<div class="entry-content"> <h3>Abstract</h3> <p>This article aims to explore the boundary between narrative and poetry within digital literature productions; our hypothesis is that narrative stories, when told in a digital context, tend to interact with poetic forms; this interaction lies in the digital device and its flow. We show that fragmentation, transfers and unstabilization are the three factors that transform narration into poetry. This hypothesis is confronted to three texts: <em>253</em> by Geoff Ryman, &ldquo;&Agrave; mains nues&rdquo;, in C&eacute;cile Portier&rsquo;s blog <em>Petite Racine</em>, and <em>Accident de personne</em> by Guillaume Vissac, initially published on Twitter during 2010. These works locate their story in the subway, which can be understood as the perfect symbol of the aesthetic of flow that we explore in this article.</p> <h3>Keywords</h3> <p class="meta-tags">digital narration, poeticization, flow, transfers, fragmentation</p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;">La ligne de partage entre la forme narrative et la forme po&eacute;tique est, en litt&eacute;rature, situ&eacute;e&nbsp;: les deux ouvrages fondamentaux &agrave; ce sujet, <em>Le R&eacute;cit po&eacute;tique</em> de Jean-Yves Tadi&eacute; (1978) et <em>Po&eacute;sie et r&eacute;cit. Une rh&eacute;torique des genres</em> de Dominique Combe (1989), ne manquent pas de le rappeler. Ce dernier caract&eacute;rise ainsi la po&eacute;sie moderne, &agrave; partir de Baudelaire et ses <em>Fleurs du mal</em> (1857), par le rejet de tout ce qui ne serait pas <em>po&eacute;sie</em>, et en particulier par le rejet &laquo;&nbsp;du narratif&nbsp;<a href="#_ftn1" name="_ftnref1">[1]</a>&nbsp;&raquo;, c&rsquo;est-&agrave;-dire du r&eacute;cit. Viendront apr&egrave;s Baudelaire, pour r&eacute;sumer &agrave; grands traits, les jalons que sont Mallarm&eacute; et Val&eacute;ry&nbsp;; comme l&rsquo;affirme alors Dominique Combe, &laquo;&nbsp;l&rsquo;exclusion du narratif, d&rsquo;abord pos&eacute;e comme une exigence propre &agrave; quelques po&egrave;tes, est devenue partie int&eacute;grante du paysage po&eacute;tique contemporain&nbsp;: c&rsquo;est bien &agrave; un v&eacute;ritable syst&egrave;me des genres que conduit le refus du r&eacute;cit en po&eacute;sie&nbsp;<a href="#_ftn2" name="_ftnref2">[2]</a>&nbsp;&raquo;. Syst&egrave;me des genres qui tend &agrave; occulter le fait que, depuis le Moyen &Acirc;ge au moins, la po&eacute;sie et le r&eacute;cit ont su cohabiter sans encombre.</p> <p style="text-align: justify;">Jean-Yves Tadi&eacute; prend appui sur ce partage g&eacute;n&eacute;rique pour proposer une d&eacute;finition du r&eacute;cit po&eacute;tique&nbsp;: il s&rsquo;agit de &laquo;&nbsp;la forme du r&eacute;cit qui emprunte au po&egrave;me ses moyens d&rsquo;action et ses effets&nbsp;&raquo;, et qui constituerait de ce fait &laquo;&nbsp;un ph&eacute;nom&egrave;ne de transition entre le roman et le po&egrave;me&nbsp;<a href="#_ftn3" name="_ftnref3">[3]</a>&nbsp;&raquo;. Postulant la solidit&eacute; de cette distinction entre deux formes que la plupart des cat&eacute;gorisations g&eacute;n&eacute;riques tendent toujours &agrave; s&eacute;parer, il d&eacute;ploie dans son ouvrage une hypoth&egrave;se qu&rsquo;il s&rsquo;attache &agrave; d&eacute;montrer par le recours &agrave; plusieurs textes du XX<sup>e</sup> si&egrave;cle&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Le r&eacute;cit po&eacute;tique conserve la fiction d&rsquo;un roman&nbsp;: des personnages auxquels il arrive une histoire dans un ou plusieurs lieux. Mais, en m&ecirc;me temps, des proc&eacute;d&eacute;s de narration renvoient au po&egrave;me&nbsp;: il y a l&agrave; un conflit constant entre la fonction r&eacute;f&eacute;rentielle, avec ses t&acirc;ches d&rsquo;&eacute;vocation et de repr&eacute;sentation, et la fonction po&eacute;tique, qui attire l&rsquo;attention sur la forme m&ecirc;me du message&nbsp;<a href="#_ftn4" name="_ftnref4">[4]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">L&rsquo;opposition cr&eacute;atrice au c&oelig;ur du r&eacute;cit po&eacute;tique tel que l&rsquo;analyse Jean-Yves Tadi&eacute; reposerait donc sur la tension entre deux fonctions renvoyant aux cat&eacute;gories propos&eacute;es par Roman Jakobson&nbsp;<a href="#_ftn5" name="_ftnref5">[5]</a>&nbsp;: la fonction r&eacute;f&eacute;rentielle, informative et centr&eacute;e sur un &eacute;l&eacute;ment du contexte qu&rsquo;elle vise &agrave; restituer, serait un trait propre au r&eacute;cit, tandis que la fonction po&eacute;tique, &laquo;&nbsp;attir[ant] l&rsquo;attention sur la forme m&ecirc;me du message&nbsp;&raquo;, permettrait de caract&eacute;riser la po&eacute;sie&nbsp;; la copr&eacute;sence de l&rsquo;une et l&rsquo;autre de ces fonctions dans un m&ecirc;me texte tendrait &agrave; en brouiller l&rsquo;identification g&eacute;n&eacute;rique, n&eacute;cessitant la cr&eacute;ation d&rsquo;une nouvelle cat&eacute;gorie, celle du r&eacute;cit po&eacute;tique.</p> <p style="text-align: justify;">Si les traits qu&rsquo;identifie Jean-Yves Tadi&eacute; concernant ce nouvel objet paraissent assez sp&eacute;cifiques, comme le fait qu&rsquo;une &oelig;uvre qualifi&eacute;e de <em>r&eacute;cit po&eacute;tique</em> conserve des effets de parall&eacute;lisme et d&rsquo;&eacute;cho&nbsp;<a href="#_ftn6" name="_ftnref6">[6]</a>, ou qu&rsquo;elle laisse peu ou pas de place &agrave; la caract&eacute;risation psychologique des personnages&nbsp;<a href="#_ftn7" name="_ftnref7">[7]</a> et au contraire beaucoup au d&eacute;cor&nbsp;<a href="#_ftn8" name="_ftnref8">[8]</a>, qui est alors parcouru dans un mouvement m&eacute;nageant une continuit&eacute; et des ruptures &agrave; la fois spatiales et temporelles&nbsp;<a href="#_ftn9" name="_ftnref9">[9]</a>, pourtant Dominique Combe en contestera la pertinence&nbsp;<a href="#_ftn10" name="_ftnref10">[10]</a>. En effet, tout son travail dans <em>Po&eacute;sie et r&eacute;cit</em> consiste &agrave; r&eacute;historiciser la d&eacute;marcation entre po&eacute;sie et r&eacute;cit qui est, depuis longtemps maintenant, essentialis&eacute;e&nbsp;: l&rsquo;identification du r&eacute;cit et de la po&eacute;sie &agrave; des fonctions dominantes, r&eacute;f&eacute;rentielle et po&eacute;tique en l&rsquo;occurrence, est en ce sens &agrave; replacer dans le contexte de sa fabrication par Val&eacute;ry et les tenants de la po&eacute;sie pure, pour lesquels la po&eacute;sie doit non seulement se pr&eacute;munir du narratif, mais &eacute;galement de toute trace de fiction, de commentaire, de description, etc., afin de permettre l&rsquo;expression d&rsquo;une int&eacute;riorit&eacute; &agrave; partir du mat&eacute;riau m&ecirc;me du langage (l&agrave; o&ugrave; le r&eacute;cit traduirait une action dans le monde par le prisme d&rsquo;un langage rendu transparent, instrumentalis&eacute; par r&eacute;f&eacute;rentialit&eacute;). Dominique Combe rappelle alors que le plus grand changement qui se joue au tournant des XIX<sup>e</sup> et XX<sup>e</sup> si&egrave;cles est la position de la po&eacute;sie elle-m&ecirc;me&nbsp;: dans la &laquo;&nbsp;&ldquo;triade&rdquo; &eacute;pique-dramatique-lyrique&nbsp;&raquo; qui structure la po&eacute;tique, la po&eacute;sie, &laquo;&nbsp;incarn&eacute;e aux XVII<sup>e</sup> et XVIII<sup>e</sup> si&egrave;cles par l&rsquo;&eacute;pique et le dramatique, au d&eacute;triment du lyrique&nbsp;<a href="#_ftn11" name="_ftnref11">[11]</a>&nbsp;&raquo;, en vient au XX<sup>e</sup> si&egrave;cle &agrave; se confondre avec le lyrisme, exclusivement, l&agrave; o&ugrave; l&rsquo;&eacute;pique est identifi&eacute; au romanesque et le dramatique au th&eacute;&acirc;tral. Autrement dit, la partition g&eacute;n&eacute;rique entre roman et po&eacute;sie, sur laquelle Jean-Yves Tadi&eacute; prend appui pour construire sa cat&eacute;gorie de <em>r&eacute;cit po&eacute;tique</em>, a une histoire que s&rsquo;attache &agrave; reconstruire Dominique Combe&nbsp;; cela signifie que les notions de <em>po&eacute;sie</em> et de <em>roman</em> ou de <em>r&eacute;cit</em>, dans ce contexte, ont un sens bien pr&eacute;cis issu des th&eacute;orisations et des usages associ&eacute;s &agrave; la po&eacute;sie moderne, de Baudelaire &agrave; Bonnefoy, en passant par Mallarm&eacute; et Val&eacute;ry. Il faudra en tenir compte dans l&rsquo;analyse.</p> <p style="text-align: justify;">Cette mise au point th&eacute;orique est un pr&eacute;alable &agrave; l&rsquo;exploration que je souhaite mener dans cet article&nbsp;: en effet, mon objectif est d&rsquo;explorer certaines formes de r&eacute;cits prises dans un contexte num&eacute;rique&nbsp;<a href="#_ftn12" name="_ftnref12">[12]</a>, c&rsquo;est-&agrave;-dire des r&eacute;cits qui naissent sur ordinateur, et plus pr&eacute;cis&eacute;ment sur internet, pour lesquels ils sont pens&eacute;s et par lesquels ils sont re&ccedil;us (ce qui n&rsquo;emp&ecirc;che pas leur publication sous d&rsquo;autres formats, comme le livre num&eacute;rique ou imprim&eacute;). Ces textes, que j&rsquo;ai pour l&rsquo;instant rang&eacute;s sous l&rsquo;&eacute;tiquette <em>r&eacute;cit</em>, constituent des objets labiles, en particulier en termes de cat&eacute;gorisation&nbsp;: on peut ainsi difficilement les consid&eacute;rer comme des <em>romans</em>, m&ecirc;me si certains d&rsquo;entre eux se construisent en r&eacute;f&eacute;rence &agrave; cet h&eacute;ritage. L&rsquo;hypoth&egrave;se qui sous-tend mon analyse consiste &agrave; dire que l&rsquo;identit&eacute; g&eacute;n&eacute;rique ou formelle que l&rsquo;on peut attribuer initialement &agrave; ces textes,&nbsp;en les qualifiant de r&eacute;cits, est remise en cause, infl&eacute;chie, complexifi&eacute;e par l&rsquo;intervention d&rsquo;un processus de po&eacute;tisation. Ce processus, je le lie directement au geste de cr&eacute;ation num&eacute;rique&nbsp;: &eacute;crire un r&eacute;cit sur un blog, sur Twitter ou sous la forme d&rsquo;un hypertexte, c&rsquo;est raconter une histoire, mais c&rsquo;est <em>en m&ecirc;me temps</em> laisser la possibilit&eacute; au po&eacute;tique d&rsquo;advenir, par ce qu&rsquo;implique, ce que permet et ce que suppose le dispositif num&eacute;rique&nbsp;<a href="#_ftn13" name="_ftnref13">[13]</a>. Comme le soutient Ren&eacute; Audet, &laquo;&nbsp;la qualit&eacute; de dispositif du num&eacute;rique appara&icirc;t dans sa capacit&eacute; de transformation du statut du texte&nbsp;<a href="#_ftn14" name="_ftnref14">[14]</a>&nbsp;&raquo;, par sa nature processuelle. Il ne s&rsquo;agit donc pas,&nbsp;dans la lign&eacute;e des travaux de Jean-Yves Tadi&eacute;, d&rsquo;inscrire cette approche dans le cadre d&rsquo;une essentialisation d&eacute;shistoricis&eacute;e des cat&eacute;gories <em>r&eacute;cit</em> et <em>po&eacute;sie</em>, mais de dire que la po&eacute;tisation du r&eacute;cit num&eacute;rique tiendrait au processus d&rsquo;&eacute;ditorialisation num&eacute;rique dans lequel ce texte est pris lorsqu&rsquo;il est cr&eacute;&eacute; pour le dispositif num&eacute;rique&nbsp;; que la <em>po&iuml;esis</em> num&eacute;rique impliquerait une po&eacute;tisation du narratif. Plus encore, les objets qui sont ici manipul&eacute;s semblent r&eacute;tifs &agrave; toute tentative trop stricte de cat&eacute;gorisation, s&rsquo;inscrivant dans le champ de la litt&eacute;rature exp&eacute;rimentale ou de la n&eacute;o-litt&eacute;rature, telles que les d&eacute;finit Magali Nachtergael&nbsp;: une litt&eacute;rature qui creuse sa propre &laquo;&nbsp;cr&eacute;ativit&eacute; linguistique, technique et m&eacute;diatique&nbsp;&raquo;, qui &laquo;&nbsp;r&eacute;siste aux outils de critique linguistiques, stylistiques et narratologiques et fait porter un doute permanent et profond sur le sens m&ecirc;me des &oelig;uvres, l&rsquo;usage des mots et leur forme&nbsp;<a href="#_ftn15" name="_ftnref15">[15]</a>&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;">Pour ces raisons, la d&eacute;finition du <em>r&eacute;cit</em> qui me servira de point de d&eacute;part est volontairement minimale&nbsp;: &laquo;&nbsp;repr&eacute;sentation d&rsquo;un &eacute;v&eacute;nement ou d&rsquo;une suite d&rsquo;&eacute;v&eacute;nements, r&eacute;els ou fictifs, par le moyen du langage, et plus particuli&egrave;rement du langage &eacute;crit&nbsp;<a href="#_ftn16" name="_ftnref16">[16]</a>&nbsp;&raquo;, le r&eacute;cit est cette &laquo;&nbsp;<em>relation </em>d&rsquo;&eacute;v&eacute;nements, que l&rsquo;on raconte et que l&rsquo;on relie&nbsp;<a href="#_ftn17" name="_ftnref17">[17]</a>&nbsp;&raquo;. La dimension <em>po&eacute;tique</em> quant &agrave; elle, et sans chercher &agrave; d&eacute;finir pr&eacute;cis&eacute;ment ce que serait la &laquo;&nbsp;po&eacute;sie num&eacute;rique&nbsp;<a href="#_ftn18" name="_ftnref18">[18]</a>&nbsp;&raquo;, se rattache &agrave; l&rsquo;attention accrue que l&rsquo;on porte &agrave; la mat&eacute;rialit&eacute; du texte, au texte comme mati&egrave;re. &Agrave; partir de cette base, et afin de mettre &agrave; l&rsquo;&eacute;preuve mon hypoth&egrave;se de d&eacute;part consistant &agrave; dire que l&rsquo;&eacute;criture num&eacute;rique induit un infl&eacute;chissement po&eacute;tique du r&eacute;cit, je d&eacute;velopperai trois points th&eacute;oriques eux-m&ecirc;mes accompagn&eacute;s d&rsquo;illustrations&nbsp;: je chercherai d&rsquo;abord &agrave; construire la <em>po&eacute;tique</em> du r&eacute;cit num&eacute;rique autour d&rsquo;une notion pivot, celle du fragment, et d&rsquo;une &oelig;uvre, <em>253</em> de Geoff Ryman&nbsp;<a href="#_ftn19" name="_ftnref19">[19]</a>, hypertexte de fiction mis en ligne en 1995. J&rsquo;interrogerai ensuite la <em>po&eacute;ticit&eacute;</em> de ces r&eacute;cits num&eacute;riques, &agrave; partir de l&rsquo;id&eacute;e que celle-ci repose sur un principe de d&eacute;placement et de d&eacute;contextualisation du narratif, et en appuyant mon propos sur la section &laquo;&nbsp;&Agrave; mains nues&nbsp;&raquo; du blog <em>Petite Racine</em> tenu par C&eacute;cile Portier. Enfin, je montrerai que le dispositif num&eacute;rique tend &agrave; mettre &agrave; l&rsquo;&eacute;preuve la fronti&egrave;re entre narratif et po&eacute;tique par un principe d&rsquo;<em>instabilisation</em>&nbsp;(si l&rsquo;on accepte le n&eacute;ologisme), passant par le prisme double de la monstration et du flux, qui trouveront &agrave; s&rsquo;illustrer dans la cr&eacute;ation <em>Accident de personne</em> &agrave; laquelle s&rsquo;est livr&eacute; Guillaume Vissac, en plusieurs temps, d&rsquo;abord sur Twitter, puis dans un livre num&eacute;rique et un livre imprim&eacute;. Les trois &oelig;uvres convoqu&eacute;es &agrave; titre d&rsquo;exemple incarnent ce processus propre au dispositif num&eacute;rique dont parle Ren&eacute; Audet, et ce &agrave; plus d&rsquo;un titre&nbsp;: parce que le texte narratif est pris dans un flux qui le d&eacute;porte sans cesse vers d&rsquo;autres formes textuelles, mais aussi parce que ces trois &oelig;uvres se d&eacute;ploient dans un espace symptomatique de notre contemporain, et symbolisant efficacement le principe de la mise en r&eacute;seau et de l&rsquo;&eacute;toilement du web sur lequel vivent ces &oelig;uvres&nbsp;: celui du m&eacute;tro.</p> <h2 style="text-align: justify;"><span id="1_Poetique_du_recit_numerique">1. Po&eacute;tique du r&eacute;cit num&eacute;rique</span><br /> &nbsp;</h2> <h3 style="text-align: justify;"><span id="11_Theorique_1_fragmentations_narratives">1.1. Th&eacute;orique, 1&nbsp;: fragmentations narratives</span></h3> <p style="text-align: justify;">L&rsquo;objet&nbsp;de cet article, le r&eacute;cit en contexte num&eacute;rique, a d&eacute;j&agrave; une histoire assez longue qui d&eacute;bute &agrave; la fin des ann&eacute;es 1980, avec la publication en CD-Rom des premiers hypertextes de fiction. L&rsquo;hypertexte de fiction appara&icirc;t ainsi, dans ces ann&eacute;es pionni&egrave;res du champ de la litt&eacute;rature num&eacute;rique, comme une de ses expressions principales, aux c&ocirc;t&eacute;s de la g&eacute;n&eacute;ration automatique des textes et de l&rsquo;animation textuelle&nbsp;<a href="#_ftn20" name="_ftnref20">[20]</a>. La po&eacute;sie num&eacute;rique se situerait plut&ocirc;t &agrave; la crois&eacute;e des deux derni&egrave;res cat&eacute;gories, explorant tout &agrave; la fois le potentiel musical, rythmique et expressif de la m&eacute;canisation de la cr&eacute;ation textuelle, et la possibilit&eacute; de pousser &agrave; son terme le traitement du signe linguistique comme mat&eacute;riau de cr&eacute;ation, en le mettant en mouvement &agrave; l&rsquo;&eacute;cran, orientant la lecture du c&ocirc;t&eacute; de la visibilit&eacute;. Emmanuelle Pelard rappelle&nbsp;<a href="#_ftn21" name="_ftnref21">[21]</a> ces traits en se livrant &agrave; une synth&egrave;se des diff&eacute;rentes propositions de classification des po&egrave;mes num&eacute;riques&nbsp;; ailleurs, elle retrace l&rsquo;histoire de ces productions dans lesquelles &laquo;&nbsp;la po&eacute;sie [se fait] image pour devenir un v&eacute;ritable fait plastique&nbsp;<a href="#_ftn22" name="_ftnref22">[22]</a>&nbsp;&raquo;. Si ce champ de la po&eacute;sie num&eacute;rique n&rsquo;est pas au c&oelig;ur de cette &eacute;tude, ses enjeux toutefois servent &agrave; penser ce qu&rsquo;il advient du r&eacute;cit d&egrave;s lors qu&rsquo;il peut, lui aussi, &ecirc;tre soumis &agrave; un travail d&rsquo;&eacute;ditorialisation num&eacute;rique offrant des possibilit&eacute;s de manipulation mat&eacute;rielle aussi bien que des contraintes de formats ou de diffusion.</p> <p style="text-align: justify;">Les premiers r&eacute;cits num&eacute;riques paraissent donc avoir partie li&eacute;e avec la forme de l&rsquo;hypertexte&nbsp;<a href="#_ftn23" name="_ftnref23">[23]</a>, qui se caract&eacute;rise par la mise en relation, &agrave; l&rsquo;aide de liens hypertextes, de multiples fragments de diff&eacute;rentes longueurs. L&rsquo;ensemble se pr&eacute;sente comme une &oelig;uvre textuelle non-lin&eacute;aire, puisque chaque fragment de texte peut potentiellement contenir un ou plusieurs liens hypertextes renvoyant vers d&rsquo;autres fragments. Dans le cadre d&rsquo;un hypertexte dit <em>de fiction</em>, il s&rsquo;agit pour les auteurs de raconter une histoire, donc de construire un r&eacute;cit, &agrave; l&rsquo;aide de cette contrainte double, la non-lin&eacute;arit&eacute; et la fragmentation&nbsp;<a href="#_ftn24" name="_ftnref24">[24]</a>. Cette fragmentation a int&eacute;ress&eacute; la recherche en ce qu&rsquo;elle a sembl&eacute; constituer un des traits centraux de la po&eacute;tique narrative en contexte num&eacute;rique, &agrave; rebours du mod&egrave;le du r&eacute;cit fleuve qui se d&eacute;ploierait dans le livre imprim&eacute;. Ren&eacute; Audet et Simon Brousseau synth&eacute;tisent ainsi cette id&eacute;e&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Marqu&eacute;es par une prise en compte avanc&eacute;e de la d&eacute;mat&eacute;rialisation de l&rsquo;&oelig;uvre litt&eacute;raire, les pratiques litt&eacute;raires num&eacute;riques se d&eacute;veloppent autour d&rsquo;une esth&eacute;tique profond&eacute;ment d&eacute;finie par la <em>diffraction</em> des contenus et par leur h&eacute;t&eacute;rog&eacute;n&eacute;it&eacute;, tout autant que par un d&eacute;tachement de la fixit&eacute; de ces contenus, rapport entre le texte et son support pourtant fortement conventionnalis&eacute; dans l&rsquo;&eacute;cosyst&egrave;me du livre&nbsp;<a href="#_ftn25" name="_ftnref25">[25]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">La notion de diffraction, approfondie par Ren&eacute; Audet ailleurs&nbsp;<a href="#_ftn26" name="_ftnref26">[26]</a>, vise non pas tant &agrave; rassembler une cat&eacute;gorie d&rsquo;&oelig;uvres qu&rsquo;&agrave; saisir un processus d&rsquo;&eacute;clatement du r&eacute;cit&nbsp;; ce processus repose sur &laquo;&nbsp;une saisie stratifi&eacute;e et r&eacute;ticul&eacute;e d&rsquo;une &oelig;uvre-archive profond&eacute;ment mosa&iuml;qu&eacute;e&nbsp;<a href="#_ftn27" name="_ftnref27">[27]</a>&nbsp;&raquo;, traduisant dans l&rsquo;&oelig;uvre la nature m&ecirc;me du dispositif num&eacute;rique, fondamentalement li&eacute; au principe du r&eacute;seau et de la base de donn&eacute;es. Pour Ren&eacute; Audet, cela constitue l&rsquo;&eacute;l&eacute;ment-clef &laquo;&nbsp;d&rsquo;une po&eacute;tique du texte litt&eacute;raire num&eacute;rique&nbsp;&raquo;, c&rsquo;est-&agrave;-dire d&rsquo;un texte marqu&eacute; par &laquo;&nbsp;une caract&eacute;ristique intrins&egrave;que du support qui l&rsquo;accueille&nbsp;<a href="#_ftn28" name="_ftnref28">[28]</a>&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;">Les premiers grands r&eacute;cits num&eacute;riques (on peut penser par exemple &agrave; <em>afternoon, a story</em> de Michael Joyce ou encore &agrave; <em>Victory Garden</em> de Stuart Moulthrop) exploitent ainsi ce processus de diffraction et de fragmentation dans une vis&eacute;e narrative. Ce faisant, ils font d&eacute;vier le r&eacute;cit de son cours en induisant de la discontinuit&eacute;&nbsp;; cette derni&egrave;re contribue &agrave; isoler des portions de r&eacute;cit en les d&eacute;tachant du fil dans lequel elles sont habituellement prises, brisant&nbsp;ainsi un des &eacute;l&eacute;ments centraux de la d&eacute;finition minimale du r&eacute;cit&nbsp;propos&eacute;e en introduction&nbsp;: la <em>mise en relation</em> d&rsquo;&eacute;v&eacute;nements entre eux par la cr&eacute;ation d&rsquo;une s&eacute;rie, d&rsquo;une succession relevant du (chrono)logique. Toute mise en relation, cependant, ne dispara&icirc;t pas dans l&rsquo;hypertexte&nbsp;: celle-ci n&rsquo;est plus (chrono)logique mais accidentelle et de ce fait, pourrait-on dire, po&eacute;tique. La lecture d&rsquo;&oelig;uvres hypertextuelles proc&egrave;de alors par effets de d&eacute;contextualisation&nbsp;: un fragment narratif peut conduire &agrave; un fragment tout autre, amor&ccedil;ant un autre r&eacute;cit ou creusant des portions de r&eacute;cits d&eacute;j&agrave; lues&nbsp;<a href="#_ftn29" name="_ftnref29">[29]</a>&nbsp;; chaque nouvelle &laquo;&nbsp;page&nbsp;&raquo; lue correspond potentiellement &agrave; un nouveau r&eacute;cit qui peut para&icirc;tre n&rsquo;avoir aucun rapport avec ce qui vient d&rsquo;&ecirc;tre lu. Tout l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t de la forme r&eacute;side alors dans ce <em>potentiel</em> de bifurcation, soumettant le r&eacute;cit &agrave; son &eacute;clatement possible, sans pour autant que cet &eacute;clatement ne s&rsquo;accomplisse &agrave; tous les coups. La lecture, et par l&agrave; l&rsquo;&oelig;uvre elle-m&ecirc;me, en ressortent marqu&eacute;es par une forme d&rsquo;instabilit&eacute;, de trouble, qui paraissent rejoindre le &laquo;&nbsp;flou&nbsp;&raquo; que Christ&egrave;le Devoivre analyse dans le r&eacute;cit po&eacute;tique, un r&eacute;cit en mouvement qui refuse l&rsquo;arr&ecirc;t, le statisme&nbsp;<a href="#_ftn30" name="_ftnref30">[30]</a>.</p> <p style="text-align: justify;">C&rsquo;est bien l&agrave; que se situe le premier infl&eacute;chissement po&eacute;tique du r&eacute;cit en contexte num&eacute;rique. Jean Cl&eacute;ment analysait dans cette perspective en 1994 l&rsquo;hypertexte de Michael Joyce, <em>afternoon, a story</em>, en affirmant en guise d&rsquo;hypoth&egrave;se que &laquo;&nbsp;l&rsquo;hypertexte fait passer la fiction du narratif au po&eacute;tique&nbsp;<a href="#_ftn31" name="_ftnref31">[31]</a>&nbsp;&raquo;. Comparant le fragment textuel dans l&rsquo;hypertexte &agrave; un aphorisme, qui produit du sens en dehors de tout contexte, il note que &laquo;&nbsp;ce sont les rep&egrave;res habituels de la fiction qui s&rsquo;effacent&nbsp;: voix narratives incertaines, ind&eacute;termination des rapports entre personnages, confusion volontaire des lieux, etc.&nbsp;&raquo;. Cet effacement, rejoignant le &laquo;&nbsp;flou&nbsp;&raquo; que je notais pr&eacute;c&eacute;demment, est ce qui oriente la lecture du c&ocirc;t&eacute; du po&eacute;tique&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Comme la po&eacute;sie lib&egrave;re les mots de leur encha&icirc;nement &agrave; la lin&eacute;arit&eacute; de l&rsquo;axe syntagmatique pour les projeter dans un r&eacute;seau de correspondances th&eacute;matiques, phon&eacute;tiques, m&eacute;taphoriques, etc. qui dessine une configuration pluri-isotopique, l&rsquo;hypertexte lib&egrave;re les s&eacute;quences narratives de leur asservissement &agrave; la grammaire du r&eacute;cit traditionnel pour les faire entrer dans l&rsquo;espace multidimensionnel d&rsquo;une structure enti&egrave;rement neuve et ouverte&nbsp;<a href="#_ftn32" name="_ftnref32">[32]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">D&egrave;s lors, ce qui ferait de ce type de r&eacute;cit num&eacute;rique un objet flottant entre les cat&eacute;gories du narratif et du po&eacute;tique serait sa lecture. Dominique Combe rappelle d&rsquo;ailleurs qu&rsquo;un des &eacute;l&eacute;ments rejet&eacute;s par Paul Val&eacute;ry dans le roman est l&rsquo;&eacute;tat dans lequel le r&eacute;cit place le lecteur&nbsp;: c&rsquo;est bien &laquo;&nbsp;la narrativit&eacute; qui asservit le lecteur en le mettant en posture d&rsquo;attente passive, mais fr&eacute;n&eacute;tique&nbsp;<a href="#_ftn33" name="_ftnref33">[33]</a>&nbsp;&raquo;. On peut alors distinguer, bien que ce soit pour partie sch&eacute;matique, une lecture lin&eacute;aire qui serait celle du r&eacute;cit dans ses formes traditionnelles, et une lecture tabulaire, qui serait celle de la po&eacute;sie, autorisant par exemple &agrave; lire les po&egrave;mes d&rsquo;un recueil dans le d&eacute;sordre ou de fa&ccedil;on non exhaustive. L&rsquo;hypertexte de fiction favorise la lecture tabulaire, et prolonge un &eacute;tat de lecture moins passif et &laquo;&nbsp;fr&eacute;n&eacute;tique&nbsp;&raquo;, mais plus contemplatif et r&eacute;flexif, que Jean-Yves Tadi&eacute; identifiait d&eacute;j&agrave; pour le r&eacute;cit po&eacute;tique&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">La lecture du r&eacute;cit po&eacute;tique, comme celle du po&egrave;me, appara&icirc;trait sans doute beaucoup plus hach&eacute;e que celle d&rsquo;un roman classique, parce que les chocs des instants po&eacute;tiques appellent, non seulement dans le r&eacute;cit, mais en nous, un prolongement, un temps qui les d&eacute;veloppe et pendant lequel nous les recr&eacute;ons. La page se contemple alors comme un tableau [&hellip;]&nbsp;<a href="#_ftn34" name="_ftnref34">[34]</a>.</p> </blockquote> <h3 style="text-align: justify;"><span id="12_Exemple_1_lhypertexte_253_a_Novel_for_the_Internet_about_London_Underground_in_Seven_Cars_and_a_Crash">1.2. Exemple, 1&nbsp;: l&rsquo;hypertexte. <em>253, a Novel for the Internet about London Underground in Seven Cars and a Crash</em></span></h3> <p style="text-align: justify;"><em>253</em>, de Geoff Ryman, est un hypertexte de fiction mis en ligne pour la premi&egrave;re fois en 1995. Faisant partie de la premi&egrave;re g&eacute;n&eacute;ration des &oelig;uvres de litt&eacute;rature num&eacute;rique, il est un des premiers hypertextes de ce genre &agrave; &ecirc;tre publi&eacute; directement sur Internet, et non sur CD-Rom comme cela avait &eacute;t&eacute; le cas pour <em>afternoon, a story</em>. Dans les ann&eacute;es qui suivent, l&rsquo;hypertexte est transpos&eacute; sous la forme d&rsquo;un ouvrage imprim&eacute;&nbsp;<a href="#_ftn35" name="_ftnref35">[35]</a>, mais reste en ligne pendant plus de quinze ans. Il n&rsquo;est d&eacute;sormais plus accessible que gr&acirc;ce &agrave; la Wayback Machine. Comme son sous-titre l&rsquo;indique, l&rsquo;&oelig;uvre, caract&eacute;ris&eacute;e comme un roman (&laquo;&nbsp;novel&nbsp;&raquo;) et affichant donc sa dimension narrative, prend pour cadre le m&eacute;tro londonien, qui se mat&eacute;rialise graphiquement sur la page de l&rsquo;hypertexte&nbsp;: le titre de l&rsquo;&oelig;uvre repr&eacute;sente le nombre &laquo;&nbsp;253&nbsp;&raquo; sous la forme de la carte d&rsquo;un r&eacute;seau du m&eacute;tro, et ce nombre est repris dans le &laquo;&nbsp;Journey Planner&nbsp;<a href="#_ftn36" name="_ftnref36">[36]</a>&nbsp;&raquo;, plac&eacute; au centre d&rsquo;un &eacute;toilement de parcours qui rassemble certaines potentialit&eacute;s de navigations permises au lecteur au sein de l&rsquo;hypertexte. Ce &laquo;&nbsp;roman&nbsp;&raquo; est polaris&eacute; par un &eacute;v&eacute;nement pr&eacute;cis, l&rsquo;accident que va conna&icirc;tre une des rames du m&eacute;tro, qui constitue le point d&rsquo;aboutissement du r&eacute;cit et, en quelque sorte, une radicalisation du principe de d&eacute;nouement. Chaque fragment textuel est organis&eacute; de la m&ecirc;me fa&ccedil;on&nbsp;: il correspond &agrave; l&rsquo;un des 253 passagers du m&eacute;tro accident&eacute;, est organis&eacute; en trois sections (&laquo;&nbsp;Outward appearence&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Inside information&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;What he / she is doing or thinking&nbsp;&raquo;), et comporte 253 mots.</p> <p style="text-align: justify;">J&rsquo;ai montr&eacute; ailleurs&nbsp;<a href="#_ftn37" name="_ftnref37">[37]</a> de quelle fa&ccedil;on, face &agrave; cette fragmentation narrative, le lecteur pouvait &ecirc;tre conduit &agrave; reconstruire, par diff&eacute;rents proc&eacute;d&eacute;s impliqu&eacute;s par l&rsquo;&oelig;uvre elle-m&ecirc;me, une intrigue, comme si le r&eacute;cit lui &eacute;tait en fait livr&eacute; &laquo;&nbsp;en kit&nbsp;&raquo;&nbsp;; cette analyse sugg&egrave;re que l&rsquo;&oelig;uvre favorise bien la lecture tabulaire &eacute;voqu&eacute;e dans le point pr&eacute;c&eacute;dent. En effet, il n&rsquo;y a pas d&rsquo;ordre ou de fil narratif &agrave; suivre, qui viendrait relier entre eux les diff&eacute;rents fragments textuels, et pour cause&nbsp;: si chaque personnage n&rsquo;est pas une entit&eacute; strictement autonome et peut &ecirc;tre reli&eacute; &agrave; d&rsquo;autres personnages de son wagon par proximit&eacute; ou parce qu&rsquo;ils vont interagir dans le cadre de la di&eacute;g&egrave;se, pour autant ces liaisons restent accidentelles et dues au hasard du placement dans les rames du m&eacute;tro. Il faut alors, pour le lecteur, chercher &agrave; donner du sens &agrave; <em>la relation qui reste</em>, &eacute;tablie par les diff&eacute;rents liens hypertextes et qui infl&eacute;chirait le r&eacute;cit vers une forme de po&eacute;tisation. &laquo;&nbsp;Mosa&iuml;qu&eacute;&nbsp;&raquo;, pour reprendre un terme de Ren&eacute; Audet et Simon Brousseau, le &laquo;&nbsp;roman&nbsp;&raquo; <em>253</em> incite &agrave; &ecirc;tre sensible aux jeux d&rsquo;&eacute;chos entre diff&eacute;rents lieux de l&rsquo;&oelig;uvre, au sein d&rsquo;une construction textuelle favorisant la r&eacute;p&eacute;tition du m&ecirc;me (les trois cat&eacute;gories et les 253 mots)&nbsp;: c&rsquo;est alors le r&eacute;seau du m&eacute;tro lui-m&ecirc;me, pens&eacute; &agrave; la fois comme flux de circulation constant et r&eacute;p&eacute;tition infinie d&rsquo;un m&ecirc;me parcours, qui sert de mod&egrave;le pour penser l&rsquo;&oelig;uvre. Chaque fragment y appara&icirc;t comme une sorte d&rsquo;entit&eacute; &agrave; la fois autonome, fonctionnant par elle-m&ecirc;me, cisel&eacute;e &agrave; la mani&egrave;re d&rsquo;une cr&eacute;ation oulipienne, mais aussi toujours en mesure d&rsquo;entrer en collision avec un autre fragment au gr&eacute; de l&rsquo;avanc&eacute;e du lecteur dans le texte, ne tenant pas compte de la chronologie des &eacute;v&eacute;nements. En effet, tout comme dans <em>afternoon, a story</em>, la navigation du lecteur dans le r&eacute;seau de l&rsquo;hypertexte l&rsquo;autorise &agrave; lire un fragment situ&eacute; avant l&rsquo;accident, puis un fragment situ&eacute; apr&egrave;s, et de nouveau un fragment situ&eacute; avant, de telle sorte que la chronologie n&rsquo;est pas tant d&eacute;construite que rendue inop&eacute;rante.</p> <p style="text-align: justify;">Ces rencontres accidentelles d&rsquo;un fragment textuel avec un autre, que le motif du <em>crash</em> th&eacute;matise, g&eacute;n&egrave;rent des &laquo;&nbsp;instants po&eacute;tiques&nbsp;&raquo;, un &laquo;&nbsp;prolongement&nbsp;&raquo; contemplatif, ainsi que le disait Jean-Yves Tadi&eacute; &agrave; propos du r&eacute;cit po&eacute;tique. Ainsi, lorsque je lis le fragment concernant la passag&egrave;re num&eacute;ro 3, Mrs Deborah Payne, je remarque parmi les liens hypertextes attirant visuellement le regard (par leur mise en couleur usuelle dans les premiers temps d&rsquo;Internet) un lien intitul&eacute; &laquo;&nbsp;businesswoman&nbsp;&raquo;, dans la premi&egrave;re section du texte&nbsp;: il vise &agrave; d&eacute;crire l&rsquo;apparence de la jeune femme, mais dans le m&ecirc;me temps, il m&rsquo;appara&icirc;t comme lest&eacute; d&rsquo;une profondeur de signification autre, qui ne se donne pas au premier regard. Le lien m&rsquo;indique une potentialit&eacute;, m&rsquo;incite &agrave; m&rsquo;extraire d&rsquo;une lecture &laquo;&nbsp;passive [et] fr&eacute;n&eacute;tique&nbsp;&raquo; caract&eacute;risant la narrativit&eacute; selon Val&eacute;ry pour laisser vagabonder ma pens&eacute;e. Cliquer sur le lien me conduit dans un autre lieu du texte, vers le passager 36, Mr Jason Luveridge&nbsp;: ma lecture de ce nouveau fragment est alors orient&eacute;e par l&rsquo;attente provoqu&eacute;e par le lien, et par la s&eacute;mantique du terme mis ainsi en exergue&nbsp;; s&rsquo;amorce une lecture double&nbsp;: l&rsquo;extrait pour lui-m&ecirc;me, et en correspondance avec le pr&eacute;c&eacute;dent, ce qui fait &eacute;merger un troisi&egrave;me texte fant&ocirc;me &agrave; la surface des deux autres. Si chaque lien correspond en d&eacute;finitive &agrave; un point de rencontre entre les personnages&nbsp;<a href="#_ftn38" name="_ftnref38">[38]</a> (ici, le personnage de Jason a &eacute;t&eacute; frapp&eacute; par l&rsquo;apparence de &laquo;&nbsp;businesswoman&nbsp;&raquo; de Deborah Payne au point d&rsquo;en tomber amoureux), il suscite &eacute;galement une lecture que l&rsquo;on pourrait dire cr&eacute;atrice, en ce qu&rsquo;elle facilite chez le lecteur la constitution de rapprochements subjectifs, fond&eacute;s autant sur les potentialit&eacute;s narratives qu&rsquo;une telle structure comporte&nbsp;<a href="#_ftn39" name="_ftnref39">[39]</a> que sur des possibles po&eacute;tiques, s&eacute;mantiques, lexicaux attachant le regard au mot et son &eacute;toilement.</p> <h2 style="text-align: justify;"><span id="2_Poeticite_du_recit_numerique">2. Po&eacute;ticit&eacute; du r&eacute;cit num&eacute;rique</span><br /> &nbsp;</h2> <h3 style="text-align: justify;"><span id="21_Theorique_2_le_deplacement">2.1. Th&eacute;orique, 2&nbsp;: le d&eacute;placement</span></h3> <p style="text-align: justify;">Ce que l&rsquo;exemple de <em>253</em> tend &agrave; montrer est l&rsquo;id&eacute;e que la po&eacute;ticit&eacute; de ce type de r&eacute;cit num&eacute;rique hypertextuel se situe dans une logique de d&eacute;placement&nbsp;: d&eacute;placement du sens du fragment par contact avec un autre fragment, d&eacute;placement des attentes de lecture par l&rsquo;abandon du d&eacute;sir fr&eacute;n&eacute;tique de l&rsquo;intrigue, d&eacute;placement du geste de cr&eacute;ation et de r&eacute;ception dans son entier, faisant du r&eacute;cit ainsi diffract&eacute; autre chose que lui-m&ecirc;me. Cette autre chose ne correspond pas &agrave; une forme qui existerait d&eacute;j&agrave; (un po&egrave;me, par exemple)&nbsp;: autrement dit, ce sont bien les processus de narrativit&eacute; et de po&eacute;ticit&eacute; qui sont ici envisag&eacute;s et non un r&eacute;sultat que l&rsquo;on pourrait reclasser. Ce <em>d&eacute;placement</em> est ce en quoi r&eacute;side la po&eacute;tisation du r&eacute;cit en contexte num&eacute;rique.</p> <p style="text-align: justify;">On peut ici appuyer l&rsquo;analyse sur l&rsquo;histoire d&eacute;j&agrave; longue de la po&eacute;sie exp&eacute;rimentale aux XX<sup>e</sup> et XXI<sup>e</sup> si&egrave;cles, qu&rsquo;analyse Ga&euml;lle Th&eacute;val dans ses travaux&nbsp;<a href="#_ftn40" name="_ftnref40">[40]</a>. Elle &eacute;voque, dans un article intitul&eacute; &laquo;&nbsp;Non-litt&eacute;rature&nbsp;<a href="#_ftn41" name="_ftnref41">[41]</a>&nbsp;&raquo;, ce principe du d&eacute;placement (ou de la d&eacute;contextualisation, terme de Jean Cl&eacute;ment&nbsp;dans ses analyses&nbsp;de l&rsquo;hypertexte de fiction) en renvoyant aux travaux du po&egrave;te Anne-James Chaton&nbsp;: sa pratique, relevant de la &laquo;&nbsp;non-litt&eacute;rature&nbsp;&raquo; ou de &laquo;&nbsp;l&rsquo;&eacute;criture sans &eacute;criture&nbsp;&raquo;&nbsp;(ainsi que Fran&ccedil;ois Bon traduit l&rsquo;<em>Uncreative Writing</em> de Kenneth Goldsmith), consiste &agrave; d&eacute;placer un mat&eacute;riau textuel dans un contexte po&eacute;tique. C&rsquo;est alors le geste qui constitue la po&eacute;ticit&eacute; du texte, et non la nature de ce dernier, qui par ailleurs n&rsquo;est g&eacute;n&eacute;ralement pas &eacute;crit de la main du po&egrave;te. On rejoint ce &laquo;&nbsp;geste d&rsquo;&eacute;crire&nbsp;&raquo; que Kenneth Goldsmith d&eacute;signe comme un &laquo;&nbsp;transfert litt&eacute;ral de langage d&rsquo;un lieu &agrave; un autre&nbsp;<a href="#_ftn42" name="_ftnref42">[42]</a>&nbsp;&raquo;. Ren&eacute; Audet place ce geste de d&eacute;placement, qu&rsquo;il situe au c&oelig;ur de la logique de la forme hypertextuelle, sous le signe de la r&eacute;ticulation&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">La r&eacute;ticulation des textes num&eacute;riques repose sur une diffraction textuelle et narrative. Appeler des contenus qui n&rsquo;appartiennent pas &agrave; la trame en cours, c&rsquo;est ouvrir &agrave; la multiplicit&eacute;&nbsp;&ndash;&nbsp;celle des voix, des types discursifs, des fils narratifs concurrents. Cette diffraction [&hellip;] trouve &agrave; s&rsquo;incarner avec force dans ces &oelig;uvres r&eacute;ticul&eacute;es, o&ugrave; la discontinuit&eacute; du texte est valoris&eacute;e, mais souvent au sein d&rsquo;un travail de (re-)connexion compl&eacute;mentaire&nbsp;<a href="#_ftn43" name="_ftnref43">[43]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Cette derni&egrave;re remarque me para&icirc;t mettre en relief le principe de la relation accidentelle pourvoyeuse de po&eacute;ticit&eacute; que j&rsquo;&eacute;voquais dans l&rsquo;exemple de <em>253&nbsp;</em>: le r&eacute;cit est soumis &agrave; une logique double d&rsquo;ouverture et de stratification qui interdit &agrave; la narrativit&eacute; de se faire synonyme de lin&eacute;arit&eacute;&nbsp;; et l&rsquo;unit&eacute; narrative d&rsquo;un r&eacute;cit num&eacute;rique semble pouvoir se construire &agrave; plusieurs &eacute;chelles, au niveau du fragment, dans la relation crois&eacute;e de plusieurs fragments distants, jusqu&rsquo;au niveau surplombant de l&rsquo;objet lui-m&ecirc;me&nbsp;&ndash;&nbsp;un peu &agrave; l&rsquo;image de ce qui se joue &agrave; la lecture d&rsquo;un recueil de po&egrave;mes.</p> <p style="text-align: justify;">Si l&rsquo;on quitte le mod&egrave;le de l&rsquo;hypertexte, qui reste en d&eacute;finitive probablement la forme la plus narrativis&eacute;e de r&eacute;cit num&eacute;rique, on constatera que l&rsquo;association des deux principes &eacute;voqu&eacute;s jusqu&rsquo;&agrave; pr&eacute;sent, la fragmentation et le d&eacute;placement, donnent lieu &agrave; d&rsquo;autres types de r&eacute;cits qui s&rsquo;&eacute;loignent du mod&egrave;le romanesque sans renoncer &agrave; la narrativit&eacute;. Ces r&eacute;cits, qui ne paraissent pas viser l&rsquo;&oelig;uvre comme totalit&eacute; et parmi lesquels je place les deux autres exemples qui servent d&rsquo;appui &agrave; ce travail, se pr&eacute;sentent comme des &eacute;clats narratifs, se rapprochant toujours plus du principe de l&rsquo;aphorisme, prenant appui sur des &eacute;l&eacute;ments du monde qu&rsquo;ils viennent mettre en fiction. Il s&rsquo;agit bien d&rsquo;un d&eacute;placement, consistant pour l&rsquo;auteur &agrave; se saisir d&rsquo;une impression pour la fixer par l&rsquo;&eacute;criture dans un dispositif capable de la remettre en mouvement, que ce dispositif soit le blog ou le compte Twitter ou Facebook, pour ne mentionner que les exemples les plus &eacute;vidents. D&egrave;s lors, la r&eacute;f&eacute;rentialit&eacute; &agrave; l&rsquo;origine m&ecirc;me du texte se trouble, et le r&eacute;cit ne cherche plus tant &agrave; traduire le monde qu&rsquo;&agrave; r&eacute;v&eacute;ler son potentiel po&eacute;tique. Ces condens&eacute;s narratifs, reposant en grande partie sur l&rsquo;implicite et incitant le lecteur, par leur force de suggestion, &agrave; s&rsquo;ins&eacute;rer dans les interstices, s&rsquo;offrent &agrave; ce dernier dans un flux permanent&nbsp;; formes &eacute;ph&eacute;m&egrave;res en ce qu&rsquo;elles sont rapidement ensevelies par leur propre accumulation sur la page de blog ou le fil Twitter, elles paraissent renouer avec un des enjeux que Paul Val&eacute;ry attribuait &agrave; la po&eacute;sie pure&nbsp;: se servir du langage comme mat&eacute;riau afin de faire &eacute;merger l&rsquo;expression d&rsquo;une int&eacute;riorit&eacute;, cet &oelig;il regardant de l&rsquo;auteur qui voit et retranscrit le monde non pas dans une prose transparente et asservie &agrave; ce dernier mais dans l&rsquo;objectif de traduire au contraire son opacit&eacute;, ou de montrer ce que l&rsquo;on n&rsquo;y voit pas. Ces fragments narratifs, contrairement &agrave; ce qui se joue par exemple dans <em>253</em>, paraissent exhiber une figure narratoriale forte que l&rsquo;on peut sans trop de difficult&eacute; associer &agrave; celle de l&rsquo;auteur&nbsp;; cette figure est alors la focale qui unifie tous ces fragments, infl&eacute;chissant la lecture vers une forme de lyrisme discret.</p> <h3 style="text-align: justify;"><span id="22_Exemple_2_le_blog_Petite_racine_A_mains_nues">2.2. Exemple, 2&nbsp;: le blog. <em>Petite racine</em>, &laquo;&nbsp;&Agrave; mains nues&nbsp;&raquo;</span></h3> <p style="text-align: justify;">C&eacute;cile Portier, sur son blog <em>Petite Racine&nbsp;</em><a href="#_ftn44" name="_ftnref44">[44]</a>, consacre une section de ses &eacute;crits &agrave; ses observations m&eacute;tropolitaines&nbsp;: &laquo;&nbsp;&Agrave; mains nues&nbsp;&raquo; rassemble ainsi plusieurs clich&eacute;s de mains de passagers du m&eacute;tro, sur lesquelles l&rsquo;autrice a fait porter son regard et qu&rsquo;elle accompagne d&rsquo;un texte retra&ccedil;ant l&rsquo;&eacute;change qu&rsquo;elle a eu avec les porteurs de ces mains remarquables qu&rsquo;elle collectionne. Puisque le projet consiste &agrave; &laquo;&nbsp;rendre compte de rencontres inopin&eacute;es dans le m&eacute;tro en faisant parler les gens de leurs mains&nbsp;<a href="#_ftn45" name="_ftnref45">[45]</a>&nbsp;&raquo;, ainsi que C&eacute;cile Portier le r&eacute;sume, on peut consid&eacute;rer ces mains comme des symboles ou des m&eacute;taphores, incarnations de sujets avec lesquels on partage, le temps du trajet en m&eacute;tro, un espace commun. De la m&ecirc;me fa&ccedil;on que <em>253</em> exploite le dispositif de l&rsquo;hypertexte pour &eacute;tablir une relation entre les diff&eacute;rents individus d&rsquo;une m&ecirc;me rame de m&eacute;tro, &laquo;&nbsp;&Agrave; mains nues&nbsp;&raquo; cherche &agrave; donner corps &agrave; ces rencontres potentielles, qui apparaissent alors comme des r&eacute;servoirs narratifs.</p> <p style="text-align: justify;">C&rsquo;est ainsi, par exemple, que la photographie sous-titr&eacute;e &laquo;&nbsp;Entre&nbsp;&raquo;, pla&ccedil;ant au centre de l&rsquo;image deux mains d&rsquo;homme comme en miroir, l&rsquo;une tatou&eacute;e de l&rsquo;inscription &laquo;&nbsp;tout&nbsp;&raquo;, l&rsquo;autre &laquo;&nbsp;rien&nbsp;&raquo;, semble avoir &eacute;t&eacute; suscit&eacute;e par la pr&eacute;sence m&ecirc;me de cette amorce textuelle inscrite sur la chair. Le texte qui d&eacute;ploie la photographie, et qui retrace l&rsquo;&eacute;change entre l&rsquo;autrice et le possesseur de ces deux mains, vise alors &agrave; raconter l&rsquo;histoire de ces tatouages, une histoire qui ne peut se dire&nbsp;: &laquo;&nbsp;J&rsquo;ai demand&eacute; pourquoi ces mots inscrits, il a r&eacute;pondu que c&rsquo;est exactement la question qu&rsquo;il s&rsquo;&eacute;tait pos&eacute; en sortant de les avoir fait inscrire, une sorte de vertige prospectif sur le tant de fois o&ugrave; la question viendrait buter contre ses mains&nbsp;<a href="#_ftn46" name="_ftnref46">[46]</a>&nbsp;&raquo;. Tout se passe alors comme si ce qui suscitait la rencontre, la photographie et l&rsquo;&eacute;change, &eacute;tait le potentiel po&eacute;tique de ces deux inscriptions, par lesquelles les mots &laquo;&nbsp;tout&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;rien&nbsp;&raquo; r&eacute;sonnent, &laquo;&nbsp;point aveugle &agrave; partir duquel tout le reste se d&eacute;ploie&nbsp;<a href="#_ftn47" name="_ftnref47">[47]</a>&nbsp;&raquo;. Le support qu&rsquo;est le blog permet de rassembler en une m&ecirc;me page l&rsquo;image et son commentaire, et de pr&eacute;server en quelque sorte, par le geste qu&rsquo;effectue le lecteur pour acc&eacute;der au texte (il lui faut cliquer sur la photographie parmi toutes les autres, en miniature, donc lui-m&ecirc;me op&eacute;rer une action de s&eacute;lection par le regard parmi de multiples mains qui s&rsquo;offrent &agrave; lui, pour pouvoir acc&eacute;der &agrave; la page rassemblant la photographie en grand format et le texte), la d&eacute;marche de l&rsquo;autrice dans sa chronologie&nbsp;: d&rsquo;abord ces deux mots inscrits &agrave; la surface du corps, puis la mise en r&eacute;cit de leur pr&eacute;sence.</p> <p style="text-align: justify;">Dans cet exemple, la contemplation po&eacute;tique semble &ecirc;tre premi&egrave;re, et le texte narratif en d&eacute;couler&nbsp;; on notera que ce dernier est parfois <em>r&eacute;cit</em> de fa&ccedil;on plus &eacute;vidente, comme dans la photographie sous-titr&eacute;e &laquo;&nbsp;D&eacute;placements&nbsp;&raquo; capturant, sur une main de femme noire, une bague reproduisant deux grandes ailes, que C&eacute;cile Portier interpr&egrave;te comme les ailes d&rsquo;Herm&egrave;s&nbsp;: c&rsquo;est alors la rencontre elle-m&ecirc;me, et ses suites, qu&rsquo;elle met en sc&egrave;ne, introduisant des discours rapport&eacute;s et terminant son texte par un effet de chute&nbsp;<a href="#_ftn48" name="_ftnref48">[48]</a>. Le processus est toujours le m&ecirc;me&nbsp;: partir de l&rsquo;impression pour aboutir au texte, permettant d&rsquo;en revenir &agrave; l&rsquo;image. On pourrait replacer cette pratique dans une lign&eacute;e qui remonterait aux fl&acirc;neries baudelairiennes, et je ne peux m&rsquo;emp&ecirc;cher de penser ici au premier quatrain du sonnet &laquo;&nbsp;&Agrave; une passante&nbsp;&raquo;, o&ugrave; la main resurgit&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">La rue assourdissante autour de moi hurlait.</p> <p style="text-align: justify;">Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,</p> <p style="text-align: justify;">Une femme passa, d&rsquo;une main fastueuse</p> <p style="text-align: justify;">Soulevant, balan&ccedil;ant le feston et l&rsquo;ourlet&nbsp;<a href="#_ftn49" name="_ftnref49">[49]</a></p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">On situera toutefois plus facilement C&eacute;cile Portier dans la lign&eacute;e de la pratique de la &laquo;&nbsp;d&eacute;rive&nbsp;&raquo;, issue du situationnisme et explor&eacute;e par plusieurs artistes qu&eacute;b&eacute;cois prenant &agrave; la fois la ville et le num&eacute;rique comme terrains de jeu. Enrico Agostini-Marchese y consacre un article dans lequel il propose une d&eacute;finition de ce que serait cette fl&acirc;nerie num&eacute;rique&nbsp;: &laquo;&nbsp;l&rsquo;exploration et [&hellip;] la mise en r&eacute;cit de la ville [&hellip;], o&ugrave; [l&rsquo;auteur] se prom&egrave;n[e] laissant [sa] trace &agrave; travers l&rsquo;utilisation de plusieurs supports&nbsp;<a href="#_ftn50" name="_ftnref50">[50]</a>&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;">Il semble que l&rsquo;on rejoint l&agrave; plusieurs caract&eacute;ristiques du r&eacute;cit po&eacute;tique qu&rsquo;analyse Christ&egrave;le Devoivre, prenant sa source dans la contemplation &agrave; laquelle se livre le sujet &eacute;crivant&nbsp;; dans ce r&eacute;cit, c&rsquo;est d&rsquo;abord &laquo;&nbsp;le vide et le plein des textes&nbsp;&raquo; qui ressort (le &laquo;&nbsp;tout&nbsp;&raquo; et le &laquo;&nbsp;rien&nbsp;&raquo;&nbsp;?), &laquo;&nbsp;une sorte de manque de consistance au niveau des &eacute;l&eacute;ments narratifs du r&eacute;cit [qui] &eacute;tonne&nbsp;<a href="#_ftn51" name="_ftnref51">[51]</a>&nbsp;&raquo;. Ce vide, ce manque de consistance du r&eacute;cit ouvrent la porte &agrave; la po&eacute;sie. C&eacute;cile Portier est famili&egrave;re de cette pratique, qu&rsquo;elle d&eacute;ploie &eacute;galement dans <em>&Eacute;tant donn&eacute;e&nbsp;</em><a href="#_ftn52" name="_ftnref52">[52]</a>, fiction num&eacute;rique qui place au centre une femme amn&eacute;sique dont on retracera l&rsquo;existence par les donn&eacute;es qu&rsquo;elle a laiss&eacute;es derri&egrave;re elle. Elle analyse cette cr&eacute;ation dans un article&nbsp;<a href="#_ftn53" name="_ftnref53">[53]</a> publi&eacute; dans un num&eacute;ro de la revue <em>Itin&eacute;raires</em> consacr&eacute; aux <em>Ethos num&eacute;riques</em>&nbsp;: en pr&eacute;ambule de ce dernier, la r&eacute;daction en charge du num&eacute;ro pr&eacute;sente pr&eacute;cis&eacute;ment l&rsquo;objet comme une &laquo;&nbsp;fiction po&eacute;tique transm&eacute;dia&nbsp;&raquo;, et C&eacute;cile Portier elle-m&ecirc;me en fait une &laquo;&nbsp;fable po&eacute;tique&nbsp;&raquo;. Partant du constat que &laquo;&nbsp;nos vies s&rsquo;&eacute;crivent par traces, que nous laissons sans y penser, mais qui nous documentent et nous archivent&nbsp;&raquo;, l&rsquo;autrice construit <em>&Eacute;tant donn&eacute;e</em> comme une entreprise de ressaisissement, par l&rsquo;&eacute;criture et par la mise en fiction, de ces traces de soi-m&ecirc;me parsem&eacute;es et capt&eacute;es par les outils num&eacute;riques&nbsp;; cette entreprise vise bien &agrave; &laquo;&nbsp;&eacute;crire pour r&eacute;introduire&nbsp;&raquo;, parce que celles-ci sont aussi les conditions de notre &laquo;&nbsp;tra&ccedil;abilit&eacute;&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;de l&rsquo;incertitude dans nos traces, comme condition de notre libert&eacute;&nbsp;&raquo;. L&rsquo;&oelig;uvre se compose d&rsquo;un assemblage de textes et de cr&eacute;ations diverses, parmi lesquelles des &laquo;&nbsp;vid&eacute;o-po&egrave;mes&nbsp;&raquo;, visant &agrave; r&eacute;tablir le r&eacute;cit de l&rsquo;existence de cette femme amn&eacute;sique. Mais ce r&eacute;cit, &agrave; l&rsquo;oppos&eacute; de la fiabilit&eacute; et de l&rsquo;exhaustivit&eacute; du r&eacute;cit officiel de nos vies port&eacute; par les donn&eacute;es, s&rsquo;efforce de m&eacute;nager des vides, de d&eacute;tourner la trace, de la po&eacute;tiser pour la d&eacute;jouer. Comme le dit C&eacute;cile Portier,</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Les donn&eacute;es nous font la promesse de pouvoir tout voir, mais on oublierait assez facilement qu&rsquo;il existe un&nbsp;<em>point aveugle</em>, que tout n&rsquo;est pas si &eacute;vident dans cette visibilit&eacute; triomphante, et que peut-&ecirc;tre il est n&eacute;cessaire de venir &eacute;clairer le plein jour d&rsquo;une autre lumi&egrave;re, po&eacute;tique, politique, pour briser l&rsquo;&eacute;vidence du &laquo;&nbsp;tout est donn&eacute;&nbsp;&raquo;.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Ce &laquo;&nbsp;point aveugle&nbsp;&raquo; &eacute;tait aussi &agrave; la source du fragment narratif &laquo;&nbsp;Entre&nbsp;&raquo; explor&eacute; ci-dessus&nbsp;: c&rsquo;est son insertion dans le tissu du r&eacute;cit qui permet &agrave; la po&eacute;sie de se d&eacute;ployer.</p> <h2 style="text-align: justify;"><span id="3_Le_narratif_et_le_poetique_en_contexte_numerique_une_frontiere">3. Le narratif et le po&eacute;tique en contexte num&eacute;rique&nbsp;: une fronti&egrave;re&nbsp;?</span><br /> &nbsp;</h2> <h3 style="text-align: justify;"><span id="31_Theorique_3_instabilisation">3.1. Th&eacute;orique, 3&nbsp;: instabilisation</span></h3> <p style="text-align: justify;">L&rsquo;exemple pr&eacute;c&eacute;dent le montre&nbsp;: &laquo;&nbsp;nous sommes certainement devenus [&hellip;] des biographes amassant des collections de faits minuscules et d&rsquo;impressions sur quiconque nous choisissons de braquer notre objectif&nbsp;<a href="#_ftn54" name="_ftnref54">[54]</a>&nbsp;&raquo;&nbsp;; s&rsquo;agirait-il, pour ces fragments narratifs qui se d&eacute;ploient sur les blogs ou sur les r&eacute;seaux sociaux et dont les exemples sont nombreux, d&rsquo;&Eacute;ric Chevillard &agrave; C&eacute;cile Coulon (qui publie &eacute;galement des po&egrave;mes), d&rsquo;(auto)biographies po&eacute;tiques&nbsp;? Pourquoi, en d&eacute;finitive, vouloir conserver des cat&eacute;gories qui ont &eacute;t&eacute; pens&eacute;es pour des productions litt&eacute;raires ant&eacute;rieures au num&eacute;rique&nbsp;? Ga&euml;lle Th&eacute;val rappelle, lorsqu&rsquo;elle &eacute;voque ces &oelig;uvres de &laquo;&nbsp;non-litt&eacute;rature&nbsp;&raquo; qu&rsquo;elle analyse par les outils de la po&eacute;sie, la r&eacute;action de Jacques Roubaud&nbsp;: &laquo;&nbsp;Pourquoi les baptiser &ldquo;po&eacute;sie&rdquo;&nbsp;? Pourquoi ne pas les nommer musique, gymnastique, air d&rsquo;op&eacute;ra, num&eacute;ro de cirque, sketch, chanson, ballet, strip-tease&nbsp;?&nbsp;<a href="#_ftn55" name="_ftnref55">[55]</a>&nbsp;&raquo; On pourrait poser la m&ecirc;me question &agrave; propos des r&eacute;cits &eacute;voqu&eacute;s dans cet article&nbsp;; reste que sans ces outils, m&ecirc;me un peu inad&eacute;quats, on s&rsquo;interdit de <em>penser</em> les objets. Je souscris de ce fait pleinement au constat de Ga&euml;lle Th&eacute;val&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Partant de la r&eacute;ception critique de ces pratiques, repr&eacute;sentative d&rsquo;une &laquo;&nbsp;doxa&nbsp;&raquo;, il s&rsquo;agirait alors de tenter de mesurer ce qui, dans les d&eacute;finitions, est amen&eacute; &agrave; se d&eacute;placer&nbsp;: o&ugrave; le terme de &laquo;&nbsp;litt&eacute;rature&nbsp;&raquo; est, comme celui d&rsquo;art, tenu pour un concept tant&ocirc;t &eacute;valuatif, tant&ocirc;t essentialiste, tant&ocirc;t institutionnaliste, l&agrave; o&ugrave; celui de &laquo;&nbsp;po&eacute;sie&nbsp;&raquo; est plus volage&nbsp;<a href="#_ftn56" name="_ftnref56">[56]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Ga&euml;lle Th&eacute;val montre que le terme de <em>po&eacute;sie </em>est manipul&eacute; et mis &agrave; distance, comme s&rsquo;il ne voulait plus rien dire ou comme s&rsquo;il &eacute;tait une &eacute;tiquette qu&rsquo;on vidait peu &agrave; peu de ses traits caract&eacute;ristiques pour en faire une coquille vide qu&rsquo;on pourrait d&eacute;passer. Il en va de m&ecirc;me dans les objets qui m&rsquo;int&eacute;ressent&nbsp;: l&rsquo;&eacute;tiquette <em>r&eacute;cit</em> est infl&eacute;chie par son insertion dans le dispositif num&eacute;rique, lui faisant subir un certain nombre de d&eacute;placements que l&rsquo;on peut identifier au geste po&eacute;tique, d&eacute;placements peut-&ecirc;tre pr&eacute;alables au d&eacute;passement.</p> <p style="text-align: justify;">Le point de rencontre le plus fort entre po&eacute;sie et r&eacute;cit en contexte num&eacute;rique repose alors sans doute sur la <em>monstration</em>&nbsp;: un des enjeux du d&eacute;ploiement de la litt&eacute;rature sur les dispositifs num&eacute;riques a &eacute;t&eacute; de mettre en relief le fait que tout texte, et pas seulement le texte po&eacute;tique, avait une mat&eacute;rialit&eacute;, et que celle-ci devait &ecirc;tre interpr&eacute;t&eacute;e. Il n&rsquo;est ainsi pas anodin que le roman r&eacute;aliste se d&eacute;veloppe, au XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, en m&ecirc;me temps que l&rsquo;objet livre lui-m&ecirc;me, de plus en plus facile &agrave; reproduire et &agrave; diffuser&nbsp;; on peut alors &eacute;tablir une concordance entre la narrativit&eacute; lin&eacute;aire reposant sur le principe de la mise en intrigue, et l&rsquo;objet livre incitant &agrave; une lecture qui irait de la couverture &agrave; la quatri&egrave;me de couverture, dans un d&eacute;roulement ininterrompu et lui-m&ecirc;me continu. Les dispositifs num&eacute;riques, permettant de s&rsquo;&eacute;manciper de cet objet, impliquent l&rsquo;invention de nouvelles proc&eacute;dures de lecture et de mat&eacute;rialisation du texte en m&ecirc;me temps qu&rsquo;ils attirent l&rsquo;attention sur le fait que le livre est lui-m&ecirc;me un dispositif avec ses contraintes de cr&eacute;ation et de r&eacute;ception&nbsp;<a href="#_ftn57" name="_ftnref57">[57]</a>. D&egrave;s lors, une attention accrue est port&eacute;e &agrave; la fa&ccedil;on dont le texte, peu importe sa nature, se d&eacute;ploie &agrave; l&rsquo;&eacute;cran, et peut en passer par l&rsquo;usage d&rsquo;outils permettant sa manipulation, qu&rsquo;il s&rsquo;agisse de le rendre cliquable par le lien hypertexte&nbsp;<a href="#_ftn58" name="_ftnref58">[58]</a>, de l&rsquo;associer &agrave; des images, de le mettre en r&eacute;seau par le biais de <em>hashtags</em>, de le mettre en couleur ou en mouvement. Emmanuelle Pelard affirme ainsi&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Quand l&rsquo;&eacute;criture sur support num&eacute;rique red&eacute;couvre &agrave; son tour l&rsquo;univers de la &laquo;&nbsp;mati&egrave;re&nbsp;&raquo;, on constate qu&rsquo;elle se rattache des qualit&eacute;s graphiques qui, pendant des si&egrave;cles, avaient &eacute;t&eacute; r&eacute;serv&eacute;es &agrave; l&rsquo;image&nbsp;: la couleur, la forme, l&rsquo;espace, et bien &eacute;videmment l&rsquo;animation. Les signes &eacute;crits ne sont plus condamn&eacute;s &agrave; seulement signifier, ils peuvent montrer ce qu&rsquo;ils d&eacute;signent ; ils r&egrave;gnent dans l&rsquo;immontrable <em>et </em>dans le montrable&nbsp;<a href="#_ftn59" name="_ftnref59">[59]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Le texte en contexte num&eacute;rique rel&egrave;ve &agrave; la fois de l&rsquo;immat&eacute;riel et du visible, il se rappelle au lecteur pour ce qu&rsquo;il dit, la fa&ccedil;on dont il le dit et l&rsquo;aspect concret qu&rsquo;il prend pour le faire&nbsp;: tenir ces trois pans ensemble dans l&rsquo;analyse contribue &agrave; inclure la po&eacute;sie, que j&rsquo;avais d&eacute;finie comme l&rsquo;attention accrue que l&rsquo;on porte &agrave; la mat&eacute;rialit&eacute; du texte, au texte comme mati&egrave;re, dans toute analyse, y compris de textes narratifs. Tout se passe d&egrave;s lors comme si le r&eacute;cit en contexte num&eacute;rique &eacute;tait toujours un r&eacute;cit po&eacute;tique, dans lequel par d&eacute;finition, selon Jean-Yves Tadi&eacute;, &laquo;&nbsp;l&rsquo;attention du lecteur est retenue par la forme du message, par la mat&eacute;rialit&eacute; du texte&nbsp;<a href="#_ftn60" name="_ftnref60">[60]</a>&nbsp;&raquo;. Je rejoins ici un constat fait par Kenneth Goldsmith, pour qui avec le num&eacute;rique &laquo;&nbsp;quelque chose a radicalement chang&eacute;&nbsp;: jamais auparavant le langage n&rsquo;avait dispos&eacute; d&rsquo;une telle <em>mat&eacute;rialit&eacute;</em>&nbsp;&ndash;&nbsp;fluidit&eacute;, plasticit&eacute;, mall&eacute;abilit&eacute;&nbsp;&ndash;&nbsp;implorant d&rsquo;&ecirc;tre activement ressaisie par l&rsquo;&eacute;crivain&nbsp;<a href="#_ftn61" name="_ftnref61">[61]</a>&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;">Que la plasticit&eacute; du texte num&eacute;rique soit associ&eacute;e &agrave; sa fluidit&eacute; me para&icirc;t crucial&nbsp;: il ne s&rsquo;agit pas seulement de constater que l&rsquo;on doit d&eacute;sormais autant voir le texte que le lire, mais &eacute;galement comprendre en quoi cela constitue une dissociation dans l&rsquo;acte de lecture, un d&eacute;doublement qui fait de la r&eacute;ception d&rsquo;une &oelig;uvre en contexte num&eacute;rique une op&eacute;ration fondamentalement instable, en mouvement (en d&eacute;placement, je l&rsquo;ai d&eacute;j&agrave; not&eacute;)&nbsp;: une op&eacute;ration d&rsquo;instabilisation de l&rsquo;&oelig;uvre.</p> <h3 style="text-align: justify;"><span id="32_Exemple_3_le_fil_Twitter_Accident_de_personne">3.2. Exemple, 3&nbsp;: le fil Twitter. <em>Accident de personne</em></span></h3> <p style="text-align: justify;"><em>Accident de personne</em>, le projet multi-support que Guillaume Vissac m&egrave;ne depuis pr&egrave;s de dix ans d&eacute;sormais, met parfaitement en lumi&egrave;re cette <em>instabilisation</em>, et ce &agrave; plus d&rsquo;un titre&nbsp;: l&rsquo;&oelig;uvre est d&rsquo;abord un ensemble de 160 fragments publi&eacute;s, &agrave; raison de trois fois par jour, sur le compte Twitter @apersonne pendant le mois de d&eacute;cembre 2010. Elle devient, en 2011, un livre num&eacute;rique, dans lequel ces fragments sont r&eacute;agenc&eacute;s, li&eacute;s, et auxquels Guillaume Vissac adjoint des intertitres, des notes de bas de page, et autant d&rsquo;autres moyens de circuler dans le texte, ce que ne permettait pas (ou du moins, pas de la m&ecirc;me fa&ccedil;on) le dispositif du fil Twitter. Enfin, en 2018, l&rsquo;&oelig;uvre devient un livre imprim&eacute;, prenant appui sur les exp&eacute;rimentations du livre num&eacute;rique mais adaptant le texte au support imprim&eacute;&nbsp;<a href="#_ftn62" name="_ftnref62">[62]</a>. V&eacute;ritable &laquo;&nbsp;roman en pi&egrave;ces d&eacute;tach&eacute;es&nbsp;&raquo; dans sa derni&egrave;re mue, comme l&rsquo;indique l&rsquo;auteur lui-m&ecirc;me, l&rsquo;&oelig;uvre para&icirc;t incarner l&rsquo;ensemble des analyses propos&eacute;es ci-dessus&nbsp;: cette mise en fiction &agrave; partir du message bien connu, du m&eacute;tro au RER, du TER au TGV, signalant un retard d&ucirc; &agrave; un &laquo;&nbsp;accident de personne&nbsp;&raquo;, d&eacute;ploie des textes &agrave; partir de ce que Guillaume Vissac, prisonnier du flux soudain arr&ecirc;t&eacute; de la rame dans laquelle il se trouve, imagine et reconstruit derri&egrave;re la froideur norm&eacute;e de l&rsquo;annonce. L&rsquo;analyse qui suit prendra principalement appui sur le premier &eacute;tat de l&rsquo;&oelig;uvre, sur Twitter&nbsp;: dans cette perspective, les deux publications suivantes font fortement d&eacute;vier le projet.</p> <p style="text-align: justify;">Les &eacute;chos avec <em>253</em> ne peuvent manquer de surgir&nbsp;: la fragmentation de l&rsquo;&oelig;uvre, le cadre du m&eacute;tro, la pr&eacute;sence de l&rsquo;accident, la contrainte du nombre de signes. Mais le dispositif n&rsquo;est pas le m&ecirc;me&nbsp;: la plateforme Twitter n&rsquo;autorise pas la pr&eacute;sence de liens hypertexte internes (c&rsquo;est-&agrave;-dire permettant de relier un fragment &agrave; un autre), et l&rsquo;auteur n&rsquo;a pas recours aux <em>hashtags</em>, qui permettraient de rassembler plusieurs Tweets. D&egrave;s lors, ce qui reste aujourd&rsquo;hui de cette &oelig;uvre en direct est un ensemble de fragments auxquels on acc&egrave;de en ordre inverse de publication, et il faut remonter le fil assez loin pour retrouver ce fameux mois de d&eacute;cembre 2010&nbsp;; plus encore, le flux de publication lui-m&ecirc;me est comme sans cesse interrompu par d&rsquo;autres Tweets, visant &agrave; remercier les lecteurs qui interagissent et partagent les publications. Comme Guillaume Vissac lui-m&ecirc;me le pr&eacute;cise dans la pr&eacute;face qu&rsquo;il adjoint &agrave; la publication de l&rsquo;&oelig;uvre sous forme de livre num&eacute;rique (entreprise que l&rsquo;on peut comprendre comme une tentative de sauver et de stabiliser l&rsquo;exp&eacute;rience), le projet est fondamentalement volatile, favorisant le d&eacute;sordre, l&rsquo;&eacute;mergence ou le surgissement de personnages fictifs au gr&eacute; des annonces bien r&eacute;elles de ces &laquo;&nbsp;accidents&nbsp;&raquo; venant heurter le flux constant de la circulation des transports en commun. Chaque journ&eacute;e correspond &agrave; un nouveau personnage, s&rsquo;exprimant &agrave; chaque fois, entre rage et d&eacute;sespoir, &agrave; la premi&egrave;re personne du singulier&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">t&ocirc;t le matin venir traquer les trains dans l&rsquo;aube encore&nbsp;: face &agrave; leurs phares respirer le reflet des nuits derni&egrave;res [&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">trains rest&eacute;s &agrave; quai, gr&egrave;ve, &amp; moi je me balance contre le pare-brise sans r&eacute;sultat&nbsp;: sans vitesse tap&eacute;e dans les m&acirc;choires on ne cr&egrave;ve pas&nbsp;<a href="#_ftn63" name="_ftnref63">[63]</a></p> <p style="text-align: justify;">mon boss me dit de pas avoir peur de sauter dans la modernit&eacute; &agrave; pieds joints, mais j&rsquo;ai peur&nbsp;: je reste &agrave; quai&nbsp;: je laisse passer les autres [&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">mis &agrave; pied pour faute grave, 5 minutes pour quitter le bureau&nbsp;: alors je cherche, cherche ma faute grave, dans les graviers, sous les rails&nbsp;<a href="#_ftn64" name="_ftnref64">[64]</a></p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Ces fragments, qui fonctionnent par ensemble de quatre Tweets le plus souvent, apparaissent ainsi comme la mise en r&eacute;cit parcellaire (et le format Twitter de l&rsquo;&oelig;uvre est le plus parcellaire des trois) de ces accidents, d&eacute;voilant dans le m&ecirc;me temps le portrait d&rsquo;une &eacute;poque, angoissant et d&eacute;sesp&eacute;r&eacute;, mais aussi parfois comique, et toujours po&eacute;tique.</p> <p style="text-align: justify;">Ce portrait se construit par la lente accumulation de ces portions narratives, qui semblent peu &agrave; peu toutes fonctionner de la m&ecirc;me fa&ccedil;on, suivant un rythme commun contribuant &agrave; la po&eacute;tisation de l&rsquo;exp&eacute;rience&nbsp;: la contrainte des 140 caract&egrave;res implique la bri&egrave;vet&eacute; et le morcellement, mais aussi un langage elliptique et hypotaxique&nbsp;; on retrouve r&eacute;guli&egrave;rement l&rsquo;usage des deux points, jouant comme une c&eacute;sure au milieu du Tweet. Ces proc&eacute;d&eacute;s tendent &agrave; attirer l&rsquo;attention au moins autant sur la nature de ces &eacute;clats textuels que sur ce qu&rsquo;ils racontent, et l&rsquo;on peut lier cet effet, en suivant Kenneth Goldsmith, au dispositif de la plateforme lui-m&ecirc;me&nbsp;: &laquo;&nbsp;l&rsquo;interface de Twitter a reconfigur&eacute; le langage ordinaire pour qu&rsquo;on le per&ccedil;oive comme extraordinaire&nbsp;<a href="#_ftn65" name="_ftnref65">[65]</a>&nbsp;&raquo;. D&eacute;tournant le principe du r&eacute;seau social, Guillaume Vissac s&rsquo;en empare ainsi <em>pour</em> ce potentiel po&eacute;tique, inscrivant son projet dans la lign&eacute;e de ceux qu&rsquo;analyse le praticien am&eacute;ricain, pour qui &laquo;&nbsp;les mots refusent d&rsquo;&ecirc;tre immobiles aujourd&rsquo;hui&nbsp;; ils sont intrins&egrave;quement sans repos. Les mots d&rsquo;aujourd&rsquo;hui sont des bulles, des manettes, des r&eacute;cipients vides, flottant dans l&rsquo;invisibilit&eacute; du r&eacute;seau [&hellip;]&nbsp;<a href="#_ftn66" name="_ftnref66">[66]</a>&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;">Plus que jamais, le r&eacute;cit qui se d&eacute;ploie dans ce contexte num&eacute;rique, qu&rsquo;il s&rsquo;agisse d&rsquo;envisager les premiers hypertextes, la pratique du blog ou la publication sur les r&eacute;seaux sociaux (plateformes qui sont d&rsquo;ailleurs de moins en moins accueillantes pour ce type de projets), doit alors faire avec la menace permanente de son propre &eacute;clatement et de son d&eacute;placement. Litt&eacute;rature du flux, l&rsquo;&eacute;criture &laquo;&nbsp;&agrave; l&rsquo;&acirc;ge num&eacute;rique&nbsp;&raquo; incite &agrave; repenser la fixit&eacute; des cat&eacute;gories d&rsquo;analyse et de classement. Si tout r&eacute;cit en contexte num&eacute;rique n&rsquo;est pas analysable en termes de po&eacute;tisation&nbsp;&ndash;&nbsp;la r&eacute;cente cr&eacute;ation <em>3<sup>e</sup> droite</em> de Fran&ccedil;ois Descraques, &eacute;galement sur Twitter, montrant par exemple assez magistralement comment la plateforme Twitter peut aussi &ecirc;tre utilis&eacute;e pour ses potentialit&eacute;s de tension narrative&nbsp;&ndash;&nbsp;pour autant, on remarquera que ce corpus de r&eacute;cits infl&eacute;chis vers (ou par) la po&eacute;sie est d&eacute;sormais large et couvre les diff&eacute;rentes &eacute;poques de ce que l&rsquo;on nomme <em>litt&eacute;rature num&eacute;rique</em>. Cet infl&eacute;chissement, que je caract&eacute;riserai &eacute;galement comme un d&eacute;passement des fronti&egrave;res, tient &agrave; plusieurs traits du dispositif num&eacute;rique lui-m&ecirc;me, qui sont alors volontairement exploit&eacute;s dans le geste de cr&eacute;ation&nbsp;: la fragmentation, le principe de d&eacute;contextualisation ou de d&eacute;placement, et l&rsquo;instabilisation. On peut les rassembler sous l&rsquo;&eacute;gide du <em>flux</em> que plusieurs ont d&eacute;j&agrave; explor&eacute;, comme Ren&eacute; Audet, Bertrand Gervais ou Ana&iuml;s Guilet, et que les r&eacute;cits pr&eacute;sent&eacute;s dans cet article, se d&eacute;roulant tous dans le cadre des transports en m&eacute;tro, incarnent.</p> <h2 style="text-align: justify;">Bibliographie<br /> &nbsp;</h2> <p style="text-align: justify;">AARSETH Espen J, <em>Cybertext. </em><em>Perspectives on Ergodic Literature</em>, Baltimore &amp; London, The John Hopkins University Press, 1997.</p> <p style="text-align: justify;">AGAMBEN Giorgio, <em>Qu&rsquo;est-ce qu&rsquo;un dispositif&nbsp;?</em>, Rueff, M. (trad.), Paris, Payot et Rivages, 2007.</p> <p style="text-align: justify;">AGOSTINI-MARCHESE Enrico, &laquo;&nbsp;La litt&eacute;rature &agrave; la d&eacute;rive num&eacute;rique. De lignes, d&rsquo;&eacute;critures et d&rsquo;espaces&nbsp;&raquo;, <em>Sens Public</em>, 15/12/2017, en ligne&nbsp;: <a href="http://sens-public.org/article1285.html">http://sens-public.org/article1285.html</a> (consult&eacute; le 26 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;">AUDET Ren&eacute;, &laquo;&nbsp;Roman &eacute;clat&eacute; ou diffraction narrative et textuelle&nbsp;? Rep&egrave;res m&eacute;thodologiques pour une po&eacute;tique compar&eacute;&nbsp;&raquo;, <em>Voix et Images</em>, vol.&nbsp;36, n&deg;&nbsp;1, 2010.</p> <p style="text-align: justify;">&ndash; &laquo;&nbsp;&Eacute;crire num&eacute;rique&nbsp;: du texte litt&eacute;raire entendu comme processus&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;1, 2014 [2015], en ligne&nbsp;: <a href="http://journals.openedition.org/itineraires/2267">http://journals.openedition.org/itineraires/2267</a> (consult&eacute; le 14 janvier 2019).</p> <p style="text-align: justify;">&ndash; &laquo;&nbsp;&OElig;uvres diffract&eacute;es contemporaines et m&eacute;andres de l&rsquo;interpr&eacute;tation : du r&eacute;cit comme errance cognitive&nbsp;&raquo;, <em>L&rsquo;Herm&eacute;neutique fictionnalis&eacute;e. Quand l&rsquo;interpr&eacute;tation s&rsquo;invite dans la fiction</em>, Correard, N., V. Ferr&eacute;, Teulade, A. (dir.), Paris, Classiques Garnier, 2015.</p> <p style="text-align: justify;">&ndash; &laquo;&nbsp;Diffraction. Pour une po&eacute;tique de la diffraction des textes narratifs&nbsp;&raquo;, <em>Fragments d&rsquo;un discours th&eacute;orique. Nouveaux &eacute;l&eacute;ments d&rsquo;un discours th&eacute;orique</em>, Bouju, E. (dir.), Nantes, &Eacute;ditions Nouvelles C&eacute;cile Defaut, 2015.</p> <p style="text-align: justify;">AUDET Ren&eacute; &amp; BROUSSEAU Simon, &laquo;&nbsp;Pour une po&eacute;tique de la diffraction de l&rsquo;&oelig;uvre litt&eacute;raire num&eacute;rique. L&rsquo;archive, le texte et l&rsquo;&oelig;uvre &agrave; l&rsquo;estompe&nbsp;&raquo;, <em>Prot&eacute;e</em>, vol.&nbsp;39, n&ordm;&nbsp;1, 2011.</p> <p style="text-align: justify;">BOOTZ Philippe, <em>Les basiques&nbsp;: la litt&eacute;rature num&eacute;rique</em>, Leonardo/OLATS, 2007, en ligne&nbsp;: <a href="http://www.olats.org/livresetudes/basiques/litteraturenumerique/basiquesLN.php">http://www.olats.org/livresetudes/basiques/litteraturenumerique/basiquesLN.php</a> (consult&eacute; le 24 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;">CL&Eacute;MENT Jean, &laquo;&nbsp;Fiction interactive et modernit&eacute;&nbsp;&raquo;, <em>Litt&eacute;rature</em>, n&ordm;&nbsp;96, 1994.</p> <p style="text-align: justify;">&ndash; &laquo;&nbsp;<em>Afternoon, a Story</em>, du narratif au po&eacute;tique dans l&rsquo;&oelig;uvre hypertextuelle&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>A:LITT&Eacute;RATURE[[carriagereturn]], </em>Actes du colloque<em> Nord Po&eacute;sie et Ordinateur</em>, Mots-Voir et Gerico-Circav, 1994.</p> <p style="text-align: justify;">&ndash; &laquo;&nbsp;Du texte &agrave; l&rsquo;hypertexte : vers une &eacute;pist&eacute;mologie de la discursivit&eacute; hypertextuelle&nbsp;&raquo;, <em>Hypertextes et hyperm&eacute;dias : r&eacute;alisations, outils, m&eacute;thodes</em>, Balpe, J.-P., Lelu, A., Saleh, I. (dir.), Paris, Herm&egrave;s, 1995.</p> <p style="text-align: justify;">&ndash; &laquo;&nbsp;Hypertexte et complexit&eacute;&nbsp;&raquo;, <em>&Eacute;tudes fran&ccedil;aises</em>, n&ordm;&nbsp;36, vol.&nbsp;2, 2000.</p> <p style="text-align: justify;">&ndash; &laquo;&nbsp;La litt&eacute;rature au risque du num&eacute;rique&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Document num&eacute;rique</em>, vol.&nbsp;5, n&ordm;&nbsp;1, 2001.</p> <p style="text-align: justify;">COMBE Dominique, <em>Po&eacute;sie et r&eacute;cit. Une rh&eacute;torique des genres</em>, Paris, Jos&eacute; Corti, 1989.</p> <p style="text-align: justify;">DEBEAUX Ga&euml;lle, &laquo;&nbsp;Penser les relations m&eacute;diatiques du livre et de l&rsquo;hypertexte &agrave; partir de&nbsp;<em>253</em>&nbsp;de Geoff Ryman et&nbsp;<em>Luminous Airplanes</em>&nbsp;de Paul La Farge&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;2, 2016 [2017], en ligne&nbsp;: <a href="#quotation">https://journals.openedition.org/itineraires/3405</a> (consult&eacute; le 25 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;">&ndash; <em>Multiplication des r&eacute;cits et st&eacute;r&eacute;om&eacute;trie litt&eacute;raire. D&rsquo;Italo Calvino aux &eacute;pifictions contemporaines</em>, disponible sur HAL&nbsp;: <a href="https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01677450">https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01677450</a> (consult&eacute; le 25 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;">&ndash; &laquo;&nbsp;S&eacute;minaire Humanit&eacute;s Num&eacute;riques MSHB &ndash; R&eacute;ception et transmission des travaux de Marcello Vitali-Rosati&nbsp;: &ldquo;Peut-on encore parler de litt&eacute;rature num&eacute;rique&nbsp;?&rdquo;&nbsp;&raquo;, Carnet de recherche <em>Multir&eacute;cits</em>, 27/03/19, en ligne&nbsp;: <a href="https://multirecits.hypotheses.org/550">https://multirecits.hypotheses.org/550</a> (consult&eacute; le 25 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;">DEVOIVRE Christ&egrave;le, &laquo;&nbsp;Errance dans le r&eacute;cit po&eacute;tique, errance du r&eacute;cit po&eacute;tique&nbsp;&raquo;, <em>Errances</em>, Cahier Figura, n&ordm;&nbsp;13, 2005.</p> <p style="text-align: justify;">FORTIN-TOURNES Anne-Laure, &laquo;&nbsp;Confluence du corps et des signes dans la fiction &eacute;lectronique hypertextuelle&nbsp;: le cas de&nbsp;<em>253</em>&nbsp;de Geoff Ryman&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>&Eacute;tudes britanniques contemporaines</em>, n&ordm;&nbsp;52,&nbsp;2017.</p> <p style="text-align: justify;">GENETTE G&eacute;rard, &laquo; Fronti&egrave;res du r&eacute;cit &raquo;, <em>Communications</em>, n&ordm;&nbsp;8, 1966.</p> <p style="text-align: justify;">GOLDSMITH Kenneth, <em>L&rsquo;&Eacute;criture sans &eacute;criture. Du langage &agrave; l&rsquo;&acirc;ge num&eacute;rique</em>, Bon F. (trad.), Paris, Jean Bo&icirc;te &Eacute;ditions, 2018.</p> <p style="text-align: justify;">HAYLES N. Katherine, <em>Writing Machines</em>, Cambridge, Massachusetts, MIT Press, 2002.</p> <p style="text-align: justify;">JAKOBSON Roman, &laquo;&nbsp;Linguistique et po&eacute;tique&nbsp;&raquo;, dans <em>Essais de linguistique g&eacute;n&eacute;rale</em>, t.&nbsp;1, Paris, &Eacute;ditions de Minuit, 1963.</p> <p style="text-align: justify;">NACHTERGAEL Magali, &laquo;&nbsp;Pr&eacute;sentation&nbsp;&raquo;, <em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;3, 2017 [2018], en ligne&nbsp;: <a href="https://journals.openedition.org/itineraires/3876">https://journals.openedition.org/itineraires/3876</a> (consult&eacute; le 23 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;">PELARD Emmanuelle, &laquo;&nbsp;Po&eacute;tique de la po&eacute;sie num&eacute;rique pour &eacute;crans tactiles&nbsp;&raquo;, dans <em>Po&eacute;tiques et esth&eacute;tiques num&eacute;riques tactiles : litt&eacute;rature et arts</em>, Ana&iuml;s Guilet et Emmanuel Pelard (dir.), Cahiers virtuels du laboratoire NT2, n&deg;&nbsp;8, 2016, en ligne&nbsp;: <a href="http://nt2.uqam.ca/fr/cahiers-virtuels/article/poetique-de-la-poesie-numerique-pour-ecrans-tactiles">http://nt2.uqam.ca/fr/cahiers-virtuels/article/poetique-de-la-poesie-numerique-pour-ecrans-tactiles</a> (consult&eacute; le 23 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;">&ndash; &laquo;&nbsp;Po&eacute;sies num&eacute;riques tactiles&nbsp;: toucher les signes par la &ldquo;main de l&rsquo;&oelig;il&rdquo;, manipuler la mati&egrave;re &agrave; l&rsquo;&eacute;cran&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;3, 2017 [2018], en ligne&nbsp;: <a href="http://journals.openedition.org/itineraires/3983">http://journals.openedition.org/itineraires/3983</a> (consult&eacute; le 23 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;">PORTIER C&eacute;cile, &laquo;&nbsp;<em>&Eacute;tant donn&eacute;e&nbsp;</em>: une fable po&eacute;tique sur le r&eacute;gime de notre identit&eacute; num&eacute;rique&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;3, 2015 [2016], en ligne&nbsp;: <a href="https://journals.openedition.org/itineraires/3124">https://journals.openedition.org/itineraires/3124</a> (consult&eacute; le 23 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;">SAEMMER Alexandra, <em>Rh&eacute;torique du texte num&eacute;rique : figures de la lecture, anticipations de pratiques</em>, Villeurbanne, Presses de l&rsquo;ENSSIB, 2015.</p> <p style="text-align: justify;">TADI&Eacute; Jean-Yves, <em>Le R&eacute;cit po&eacute;tique</em> [1978], Paris, Gallimard, 1992.</p> <p style="text-align: justify;">TH&Eacute;VAL Ga&euml;lle, <em>Po&eacute;sies ready-made. xx<sup>e</sup>-xxi<sup>e</sup> si&egrave;cles</em>, Paris, L&rsquo;Harmattan, coll.&nbsp;&laquo;&nbsp;Arts &amp; M&eacute;dias&nbsp;&raquo;, 2015.</p> <p style="text-align: justify;">&ndash; &laquo;&nbsp;Non-litt&eacute;rature&nbsp;&raquo;, <em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;3, 2017 [2018], en ligne&nbsp;: <a href="http://journals.openedition.org/itineraires/3983">http://journals.openedition.org/itineraires/3983</a> (consult&eacute; le 24 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;">VANDENDORPE Christian, <em>Du papyrus &agrave; l&rsquo;hypertexte : essai sur les mutations du texte et de la lecture</em>, Paris, &Eacute;ditions La D&eacute;couverte, 1999.</p> <h2 style="text-align: justify;">Notes<br /> &nbsp;</h2> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1">[1]</a> Dominique Combe, <em>Po&eacute;sie et r&eacute;cit. Une rh&eacute;torique des genres</em>, Paris, Jos&eacute; Corti, 1989, p.&nbsp;7.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2">[2]</a> <em>Ibid</em>., p.&nbsp;10.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3">[3]</a> Jean-Yves Tadi&eacute;, <em>Le R&eacute;cit po&eacute;tique</em> [1978], Paris, Gallimard, 1992, p.&nbsp;7, pour cette citation et la pr&eacute;c&eacute;dente.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4">[4]</a> <em>Ibid.</em>, p.&nbsp;7-8.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5">[5]</a> Voir Roman Jakobson, &laquo;&nbsp;Linguistique et po&eacute;tique&nbsp;&raquo;, dans <em>Essais de linguistique g&eacute;n&eacute;rale</em>, t.&nbsp;1, Paris, &Eacute;ditions de Minuit, 1963.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref6" name="_ftn6">[6]</a> &laquo;&nbsp;Les unit&eacute;s de mesure peuvent changer, pourvu qu&rsquo;il s&rsquo;agisse toujours de mesurer des s&eacute;quences&nbsp;&raquo; (Jean-Yves Tadi&eacute;, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;8).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref7" name="_ftn7">[7]</a> &laquo;&nbsp;Le d&eacute;p&eacute;rissement des r&eacute;f&eacute;rences r&eacute;alistes comme de la psychologie est la condition qui permet l&rsquo;int&eacute;gration des personnages au r&eacute;cit po&eacute;tique&nbsp;&raquo; (<em>ibid.</em>, p.&nbsp;9).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref8" name="_ftn8">[8]</a> &laquo;&nbsp;L&rsquo;effacement des personnages laisse &agrave; l&rsquo;espace, au d&eacute;cor, urbains ou naturels, une place privil&eacute;gi&eacute;e&nbsp;; peut-on imaginer un r&eacute;cit po&eacute;tique d&rsquo;o&ugrave; ils soient absents&nbsp;?&nbsp;&raquo; (<em>ibid.</em>, p.&nbsp;9).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref9" name="_ftn9">[9]</a> <em>Ibid.</em>, p.&nbsp;9 &agrave; 11.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref10" name="_ftn10">[10]</a> Il le fera de fa&ccedil;on assez radicale, en consid&eacute;rant que le &laquo;&nbsp;r&eacute;cit po&eacute;tique&nbsp;&raquo; propos&eacute; par Tadi&eacute; est une cat&eacute;gorie disparate qui ne repose pas sur des traits stylistiques permettant de donner un sens clair &agrave; &laquo;&nbsp;po&eacute;tique&nbsp;&raquo;. Pire&nbsp;: Tadi&eacute; emploierait <em>po&eacute;tique</em> comme on dit d&rsquo;une femme qu&rsquo;elle est <em>romanesque</em>.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref11" name="_ftn11">[11]</a> Dominique Combe, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;70, pour cette citation et la pr&eacute;c&eacute;dente.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref12" name="_ftn12">[12]</a> J&rsquo;utilise &agrave; dessein cette tournure plut&ocirc;t que &laquo;&nbsp;r&eacute;cit num&eacute;rique&nbsp;&raquo; afin d&rsquo;indiquer les d&eacute;bats en cours autour de la notion de <em>litt&eacute;rature num&eacute;rique</em>. On en trouvera un aper&ccedil;u dans le billet suivant&nbsp;: Ga&euml;lle Debeaux, &laquo;&nbsp;S&eacute;minaire Humanit&eacute;s Num&eacute;riques MSHB &ndash; R&eacute;ception et transmission des travaux de Marcello Vitali-Rosati&nbsp;: &ldquo;Peut-on encore parler de litt&eacute;rature num&eacute;rique&nbsp;?&rdquo;&nbsp;&raquo;, Carnet de recherche <em>Multir&eacute;cits</em>, 27/03/19, en ligne&nbsp;: <a href="https://multirecits.hypotheses.org/550">https://multirecits.hypotheses.org/550</a> (consult&eacute; le 23 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref13" name="_ftn13">[13]</a> Je donne au terme <em>dispositif</em> le sens que construit Giorgio Agamben dans <em>Qu&rsquo;est-ce qu&rsquo;un dispositif&nbsp;?</em>&nbsp;: &laquo;&nbsp;Tout ce qui a, d&rsquo;une mani&egrave;re ou d&rsquo;une autre, la capacit&eacute; de capturer, d&rsquo;orienter, de d&eacute;terminer, d&rsquo;intercepter, de modeler, de contr&ocirc;ler et d&rsquo;amener les gestes, les conduites, les opinions et les discours des &ecirc;tres vivants&nbsp;&raquo; (Giorgio Agamben, <em>Qu&rsquo;est-ce qu&rsquo;un dispositif&nbsp;?</em>, Paris, Payot et Rivages, 2007, p.&nbsp;31).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref14" name="_ftn14">[14]</a> Ren&eacute;&nbsp;Audet, &laquo;&nbsp;&Eacute;crire num&eacute;rique&nbsp;: du texte litt&eacute;raire entendu comme processus&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;1, 2014 [2015], en ligne&nbsp;: http://journals.openedition.org/itineraires/2267 (consult&eacute; le 14 janvier 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref15" name="_ftn15">[15]</a> Magali Nachtergael, &laquo;&nbsp;Pr&eacute;sentation&nbsp;&raquo;, <em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;3, 2017 [2018], en ligne&nbsp;: <a href="https://journals.openedition.org/itineraires/3876">https://journals.openedition.org/itineraires/3876</a> (consult&eacute; le 23 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref16" name="_ftn16">[16]</a> G&eacute;rard Genette, &laquo; Fronti&egrave;res du r&eacute;cit &raquo;, <em>Communications</em>, n&ordm;&nbsp;8, 1966, p.&nbsp;152.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref17" name="_ftn17">[17]</a> Jean-Yves Tadi&eacute;, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;7.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref18" name="_ftn18">[18]</a> Je renvoie pour cela &agrave; l&rsquo;article d&rsquo;Emmanuelle Pelard, &laquo;&nbsp;Po&eacute;tique de la po&eacute;sie num&eacute;rique pour &eacute;crans tactiles&nbsp;&raquo;, dans <em>Po&eacute;tiques et esth&eacute;tiques num&eacute;riques tactiles : litt&eacute;rature et arts</em>, Ana&iuml;s Guilet et Emmanuel Pelard (dir.), Cahiers virtuels du laboratoire NT2, n&deg;&nbsp;8, 2016, en ligne&nbsp;: http://nt2.uqam.ca/fr/cahiers-virtuels/article/poetique-de-la-poesie-numerique-pour-ecrans-tactiles (consult&eacute; le 23 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref19" name="_ftn19">[19]</a> Les trois &oelig;uvres seront pr&eacute;sent&eacute;es en d&eacute;tail dans le cours de l&rsquo;article. On les retrouve aux adresses suivantes&nbsp;: <a href="https://web.archive.org/web/20120113034518/http:/www.ryman-novel.com/">https://web.archive.org/web/20120113034518/http://www.ryman-novel.com/</a>, <a href="https://petiteracine.net/wordpress/cat%C3%A9gorie/a-mains-nues/">https://petiteracine.net/wordpress/cat&eacute;gorie/a-mains-nues/</a>et <a href="https://twitter.com/apersonne">https://twitter.com/apersonne</a>.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref20" name="_ftn20">[20]</a> Voir &agrave; ce propos l&rsquo;article de Jean Cl&eacute;ment, &laquo;&nbsp;La litt&eacute;rature au risque du num&eacute;rique&nbsp;&raquo;, <em>Document num&eacute;rique</em>, vol.&nbsp;5, n&ordm;&nbsp;1, 2001, p.&nbsp;113-134.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref21" name="_ftn21">[21]</a> Emmanuelle Pelard, &laquo;&nbsp;Po&eacute;tique de la po&eacute;sie num&eacute;rique pour &eacute;crans tactiles&nbsp;&raquo;, art. cit.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref22" name="_ftn22">[22]</a> Emmanuelle&nbsp;Pelard, &laquo;&nbsp;Po&eacute;sies num&eacute;riques tactiles&nbsp;: toucher les signes par la &ldquo;main de l&rsquo;&oelig;il&rdquo;, manipuler la mati&egrave;re &agrave; l&rsquo;&eacute;cran&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;3, 2017 [2018], en ligne&nbsp;: <a href="http://journals.openedition.org/itineraires/3983">http://journals.openedition.org/itineraires/3983</a> (consult&eacute; le 24 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref23" name="_ftn23">[23]</a> M&ecirc;me si, comme Philippe Bootz le rappelle dans son historique de la litt&eacute;rature num&eacute;rique, les premi&egrave;res tentatives de m&eacute;canisation de la production litt&eacute;raire, ant&eacute;rieures aux ann&eacute;es 1980, portaient tout autant sur la po&eacute;sie que sur le r&eacute;cit. Voir Philippe Bootz, <em>Les basiques&nbsp;: la litt&eacute;rature num&eacute;rique</em>, Leonardo/OLATS, 2007, <a href="http://www.olats.org/livresetudes/basiques/litteraturenumerique/basiquesLN.php">en ligne</a> (consult&eacute; le 24 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref24" name="_ftn24">[24]</a> Jean Cl&eacute;ment a &eacute;crit plusieurs articles sur cet objet&nbsp;: voir Jean Cl&eacute;ment, &laquo;&nbsp;Fiction interactive et modernit&eacute;&nbsp;&raquo;, <em>Litt&eacute;rature</em>, n&ordm;&nbsp;96, 1994&nbsp;; &laquo;&nbsp;Du texte &agrave; l&rsquo;hypertexte : vers une &eacute;pist&eacute;mologie de la discursivit&eacute; hypertextuelle&nbsp;&raquo;, <em>Hypertextes et hyperm&eacute;dias : r&eacute;alisations, outils, m&eacute;thodes</em>, Balpe, J.-P., Lelu, A., Saleh, I. (dir.), Paris, Herm&egrave;s, 1995&nbsp;; &laquo;&nbsp;Hypertexte et complexit&eacute;&nbsp;&raquo;, <em>&Eacute;tudes fran&ccedil;aises</em>, n&ordm;&nbsp;36, vol.&nbsp;2, 2000.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref25" name="_ftn25">[25]</a> Ren&eacute; Audet &amp; Simon Brousseau, &laquo;&nbsp;Pour une po&eacute;tique de la diffraction de l&rsquo;&oelig;uvre litt&eacute;raire num&eacute;rique. L&rsquo;archive, le texte et l&rsquo;&oelig;uvre &agrave; l&rsquo;estompe&nbsp;&raquo;, <em>Prot&eacute;e</em>, vol.&nbsp;39, n&ordm;&nbsp;1, 2011, p.&nbsp;10. Je souligne.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref26" name="_ftn26">[26]</a> Voir Ren&eacute; Audet, &laquo;&nbsp;Roman &eacute;clat&eacute; ou diffraction narrative et textuelle&nbsp;? Rep&egrave;res m&eacute;thodologiques pour une po&eacute;tique compar&eacute;e&nbsp;&raquo;, <em>Voix et Images</em>, vol.&nbsp;36, n&deg;&nbsp;1, 2010&nbsp;; &laquo;&nbsp;&OElig;uvres diffract&eacute;es contemporaines et m&eacute;andres de l&rsquo;interpr&eacute;tation : du r&eacute;cit comme errance cognitive&nbsp;&raquo;, <em>L&rsquo;Herm&eacute;neutique fictionnalis&eacute;e. Quand l&rsquo;interpr&eacute;tation s&rsquo;invite dans la fiction</em>, Correard, N., V. Ferr&eacute;, Teulade, A. (dir.), Paris, Classiques Garnier, 2015&nbsp;; &laquo;&nbsp;Diffraction. Pour une po&eacute;tique de la diffraction des textes narratifs&nbsp;&raquo;, <em>Fragments d&rsquo;un discours th&eacute;orique. Nouveaux &eacute;l&eacute;ments d&rsquo;un discours th&eacute;orique</em>, Bouju, E. (dir.), Nantes, &Eacute;ditions Nouvelles C&eacute;cile Defaut, 2015.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref27" name="_ftn27">[27]</a> Ren&eacute; Audet &amp; Simon Brousseau, &laquo;&nbsp;Pour une po&eacute;tique de la diffraction de l&rsquo;&oelig;uvre litt&eacute;raire num&eacute;rique. L&rsquo;archive, le texte et l&rsquo;&oelig;uvre &agrave; l&rsquo;estompe&nbsp;&raquo;, art. cit., p.&nbsp;10.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref28" name="_ftn28">[28]</a> Ren&eacute;&nbsp;Audet, &laquo;&nbsp;&Eacute;crire num&eacute;rique&nbsp;: du texte litt&eacute;raire entendu comme processus&nbsp;&raquo;, art. cit.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref29" name="_ftn29">[29]</a> Sur ce point, je me permets de renvoyer &agrave; mes travaux de th&egrave;se&nbsp;: Ga&euml;lle Debeaux, <em>Multiplication des r&eacute;cits et st&eacute;r&eacute;om&eacute;trie litt&eacute;raire. D&rsquo;Italo Calvino aux &eacute;pifictions contemporaines</em>, disponible sur HAL&nbsp;: <a href="https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01677450">https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01677450</a> (consult&eacute; le 24 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref30" name="_ftn30">[30]</a> Christ&egrave;le Devoivre, &laquo;&nbsp;Errance dans le r&eacute;cit po&eacute;tique, errance du r&eacute;cit po&eacute;tique&nbsp;&raquo;, <em>Errances</em>, Cahier Figura, n&ordm;&nbsp;13, 2005, p.&nbsp;40.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref31" name="_ftn31">[31]</a> Jean Cl&eacute;ment, &laquo;&nbsp;<em>Afternoon, a Story</em>, du narratif au po&eacute;tique dans l&rsquo;&oelig;uvre hypertextuelle&nbsp;&raquo;, dans <em>A:LITT&Eacute;RATURE, </em>Actes du colloque<em> Nord Po&eacute;sie et Ordinateur</em>, Mots-Voir et Gerico-Circav, 1994. Je cite &agrave; partir de la <a href="http://hypermedia.univ-paris8.fr/jean/articles/Afternoon.htm">version mise en ligne</a> par l&rsquo;auteur, non-pagin&eacute;e&nbsp;(consult&eacute; le 24 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref32" name="_ftn32">[32]</a> <em>Ibid.</em></p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref33" name="_ftn33">[33]</a> Dominique Combe, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;81.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref34" name="_ftn34">[34]</a> Jean-Yves Tadi&eacute;, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;111.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref35" name="_ftn35">[35]</a> Geoff Ryman, <em>253&nbsp;: the print remix</em>, London, Flamingo, 1998. L&rsquo;hypertexte num&eacute;rique &eacute;tait initialement publi&eacute; &agrave; l&rsquo;adresse <a href="http://www.ryman-novel.com/home.htm">http://www.ryman-novel.com/home.htm</a> mais celle-ci renvoie d&eacute;sormais au site personnel de l&rsquo;auteur, apr&egrave;s avoir &eacute;t&eacute; plusieurs ann&eacute;es inactive&nbsp;; on retrouve la trace de l&rsquo;hypertexte gr&acirc;ce &agrave; la WayBack Machine, &agrave; l&rsquo;adresse suivante&nbsp;: <a href="http://onlinebooks.library.upenn.edu/webbin/book/lookupid?key=olbp27604">http://onlinebooks.library.upenn.edu/webbin/book/lookupid?key=olbp27604 </a>(consult&eacute; le 25 avril 2019). Pour une analyse de la rem&eacute;diation concernant <em>253</em>, voir Ga&euml;lle Debeaux, &laquo;&nbsp;Penser les relations m&eacute;diatiques du livre et de l&rsquo;hypertexte &agrave; partir de&nbsp;<em>253</em>&nbsp;de Geoff Ryman et <em>Luminous Airplanes</em> de Paul La Farge&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;2, 2016 [2017], en ligne&nbsp;: <a href="https://journals.openedition.org/itineraires/3405">https://journals.openedition.org/itineraires/3405</a> (consult&eacute; le 25 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref36" name="_ftn36">[36]</a> On peut le consulter en suivant ce lien&nbsp;: <a href="https://web.archive.org/web/20120115114505/http:/www.ryman-novel.com/info/home.htm">https://web.archive.org/web/20120115114505/http://www.ryman-novel.com/info/home.htm</a> (consult&eacute; le 25 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref37" name="_ftn37">[37]</a> Voir Ga&euml;lle Debeaux, <em>Multiplication des r&eacute;cits et st&eacute;r&eacute;om&eacute;trie litt&eacute;raire. D&rsquo;Italo Calvino aux &eacute;pifictions contemporaines</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;259-279.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref38" name="_ftn38">[38]</a> Je renvoie ici &agrave; l&rsquo;article d&rsquo;Anne-Laure&nbsp;Fortin-Tourn&egrave;s, &laquo;&nbsp;Confluence du corps et des signes dans la fiction &eacute;lectronique hypertextuelle&nbsp;: le cas de&nbsp;<em>253</em>&nbsp;de Geoff Ryman&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>&Eacute;tudes britanniques contemporaines</em>, n&ordm;&nbsp;52,&nbsp;2017.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref39" name="_ftn39">[39]</a> Voir par exemple mon analyse sur la micro-intrigue autour du personnage de Sam Cruza (Ga&euml;lle Debeaux, <em>Multiplication des r&eacute;cits et st&eacute;r&eacute;om&eacute;trie litt&eacute;raire. D&rsquo;Italo Calvino aux &eacute;pifictions contemporaines</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;138-139).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref40" name="_ftn40">[40]</a> On mentionnera par exemple Ga&euml;lle Th&eacute;val, <em>Po&eacute;sies ready-made. xx<sup>e</sup> &ndash; xxi<sup>e</sup> si&egrave;cles</em>, Paris, L&rsquo;Harmattan, coll.&nbsp;&laquo;&nbsp;Arts &amp; M&eacute;dias&nbsp;&raquo;, 2015.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref41" name="_ftn41">[41]</a> Ga&euml;lle Th&eacute;val, &laquo;&nbsp;Non-litt&eacute;rature&nbsp;&raquo;, <em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;3, 2017 [2018], en ligne&nbsp;: <a href="http://journals.openedition.org/itineraires/3983">http://journals.openedition.org/itineraires/3983</a> (consult&eacute; le 24 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref42" name="_ftn42">[42]</a> Kenneth Goldsmith, <em>L&rsquo;&Eacute;criture sans &eacute;criture. Du langage &agrave; l&rsquo;&acirc;ge num&eacute;rique</em>, Fran&ccedil;ois Bon (trad.), Paris, Jean Bo&icirc;te &Eacute;ditions, 2018, p.&nbsp;11 (<em>Uncreative Writing. </em><em>Managing Language in the Digital Age</em>, New York, Columbia University Press, 2011).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref43" name="_ftn43">[43]</a> Ren&eacute; Audet, &laquo;&nbsp;&Eacute;crire num&eacute;rique&nbsp;: du texte litt&eacute;raire entendu comme processus&nbsp;&raquo;, art. cit.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref44" name="_ftn44">[44]</a> Accessible en suivant ce lien&nbsp;: <a href="https://petiteracine.net/wordpress/">https://petiteracine.net/wordpress/</a> (consult&eacute; le 26 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref45" name="_ftn45">[45]</a> Voir <a href="https://petiteracine.net/wordpress/cecile-portier/">https://petiteracine.net/wordpress/cecile-portier/</a> (consult&eacute; le 26 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref46" name="_ftn46">[46]</a> Voir <a href="https://petiteracine.net/wordpress/2012/06/entre/">https://petiteracine.net/wordpress/2012/06/entre/</a> (consult&eacute; le 26 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref47" name="_ftn47">[47]</a> <em>Ibid.</em></p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref48" name="_ftn48">[48]</a> Voir <a href="https://petiteracine.net/wordpress/2011/11/deplacements/">https://petiteracine.net/wordpress/2011/11/deplacements/</a> (consult&eacute; le 26 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref49" name="_ftn49">[49]</a> Charles Baudelaire, &laquo;&nbsp;&Agrave; une passante&nbsp;&raquo;, <em>Les Fleurs du mal</em>, 2<sup>e</sup> &eacute;dition, Alen&ccedil;on, Poulet-Malassis &amp; De Broise &Eacute;diteurs, 1861, p.&nbsp;216.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref50" name="_ftn50">[50]</a> Enrico Agostini-Marchese, &laquo;&nbsp;La litt&eacute;rature &agrave; la d&eacute;rive num&eacute;rique. De lignes, d&rsquo;&eacute;critures et d&rsquo;espaces&nbsp;&raquo;, <em>Sens Public</em>, 15/12/2017, en ligne&nbsp;: <a href="http://sens-public.org/article1285.html">http://sens-public.org/article1285.html</a> (consult&eacute; le 26 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref51" name="_ftn51">[51]</a> Christ&egrave;le Devoivre, &laquo;&nbsp;Errance dans le r&eacute;cit po&eacute;tique, errance du r&eacute;cit po&eacute;tique&nbsp;&raquo;, art. cit., p.&nbsp;32.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref52" name="_ftn52">[52]</a> L&rsquo;&oelig;uvre en elle-m&ecirc;me n&rsquo;est plus directement accessible, mais on peut voir son fonctionnement dans la fiche que le r&eacute;pertoire NT2 lui consacre&nbsp;: <a href="http://nt2.uqam.ca/fr/video/etant-donnee-cecile-portier-video-1">http://nt2.uqam.ca/fr/video/etant-donnee-cecile-portier-video-1</a> (consult&eacute; le 26 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref53" name="_ftn53">[53]</a> C&eacute;cile&nbsp;Portier, &laquo;&nbsp;<em>&Eacute;tant donn&eacute;e&nbsp;</em>: une fable po&eacute;tique sur le r&eacute;gime de notre identit&eacute; num&eacute;rique&nbsp;&raquo;, <em>Itin&eacute;raires</em>, vol.&nbsp;3, 2015 [2016], en ligne&nbsp;: <a href="https://journals.openedition.org/itineraires/3124">https://journals.openedition.org/itineraires/3124</a> (consult&eacute; le 26 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref54" name="_ftn54">[54]</a> Kenneth Goldsmith, <em>L&rsquo;&Eacute;criture sans &eacute;criture. Du langage &agrave; l&rsquo;&acirc;ge num&eacute;rique</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;191.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref55" name="_ftn55">[55]</a> Jacques Roubaud, &laquo;&nbsp;Obstination de la po&eacute;sie&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Le Monde Diplomatique</em>, 2010, p.&nbsp;23, cit&eacute; par Ga&euml;lle Th&eacute;val, &laquo;&nbsp;Non-litt&eacute;rature&nbsp;&raquo;, art. cit.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref56" name="_ftn56">[56]</a> <em>Ibid.</em></p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref57" name="_ftn57">[57]</a> Voir &agrave; ce propos trois ouvrages fondateurs&nbsp;: Espen J. Aarseth, <em>Cybertext. Perspectives on Ergodic Literature</em>, Baltimore &amp; London, The John Hopkins University Press, 1997&nbsp;; Christian Vandendorpe, <em>Du papyrus &agrave; l&rsquo;hypertexte : essai sur les mutations du texte et de la lecture</em>, Paris, &Eacute;ditions La D&eacute;couverte, 1999&nbsp;; N. Katherine Hayles, <em>Writing Machines</em>, Cambridge, Massachusetts, MIT Press, 2002.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref58" name="_ftn58">[58]</a> Voir &agrave; ce propos Alexandra Saemmer, <em>Rh&eacute;torique du texte num&eacute;rique : figures de la lecture, anticipations de pratiques</em>, Villeurbanne, Presses de l&rsquo;ENSSIB, 2015.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref59" name="_ftn59">[59]</a> Emmanuelle Pelard, &laquo;&nbsp;Po&eacute;tique de la po&eacute;sie num&eacute;rique pour &eacute;crans tactiles&nbsp;&raquo;, art. cit.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref60" name="_ftn60">[60]</a> Jean-Yves Tadi&eacute;, <em>Le R&eacute;cit po&eacute;tique</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;143.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref61" name="_ftn61">[61]</a> Kenneth Goldsmith, <em>L&rsquo;&Eacute;criture sans &eacute;criture. Du langage &agrave; l&rsquo;&acirc;ge num&eacute;rique</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;33.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref62" name="_ftn62">[62]</a> La g&eacute;n&eacute;alogie du projet est pr&eacute;sent&eacute;e <a href="http://fuirestunepulsion.net/spip.php?article4243#.XMa2HegzZPZ">ici</a>&nbsp;(consult&eacute; le 29 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref63" name="_ftn63">[63]</a> Fragments en date du 11 d&eacute;cembre 2010, accessible <a href="https://twitter.com/apersonne/status/13473060770287616">ici</a>&nbsp;(consult&eacute; le 29 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref64" name="_ftn64">[64]</a> Fragments en date du 6 d&eacute;cembre 2010, accessible <a href="https://twitter.com/apersonne/status/11661116866306048">ici</a>&nbsp;(consult&eacute; le 29 avril 2019).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref65" name="_ftn65">[65]</a> Kenneth Goldsmith, <em>L&rsquo;&Eacute;criture sans &eacute;criture. Du langage &agrave; l&rsquo;&acirc;ge num&eacute;rique</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;178.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref66" name="_ftn66">[66]</a> <em>Ibid.</em>, p.&nbsp;231.</p> <h3 style="text-align: justify;"><span id="Auteur">Auteur</span></h3> <p style="text-align: justify;"><strong>Ga&euml;lle Debeaux</strong> est Ma&icirc;tresse de conf&eacute;rences en Litt&eacute;rature g&eacute;n&eacute;rale et compar&eacute;e &agrave; l&rsquo;universit&eacute; Rennes 2, et membre du CELLAM. Ses recherches portent sur les enjeux narratifs des productions de litt&eacute;rature contemporaine (litt&eacute;rature imprim&eacute;e, litt&eacute;rature num&eacute;rique), sur l&rsquo;hybridation m&eacute;diatique du texte et son implication concernant l&rsquo;objet livre, et sur les formes de multiplication des r&eacute;cits. Elle s&rsquo;int&eacute;resse en particulier aux domaines anglophones, fran&ccedil;ais et italien. Elle a publi&eacute; plusieurs articles interrogeant la litt&eacute;rature num&eacute;rique, dont &laquo;&nbsp;Penser les relations m&eacute;diatiques du livre et de l&rsquo;hypertexte &agrave; partir de <em>253</em> de Geoff Ryman et <em>Luminous Airplanes</em> de Paul La Farge&nbsp;&raquo;, <em>Itin&eacute;raires</em>, <a href="https://journals.openedition.org/itineraires/3405">2016-2 | 2017</a> et &laquo;&nbsp;Prendre au pied de la lettre les m&eacute;taphores spatiales dans <em>House of Leaves</em> et <em>Luminous Airplanes</em>&nbsp;: arpenter le labyrinthe textuel&nbsp;&raquo;, <em>Savoirs en prisme</em>, <a href="https://savoirsenprisme.com/numeros/08-2018-textualites-et-spatialites/">08 | 2018</a>.</p> <h3 style="text-align: justify;">Copyright</h3> <p style="text-align: justify;">Tous droits r&eacute;serv&eacute;s.</p> </div>