="_ftn35">[35]</a>&nbsp;Jean-Marc Moura,&nbsp;<em>La Litt&eacute;rature des lointains</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;38.</p> <p><a href="#_ftnref36" name="_ftn36">[36]</a>&nbsp;Vanessa Pietrasik,&nbsp;<em>La Satire en jeu. Critique et scepticisme en Allemagne &agrave; la fin du XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>, Tusson, Du L&eacute;rot, 2011, p.&nbsp;110.</p> <p><a href="#_ftnref37" name="_ftn37">[37]</a>&nbsp;Pascal Engel, &laquo;&nbsp;La pens&eacute;e de la satire&nbsp;&raquo;, dans &laquo;&nbsp;Mauvais genre. La satire litt&eacute;raire moderne&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;36.</p> <p><a href="#_ftnref38" name="_ftn38">[38]</a>&nbsp;Bernd Renner, &laquo;&nbsp;Avant-propos&nbsp;&raquo;, art. cit., p.&nbsp;17.</p> <p><a href="#_ftnref39" name="_ftn39">[39]</a>&nbsp;John Clement Ball,&nbsp;<em>Satire and the Postcolonial Novel</em>, New York / Londres, Routledge, 2003, p.&nbsp;13.</p> <p><a href="#_ftnref40" name="_ftn40">[40]</a>&nbsp;Gauz,&nbsp;<em>Debout-pay&eacute;</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;98.</p> <p><a href="#_ftnref41" name="_ftn41">[41]</a>&nbsp;Bernard B. Dadi&eacute;,&nbsp;<em>Un N&egrave;gre &agrave; Paris</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;144.</p> <p><a href="#_ftnref42" name="_ftn42">[42]</a>&nbsp;V&eacute;ronique Porra, &laquo;&nbsp;Rupture dans la postcolonie&nbsp;? Sur quelques modalit&eacute;s de la contestation des discours exotique et anthropologique dans les litt&eacute;ratures africaines francophones contemporaines&nbsp;&raquo;, dans Silke Segler-Messner (dir.),&nbsp;<em>Voyages &agrave; l&rsquo;envers. Formes et figures de l&rsquo;exotisme dans les litt&eacute;ratures post-coloniales francophones</em>, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2009, p.&nbsp;34-35.</p> <p><a href="#_ftnref43" name="_ftn43">[43]</a>&nbsp;Voir Mar Garcia, &laquo;&nbsp;Postures (post)exotiques&nbsp;&raquo;, art. cit., p.&nbsp;278&nbsp;; Claire Ducournau, &laquo;&nbsp;L&rsquo;exotisme postcolonial par Graham Huggan. Pr&eacute;sentation&nbsp;&raquo;, art. cit., p.&nbsp;282.</p> <p><a href="#_ftnref44" name="_ftn44">[44]</a>&nbsp;Charles Baudelaire,&nbsp;<em>Les Fleurs du Mal</em>&nbsp;(1861), Paris, UGE, &laquo;&nbsp;Le Livre de Poche&nbsp;&raquo;, 1999, p.&nbsp;50.</p> <h3>Auteur</h3> <p><strong>Florian Alix&nbsp;</strong>est ma&icirc;tre de Conf&eacute;rences &agrave; Sorbonne Universit&eacute;, rattach&eacute; au Centre International d&rsquo;&Eacute;tudes Francophones. Il est l&rsquo;auteur d&rsquo;une th&egrave;se portant sur l&rsquo;essai postcolonial. Il a &eacute;galement fait para&icirc;tre plusieurs articles sur les litt&eacute;ratures francophones et postcoloniales (&Eacute;douard Glissant, Aim&eacute; C&eacute;saire, Valentin Yves Mudimbe, Abdelkebir Khatibi, Driss Chra&iuml;bi, Dany Laferri&egrave;re&hellip;). Membre du collectif Write Back, il a &agrave; ce titre co-dirig&eacute; l&rsquo;ouvrage&nbsp;<em>Postcolonial Studies&nbsp;: modes d&rsquo;emploi</em>&nbsp;paru en 2013 aux Presses universitaires de Lyon.</p> <h3><strong>Copyright</strong></h3> <p>Tous droits r&eacute;serv&eacute;s.</p>