<div class="entry-content"> <h3>Abstract</h3> <p>Unlike some writer-journalists (Jean Hatzfeld, Jean Rolin, Emmanuel Carr&egrave;re) who have largely abandoned the press to devote themselves almost exclusively to books, Florence Aubenas practices the long format alternately in the daily newspaper, in the magazine and in the book, and links to it a poetics paradoxically based on the brief. Her mediapoetics is indeed characterized by a complex device between short edited (aggregations of fragments to account for other voices, denunciation of the shortcomings of an often unjust society by the simple exhibition of its dysfunctions) and long pruned (disappearance of all the details which could harm the pleasure of the reading, invisibilization in particular of the reporter, setting up of a powerful plot) which leads in <em>L&rsquo;Inconnu de la poste</em> as in <em>Le Quai de Ouistreham</em> to a form of particularly successful balancing act.</p> <p><strong>Keywords</strong><br /> &nbsp;</p> <p class="meta-tags">long form, non fiction, journalism, mediapoetics, Florence Aubenas</p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;">Florence Aubenas constitue d&eacute;j&agrave; aujourd&rsquo;hui, m&ecirc;me si sans doute ce constat l&rsquo;ennuie, pour la presse &eacute;crite fran&ccedil;aise une l&eacute;gende et elle rejoint Albert Londres dans le panth&eacute;on assez d&eacute;sert&eacute; des grands journalistes fran&ccedil;ais mythifi&eacute;s. Il serait facile, mais tr&egrave;s r&eacute;ducteur, de r&eacute;duire sa visibilit&eacute; &agrave; son exp&eacute;rience d&rsquo;ex-otage en 2005 en Irak, &agrave; sa d&eacute;nonciation des d&eacute;voiements de l&rsquo;enqu&ecirc;te dans l&rsquo;affaire d&rsquo;Outreau en 2005 ou m&ecirc;me &agrave; son livre &agrave; succ&egrave;s de 2010, <em>Le Quai de Ouistreham</em>, d&eacute;crivant une immersion de six mois dans des milieux pr&eacute;caris&eacute;s dans le Nord de la France. Car il n&rsquo;existe pas en France actuellement d&rsquo;autre journaliste capable de cr&eacute;er, comme elle, une v&eacute;ritable fr&eacute;n&eacute;sie autour de quelques pages de reportages sur un rond-point lors du mouvement des gilets jaunes (<em>Le Monde</em>, 16-17 janvier 2019), dans un EHPAD au d&eacute;but de la pand&eacute;mie (<em>Le Monde</em>, 1<sup>er</sup> avril 2020) ou derni&egrave;rement sur les traces d&rsquo;une femme des bois dans une vall&eacute;e c&eacute;venole (<em>Le Monde</em>, 2-3 mai 2021). M&ecirc;me si elle intervient aussi bien en tant que reporter de guerre que fait-diversi&egrave;re, sa patte est reconnaissable entre toutes, d&rsquo;abord par ses sujets de pr&eacute;dilection (plut&ocirc;t du c&ocirc;t&eacute; des espaces et des m&eacute;canismes d&rsquo;invisibilisation, des d&eacute;laiss&eacute;s de la soci&eacute;t&eacute;, des informations &laquo;&nbsp;en bas de la pile&nbsp;<a href="#_ftn1" name="_ftnref1">[1]</a>&nbsp;&raquo;), ensuite par les dispositifs qu&rsquo;elle met en place (un c&ocirc;toiement assidu de ses sujets dont elle ins&egrave;re les mots bruts sous la forme d&rsquo;&eacute;clats brefs &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur du reportage, sa propre invisibilisation dans la restitution finale), enfin par son style, m&eacute;lange de d&eacute;tails pr&eacute;cis, d&rsquo;empathie et d&rsquo;ironie. Surtout, que ce soit dans ses reportages-livres mais &eacute;galement au <em>Monde</em>, dans une &eacute;poque qui para&icirc;t surtout concern&eacute;e par la rapidit&eacute; et les formes br&egrave;ves, Florence Aubenas pratique le long format. Ce privil&egrave;ge de la longueur para&icirc;t moins une cons&eacute;quence de son succ&egrave;s qu&rsquo;une condition de sa pratique. Le long tient d&rsquo;abord &eacute;videmment &agrave; la dur&eacute;e de ses enqu&ecirc;tes mais aussi et peut-&ecirc;tre surtout &agrave; l&rsquo;&eacute;criture car c&rsquo;est aussi l&rsquo;immersion du lecteur que cherche &agrave; provoquer une Florence Aubenas de plus en plus attentive &agrave; &laquo;&nbsp;la cuisine de l&rsquo;&eacute;criture&nbsp;<a href="#_ftn2" name="_ftnref2">[2]</a>&nbsp;&raquo; et de plus en plus encline aussi aujourd&rsquo;hui &agrave; convoquer sinon des mod&egrave;les, du moins des r&eacute;f&eacute;rences, litt&eacute;raires. Ces r&eacute;f&eacute;rences viennent des dispositifs mim&eacute;tiques du roman r&eacute;aliste et naturaliste mais &eacute;galement du nouveau journalisme am&eacute;ricain&nbsp;<a href="#_ftn3" name="_ftnref3">[3]</a>. La longueur est provoqu&eacute;e par la n&eacute;cessit&eacute; de m&ecirc;ler du configurant et de l&rsquo;intriguant, si bien que nous verrons que le long chez Aubenas est fait, tr&egrave;s paradoxalement, &agrave; la fois de &laquo;&nbsp;bref&nbsp;&raquo; mont&eacute; (configuration) et de &laquo;&nbsp;tr&egrave;s&nbsp;long&nbsp;&raquo; &eacute;lagu&eacute; (mise en intrigue).</p> <h2><span id="1_Un_gout_pour_le_long"><strong>1. Un go&ucirc;t pour le long</strong></span><br /> &nbsp;</h2> <p style="text-align: justify;">&Eacute;videmment, en utilisant la formule &laquo;&nbsp;long format&nbsp;&raquo;, on se trouve devant un probl&egrave;me de terminologie et de quantification. &Agrave; partir de quelle taille dans la presse fran&ccedil;aise peut-on parler de long format&nbsp;? S&rsquo;agit-il seulement de nombre de signes ou prend-on en compte d&rsquo;autres facteurs comme la dur&eacute;e de l&rsquo;enqu&ecirc;te&nbsp;?</p> <h3 style="text-align: justify;"><span id="11_Une_affaire_de_signes">1.1 Une affaire de signes</span></h3> <p style="text-align: justify;">&nbsp;Il existe incontestablement chez Aubenas une tendance affirm&eacute;e au long&nbsp;: &agrave; c&ocirc;t&eacute; de ses longs papiers dans <em>Le Monde</em>, elle en r&eacute;alise de plus &eacute;tendus encore dans <em>M. Le Magazine du Monde</em>, pratique volontiers la s&eacute;rie estivale d&rsquo;articles et surtout &eacute;crit r&eacute;guli&egrave;rement des enqu&ecirc;tes en utilisant le format du livre.</p> <p style="text-align: justify;">Florence Aubenas, ces derni&egrave;res ann&eacute;es, obtient quasiment toujours pour ses papiers dans <em>Le Monde</em> une pleine page et il n&rsquo;est pas rare qu&rsquo;elle se voit attribuer une double page, voire plus, sur le mod&egrave;le des longs papiers dans les journaux am&eacute;ricains, mais aussi si l&rsquo;on veut rester dans une r&eacute;f&eacute;rence fran&ccedil;aise, dans la tradition des grands reportages d&rsquo;<em>Actuel </em>dans les ann&eacute;es quatre-vingt. Elle d&eacute;fend souvent l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;un allongement de ses papiers d&ucirc; &agrave; l&rsquo;&eacute;poque, en expliquant qu&rsquo;au d&eacute;but des ann&eacute;es 2000, la presse avait pris l&rsquo;habitude de s&rsquo;aligner sur les formats courts de l&rsquo;audiovisuel et qu&rsquo;aujourd&rsquo;hui le journaliste, pour se d&eacute;marquer des r&eacute;seaux sociaux, est amen&eacute; &agrave; faire du long. : &laquo;&nbsp;Le fait qu&rsquo;il y ait des sujets courts, du twitter, du rapide, c&rsquo;est bien et cela d&eacute;veloppe de l&rsquo;autre c&ocirc;t&eacute; du beaucoup plus long. On peut &eacute;crire beaucoup plus long aujourd&rsquo;hui qu&rsquo;on ne le faisait il y a dix ans&nbsp;<a href="#_ftn4" name="_ftnref4">[4]</a>&nbsp;&raquo;. En fait, il s&rsquo;agit plut&ocirc;t de sa marque de fabrique, comme le montre cette d&eacute;claration d&rsquo;un t&eacute;moin : &laquo; J&rsquo;ai connu Florence en ao&ucirc;t 1998. Elle est venue &agrave; Casablanca faire une enqu&ecirc;te sur les <em>haragas</em> (immigr&eacute;s clandestins). Elle a rencontr&eacute; tout le monde, ONG, ex-clandestins et futurs clandestins. Elle a fait six pages dans <em>Lib&eacute;ration.</em> Elle a fait prendre conscience &agrave; l&rsquo;ensemble des acteurs marocains de l&rsquo;immigration clandestine&nbsp;&raquo;&nbsp;<a href="#_ftn5" name="_ftnref5">[5]</a>.&nbsp;Ses papiers font autour de 1800 mots pour une page, 3600 pour une double page avec illustrations, soit entre 14 et 15 feuillets&hellip;</p> <p style="text-align: justify;">Mais elle d&eacute;veloppe &eacute;galement d&rsquo;autres pratiques caract&eacute;ristiques du long format comme la s&eacute;rie d&rsquo;articles d&rsquo;&eacute;t&eacute;, saison cens&eacute;e propice au temps de la lecture. En ao&ucirc;t 2014, elle propose une travers&eacute;e du Maghreb, un reportage dans la veine des reporters de l&rsquo;entre-deux-guerres, avec un humour encore plus d&eacute;capant que celui d&rsquo;Albert Londres&nbsp;: on y trouve m&ecirc;me &laquo;&nbsp;une autoroute inachev&eacute;e&nbsp;<a href="#_ftn6" name="_ftnref6">[6]</a>&nbsp;&raquo;, clin d&rsquo;&oelig;il discret &agrave; la route des for&ccedil;ats dans <em>Au bagne.</em> En ao&ucirc;t 2016, elle fait une s&eacute;rie plus orient&eacute;e vers le crime &laquo;&nbsp;Face aux t&eacute;n&egrave;bres&nbsp;&raquo;. En ao&ucirc;t 2019, elle donne une s&eacute;rie de six articles sur l&rsquo;hypermarch&eacute; (soit 10 800 mots &agrave; peu pr&egrave;s)&nbsp;<a href="#_ftn7" name="_ftnref7">[7]</a>.&nbsp;Elle mobilise parfois <em>M. Le Magazine du Monde</em>, &agrave; l&rsquo;instar d&rsquo;Emmanuel Carr&egrave;re avec la revue <em>XXI,</em> comme un tremplin pour des &oelig;uvres longues. Le 11 octobre 2014, en 3000 mots, elle y signe une premi&egrave;re contre-enqu&ecirc;te sur l&rsquo;assassinat de Catherine Burgod. Cet article contient d&eacute;j&agrave; un certain nombre de sc&egrave;nes importantes du livre&nbsp;de 2021, <em>L&rsquo;Inconnu de la poste,</em> et notamment les sc&egrave;nes cruciales du meurtre et du cimeti&egrave;re. Ses articles dans<em> M. le Magazine</em> font souvent plus de 5000 mots, autour de 32 000-35 000 signes, un peu en dessous d&rsquo;un article de <em>mook</em>, c&rsquo;est-&agrave;-dire environ la moiti&eacute; de la taille des articles des grandes revues am&eacute;ricaines de journalisme narratif.</p> <p style="text-align: justify;">Enfin sa carri&egrave;re, depuis 2005, est rythm&eacute;e par des parutions de livres importants. Citons, outre le recueil de ses articles du <em>Monde</em> dans <em>En France</em> (2014), trois livres remarqu&eacute;s <em>La M&eacute;prise </em>(2005), <em>Le Quai de Ouistreham</em> (2010) et le dernier, <em>L&rsquo;Inconnu de la poste </em>(2021)<em>.</em> Elle constate d&rsquo;ailleurs avec malice quand elle a fait la couverture du <em>Nouvel Obs</em> lors de la sortie d&rsquo;<em>En France&nbsp;</em>: &laquo; Si j&rsquo;avais propos&eacute; un seul de ces reportages, je n&rsquo;aurais pas eu deux pages&nbsp;<a href="#_ftn8" name="_ftnref8">[8]</a> &raquo;. Ce passage &agrave; l&rsquo;&eacute;dition est loin de constituer un hapax&nbsp;: un certain nombre de ses confr&egrave;res et consoeurs de la presse &eacute;crite se sont aussi lanc&eacute;s dans l&rsquo;alternance entre articles et ouvrages de librairie mais Florence Aubenas ne pratique pas directement le journalisme politique&nbsp;<a href="#_ftn9" name="_ftnref9">[9]</a> comme les uns (Rapha&euml;lle Bacqu&eacute;, Ariane Chemin, Franz-Olivier Giesbert) et elle ne semble pas tent&eacute;e par des projets plus explicitement litt&eacute;raires, voire parfois fictionnels, comme les autres (Jean Rolin, Jean Hatzfeld, Sorj Chalandon) dont elle est pourtant proche, aussi bien par l&rsquo;esprit que par la vie (ils sont tous pass&eacute;s par <em>Lib&eacute;ration</em>).</p> <h3 style="text-align: justify;"><span id="12_La_duree_de_lenquete">1.2 La dur&eacute;e de l&rsquo;enqu&ecirc;te</span></h3> <p style="text-align: justify;">La longueur du r&eacute;cit para&icirc;t li&eacute;e au temps d&eacute;gag&eacute; pour l&rsquo;enqu&ecirc;te. Florence Aubenas rel&egrave;ve de la famille des grands reporters mais elle ne d&eacute;finit pas le grand reportage par la distance du d&eacute;placement (&agrave; c&ocirc;t&eacute; des reportages lointains de guerre, son livre <em>En France</em> montre une enqu&ecirc;te dans la France dite profonde&nbsp;: &laquo;&nbsp;Quelles manifs a-t-on couvertes en France&nbsp;? Marseille, Paris et Lyon. Qu&rsquo;en pense Pithiviers&nbsp;? Je n&rsquo;en sais rien. C&rsquo;est un gros d&eacute;faut. C&rsquo;est parfois parce que la manif est petite qu&rsquo;il faut y aller&nbsp;<a href="#_ftn10" name="_ftnref10">[10]</a>&nbsp;&raquo;) mais par la dur&eacute;e du temps pass&eacute; sur le terrain. Pour le reportage sur les gilets jaunes sur un rond-point, dix jours ont &eacute;t&eacute; n&eacute;cessaires &laquo;&nbsp;pour faire partie des meubles&nbsp;&raquo;&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Quand je suis arriv&eacute;e sur ce rond point, les gens &eacute;taient tr&egrave;s m&eacute;fiants. &laquo;&nbsp;Notre porte-parole n&rsquo;est pas l&agrave;&nbsp;&raquo;, m&rsquo;ont-ils dit. Ils m&rsquo;ont install&eacute;e sur une chaise en plein froid, loin du brasero. Les Gilets jaunes me filmaient avec leurs portables pour prouver apr&egrave;s que j&rsquo;avais menti. Au bout d&rsquo;une heure et demie, je gelais, je me suis approch&eacute;e du brasero. On a discut&eacute;. Ca s&rsquo;est un peu d&eacute;tendu&hellip; Quand ils m&rsquo;ont dit au revoir, j&rsquo;ai dit &laquo;&nbsp;Non, vous voyez l&rsquo;h&ocirc;tel Campanile, l&agrave;-bas&nbsp;? je m&rsquo;installe pour dix jours&nbsp;&raquo;. Ils &eacute;taient surpris. Au bout d&rsquo;un moment, j&rsquo;ai fait partie des meubles&hellip; Moi-m&ecirc;me j&rsquo;ai chang&eacute; d&rsquo;avis sur eux. Il n&rsquo;y a pas de raccourci possible pour traiter ces sujets. Il faut du temps. Alors que dans notre m&eacute;tier, on chausse toujours des bottes de sept lieues, avec les avions, on va toujours trois fois plus vite &ndash; trop vite&nbsp;? &hellip;&nbsp;<a href="#_ftn11" name="_ftnref11">[11]</a></p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Pour son reportage pendant le confinement, elle passe onze jours dans un EHPAD de Bagnolet en Seine-Saint-Denis&nbsp;; en 2016, pour une plong&eacute;e au c&oelig;ur du malaise policier, elle reste dix jours au commissariat de Sarcelles. Pour Outreau, il lui faut s&eacute;journer deux mois sur place lors du proc&egrave;s.</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">J&rsquo;ai ce luxe de choisir mes sujets et d&rsquo;avoir du temps. Passer plus d&rsquo;un mois d&rsquo;&eacute;t&eacute; &agrave; Piemanson ou quinze jours &agrave; H&eacute;nin-Beaumont lors des derni&egrave;res &eacute;lections municipales ne me pose aucun probl&egrave;me, je n&rsquo;ai presque pas de vie priv&eacute;e &ndash; ce que j&rsquo;assume tr&egrave;s bien&nbsp;<a href="#_ftn12" name="_ftnref12">[12]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Dans <em>L&rsquo;Inconnu de la poste</em>, enqu&ecirc;te qui lui a pris plus de six ann&eacute;es, la reporter explique qu&rsquo;elle a pass&eacute; des heures &agrave; regarder avec G&eacute;rald Thomassin des films sur son portable et qu&rsquo;il lui a appris ensuite &agrave; faire la manche &laquo;&nbsp;selon les r&egrave;gles &raquo;&nbsp;<a href="#_ftn13" name="_ftnref13">[13]</a>.</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Je partage &ccedil;a avec les p&ecirc;cheurs &agrave; la ligne. Je suis tellement emport&eacute;e par l&rsquo;histoire que &ccedil;a me semble bref, je me dis que j&rsquo;ai d&ucirc; oublier quelque chose. Tu ne peux pas comprendre comment quelqu&rsquo;un pense si tu ne passes pas du temps avec lui. Il n&rsquo;y a pas de raccourci. Tu ouvres des milliers de tiroirs sans savoir&nbsp;<a href="#_ftn14" name="_ftnref14">[14]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Elle prend des notes sur un carnet &ndash; et m&ecirc;me aujourd&rsquo;hui, du fait de la judiciarisation des m&oelig;urs, enregistre &ndash; et r&eacute;dige &agrave; son retour le reportage. La dur&eacute;e de l&rsquo;enqu&ecirc;te est ce qui permet de faire le tour d&rsquo;un sujet, de se mettre dans la peau des personnes qu&rsquo;elle rencontre, de s&rsquo;affronter &agrave; leurs difficult&eacute;s, de comprendre leurs vies. Ce temps consid&eacute;r&eacute; comme composante essentielle de l&rsquo;immersion constitue l&rsquo;un des principes premiers du nouveau journalisme,&nbsp;parfois rebaptis&eacute; <em>slow journalisme</em>. Mais la longueur du papier tient aussi aux mots qu&rsquo;il faut accumuler pour immerger le lecteur, pour tenter de partager avec lui ce temps long du terrain, de ses d&eacute;tails et de ses sinuosit&eacute;s, pour configurer.</p> <h2><span id="2_Du_bref_monte_pour_configurer"><strong>2. Du &laquo; bref &raquo; mont&eacute; pour configurer</strong></span><br /> &nbsp;</h2> <p style="text-align: justify;">Il faut d&rsquo;abord configurer les &eacute;v&eacute;nements pour &eacute;tablir des faits, leur donner sens, pour &eacute;tablir des causalit&eacute;s. La configuration, pour le narratologue Rapha&euml;l Baroni&nbsp;<a href="#_ftn15" name="_ftnref15">[15]</a>, inscrit les &eacute;v&eacute;nements racont&eacute;s dans une totalit&eacute; intelligible et leur donne un sens. Cette configuration explicative, chez Aubenas, passe par le montage d&rsquo;&eacute;l&eacute;ments tr&egrave;s brefs&nbsp;: d&eacute;tails descriptifs, &eacute;clats de parole&hellip;</p> <h3 style="text-align: justify;"><span id="21_Le_bref">2.1 Le bref</span></h3> <p style="text-align: justify;">Les articles d&rsquo;Aubenas se reconnaissent &agrave; la fois &agrave; son go&ucirc;t tr&egrave;s naturaliste pour le petit fait vrai et &agrave; son empathie avec ses sujets, &agrave; son positionnement du c&ocirc;t&eacute; des faibles, des marginaux et des sans-voix et aussi &agrave; une forme d&rsquo;ironie, notamment envers les puissants mais pas seulement. Or d&eacute;taillisme, empathie, et ironie se manifestent lors de l&rsquo;insertion d&rsquo;&eacute;clats&nbsp;: un d&eacute;tail descriptif sur lequel elle va revenir ou des paroles rapport&eacute;es, non comment&eacute;es explicitement mais qui, par la mani&egrave;re dont elles sont &eacute;nonc&eacute;es, prennent sens. Ainsi dans <em>La M&eacute;prise</em>, le mantra de Myriam Badaoui (celle qui a d&eacute;nonc&eacute; abusivement ses voisins pour p&eacute;dophilie) &ndash; &laquo;&nbsp;vous voulez voir mes cicatrices&nbsp;?&nbsp;&ndash;, dont Florence Aubenas finit par faire une rengaine insistante, r&eacute;v&egrave;le non seulement son pass&eacute; douloureux mais aussi son exhibitionnisme et son besoin maladif d&rsquo;&ecirc;tre consid&eacute;r&eacute;e et reconnue.</p> <p style="text-align: justify;">Les fragments de paroles au discours direct, d&eacute;pouill&eacute;s de leur environnement discursif social, permettent souvent d&rsquo;avoir acc&egrave;s au plus intime des sujets, et ils constituent des r&eacute;v&eacute;lateurs brutaux de drames priv&eacute;s.</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Monsieur Nutella vient de se garer sur le parking de l&rsquo;Hyper U. &Agrave; l&rsquo;accueil, une employ&eacute;e cherche la trace d&rsquo;une transaction : un p&egrave;re de famille a d&eacute;couvert sur sa carte bancaire un myst&eacute;rieux d&eacute;bit de 179 euros au magasin. &Ccedil;a y est, elle a trouv&eacute;. &laquo; Il s&rsquo;agit d&rsquo;un portable et de bi&egrave;res. &raquo; Ton r&eacute;confortant : &laquo; En promo, les bi&egrave;res. &raquo; Le p&egrave;re grince. &laquo; C&rsquo;est mon fils, s&ucirc;r. &raquo; Il l&rsquo;appelle. Mais le fils disputait un match de foot, ce jour-l&agrave;. &laquo; Alors, qui ? &raquo;, demande l&rsquo;employ&eacute;e, par-dessus ses lunettes. Elle s&rsquo;est prise au jeu. Le p&egrave;re devient blanc. &laquo; Ma femme. &raquo;</p> <p style="text-align: justify;">Sayn&egrave;te. Brutale intrusion dans les intimit&eacute;s&nbsp;<a href="#_ftn16" name="_ftnref16">[16]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Dans les cas les plus forts, l&rsquo;empathie passe par l&rsquo;int&eacute;gration du flux de conscience du t&eacute;moin, par une sorte de fusion avec le point de vue interne.</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Lundi 23 mars. Accroupie pr&egrave;s de l&rsquo;ascenseur, Sihem r&eacute;pare le d&eacute;ambulateur de Mme Dupont. Une toux secoue la vieille dame, et Sihem sent quelques postillons lui tomber sur le visage. &laquo; Cette fois, c&rsquo;est fait, elle pense. Si elle l&rsquo;a, je l&rsquo;ai. &raquo; Sihem se rel&egrave;ve. Se ressaisir. Emp&ecirc;cher le film catastrophe de lui envahir la t&ecirc;te. Continuer la tourn&eacute;e du matin en se disant : &laquo; On est l&rsquo;arm&eacute;e, il y a une guerre, il faut &ecirc;tre courageuse&nbsp;<a href="#_ftn17" name="_ftnref17">[17]</a>. &raquo;</p> </blockquote> <h3 style="text-align: justify;"><span id="22_Lironie">2.2 L&rsquo;ironie</span></h3> <p style="text-align: justify;">Parfois la forme br&egrave;ve est plus radicalement ironique. Car Florence Aubenas n&rsquo;est pas dans l&rsquo;ang&eacute;lisme et ne cache pas dans ses reportages que le sentiment d&rsquo;exclusion peut conduire &agrave; des formes d&rsquo;extr&eacute;misme id&eacute;ologique qui passent par le conspirationnisme, le complotisme, le racisme. Elle n&rsquo;h&eacute;site pas &agrave; recourir alors &agrave; la paralepse, c&rsquo;est-&agrave;-dire &agrave; int&eacute;grer une information qui exc&egrave;de la logique du point de vue rapport&eacute;, comme dans cette sc&egrave;ne qui, visiblement, pr&eacute;c&egrave;de sa rencontre&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Ca y est, les couples homosexuels auraient le droit de passer devant le maire, et, en cas de refus, tout &eacute;lu pourrait &ecirc;tre condamn&eacute; &agrave; 70&nbsp;000&nbsp;euros d&rsquo;amende et 3&nbsp;mois de suspension. &laquo;&nbsp;Tu as entendu ce que tu risques&nbsp;?&nbsp;&raquo; a gliss&eacute; Mme Libessart &agrave; M.&nbsp;Libessart, qui est le maire du village. Et elle a continu&eacute;&nbsp;: &laquo;&nbsp;Dire que tu re&ccedil;ois une journaliste aujourd&rsquo;hui&nbsp;! Tu pourrais lui dire que tu as chang&eacute; d&rsquo;avis, non&nbsp;?&nbsp;&nbsp;&raquo;&nbsp;<a href="#_ftn18" name="_ftnref18">[18]</a></p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">L&rsquo;ironie, souvent tendre, peut aussi, rarement, &ecirc;tre mordante. En 2017, dans un voyage au sein des partisans d&rsquo;Emmanuel Macron, la plume corrosive d&eacute;nonce la mani&egrave;re dont un discours bureaucratique obs&eacute;d&eacute; par l&rsquo;&eacute;conomie, emp&ecirc;che de voir la r&eacute;alit&eacute;. Dans la divulgation du lexique macroniste, Aubenas est finalement plus cruelle encore que pour les &eacute;lecteurs du Front national&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Ici, les mots de l&rsquo;&eacute;conomie ont tout envahi. On ne dit pas &laquo; parti &raquo; mais &laquo; mouvement &raquo;, ni &laquo; programme &raquo; mais &laquo;&nbsp;projet &raquo;. On ambitionne de remplacer &laquo; investiture &raquo; par &laquo; label &raquo;. Et on en blague, gris&eacute;s de se voir si nombreux : <em>&laquo; Le&nbsp;conseil des ministres&nbsp;s&rsquo;appellera le &ldquo;weekly-meeting&rdquo;, il aura lieu par Skype. &raquo;&nbsp;</em>Ce sera quand&nbsp;Macron, 39 ans, sera &eacute;lu pr&eacute;sident. Rodolphe, 34 ans, n&rsquo;en doute pas.&nbsp;<em>&laquo; On aidera les anciens &eacute;lus &agrave; se r&eacute;ins&eacute;rer, la politique doit devenir un CDD. &raquo;&nbsp;</em>Il l&rsquo;a dit sans rire, comme s&rsquo;il renvoyait en boomerang les commandements qu&rsquo;on lui mart&egrave;le depuis qu&rsquo;il est tout m&ocirc;me. Rodolphe a deux boulots, instituteur et barman. Il compte laisser tomber instituteur. Sur la sc&egrave;ne, des jeunes gens expliquent d&rsquo;un micro &eacute;mu pourquoi ils ont rejoint En marche !, ce qui donne un petit c&ocirc;t&eacute; Alcooliques anonymes&nbsp;<a href="#_ftn19" name="_ftnref19">[19]</a>.</p> </blockquote> <h3 style="text-align: justify;"><span id="23_Les_effets_du_montage">2.3 Les effets du montage</span></h3> <p style="text-align: justify;">Une des fonctions de ce discours rapport&eacute; est souvent de d&eacute;noncer ou de mettre en &eacute;vidence des dysfonctionnements de notre soci&eacute;t&eacute;. La parole rapport&eacute;e, la plupart du temps plus fataliste que d&eacute;nonciatrice, troue le texte et doit imposer une pause r&eacute;flexive dans la lecture. Ces r&eacute;cits n&eacute;cessitent une lecture lente, non du fait de la complexit&eacute; de l&rsquo;argumentation mais par le feuillet&eacute; des &eacute;nonciations, les oppositions entre <em>doxa</em>, parole des t&eacute;moins, et narration qui se dessinent souvent gr&acirc;ce au montage. Parfois, volontairement, la narration ne tranche pas, laissant deux sujets en face-&agrave;-face. L&rsquo;&eacute;conomie et l&rsquo;ellipse obligent le lecteur &agrave; r&eacute;fl&eacute;chir comme dans la sayn&egrave;te suivante&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">&Agrave; la 10, une infirmi&egrave;re pose ses achats, un gros chariot, 300 euros au moins. Puis, sans chercher &agrave; se cacher, elle range dans son sac une tondeuse &agrave; cheveux Babyliss, 39,99 euros. L&rsquo;h&ocirc;tesse : &laquo; Je crois que vous oubliez de payer quelque chose. &raquo; L&rsquo;autre, sans se d&eacute;monter : &laquo;&nbsp;Avec ce que je laisse &agrave; Hyper U, je peux bien me servir. &raquo;&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;">L&rsquo;h&ocirc;tesse la conna&icirc;t de vue, leurs gamins jouent ensemble au foot. Et, tout d&rsquo;un coup, elle a l&rsquo;impression que des barri&egrave;res sont en train de sauter, que les gens se permettent des choses qu&rsquo;ils n&rsquo;auraient jamais os&eacute; faire auparavant. Elle se demande si ce n&rsquo;est pas depuis les &laquo;&nbsp;gilets jaunes &raquo;. L&rsquo;infirmi&egrave;re souriante met maintenant un paquet de chewing-gums dans sa poche&nbsp;<a href="#_ftn20" name="_ftnref20">[20]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Dans un article sur la police &agrave; Sarcelles, frappe &eacute;galement la tentative de maintien d&rsquo;un &eacute;quilibre entre les points de vue. Aubenas &eacute;vite la simplification abusive. Certes le jeune suspect du vol de portable que tout accusait est innocent&eacute; &agrave; la fin de l&rsquo;article (selon le retournement caract&eacute;ristique de l&rsquo;intrigue polici&egrave;re) mais l&rsquo;article montre aussi les conditions terribles faites aux policiers. Finement la ressemblance g&eacute;n&eacute;rationnelle, physique et sociologique, entre les bandes des cit&eacute;s et les jeunes policiers est mise en avant&nbsp;: &laquo; Ils sont face &agrave; face, uniforme et cagoule, m&ecirc;me &acirc;ge ou presque.&nbsp;&nbsp;&laquo; &ldquo;<em>Des fois, j&rsquo;ai l&rsquo;impression de faire de la m&eacute;diation entre deux bandes&rdquo;, </em>aime r&eacute;p&eacute;ter un &eacute;lu de Villiers-le-Bel&nbsp;&raquo;&nbsp;<a href="#_ftn21" name="_ftnref21">[21]</a>.</p> <p style="text-align: justify;">Le montage des paroles vives permet donc de mettre en balance des opinions et parfois aussi, pour la journaliste, d&rsquo;&eacute;mettre un avis qui prend en compte la complexit&eacute; du monde. Dans l&rsquo;extrait suivant, pour contrebalancer des voix anti-migrants, anti-musulmans, racistes sur les ronds-points, Aubenas se trouve des porte-paroles, des repr&eacute;sentants, en la pr&eacute;sence d&rsquo;un couple engag&eacute; dans l&rsquo;associatif et puis surtout elle montre une s&eacute;quence qui, non seulement, par l&rsquo;exemple, d&eacute;ment la g&eacute;n&eacute;ralit&eacute; des propos tenus mais qui, en plus, permet d&rsquo;opposer le r&eacute;el d&rsquo;une communaut&eacute; unie autour d&rsquo;un couscous &agrave; la fantasmatisation des propos.</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Le premier samedi o&ugrave; elle est venue, cette pr&eacute;sidente d&rsquo;association a failli s&rsquo;en aller. &laquo; J&rsquo;&eacute;tais &agrave; la torture. Ils se l&acirc;chaient sur les Arabes qui profitent. &raquo; Puis elle s&rsquo;est dit : &laquo; On est l&agrave;, il faut essayer. &raquo; Curieusement, son mari, fonctionnaire, ne s&rsquo;est pas mis en &shy;col&egrave;re comme avec leurs amis qui votent&nbsp;Marine Le Pen. Il discute. Oui, ici, c&rsquo;est possible, chacun fait en sorte que tout se passe bien. La conversation a repris. &laquo; Certains &shy;Arabes peuvent &ecirc;tre m&eacute;chants, &ccedil;a d&eacute;pend de leur degr&eacute; de religion. &raquo;&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;">Comme par miracle, Zara et Fatma apparaissent &agrave; cet instant pr&eacute;cis, portant des foulards imprim&eacute;s l&eacute;opard, pour offrir un grand plat de couscous. &laquo; Trop timides pour se faire voir &raquo;, disent-elles, en repartant sur la pointe des pieds. Tout&nbsp;le monde&nbsp;mange du couscous&nbsp;<a href="#_ftn22" name="_ftnref22">[22]</a>.&nbsp;</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Parfois, le dispositif ne consiste plus, par empathie, &agrave; se confondre avec le point de vue du sujet mais &agrave; donner au sujet les r&eacute;flexes de la reporter. On voit donc les t&eacute;moins se transformer en d&eacute;tective ou en journaliste et mener l&rsquo;enqu&ecirc;te &agrave; sa place. Ces enqu&ecirc;tes, con&ccedil;ues sur le mod&egrave;le du roman policier, permettent l&rsquo;installation de micro-intrigues tr&egrave;s immersives comme ici, o&ugrave; dans un hypermarch&eacute;, le client et le lecteur tentent de &laquo;&nbsp;faire parler&nbsp;&raquo; un &laquo;&nbsp;bocal d&rsquo;oreilles de porc farcies&nbsp;&raquo;.</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Au rayon charcuterie, une infirmi&egrave;re embarque un bocal d&rsquo;oreilles de porc farcies, le m&ecirc;me qu&rsquo;elle ach&egrave;te &agrave; Hyper U depuis quinze ans. Elle avait &eacute;t&eacute; intrigu&eacute;e au d&eacute;but, &ccedil;a ne se faisait pas alors de travailler avec des agriculteurs du coin. Des lettres rustiques, imitation &eacute;picerie &agrave; l&rsquo;ancienne, annoncent sur l&rsquo;&eacute;tiquette : &laquo; Charcuteries fermi&egrave;res du G&eacute;vaudan, Andr&eacute; Balez, Recoules-de-Fumas. Elle avait ri, encore de la pub, comme ce Justin Bridou, personnage invent&eacute; jusqu&rsquo;&agrave; la moustache pour fourguer du saucisson d&rsquo;usine. Un dimanche, l&rsquo;infirmi&egrave;re n&rsquo;avait plus tenu. Elle avait roul&eacute; jusqu&rsquo;&agrave; l&rsquo;adresse du bocal. Une cour de ferme. Un toit de lauzes affaiss&eacute; par les ans. Et surgit Andr&eacute; Balez, sous un impayable chapeau. Oui, j&rsquo;existe, il tonne. Il apprend &agrave; l&rsquo;infirmi&egrave;re qu&rsquo;elle n&rsquo;est pas la premi&egrave;re &agrave; venir v&eacute;rifier&nbsp;<a href="#_ftn23" name="_ftnref23">[23]</a>.&nbsp;</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Ce proc&eacute;d&eacute; de substitution s&rsquo;explique notamment par la disparition de la reporter, cons&eacute;quence du raccourcissement op&eacute;r&eacute; sur les textes.</p> <h2><span id="3_Du_long_elague"><strong>3. Du long &eacute;lagu&eacute;</strong></span><br /> &nbsp;</h2> <p style="text-align: justify;">Car ce bref mont&eacute; est aussi paradoxalement du coup&eacute;. Les longs formats se r&eacute;v&egrave;lent souvent &ecirc;tre de <em>tr&egrave;s</em> longs formats, mais r&eacute;duits. Florence Aubenas explique, &agrave; de nombreuses reprises, qu&rsquo;elle a d&ucirc; &eacute;courter un texte initialement plus long. Elle avoue ainsi volontiers dans ses entretiens que <em>L&rsquo;Inconnu de la poste</em>, dans sa premi&egrave;re version, faisait mille pages et qu&rsquo;elle a &eacute;lagu&eacute;, pour mieux retenir le lecteur par une intrigue, dont la fonction est bien, comme l&rsquo;a d&eacute;montr&eacute; Baroni, de &laquo;&nbsp;susciter un d&eacute;sir cognitif&nbsp;<a href="#_ftn24" name="_ftnref24">[24]</a>&nbsp;&raquo;. Une fois au moins, cette mise en intrigue n&rsquo;a pas abouti. En 2012, pour un reportage embarqu&eacute;, Aubenas a habit&eacute; pendant neuf mois dans la banlieue de Nanterre, dans une cit&eacute; HLM. Le livre avait m&ecirc;me un titre, annonc&eacute; chez l&rsquo;Olivier&nbsp;: <em>La Banlieue quand elle ne br&ucirc;le pas</em>. Mais Florence Aubenas n&rsquo;a pas trouv&eacute; l&rsquo;intrigue, le livre est rest&eacute; en pi&egrave;ces&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">J&rsquo;ai pass&eacute; un an et demi. J&rsquo;ai pris un appartement dans une tour HLM &agrave; Nanterre, une cit&eacute; pour sa vie nocturne, rien, je n&rsquo;ai rien publi&eacute;. On parlait du r&eacute;cit, je n&rsquo;ai pas trouv&eacute; cette mani&egrave;re, effectivement j&rsquo;ai &eacute;crit le livre, c&rsquo;&eacute;tait une s&eacute;rie de sketchs pour moi mal organis&eacute;s les uns avec les autres, quand on fait un livre, ma conception avec moi, c&rsquo;est quand il y a un livre, quand on a envie de tourner la page, je ne sais pas faire les petits contes, moi&nbsp;<a href="#_ftn25" name="_ftnref25">[25]</a>.</p> </blockquote> <h3 style="text-align: justify;"><span id="31_La_disparition_de_lenquetrice">3.1 La disparition de l&rsquo;enqu&ecirc;trice</span></h3> <p style="text-align: justify;">Parmi les suppressions, figurent souvent les marques de la pr&eacute;sence de la reporter sur les lieux, toute r&eacute;f&eacute;rence &agrave; la situation de reportage et donc tr&egrave;s logiquement le je. Florence Aubenas, aussi pr&eacute;sente soit-elle sur le terrain et quelle que soit sa proximit&eacute; conquise au fil des jours avec ses sujets, n&rsquo;&eacute;crit que peu aujourd&rsquo;hui &agrave; la premi&egrave;re personne et sa non-fiction, dans ce cadre, d&eacute;roge avec une certaine tentation fran&ccedil;aise d&rsquo;exhibition du moi, incarn&eacute;e exemplairement par Philippe Jaenada et avant par l&rsquo;&eacute;cole des grands reporters jusqu&rsquo;&agrave; <em>Actuel</em>. Elle a trouv&eacute; <em>sa</em> mani&egrave;re, paradoxale, de r&eacute;pondre &agrave; la question essentielle pos&eacute;e par Emmanuel Carr&egrave;re au d&eacute;but de <em>L&rsquo;Adversaire</em>&nbsp;: &laquo;&nbsp;Mon probl&egrave;me n&rsquo;est pas, [&hellip;], l&rsquo;information. Il est de trouver ma place face &agrave; votre histoire&nbsp;<a href="#_ftn26" name="_ftnref26">[26]</a>&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;">&laquo;&nbsp;Et d&rsquo;un coup, le piquet de gr&egrave;ve ressemble &agrave; un confessionnal dans la fum&eacute;e des cigarettes&nbsp;<a href="#_ftn27" name="_ftnref27">[27]</a>&nbsp;&raquo;.&nbsp;Parfois la pr&eacute;sence de la journaliste sur le terrain et les conditions de la rencontre se d&eacute;voilent entre les lignes, comme ici par une m&eacute;taphore qui montre l&rsquo;intimit&eacute; intervenue avec les sujets tout en faisant bel et bien dispara&icirc;tre la &laquo;&nbsp;confesseuse&nbsp;&raquo;. En fait le travail d&rsquo;&eacute;criture consiste &agrave; effacer les traces de l&rsquo;entretien originel. Les invisibles sont pr&eacute;sent&eacute;s en action dans leur milieu, jamais stabilis&eacute;s en position de discussion, si bien que la reporter appara&icirc;t comme &agrave; la fois partout et nulle part. De quel c&ocirc;t&eacute; de la fen&ecirc;tre est-elle, par exemple, dans cette petite s&eacute;quence prise dans un reportage sur un EHPAD ?</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mardi 17 mars. Le couple s&rsquo;est plant&eacute; sur le trottoir, juste devant la fa&ccedil;ade. Ils doivent avoir la cinquantaine, et c&rsquo;est elle qui se met &agrave; crier la premi&egrave;re, mains en porte-voix : &laquo; Maman, montre-toi, on est l&agrave; ! &raquo; Aux fen&ecirc;tres, rien ne bouge. Alors le mari vient en renfort, mimant une s&eacute;r&eacute;nade d&rsquo;une belle voix fausse de baryton : &laquo; Je vous aime, je suis sous votre balcon ! &raquo; Un volet bouge. &laquo; Maman &raquo; appara&icirc;t derri&egrave;re la vitre ; ses l&egrave;vres remuent, mais elle parle trop doucement pour qu&rsquo;ils l&rsquo;entendent. &laquo; Tu as vu ? Elle a mis sa robe de chambre bleue &raquo;, constate madame. Puis ils ne disent plus rien, se tenant juste par les yeux, eux en bas et elle en haut, qui agite d&eacute;licatement la main, fa&ccedil;on reine d&rsquo;Angleterre. Quand le couple finit par s&rsquo;en aller, elle fait pivoter son fauteuil roulant pour les apercevoir le plus longtemps possible&nbsp;<a href="#_ftn28" name="_ftnref28">[28]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">La disparition syntaxique d&rsquo;Aubenas de la phrase renvoie &agrave; ses techniques d&rsquo;invisibilisation sur le terrain o&ugrave; elle s&rsquo;applique &laquo;&nbsp;&agrave; faire partie des meubles&nbsp;&raquo;. Dans le magazine<em> M. Le Monde</em> en 2015, elle raconte les vacances de r&ecirc;ve de jeunes de banlieue de Grigny ou de la Courneuve, lib&eacute;r&eacute;s en Asie de certains pr&eacute;jug&eacute;s communs en France. Dans ce reportage tr&egrave;s enlev&eacute;, un &laquo;&nbsp;on&nbsp;&raquo; ambigu est l&rsquo;indice maximal de la pr&eacute;sence de la reporter sur place&nbsp;: &laquo;&nbsp;On finit sur la plage, avec une dizaine de gar&ccedil;ons des Hauts-de-Seine, autour d&rsquo;un t&eacute;l&eacute;phone qui balance du rap dans un sable blanc comme du sel&nbsp;<a href="#_ftn29" name="_ftnref29">[29]</a>&nbsp;&raquo;. Un article sign&eacute; de Marie-Pierre Lannelongue nous donne le protocole de l&rsquo;enqu&ecirc;te&nbsp;<a href="#_ftn30" name="_ftnref30">[30]</a>&nbsp;: Aubenas a pris l&rsquo;avion pour la Tha&iuml;lande avec deux gar&ccedil;ons de la cit&eacute; des P&acirc;querettes, &agrave; Nanterre et sur place, elle a rencontr&eacute; d&rsquo;autres jeunes gens issus de la banlieue.</p> <p style="text-align: justify;">Ce dispositif d&rsquo;invisibilisation peut &ecirc;tre rapproch&eacute; des fictions de m&eacute;thode <a href="#_ftn31" name="_ftnref31">[31]</a> propos&eacute;es par Ivan Jablonka, soit &laquo;&nbsp;des fictions visibles, assum&eacute;es comme telles, &eacute;rig&eacute;es en outils cognitifs&nbsp;<a href="#_ftn32" name="_ftnref32">[32]</a>&nbsp;&raquo;. Ici la fiction de m&eacute;thode passe par la disparition de Florence Aubenas et par l&rsquo;installation d&rsquo;une quasi narration omnisciente, tr&egrave;s proche de celle du roman r&eacute;aliste. Il n&rsquo;est donc pas &eacute;tonnant et tout &agrave; fait int&eacute;ressant que les rares critiques faites &agrave; Florence Aubenas l&rsquo;accusent de produire une &laquo;&nbsp;chronique romanc&eacute;e&nbsp;<a href="#_ftn33" name="_ftnref33">[33]</a>&nbsp;&raquo;. Dans <em>Ouest-France</em>, les &eacute;lus de Cou&euml;ron et le d&eacute;put&eacute;-maire, m&eacute;contents de l&rsquo;image soi-disant mis&eacute;rabiliste donn&eacute;e par Aubenas de leur commune, d&eacute;noncent &laquo;&nbsp;une description certes litt&eacute;raire, mais &eacute;tonnamment d&eacute;connect&eacute;e de la r&eacute;alit&eacute;. Il est clair, aux yeux de tous, que Florence Aubenas n&rsquo;a jamais pos&eacute; un pied sur notre commune, sauf peut-&ecirc;tre dans une autre vie&nbsp;<a href="#_ftn34" name="_ftnref34">[34]</a>&nbsp;&raquo;. Elle avait &eacute;crit&nbsp;: &laquo; C&rsquo;est un gar&ccedil;on&nbsp;du pays, de Cou&euml;ron exactement, ancien village de p&ecirc;cheurs [&hellip;] une &eacute;tendue de vase et d&rsquo;herbes o&ugrave; grouille une p&egrave;gre d&rsquo;eau douce, vivant chichement de braconnages&nbsp;divers, braquages mis&eacute;reux,&nbsp;trafic de ferrailles et de&nbsp;stup&eacute;fiants [&hellip;]&nbsp;<a href="#_ftn35" name="_ftnref35">[35]</a> &raquo;. Un journaliste local l&rsquo;avait semonc&eacute;e et lui avait m&ecirc;me reproch&eacute; de faire du Zola&nbsp;<a href="#_ftn36" name="_ftnref36">[36]</a>. Effectivement elle a cette mani&egrave;re balzacienne ou zolienne, en tout cas romanesque selon les crit&egrave;res du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, de lier un lieu et un &eacute;v&eacute;nement, comme dans cette description du pays de Gex o&ugrave; se sont implant&eacute;s les Romand, avant le drame.</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">En bordure de la Suisse, le pays de Gex, vert et vallonn&eacute;, ne ressemble &agrave; rien d&rsquo;autre dans le d&eacute;partement de l&rsquo;Ain. Depuis les ann&eacute;es 60 s&rsquo;y est install&eacute;e une tribu dor&eacute;e de cadres sup&eacute;rieurs, de fonctionnaires internationaux, de commer&ccedil;ants ais&eacute;s, qui jouent &agrave; saute-fronti&egrave;re entre les salaires suisses et l&rsquo;art de vivre fran&ccedil;ais. Lorsque les Romand y arrivent en 1984, ils semblent avoir trouv&eacute; l&agrave; leur terre promise&nbsp;<a href="#_ftn37" name="_ftnref37">[37]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">De fait, ce lien avec le mod&egrave;le r&eacute;aliste ou naturaliste est de plus en plus affirm&eacute; et revendiqu&eacute; chez Aubenas.</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Ici, c&rsquo;est Zola dans le d&eacute;sert : les plus grandes mines de phosphate du monde, principale ressource de Tunisie, auxquelles se cramponne un peuple de mis&egrave;re, luttant pour un travail qui, peu &agrave; peu, finira par l&rsquo;empoisonner. Depuis pr&egrave;s d&rsquo;un si&egrave;cle et demi, l&rsquo;histoire s&rsquo;y raconte &agrave; travers de longues gr&egrave;ves, ponctu&eacute;es d&rsquo;arrestations, de morts, d&rsquo;injustices, dans les bourrasques du sirocco qui soul&egrave;ve une poussi&egrave;re blanche, corrosive, tandis que grince, au loin, un train rempli de phosphate&nbsp;<a href="#_ftn38" name="_ftnref38">[38]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Dans son interview r&eacute;cente &agrave; <em>Zadig&nbsp;</em><a href="#_ftn39" name="_ftnref39">[39]</a><em>, </em>elle se r&eacute;f&egrave;re explicitement &agrave; <em>Germinal.</em> Comme Zola, Florence Aubenas a une ambition panoramique, comme Zola, ses proc&eacute;d&eacute;s d&rsquo;enqu&ecirc;te aboutissent &agrave; une invisibilisation de l&rsquo;enqu&ecirc;teur au profit de ses sujets pour elle, ou de ses personnages pour lui. Elle a feuillet&eacute; les <em>Carnets d&rsquo;enqu&ecirc;te&nbsp;</em><a href="#_ftn40" name="_ftnref40">[40]</a> et trouve que Zola, &agrave; l&rsquo;oppos&eacute; d&rsquo;elle, prend des notes extraordinairement pr&eacute;cises sur les d&eacute;cors et retranscrit tr&egrave;s peu de dialogues. Mais dans tous les cas, il s&rsquo;agit de narrer et de mettre en place une intrigue.</p> <h3 style="text-align: justify;"><span id="32_Des_exceptions">3.2 Des exceptions</span></h3> <p style="text-align: justify;">De mani&egrave;re assez amusante, le je est pourtant fort pr&eacute;sent dans une s&eacute;rie un peu &agrave; contre-emploi, intitul&eacute;e &laquo; Red Carpet &raquo;, r&eacute;alis&eacute;e &agrave; propos du festival de Cannes. Sur les <em>people</em>, Florence Aubenas s&rsquo;est d&eacute;j&agrave; expliqu&eacute;e&nbsp;: &laquo;&nbsp;Je ne dis pas qu&rsquo;ils ne sont pas dignes d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t. Je dis qu&rsquo;ils n&rsquo;appartiennent pas &agrave; mon univers, ne nourrissent pas mon imaginaire, ne r&eacute;pondent pas &agrave; ma priorit&eacute; qui est de comprendre comment vivent les Fran&ccedil;ais&nbsp;<a href="#_ftn41" name="_ftnref41">[41]</a>&nbsp;&raquo;. &Agrave; Cannes, non seulement l&rsquo;ironie, d&eacute;vastatrice, est omnipr&eacute;sente mais la journaliste s&rsquo;exhibe pour montrer son &eacute;tranget&eacute; et son ext&eacute;riorit&eacute; &agrave; ce monde, avec une &laquo;&nbsp;brusque envie de reprendre le train&nbsp;<a href="#_ftn42" name="_ftnref42">[42]</a>&nbsp;&raquo;,</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Des filles en talons aiguille se photographient avec un verre de ros&eacute; sur le sable. Tout laisse croire qu&rsquo;elles ont pass&eacute; une nuit blanche. &Agrave; mon avis, elles se vantent.&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;">Vers la gare commence le lent p&egrave;lerinage de ceux qui essaient d&rsquo;avancer leur d&eacute;part. Une dame avec un coup de soleil au contr&ocirc;leur :&nbsp;&nbsp;<em>&laquo; La cl&ocirc;ture ? Il n&rsquo;y a que les ploucs pour y aller.&raquo;&nbsp;&nbsp;</em>J&rsquo;en fais partie. Je vous avais pr&eacute;par&eacute;, moi aussi, quelques anecdotes &eacute;mouvantes sur certains films. Aucun n&rsquo;a &eacute;t&eacute; prim&eacute;. Il doit s&rsquo;agir d&rsquo;un complot&nbsp;<a href="#_ftn43" name="_ftnref43">[43]</a>.&nbsp;</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Il est amusant de constater que ces articles sont brefs. Au long empathique chez les sans voix, les pr&eacute;caires, s&rsquo;oppose le bref, satirique chez les &laquo;&nbsp;paillettes&nbsp;&raquo; qui s&rsquo;inscrit dans une longue tradition de l&rsquo;&eacute;pigramme, de la caricature et de la physiologie. Ces articles ne sont pas exempts d&rsquo;ailleurs d&rsquo;autod&eacute;rision lorsqu&rsquo;elle se d&eacute;crit comme inexorablement attir&eacute;e par le Secours catholique de Cannes. L&rsquo;ensemble est une d&eacute;nonciation impitoyable de la &laquo;&nbsp;bulle&nbsp;<a href="#_ftn44" name="_ftnref44">[44]</a>&nbsp;&raquo; de Cannes.</p> <p style="text-align: justify;">Le reportage en immersion <em>Le Quai de Ouistreham</em> constitue un autre exemple de tr&egrave;s long o&ugrave; le je est constamment pr&eacute;sent, puisque Aubenas y a pris totalement la place de ces sujets et a effectivement &eacute;crit &agrave; la premi&egrave;re personne, comme une autre. Aubenas y emploie cependant un je plat, sans introspection, qui ne commente jamais, par exemple, les absurdit&eacute;s du syst&egrave;me bureaucratique fran&ccedil;ais qu&rsquo;elle d&eacute;plie, &agrave; l&rsquo;instar de l&rsquo;histoire de cet homme &agrave; l&rsquo;Agence pour l&rsquo;Emploi que l&rsquo;on invite &agrave; t&eacute;l&eacute;phoner pour pr&eacute;venir que son t&eacute;l&eacute;phone a &eacute;t&eacute; coup&eacute;. Elle ne revient pas, une fois le prologue pass&eacute;, sur son identit&eacute; de journaliste et elle &eacute;crit comme la femme d&eacute;sempar&eacute;e qu&rsquo;elle feint d&rsquo;&ecirc;tre, n&eacute;gligeant tous les effets de feuillet&eacute;s et de vertiges identitaires caract&eacute;ristiques des reportages d&rsquo;immersion&nbsp;<a href="#_ftn45" name="_ftnref45">[45]</a>. Cette immersion anonyme qui sans doute satisfaisait totalement son envie de &laquo;&nbsp;faire partie des meubles&nbsp;&raquo;, en m&ecirc;me temps d&eacute;rogeait &agrave; ses principes d&rsquo;invisibilisation puisqu&rsquo;elle est devenue l&rsquo;h&eacute;ro&iuml;ne de sa propre histoire. Significativement, malgr&eacute; le succ&egrave;s du livre, son adaptation au th&eacute;&acirc;tre et au cin&eacute;ma, elle n&rsquo;a pas retent&eacute; l&rsquo;exp&eacute;rience et ne s&rsquo;est pas, comme une Maryse Choisy, transform&eacute;e de mani&egrave;re infinie. Elle affirme aujourd&rsquo;hui que l&rsquo;image des journalistes, d&eacute;grad&eacute;e, ne permet plus de telles exp&eacute;riences qui pourraient passer pour des tromperies.</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Arriver &agrave; un rond-point de Gilets jaunes sans dire qu&rsquo;on est journaliste, c&rsquo;est vraiment tromper les gens. Je me leurre peut-&ecirc;tre, mais quand je disais&nbsp;: &laquo;&nbsp;Je suis femme de m&eacute;nage&nbsp;&raquo;, je ne cherchais pas &agrave; tromper. Les Gilets jaunes, dans le contexte qu&rsquo;on connaissait, l&rsquo;auraient pris comme une tromperie. Alors j&rsquo;ai affich&eacute; la couleur&nbsp;<a href="#_ftn46" name="_ftnref46">[46]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Malgr&eacute; la forte pr&eacute;sence du je, <em>Le Quai de Ouistreham</em> est aussi incontestablement un r&eacute;cit &eacute;lagu&eacute; jusqu&rsquo;&agrave; pouvoir reposer sur la force d&rsquo;immersion d&rsquo;une intrigue.</p> <h3 style="text-align: justify;"><span id="33_Limmersion_par_lintrigue">3.3 L&rsquo;immersion par l&rsquo;intrigue</span></h3> <p style="text-align: justify;">Si le bref coagul&eacute; &eacute;tait du configurant, le long &eacute;lagu&eacute; est de l&rsquo;intriguant. Rapha&euml;l Baroni appelle intriguant un r&eacute;cit o&ugrave; &laquo;&nbsp;l&rsquo;intrigue est con&ccedil;ue dans le but d&rsquo;immerger le lecteur dans une exp&eacute;rience simul&eacute;e et de nouer une tension orient&eacute;e vers un d&eacute;nouement &eacute;ventuel. Il s&rsquo;agit de construire une exp&eacute;rience esth&eacute;tique fond&eacute;e sur le suspense, la curiosit&eacute; ou la surprise, ce qui implique que la compr&eacute;hension globale des &eacute;v&eacute;nements est strat&eacute;giquement retard&eacute;e ou emp&ecirc;ch&eacute;e&nbsp;<a href="#_ftn47" name="_ftnref47">[47]</a>&nbsp;&raquo;. Dans <em>Le Quai de Ouistreham</em>, l&rsquo;intrigue est constitu&eacute;e autour du suspense cr&eacute;&eacute; autour de l&rsquo;obtention d&rsquo;un contrat &agrave; dur&eacute;e d&eacute;termin&eacute;e. Le texte est &eacute;lagu&eacute; des conditions r&eacute;elles de l&rsquo;exp&eacute;rience qui seront donn&eacute;es dans les articles de presse accompagnant la sortie du livre. On y apprend par exemple que la journaliste n&rsquo;a pas r&eacute;ussi &agrave; vivre de ce qu&rsquo;elle gagnait et que si beaucoup de ses co&eacute;quipi&egrave;res ont &eacute;t&eacute; agr&eacute;ablement surprises en apprenant sa v&eacute;ritable identit&eacute; et en lisant son r&eacute;cit, d&rsquo;autres se sont senties trahies par cette usurpation de fonction. En fait le r&eacute;cit est bien r&eacute;gi par un &eacute;lan intriguant&nbsp;: il s&rsquo;agit d&rsquo;un r&eacute;cit &eacute;piphanique o&ugrave; une femme de plus en plus rebelle et impliqu&eacute;e (elle r&eacute;pond &agrave; un manager, tente de parler politique avec d&rsquo;autres employ&eacute;s, refuse un travail par amiti&eacute;), se voit offrir le fameux contrat. Comme si l&rsquo;enqu&ecirc;te sociale &eacute;tait doubl&eacute;e d&rsquo;un roman d&rsquo;apprentissage. Le r&eacute;cit d&rsquo;apprentissage est construit selon un d&eacute;roulement t&eacute;l&eacute;ologique o&ugrave; le CDI constitue le d&eacute;nouement &agrave; la fois inattendu mais aussi id&eacute;al pour la cl&ocirc;ture de l&rsquo;histoire.</p> <p style="text-align: justify;">Dans <em>L&rsquo;Inconnu de la poste</em>, le r&eacute;cit passe par un travail d&rsquo;&eacute;quilibriste entre le configurant (le bref mont&eacute;) et l&rsquo;intriguant (le tr&egrave;s long &eacute;lagu&eacute;), qui va conduire le lecteur &agrave; rester dans le livre pour conna&icirc;tre l&rsquo;identit&eacute; de l&rsquo;assassin. Le configurant permet de mettre le lecteur &agrave; la hauteur des sujets du livre et de l&rsquo;amener &agrave; r&eacute;fl&eacute;chir &agrave; plusieurs milieux, territoires, terrains et l&rsquo;intriguant le conduit &agrave; &ecirc;tre totalement pris par l&rsquo;histoire comme dans un <em>page turner</em>. Dans une interview donn&eacute;e &agrave; <em>L&rsquo;Obs</em>, elle d&eacute;taille ainsi la mani&egrave;re dont, dans <em>L&rsquo;Inconnu de la poste,</em> le travail de l&rsquo;&eacute;criture a s&eacute;lectionn&eacute; dans le mat&eacute;riau de l&rsquo;enqu&ecirc;te :</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Il y a beaucoup de choses qui ne servent pas directement, mais vous impr&egrave;gnent d&rsquo;une r&eacute;gion, d&rsquo;un contexte. Par exemple, j&rsquo;ai &eacute;norm&eacute;ment travaill&eacute; sur le pass&eacute; de cet endroit, qui fut un haut lieu de la R&eacute;sistance et finalement je n&rsquo;ai pas int&eacute;gr&eacute; ce volet. J&rsquo;ai aussi beaucoup travaill&eacute; sur la transformation de la vall&eacute;e, la disparition du monde paysan aval&eacute; par l&rsquo;industrie du plastique. J&rsquo;ai visit&eacute; une usine, rencontr&eacute; des industriels. Les auteurs de non-fiction am&eacute;ricains que j&rsquo;admire, comme Ted Conover ou Gay Talese, auraient consacr&eacute; au moins trois chapitres <em>in extenso</em> &agrave; cet aspect. Moi, je ne sais pas faire, j&rsquo;ai peur de ralentir la narration<strong>.</strong> Je n&rsquo;ai pas ce talent d&rsquo;ouvrir autant de tiroirs dans un r&eacute;cit.&nbsp;<a href="#_ftn48" name="_ftnref48">[48]</a></p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Le travail de l&rsquo;intrigue ici est calqu&eacute; sur celui du roman policier. &Agrave; plusieurs reprises, et notamment dans l&rsquo;article matriciel paru dans <em>M. Le Monde&nbsp;</em><a href="#_ftn49" name="_ftnref49">[49]</a>, Aubenas souligne combien ce meurtre s&rsquo;apparente aux &eacute;nigmes de la chambre close dont le mod&egrave;le prototypique est <em>Le Myst&egrave;re de la chambre jaune</em>. &Agrave; d&rsquo;autres moments, elle affirme avoir cal&eacute; son intrigue sur celle d&rsquo;un Simenon, c&rsquo;est-&agrave;-dire en suivant l&rsquo;enqu&ecirc;te tout en racontant la pluralit&eacute; des choses&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">&laquo;&nbsp;Les romans qui me plaisent sont les romans &agrave; histoire, les conteurs, Kadar&eacute;, Balzac. Il faut que je sois emport&eacute;e par un r&eacute;cit. Comme dans <em>La Cousine Bette&nbsp;</em>&raquo;. Elle dit avoir beaucoup travaill&eacute; sur la forme de <em>L&rsquo;Inconnu de la post</em>e, pour &eacute;chapper au d&eacute;roul&eacute; de l&rsquo;enqu&ecirc;te, pour &laquo;&nbsp;raconter la pluralit&eacute; des choses &raquo;. &Ccedil;a lui rappelle une phrase de Simenon, qui disait avoir longtemps suivi le m&ecirc;me fil, &agrave; savoir la fum&eacute;e de la pipe de Maigret, jusqu&rsquo;au jour o&ugrave; il en a termin&eacute; avec le commissaire et d&eacute;clar&eacute; &laquo; J&rsquo;ai d&eacute;cid&eacute; de l&acirc;cher la rampe &raquo;. Eh bien elle a l&acirc;ch&eacute; la rampe dans ce livre-l&agrave;, &laquo; c&rsquo;&eacute;tait vertigineux et &ccedil;a m&rsquo;a plu <a href="#_ftn50" name="_ftnref50">[50]</a>&nbsp;&raquo;.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Le processus est donc double&nbsp;: d&rsquo;un c&ocirc;t&eacute; le montage d&rsquo;&eacute;clats brefs qui donnent la chair de ces milieux et de ces hommes. Le dispositif &eacute;nonciatif utilis&eacute; est celui du reportage litt&eacute;raire ou de la non-fiction am&eacute;ricaine&nbsp;: Florence Aubenas &eacute;crit comme si elle se mettait dans la t&ecirc;te des personnages. Elle le fait m&ecirc;me pour la victime Catherine Burgod qu&rsquo;elle n&rsquo;a jamais rencontr&eacute;e. &laquo;&nbsp;Oui, mais c&rsquo;est pr&eacute;cis&eacute;ment ce qui n&rsquo;est pas possible de faire dans un article et ce que permet l&rsquo;&eacute;criture d&rsquo;un livre. L&rsquo;envie du livre est venue avec cette construction-l&agrave;. C&rsquo;est une grande responsabilit&eacute;. Imaginer comment le livre sera re&ccedil;u &agrave; Montr&eacute;al-la-Cluse me terrorise, &agrave; vrai dire&nbsp;&raquo;&nbsp;<a href="#_ftn51" name="_ftnref51">[51]</a>. De l&rsquo;autre c&ocirc;t&eacute;, elle relie ces sc&egrave;nes avec une intrigue haletante qui passe par la disparition de tout ce qui n&rsquo;est pas strictement n&eacute;cessaire, y compris la reporter elle-m&ecirc;me. On sait qu&rsquo;elle s&rsquo;est immerg&eacute;e &agrave; Montr&eacute;al-la-Cluse pendant des ann&eacute;es mais cette immersion s&rsquo;est accompagn&eacute;e, comme dans ses derniers articles du <em>Monde,</em> d&rsquo;une disparition textuelle. Comme l&rsquo;ouvrage reste et doit rester de la non-fiction, il est accompagn&eacute; de ce singulier prologue &eacute;crit &agrave; la premi&egrave;re personne o&ugrave; Florence Aubenas indique une fois pour toute sa position, son identit&eacute; au sein de l&rsquo;histoire et aussi son appartenance &agrave; la non-fiction &agrave; la fran&ccedil;aise, celle qui n&rsquo;oublie pas qu&rsquo;une litt&eacute;rature du r&eacute;el est toujours filtr&eacute;e par un sujet. Au lecteur ensuite de s&rsquo;en souvenir et d&rsquo;&ecirc;tre sensible au travail d&rsquo;enqu&ecirc;te sociale et d&rsquo;&eacute;criture ou &agrave; lui de l&rsquo;oublier et de croire qu&rsquo;il est plong&eacute; devant un <em>page turner</em> policier.</p> <p style="text-align: justify;">Il n&rsquo;en reste pas moins que le prologue a plac&eacute; la reporter au c&oelig;ur de l&rsquo;action, puisqu&rsquo;il l&rsquo;a montr&eacute;e, attendant Thomassin le jour de sa disparition. Elle est au c&oelig;ur de ce vide qu&rsquo;elle va essayer de combler, comme s&rsquo;il lui avait l&eacute;gu&eacute; cette disparition. Elle est d&rsquo;ailleurs impliqu&eacute;e par l&rsquo;autorit&eacute; judiciaire qui se tourne vers elle : &laquo; &laquo; Que s&rsquo;est-il pass&eacute;, selon vous&nbsp;?&nbsp;&raquo;, m&rsquo;a demand&eacute; le policier&nbsp;<a href="#_ftn52" name="_ftnref52">[52]</a>&nbsp;&raquo;. Mais elle est aussi, comme dans ses articles, la disparue du livre, partageant avec Thomassin une sorte de destin d&rsquo;&eacute;vanescence. Ce rendez-vous manqu&eacute; entre la reporter et son sujet renvoie en creux pour le lecteur &agrave; sa propre disparition &agrave; elle.</p> <p style="text-align: justify;">Le long format chez Florence Aubenas se caract&eacute;rise donc par un dispositif complexe entre bref mont&eacute; (agr&eacute;gations d&rsquo;&eacute;clats brefs pour rendre compte d&rsquo;autres voix, d&eacute;nonciation des travers d&rsquo;une soci&eacute;t&eacute; souvent injuste par la simple exhibition de ses dysfonctionnements) et long &eacute;lagu&eacute; (disparition de tous les d&eacute;tails qui pourraient nuire au plaisir de la lecture, disparition notamment de la reporter, mise en place d&rsquo;une intrigue percutante) qui tient dans <em>L&rsquo;Inconnu de la poste</em> comme dans <em>Le Quai de Ouistreham</em> d&rsquo;une forme de num&eacute;ro d&rsquo;&eacute;quilibriste particuli&egrave;rement r&eacute;ussi. Il est tr&egrave;s frappant de voir que si Aubenas continue &agrave; refuser l&rsquo;&eacute;tiquette d&rsquo;&eacute;crivaine (&laquo;&nbsp;&laquo;&nbsp;Si je devais choisir une &eacute;tiquette, ce serait journaliste, reporter, plut&ocirc;t qu&rsquo;&eacute;crivain&nbsp;<a href="#_ftn53" name="_ftnref53">[53]</a>&nbsp;&raquo;), ses plus r&eacute;centes interventions, notamment radiophoniques, ou les tr&egrave;s nombreux salons et festivals dont elle occupe la place d&rsquo;honneur la montrent de plus en plus pr&ecirc;te &agrave; reconna&icirc;tre des g&eacute;n&eacute;alogies qu&rsquo;elle choisit certes dans l&rsquo;histoire du nouveau journalisme qu&rsquo;elle ma&icirc;trise &agrave; la perfection, qu&rsquo;il soit am&eacute;ricain ou fran&ccedil;ais, mais aussi dans l&rsquo;histoire de la litt&eacute;rature fran&ccedil;aise du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, notamment du c&ocirc;t&eacute; du long roman r&eacute;aliste.</p> <p style="text-align: justify;">J&rsquo;aime la litt&eacute;rature du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, Balzac, Flaubert, Maupassant, Zola, tous des raconteurs d&rsquo;histoires. Comme aussi Simenon, Emmanuel Carr&egrave;re, Michel Houellebecq. J&rsquo;aime aussi beaucoup la litt&eacute;rature du r&eacute;el, qui va de Bruce Chatwin &agrave; Tom Wolfe, en passant par Ted Conover et Nicolas Bouvier. La litt&eacute;rature du r&eacute;el travaille une mati&egrave;re vivante qui se trouve devant vous et qui continue &agrave; &eacute;voluer au moment o&ugrave; vous en parlez&nbsp;<a href="#_ftn54" name="_ftnref54">[54]</a>.&nbsp;</p> <h3 style="text-align: justify;"><strong>Notes</strong><br /> &nbsp;</h3> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1">[1]</a> Nicolas Blondeau, &laquo;&nbsp;Je voulais privil&eacute;gier les informations du haut de la pile&nbsp;&raquo;, interview de Florence Aubenas, <em>Le Bien Public</em>, 12 avril 2015, p. 16.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2">[2]</a> &laquo;&nbsp;J&rsquo;aime beaucoup la cuisine de l&rsquo;&eacute;criture&nbsp;&raquo;, interview donn&eacute;e le 16 mars 2021 &agrave; Infusion Fnac. https://www.youtube.com/watch?v=U_14GQ0zdN4</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3">[3]</a> Nous remettons l&rsquo;expos&eacute; de la d&eacute;marche de plus en plus intertextuelle de Florence Aubenas &agrave; un ouvrage en pr&eacute;paration&nbsp;: <em>L&rsquo;Observatoire des invisibles. Nouveau journalisme et non fiction en France</em>.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4">[4]</a> <em>Le Quotidien</em>, 19 mars 2021.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5">[5]</a> &laquo;&nbsp;Pour Florence Aubenas et Hussein Hanoun al-Saadi&nbsp;&raquo;, <em>Lib&eacute;ration</em>, 14 janvier 2005, p. 6. Nous soulignons.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref6" name="_ftn6">[6]</a> &laquo;&nbsp;L&rsquo;autoroute inachev&eacute;e&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Trans-Maghreb Express 3/6&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, 7 ao&ucirc;t 2014, p. 16.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref7" name="_ftn7">[7]</a> Voir &laquo;&nbsp;Au pays des hypers&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, &agrave; partir du 20 ao&ucirc;t 2019.&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref8" name="_ftn8">[8]</a> &laquo;&nbsp;Florence Aubenas pr&eacute;side le 3<sup>e</sup> festival international des &laquo;&nbsp;&Eacute;crits de femmes&nbsp;&raquo;, aujourd&rsquo;hui en Puisaye&nbsp;&raquo;, <em>Le Journal du Centre</em>, dimanche 12 octobre 2014, site web.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref9" name="_ftn9">[9]</a> Christian Le Bart, Pierre&nbsp;Leroux&nbsp;et Roselyne&nbsp;Ringoot, &laquo;&nbsp;Les livres de journalistes politiques. Sociologie d&rsquo;un passage &agrave; l&rsquo;acte&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Mots. Les langages du politique</em>&nbsp;[En ligne], 104&nbsp;|&nbsp;2014, mis en ligne le 19 mai 2014, consult&eacute; le 28 mai 2021. URL&nbsp;: http://journals.openedition.org/mots/21566&nbsp;; DOI&nbsp;: https://doi.org/10.4000/mots.21566</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref10" name="_ftn10">[10]</a> &laquo;&nbsp;Conversation avec Florence Aubenas&nbsp;&raquo;, <em>Zadig</em>, automne 2020, p. 22.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref11" name="_ftn11">[11]</a>&nbsp;Art. cit., p. 21.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref12" name="_ftn12">[12]</a> Fr&eacute;d&eacute;rique Br&eacute;haut, &laquo;&nbsp;De la vie dans les journaux&nbsp;&raquo;, <em>Le Courrier de l&rsquo;Ouest</em>, 20 d&eacute;cembre 2014.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref13" name="_ftn13">[13]</a> <em>L&rsquo;Inconnu de la poste</em>, L&rsquo;Olivier, 2021, p. 10.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref14" name="_ftn14">[14]</a> Claire Devarrieux, &laquo;&nbsp;Florence Aubenas face au &laquo;&nbsp;Petit Criminel&nbsp;&raquo;&nbsp;&raquo;, <em>Lib&eacute;ration</em>, 11 f&eacute;vrier 2021, site web.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref15" name="_ftn15">[15]</a> &laquo;&nbsp;La configuration renvoie sp&eacute;cifiquement aux structures d&rsquo;un texte id&eacute;alement coop&eacute;ratif, qui vise &agrave; assister le processus de compr&eacute;hension&nbsp;&raquo;. Rapha&euml;l Baroni, <em>Les Rouages de l&rsquo;intrigue. Les outils de la narratologie postclassique pour l&rsquo;analyse des textes litt&eacute;raires</em>, Gen&egrave;ve, Slatkine, 2017, p. 31.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref16" name="_ftn16">[16]</a> &laquo; Monsieur Nutella,&nbsp;<span style="font-family: 'Georgia',serif; color: #333333;">&ldquo;chef de gang&rdquo;</span>&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, 21 ao&ucirc;t 2019, p. 22. &nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref17" name="_ftn17">[17]</a> &laquo; En Ehpad, la vie et la mort au jour le jour&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Le Monde</em>, 1<sup>er</sup> avril 2020, p. 19.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref18" name="_ftn18">[18]</a> &laquo;&nbsp;70 000 euros quand m&ecirc;me&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, 27 mai 2013, p. 21.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref19" name="_ftn19">[19]</a> &laquo;&nbsp;Voyage dans la Macronie &raquo;, <em>Le Monde</em>, 25 mars 2017, p. 12.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref20" name="_ftn20">[20]</a> &laquo;&nbsp;Marlaine, Adeline et les autres&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Au pays des hypers&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, 22 ao&ucirc;t 2019, p.&nbsp;16. &nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref21" name="_ftn21">[21]</a> &laquo;&nbsp;Dix jours au poste&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, 31 d&eacute;cembre 2016, p. 12. &nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref22" name="_ftn22">[22]</a> &laquo;&nbsp;La r&eacute;volte des ronds-points&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, 17 d&eacute;cembre 2018, p. 15.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref23" name="_ftn23">[23]</a> &laquo;&nbsp;Et votre veau, il est fran&ccedil;ais&nbsp;?&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Au pays des hypers&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, vendredi 23 ao&ucirc;t 2019, p. 18.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref24" name="_ftn24">[24]</a> Rapha&euml;l Baroni, <em>Les rouages de l&rsquo;intrigue</em>, <em>op. cit.</em>, p. 39.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref25" name="_ftn25">[25]</a> <em>Le Quotidien</em>, 19 mars 2021.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref26" name="_ftn26">[26]</a> Emmanuel Carr&egrave;re, <em>L&rsquo;Adversaire</em>, Paris, POL, Folio, 2000, p. 203-204.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref27" name="_ftn27">[27]</a> &laquo; <span style="font-family: 'Georgia',serif; color: #333333;">&ldquo;</span>On ne les met pas au lit, on les jette<span style="font-family: 'Georgia',serif; color: #333333;">&rdquo;</span>&nbsp;: enqu&ecirc;te sur le quotidien d&rsquo;une maison de retraite &raquo;, <em>Le Monde</em>, 19 juillet 2017, p. 14.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref28" name="_ftn28">[28]</a> &laquo;&nbsp;En Ehpad, la vie et la mort au jour le jour&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, 1<sup>er</sup> avril 2020, p. 19.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref29" name="_ftn29">[29]</a> &laquo;&nbsp;La cit&eacute; sous les palmiers&nbsp;&raquo;, <em>M le Magazine</em>, 7 mars 2015, p. 33.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref30" name="_ftn30">[30]</a> Marie-Pierre Lannelongue, &laquo;&nbsp;Au programme&nbsp;&raquo;, <em>M le Magazine</em>, 7 mars 2015, p. 8.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref31" name="_ftn31">[31]</a> Ivan Jablonka, &laquo;&nbsp;Le Troisi&egrave;me continent&nbsp;&raquo;, <em>Pour la litt&eacute;rature du r&eacute;el, Feuilleton</em>, automne 2018, p. 42. Voir aussi <em>L&rsquo;Histoire est une litt&eacute;rature contemporaine</em>, Librairie du XXI<sup>e</sup> si&egrave;cle, Seuil, 2014.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref32" name="_ftn32">[32]</a> <em>Ibid</em>.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref33" name="_ftn33">[33]</a> J&eacute;r&ocirc;me H&eacute;mard, &laquo;&nbsp;Bienvenue dans la ville poussette&nbsp;&raquo;, <em>L&rsquo;Aisne nouvelle</em>, 10 avril 2014.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref34" name="_ftn34">[34]</a> &laquo;&nbsp;Ch&egrave;re Florence Aubenas&hellip;&nbsp;&raquo;, <em>Ouest-France</em>, 7 septembre 2013.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref35" name="_ftn35">[35]</a> &laquo; Proc&egrave;s Meilhon 21h53 : <span style="font-family: 'Georgia',serif; color: #333333;">&ldquo;</span>J&rsquo;ai rencontr&eacute; un homme de 31 ans<span style="font-family: 'Georgia',serif; color: #333333;">&rdquo;</span> &raquo;, <em>Le Monde</em>, 6 juin 2013, p. 20.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref36" name="_ftn36">[36]</a> <em>Presse Oc&eacute;an</em>, 9 juillet 2013.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref37" name="_ftn37">[37]</a> &laquo;&nbsp;Mensonge monstre&nbsp;&raquo;, <em>Lib&eacute;ration</em>, 12 janvier 2013, p. 20.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref38" name="_ftn38">[38]</a> &laquo;&nbsp;Le circuit r&eacute;volutionnaire&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Trans-Maghreb Express 5/6&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, 9 ao&ucirc;t 2014, p.&nbsp;20.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref39" name="_ftn39">[39]</a> &laquo;&nbsp;Conversation avec Florence Aubenas&nbsp;&raquo;, <em>Zadig</em>, automne 2020, p. 19.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref40" name="_ftn40">[40]</a> &Eacute;mile Zola, <em>Carnets d&rsquo;enqu&ecirc;tes. Une ethnographie in&eacute;dite de la France</em>, Plon, 1987.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref41" name="_ftn41">[41]</a> Isabelle Girard, &laquo;&nbsp;Florence Aubenas sur la piste de G&eacute;rald Thomassin disparu depuis ao&ucirc;t 2019&nbsp;&raquo;, <em>Madame Figaro,</em>12 f&eacute;vrier 2021, site web.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref42" name="_ftn42">[42]</a> &laquo;&nbsp;Vous ne savez pas qu&rsquo;elle hait la Vittel&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Red Carpet&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, 21 mai 2016, p. 14.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref43" name="_ftn43">[43]</a> &laquo;&nbsp;Les autres reviennent&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Red Carpet&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, 23 mai 2016, p. 15.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref44" name="_ftn44">[44]</a> &laquo;&nbsp;Votre rimmel coule un peu&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Red Carpet&nbsp;&raquo;, <em>Le Monde</em>, 13 mai 2016, p. 14.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref45" name="_ftn45">[45]</a> Nous nous permettons de renvoyer &agrave; notre propre chapitre : &laquo; Dans la peau d&rsquo;un autre. La pratique de l&rsquo;immersion en journalisme et en litt&eacute;rature : histoire et po&eacute;tiques &raquo;, article paru dans Pierre Leroux et Erik Neveu (dir.), <em>En immersion</em>, PUR, 2017, p. 22-36.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref46" name="_ftn46">[46]</a> &laquo;&nbsp;Conversation avec Florence Aubenas&nbsp;&raquo;, <em>op. cit</em>., p. 21.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref47" name="_ftn47">[47]</a> Rapha&euml;l Baroni, &laquo;&nbsp;Histoires v&eacute;cues, fictions, r&eacute;cits factuels&nbsp;&raquo;, <em>Po&eacute;tique</em>, Seuil, 2007/3, p.&nbsp;259-277.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref48" name="_ftn48">[48]</a> &laquo;&nbsp;Sur la piste du petit criminel&nbsp;&raquo;, propos recueillis par Elisabeth Philippe, <em>L&rsquo;Obs</em>, jeudi 4 f&eacute;vrier 2021, p. 67-72.&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref49" name="_ftn49">[49]</a> Florence Aubenas, &laquo;&nbsp;Comme dans un mauvais film&nbsp;&raquo;, <em>M Le magazine du Monde</em>, 11 octobre 2014, p. 67.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref50" name="_ftn50">[50]</a> Claire Devarrieux, &laquo;&nbsp;Florence Aubenas face au <em>Petit Criminel&nbsp;</em>&raquo;, <em>Lib&eacute;ration</em>, 11 f&eacute;vrier 2021, p. 24.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref51" name="_ftn51">[51]</a> &laquo;&nbsp;Chaque &eacute;poque a ses faits divers&nbsp;&raquo;, <em>Le Temps</em>, 13 f&eacute;vrier 2021, p. 25.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref52" name="_ftn52">[52]</a> <em>L&rsquo;Inconnu de la poste</em>, <em>op. cit.,</em> p. 11. &nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref53" name="_ftn53">[53]</a> <em>Lib&eacute;ration</em>, <em>op. cit</em>., 11 f&eacute;vrier 2021.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref54" name="_ftn54">[54]</a> <em>Le Temps</em>, 13 f&eacute;vrier 2021.</p> <h3 class="mks_toggle_heading">Bibliographie<br /> &nbsp;</h3> <p style="text-align: justify;">Paul Aron, &laquo; Un r&eacute;cit sur le travail pr&eacute;caire : <em>Le Quai de Ouistreham</em> de Florence Aubenas&nbsp;&raquo;, dans Roswitha B&ouml;hm et C&eacute;cile Kovacshazy (dir.), <em>Pr&eacute;carit&eacute;, litt&eacute;rature et cin&eacute;ma de la crise au XXI<sup>e</sup> si&egrave;cle</em>, T&uuml;bingen, Narr Francke Attempto, 2015, p. 25-38.</p> <p style="text-align: justify;">Florence Aubenas, <em>L&rsquo;Inconnu de la poste</em>, L&rsquo;Olivier, 2021.</p> <p style="text-align: justify;">Florence Aubenas, <em>Le Quai de Ouistreham</em>, L&rsquo;Olivier, 2010.</p> <p style="text-align: justify;">Emmanuel Carr&egrave;re, <em>L&rsquo;Adversaire</em>, Paris, POL, Folio, 2000.</p> <p style="text-align: justify;">Rapha&euml;l Baroni, <em>Les Rouages de l&rsquo;intrigue. Les outils de la narratologie postclassique pour l&rsquo;analyse des textes litt&eacute;raires</em>, Gen&egrave;ve, Slatkine, 2017.</p> <p style="text-align: justify;">Rapha&euml;l Baroni, &laquo;&nbsp;Histoires v&eacute;cues, fictions, r&eacute;cits factuels&nbsp;&raquo;, <em>Po&eacute;tique</em>, Seuil, 2007/3, p. 259-277.</p> <p style="text-align: justify;">Ivan Jablonka, <em>L&rsquo;Histoire est une litt&eacute;rature contemporaine</em>, Librairie du XXIe si&egrave;cle, Seuil, 2014.</p> <p style="text-align: justify;">Christian Le Bart, Pierre&nbsp;Leroux&nbsp;et Roselyne&nbsp;Ringoot, &laquo;&nbsp;Les livres de journalistes politiques. Sociologie d&rsquo;un passage &agrave; l&rsquo;acte&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Mots. Les langages du politique</em>&nbsp;[En ligne], 104&nbsp;|&nbsp;2014, URL&nbsp;: <a href="http://journals.openedition.org/mots/21566" target="_blank">http://journals.openedition.org/mots/21566</a></p> <p style="text-align: justify;">Pierre Leroux et Erik Neveu (dir.), <em>En immersion</em>, PUR, 2017.</p> <p style="text-align: justify;">Marie-&Egrave;ve Th&eacute;renty, <em>Femmes de presse, femmes de lettres. De Delphine de Girardin &agrave; Florence Aubenas</em>, CNRS &eacute;ditions, 2019.</p> <p style="text-align: justify;">&Eacute;mile Zola, <em>Carnets d&rsquo;enqu&ecirc;tes. Une ethnographie in&eacute;dite de la France</em>, pr&eacute;sentation par Henri Mitterand, &laquo;&nbsp;Terre humaine&nbsp;&raquo;, Plon, 1987.</p> <h3 style="text-align: justify;"><span id="Auteur">Auteur</span></h3> <p style="text-align: justify;"><strong>Marie-&Egrave;ve Th&eacute;renty</strong> est professeure de litt&eacute;rature fran&ccedil;aise et directrice du centre de recherche RIRRA21 &agrave; l&rsquo;universit&eacute; Paul Val&eacute;ry-Montpellier 3. Sp&eacute;cialiste des rapports entre presse et litt&eacute;rature, de po&eacute;tique des supports et d&rsquo;imaginaire des soci&eacute;t&eacute;s m&eacute;diatiques, elle a publi&eacute; plusieurs ouvrages dont <i>Mosa&iuml;ques. &Ecirc;tre &eacute;crivain entre presse et roman (1829-1836)</i> (Champion, 2003)&nbsp;; <i>La Litt&eacute;rature au quotidien. Po&eacute;tiques journalistiques au XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle</i> (Seuil, 2007)&nbsp;; <i>Femmes de presse, femmes de lettres</i>. <i>De Delphine de Girardin &agrave; Florence Aubenas </i>(CNRS &eacute;ditions, 2019) et sous le pseudonyme de Roy Pinker, <i>Fake news et viralit&eacute; avant internet </i>(avec Pierre-Carl Langlais et Julien Schuh, CNRS &eacute;ditions, 2020). Elle codirige avec Guillaume Pinson la plate-forme <a data-saferedirecturl="https://www.google.com/url?q=http://medias19.org/&amp;source=gmail&amp;ust=1644946236957000&amp;usg=AOvVaw0tGhDfKYYfNIhIYgEeU5dT" href="http://medias19.org/" rel="noopener" target="_blank">medias19.org</a>, d&eacute;di&eacute;e &agrave; l&rsquo;&eacute;tude de la culture m&eacute;diatique et elle est responsable du projet Numapresse (<a data-saferedirecturl="https://www.google.com/url?q=http://numapresse.org/&amp;source=gmail&amp;ust=1644946236957000&amp;usg=AOvVaw2BU4vBq9sBdKSZrQuPvjKv" href="http://numapresse.org/" rel="noopener" target="_blank">numapresse.org</a>) financ&eacute; par l&rsquo;Agence nationale pour la recherche (ANR). Elle pr&eacute;pare un ouvrage sur la non fiction journalistique depuis la Seconde Guerre mondiale.</p> <h3 style="text-align: justify;"><strong>Copyright</strong></h3> <p style="text-align: justify;">Tous droits r&eacute;serv&eacute;s.</p> </div>