<h3>Abstract</h3> <p>We tend to think that visual objects are the sole preserve of painting, cinema or photographic art, and that they are alien to radio. Yet an image&rsquo;s &ldquo;sonority&rdquo; may also be revealed and expressed in speech, sound and silence simply by switching the medium. Simone Douek, a writer and director of documentaries for France Culture, draws on her own experience of listening to the radio and her work to illustrate the importance of the concept of&nbsp;<em>mise en sc&egrave;ne</em>&nbsp;in conveying this soundlessness. Art and landscape are Douek&rsquo;s two main themes, together with how we can listen to images and transform them into sound objects.</p> <p><strong>Keywords</strong><br /> &nbsp;</p> <p>visual arts, sound documentary, visual/sound, landscape, aesthetics</p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <p>Certaines situations radiophoniques semblent des apories. Comment faire entendre un tableau accroch&eacute; &agrave; un mur, un sourire &eacute;nigmatique, des montagnes qui se dessinent sur l&rsquo;horizon, un panneau annon&ccedil;ant l&rsquo;entr&eacute;e d&rsquo;une ville, une friche au milieu d&rsquo;une rivi&egrave;re, un film muet qui d&eacute;file sur un &eacute;cran&nbsp;? On se trouve devant cette contradiction de vouloir faire entrer dans un creuset sonore et invisible une image r&eacute;elle qui se d&eacute;ploie devant nos yeux.</p> <p>Pourtant j&rsquo;insiste, je pousse la contradiction&nbsp;: &ecirc;tre &agrave; l&rsquo;&eacute;coute du muet, d&eacute;plier&nbsp;; imaginer sa sonorit&eacute;&hellip; mettre en mouvement une image fixe&hellip; tendre &agrave; la cr&eacute;ation d&rsquo;un objet esth&eacute;tique.</p> <p>Bien que je sois attach&eacute;e &agrave; la richesse de l&rsquo;univers sonore, j&rsquo;ai mis en &oelig;uvre de nombreux documentaires en partant d&rsquo;une premi&egrave;re impression visuelle, guid&eacute;e par l&rsquo;attirance qu&rsquo;exercent sur moi une &oelig;uvre d&rsquo;art plastique ou la contemplation d&rsquo;un paysage. Dans le premier moment du regard il y a parfois, l&rsquo;espace d&rsquo;un instant, une surdit&eacute; passag&egrave;re, tant notre attention se fixe et s&rsquo;attache &agrave; l&rsquo;objet regard&eacute;.</p> <p>Pourtant, paradoxe, une perception visuelle peut &ecirc;tre source d&rsquo;une &oelig;uvre sonore&nbsp;; une situation visuelle &eacute;chappe &agrave; sa nature, s&rsquo;ouvre &agrave; la radio, trouve une voix. Elle se transpose, et nous rappelle que le son est omnipr&eacute;sent dans notre perception du monde.</p> <p>Me revient toujours cette exclamation des surr&eacute;alistes &mdash; cit&eacute;e par Pierre Descargues quand j&rsquo;ai enregistr&eacute; avec lui une s&eacute;rie d&rsquo;entretiens pour&nbsp;<em>&Agrave; voix nue</em>&nbsp;: les surr&eacute;alistes consid&eacute;raient l&rsquo;&oelig;uvre de Paolo Uccello comme un des sommets de la peinture, ils la portaient aux nues, et quand ils arrivaient au premier &eacute;tage du Louvre, avant m&ecirc;me d&rsquo;avoir p&eacute;n&eacute;tr&eacute; dans la galerie italienne, ils disaient entendre le fracas des armes, les cris des hommes, le hennissement des chevaux et le claquement de leurs sabots sur le sol. Ils parlaient de&nbsp;<em>La bataille de San Romano</em>&nbsp;dont le vacarme envahissait la grande galerie et effa&ccedil;ait toute autre perception sonore.</p> <p>Un &eacute;clat surr&eacute;aliste&nbsp;: faire surgir le son d&rsquo;une image fixe &mdash; d&rsquo;une image qui ne reste donc que temporairement une image muette.</p> <p>De tout sujet, de toute perception, jaillit le son&nbsp;; de toute surface ou ronde bosse qui ne parle pas, &eacute;merge la parole.</p> <p>Une surface destin&eacute;e au regard et d&rsquo;abord offerte au regard se met &agrave; vivre en se laissant apprivoiser par des mots et des sons &mdash; pourrait-on dire se laisse couler et transformer en mots et en sons. C&rsquo;est une sorte de renversement, de jeu, d&rsquo;exercice de style, de d&eacute;fi &agrave; l&rsquo;insonore pour faire percevoir une couleur, une texture, une architecture, mais en empruntant d&rsquo;autres chemins qui nous font sortir de la couleur ou du dessin pour aborder l&rsquo;art autrement.</p> <p>Rien n&rsquo;est magique cependant, et puisqu&rsquo;il s&rsquo;agit de cr&eacute;er un moment radiophonique, on ne reste pas longtemps dans la simple contemplation a-sonore d&rsquo;une &oelig;uvre muette, coll&eacute;s dans la fascination d&rsquo;un objet. C&rsquo;est le pouvoir de la parole qui, telles les lettres inscrites sur le front du Golem, donne vie, anime une surface plane et muette, en faisant de surcro&icirc;t na&icirc;tre une autre dimension qui d&eacute;passe la simple description d&rsquo;un tableau.</p> <h2>Devant l&rsquo;&oelig;uvre<br /> &nbsp;</h2> <p>Uccello, &agrave; nouveau, et la&nbsp;<em>Bataille de San Romano</em>. Au Louvre, avec le murmure ou la rumeur des visiteurs qui passent dans cette grande galerie italienne, quelqu&rsquo;un se tient devant la toile, debout, c&rsquo;est un historien de l&rsquo;art, Pierre Sterckx. Nous l&rsquo;avons amen&eacute; l&agrave; et nous sommes avec lui, micro et perche tendus vers sa parole, et vers ce qui &eacute;merge de ces cavaliers, de ces chevaux, de ce tumulte &eacute;voqu&eacute; &agrave; l&rsquo;instant.</p> <p>Ce jour-l&agrave; c&rsquo;est d&rsquo;une parole que ressort le tableau, qui est pour ainsi dire jet&eacute; &agrave; notre &eacute;coute. Truculence, souffle et mouvement de la composition guident de mani&egrave;re mim&eacute;tique l&rsquo;&eacute;nergie et les mots du regardeur, et sa parole &agrave; son tour devient lances, &eacute;clat des armes, perspectives vertigineuses, pastilles dor&eacute;es qui ornent les parures des chevaux ou&nbsp;<em>mazzocchi</em>&nbsp;qui coiffent les combattants.</p> <p>Mais ce n&rsquo;est pas une description minutieuse qu&rsquo;il nous offre, car celle-ci finirait par nous perdre dans ses m&eacute;andres&nbsp;; ce n&rsquo;est pas un trac&eacute; au pantographe, qui nous ferait oublier l&rsquo;objet de son discours et sans doute le rendre ennuyeux et r&eacute;ducteur. Diderot, qui &eacute;tait loin de se poser des questions radiophoniques, a, dans ses critiques de salon, cette formidable intuition qui s&rsquo;applique &agrave; nos arts sonores&nbsp;: trop de description nous &eacute;loigne de l&rsquo;objet, peut nous le rendre illisible, voire invisible. En parlant d&rsquo;une&nbsp;<em>Ruine</em>&nbsp;de Hubert Robert, Diderot se laisse d&rsquo;abord &mdash; volontairement et ironiquement &mdash; glisser dans la description m&eacute;ticuleuse de l&rsquo;&oelig;uvre. Puis il arr&ecirc;te l&rsquo;exercice&nbsp;:</p> <blockquote> <p>Plus on d&eacute;taille, plus l&rsquo;image qu&rsquo;on pr&eacute;sente &agrave; l&rsquo;esprit des autres diff&egrave;re de celle qui est sur la toile. D&rsquo;abord l&rsquo;&eacute;tendue que notre imagination donne aux objets est toujours proportionn&eacute;e &agrave; l&rsquo;&eacute;num&eacute;ration des parties. Il y a un moyen s&ucirc;r de faire prendre &agrave; celui qui nous &eacute;coute un puceron pour un &eacute;l&eacute;phant ; il ne s&rsquo;agit que de pousser &agrave; l&rsquo;exc&egrave;s l&rsquo;anatomie circonstanci&eacute;e de l&rsquo;atome vivant&nbsp;<a href="#_ftn1" name="_ftnref1">[1]</a>.</p> </blockquote> <p>Ainsi &agrave; la radio&nbsp;: il faut alors plut&ocirc;t parler de stylisation.</p> <p>Ce jour-l&agrave;, c&rsquo;est &agrave; l&rsquo;enregistrement, et avec une grande simplicit&eacute; de moyens, que va s&rsquo;op&eacute;rer le basculement d&rsquo;un art &agrave; un autre. Regarder, et dire. Les paroles dites devant la toile la restituent, et surtout transforment le support de perception&nbsp;; une &oelig;uvre peinte pour le regard se m&eacute;tamorphose en &oelig;uvre parl&eacute;e pour une &eacute;coute sans la toile. La force du personnage, qui vit et bouge et parle au diapason de la toile, la fait tourner pour nos oreilles comme un carrousel de personnages en bois rendus vivants par l&rsquo;enthousiasme de celui qui regarde et transmet, anime la perspective et les couleurs en passant de l&rsquo;art de Uccello &agrave; l&rsquo;art moderne, et voici que surgissent tout &agrave; coup Mondrian et Muybridge. En quelques s&eacute;quences, il nous m&egrave;ne au d&eacute;chiffrage d&rsquo;un r&eacute;bus, son explication devient un polar, avec un jeu de questions-r&eacute;ponses qui nous porte et nous accroche &agrave; sa d&eacute;monstration &mdash; parce que simplement nous&nbsp;<em>entendons</em>&nbsp;le tableau.</p> <p>J&rsquo;ai aim&eacute; placer beaucoup d&rsquo;interlocuteurs dans cette situation d&rsquo;enregistrement, tant il est vrai que la confrontation avec l&rsquo;objet r&eacute;el, si on ne le voit pas &agrave; la radio, porte la parole et la force &agrave; dire l&rsquo;extr&ecirc;me. Elle nous offre une &eacute;coute sensible, tourn&eacute;e vers l&rsquo;int&eacute;rieur de l&rsquo;objet. Parmi d&rsquo;autres, Philippe Dagen auscultant Bacon au centre Pompidou, Humpfrey Wine dans la salle consacr&eacute;e &agrave; Claude Lorrain &agrave; la National Gallery, S&eacute;bastien Allard analysant les toiles d&rsquo;Ingres au Louvre. Mais il y a aussi d&rsquo;autres sortes de documents&nbsp;: &Eacute;lisabeth Badinter, d&eacute;chiffrant les lettres manuscrites de Julie de Lespinasse ou d&rsquo;&Eacute;milie du Ch&acirc;telet &agrave; la BNF, a offert &agrave; l&rsquo;&eacute;coute la richesse et l&rsquo;&eacute;paisseur d&rsquo;une mati&egrave;re retrouv&eacute;e. Les archives muettes d&eacute;chiffrent des &oelig;uvres muettes, et leur rendent la parole. En feuilletant, au British Museum, le&nbsp;<em>Liber veritatis</em>&nbsp;de Claude Lorrain, qui &eacute;tait &agrave; la fois un travail pr&eacute;paratoire &agrave; ses toiles et une preuve de propri&eacute;t&eacute; intellectuelle de ses &oelig;uvres, j&rsquo;ai vu la main du peintre tracer le dessin, j&rsquo;ai senti son souffle, j&rsquo;en ai jalonn&eacute; l&rsquo;&eacute;mission par de br&egrave;ves notations parl&eacute;es.</p> <h2>Sans l&rsquo;&oelig;uvre<br /> &nbsp;</h2> <p>&Agrave; l&rsquo;inverse, j&rsquo;ai explor&eacute; un certain nombre d&rsquo;&oelig;uvres de peintres de la renaissance italienne sans autre support que des reproductions, faute de missions autoris&eacute;es en Italie. Attir&eacute;e de l&rsquo;un &agrave; l&rsquo;autre par capillarit&eacute;, par la soif peut-&ecirc;tre de recomposer une grande toile sonore de ces artistes, je les d&eacute;couvrais aussi comme une promesse future d&rsquo;aller les retrouver un jour dans leurs mus&eacute;es ou leurs chapelles. Je travaillais sur ces peintures ou ces sculptures en me trouvant &agrave; peu pr&egrave;s dans la m&ecirc;me situation que les auditeurs, qui ne pouvaient &agrave; l&rsquo;instant de la diffusion compter que sur leur perception sonore, ou sur leur m&eacute;moire de ces images.</p> <p>Mais &eacute;tait-ce vraiment une lacune&nbsp;? Je me souviens, enregistrant une<em>&nbsp;Matin&eacute;e des autres</em>&nbsp;sur le Golem, avoir confi&eacute; &agrave; Marc-Alain Ouaknin (qui intervenait dans l&rsquo;&eacute;mission) mon regret de ne pouvoir aller &agrave; Prague. Il me raconta alors l&rsquo;histoire d&rsquo;&Eacute;li&eacute;zer qui, ayant r&ecirc;v&eacute; trois fois qu&rsquo;un tr&eacute;sor l&rsquo;attendait sous une arche du pont de Prague, prit son baluchon et se rendit &agrave; la ville qui &eacute;tait &agrave; trois semaines de marche de chez lui. Il ne trouva rien sous le pont, mais le garde qui l&rsquo;observait, &agrave; qui il avait fini par promettre de partager le tr&eacute;sor, se moqua en &eacute;clatant de rire. &laquo;&nbsp;Si on devait croire tous les r&ecirc;ves&hellip;&nbsp;&raquo; Ainsi, le dernier qu&rsquo;il fit trois nuits de suite, lui soufflant qu&rsquo;il devait vite se rendre chez un certain &Eacute;liezer, car sous sa cuisini&egrave;re se cachait un tr&eacute;sor&hellip;</p> <p>Plus proche de l&rsquo;art et de sa perception, je pense &agrave; la d&eacute;marche d&rsquo;Aby Warburg qui, cherchant la v&eacute;rit&eacute; d&rsquo;une &oelig;uvre, ne retournait pas &agrave; l&rsquo;original, mais pr&eacute;f&eacute;rait se servir de sa repr&eacute;sentation dont il captait une autre dynamique&nbsp;; pour ses conf&eacute;rences, il faisait s&rsquo;entrechoquer des images en les agrafant sur de grands panneaux &mdash; dont la m&eacute;moire est gard&eacute;e dans son atlas&nbsp;<em>Mn&eacute;mosyne</em>&nbsp;&mdash;, o&ugrave; se c&ocirc;toyaient reproductions de gravures, peintures de la Renaissance italienne et photographies contemporaines &mdash; questionnant pour lui &laquo;&nbsp;la repr&eacute;sentation de la vie en mouvement, un certain nombre de valeurs expressives pr&eacute;existantes&nbsp;&raquo;, comme il &eacute;crivait. Pour prolonger d&rsquo;une certaine fa&ccedil;on la pens&eacute;e de Warburg, on peut aussi songer &agrave; Vertov qui consid&eacute;rait le r&eacute;el comme peu digne d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t, mais que seul le cin&eacute;ma avait la vertu de ranimer, en l&rsquo;interpr&eacute;tant de mani&egrave;re construite dans l&rsquo;&oelig;uvre cin&eacute;matographique par le montage et le choc des images.</p> <p>&Eacute;voquer une &oelig;uvre d&rsquo;art sans la contempler en face, ou sans en avoir la reproduction sous les yeux, attire davantage l&rsquo;attention sur le caract&egrave;re non visuel de l&rsquo;art sonore, sur le fait que la radio r&eacute;v&egrave;le autrement une &oelig;uvre d&rsquo;art, soulignant une fois de plus le pouvoir du sonore &agrave; rendre compte du non sonore.</p> <h2>Entrer chez l&rsquo;artiste<br /> &nbsp;</h2> <p>Que l&rsquo;&oelig;uvre soit reproduite ou r&eacute;elle, il faut lui donner vie, trouver, par exemple, le moyen d&rsquo;entrer chez l&rsquo;artiste&nbsp;: de m&ecirc;me que les personnages de Paul Grimault sortaient du cadre de leur tableau pour se rejoindre, de m&ecirc;me que Sherlock Junior sortait de l&rsquo;&eacute;cran du film de Keaton pour rejoindre la spectatrice dont il &eacute;tait amoureux, de m&ecirc;me pour nous il s&rsquo;agit d&rsquo;enjamber le cadre, mais &agrave; l&rsquo;inverse, pour entrer dans une &oelig;uvre, et ce n&rsquo;est pas dans une prison qu&rsquo;on s&rsquo;enferme mais au contraire dans un espace qui s&rsquo;&eacute;largit et nous entra&icirc;ne dans l&rsquo;univers de l&rsquo;artiste.</p> <p>Si on peut souvent s&rsquo;arr&ecirc;ter devant une peinture ou une sculpture en exploitant tout ce que les mus&eacute;es proches nous offrent (ce qui fut le cas pour Uccello), il faut souvent inventer des voyages fictifs, cheminements ou r&eacute;cits d&rsquo;exp&eacute;riences offerts par des textes&nbsp;: nous sommes partis rejoindre l&rsquo;&oelig;uvre de Piero della Francesca par un chemin caillouteux, en pleine campagne toscane, sous la chaleur d&rsquo;un soleil d&rsquo;&eacute;t&eacute;, et nous avons suivi les pas de celui qui &eacute;crivait ainsi son approche de la chapelle o&ugrave; &eacute;tait conserv&eacute;e la&nbsp;<em>Madonna del parto</em>&nbsp;&mdash; un texte lu par un com&eacute;dien. Parfois, la recherche d&rsquo;une mise en sc&egrave;ne nous fait d&eacute;couvrir qu&rsquo;on peut transposer un lieu en cr&eacute;ant une m&eacute;taphore architecturale et picturale&nbsp;: ce n&rsquo;est pas &agrave; Fiesole ni &agrave; Florence que nous avons retrouv&eacute; Fra Angelico, mais un couvent de Dominicains &agrave; Paris est devenu le d&eacute;cor de l&rsquo;&eacute;vocation de l&rsquo;artiste, et le hasard heureux de la situation documentaire nous a fait rencontrer de surcro&icirc;t un Fr&egrave;re dominicain, pensionnaire de ce couvent, peintre, vouant une admiration sans borne &agrave; celui qu&rsquo;il disait &ecirc;tre son ma&icirc;tre. Car la parole des artistes contemporains est tr&egrave;s riche d&rsquo;&eacute;chos des &oelig;uvres de leurs pr&eacute;d&eacute;cesseurs dans lesquelles ils se coulent. G&eacute;rard Garouste a plong&eacute; dans l&rsquo;univers de Giorgione, Jean-Paul Marcheschi a suivi les regards et les lumi&egrave;res de Piero della Francesca&nbsp;; les artistes contemporains aiment aussi traquer les gestes de ceux qui les ont pr&eacute;c&eacute;d&eacute;s de plusieurs si&egrave;cles, tant le mouvement et le geste font partie d&rsquo;un langage universel qui lie toutes les &eacute;poques. Cette surimpression d&rsquo;un geste sur tant d&rsquo;autres peut finalement trouver son expression sonore&nbsp;: c&rsquo;est par le contemporain qu&rsquo;on peut remonter le temps, d&eacute;chiffrer peut-&ecirc;tre par la parole ce genre de myst&egrave;re. Vladimir Velicovic, pensant &agrave; sa propre gestualit&eacute; devant ses toiles, entre dans le mouvement int&eacute;rieur de Bacon, et nous le fait percevoir.</p> <h2>Regard sonore<br /> &nbsp;</h2> <p>J&rsquo;ai retrouv&eacute;, dans un de mes cahiers pr&eacute;paratoires aux &eacute;missions, une phrase de Francis Ponge, &eacute;cho inattendu &agrave; mes pr&eacute;occupations&nbsp;: &laquo;&nbsp;La contemplation des beaut&eacute;s produit une sorte d&rsquo;engorgement que peut seule r&eacute;soudre la parole prise&nbsp;<a href="#_ftn2" name="_ftnref2">[2]</a>&nbsp;&raquo;.</p> <p>Dans le m&ecirc;me ouvrage, on trouve aussi une r&eacute;ponse de Ponge &agrave; une enqu&ecirc;te radiophonique sur la diction po&eacute;tique&nbsp;:</p> <blockquote> <p>Vous savez ce qui me porte, ou me pousse, m&rsquo;oblige &agrave; &eacute;crire, c&rsquo;est l&rsquo;&eacute;motion que procure le&nbsp;<em>mutisme</em>&nbsp;des choses qui nous entourent. Peut-&ecirc;tre s&rsquo;agit-il d&rsquo;une sorte de piti&eacute;, de sollicitude, enfin j&rsquo;ai le sentiment d&rsquo;instances muettes de la part des choses, qui solliciteraient de nous qu&rsquo;enfin l&rsquo;on s&rsquo;occupe d&rsquo;elles et les parle&hellip;&nbsp;</p> </blockquote> <p>&Agrave; point nomm&eacute;&hellip; Ponge est au c&oelig;ur de ce paradoxe apparent de faire parler le non sonore. Ce que dit cette phrase de Ponge est primordial, comme si elle notait que l&rsquo;essentiel est dans les mots, donc pour nous dans la parole, le son, que les choses se r&eacute;solvent en son, &eacute;clatent en son. Pour pousser plus loin, on pourrait dire que la parole rel&egrave;gue au second plan la fascination de l&rsquo;image.</p> <p>Cette phrase &eacute;tait &eacute;crite parmi d&rsquo;autres notes qui devaient construire la r&eacute;flexion, pour un documentaire que je pr&eacute;parais, et qui s&rsquo;appelait &laquo;&nbsp;Le non-spectacle et le pas-beau&nbsp;&raquo;.</p> <p>Je me permets un petit glissement en passant&nbsp;: pour moi, ce n&rsquo;est pas de beaut&eacute; qu&rsquo;il faut parler &agrave; propos du documentaire, mais plut&ocirc;t d&rsquo;objet esth&eacute;tique fabriqu&eacute;, construit, afin qu&rsquo;il &eacute;merge &agrave; partir d&rsquo;une &eacute;criture particuli&egrave;re. Je cite G&eacute;rard Farasse, qui intervenait dans l&rsquo;&eacute;mission&nbsp;:</p> <blockquote> <p>Le pas beau me convient tout &agrave; fait parce que si on s&rsquo;int&eacute;resse au beau on s&rsquo;int&eacute;resse souvent &agrave; l&rsquo;acad&eacute;misme du beau, c&rsquo;est-&agrave;-dire &agrave; ce qu&rsquo;il est convenu d&rsquo;appeler la beaut&eacute; et on est &agrave; peu pr&egrave;s s&ucirc;r de se tromper ; et qu&rsquo;il faut aller au contraire dans l&rsquo;autre sens, c&rsquo;est-&agrave;-dire s&rsquo;int&eacute;resser &agrave; ce qui n&rsquo;appara&icirc;t pas imm&eacute;diatement comme beau pour pouvoir d&eacute;couvrir une beaut&eacute; qu&rsquo;on n&rsquo;a pas encore vue. Donc le pas beau &ccedil;a me semble une notion porteuse, esth&eacute;tiquement&nbsp;<a href="#_ftn3" name="_ftnref3">[3]</a>.</p> </blockquote> <p>Pour cette &eacute;mission de&nbsp;<em>Surpris par la nuit</em>, &laquo;&nbsp;Le non-spectacle et le pas-beau&nbsp;&raquo;, il &eacute;tait encore question d&rsquo;images muettes. Celles-ci &eacute;taient contemporaines&nbsp;: c&rsquo;&eacute;taient des photographies de Philippe Bazin, qui avait cueilli &agrave; Lille seize repr&eacute;sentations de la ville, r&eacute;unies dans une exposition. J&rsquo;&eacute;tais attir&eacute;e par sa d&eacute;marche, j&rsquo;ai &eacute;t&eacute; attir&eacute;e par cette galerie de photos, par d&eacute;finition non sonores. Et de surcro&icirc;t elles &eacute;taient comme la majorit&eacute; des images qui nous entourent ou des moments que nous vivons, c&rsquo;est-&agrave;-dire sans spectacle, sans &eacute;v&eacute;nement, n&rsquo;appartenant pas forc&eacute;ment &agrave; ce que nous appellerions la beaut&eacute;. Mais il en sort assur&eacute;ment une certaine esth&eacute;tique, ou pour le dire autrement, un certain regard sur les choses. Et au lieu de faire un documentaire prenant la forme d&rsquo;un portrait du photographe, j&rsquo;ai pr&eacute;f&eacute;r&eacute; entrer dans des images muettes &mdash; forc&eacute;ment le portrait finissait par transpara&icirc;tre, c&rsquo;&eacute;tait peut-&ecirc;tre une des mani&egrave;res ici de d&eacute;plier ces surfaces planes.</p> <p>Que voyait-on&nbsp;? Des paysages urbains, des immeubles, des rues bord&eacute;es d&rsquo;arbres, des places, des barres d&rsquo;immeubles. Ces paysages n&rsquo;&eacute;taient pas remarquables&nbsp;<em>a priori</em>. Seule &eacute;tait remarquable leur composition, leur architecture, leur surplomb sur la ville&nbsp;; et la d&eacute;marche de photographie documentaire donnait sens &agrave; ces images, qui concernaient des personnages bien pr&eacute;cis. Or dans ces photographies, on ne voyait aucun personnage.</p> <p>Cet ensemble de photos s&rsquo;intitulait &laquo;&nbsp;Vues imprenables&nbsp;&raquo;, nous rappelant le clich&eacute; qu&rsquo;on utilise parfois pour parler d&rsquo;un panorama somptueux et rare&nbsp;; ou que l&rsquo;on retrouve sur des brochures d&rsquo;agents immobiliers pour vanter la situation d&rsquo;un appartement ou d&rsquo;une maison.</p> <p>Pourquoi ces vues &eacute;taient-elles imprenables&nbsp;? Elles l&rsquo;&eacute;taient en r&eacute;alit&eacute;, d&rsquo;abord, au sens propre. Elles &eacute;taient imprenables parce qu&rsquo;on ne pouvait pas les prendre&nbsp;: le photographe avait choisi des points de vue que tout un chacun ne pouvait atteindre, car il s&rsquo;agissait des bureaux de personnalit&eacute;s influentes ou importantes dans l&rsquo;&eacute;chelle sociale, exer&ccedil;ant de hautes responsabilit&eacute;s dans la ville. On n&rsquo;entre pas de fa&ccedil;on banale dans le bureau du pr&eacute;sident du tribunal de grande instance de Lille, du pr&eacute;sident de la SNCF, du directeur de la CPAM de Lille, de l&rsquo;&eacute;v&ecirc;que, etc. Ces vues sont imprenables, parce qu&rsquo;inaccessibles. Ces bureaux ne sont pas des lieux de visite publics. Le photographe voulait &laquo;&nbsp;d&eacute;voiler les vues d&rsquo;une ville connue selon des points de vue inconnus, et pourtant tr&egrave;s proches de nous&nbsp;&raquo;&nbsp;: ce qui se voit de ces fen&ecirc;tres, situ&eacute;es &agrave; des &eacute;tages divers, dans les bureaux d&rsquo;o&ugrave; il avait photographi&eacute; en l&rsquo;absence de leurs occupants, s&rsquo;appuie sur le paradoxe qu&rsquo;il avait sans doute aussi recherch&eacute;, montrant que des personnes de pouvoir ont sous les yeux des vues toutes simples.</p> <p>Les mots ne demandaient qu&rsquo;&agrave; sauter hors de leur tableau. Les photographies se sont ouvertes, ont regagn&eacute; par la fen&ecirc;tre l&rsquo;int&eacute;rieur des bureaux. Mieux, leurs occupants nous y ont accueillis, le photographe a parl&eacute; avec eux &mdash; c&rsquo;&eacute;tait la premi&egrave;re fois, &eacute;v&eacute;nement d&eacute;clench&eacute; par l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement radiophonique, la r&eacute;flexion sur le pas beau s&rsquo;est poursuivie, le non-spectacle s&rsquo;est impos&eacute;, et pour lui donner toute l&rsquo;importance qu&rsquo;il avait, quelques textes de Ponge ou du po&egrave;te G&eacute;rard Farasse (lui-m&ecirc;me sp&eacute;cialiste de Ponge) ont &eacute;t&eacute; lus, non par des com&eacute;diens &mdash; qui auraient risqu&eacute; de les rendre beaux &mdash; mais par les occupants m&ecirc;mes des bureaux, le pr&eacute;sident du tribunal de grande instance ou le directeur de la CPAM de Lille&nbsp;; ils se sont d&rsquo;ailleurs pr&ecirc;t&eacute;s &agrave; l&rsquo;exercice avec enthousiasme.</p> <p>Ce documentaire &eacute;tait aussi l&rsquo;occasion de s&rsquo;interroger sur l&rsquo;art contemporain et son rapport &agrave; la beaut&eacute;, de l&rsquo;admirable au non spectaculaire, au travers d&rsquo;une mise en sc&egrave;ne.</p> <p>C&rsquo;est aussi dans cette optique que j&rsquo;ai voulu m&rsquo;int&eacute;resser &agrave; l&rsquo;envers des &oelig;uvres, qui se voit encore moins, qui est tout aussi silencieux. Mais &agrave; la radio ni l&rsquo;envers ni l&rsquo;endroit ne se voient, envers et endroit ont le m&ecirc;me statut. Simplement, ce qui cr&eacute;e le myst&egrave;re de l&rsquo;envers c&rsquo;est l&rsquo;invisible, l&rsquo;absence, le hors-champ. C&rsquo;est l&rsquo;arri&egrave;re d&rsquo;un tableau (qui r&eacute;v&egrave;le qu&rsquo;on peut s&rsquo;y attacher ou en r&ecirc;ver), ce sont les secrets de fabrication des &oelig;uvres (tout ce qui dans un laboratoire de r&eacute;flexion et de t&acirc;tonnements aboutit &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre montr&eacute;e)&nbsp;; c&rsquo;est le r&eacute;el qui nourrit la fiction (comment un journal tenu quotidiennement se laisse p&eacute;trir pour devenir roman et sortir de l&rsquo;autoficton, mieux, se donne &agrave; lire apr&egrave;s la fiction &mdash; je pense &agrave; Annie Ernaux). Ce sont les sons et les voix que l&rsquo;on convoque. Avec en &eacute;cho ce qu&rsquo;en dit Fran&ccedil;ois Dagognet&nbsp;:</p> <blockquote> <p>Tout a &eacute;t&eacute; tent&eacute; et finalement l&rsquo;art classique &eacute;tait une prison. Pourquoi moi j&rsquo;accorde du prix &agrave; ceux qui comme Fontana et tant d&rsquo;autres ont d&eacute;chir&eacute; la toile ? Ils l&rsquo;ont crev&eacute;e, ils l&rsquo;ont lac&eacute;r&eacute;e, parce qu&rsquo;il n&rsquo;y a pas de raison qu&rsquo;on ne voie pas son arri&egrave;re. Pourquoi est-ce que l&rsquo;avant nous cache ce qui est derri&egrave;re lui, qui a autant de droit &agrave; exister ? Bon alors une toile fendue, le trou, moi je trouve &ccedil;a magnifique, parce que c&rsquo;est le commencement de la lib&eacute;ration&nbsp;<a href="#_ftn4" name="_ftnref4">[4]</a>.</p> </blockquote> <p>Parlant de l&rsquo;invisible, je peux aussi parler du banal, ou du non remarquable. Je l&rsquo;&eacute;voquais plus haut en parlant du non-spectacle et du pas beau. Il y a aussi le banal sans parole&nbsp;: ainsi, un tas de sable par exemple. C&rsquo;est par la vision d&rsquo;un tas de sable, premier regard sur le paysage d&rsquo;une carri&egrave;re, paysage dont la force min&eacute;rale m&rsquo;est apparue alors que je ne l&rsquo;attendais pas, que j&rsquo;ai &eacute;t&eacute; amen&eacute;e &agrave; &eacute;crire une composition sonore sur cette &eacute;tendue lunaire.</p> <h2>Paysage<br /> &nbsp;</h2> <p>Le paysage est une sollicitation du regard.</p> <p>Pourquoi est-il radiophonique&nbsp;? Il y a une premi&egrave;re &eacute;vidence, c&rsquo;est le paysage sonore. Car si je parle d&rsquo;une sollicitation visuelle, je peux tout autant parler du bruissement particulier des arbres quand je marche dans un chemin, ou de la course des feuilles s&egrave;ches sur la terre, pouss&eacute;es par le vent, ou des dialogues &eacute;chang&eacute;s par les oiseaux. Le son attire tout autant mon attention que les visions auxquelles il correspond.</p> <p>Le son &laquo;&nbsp;parle&nbsp;&raquo;, ou chante, &eacute;videmment, un paysage.</p> <p>J&rsquo;ai entendu r&eacute;cemment un tr&egrave;s beau son &mdash; je ne connaissais absolument pas le lieu qu&rsquo;il mettait en sc&egrave;ne. Un bateau est secou&eacute; par le remous de la mer agit&eacute;e par le vent, son flanc vient cogner un quai de mani&egrave;re r&eacute;p&eacute;titive, on per&ccedil;oit le vent, les m&acirc;ts cliquettent. &Agrave; un moment on entend une sir&egrave;ne, dans une sorte de ouate ou de sentiment d&rsquo;irr&eacute;el. La prise de son &eacute;tait tr&egrave;s fine, et pendant cette &eacute;coute &mdash; qui durait 7 ou 8&nbsp;minutes, je me laissais flotter en attendant une suite. Cela r&eacute;sonnait davantage pour moi comme une &eacute;vocation sonore, tr&egrave;s belle, et je me demandais en m&ecirc;me temps ce que je devais comprendre de ce son &mdash; ce que je devais en faire.</p> <p>Si j&rsquo;enregistre des oiseaux, dans le bruissement des feuilles, en m&rsquo;appliquant &agrave; saisir la puret&eacute; de ces sons, aurai-je pour autant, apr&egrave;s montage, r&eacute;ussi &agrave; &eacute;laborer un objet esth&eacute;tique signifiant&nbsp;? (Je pr&eacute;cise que le moindre son m&rsquo;arr&ecirc;te et me capte quand je m&rsquo;int&eacute;resse &agrave; un paysage). Un paysage sonore seul suffit-il pour donner un sens&nbsp;?</p> <p>Il me semble qu&rsquo;il faut le transfigurer par un autre biais, faire ressortir sa personnalit&eacute;, composer ce que j&rsquo;aime appeler un portrait-paysage.</p> <p>Il faut se souvenir, &agrave; ce propos, de la fa&ccedil;on dont Yann Parantho&euml;n a trait&eacute; le paysage sonore de Lesconil. C&rsquo;&eacute;tait une fresque sur le paysage sonore ‒ un cas d&rsquo;&eacute;cole puisqu&rsquo;il appartenait au projet mondial d&rsquo;environnement sonore de Murray-Schafer, et faisait partie de l&rsquo;&eacute;tude comparative des cinq paysages sonores de villages europ&eacute;ens. Or ce paysage sonore de Lesconil nous est arriv&eacute; peu &agrave; peu, nous n&rsquo;avons pas tout de suite entendu la mer, les bateaux, les vagues, les sir&egrave;nes, la cri&eacute;e, et d&rsquo;autres sons caract&eacute;ristiques d&rsquo;un port. Tout nous a &eacute;t&eacute; distill&eacute; par petites touches, et, surtout, par la subjectivit&eacute; des habitants, par leurs voix et leur accent ; leurs paroles nous conduisaient &agrave; des &eacute;l&eacute;ments sonores qui devenaient signifiants par ce qu&rsquo;ils en disaient. Les &eacute;l&eacute;ments sonores s&rsquo;encha&icirc;naient, rempla&ccedil;aient les sensations des personnages, ou nous parvenaient dans une alternance, et en tout cas jamais ces sons n&rsquo;&eacute;taient trait&eacute;s comme des illustrations mais comme des signifi&eacute;s &agrave; part enti&egrave;re. La force de ce traitement de la mati&egrave;re sonore, c&rsquo;est d&rsquo;avoir cr&eacute;&eacute; le d&eacute;sir par l&rsquo;attente des &eacute;l&eacute;ments qui la composent. Le d&eacute;voilement des sons, un &agrave; un, &agrave; travers la parole des personnages ‒ dont la voix et l&rsquo;accent sont partie int&eacute;grante du paysage sonore que l&rsquo;on entend ‒ parach&egrave;ve l&rsquo;&eacute;coute en &oelig;uvre d&rsquo;art, en composant une musique de l&rsquo;environnement qui prend en compte toutes ses manifestations.</p> <p>Un paysage est habit&eacute;, c&rsquo;est pour cela aussi qu&rsquo;on peut parler de portrait paysage. C&rsquo;est-&agrave;-dire que le portrait sonore finira par &ecirc;tre autant celui du paysage que celui des occupants de ce paysage, et c&rsquo;est ce qui s&rsquo;ajoute ou se joint au paysage sonore pour dessiner un lieu, un territoire. C&rsquo;&eacute;tait le cas dans ce&nbsp;<em>Questionnaire pour Lesconil</em>, o&ugrave; se r&eacute;v&eacute;lait &agrave; nous la personnalit&eacute; des habitants, d&rsquo;abord silencieux ou r&eacute;serv&eacute;s, assez int&eacute;rieurs ou fa&ccedil;onn&eacute;s par la mer.</p> <p>Un paysage est habit&eacute;. Comme nous le savons un paysage est une g&eacute;ographie trac&eacute;e et construite par ceux qui y vivent&nbsp;; comme nous le savons il n&rsquo;existe plus ou quasiment plus au monde de territoire &agrave; l&rsquo;&eacute;tat naturel. Les urbanistes et les paysagistes ont aussi attir&eacute; notre attention, depuis plusieurs d&eacute;cennies, sur le fait qu&rsquo;un paysage n&rsquo;est pas seulement rural, ou sylvestre, mais qu&rsquo;il concerne tous nos environnements&nbsp;: urbains, industriels, min&eacute;raux, etc. Ces environnements, ces territoires fabriqu&eacute;s par les humains, peuvent &ecirc;tre nomm&eacute;s paysages. Quand on regarde un paysage, on peut encore, dans certains cas, en saisir &agrave; l&rsquo;&oelig;il les strates du temps&nbsp;: je pense par exemple au d&eacute;coupage des champs autour de Cayeux, qui sont les marques d&rsquo;anciens polders, et de digues construites pour se prot&eacute;ger de l&rsquo;eau, je pense aux formes de certaines rues &agrave; Paris.</p> <p>C&rsquo;est pour cette somme d&rsquo;actions humaines superpos&eacute;es qu&rsquo;on peut prononcer le mot de palimpseste utilis&eacute; par Fran&ccedil;ois Dagognet. Ce tuilage qui constitue le paysage actuel peut &ecirc;tre dit, racont&eacute;, v&eacute;cu, utilis&eacute;&nbsp;: un paysage est un r&eacute;cit composite et compos&eacute; de paroles humaines.</p> <p>Ainsi il s&rsquo;&eacute;paissit et se laisse prendre.</p> <h2>Montagne-eau<br /> &nbsp;</h2> <p>J&rsquo;ai fait une d&eacute;couverte qui m&rsquo;a r&eacute;jouie&nbsp;: en lisant des &eacute;crits sur la notion de paysage en extr&ecirc;me Orient, j&rsquo;ai appris que l&rsquo;un des mots qui d&eacute;signe le paysage en chinois,&nbsp;<em>sanshui</em>, est fait de deux id&eacute;ogrammes et se traduit par un double substantif&nbsp;: &laquo;&nbsp;montagne-eau&nbsp;&raquo;. Ce qu&rsquo;en &eacute;crit Fran&ccedil;ois Jullien correspond au traitement d&rsquo;une mati&egrave;re sonore &agrave; la radio, quand on sort du contemplatif pour cr&eacute;er une mati&egrave;re mouvante. On compose le vertical et l&rsquo;horizontal, le statique et le mouvant, ce qui a forme et ce qui &eacute;pouse la forme, &laquo;&nbsp;ou enfin ce qu&rsquo;on a frontalement devant les yeux et qu&rsquo;on regarde (la montagne) et ce qu&rsquo;on entend de divers c&ocirc;t&eacute;s et dont le bruissement parvient &agrave; l&rsquo;oreille (l&rsquo;eau). La vue et l&rsquo;ou&iuml;e sont &eacute;galement sollicit&eacute;es&nbsp;<a href="#_ftn5" name="_ftnref5">[5]</a>&nbsp;&raquo;.</p> <p>Je retrouve ici des motivations qui souvent m&rsquo;incitent &agrave; construire un documentaire sonore, qui ne sont ni celles d&rsquo;une information (mais qui peuvent en contenir), ni d&rsquo;un regard ou d&rsquo;une enqu&ecirc;te sur la soci&eacute;t&eacute;, mais tout simplement un choc esth&eacute;tique, &agrave; la fois visuel (un paysage qui s&rsquo;&eacute;tend devant mes yeux) et sonore, parce que des sons y sont extr&ecirc;mement pr&eacute;sents, et r&eacute;p&eacute;titifs &mdash; la r&eacute;p&eacute;tition cr&eacute;e un climat po&eacute;tique.</p> <p>Cette combinaison entre le regard et le son, entre la sollicitation visuelle et la sollicitation auditive, a constitu&eacute; la naissance d&rsquo;un portrait paysage que j&rsquo;ai compos&eacute;. Je peux parler d&rsquo;un regard sonore. Car c&rsquo;est la sollicitation sonore, tr&egrave;s pr&eacute;sente, qui est devenue la voix essentielle de ce documentaire.</p> <h2>Les trains<br /> &nbsp;</h2> <p>Je suis &agrave; ce moment-l&agrave; &agrave; l&rsquo;Estaque, sur les hauteurs de Marseille. Sur cette colline, des maisons sont construites, on a l&rsquo;impression qu&rsquo;elles ont &eacute;t&eacute; dispos&eacute;es au hasard de l&rsquo;occupation du sol, une sorte de guirlande de maisons qui surplombent la ville. J&rsquo;ai devant moi un panorama tr&egrave;s large&nbsp;: le golfe de Marseille, la mer, les &icirc;les avec le ch&acirc;teau d&rsquo;If, l&rsquo;autre c&ocirc;t&eacute; du golfe avec une autre partie de la ville, et la d&eacute;coupe de Notre Dame de la Garde. Je vois le va-et-vient des bateaux qui entrent ou sortent du port. Ceci pour la vue.</p> <p>&Agrave; l&rsquo;endroit o&ugrave; je suis plac&eacute;e, sur la petite terrasse d&rsquo;une de ces maisons, j&rsquo;ai aussi un son r&eacute;current, qui marque le paysage par sa singularit&eacute;&nbsp;: ce sont des trains qui passent sur la voie ferr&eacute;e situ&eacute;e en contrebas, &agrave; une petite cinquantaine de m&egrave;tres des maisons.</p> <p>Ici on ne sait ce qui attire le plus, si c&rsquo;est la vue ou les sons qui occupent r&eacute;solument le paysage. On peut donc y entrer en fermant les yeux et en &eacute;coutant, ou bien en les ouvrant et en regardant le golfe, ou encore en allant &agrave; la rencontre des habitants de ces maisons pour qui le quotidien est rythm&eacute; par ces sons. On a le choix des outils&nbsp;: l&rsquo;enregistreur, ou le pinceau et la toile. Si je pense &agrave; la notion chinoise du paysage, je peux dire que l&rsquo;on se trouve ici dans la &laquo;&nbsp;Montagne-eau&nbsp;&raquo;. Il y a tous les &eacute;l&eacute;ments statiques&nbsp;: les rochers qui dessinent en contrebas les contours du golfe, les &icirc;les, la digue b&acirc;tie qui s&rsquo;&eacute;tire le long de la c&ocirc;te, et parall&egrave;lement, bien plus haut, sous nos yeux, la ligne horizontale de la voie ferr&eacute;e immobile. Y entrent ou y bruissent l&rsquo;eau du golfe, changeant de direction selon le vent, changeant de couleur selon le ciel, portant des voiles ou des bateaux de commerce qui entrent ou sortent, mais aussi une autre sorte de mouvance, et pas des moindres&nbsp;: les trains qui passent tout pr&egrave;s dans les deux sens, des trains tr&egrave;s diff&eacute;rents, du train quotidien qui m&egrave;ne du centre de Marseille aux villes c&ocirc;ti&egrave;res plus loin, au train de voyageurs, train de marchandises, train militaire, train des poubelles.</p> <p>Cette situation, tout en signant d&rsquo;abord une pr&eacute;sence forte du paysage sonore, dit bien aussi ce qu&rsquo;est un portrait-paysage, c&rsquo;est-&agrave;-dire qu&rsquo;on chemine, &agrave; partir du point de d&eacute;part sur la colline, pour brosser le portrait d&rsquo;un lieu. Enfin les &eacute;l&eacute;ments s&rsquo;articulent et se transforment en objet radiophonique proprement dit, avec le travail du montage, qui a contribu&eacute; &agrave; donner &agrave; cette perception premi&egrave;re la forme d&rsquo;un objet sonore &eacute;labor&eacute;, transform&eacute; pour donner &agrave; entendre non une information, mais un fait sensible.</p> <p>Un choc d&rsquo;une &eacute;trange et surprenante po&eacute;sie est provoqu&eacute; par ce paysage industriel sonore&nbsp;; la puissance du r&ecirc;ve contenue dans les trains, dans la r&eacute;p&eacute;tition de leur passage, donne aussi un caract&egrave;re musical &agrave; ces sons. Et quand les habitants parlent des trains, ils se rendent compte qu&rsquo;ils les ont int&eacute;gr&eacute;s dans leur quotidien, d&rsquo;autant que la force de ces machines est de confisquer la parole aux humains quand ils passent.</p> <p>Nous sommes rest&eacute;s sur cette colline pendant trois jours, de mani&egrave;re &agrave; ne rater aucun train, du petit matin au soir, autour de 21&nbsp;heures. Nous avons r&eacute;sist&eacute; &agrave; aller l&agrave; o&ugrave; allait chaque train, en gardant le point de vue d&rsquo;un espace limit&eacute;, sur ce point statique de la terrasse au-dessus de la voie ferr&eacute;e. Nous avons d&eacute;ambul&eacute; de maison en maison sur la colline. Une seule exception&nbsp;: une &eacute;chapp&eacute;e &agrave; la gare de l&rsquo;Estaque (qui &eacute;tait tr&egrave;s proche), o&ugrave; nous avons encore &eacute;cout&eacute; les trains passer, o&ugrave; nous sommes mont&eacute;s dans une locomotive le temps d&rsquo;un trajet entre l&rsquo;Estaque et Ensu&egrave;s, la station suivante sur la c&ocirc;te bleue. Mais nous revenions toujours &agrave; notre colline.</p> <p>L&rsquo;&eacute;criture s&rsquo;est faite avec le montage, qui avait pour particularit&eacute; d&rsquo;avoir tout transform&eacute; en parole, que ce soit le son des trains ou les r&eacute;cits des habitants. Les trains parlent, les habitants &eacute;coutent et parlent. Tout se m&ecirc;le dans la r&eacute;alit&eacute;, tout se m&ecirc;lait et se r&eacute;pondait dans le documentaire&nbsp;; avec le respect d&rsquo;une temporalit&eacute;, lente, au rythme du temps que mettait un train pour passer devant les maisons, au rythme de la parole des protagonistes de cette histoire, qui d&rsquo;ailleurs n&rsquo;a pas d&rsquo;histoire. C&rsquo;est ce qui fait que le montage, ou l&rsquo;agencement de tous ces &eacute;l&eacute;ments, transforme le banal de cette colline en &eacute;v&eacute;nement de chaque jour (c&rsquo;&eacute;tait pour moi en tout cas un &eacute;v&eacute;nement), mais les personnes dont la parole est sollicit&eacute;e se mettent &agrave; observer, et pour finir se rendent compte de l&rsquo;existence pour eux d&rsquo;un fait qui s&rsquo;est effac&eacute; dans le quotidien parce qu&rsquo;ils ne le nomment pas. Plus exactement, ils n&rsquo;en parlent pas parce qu&rsquo;ils n&rsquo;y pensent pas, mais d&egrave;s qu&rsquo;on sollicite leur parole ils disent ce qu&rsquo;ils voient, ce qu&rsquo;ils entendent, ce qu&rsquo;ils ressentent.</p> <p>Pour terminer, je d&eacute;cris bri&egrave;vement l&rsquo;agencement de ce documentaire, qui s&rsquo;est d&eacute;velopp&eacute; &agrave; partir du point de d&eacute;part d&rsquo;un paysage et de ses sons.</p> <p>C&rsquo;est une narration, avec un d&eacute;but et une fin, mis en sc&egrave;ne d&rsquo;une mani&egrave;re particuli&egrave;re&nbsp;: c&rsquo;est-&agrave;-dire que notre position g&eacute;ographique n&rsquo;a pas avanc&eacute; d&rsquo;un m&egrave;tre. Au d&eacute;but nous nous tenons &agrave; un lieu bien pr&eacute;cis, avec un personnage, dans une situation d&rsquo;attente. &Agrave; la fin, au bout de 1&nbsp;h&nbsp;14 (format de&nbsp;<em>Surpris par la nuit</em>), nous sommes au m&ecirc;me endroit, avec le m&ecirc;me personnage, mais ce que nous attendions finit par arriver. Ce que nous attendions, c&rsquo;&eacute;tait un train, un train particulier. Or cette attente que nous avons install&eacute;e au d&eacute;but s&rsquo;oublie pendant le d&eacute;roulement des s&eacute;quences. Quand j&rsquo;ai parl&eacute; du montage dans mon livre&nbsp;<a href="#_ftn6" name="_ftnref6">[6]</a>, j&rsquo;ai rappel&eacute; certaines analyses d&rsquo;Andr&eacute; Bazin &agrave; propos du cin&eacute;ma, et notamment toutes les analyses qu&rsquo;il fait sur le montage invisible et le montage visible, celui que l&rsquo;on ne sent pas et celui que l&rsquo;on per&ccedil;oit. Le montage visible est un outil de compr&eacute;hension, parce qu&rsquo;il introduit des ruptures per&ccedil;ues, mais voulues, qui cr&eacute;ent par le choc des images entre elles non seulement une signification, mais une autre r&eacute;alit&eacute;. &laquo;&nbsp;C&rsquo;est le montage, cr&eacute;ateur abstrait de sens, qui maintient le spectacle dans son irr&eacute;alit&eacute; n&eacute;cessaire&nbsp;&raquo;, &eacute;crit Andr&eacute; Bazin.</p> <p>Dans &laquo;&nbsp;Les trains de l&rsquo;Estaque&nbsp;<a href="#_ftn7" name="_ftnref7">[7]</a>&nbsp;&nbsp;&raquo;, la narration repose au contraire sur un montage qui est invisible, dont on ne per&ccedil;oit pas les ruptures. &Agrave; partir de l&rsquo;installation du d&eacute;but, on chemine le long de la colline o&ugrave; chaque rencontre nous dit des perceptions diff&eacute;rentes des trains qui passent, avec des sutures amen&eacute;es par les mots ou les id&eacute;es pr&eacute;c&eacute;dentes, on glisse aussi comme les trains sur la voie ferr&eacute;e, on glisse avec eux et on est men&eacute;s, conduits, guid&eacute;s, dans une &eacute;coute. Le but de cette composition sonore &eacute;tait d&rsquo;entendre et d&rsquo;&eacute;couter les trains. On les attend, mais parfois aussi ils nous prennent par surprise et nous interrompent. Ils deviennent une musique, dont la perception est racont&eacute;e sur divers modes. Et au bout du morceau de musique, on retrouve la position du d&eacute;but, on avait oubli&eacute; qu&rsquo;on &eacute;tait dans l&rsquo;attente du train des poubelles, il arrive, on l&rsquo;&eacute;coute, des paroles arrivent encore, et on d&eacute;cide d&rsquo;&eacute;couter encore les trains.</p> <p>Je pourrais m&ecirc;me dire que les paysages que nous cr&eacute;ons sont des fictions. Quand Frank Venaille a cr&eacute;&eacute; les &laquo;&nbsp;Souvenirs d&rsquo;en Flandres&nbsp;<a href="#_ftn8" name="_ftnref8">[8]</a>&nbsp;&raquo;, il a associ&eacute; le r&eacute;cit d&rsquo;un narrateur, qui sonne comme une fiction, &agrave; la d&eacute;couverte d&rsquo;un paysage qu&rsquo;il retrouvait avec le micro. Sortis d&rsquo;une r&eacute;miniscence, d&rsquo;une association d&rsquo;id&eacute;es, d&rsquo;une subjectivit&eacute;, d&rsquo;un choc esth&eacute;tique, ces portraits-paysages transforment la r&eacute;alit&eacute; en une perception qui sera singuli&egrave;re, celle de son auteur.</p> <p>De m&ecirc;me, quand je parle d&rsquo;un &laquo;&nbsp;acte radiophonique&nbsp;&raquo;, je parle de la cr&eacute;ation d&rsquo;un lieu immat&eacute;riel&nbsp;; nous cr&eacute;ons ce &laquo;&nbsp;lieu radiophonique&nbsp;&raquo; justement avec l&rsquo;&eacute;criture et le montage, il est &agrave; la radio ce que la sc&egrave;ne est au th&eacute;&acirc;tre, son espace est sonore mais non palpable et non mesurable, il n&rsquo;a pas de limite sinon le temps imparti dans une grille de programme, il est transpos&eacute; de la r&eacute;alit&eacute;, n&rsquo;a pas de fronti&egrave;re visuelle, c&rsquo;est un lieu qu&rsquo;investit notre imaginaire, notre pens&eacute;e. Un lieu propre &agrave; habiter le &laquo;&nbsp;non-lieu&nbsp;&raquo; qu&rsquo;est la radio.</p> <p>J&rsquo;&eacute;voquais au d&eacute;but la contradiction de vouloir faire entrer dans un creuset sonore et invisible une image r&eacute;elle qui se d&eacute;ploie devant nos yeux. Il faudrait plut&ocirc;t parler d&rsquo;un paysage invisible qui se r&eacute;v&egrave;le dans le champ radiophonique par la mobilit&eacute; du son.</p> <h3><strong>Notes</strong><br /> &nbsp;</h3> <p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1">[1]</a>&nbsp;Denis Diderot,&nbsp;<em>&OElig;uvres esth&eacute;tiques</em>, textes et annotations de Paul Verni&egrave;re, Paris, &Eacute;ditions Garnier, 1959, p.&nbsp;647-648.</p> <p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2">[2]</a>&nbsp;Phrase cit&eacute;e en exergue du&nbsp;<em>Guide d&rsquo;un petit voyage dans l&rsquo;&oelig;uvre de Francis Ponge</em>&nbsp;de G&eacute;rard Farasse et Bernard Veck, Villeneuve d&rsquo;Ascq, Presses universitaires du Septentrion, &laquo;&nbsp;Savoirs mieux. Litt&eacute;rature&nbsp;&raquo;, 1999.</p> <p><a href="#_ftnref3" name="_ftn3">[3]</a>&nbsp;&laquo;&nbsp;Le non-spectacle et le pas-beau&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Surpris par la nuit</em>, France Culture, par Simone Douek, r&eacute;alisation Anna Szmuc, 20 juin 2003.</p> <p><a href="#_ftnref4" name="_ftn4">[4]</a>&nbsp;&laquo;&nbsp;Le non spectacle et le pas beau&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>ibid</em>.</p> <p><a href="#_ftnref5" name="_ftn5">[5]</a>&nbsp;Fran&ccedil;ois Jullien,&nbsp;<em>Vivre de paysage ou l&rsquo;impens&eacute; de la Raison</em>, Paris, Gallimard, &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que des id&eacute;es&nbsp;&raquo;, 2014.</p> <p><a href="#_ftnref6" name="_ftn6">[6]</a>&nbsp;Simone Douek,&nbsp;<em>L&rsquo;acte radiophonique, une esth&eacute;tique du documentaire</em>, Gr&acirc;ne, &Eacute;ditions Cr&eacute;aphis, 2021.</p> <p><a href="#_ftnref7" name="_ftn7">[7]</a>&nbsp;&laquo;&nbsp;Les trains de l&rsquo;Estaque&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Surpris par la nuit</em>, France Culture, par Simone Douek, r&eacute;alisation Ang&eacute;lique Tibau, 6 juillet 2007.</p> <p><a href="#_ftnref8" name="_ftn8">[8]</a>&nbsp;&laquo; Souvenirs d&rsquo;en Flandres, le passeur d&rsquo;eau &raquo;,&nbsp;<em>Nuits magn&eacute;tiques</em>, France Culture, par Frank Venaille, r&eacute;alisation Bruno Sourcis, 10 septembre 1987.</p> <h3>Autrice</h3> <p>Productrice &agrave; France Culture pendant plus de trente ans, o&ugrave; elle a pratiqu&eacute; toutes les formes radiophoniques, du direct au documentaire,&nbsp;<strong>Simone Douek</strong>&nbsp;a collabor&eacute; &agrave; un grand nombre d&rsquo;&eacute;missions sur la cha&icirc;ne, notamment :&nbsp;<em>Les &Icirc;les de France</em>,&nbsp;<em>&Agrave; voix nue,</em>&nbsp;<em>Une vie, une &oelig;uvre</em>,&nbsp;<em>Les Mardis du cin&eacute;ma</em>,&nbsp;<em>Cin&eacute;-Club</em>,&nbsp;<em>La Matin&eacute;e des autres</em>,&nbsp;<em>Le bon plaisir</em>,&nbsp;<em>Surpris par la nuit</em>,&nbsp;<em>Tire ta langue</em>,&nbsp;<em>Lieux de m&eacute;moire</em>,&nbsp;<em>Grand Angle</em>,&nbsp;<em>Les chemins de la connaissance</em>,&nbsp;<em>Sur les docks</em>. Elle a aussi enseign&eacute; l&rsquo;&eacute;criture radiophonique &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; de Marne la Vall&eacute;e pendant 12 ans, ainsi qu&rsquo;&agrave; la SAE (Sound Audiovisual Engeneering School). Elle a r&eacute;cemment publi&eacute;&nbsp;<em>L&rsquo;Acte radiophonique, une esth&eacute;tique du documentaire</em>, &eacute;ditions Cr&eacute;aphis, 2021, occasion d&rsquo;une interview &eacute;clairante &agrave; &eacute;couter&nbsp;<a href="https://aligrefm.org/podcasts/philosophie-au-present-08-juillet-2023-polyphonies-du-reel-avec-simone-douek-2261" target="_blank">ici</a>.</p> <h3><strong>Copyright</strong></h3> <p>Tous droits r&eacute;serv&eacute;s.</p>