<h2>Keywords<br /> &nbsp;</h2> <p>Alain Veinstein,&nbsp;magnetic nights,&nbsp;Colette Fellous,&nbsp;Christophe Deleu,&nbsp;Robert Kramer</p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <p>Colette Fellous ‒ Je me souviens de la premi&egrave;re fois o&ugrave; je suis all&eacute;e voir Alain (Alain Veinstein) pour lui proposer une s&eacute;rie de&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>. C&rsquo;est Alain Trutat qui m&rsquo;avait envoy&eacute;e chez lui, car j&rsquo;avais d&eacute;j&agrave; produit plusieurs ACR <a href="#_ftn1" name="_ftnref1">[1]</a>. J&rsquo;&eacute;tais une vraie &eacute;couteuse des&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>. Tous les soirs j&rsquo;&eacute;coutais, j&rsquo;&eacute;tais passionn&eacute;e par tout ce monde qui &eacute;tait l&agrave;. Et donc je lui ai dit simplement que j&rsquo;avais tr&egrave;s envie de faire une s&eacute;rie sur &laquo; la premi&egrave;re fois &raquo;, sur toutes les premi&egrave;res fois qu&rsquo;on pouvait conna&icirc;tre. Dans ce bureau, j&rsquo;ai prononc&eacute; juste deux ou trois mots, comme deux ans auparavant devant Ren&eacute; Farabet quand je lui avais propos&eacute; de faire un ACR sur la m&eacute;moire et le cercle <a href="#_ftn2" name="_ftnref2">[2]</a>. Comme Alain savait que je venais de l&rsquo;Atelier (il avait &eacute;cout&eacute; cette &eacute;mission sur la m&eacute;moire et le cercle, m&rsquo;a-t-il gliss&eacute;), il m&rsquo;a dit tr&egrave;s vite : &laquo; Je vous pr&eacute;viens, ici, c&rsquo;est au ras des p&acirc;querettes. &raquo; Il y avait une jolie malice dans ses yeux et d&eacute;j&agrave; une connivence, quelque chose qui faisait qu&rsquo;il y avait de l&rsquo;air, de l&rsquo;humour, de la l&eacute;g&egrave;ret&eacute;, et en m&ecirc;me temps de l&rsquo;engagement parce qu&rsquo;on connaissait l&rsquo;un et l&rsquo;autre la grande exigence de la radio. Je savais qu&rsquo;il &eacute;tait po&egrave;te, lui savait sans doute que j&rsquo;&eacute;tais &eacute;crivain, mais en m&ecirc;me temps on ne se connaissait pas et on s&rsquo;est tout de suite fait confiance <a href="#_ftn3" name="_ftnref3">[3]</a>.</p> <p>Par rapport &agrave; l&rsquo;<em>Atelier de cr&eacute;ation</em>, que j&rsquo;aimais beaucoup, qui a &eacute;t&eacute; un peu ma formation, les&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>&nbsp;repr&eacute;sentaient un espace de libert&eacute;, de vraie libert&eacute;. C&rsquo;&eacute;tait un lieu directement ancr&eacute; dans le mouvement du monde, moins fig&eacute; que l&rsquo;Atelier. J&rsquo;en avais un peu assez de faire des Ateliers : c&rsquo;&eacute;tait tr&egrave;s int&eacute;ressant, mais sans le mouvement, la libert&eacute; que je cherchais dans la radio, libert&eacute; de la phrase, de la voix, de la composition, du montage ; libert&eacute;, au fond, d&rsquo;une forme &agrave; inventer autant que dans le roman. Je venais de faire para&icirc;tre mon premier roman <a href="#_ftn4" name="_ftnref4">[4]</a>, et je voulais faire de la radio une sorte de roman. Alain proposait comme ligne conductrice des&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>&nbsp;la radio comme un r&eacute;cit : de mon c&ocirc;t&eacute;, je le voyais peut-&ecirc;tre moins comme un r&eacute;cit, plus comme un roman avec la voix des autres, et le bruit du monde. Les gens qu&rsquo;on rencontre, &ccedil;a devient souvent comme des personnages d&rsquo;un roman : on ne les rencontre pas juste pour nous, on sait qu&rsquo;apr&egrave;s ils vont &ecirc;tre &eacute;cout&eacute;s par d&rsquo;autres. Il y a donc &agrave; la fois une proximit&eacute; et une distance, aussi. C&rsquo;est un peu un jeu.</p> <p>J&rsquo;aime beaucoup les chemins parall&egrave;les de la radio et du roman, j&rsquo;ai besoin de cet esprit d&rsquo;&eacute;quipe, les techniciens, les r&eacute;alisateurs, les assistants, tout ce qui fait la beaut&eacute; de la radio. J&rsquo;ai besoin bien s&ucirc;r de ceux que je vais rencontrer et qui vont me confier leur parole, c&rsquo;est merveilleux d&rsquo;aller dans des pays lointains ou des villes encore inconnues et de rencontrer de nouveaux visages, de nouvelles voix pour ensuite les faire partager au public, c&rsquo;est une exp&eacute;rience unique. &Ecirc;tre toujours en mouvement, &eacute;couter, bouger, &ecirc;tre &agrave; la recherche. J&rsquo;aime le mouvement en fait, pas seulement le mouvement de la pens&eacute;e, mais le mouvement physique. Et en m&ecirc;me temps, pour &eacute;crire, j&rsquo;ai besoin de solitude, de fouiller dans une m&eacute;moire ancienne, des r&eacute;gions plus &eacute;troites, plus secr&egrave;tes. Mais la voie que je recherche est la m&ecirc;me, ainsi je ne me sens jamais s&eacute;par&eacute;e.</p> <p>La radio nourrit l&rsquo;&eacute;criture car lorsque j&rsquo;&eacute;cris, beaucoup de choses de l&rsquo;exp&eacute;rience de la radio me reviennent, du montage notamment, du rythme des voix, de la musique. J&rsquo;ai beaucoup appris sur la fa&ccedil;on de rythmer une phrase par l&rsquo;habitude d&rsquo;&eacute;couter tr&egrave;s attentivement la voix et la pens&eacute;e des autres. Et de l&rsquo;autre c&ocirc;t&eacute;, j&rsquo;aime composer une &eacute;mission, m&ecirc;me avec peu de moyens &agrave; la fa&ccedil;on d&rsquo;un roman, c&rsquo;est-&agrave;-dire que je prends la libert&eacute; de mettre ensemble des gens ou des th&egrave;mes qui n&rsquo;ont pas forc&eacute;ment de rapports entre eux puisque je sais que comme dans l&rsquo;&eacute;criture je leur trouverai un lien. Dans un livre, tout peut surgir au d&eacute;tour d&rsquo;une phrase, on peut parler d&rsquo;autre chose, lever la t&ecirc;te, d&eacute;crire le ciel ou une branche d&rsquo;arbre et puis on revient, on reprend la route, le r&eacute;cit. Le roman, c&rsquo;est une pens&eacute;e des liens. Quand j&rsquo;&eacute;cris, je suis moins pr&eacute;occup&eacute;e par le sujet que par ces liens &agrave; faire. C&rsquo;est cela la fiction pour moi, la forme d&rsquo;un livre, sa libert&eacute;, son audace, son mouvement, c&rsquo;est ce que j&rsquo;aime par-dessus tout, dans les livres que je lis &eacute;galement.</p> <p>Mais la fiction appara&icirc;t d&egrave;s qu&rsquo;on &eacute;crit ou qu&rsquo;on enregistre quelque chose&nbsp;: &ccedil;a de d&eacute;tache de soi ou du r&eacute;el et &ccedil;a devient une autre mati&egrave;re. M&ecirc;me &agrave; partir d&rsquo;enqu&ecirc;tes tr&egrave;s concr&egrave;tes, m&ecirc;me quand j&rsquo;&eacute;voque des exp&eacute;riences intimes de ma vie, pour moi d&egrave;s que je les installe dans une forme, elles deviennent de la fiction. Je pense que c&rsquo;est aussi parce que c&rsquo;est destin&eacute; &agrave; &ecirc;tre lu ou &eacute;cout&eacute; par un public qu&rsquo;on ne voit pas, auditeurs, lecteurs. C&rsquo;est &laquo;&nbsp;adress&eacute;&nbsp;&raquo;, comme aurait dit Barthes. Ce n&rsquo;est plus une chose qu&rsquo;on a v&eacute;cue soi-m&ecirc;me, c&rsquo;est une chose qu&rsquo;on va rapporter, retravailler, mais qui est adress&eacute;e. Et qui, sans adresse, n&rsquo;existerait pas.</p> <p>Christophe Deleu ‒ Vous parlez de l&rsquo;&eacute;coute et de l&rsquo;adresse&nbsp;: une chose me frappe dans&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>, c&rsquo;est que, d&egrave;s qu&rsquo;on commen&ccedil;ait &agrave; &eacute;couter, on savait qu&rsquo;on &eacute;tait pris en charge en tant qu&rsquo;auditeur. D&egrave;s le g&eacute;n&eacute;rique, d&egrave;s l&rsquo;accueil, on savait qu&rsquo;on allait &ecirc;tre bien trait&eacute;.</p> <p>Colette Fellous ‒ Oui, tout de suite, il fallait plonger l&rsquo;auditeur dans un monde &agrave; la fois&hellip; myst&eacute;rieux, secret, intime je veux dire, mais o&ugrave; tout le monde pouvait entrer et s&rsquo;y reconna&icirc;tre, c&rsquo;est &ccedil;a qui &eacute;tait beau. On invitait l&rsquo;auditeur, en fait. La radio, c&rsquo;est vraiment un pacte, un pacte grandiose entre celui qui parle, qui ne voit pas l&rsquo;auditeur, et l&rsquo;auditeur, qui &eacute;coute et ne voit pas celui qui parle. Je crois d&rsquo;ailleurs que tous les producteurs de&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>&nbsp;avaient ce pacte, qui &eacute;tait aussi&hellip; un peu consolid&eacute; par les charg&eacute;s de r&eacute;alisation, qui d&eacute;fendaient l&rsquo;esprit d&rsquo;une &eacute;mission et pouvaient dire par exemple &agrave; un nouveau producteur&nbsp;: &laquo;&nbsp;Ah non, l&agrave; ce n&rsquo;est pas&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>.&nbsp;&raquo; Pour diff&eacute;rencier aussi l&rsquo;&eacute;mission des autres &eacute;missions de la cha&icirc;ne, d&egrave;s le g&eacute;n&eacute;rique, d&egrave;s le &laquo;&nbsp;chapeau&nbsp;&raquo;. Le ton &eacute;tait facilement reconnaissable.</p> <p>C&rsquo;est tr&egrave;s bizarre ce qui se passe quand on &laquo;&nbsp;passe&nbsp;&raquo; &agrave; la radio. Il suffit que le micro soit ouvert, que la bande magn&eacute;tique se mette &agrave; d&eacute;filer, pour que le temps tout d&rsquo;un coup se d&eacute;coupe d&rsquo;une autre fa&ccedil;on. C&rsquo;est tr&egrave;s difficile &agrave; expliquer, c&rsquo;est une sensation impalpable. Mais parfois, de l&rsquo;autre c&ocirc;t&eacute;, lorsque c&rsquo;est r&eacute;ussi, l&rsquo;auditeur arrive &agrave; entendre ce fr&eacute;missement de la voix, de ce qu&rsquo;elle ne dit pas compl&egrave;tement mais qu&rsquo;elle fait ressentir. On devine le d&eacute;but d&rsquo;un sourire, l&rsquo;&eacute;clat des yeux, la forme des l&egrave;vres, le temps entre deux phrases devient si allusif, si beau, si plein. Le temps de l&rsquo;enregistrement est cet endroit du monde o&ugrave; tout &agrave; coup on se retrouve au bord du vide et que les mots, la voix, le silence, toutes les choses qui sont suspendues dans l&rsquo;air prennent la peine de se mettre ensemble pour cr&eacute;er un nouveau temps qui n&rsquo;appartiendra d&eacute;sormais qu&rsquo;&agrave; la radio. Un temps de gr&acirc;ce. C&rsquo;est l&agrave; qu&rsquo;il vivra, c&rsquo;est l&agrave; qu&rsquo;il sera reconstruit et qu&rsquo;on l&rsquo;offrira au public. C&rsquo;est un temps qui s&eacute;pare et qui relie en m&ecirc;me temps, qui peut faire m&ecirc;me oublier parfois ce que vous &ecirc;tes en train de dire. Mais c&rsquo;est un temps qui ne triche jamais, et qui vous fait entrer de plain-pied avec ce que vous &ecirc;tes. Votre voix t&eacute;moigne de tout, de vous et des autres, &agrave; ce moment-l&agrave;. Rien n&rsquo;&eacute;chappe au micro, il prend tout, en vrac, le bien et le mal, les failles et les d&eacute;fauts autant que les plis de la v&eacute;rit&eacute;, la malice d&rsquo;un sourire, les accrocs du vent ou l&rsquo;amertume d&rsquo;une existence&hellip;</p> <p>Si j&rsquo;ai fait de la radio, c&rsquo;est vraiment pour &ccedil;a&nbsp;: pour cr&eacute;er et entrer dans ce temps-l&agrave;. Cr&eacute;er avec peu de choses. Avec les sons, les ambiances des villes (m&ecirc;me tr&egrave;s proches&hellip; la rue d&rsquo;en-bas aussi bien&hellip;). Surtout avec la voix des autres. Avec les mots qui vont &ecirc;tre rassembl&eacute;s et dont on va prendre soin aussi. Je me souviens que je pr&eacute;parais assez vite mes textes d&rsquo;introduction ou mes textes de liaison. Je prenais quelques notes pendant la pr&eacute;paration, mais j&rsquo;avais besoin ensuite de la pression de l&rsquo;antenne pour &eacute;crire vraiment. Je les &eacute;crivais presque un quart d&rsquo;heure avant le d&eacute;but de l&rsquo;&eacute;mission, afin de mieux transmettre une &eacute;motion, ou plut&ocirc;t pour retrouver mon &eacute;motion premi&egrave;re, celle que j&rsquo;avais eue au moment de l&rsquo;enregistrement et faire que l&rsquo;auditeur soit exactement au m&ecirc;me niveau que cette &eacute;motion, que nous &eacute;coutions et d&eacute;couvrions ensemble. Je ne voulais pas que ce soit tr&egrave;s &eacute;crit, comme dans mes romans o&ugrave; je revenais sur les phrases pendant des mois. Pour la radio, non, j&rsquo;avais envie que ce soit comme une &eacute;motion &laquo;&nbsp;jet&eacute;e&nbsp;&raquo; &agrave; la mer, offerte comme un bouquet. Donc, c&rsquo;&eacute;tait &agrave; la fois pr&eacute;cis et travaill&eacute;, mais autrement que dans un roman, il fallait que ce soit &agrave; consommer tout de suite. La radio a la beaut&eacute; de l&rsquo;&eacute;ph&eacute;m&egrave;re, de l&rsquo;imparfait, de l&rsquo;inachev&eacute;. Ce qui fait que je n&rsquo;ai jamais r&eacute;&eacute;cout&eacute; ces textes, et que je ne les ai pas utilis&eacute;s non plus dans mes romans. J&rsquo;en ai &eacute;norm&eacute;ment, comme Laure Adler. C&rsquo;&eacute;tait toujours des textes pens&eacute;s, r&eacute;fl&eacute;chis, mais &eacute;crits vraiment pour la radio, pour &ecirc;tre dits, la voix devenant elle-m&ecirc;me un langage &agrave; part enti&egrave;re. Et c&rsquo;est ce que j&rsquo;aime aussi&nbsp;: il y a une g&eacute;n&eacute;rosit&eacute; de la radio, qu&rsquo;on ne retrouve pas tellement ailleurs. Une g&eacute;n&eacute;rosit&eacute; qui &eacute;tait celle aussi des responsables de programmes comme Alain, ou comme Ren&eacute; Farabet &agrave; l&rsquo;ACR, qui laissaient leur chance aux &laquo;&nbsp;premi&egrave;res fois&nbsp;&raquo; justement, aux jeunes auteurs qui arrivaient avec leur d&eacute;sir de radio.</p> <p>Je pense ici &agrave; Roland Barthes, avec qui les choses se sont pass&eacute;es exactement de la m&ecirc;me fa&ccedil;on. J&rsquo;&eacute;tais all&eacute;e le voir pour m&rsquo;inscrire &agrave; son s&eacute;minaire <a href="#_ftn5" name="_ftnref5">[5]</a>. Je ne le connaissais pas mais j&rsquo;avais lu beaucoup de choses de lui. Je voulais absolument suivre son s&eacute;minaire, mais je ne savais pas comment lui montrer que c&rsquo;&eacute;tait tr&egrave;s important pour moi. Il m&rsquo;a d&rsquo;abord dit qu&rsquo;il regrettait, que son s&eacute;minaire &eacute;tait complet, qu&rsquo;il voulait organiser des s&eacute;minaires restreints et que du coup, il y avait tr&egrave;s peu d&rsquo;&eacute;tudiants. J&rsquo;&eacute;tais d&eacute;sempar&eacute;e et je lui ai juste dit que c&rsquo;&eacute;tait important, que je ne le d&eacute;rangerais pas, que j&rsquo;avais juste besoin d&rsquo;une &laquo; pr&eacute;sence lointaine &raquo;. Ces mots ont suffi pour qu&rsquo;il m&rsquo;accepte, c&rsquo;&eacute;tait une sorte de pacte entre nous, nous &eacute;tions &laquo;&nbsp;sur la m&ecirc;me longueur d&rsquo;ondes&nbsp;&raquo;, il m&rsquo;a fait confiance et a dit &laquo; Alors, d&rsquo;accord. &raquo; Je n&rsquo;ai jamais oubli&eacute; ce moment o&ugrave; il m&rsquo;a ouvert la porte, et quand de jeunes producteurs arrivaient, je les &eacute;coutais, m&ecirc;me si ce qu&rsquo;ils proposaient n&rsquo;&eacute;tait peut-&ecirc;tre pas encore tr&egrave;s travaill&eacute;. Mais je sentais par leur pr&eacute;sence s&rsquo;il y avait un vrai d&eacute;sir ou pas. Il n&rsquo;y a pas de radio, d&rsquo;art en g&eacute;n&eacute;ral, sans d&eacute;sir. Et la radio, pour nous, ce n&rsquo;&eacute;tait pas simplement un outil de communication, c&rsquo;&eacute;tait de l&rsquo;art. De l&rsquo;art &eacute;ph&eacute;m&egrave;re, certes, consommable, qui se modifiait d&rsquo;un jour &agrave; l&rsquo;autre, qui se renouvelait et se transformait sans cesse.</p> <p>Christophe Deleu ‒ Ce qui &eacute;tait aussi &eacute;tonnant, quand on &eacute;coutait&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>, c&rsquo;est qu&rsquo;en dehors des &eacute;missions de d&eacute;but de semaine (soit le lundi, soit le mardi, en fonction des saisons), c&rsquo;&eacute;tait les producteurs de chaque &eacute;mission qui pronon&ccedil;aient le nom de l&rsquo;&eacute;mission, qui disaient eux-m&ecirc;mes le fameux &laquo;&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>, bonsoir&hellip;&nbsp;&raquo; et qui accueillaient les auditeurs. On est assez loin d&rsquo;une &eacute;mission consid&eacute;r&eacute;e comme une &laquo;&nbsp;marque&nbsp;&raquo; o&ugrave; celui qui pr&eacute;sente serait toujours le m&ecirc;me&hellip;</p> <p>Colette Fellous ‒ Oui, en d&eacute;but de semaine, Alain, ou Laure, ou moi, nous pr&eacute;sentions les &eacute;missions de la semaine, mais apr&egrave;s c&rsquo;&eacute;tait compl&egrave;tement les &eacute;missions des producteurs, c&rsquo;&eacute;tait &agrave; eux de les pr&eacute;senter, chacun avec son style, sa voix, ce n&rsquo;&eacute;tait jamais pareil&hellip; Et c&rsquo;est cet ensemble de voix et de personnalit&eacute;s qui comptait aussi. Il y avait bien s&ucirc;r des producteurs qui revenaient. D&rsquo;ailleurs lorsqu&rsquo;Alain m&rsquo;a confi&eacute; les&nbsp;<em>Nuits</em>, en 1989, j&rsquo;ai voulu qu&rsquo;il y ait une continuit&eacute; avec lui, j&rsquo;ai repris Mathieu B&eacute;n&eacute;zet <a href="#_ftn6" name="_ftnref6">[6]</a>, Franck Venaille, Jean-Pierre Milovanoff, Jean Daive&hellip; J&rsquo;ai donc endoss&eacute; ce r&ocirc;le de poursuivre les&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>&nbsp;sans les trahir, mais en &eacute;tant &eacute;videmment un peu diff&eacute;rente. J&rsquo;ai introduit par exemple le &laquo; docu-fiction &raquo;, comme on dit. J&rsquo;ai continu&eacute; bien s&ucirc;r &agrave; sortir des studios, dans&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>. Pour donner &agrave; voir le monde comme on le vit, et pas seulement des rencontres en studio. Mais il y a eu des &eacute;missions peut-&ecirc;tre un peu plus&hellip; journalistiques qu&rsquo;&agrave; l&rsquo;&eacute;poque d&rsquo;Alain, mais toujours personnelles. Avant mon&nbsp;<em>Carnet nomade</em>, que j&rsquo;ai commenc&eacute; au sein des&nbsp;<em>Nuits</em>&nbsp;en 1997, j&rsquo;ai cr&eacute;&eacute;&nbsp;<em>Les Petites ondes</em>, qui me permettaient d&rsquo;avoir une &eacute;mission que je signais moi-m&ecirc;me tous les mois <a href="#_ftn7" name="_ftnref7">[7]</a>, et en 1997, &Agrave; ciel ouvert qui &eacute;tait plus sur l&rsquo;international <a href="#_ftn8" name="_ftnref8">[8]</a>. Vers la fin de&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>, j&rsquo;ai aussi cr&eacute;&eacute; de petites s&eacute;quences qui s&rsquo;appelaient&nbsp;<em>Coup&eacute;, r&ecirc;v&eacute;, coll&eacute;</em>, qui &eacute;taient des modules courts mais o&ugrave; l&rsquo;on pouvait se permettre toutes les fantaisies <a href="#_ftn9" name="_ftnref9">[9]</a>&hellip;</p> <p>Du c&ocirc;t&eacute; des producteurs, &agrave; c&ocirc;t&eacute; de ceux que j&rsquo;ai nomm&eacute;s et qui ont continu&eacute; d&rsquo;&ecirc;tre r&eacute;guliers comme &eacute;crivains producteurs, je voudrais nommer Nancy Huston <a href="#_ftn10" name="_ftnref10">[10]</a>. J&rsquo;ai engag&eacute; des d&eacute;butants (qui sont devenus professionnels ensuite, comme Anice Cl&eacute;ment, qui venait de commencer avec Alain <a href="#_ftn11" name="_ftnref11">[11]</a>) ou des artistes qui tentaient une exp&eacute;rience radiophonique, je pense &agrave; Andr&eacute; S. Labarthe <a href="#_ftn12" name="_ftnref12">[12]</a>, Michel Boujut <a href="#_ftn13" name="_ftnref13">[13]</a>, Catherine Soullard, qui a r&eacute;alis&eacute; plusieurs s&eacute;ries <a href="#_ftn14" name="_ftnref14">[14]</a>, Lorette Nob&eacute;court <a href="#_ftn15" name="_ftnref15">[15]</a>, Fran&ccedil;ois Weyergans <a href="#_ftn16" name="_ftnref16">[16]</a>, Colette Mazabrard <a href="#_ftn17" name="_ftnref17">[17]</a>, et tant d&rsquo;autres. Je pense aussi au cin&eacute;aste Robert Kramer que j&rsquo;aimais beaucoup, qui s&rsquo;est essay&eacute; pour la premi&egrave;re fois &agrave; faire une &eacute;mission dans&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>&nbsp;<a href="#_ftn18" name="_ftnref18">[18]</a>. Il a r&eacute;alis&eacute; quelques tr&egrave;s belles &eacute;missions aux&nbsp;<em>Nuits</em>, il en avait &eacute;t&eacute; tr&egrave;s heureux <a href="#_ftn19" name="_ftnref19">[19]</a> et moi aussi : son m&eacute;tier de cin&eacute;aste apportait un ton diff&eacute;rent, sa fa&ccedil;on de commenter, de d&eacute;caler un peu les choses, c&rsquo;&eacute;tait vraiment tr&egrave;s beau. J&rsquo;aimais beaucoup l&rsquo;id&eacute;e que des artistes ou des &eacute;crivains qui n&rsquo;avaient jamais fait de radio tentent une &laquo; premi&egrave;re fois &raquo;. Au fond comme si je n&rsquo;avais jamais quitt&eacute; le th&egrave;me de ma toute premi&egrave;re &eacute;mission &agrave; Nuits magn&eacute;tiques ! Je voulais que chaque &eacute;mission soit comme une premi&egrave;re fois, avec l&rsquo;&eacute;nergie, la curiosit&eacute;, l&rsquo;invention et le d&eacute;sir, toujours &agrave; renouveler. Parce que si on reprend toujours la m&ecirc;me forme, si c&rsquo;est le moule qui revient, pour moi ce n&rsquo;est plus la radio que j&rsquo;aime, qu&rsquo;on aime. Il faut que ce soit toujours diff&eacute;rent, et c&rsquo;est possible, parce que la radio est souple et offre beaucoup de possibilit&eacute;s, avec peu de moyens.</p> <p>Mon r&ocirc;le, quand j&rsquo;ai repris les&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>, c&rsquo;&eacute;tait de choisir les projets et de coacher les producteurs &ndash; je ne parle pas ici bien s&ucirc;r des producteurs chevronn&eacute;s, mais de ceux qui venaient avec leur d&eacute;sir de radio et ne savaient pas trop comment s&rsquo;y prendre. S&rsquo;ils avaient une vraie personnalit&eacute;, une vraie personnalit&eacute; et&hellip; une belle promesse, je les &eacute;coutais, presque comme un psychanalyste ! J&rsquo;&eacute;coutais ce qu&rsquo;ils disaient et &agrave; partir de leurs mots je leur sugg&eacute;rais deux ou trois choses, mais c&rsquo;est eux, bien s&ucirc;r, qui d&eacute;cidaient par la suite. Je donnais un d&eacute;clic, et ensuite je les laissais faire, et trouver eux-m&ecirc;mes. Je n&rsquo;avais aucun mod&egrave;le, aucune envie de dire comment faire, c&rsquo;&eacute;tait d&rsquo;ailleurs la loi des&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>&nbsp;: Alain Veinstein et Laure Adler agissaient aussi de la m&ecirc;me fa&ccedil;on, une fois que le sujet avait &eacute;t&eacute; accept&eacute;, ils nous laissaient compl&egrave;tement libres. Il n&rsquo;y avait aucun contr&ocirc;le, ce qui nous guidait c&rsquo;&eacute;taient ces seuls mots : la confiance, la libert&eacute;, l&rsquo;intelligence, la beaut&eacute; aussi, et l&rsquo;engagement. On &eacute;tait tous l&agrave; parce qu&rsquo;on voulait cr&eacute;er. Et renouveler la radio&nbsp;!</p> <p>La radio a &eacute;t&eacute; vraiment modernis&eacute;e par les&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>. On entendait des voix qu&rsquo;on ne pouvait pas entendre ailleurs, c&rsquo;&eacute;tait magnifique. Il y avait des choses qu&rsquo;on ne pouvait plus faire dans les&nbsp;<em>Nuits</em>, m&ecirc;me des choses dr&ocirc;les et un peu na&iuml;ves, comme par exemple utiliser l&rsquo;expression &laquo; chers auditeurs&nbsp;&raquo; (qui revient aujourd&rsquo;hui !) : on voulait &ecirc;tre plus proches, on ne voulait pas qu&rsquo;il y ait une fronti&egrave;re entre celui qui parlait et celui qui &eacute;coutait. Donc, pendant des ann&eacute;es, on a essay&eacute; de d&eacute;poussi&eacute;rer, d&rsquo;effacer des habitudes tr&egrave;s anciennes, pour donner une autre id&eacute;e de la radio, o&ugrave; tout serait possible, une autre mati&egrave;re.</p> <p>Et cela, je trouve que &ccedil;a ressemblait &agrave; ce que faisait Roland Barthes. Barthes nous disait que tous les petits d&eacute;tails que d&rsquo;habitude on n&eacute;gligeait, ceux de la vie quotidienne par exemple, ou les doutes, les pannes, tout cela pouvait au contraire &ecirc;tre tr&egrave;s int&eacute;ressant et que si on les int&eacute;grait dans l&rsquo;&eacute;criture, si on les mettait en sc&egrave;ne, cela pouvait donner une forme diff&eacute;rente &agrave; un texte et du coup &ccedil;a renouvelait le genre. Dans les&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>, on pouvait ainsi inclure des ratages, des fous-rires, des s&eacute;quences qui normalement auraient d&ucirc; &ecirc;tre hors-champ&hellip; tout &eacute;tait possible du moment que &ccedil;a faisait sens. Je repense &agrave; l&rsquo;expression d&rsquo;Alain Veinstein &laquo; au ras des p&acirc;querettes &raquo; : pour moi, c&rsquo;&eacute;tait aussi Barthes, &ccedil;a. Quand j&rsquo;ai entendu &ccedil;a, dit avec humour dans la bouche d&rsquo;Alain, j&rsquo;ai tout de suite pens&eacute; que j&rsquo;&eacute;tais au bon endroit. Cela voulait dire qu&rsquo;on allait ennoblir les petites choses, leur redonner du sens, les rendre majestueuses, en fait. Gr&acirc;ce &agrave; la magie de la radio. Et que c&rsquo;&eacute;tait &ccedil;a, que ce serait &ccedil;a, notre t&acirc;che.</p> <h2><strong>Notes</strong><br /> &nbsp;</h2> <p><em>Notes ajout&eacute;es par les &eacute;diteurs.</em></p> <p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1">[1]</a> ACR &laquo; Des ronds dans l&rsquo;onde &raquo; du 1er juin 1980 ; &laquo; Perdus, pas perdus &raquo; du 25 janvier 1981&nbsp;; &laquo; Marrakech &raquo; du 11 octobre 1981 ; &laquo; Une langue et ses acteurs : le yiddish &raquo; du 7 f&eacute;vrier 1982. La premi&egrave;re collaboration de Colette Fellous &agrave; l&rsquo;<em>Atelier de cr&eacute;ation radiophonique</em>&nbsp;remonte &agrave; 1975, notamment pour une lecture &agrave; plusieurs voix d&rsquo;un texte de Denis Roche (&laquo; D&eacute;charge publique&nbsp;&raquo;, ACR du 2 novembre 1975). L&rsquo;<em>Atelier de cr&eacute;ation radiophonique</em>&nbsp;est un programme de France Culture cr&eacute;&eacute; par Alain Trutat et Ren&eacute; Farabet en 1969, qui a perdur&eacute; sous divers formats et dans diverses cases jusqu&rsquo;en 2018. V.&nbsp;<a href="https://komodo21.numerev.com/numeros/1265-revue-10-atelier-de-creation-radiophonique-1969-2001-la-part-des-ecrivains">le num&eacute;ro</a>&nbsp;de&nbsp;<em>Komodo 21</em>, 10 | 2019, qui lui est consacr&eacute;.<br /> <a href="#_ftnref2" name="_ftn2">[2]</a> ACR &laquo; Des ronds dans l&rsquo;onde &raquo; du 1er juin 1980. Avec Jacques d&rsquo;Ar&egrave;s, Jean Guizerix, Claude Itzykson, Edmond Jab&egrave;s, Brice Lalonde, Pierre Lamaison, Wilfride Piollet, Jacqueline Risset, Raoul Ruiz, Jean Thibaudeau, Eva de Vitray-Meyerovitch, Jean-Louis Schefer, Jean-No&euml;l Vuarnet, Bianu Z&eacute;no, et lecture d&rsquo;extraits de&nbsp;<em>M&eacute;tamorphoses du cercle</em>&nbsp;de Georges Poulet.<br /> <a href="#_ftnref3" name="_ftn3">[3]</a> Le projet propos&eacute; est devenu une &eacute;mission en cinq parties, &laquo; La premi&egrave;re fois&nbsp;&raquo;, France Culture,&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>, du 8 au 12 novembre 1982.<br /> <a href="#_ftnref4" name="_ftn4">[4]</a>&nbsp;<em>Roma</em>, Paris, Deno&euml;l, 1982. Dans l&rsquo;&eacute;mission&nbsp;<em>Mythologie de poche</em>&nbsp;que lui consacre Thomas Baumgartner en 2011, Colette Fellous fait le lien entre ce roman, histoire, dans &laquo; une forme assez ouverte &raquo;, &laquo; d&rsquo;une fille qui se promenait dans une ville et qui rencontrait des gens, et ces gens lui parlaient &raquo;, et son approche de la radio : &laquo; Je me suis dit &ldquo;J&rsquo;ai envie de faire la m&ecirc;me chose en radio. Ce que je fais dans un roman j&rsquo;aimerais le faire avec la voix des autres. Mais la voix r&eacute;elle ; et peut-&ecirc;tre qu&rsquo;apr&egrave;s, en recueillant des voix, je pourrais leur trouver une forme, et inventer un petit roman radiophonique &agrave; partir de &ccedil;a&rdquo; &raquo; (France Culture, 26 ao&ucirc;t 2011).<br /> <a href="#_ftnref5" name="_ftn5">[5]</a> Voir le r&eacute;cit de cette rencontre, quand elle avait 22 ans, et l&rsquo;&eacute;vocation de la relation avec Roland Barthes, dans&nbsp;<em>La pr&eacute;paration de la vie</em>, Paris, Gallimard, 2014.<br /> <a href="#_ftnref6" name="_ftn6">[6]</a> Il produit ou co-produit une ou deux s&eacute;ries par an de 1992 &agrave; 1998.<br /> <a href="#_ftnref7" name="_ftn7">[7]</a> Premier num&eacute;ro mardi 2 octobre 1990. Magazine mensuel diffus&eacute; le premier mardi du mois jusqu&rsquo;au num&eacute;ro 3 (4 d&eacute;cembre 1990) puis le premier vendredi du mois, jusqu&rsquo;au vendredi 3 octobre 1997.<br /> <a href="#_ftnref8" name="_ftn8">[8]</a> Rendez-vous mensuel inaugur&eacute; le 1er janvier 1997, r&eacute;alisateurs tournants.&nbsp;<em>Carnet nomade</em>&nbsp;commence lundi 3 novembre de cette ann&eacute;e.<br /> <a href="#_ftnref9" name="_ftn9">[9]</a> Premi&egrave;re &eacute;mission jeudi 16 juillet 1998 (prod. Monica Fantini, Yvon Croizier, Ga&euml;lle Meininger, Emmanuelle Forner, et Ir&egrave;ne B&eacute;r&eacute;lowitch, Michel Pomar&egrave;de, r&eacute;al. Anne Pascale Desvignes). Suite de courts reportages vivants (10-15 mn) introduits par une conversation d&eacute;tendue entre les membres de l&rsquo;&eacute;quipe de production (tournante).<br /> <a href="#_ftnref10" name="_ftn10">[10]</a> Ses premi&egrave;res s&eacute;ries documentaires pour&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>&nbsp;datent de 1989 : &laquo; Recluses et vagabondes &raquo; (14-17 mars 1989, en co-production avec Le&iuml;la Sebbar) ; &laquo;&nbsp;Vies &agrave; vifs &raquo; (12-15 septembre 1989). Nancy Huston inaugure sa collaboration avec Colette Fellous par une deuxi&egrave;me s&eacute;rie de &laquo; Vies &agrave; vif &raquo; (23-26 juin 1992). Suivent des s&eacute;ries sur les &laquo; Passions instrumentales &raquo; en 1993 (16-19 f&eacute;vrier), sur la cr&eacute;ation en 1995 (&laquo; Cr&eacute;er, procr&eacute;er : les voies de l&rsquo;immortalit&eacute; &raquo;, 7-10 f&eacute;vrier), sur &laquo; Tonino Guerra : mille po&egrave;tes &raquo; en 1996 (deux &eacute;missions, 14-15 mai). Sa derni&egrave;re s&eacute;rie, &laquo; &Eacute;tranges Fran&ccedil;ais &raquo;, est diffus&eacute;e en deux fois deux &eacute;missions, les 16-17 septembre 1997 et 26-27 octobre 1998 (suite d&rsquo;entretiens avec des &eacute;trangers r&eacute;sidant en France, sur leur perception de la France).<br /> <a href="#_ftnref11" name="_ftn11">[11]</a> Sa premi&egrave;re s&eacute;rie pour&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>, sur &laquo; Les cur&eacute;s de campagne &raquo;, date des 27-30 septembre 1988 ; sa premi&egrave;re pour Colette Fellous, &laquo; Naissance &raquo;, est diffus&eacute;e du 18 au 21 septembre 1990. Elle produit ensuite une quinzaine de s&eacute;ries documentaires, la plupart en quatre volets, jusqu&rsquo;en 1998. Sa derni&egrave;re &eacute;mission, jeudi 15 juillet 1999, est un documentaire d&rsquo;une heure sur un couple venu s&rsquo;installer deux ans plus t&ocirc;t au village de Pr&eacute; C&eacute;lestine dans l&rsquo;Aubrac, dans des conditions difficiles (racont&eacute;es par la femme, Nicole Lombard, dans&nbsp;<em>&Eacute;trangers</em>&nbsp;sur l&rsquo;Aubrac).<br /> <a href="#_ftnref12" name="_ftn12">[12]</a> On pense surtout &agrave; &laquo; Monologue dans le vestibule d&rsquo;une grande oreille &raquo;, mardi 30 mai 1995, r&eacute;al. Vincent Decque. Andr&eacute; S. Labarthe co-produit ensuite en 1996, avec Isabelle R&egrave;bre, une s&eacute;rie sur le cin&eacute;ma (&laquo; Ceci n&rsquo;est pas du cin&eacute;ma &raquo;, 6-9 f&eacute;vrier), et participe en 1997 et 1998 &agrave; quelques autres &eacute;missions sur le cin&eacute;ma, notamment &laquo; Georges Bataille &agrave; perte de vue : l&rsquo;impossible et le cin&eacute;ma &raquo; (20 octobre 1997), consacr&eacute;e &agrave; son pari impossible de faire un film sur Bataille (pour &laquo; Un si&egrave;cle d&rsquo;&eacute;crivains &raquo; sur France 3).<br /> <a href="#_ftnref13" name="_ftn13">[13]</a> Critique de cin&eacute;ma, essayiste et romancier, entr&eacute; &agrave;&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>&nbsp;&agrave; l&rsquo;&eacute;poque de Laure Adler (il assure la chronique de cin&eacute;ma dans le magazine&nbsp;<em>La nuit et le moment</em>). Juste avant le d&eacute;part d&rsquo;Alain Veinstein, il co-produit avec Robert Kramer et Sylvie P&eacute;ju une s&eacute;rie sur Fellini (&laquo; Fellini Mondo&nbsp;&raquo;, quatre &eacute;missions, du 15 au 18 mai 1990). Pour Colette Fellous, il produit quatre &eacute;missions unitaires d&rsquo;1h15 en 1991 (&laquo; Robert Kramer : atelier de l&rsquo;artiste &raquo;, &laquo; Courbet dans sa vall&eacute;e &raquo;), 1992 (&laquo; Montr&eacute;al blues &raquo;, sur le cin&eacute;ma au Qu&eacute;bec), 1995 (&laquo; Le photographe et le jeune homme contrari&eacute; &raquo;, enqu&ecirc;te sur le photographe Paul Strand, &agrave; partir d&rsquo;une photo de jeunesse retrouv&eacute;e).<br /> <a href="#_ftnref14" name="_ftn14">[14]</a> Notamment avec les s&eacute;ries documentaires &laquo; M&eacute;tiers et caract&egrave;res &raquo; (quatre &eacute;missions, 26-29 septembre 1995), &laquo; M&egrave;re et fils &raquo; (quatre &eacute;missions, 21-23 f&eacute;vrier 1996), &laquo; Portraits &raquo; (cinq &eacute;missions, 8-12 d&eacute;cembre 1997), &laquo; Ailleurs sur un pont &raquo; (cinq &eacute;missions, 2-6 mars 1998), &laquo; J&rsquo;ai envie / J&rsquo;ai pas envie &raquo; (trois &eacute;missions, 27-29 avril 1999). Sa derni&egrave;re &eacute;mission est un portrait de &laquo; Laurent Naouri, baryton &raquo; (22 juin 1999). Elle continue dans&nbsp;<em>Surpris par la nuit</em>&nbsp;de 1999 &agrave; 2004.<br /> <a href="#_ftnref15" name="_ftn15">[15]</a> Pour &laquo; Mais si ce soir, je d&icirc;ne avec Fedor &raquo;, diffus&eacute; vendredi 30 avril 1999, r&eacute;al. Anne-Pascale Desvignes.<br /> <a href="#_ftnref16" name="_ftn16">[16]</a> Colette Fellous pense certainement &agrave; &laquo; La com&eacute;dienne et l&rsquo;&eacute;crivain &raquo;, seule &laquo;&nbsp;exp&eacute;rience&nbsp;&raquo; &agrave; proprement parler de l&rsquo;auteur dans&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>, d&eacute;crit ainsi dans la notice Ina : &laquo; un kal&eacute;idoscope de sons, de voix et de musiques, et un t&eacute;moignage tr&egrave;s moderne sur les rapports affectifs et f&eacute;conds entre deux g&eacute;n&eacute;rations, entre une fille et son p&egrave;re. Un document psychologique, un hommage &agrave; l&rsquo;art radiophonique et une confidence sur le monde int&eacute;rieur d&rsquo;un &eacute;crivain. &raquo;<br /> <a href="#_ftnref17" name="_ftn17">[17]</a> Critique de cin&eacute;ma, partie comme enseignante en Inde en 1996 o&ugrave; elle va rester pendant dix ans, elle intervient dans une s&eacute;rie documentaire de de 1999 sur l&rsquo;Inde, &laquo; Chroniques indiennes de Nizamuddin Est &raquo; (cinq &eacute;missions, 5-9 juillet, prod. Patrick Cazals et Colette Fellous). Apr&egrave;s la transformation de&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>&nbsp;en&nbsp;<em>Surpris par la nuit</em>, elle est r&eacute;guli&egrave;rement pr&eacute;sente dans&nbsp;<em>Carnet nomade</em>&nbsp;entre 1999 et 2005.<br /> <a href="#_ftnref18" name="_ftn18">[18]</a> Il s&rsquo;agit sans doute de la mini-s&eacute;rie &laquo; De pr&egrave;s, de loin &raquo;, deux &eacute;missions diffus&eacute;es dans&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>&nbsp;les 7 et 8 novembre 1991. &laquo; De pr&egrave;s, de loin, o&ugrave; se trouve exactement le pays natal ? Que devient-il ? O&ugrave; sont ses bruits, o&ugrave; est sa langue ? Reportage et r&eacute;cit de Robert Kramer pendant un voyage &agrave; travers les &Eacute;tats-Unis, son mariage avec Erika, la description des paysages avec les sons d&rsquo;ambiance, la visite sur la tombe de son grand-p&egrave;re&nbsp;&raquo; (notice Ina).<br /> <a href="#_ftnref19" name="_ftn19">[19]</a> Notamment &laquo; Lettre &agrave; Chuong, &agrave; Hano&iuml; &raquo;, documentaire sonore d&rsquo;1h15 diffus&eacute; dans&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>&nbsp;du 20 novembre 1992, compos&eacute; en marge de son film&nbsp;<em>Point de d&eacute;part</em>, en salles en 1994, qui raconte son retour &agrave; Hano&iuml; (en 1969, ce cin&eacute;aste am&eacute;ricain d&rsquo;extr&ecirc;me-gauche avait co-produit&nbsp;<em>People&rsquo;s War</em>, tourn&eacute; dans le Vietnam en guerre). Colette Fellous lui rend un bel hommage dans &laquo; Pour Robert Kramer &raquo;,&nbsp;<em>Carnet nomade</em>&nbsp;du 13 avril 2001.</p> <h3>Autrice</h3> <p><b>Colette Fellous</b>&nbsp;est n&eacute;e en Tunisie et vit en France depuis l&rsquo;&acirc;ge de dix-sept ans. Apr&egrave;s des &eacute;tudes &agrave; la Sorbonne (1968-1971) puis &agrave; l&rsquo;&Eacute;cole pratique des hautes &eacute;tudes (1972-1976), o&ugrave; elle suit notamment le s&eacute;minaire de Roland Barthes, et des d&eacute;buts de com&eacute;dienne (1974-1976), elle&nbsp;devient productrice de radio, d&rsquo;abord pour l&rsquo;<i>Atelier de cr&eacute;ation radiophonique&nbsp;</i>de Ren&eacute; Farabet (1980-1982), puis pour les&nbsp;<i>Nuits magn&eacute;tiques</i>&nbsp;d&rsquo;Alain Veinstein, &agrave; partir de 1982. Son premier roman,&nbsp;<i>Roma,</i>&nbsp;est paru en 1982 chez Deno&euml;l, comme&nbsp;<i>Calypso</i>&nbsp;en 1987. Depuis&nbsp;<i>Rosa Gallica</i>&nbsp;en 1989, &nbsp;tous ses romans sont publi&eacute;s chez Gallimard.&nbsp;Enfant, elle &eacute;coutait&nbsp;<i>Les</i><i>&nbsp;Ma&icirc;tres du myst&egrave;re&nbsp;</i>et&nbsp;<i>Salut les copains !&nbsp;,&nbsp;</i>&laquo; sous de grands parasites sonores qui me ravissaient, parce qu&rsquo;ils me montraient bien que j&rsquo;&eacute;tais de l&rsquo;autre c&ocirc;t&eacute; de la M&eacute;diterran&eacute;e et que mon r&ecirc;ve habitait dans le pays de cette radio&nbsp;&raquo;.&nbsp;&Agrave;&nbsp;8 ans, elle d&eacute;couvre la technique des bruitages&nbsp;lors d&rsquo;une visite scolaire &agrave; Radio Tunis : premier &eacute;merveillement devant la magie de la radio. &Agrave; 32 ans,&nbsp;seule avec son Nagra,&nbsp;pour&nbsp;&laquo;&nbsp;La premi&egrave;re fois&nbsp;&raquo;,&nbsp;sa premi&egrave;re s&eacute;rie&nbsp;aux&nbsp;<i>Nuits magn&eacute;tiques,&nbsp;</i>elle enregistre&nbsp;Vladimir Jank&eacute;l&eacute;vitch jouant du piano chez lui et lui d&eacute;veloppant merveilleusement&nbsp;&laquo; ce qu&rsquo;&eacute;tait&nbsp;&ldquo;l&rsquo;apparition disparaissante&rdquo;, le je-ne-sais-quoi et le presque-rien &raquo;. &Agrave;&nbsp;40 ans, en 1990, Alain Veinstein et Laure Adler lui confient la coordination des&nbsp;<i>N</i><i>uits magn&eacute;tiques</i>, qu&rsquo;elle assure jusqu&rsquo;&agrave; la disparition de l&rsquo;&eacute;mission &agrave; l&rsquo;&eacute;t&eacute; 1999. C&rsquo;est l&agrave;, avec le mensuel&nbsp;<i>Les&nbsp;Petites&nbsp;</i><i>ondes</i>&nbsp;(<wbr />1990-1997) puis le bi-mensuel<i>&nbsp;Carnet nomade</i>&nbsp;(1997-2015)<i>,&nbsp;</i>con&ccedil;u avec la libert&eacute; d&rsquo;un carnet d&rsquo;&eacute;crivain et fonctionnant comme une &laquo; petite universit&eacute; de poche&nbsp;&raquo;, qu&rsquo;elle inaugure une forme d&rsquo;&eacute;criture de soi, parall&egrave;lement&nbsp;&agrave; une forme plus autobiographique de ses livres&nbsp;aussi :&nbsp;<i>Le Petit Casin0</i>&nbsp;en 1999 puis le cycle de six livres ouvert par&nbsp;<i>Avenue de France</i>&nbsp;en 2001, puis&nbsp;<i>Aujourd&rsquo;hui</i>&nbsp;en 2005,&nbsp;<i>Plein &eacute;t&eacute;</i>&nbsp;en 2007,&nbsp;<i>Un amour de fr&egrave;re&nbsp;</i>en 2011,&nbsp;<i>La pr&eacute;paration de la vie</i>&nbsp;en 2014 et&nbsp;<i>Pi&egrave;ces d&eacute;tach&eacute;es</i>&nbsp;en 2017. Son dernier livre&nbsp;<i>Kyoto song</i>, qui amorce un cycle consacr&eacute; au voyage, est paru en 2020.&nbsp;<i>Carnet nomade</i>&nbsp;a continu&eacute; jusqu&rsquo;&agrave; son d&eacute;part de France Culture, en 2015, ann&eacute;e marquant pour elle la fin d&rsquo;un &laquo;&nbsp;m&eacute;tier&nbsp;&raquo; qu&rsquo;elle aura v&eacute;cu &laquo;&nbsp;tr&egrave;s profond&eacute;ment, dans [s]a peau, dans [s]on corps&nbsp;&raquo;, comme elle le confiait quelques ann&eacute;es plus t&ocirc;t&nbsp;<a href="http://auditeurs-de-france-culture.asso.fr/?Dejeuner-Rencontre-du-14-novembre">dans un texte</a>&nbsp;racontant son enfance, sa naissance &agrave; l&rsquo;&eacute;criture, ses ann&eacute;es de radio et tout sp&eacute;cialement son&nbsp;<i>Carnet nomade</i>. Colette Fellous a cr&eacute;&eacute; et dirige au Mercure de France la collection &laquo;Traits et portraits &raquo; (28 titres depuis 2006).</p> <h3 align="JUSTIFY"><b>Copyright</b></h3> <p align="JUSTIFY">Tous droits r&eacute;serv&eacute;s.</p>