<blockquote> <p>MICHEL BUTOR,&nbsp;<em>lisant.</em>&nbsp;&laquo;&nbsp;Il en fait trop&nbsp;: non seulement le th&eacute;&acirc;tre, mais le roman, non seulement les invectives, mais les chansons, les petites &eacute;pop&eacute;es, mais le promontoire du songe<em>&nbsp;</em>; non seulement la litt&eacute;rature, mais le dessin. Il finira par nous prendre toute la place&nbsp;! [&hellip;]<br /> Il &eacute;crit trop&nbsp;: les volumes s&rsquo;accumulent, les &eacute;ditions prolif&egrave;rent, fourmillent de notes&nbsp;; on ne peut plus suivre.&nbsp;&raquo;<br /> DAVID COLLIN. Est-ce que Michel Butor se reconna&icirc;t [&hellip;] dans ce portrait critique et caricatural, pourrait-on dire&nbsp;?<br /> MICHEL BUTOR. Oui, je me reconnais, bien s&ucirc;r. Il y a beaucoup de choses qu&rsquo;on a dites de moi l&agrave;-dedans. Seulement, &eacute;videmment, j&rsquo;ai beaucoup moins &eacute;crit que Hugo. J&rsquo;ai &eacute;norm&eacute;ment &eacute;crit, &ccedil;a, je le reconnais [Rire de David Collin]. J&rsquo;avoue, j&rsquo;avoue. Mais ce n&rsquo;est rien &agrave; c&ocirc;t&eacute; de ce qu&rsquo;il a &eacute;crit. Incroyable, la quantit&eacute; de textes qu&rsquo;il a produits, avec des tas de versions. Donc, je suis une petite nature &agrave; c&ocirc;t&eacute; de lui.</p> </blockquote> <p>Ainsi s&rsquo;exprime Michel Butor lors de la toute derni&egrave;re &eacute;mission r&eacute;alis&eacute;e avec lui &agrave; la Radio Suisse Romande, consacr&eacute;e &agrave; l&rsquo;anthologie qu&rsquo;il vient de publier sur Hugo, quatre mois environ avant son d&eacute;c&egrave;s survenu le 24 ao&ucirc;t 2016. &laquo;&nbsp;L&rsquo;&eacute;criture poulpe&nbsp;&raquo;, qui sert d&rsquo;exergue &agrave; cette anthologie, et dont il lit ici un extrait, est une sorte d&rsquo;inventaire des propos vindicatifs tenus &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de Hugo, dont Butor admet volontiers qu&rsquo;ils le d&eacute;crivent lui aussi &ndash;&nbsp;comme si la publication de son anthologie &eacute;tait une sorte d&rsquo;&eacute;cho envoy&eacute; &agrave; celui qui disait &laquo;&nbsp;Ego Hugo&nbsp;&raquo;. Ce qui est tout &agrave; fait surprenant, cependant, c&rsquo;est la fa&ccedil;on dont Butor se pr&eacute;sente en &eacute;crivain beaucoup moins prolifique, et en &laquo;&nbsp;petite nature&nbsp;&raquo; par rapport &agrave; son a&icirc;n&eacute; &ndash;&nbsp;cette modestie ne servant pas &agrave; dissimuler l&rsquo;orgueil qu&rsquo;il y aurait &agrave; s&rsquo;y &eacute;galer. Butor affirme bien une diff&eacute;rence entre l&rsquo;auteur des&nbsp;<em>Ch&acirc;timents</em>&nbsp;et lui-m&ecirc;me, qu&rsquo;attestent maintes autres attitudes &ndash;&nbsp;et en particulier son refus de devenir &laquo;&nbsp;le vers personnellement&nbsp;&raquo; (selon l&rsquo;expression de Mallarm&eacute;), pour n&rsquo;adopter qu&rsquo;une versification minimale et facilement attaquable par ses d&eacute;fauts apparents (au regard d&rsquo;une tradition qui ne consid&egrave;re une suite de syllabes comme un vers que si elle a un aspect incantatoire et musical).</p>