<p>En 2012, l&rsquo;&eacute;mission &laquo;&nbsp;Les Pieds sur terre&nbsp;&raquo; f&ecirc;tait son dixi&egrave;me anniversaire par une mise en recueil&nbsp;: la productrice Sonia Kronlund publiait alors chez Actes Sud <em>Les Pieds sur terre</em>, livre r&eacute;sultant de la s&eacute;lection d&rsquo;une quarantaine <w:sdt id="-1363748462" sdttag="goog_rdk_3">de </w:sdt>reportages. Le sous-titre &laquo;&nbsp;nouvelles du r&eacute;el&nbsp;&raquo; joue avec le&nbsp;paradigme&nbsp;de l&rsquo;actualit&eacute; au c&oelig;ur du travail journalistique et rappelle qu&rsquo;il s&rsquo;agit, dans la lecture comme dans l&rsquo;&eacute;coute de l&rsquo;&eacute;mission, de prendre des nouvelles du r&eacute;el, de prendre le pouls d&rsquo;une soci&eacute;t&eacute;. &laquo;&nbsp;La vie moderne&nbsp;&raquo;, titre auquel avait d&rsquo;abord song&eacute; la productrice aux d&eacute;buts de l&rsquo;&eacute;mission, traduisait &eacute;galement cette saisie du contemporain, du r&eacute;el et du quotidien. La r&eacute;f&eacute;rence au genre de la nouvelle inscrit &eacute;galement le livre dans une famille litt&eacute;raire qui fait signe vers la bri&egrave;vet&eacute;, le travail d&rsquo;un arc narratif resserr&eacute; et un art de la chute bien cisel&eacute;, pointant du doigt le go&ucirc;t de l&rsquo;&eacute;mission pour le <em>storytelling</em>, dans la filiation d&rsquo;autres grandes &eacute;missions auxquelles elle se r&eacute;f&egrave;re. Les ambitions politiques et le cadre esth&eacute;tique de l&rsquo;&eacute;mission sont donc d&rsquo;embl&eacute;e rappel&eacute;s et reformul&eacute;s lors du passage au livre. Cette &eacute;mission quotidienne, produite par Sonia Kronlund depuis 2002 sur la cha&icirc;ne de radio publique <em>France Culture</em>, est en effet d&eacute;crite sur le site internet ou sur les plateformes de podcast en ces termes&nbsp;: &laquo;&nbsp;[t]ous les jours, une demi-heure de reportage sans commentaire&nbsp;&raquo;. Nous reviendrons sur une telle description &agrave; l&rsquo;aune de la mise en livre de l&rsquo;&eacute;mission.</p> <p>Avant d&rsquo;en venir au livre, une br&egrave;ve pr&eacute;sentation de l&rsquo;&eacute;mission s&rsquo;impose. L&rsquo;&eacute;mission est en fait le fruit d&rsquo;un travail de collaboration entre Sonia Kronlund et des producteurs&middot;ices d&eacute;l&eacute;gu&eacute;&middot;es, qui lui proposent r&eacute;guli&egrave;rement leurs sujets de reportage. Le choix des th&eacute;matiques semble plac&eacute; sous le signe de la vari&eacute;t&eacute;. Les sujets politiques (monde du travail, pr&eacute;carit&eacute;, in&eacute;galit&eacute;s de genre, etc.) c&ocirc;toient volontiers l&rsquo;anecdotique (&laquo;&nbsp;l&rsquo;&eacute;merveillement&nbsp;&raquo;, les &laquo;&nbsp;soir&eacute;es qui tournent mal&nbsp;&raquo;, les &laquo;&nbsp;conflits de voisinage&nbsp;&raquo;) voire l&rsquo;intime (&laquo;&nbsp;Trouver l&rsquo;amour&nbsp;&raquo;). Un d&eacute;sir d&rsquo;&eacute;quilibrer les sujets sous-tend malgr&eacute; tout cet &eacute;clectisme, dans le souci de faire entendre les grandes probl&eacute;matiques sociales qui ont, nous le verrons, motiv&eacute; la cr&eacute;ation de l&rsquo;&eacute;mission. Celle-ci se compose aujourd&rsquo;hui de plusieurs formes d&rsquo;&eacute;pisodes, dont on pourrait rapidement esquisser la typologie suivante.</p> <p>Le format le plus courant et embl&eacute;matique de l&rsquo;&eacute;mission est l&rsquo;&eacute;pisode rassemblant plusieurs histoires sous un m&ecirc;me th&egrave;me. Le fil rouge de l&rsquo;&eacute;pisode est alors explicit&eacute; par l&rsquo;introduction de Sonia Kronlund&nbsp;: il peut aller d&rsquo;une situation commune (&laquo;&nbsp;Le jour o&ugrave; j&rsquo;ai failli mourir&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;La sortie de prison&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Ascenseurs en panne&nbsp;&raquo;) au partage d&rsquo;un simple d&eacute;tail. Cette mise en s&eacute;rie &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur d&rsquo;un m&ecirc;me &eacute;pisode engendre des effets de rapprochements et d&rsquo;&eacute;loignements, de ruptures et de continuit&eacute;s. Aussi l&rsquo;&eacute;pisode &laquo;&nbsp;Se cacher&nbsp;&raquo; met-il par exemple en regard deux t&eacute;moignages, celui d&rsquo;un homme, originaire du S&eacute;n&eacute;gal, ayant d&ucirc; se cacher en Europe de nos jours, puis celui d&rsquo;une personne cach&eacute;e enfant, parce que juive, pendant la Seconde Guerre mondiale. La mise en regard, on le voit, travaille tant&ocirc;t l&rsquo;art du parall&egrave;le, tant&ocirc;t celui du contrepoint, en m&eacute;nageant des mouvements de balancier qui vont parfois jusqu&rsquo;au renversement de situation&nbsp;: &laquo;&nbsp;Les Pieds sur les pieds&nbsp;&raquo; fait ainsi entendre successivement un f&eacute;tichiste des pieds puis un homme amput&eacute; du pied droit.</p> <p>Viennent ensuite les &eacute;pisodes unitaires isol&eacute;s, consacr&eacute;s &agrave; un seul t&eacute;moignage. Il s&rsquo;agit, nous y reviendrons, du format initial des &laquo;&nbsp;Pieds sur terre&nbsp;&raquo;, qui resurgit d&eacute;sormais occasionnellement. &laquo;&nbsp;La comptable en faillite&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Le blues de Jeanne&nbsp;&raquo; ou &laquo;&nbsp;Laeticia, m&eacute;decin reconvertie&nbsp;&raquo; sont des exemples de ces &eacute;pisodes centr&eacute;s sur une seule exp&eacute;rience, et, le plus souvent, une seule voix. M&ecirc;me dans les cas polyphoniques, les voix &eacute;voquent en ch&oelig;ur une m&ecirc;me situation mise &agrave; l&rsquo;honneur : il en va ainsi de l&rsquo;&eacute;pisode &laquo;&nbsp;Liliane et Andr&eacute;e&nbsp;: le plus beau des mariages pour tous&nbsp;&raquo;, o&ugrave; l&rsquo;histoire d&rsquo;amour des deux femmes est racont&eacute;e avec leurs mots, mais aussi avec ceux de Marie-No&euml;l, animatrice de l&rsquo;Ehpad o&ugrave; leur mariage fut c&eacute;l&eacute;br&eacute;. Ces &eacute;pisodes unitaires peuvent parfois &ecirc;tre mis en s&eacute;rie, r&eacute;unis alors sous un m&ecirc;me th&egrave;me. La s&eacute;rie &laquo;&nbsp;Racisme au quotidien&nbsp;&raquo;&nbsp;est par exemple compos&eacute;e de trois &eacute;pisodes&nbsp;unitaires&nbsp;: &laquo;&nbsp;Les mots pour dire&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;L&rsquo;histoire de Yacouba&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;Le racisme au quotidien&nbsp;&raquo;.</p> <p>Enfin, l&rsquo;&eacute;mission accorde une place historiquement plus marginale mais grandissante &agrave; des s&eacute;ries qui sortent de ce fonctionnement et se rapprochent de la cr&eacute;ation documentaire. Il s&rsquo;agit le plus souvent d&rsquo;enqu&ecirc;tes racont&eacute;es &agrave; la premi&egrave;re personne, comme le &laquo;&nbsp;Journal breton&nbsp;&raquo; d&rsquo;In&egrave;s L&eacute;raud ou les embl&eacute;matiques s&eacute;ries d&rsquo;Adila Bennedja&iuml;-Zou. La derni&egrave;re en date, &laquo;&nbsp;Ex-ologie&nbsp;&raquo;, restitue ainsi en cinq &eacute;pisodes une qu&ecirc;te au cours de laquelle la productrice retourne voir les hommes qu&rsquo;elle a aim&eacute;s &ndash; un par &eacute;pisode &ndash; pour tenter de mieux saisir la personne qu&rsquo;elle est aujourd&rsquo;hui, et, peut-&ecirc;tre, &eacute;claircir la cause de son c&eacute;libat. Elle partage avec ses auditeur&middot;ices son protocole d&rsquo;enqu&ecirc;te et restitue avec transparence son cheminement, y compris dans ses impasses et &eacute;checs, selon un paradigme d&eacute;sormais bien d&eacute;crit du c&ocirc;t&eacute; de la litt&eacute;rature contemporaine<sup><a href="«#_ftn1" name="_ftnref1" title="">[1]</a></sup>. Les retentissements intimes de la fabrique du documentaire sur celle qui le produit font alors partie int&eacute;grante de la cr&eacute;ation documentaire&nbsp;: on s&rsquo;&eacute;loigne l&agrave; du reportage &laquo;&nbsp;sans commentaire&nbsp;&raquo;.</p> <p>Derri&egrave;re cette diversit&eacute;, comment d&eacute;crire l&rsquo;originalit&eacute; du projet radiophonique des &laquo;&nbsp;Pieds sur terre&nbsp;&raquo;&nbsp;? L&rsquo;occasion du passage des ondes au papier permettra de saisir quelques aspects de la sp&eacute;cificit&eacute; de la collecte de voix effectu&eacute;e par l&rsquo;&eacute;mission. Le geste de la mise en livre n&rsquo;est pas isol&eacute; &ndash; Daniel Mermet f&ecirc;tait par exemple, en 1999, les dix ans de la mythique &eacute;mission &laquo;&nbsp;L&agrave;-bas si j&rsquo;y suis&nbsp;&raquo; en publiant un livre<sup><a href="«#_ftn2" name="_ftnref2" title="">[2]</a></sup> du m&ecirc;me titre, et de telles circulations t&eacute;moignent d&rsquo;une r&eacute;elle proximit&eacute; entre ces entreprises radiophoniques et ce que l&rsquo;on nomme d&eacute;sormais les livres de voix<sup><a href="«#_ftn3" name="_ftnref3" title="">[3]</a></sup>. Il s&rsquo;agit l&agrave; d&rsquo;un livre-&eacute;v&eacute;nement qui, outre le fait de marquer symboliquement un anniversaire, est l&rsquo;occasion d&rsquo;expliciter un &laquo;&nbsp;projet&nbsp;&raquo; radiophonique, terme abondamment utilis&eacute; dans la pr&eacute;face de Sonia Kronlund. Cette pr&eacute;face, nouveau seuil de l&rsquo;&eacute;mission, se fait lieu d&rsquo;affirmation d&rsquo;une posture de productrice&nbsp;: cette derni&egrave;re y <w:sdt id="-934287297" sdttag="goog_rdk_10"></w:sdt>retrace la g&eacute;n&eacute;alogie de l&rsquo;&eacute;mission et articule sa ligne &eacute;ditoriale dans un paratexte qui n&rsquo;a pas son &eacute;quivalent &agrave; la radio. Apr&egrave;s dix ans d&rsquo;&eacute;mission, elle y (re)noue un pacte d&rsquo;&eacute;coute &agrave; mesure que s&rsquo;instaure le pacte de lecture<sup><a href="«#_ftn4" name="_ftnref4" title="">[4]</a></sup>.</p> <p>Du dispositif radiophonique au livre de voix : la mise en livre permet donc de mesurer quelques-uns des enjeux esth&eacute;tiques et politiques de cette &eacute;mission phare de <em>France Culture</em>.</p> <h2>1. Recueil d&rsquo;une parole documentaire&nbsp;: quel dispositif radiophonique&nbsp;?</h2> <p>&nbsp;</p> <p>La pr&eacute;sentation de l&rsquo;&eacute;mission sur le site internet de <em>France Culture</em> indique&nbsp;que celle-ci se compose d&rsquo;histoires &laquo;&nbsp;nourries d&rsquo;&eacute;l&eacute;ments de reportage&nbsp;&raquo; tandis que les tags font r&eacute;f&eacute;rence au genre du &laquo;&nbsp;documentaire radiophonique&nbsp;&raquo;, la rapprochant alors d&rsquo;autres &eacute;missions de la cha&icirc;ne, tel &laquo;&nbsp;LSD&nbsp;&raquo; ou &laquo;&nbsp;L&rsquo;Exp&eacute;rience&nbsp;&raquo;. En somme, un flottement terminologique demeure, entre r&eacute;f&eacute;rence au reportage et au documentaire radiophonique. D&rsquo;ailleurs, dans la pr&eacute;face du livre, Sonia Kronlund &eacute;nonce cette h&eacute;sitation pour mieux la balayer au d&eacute;tour d&rsquo;une note de bas de page : &laquo;&nbsp;La fronti&egrave;re qui s&eacute;pare le &quot;documentaire&quot; du &quot;reportage&quot;, &agrave; la radio du moins, est assez floue. Une discussion qui permettrait de la d&eacute;limiter, si toutefois c&rsquo;est possible, serait longue et ennuyeuse et rien ne permet de dire qu&rsquo;on arriverait &agrave; un r&eacute;sultat int&eacute;ressant<sup><a href="«#_ftn5" name="_ftnref5" title="">[5]</a></sup>.&nbsp;&raquo;</p> <p>Tentons pourtant de saisir quelques-unes des caract&eacute;ristiques sous-tendues par ces cat&eacute;gories g&eacute;n&eacute;riques. Le documentaire radiophonique est un genre r&eacute;apparu depuis les ann&eacute;es 2000 dans le discours des institutions radiophoniques, au point de gagner en l&eacute;gitimit&eacute; et d&rsquo;entra&icirc;ner une r&eacute;elle professionnalisation autour du genre. C&rsquo;est ce qu&rsquo;ont montr&eacute; les analyses de Christophe Deleu, en particulier dans l&rsquo;ouvrage qu&rsquo;il a consacr&eacute; au genre, <em>Le documentaire radiophonique</em> : &laquo;&nbsp;[c]e n&rsquo;est que r&eacute;cemment que la notion de documentaire est revenue en force pour qualifier des productions qu&rsquo;on voulait distinguer des &eacute;missions de studio en direct<sup><a href="«#_ftn6" name="_ftnref6" title="">[6]</a></sup>.&nbsp;&raquo; Le genre se distingue donc du fonctionnement spatio-temporel majoritaire de la radio&nbsp;en ce qu&rsquo;il fait sortir du lieu du studio et implique une temporalit&eacute; distincte du direct&nbsp;: r&eacute;colte de sons&nbsp;et travail de montage en amont de la diffusion. En cela, il a &eacute;t&eacute; tributaire d&rsquo;avanc&eacute;es technologiques, comme le Nagra, mat&eacute;riel qui a facilit&eacute; la r&eacute;colte de voix sur le terrain, ou la simplification des m&eacute;thodes de montage. Outre cette dimension mat&eacute;rielle, le documentaire d&eacute;place &eacute;galement les contours des fonctions traditionnellement associ&eacute;es &agrave; la radio comme m&eacute;dia du direct par excellence. Apr&egrave;s la Seconde Guerre mondiale et sur la radio publique uniquement, le documentaire se d&eacute;veloppe, comme en t&eacute;moigne la cr&eacute;ation en 1969 de &laquo;&nbsp;L&rsquo;Atelier de cr&eacute;ation radiophonique&nbsp;&raquo; sur <em>France Culture</em>, qui valorise des cr&eacute;ations exp&eacute;rimentales, fictionnelles et <w:sdt id="-80228872" sdttag="goog_rdk_14"></w:sdt>documentaires. L&rsquo;essor du genre m&eacute;rite sans doute d&rsquo;&ecirc;tre replac&eacute; dans le contexte du d&eacute;ploiement d&rsquo;un &laquo;&nbsp;espace du documentaire<sup><a href="«#_ftn7" name="_ftnref7" title="">[7]</a></sup> &raquo; plus vaste, des documentaires filmiques dont Aline Caillet propose une th&eacute;orie esth&eacute;tique jusqu&rsquo;aux &laquo;&nbsp;narrations documentaires<sup><a href="«#_ftn8" name="_ftnref8" title="">[8]</a></sup>&nbsp;&raquo; identifi&eacute;es par Lionel Ruffel dans la litt&eacute;rature contemporaine. De m&ecirc;me, le paradigme du terrain<sup><a href="«#_ftn9" name="_ftnref9" title="">[9]</a></sup> d&eacute;passe largement cette sortie hors du studio radiophonique&nbsp;: Mathilde Roussign&eacute; propose ainsi une &laquo;&nbsp;anthropologie litt&eacute;raire du terrain<sup><a href="«#_ftn10" name="_ftnref10" title="">[10]</a></sup>&nbsp;&raquo;.</p> <p>&laquo;&nbsp;Les Pieds sur terre&nbsp;&raquo; s&rsquo;inscrit dans cet h&eacute;ritage d&rsquo;une tradition de documentaire radiophonique pour la radio publique. En proposant une parole &eacute;loign&eacute;e de la maison de la radio tant du point de vue g&eacute;ographique (couverture de l&rsquo;ensemble du territoire, du centre jusqu&rsquo;aux marges) que sociologique (le projet na&icirc;t de la volont&eacute; de donner la parole aux invisibles), l&rsquo;&eacute;mission rejoint cette d&eacute;finition du documentaire radiophonique comme exception face au fonctionnement en direct et en studio. &laquo;&nbsp;Les Pieds sur terre&nbsp;&raquo; propose en effet un dispositif rejoignant ce que Christophe Deleu nomme &laquo;&nbsp;la parole documentaire<sup><a href="«#_ftn11" name="_ftnref11" title="">[11]</a></sup>&nbsp;&raquo;, pour la distinguer d&rsquo;autres types de paroles d&rsquo;anonymes entendus &agrave; la radio. La &laquo;&nbsp;parole documentaire&nbsp;&raquo; est d&eacute;finie en ces termes : &laquo;&nbsp;sous la forme d&rsquo;une interview mont&eacute;e, le journaliste ou l&rsquo;animateur donne la parole &agrave; une personne racontant une exp&eacute;rience&nbsp;&raquo;. Sonia Kronlund a d&rsquo;ailleurs racont&eacute; la fabrique des &eacute;missions et cet art du montage &agrave; partir de plusieurs heures de rushs&nbsp;: &laquo;&nbsp;Nous montons &eacute;norm&eacute;ment tout en respectant scrupuleusement le fond de ce qu&rsquo;a dit la personne<sup><a href="«#_ftn12" name="_ftnref12" title="">[12]</a></sup>.&nbsp;&raquo; Le dispositif rejoint donc en bien des points le genre du documentaire radiophonique.</p> <p>Cependant, pour r&eacute;cent qu&rsquo;il soit, Christophe Deleu a bien montr&eacute; que le documentaire radiophonique &eacute;tait un genre hybride, r&eacute;sultant de &laquo;&nbsp;l&rsquo;addition d&rsquo;autres genres radiophoniques pr&eacute;existants<sup><a href="«#_ftn13" name="_ftnref13" title="">[13]</a></sup>&nbsp;&raquo;, et empruntant notamment au radioreportage. &laquo;&nbsp;Les Pieds sur terre&nbsp;&raquo; peut donc bien &ecirc;tre &eacute;galement qualifi&eacute;e d&rsquo;&eacute;mission de reportage, mais un reportage paradoxal, car plac&eacute; sous le signe de l&rsquo;absence de commentaire, du retrait du commentateur.</p> <h2>2. Un reportage &laquo;&nbsp;sans commentaire&nbsp;&raquo;</h2> <p>&nbsp;</p> <p>Cette expression, centrale dans l&rsquo;identit&eacute; de l&rsquo;&eacute;mission, souligne l&rsquo;originalit&eacute; de son dispositif en le distinguant d&rsquo;autres pratiques et genres radiophoniques. Et de fait, le radioreportage, par exemple, se d&eacute;finit d&rsquo;abord par la voix journalistique commentant ce qui est vu en s&rsquo;immergeant dans le r&eacute;el. La mention d&rsquo;un &laquo;&nbsp;reportage sans commentaire&nbsp;&raquo; rel&egrave;ve donc, <em>a priori</em>, de l&rsquo;oxymore. Du reportage, l&rsquo;&eacute;mission garde bien l&rsquo;&eacute;chapp&eacute;e hors du studio et le go&ucirc;t du terrain, dont t&eacute;moigne la captation de bruits du r&eacute;el, mais ne retient pas la pr&eacute;sence journalistique sur son terrain&nbsp;: ses commentaires sont supprim&eacute;s pour ne retenir que la voix des enqu&ecirc;t&eacute;&middot;es. Ces coupes au montage renforcent l&rsquo;impression d&rsquo;une parole livr&eacute;e sans m&eacute;diation, une id&eacute;e qui est centrale dans l&rsquo;identit&eacute; sonore et &eacute;thique de <w:sdt id="-1521154800" sdttag="goog_rdk_15"></w:sdt>l&rsquo;&eacute;mission, au point o&ugrave; l&rsquo;on pourrait se demander si la notion de &laquo;&nbsp;t&eacute;moignage&nbsp;&raquo; ne serait pas plus juste que celle de &laquo;&nbsp;reportage&nbsp;&raquo; pour d&eacute;crire le genre radiophonique en question.</p> <p>Or, en r&eacute;&eacute;coutant d&rsquo;anciens &eacute;pisodes des &laquo;&nbsp;Pieds sur terre&nbsp;&raquo;, on mesure &agrave; quel point cet &eacute;loignement vis-&agrave;-vis du radioreportage est en fait progressif, en s&rsquo;inspirant sans doute d&rsquo;&eacute;missions comme &laquo;&nbsp;Strip-Tease&nbsp;&raquo; pour l&rsquo;effacement des commentaires, et de &laquo;&nbsp;This American life&nbsp;&raquo; dans l&rsquo;attention port&eacute;e &agrave; ces narrations &agrave; la premi&egrave;re personne. Si la voix journalistique faisait partie de l&rsquo;&eacute;mission &agrave; ses d&eacute;buts, celle-ci est de plus en plus accidentelle dans les &eacute;pisodes r&eacute;cents (si l&rsquo;on met de c&ocirc;t&eacute; les enqu&ecirc;tes en s&eacute;rie &agrave; la premi&egrave;re personne &eacute;voqu&eacute;es en introduction). D&rsquo;ailleurs, en 2012 d&eacute;j&agrave;, dans la mise en livre, la voix disparaissait syst&eacute;matiquement des retranscriptions, &agrave; l&rsquo;image donc de l&rsquo;&eacute;volution de ce dispositif radiophonique. Dans &laquo;&nbsp;Henriette et Daniel, les cosmonautes de Ravel&nbsp;&raquo; (premi&egrave;re &laquo;&nbsp;nouvelle&nbsp;&raquo; du recueil), la retranscription &ndash; l&rsquo;&eacute;criture, plut&ocirc;t &ndash; efface ainsi la pr&eacute;sence de Sonia Kronlund, que l&rsquo;on peut pourtant entendre si l&rsquo;on r&eacute;&eacute;coute cet &eacute;pisode<sup><a href="«#_ftn14" name="_ftnref14" title="">[14]</a></sup> :</p> <blockquote> <p>DANIEL&nbsp;: C&rsquo;est pareil, moi. Je fais pas de diff&eacute;rence. Mais j&rsquo;ai quand m&ecirc;me vot&eacute; Le Pen, moi. Je ne sais pas exactement pourquoi. Pour l&rsquo;euro&hellip; Ils auraient d&ucirc; laisser le franc. Mettre l&rsquo;euro, moi &ccedil;a me pla&icirc;t pas beaucoup non plus&hellip; Et pis, ils ont laiss&eacute; les fronti&egrave;res ouvertes, je trouve &ccedil;a pas trop bien, moi, &agrave; mon avis&hellip;</p> <p>HENRIETTE&nbsp;: J&rsquo;ai pas vot&eacute; du tout, moi. Oh&nbsp;! non, je peux plus sortir. De toute mani&egrave;re j&rsquo;aurais vot&eacute; Le Pen aussi. Mais je peux pas dire pourquoi parce que je sais pas.</p> <p>DANIEL&nbsp;: Il y a du bon et du mauvais, c&rsquo;est toujours la m&ecirc;me chose. Parce que vous savez, j&rsquo;aime pas tellement la politique, moi. Je vote, c&rsquo;est tout. Le reste&hellip; J&rsquo;attends les r&eacute;sultats, c&rsquo;est tout<sup><a href="«#_ftn15" name="_ftnref15" title="">[15]</a></sup>.</p> </blockquote> <p><strong><img src="https://www.numerev.com/img/ck_3044_30_image-20240913115531-1.png" />Doc. 1&nbsp;&ndash; Extrait de&nbsp;: Sonia Kronlund (productrice), &laquo;&nbsp;Les Cosmonautes de Ravel : Henriette et Daniel&nbsp;&raquo;, Les Pieds sur terre, <em>France Culture</em>, premi&egrave;re diffusion le 4 ao&ucirc;t 2002. Enregistrement disponible en rediffusion sur le site de Radio France&nbsp;: <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-pieds-sur-terre/les-cosmonautes-de-ravel-henriette-et-daniel-r-8238098">https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-pieds-sur-terre/les-cosmonautes-de-ravel-henriette-et-daniel-r-8238098</a> (consult&eacute; le 15 ao&ucirc;t 2023).</strong></p> <p>On observe bien la mise en sourdine de la journaliste&nbsp;dans cette retranscription : les commentaires &agrave; valeur axiologique sont gomm&eacute;s (&laquo;&nbsp;c&rsquo;est quand m&ecirc;me un choix tr&egrave;s marqu&eacute;&nbsp;&raquo;, peut-on entendre dans l&rsquo;&eacute;mission), de m&ecirc;me que les coulisses de cette parole (les questions pos&eacute;es, &agrave; commencer par l&rsquo;initial<w:sdt id="-1004282675" sdttag="goog_rdk_18">e</w:sdt> &laquo;&nbsp;pour qui avez-vous vot&eacute;&nbsp;?&nbsp;&raquo;). Ce choix dans la mise en livre est repr&eacute;sentatif d&rsquo;une &eacute;volution g&eacute;n&eacute;rale de l&rsquo;&eacute;mission, qui, dans son format le plus courant, laisse moins place aujourd&rsquo;hui &agrave; cette restitution du moment de l&rsquo;enqu&ecirc;te pour privil&eacute;gier une parole non coup&eacute;e. Dans le recueil, la figuration de la journaliste sur le terrain est donc hors-champ et ne refait surface que de mani&egrave;re accidentelle, &agrave; l&rsquo;image de cette mention de &laquo;&nbsp;la dame<sup><a href="«#_ftn16" name="_ftnref16" title="">[16]</a></sup>&nbsp;&raquo;, appel&eacute;e plus loin &laquo;&nbsp;Sonia<sup><a href="«#_ftn17" name="_ftnref17" title="">[17]</a></sup>&nbsp;&raquo; dans la nouvelle &laquo;&nbsp;Ginette et Loulou&nbsp;&raquo;.</p> <p>Ce travail de montage rejoint une certaine conception de la voix comme lieu par excellence de la spontan&eacute;it&eacute;, de la fluidit&eacute; et du naturel. En proposant une &laquo;&nbsp;arch&eacute;ologie du livre de voix<sup><a href="«#_ftn18" name="_ftnref18" title="">[18]</a></sup>&nbsp;&raquo;, Maud Lecacheur a rappel&eacute; que le m&eacute;dium radiophonique avait red&eacute;fini l&rsquo;imaginaire de la voix et les valeurs qui lui sont associ&eacute;es, qui &eacute;taient &eacute;galement celles qu&rsquo;une grande partie de l&rsquo;histoire de la philosophie lui conf&eacute;rait&nbsp;: imm&eacute;diatet&eacute; et intuition, par opposition au discours construit, donc potentiellement mensonger. Cette r&eacute;partition de valeurs est au c&oelig;ur du projet de l&rsquo;&eacute;mission et se retrouve dans cette mise en livre, qui prend pour repoussoir le discours (du porte-parole) pour pr&eacute;f&eacute;rer la parole (de l&rsquo;anonyme). Le fait de monter la voix comme &eacute;tant livr&eacute;e de mani&egrave;re brute convoque aussi cet imaginaire d&rsquo;une parole intuitive et imm&eacute;diate, ce<w:sdt id="-805929558" sdttag="goog_rdk_21"> qui</w:sdt> r&eacute;sulte pourtant d&rsquo;une construction, d&rsquo;un travail, d&rsquo;un art du montage, voire d&rsquo;un truquage. Le retrait des questions construit l&rsquo;illusion d&rsquo;une parole spontan&eacute;e.</p> <p>De ce point de vue, la filiation avec l&rsquo;&eacute;mission de reportage culte &laquo;&nbsp;L&agrave;-bas si j&rsquo;y suis&nbsp;&raquo; est int&eacute;ressante. Sonia Kronlund rappelle r&eacute;guli&egrave;rement ses d&eacute;buts aupr&egrave;s de Daniel Mermet&nbsp;: elle vient de l&rsquo;&eacute;cole &laquo;&nbsp;L&agrave;-bas si j&rsquo;y suis&nbsp;&raquo;, et prolonge son souci de faire entendre les oubli&eacute;&middot;es sur une cha&icirc;ne de radio publique. Cette &eacute;mission de <em>France Inter</em>, de 1989 &agrave; 2014, avait pour slogan &laquo;&nbsp;plus pr&egrave;s des jetables que des notables&nbsp;&raquo;, rappelant l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t des &laquo;&nbsp;Pieds sur terre&nbsp;&raquo; pour les marges. Cette filiation c&ocirc;toie cependant un discours de diff&eacute;renciation, dans la pr&eacute;face de ce livre ou dans des entretiens&nbsp;: &laquo;&nbsp;je suis de celles qui ont d&eacute;but&eacute; avec Daniel Mermet mais je fais &quot;du Mermet&quot; sans les commentaires<sup><a href="«#_ftn19" name="_ftnref19" title="">[19]</a></sup>&nbsp;!&nbsp;&raquo; On a l&agrave; une mise &agrave; distance d&rsquo;un certain type de reportage et une distinction vis-&agrave;-vis du r&ocirc;le du commentateur engag&eacute; comme Daniel Mermet.</p> <p>Le &laquo;&nbsp;sans commentaire&nbsp;&raquo; affiche &eacute;galement un autre repoussoir, celui de la parole m&eacute;di&eacute;e par la figure de l&rsquo;expert, quel qu&rsquo;il soit. C&rsquo;est ce qui est dit dans cet extrait de la pr&eacute;face :</p> <blockquote> <p>De ces gens, qu&rsquo;on ne sait plus comment appeler &ndash; ex &laquo;&nbsp;vrais gens&nbsp;&raquo; devenus &laquo;&nbsp;France d&rsquo;en-bas&nbsp;&raquo;, puis r&eacute;cemment &laquo;&nbsp;France invisible&nbsp;&raquo; et maintenant &laquo;&nbsp;France d&rsquo;&agrave; c&ocirc;t&eacute;&nbsp;&raquo;, dont on peut au moins &ecirc;tre s&ucirc;r qu&rsquo;ils ne sont pas des people &ndash; la parole est rarement livr&eacute;e &laquo;&nbsp;seule&nbsp;&raquo; : il y a toujours quelque part un sociologue &ndash; ou pire un psychologue &ndash; pour l&rsquo;analyser, pour en d&eacute;crypter ou en interpr&eacute;ter le sens et, &agrave; d&eacute;faut de sociologue, un journaliste lyrique ou s&ucirc;r de son empathie. Dans Les Pieds sur Terre, au contraire, j&rsquo;ai laiss&eacute; les gens parler sans commentaire et tous les jours<sup><a href="«#_ftn20" name="_ftnref20" title="">[20]</a></sup>.</p> </blockquote> <p>Le &laquo;&nbsp;sans commentaire&nbsp;&raquo; permet donc de distinguer l&rsquo;&eacute;mission d&rsquo;autres pratiques du recueil de voix, comme celle initi&eacute;e par l&rsquo;entretien sociologique. Le travail-somme dirig&eacute; par Pierre <w:sdt id="928779629" sdttag="goog_rdk_22"></w:sdt>Bourdieu <em>La Mis&egrave;re du monde</em> est d&rsquo;ailleurs &eacute;voqu&eacute; pour mieux diff&eacute;rencier la d&eacute;marche radiophonique de cette analyse sociologique&nbsp;: &laquo;&nbsp;je ne suis ni historienne, ni sociologue et je n&rsquo;ai jamais cherch&eacute; &agrave; faire une suite &agrave; <em>La Mis&egrave;re du monde</em> de Pierre Bourdieu<sup><a href="«#_ftn21" name="_ftnref21" title="">[21]</a></sup>.&nbsp;&raquo;</p> <p>L&rsquo;absence de commentaire m&eacute;rite pourtant d&rsquo;&ecirc;tre nuanc&eacute;e. Chaque auditeur&middot;ice de l&rsquo;&eacute;mission sait que celle-ci commence syst&eacute;matiquement par une prise de parole de Sonia Kronlund&nbsp;: c&rsquo;est d&rsquo;ailleurs cette voix qui conf&egrave;re son unit&eacute; aux &eacute;pisodes, &agrave; la mani&egrave;re d&rsquo;Ira Glass, le producteur-star de l&rsquo;&eacute;mission &laquo;&nbsp;This American life&nbsp;&raquo; et ses fameux &laquo;&nbsp;prologues&nbsp;&raquo;. Ces minutes d&rsquo;ouverture recouvrent des fonctions vari&eacute;es, &agrave; commencer par la cr&eacute;ation d&rsquo;un horizon d&rsquo;attente, &agrave; la mani&egrave;re d&rsquo;une accroche. L&rsquo;&eacute;coute est alors souvent r&eacute;inscrite dans une th&eacute;matique plus large&nbsp;: en la reliant &agrave; une autre anecdote&nbsp;; en commen&ccedil;ant par une d&eacute;finition&nbsp;; en livrant quelques chiffres-cl&eacute;. L&rsquo;&eacute;coute est contextualis&eacute;e, en particulier lorsque l&rsquo;&eacute;pisode r&eacute;sonne avec une actualit&eacute; (&laquo;&nbsp;Sofya Rudeshko, histoire d&rsquo;un f&eacute;minicide&nbsp;&raquo;) ou un anniversaire (&laquo;&nbsp;Cl&eacute;ment M&eacute;ric&nbsp;: la prise de conscience &raquo;, rediffus&eacute; pour le dixi&egrave;me anniversaire de la mort du militant antifasciste). Cette introduction est &eacute;galement l&rsquo;occasion de livrer des informations sur les conditions de production et de diffusion&nbsp;de l&rsquo;&eacute;mission : nom du&middot;de la producteur&middot;ice d&eacute;l&eacute;gu&eacute;&middot;e, modification ou non des noms dans l&rsquo;&eacute;pisode, rediffusion. Enfin, le prologue se fait parfois espace d&rsquo;avertissements avant l&rsquo;&eacute;coute. Cela peut aller du conseil (tel &eacute;pisode ne doit pas &ecirc;tre mis entre de jeunes oreilles) jusqu&rsquo;au positionnement prenant des formes d&rsquo;engagement vari&eacute;es. L&rsquo;&eacute;mission se pr&eacute;sente ainsi comme faisant &oelig;uvre de r&eacute;paration symbolique et participant &agrave; un &eacute;lan de justice sur certains sujets (les f&eacute;minicides par exemple), quand elle va au contraire mettre &agrave; distance d&#39;autres propos recueillis. Certaines introductions revendiquent ainsi la neutralit&eacute; de l&rsquo;&eacute;mission vis-&agrave;-vis de la parole relay&eacute;e.&nbsp;Cet avertissement n&rsquo;&eacute;tant pas syst&eacute;matique, l&rsquo;affichage de neutralit&eacute; ponctuel dessine en creux des lignes &eacute;ditoriales. Ainsi, dans &laquo;&nbsp;Des femmes qui crient&nbsp;&raquo;, la deuxi&egrave;me histoire donne la parole &agrave; une femme qui a cri&eacute; des insultes contre des &eacute;lus lors d&rsquo;une manifestation de Gilets Jaunes. Sonia Kronlund rappelle alors&nbsp;:</p> <blockquote> <p>Je pr&eacute;cise une fois encore [&hellip;] que les opinions exprim&eacute;es par les personnes que nous rencontrons ne refl&egrave;tent pas forc&eacute;ment le point de vue de notre r&eacute;daction ni n&rsquo;engagent a fortiori celui de France culture et qu&rsquo;en l&rsquo;occurrence comme vous l&rsquo;entendrez l&rsquo;opinion de la deuxi&egrave;me personne a &eacute;t&eacute; jug&eacute;<w:sdt id="-1795669590" sdttag="goog_rdk_27">e</w:sdt> un d&eacute;lit<sup><a href="«#_ftn22" name="_ftnref22" title="">[22]</a></sup>.</p> </blockquote> <p>On rejoint l&agrave; encore la d&eacute;finition de &laquo;&nbsp;la parole documentaire&nbsp;&raquo;&nbsp;donn&eacute;e par Christophe Deleu, une parole, donc, encadr&eacute;e et ma&icirc;tris&eacute;e dans le sens d&rsquo;une ligne &eacute;ditoriale&nbsp;:</p> <blockquote> <p>Les propos qu&rsquo;on entend sont alors proches des r&eacute;cits de vie recueillis par les sociologues et les ethnologues. Mais la radio n&rsquo;est ni la sociologie, ni l&rsquo;ethnologie, elle poursuit d&rsquo;autres objectifs (int&eacute;resser, s&eacute;duire, distraire, captiver le public). Dans la plupart des cas, elle consid&egrave;re que donner la parole aux gens sous la forme d&rsquo;interviews ne suffit pas, et &eacute;labore des dispositifs qui encadrent cette parole afin de ma&icirc;triser le contenu et le sens du programme<sup><a href="«#_ftn23" name="_ftnref23" title="">[23]</a></sup>.</p> </blockquote> <p>De mani&egrave;re g&eacute;n&eacute;rale, le ton monocorde de Sonia Kronlund, fr&ocirc;lant parfois l&rsquo;ironie, semble aller dans le sens d&rsquo;une n&eacute;cessaire mise &agrave; distance des sujets, qui sont &eacute;galement mis sur un pied d&rsquo;&eacute;galit&eacute;. L&agrave; encore, le repoussoir&nbsp;semble &ecirc;tre ce &laquo;&nbsp;journaliste lyrique ou s&ucirc;r de son empathie<sup><a href="«#_ftn24" name="_ftnref24" title="">[24]</a></sup>&nbsp;&raquo; &eacute;voqu&eacute; dans la pr&eacute;face. Le recueil de voix prend donc une voie bien diff&eacute;rente de celle emprunt&eacute;e par nombre de dispositifs litt&eacute;raires relationnels qui instaurent un rapport au terrain h&eacute;ritant du tournant du <em>care</em> de la fin du <w:sdt id="-188379804" sdttag="goog_rdk_32"><w:sdt id="-327444938" sdttag="goog_rdk_33">XX</w:sdt></w:sdt>e si&egrave;cle, comme a pu le d&eacute;crire Mathilde Roussign&eacute;<sup><a href="«#_ftn25" name="_ftnref25" title="">[25]</a></sup>.</p> <p>Les commentaires introductifs qui pr&eacute;c&egrave;dent syst&eacute;matiquement l&rsquo;espace &laquo; sans commentaire&nbsp;&raquo; mettent &agrave; distance le lien empathique qui marque souvent le dispositif du recueil de voix. Ce dispositif, commentant et affichant l&rsquo;absence de commentaire &agrave; la fois, vise en fait &agrave; cr&eacute;er une &eacute;coute &eacute;galitaire de toutes les voix, tout en &eacute;non&ccedil;ant un ancrage &eacute;ditorial qui ne recueille pas, malgr&eacute; tout, toutes les voix de la m&ecirc;me mani&egrave;re.</p> <h2>3. Recueillir la parole des invisibles&nbsp;: livre de voix et projet politique</h2> <p>&nbsp;</p> <p>L&rsquo;essor du documentaire radiophonique, en particulier celui qui consiste en une collecte de t&eacute;moignages, rappelle plusieurs autres ph&eacute;nom&egrave;nes marquant l&rsquo;&eacute;poque contemporaine, du &laquo;&nbsp;tournant ethnographique&nbsp;&raquo; (Hal Foster<sup><a href="«#_ftn26" name="_ftnref26" title="">[26]</a></sup>) &agrave; l&rsquo;&laquo;&nbsp;&egrave;re du t&eacute;moin&nbsp;&raquo; (Annette <w:sdt id="468798278" sdttag="goog_rdk_36"></w:sdt>Wievior<w:sdt id="-3750555" sdttag="goog_rdk_39">k</w:sdt>a<sup><a href="«#_ftn27" name="_ftnref27" title="">[27]</a></sup>). &Agrave; la crois&eacute;e des m&eacute;thodes d&rsquo;entretien h&eacute;rit&eacute;es des sciences sociales et de l&rsquo;approche journalistique du terrain, le recueil radiophonique des voix peut &ecirc;tre rapproch&eacute; de ce que l&rsquo;on nomme d&eacute;sormais, du c&ocirc;t&eacute; de la litt&eacute;rature et dans la lign&eacute;e de l&rsquo;&oelig;uvre de Svetlana Alexievitch, les &laquo;&nbsp;livres de voix<sup><a href="«#_ftn28" name="_ftnref28" title="">[28]</a></sup>&nbsp;&raquo;. La litt&eacute;rature contemporaine est en effet marqu&eacute;e par un tropisme de la voix&nbsp;: Maud Lecacheur a soulign&eacute; le recours de nombre d&rsquo;&eacute;crivain&middot;es au magn&eacute;tophone et d&eacute;crit leur souci de r&eacute;int&eacute;gration de la voix dans le texte. Cette proximit&eacute; pr&eacute;cise une parent&eacute; entre r&eacute;colte radiophonique des voix et formes litt&eacute;raires qui avait d&eacute;j&agrave; &eacute;t&eacute; soulign&eacute;e, par exemple par Fanny Dujardin<sup><a href="«#_ftn29" name="_ftnref29" title="">[29]</a></sup>, en rapprochant le documentaire radiophonique du roman polyphonique et plurilingue d&eacute;crit par Bakhtine. Et le livre-anniversaire des Pieds sur terre manifeste ce lien entre une forme litt&eacute;raire et un projet radiophonique&nbsp;: le geste du passage de l&rsquo;oral &agrave; l&rsquo;&eacute;crit traduit une proximit&eacute; esth&eacute;tique et politique entre le livre de voix et l&#39;&eacute;mission. D&rsquo;ailleurs, le moment de publication (2012) co&iuml;ncide avec l&rsquo;entr&eacute;e dans une d&eacute;cennie o&ugrave; la publication des livres de voix s&rsquo;intensifie, et la maison d&rsquo;&eacute;dition du livre-anniversaire est &eacute;galement celle qui traduit les livres de Svetlana Alexievitch en fran&ccedil;ais &agrave; partir de 2013.</p> <p>Un singulier renversement a lieu&nbsp;: si l&rsquo;&eacute;coute sans image d&eacute;cuplait l&rsquo;imagination visuelle, la lecture, elle, ira de pair avec la convocation d&rsquo;un imaginaire vocal et auditif riche. Sonia Kronlund tient &agrave; ces &laquo;&nbsp;portraits de langue&nbsp;&raquo;, ou &laquo;&nbsp;portraits de voix&nbsp;&raquo;, comme elle les nomme dans son introduction<sup><a href="«#_ftn30" name="_ftnref30" title="">[30]</a></sup>. C&rsquo;est ce que mobilisent les didascalies en t&ecirc;te de chaque reportage s&eacute;lectionn&eacute; dans le livre. Ces chapeaux permettent de donner des &eacute;l&eacute;ments de contexte, mais surtout de renseigner les lecteur&middot;ices sur les timbres des voix&nbsp;: les &laquo;&nbsp;voix enjou&eacute;es&nbsp;&raquo; de Philippe et Didier (&laquo;&nbsp;Les Contis&nbsp;&raquo;), la &laquo;&nbsp;voix tendue, en col&egrave;re, pas loin du cri&nbsp;&raquo; de Kamel (&laquo;&nbsp;Caterpillar&nbsp;&raquo;), la &laquo;&nbsp;voix sans cesse au bord des larmes, bris&eacute;e&nbsp;&raquo; de Kahina &eacute;voquant le f&eacute;minicide de sa s&oelig;ur ou encore la &laquo;&nbsp;tr&egrave;s belle diction&nbsp;&raquo; de Yacouba. Toute une palette d&rsquo;adjectifs est ainsi mobilis&eacute;e pour caract&eacute;riser la voix avant la lecture, pour faire entendre le texte. Le livre rend compte d&rsquo;une diversit&eacute; de dialectes et accents (accent alsacien du tenancier d&rsquo;un tabac dans &laquo;&nbsp;Les lapins m&acirc;les&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;tr&egrave;s fort accent nivernais&nbsp;&raquo; de Denise qui &laquo;&nbsp;roule les r&nbsp;&raquo; ou le &laquo;&nbsp;l&eacute;ger accent berb&egrave;re&nbsp;&raquo; de Mustafa dans &laquo;&nbsp;Maison Borloo, maison fiasco&nbsp;&raquo;), mais aussi de sociolectes (le chapeau de &laquo;&nbsp;C&rsquo;est quoi ton 06&nbsp;?&nbsp;&raquo; &eacute;voque, non sans risquer une pr&eacute;sentation assez caricaturale des personnages, le &laquo;&nbsp;parl&eacute; wesh wesh &raquo; des jeunes rencontr&eacute;s). &Agrave; cette diversit&eacute; de la parole se superpose une vari&eacute;t&eacute; g&eacute;ographique (villes, banlieues, ruralit&eacute;) et th&eacute;matique&nbsp;: on passe de la fermeture d&rsquo;une usine dans le Pas-de-Calais (&laquo;&nbsp;Christian&nbsp;&raquo;) au syst&egrave;me carc&eacute;ral (&laquo;&nbsp;Mohammed, d&eacute;tenu &agrave; vie&nbsp;&raquo;), de la condition des agriculteurs dans la Ni&egrave;vre (&laquo;&nbsp;&Eacute;ric et son ami&nbsp;&raquo;) au racisme (&laquo;&nbsp;Yacuba&nbsp;&raquo;) ou &agrave; l&rsquo;addiction (&laquo;&nbsp;Sur la corde raide&nbsp;&raquo;).</p> <p>Cette attention &agrave; la diversit&eacute; dans l&rsquo;&eacute;chantillonnage livresque des &laquo;&nbsp;Pieds sur terre&nbsp;&raquo; permet d&rsquo;ailleurs de balayer le partage qui peut exister parfois entre litt&eacute;rature l&eacute;gitime et r&eacute;cits anonymes ne pouvant acc&eacute;der &agrave; la forme-livre. Derri&egrave;re un projet valorisant imm&eacute;diatet&eacute; et absence de m&eacute;diation, Marie-Jeanne Zenetti a ainsi mis en &eacute;vidence dans le projet du &laquo;&nbsp;Parlement des invisibles&nbsp;&raquo; et la collection &laquo;&nbsp;Raconter la vie&nbsp;&raquo;, initi&eacute;s par l&rsquo;historien Pierre Rosanvallon, la pr&eacute;sence d&rsquo;une hi&eacute;rarchisation des formes de r&eacute;cit. Elle a montr&eacute; que &laquo;&nbsp;le passage &agrave; la collection papier de certains textes initialement publi&eacute;s en ligne ent&eacute;rin[ait] ce geste de partage entre litt&eacute;rature et non-litt&eacute;rature<sup><a href="«#_ftn31" name="_ftnref31" title="">[31]</a></sup>&nbsp;&raquo;. Si le livre reste un horizon enviable de la radio, un moyen de marquer symboliquement un anniversaire, d&rsquo;en livrer les dessous par une pr&eacute;face explicative, il ne semble pas &ecirc;tre le lieu d&rsquo;une hi&eacute;rarchisation des paroles, au contraire.</p> <p>Mobilisant tant&ocirc;t l&rsquo;image du ch&oelig;ur antique, tant&ocirc;t celle du parlement, les &eacute;critures contemporaines tissant les voix recueillies s&rsquo;&eacute;noncent bien souvent aux c&ocirc;t&eacute;s d&rsquo;un projet politique qui se r&eacute;aliserait dans le livre. Sylvie Servoise a rappel&eacute; les liens entre polyphonie narrative et enjeux d&eacute;mocratiques, notamment avec ces trois piliers&nbsp;:</p> <blockquote> <p>[L]a polyphonie permet de repr&eacute;senter la pluralit&eacute; comme fabrique du social, au sens o&ugrave; elle en tient lieu (repr&eacute;sentation-substitution) ; elle contribue &agrave; rendre visible ce qui ne l&rsquo;est pas ou pas assez (repr&eacute;sentation-monstration) ; elle participe &agrave; l&rsquo;effort d&rsquo;intelligibilit&eacute; du social, &agrave; la clarification des enjeux et modalit&eacute;s des d&eacute;bats et des conflits (repr&eacute;sentation-&eacute;lucidation)<sup><a href="«#_ftn32" name="_ftnref32" title="">[32]</a></sup>.</p> </blockquote> <p>La forme-livre des &laquo;&nbsp;Pieds sur terre&nbsp;&raquo;, prolongement de l&rsquo;&eacute;mission, se veut pr&eacute;cis&eacute;ment &ecirc;tre cet espace textuel de repr&eacute;sentation, de diversit&eacute;, y compris dans ce que cela implique &laquo;&nbsp;de d&eacute;bat et m&ecirc;me de dissensus&nbsp;&raquo;, pour reprendre les termes de Sylvie Servoise. Ainsi, plusieurs t&eacute;moignages du recueil entrent en r&eacute;sonnance par le partage d&rsquo;une th&eacute;matique commune mais en exprimant des points de vue diff&eacute;rents. C&rsquo;est le cas de la prostitution, qui prend des visages bien diff&eacute;rents, entre m&eacute;tier choisi et revendiqu&eacute; (&laquo;&nbsp;Sylvie et son camion&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Sonia la pute&nbsp;&raquo;) et exploitation dans le cadre d&rsquo;un parcours migratoire (&laquo;&nbsp;Les filles de Belleville&nbsp;&raquo;).</p> <p>La pr&eacute;face, en donnant l&rsquo;occasion &agrave; la productrice de raconter la gen&egrave;se de l&rsquo;&eacute;mission, permet d&rsquo;expliciter le projet politique de l&rsquo;&eacute;mission, qui s&rsquo;inscrit en r&eacute;action &agrave; la pr&eacute;sence de Jean-Marie Le Pen au second tour des &eacute;lections pr&eacute;sidentielles de 2002 :</p> <blockquote> <p>[Q]ui &eacute;taient-ils, TOUS CES GENS qui avaient vot&eacute; pour Jean-Marie Le Pen ? D&rsquo;o&ugrave; venaient-ils, que voulaient-ils et pourquoi avaient-ils fait CELA ? C&rsquo;est ainsi qu&rsquo;est n&eacute;e l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une &eacute;mission quotidienne sur France Culture o&ugrave; la parole serait donn&eacute;e &agrave; des anonymes [&hellip;] en grande partie pour comprendre comment on en &eacute;tait arriv&eacute; l&agrave;<sup><a href="«#_ftn33" name="_ftnref33" title="">[33]</a></sup>.</p> </blockquote> <p>Il y a l&agrave; l&rsquo;affichage d&rsquo;une parent&eacute; tr&egrave;s nette, dans la naissance du projet, entre voix d&eacute;mocratique et voix sur les ondes, cette proximit&eacute; se manifestant &agrave; l&rsquo;occasion d&rsquo;un temps &eacute;lectoral. La th&eacute;matique de la mont&eacute;e de l&rsquo;extr&ecirc;me-droite est en effet un fil rouge qui relie bien des nouvelles du recueil entre elles. D&rsquo;ailleurs, cet int&eacute;r&ecirc;t est mis en abyme dans la remarque de St&eacute;phane, tenancier alsacien d&rsquo;un tabac-presse au c&oelig;ur de la nouvelle intitul&eacute;e &laquo;&nbsp;Les lapins m&acirc;les&nbsp;&raquo;&nbsp;: &laquo;&nbsp;Le 21 avril, c&rsquo;&eacute;tait pas une r&eacute;v&eacute;lation, pas du tout, une continuation ici. Les m&eacute;dias se penchent vers nous par rapport &agrave; &ccedil;a, mais je pense qu&rsquo;ils auraient d&ucirc; le faire bien avant<sup><a href="«#_ftn34" name="_ftnref34" title="">[34]</a></sup>&nbsp;&raquo;. Cette prise de parole, retranscrite dans le recueil, nuance la vision du second tour comme d&rsquo;un choc &ndash; le choc serait plut&ocirc;t le r&eacute;sultat d&rsquo;un aveuglement de classe, et, en l&rsquo;occurrence, d&rsquo;un aveuglement m&eacute;diatique. C&rsquo;est bien &agrave; ce d&eacute;faut de repr&eacute;sentativit&eacute; que l&rsquo;&eacute;mission entend rem&eacute;dier.</p> <p>D&rsquo;ailleurs, la filiation avec l&rsquo;&eacute;mission am&eacute;ricaine &laquo;&nbsp;This American life&nbsp;&raquo; s&rsquo;est &eacute;galement affirm&eacute;e dans un contexte similaire. En 2012, &agrave; l&rsquo;occasion des &eacute;lections pr&eacute;sidentielles am&eacute;ricaines, Sonia Kronlund s&eacute;lectionne des &eacute;pisodes de l&rsquo;&eacute;mission, les fait traduire et les diffuse &agrave; l&rsquo;heure des &laquo;&nbsp;Pieds sur terre&nbsp;&raquo;. Armes &agrave; feu, criminalit&eacute;, avortement&nbsp;: on retrouve dans cet &eacute;chantillonnage les &laquo;&nbsp;grandes questions au c&oelig;ur du scrutin<sup><a href="«#_ftn35" name="_ftnref35" title="">[35]</a></sup>&nbsp;&raquo; am&eacute;ricain. Ce projet t&eacute;moigne de la proximit&eacute; entre les deux &eacute;missions, et montre &agrave; quel point cette proximit&eacute; se noue dans le moment d&eacute;mocratique de l&rsquo;&eacute;lection, tout comme le projet des &laquo;&nbsp;Pieds sur terre&nbsp;&raquo; naissait apr&egrave;s les &eacute;lections de 2002. La n&eacute;cessit&eacute; de faire entendre les voix semble donc d&rsquo;autant plus urgente que celles-ci s&rsquo;expriment dans le dispositif d&eacute;mocratique du vote.</p> <p>M&ecirc;me si l&rsquo;&eacute;mission am&eacute;ricaine n&rsquo;&eacute;tait pas une inspiration directe pour la productrice, sa d&eacute;couverte dans les ann&eacute;es 2000 contribua de fait &agrave; orienter l&rsquo;&eacute;volution du projet, notamment en repla&ccedil;ant la narration, ou <em>storytelling</em>, au centre. Il est d&rsquo;ailleurs int&eacute;ressant de rebondir sur ce terme en r&eacute;inscrivant le projet de l&rsquo;&eacute;mission dans les r&eacute;cents travaux autour du partage des r&eacute;cits entre litt&eacute;rature et <em>storytelling</em>, car il y a l&agrave; un d&eacute;placement. Rapha&euml;lle Guid&eacute;e a montr&eacute; tous les suppos&eacute;s de ce &laquo;&nbsp;conte contemporain&nbsp;&raquo; qui voudrait opposer la litt&eacute;rature comme contre-r&eacute;cit alternatif &agrave; un vulgaire <em>storytelling</em> per&ccedil;u comme pur outil de propagande sans pouvoir de mobilisation<sup><a href="«#_ftn36" name="_ftnref36" title="">[36]</a></sup>. Or cette binarit&eacute; n&rsquo;est pas rejou&eacute;e ici, sans doute parce que la radio met en place d&rsquo;autres sch&eacute;mas de l&eacute;gitimation que ceux du champ litt&eacute;raire. En s&rsquo;inscrivant dans la continuit&eacute; de l&rsquo;&eacute;mission am&eacute;ricaine et en reprenant &agrave; son compte, de mani&egrave;re positive, l&rsquo;expression de <em>storytelling</em>, la productrice de l&rsquo;&eacute;mission s&rsquo;inscrit dans une croyance dans l&rsquo;effet d&eacute;mocratique du r&eacute;cit de soi, et de l&rsquo;&eacute;coute des autres. Trouver la bonne histoire et rendre plaisante l&rsquo;&eacute;coute, notamment par le montage, ne semble pas contredire l&rsquo;ambition politique r&eacute;affirm&eacute;e semaine apr&egrave;s semaine par l&rsquo;&eacute;mission.</p> <p><em>Les Pieds sur terre</em> s&rsquo;apparente donc au livre de voix et, comme cette forme litt&eacute;raire marqu&eacute;e par la polyphonie, il entreprend de repr&eacute;senter le r&eacute;el dans sa pluralit&eacute;, dans ce qui est habituellement invisibilis&eacute;, et dans un effort d&rsquo;&eacute;lucidation de celui-ci, pour reprendre les points mentionn&eacute;s par Sylvie Servoise. Cet enjeu politique m&eacute;rite d&rsquo;&ecirc;tre replac&eacute; dans le cadre de la &laquo;&nbsp;mission de service publique&nbsp;&raquo; du projet. L&rsquo;article de Christophe Deleu, &laquo;&nbsp;Y a-t-il une sp&eacute;cificit&eacute; du service public en mati&egrave;re radiophonique&nbsp;?&nbsp;&raquo;, met en avant le fait que les trois genres radiophoniques que sont la cr&eacute;ation, la fiction et le documentaire s&rsquo;entendent exclusivement sur le service public et s&rsquo;inscrivent dans une certaine conception de l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t g&eacute;n&eacute;ral<sup><a href="«#_ftn37" name="_ftnref37" title="">[37]</a></sup>&nbsp;: &laquo;&nbsp;[c]es trois genres ont r&eacute;ussi &agrave; se d&eacute;velopper en raison des missions qui ont &eacute;t&eacute; attribu&eacute;es &agrave; la radio par les pouvoirs publics&nbsp;&raquo;. Leur point commun, nous indique le chercheur, est de s&rsquo;&eacute;loigner de la vocation de la radio comme m&eacute;dia du direct. Mais ces genres restent rares, y compris sur ces cha&icirc;nes publiques, comme l&rsquo;indique le titre d&rsquo;un r&eacute;cent article des Inrocks qualifiant &laquo;&nbsp;Les Pieds sur terre&nbsp;&raquo; d&rsquo;&eacute;mission &laquo;&nbsp;&agrave; contre-courant<sup><a href="«#_ftn38" name="_ftnref38" title="">[38]</a></sup>&nbsp;&raquo;. Dans cet entretien, Sonia Kronlund pointe le lien entre cet h&eacute;ritage d&rsquo;une radio de service public et l&rsquo;ambition polyphonique de l&rsquo;&eacute;mission, en parlant de radio &laquo;&nbsp;concernante&nbsp;&raquo;, de &laquo;&nbsp;m&eacute;dia de proximit&eacute;&nbsp;&raquo; ou encore de &laquo;&nbsp;journalisme de service public&nbsp;&raquo;. L&rsquo;article de Christophe Deleu s&rsquo;ouvrait sur la question du podcast, qui semble aujourd&rsquo;hui &ecirc;tre un nouveau lieu, aux c&ocirc;t&eacute;s de la radio publique, pour le documentaire radiophonique. Il n&rsquo;est pas anodin que &laquo;&nbsp;Les Pieds sur terre&nbsp;&raquo; soit devenu l&rsquo;une des &eacute;missions les plus podcast&eacute;es de la cha&icirc;ne<sup><a href="«#_ftn39" name="_ftnref39" title="">[39]</a></sup>.</p> <p>&nbsp;</p> <p>En explorant l&rsquo;ambigu&iuml;t&eacute; g&eacute;n&eacute;rique qui caract&eacute;rise l&rsquo;&eacute;mission, entre reportage et documentaire, sans l<w:sdt id="1900553159" sdttag="goog_rdk_45">a</w:sdt> r&eacute;soudre compl&egrave;tement, et en &eacute;tudiant la proximit&eacute; de l&rsquo;&eacute;mission avec le livre de voix, manifest&eacute;e &agrave; l&rsquo;occasion de sa mise en recueil, le lien entre dispositif d&rsquo;&eacute;coute/de lecture et projet politique se pr&eacute;cise. L&rsquo;attention port&eacute;e &agrave; la pluralit&eacute; des voix s&rsquo;inscrit dans un contexte politique sp&eacute;cifique, au sein duquel l&rsquo;&eacute;mission entend combler un d&eacute;faut de repr&eacute;sentativit&eacute; des voix sur les ondes. En s&rsquo;inscrivant dans la filiation d&rsquo;&eacute;missions comme &laquo;&nbsp;L&agrave;-bas si j&rsquo;y suis&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;This American life&nbsp;&raquo; ou encore &laquo;&nbsp;Strip-tease&nbsp;&raquo;, l&rsquo;&eacute;mission cr&eacute;e un dispositif radiophonique singulier marqu&eacute; par la diversit&eacute; et unifi&eacute; par la voix de Sonia Kronlund, entre pr&eacute;sence et retrait du commentaire.</p> <p>Notons que le vingti&egrave;me anniversaire, en 2022, n&rsquo;a pas donn&eacute; lieu &agrave; un second livre-anniversaire, mais fut f&ecirc;t&eacute; par une s&eacute;lection de trois s&eacute;ries d&rsquo;&eacute;pisodes, dont l&rsquo;une, &laquo;&nbsp;La s&eacute;lection des auditeurs et des auditrices&nbsp;&raquo;, r&eacute;sultait d&rsquo;un vote des auditeur&middot;ices sur les r&eacute;seaux sociaux de l&rsquo;&eacute;mission<sup><a href="«#_ftn40" name="_ftnref40" title="">[40]</a></sup>. Cela t&eacute;moigne certainement d&rsquo;un nouveau type de lien avec auditeur&middot;ices via le podcast qui, on le sait, modifie la r&eacute;ception du documentaire radiophonique. Sans doute est-ce aussi le signe d&rsquo;un affranchissement du documentaire sonore vis-&agrave;-vis du livre. Mais Sonia Kronlund se tourne &eacute;galement vers d&rsquo;autres projets, qui s&rsquo;autonomisent encore davantage du format radiophonique originel des <em>Pieds sur terre</em>. Sa mise en film et en livre d&rsquo;un &eacute;pisode qui la marqua particuli&egrave;rement, intitul&eacute; &laquo;&nbsp;L&rsquo;homme aux mille visages<sup><a href="«#_ftn41" name="_ftnref41" title="">[41]</a></sup>&nbsp;&raquo;, histoire d&rsquo;un faux m&eacute;decin menant une double vie, montre &agrave; nouveau la plasticit&eacute; des histoires recueillies entre divers supports. La non-fiction semble aujourd&rsquo;hui particuli&egrave;rement propice aux circulations entre les ondes, le papier et les &eacute;crans.</p> <h2>Notes</h2> <p>&nbsp;</p> <div> <div id="ftn1"> <p><sup><a href="«#_ftnref1" name="_ftn1" title="">[1]</a></sup> L. D<w:sdt id="-172342389" sdttag="goog_rdk_81">emanze</w:sdt>, <em>Un Nouvel &acirc;ge de l&rsquo;enqu&ecirc;te</em>, Paris, Jos&eacute; Corti, coll. &laquo;&nbsp;Les Essais&nbsp;&raquo;, 2019.</p> </div> <div id="ftn2"> <p><sup><a href="«#_ftnref2" name="_ftn2" title="">[2]</a></sup> D. M<w:sdt id="2051330082" sdttag="goog_rdk_82">ermet</w:sdt>, <em>L&agrave;-bas si j&rsquo;y suis. Carnets de route</em>, Paris, La D&eacute;couverte, 1999.</p> </div> <div id="ftn3"> <p><sup><a href="«#_ftnref3" name="_ftn3" title="">[3]</a></sup> Voir <w:sdt id="193819545" sdttag="goog_rdk_84">M.</w:sdt> Lecacheur, &laquo;&nbsp;La litt&eacute;rature sur &eacute;coute&nbsp;: recueillir la parole d&rsquo;autrui de Georges Perec &agrave; Olivia Rosenthal&nbsp;&raquo;, th&egrave;se men&eacute;e sous la direction de L. D<w:sdt id="1587263818" sdttag="goog_rdk_86">emanze</w:sdt>, soutenue en 2022, ENS de Lyon.</p> </div> <div id="ftn4"> <p><sup><a href="«#_ftnref4" name="_ftn4" title="">[4]</a></sup> Explicitation de r&eacute;f&eacute;rences qui font partie de l&rsquo;identit&eacute; sonore des &laquo;&nbsp;Pieds sur terre&nbsp;&raquo;, telle que <w:sdt id="-1094935699" sdttag="goog_rdk_87">la </w:sdt>r&eacute;plique du film <em>Libert&eacute;, la nuit </em>et prononc&eacute;e par Jean Pierre L&eacute;aud, accroche de l&rsquo;&eacute;mission devenant seuil du livre.</p> </div> <div id="ftn5"> <p><sup><a href="«#_ftnref5" name="_ftn5" title="">[5]</a></sup> S. K<w:sdt id="405579690" sdttag="goog_rdk_90">ronlund</w:sdt>, <em>Les pieds sur terre : nouvelles du r&eacute;el</em>, Arles, Actes sud, 2012, p.&nbsp;17.</p> </div> <div id="ftn6"> <p><sup><a href="«#_ftnref6" name="_ftn6" title="">[6]</a></sup> C<w:sdt id="2140522200" sdttag="goog_rdk_91">. </w:sdt>D<w:sdt id="-1323198207" sdttag="goog_rdk_93">eleu</w:sdt>, <em>Le documentaire radiophonique</em>, Paris, L&rsquo;Harmattan, coll. &laquo;&nbsp;M&eacute;moires de radio&nbsp;&raquo;, 2013, &laquo;&nbsp;Introduction&nbsp;&raquo;.</p> </div> <div id="ftn7"> <p><sup><a href="«#_ftnref7" name="_ftn7" title="">[7]</a></sup> A. Caillet, <em>Dispositifs critiques. Le documentaire, du cin&eacute;ma aux arts visuels</em>, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. &laquo;&nbsp;Arts contemporains&nbsp;&raquo;, 2014. Introduction intitul&eacute;e &laquo;&nbsp;L&rsquo;espace du documentaire&nbsp;&raquo;, p.&nbsp;9.</p> </div> <div id="ftn8"> <p><sup><a href="«#_ftnref8" name="_ftn8" title="">[8]</a></sup> L. Ruffel, &laquo;&nbsp;Un r&eacute;alisme contemporain : les narrations documentaires&nbsp;&raquo;, <em>Litt&eacute;rature</em>, n&deg;166, &laquo;&nbsp;Usages du document en litt&eacute;rature&nbsp;&raquo;, 2012, p.&nbsp;13-25, <a href="https://www.cairn.info/revue-litterature-2012-2-page-13.htmdi%C3%A8sere6no6">https://www.cairn.info/revue-litterature-2012-2-page-13.htmdi%C3%A8sere6no6</a>. Consult&eacute; le 6 f&eacute;vrier 2024.</p> </div> <div id="ftn9"> <p><sup><a href="«#_ftnref9" name="_ftn9" title="">[9]</a></sup> A. James et D. Viart, &laquo;&nbsp;Les litt&eacute;ratures de terrain&nbsp;&raquo;, <em>Revue critique de fixxion fran&ccedil;aise contemporaine</em>, n&deg;18, 2019, <a href="https://journals.openedition.org/fixxion/1254">https://journals.openedition.org/fixxion/1254</a>. Consult&eacute; le 6 f&eacute;vrier 2024.</p> </div> <div id="ftn10"> <p><sup><a href="«#_ftnref10" name="_ftn10" title="">[10]</a></sup> M. Roussign&eacute;, <em>Terrain et litt&eacute;rature, nouvelles approches</em>, Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, 2023.</p> </div> <div id="ftn11"> <p><sup><a href="«#_ftnref11" name="_ftn11" title="">[11]</a></sup> C. D<w:sdt id="-626700533" sdttag="goog_rdk_95">eleu</w:sdt>, <em>Les anonymes &agrave; la radio : usages, fonctions et port&eacute;e de leur parole</em>, Bruxelles, De Boeck, 2006, p.&nbsp;163. Christophe Deleu distingue trois types de dispositifs radiophoniques d&rsquo;octroi de la parole : la parole forum ; la parole divan&nbsp;; la parole documentaire. Il consacre &agrave; cette derni&egrave;re la quatri&egrave;me partie de son ouvrage.</p> </div> <div id="ftn12"> <p><sup><a href="«#_ftnref12" name="_ftn12" title="">[12]</a></sup> G. C<w:sdt id="-1658908754" sdttag="goog_rdk_96">ourchelle</w:sdt>, <em>Les coulisses de la radio</em>, Paris, &Eacute;ditions du Ch&ecirc;ne, 2015.</p> </div> <div id="ftn13"> <p><sup><a href="«#_ftnref13" name="_ftn13" title="">[13]</a></sup> C. D<w:sdt id="-1980527091" sdttag="goog_rdk_98">eleu</w:sdt>, <em>Le documentaire radiophonique, op. cit.</em>, &laquo;&nbsp;Introduction&nbsp;&raquo;.</p> </div> <div id="ftn14"> <p><sup><a href="«#_ftnref14" name="_ftn14" title="">[14]</a></sup> D&rsquo;abord diffus&eacute; le 04/09/2002, l&rsquo;&eacute;pisode est disponible puisqu&rsquo;il a fait l&rsquo;objet d&rsquo;une rediffusion le 06/07/2015&nbsp;: <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-pieds-sur-terre/les-cosmonautes-de-ravel-henriette-et-daniel-r-8238098">https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-pieds-sur-terre/les-cosmonautes-de-ravel-henriette-et-daniel-r-8238098</a>. Consult&eacute; le 15 ao&ucirc;t 2023.</p> </div> <div id="ftn15"> <p><sup><a href="«#_ftnref15" name="_ftn15" title="">[15]</a></sup> S. K<w:sdt id="143705063" sdttag="goog_rdk_101">ronlund</w:sdt>, <em>Les pieds sur terre, op.&nbsp;cit.</em>, p.&nbsp;36.</p> </div> <div id="ftn16"> <p><sup><a href="«#_ftnref16" name="_ftn16" title="">[16]</a></sup> <em>Ibid.,</em> p.&nbsp;91.</p> </div> <div id="ftn17"> <p><sup><a href="«#_ftnref17" name="_ftn17" title="">[17]</a></sup> <em>Ibid.,</em> p.&nbsp;95.</p> </div> <div id="ftn18"> <p><sup><a href="«#_ftnref18" name="_ftn18" title="">[18]</a></sup> M. L<w:sdt id="-796679801" sdttag="goog_rdk_102">ec</w:sdt><w:sdt id="-1794430318" sdttag="goog_rdk_105">acheur</w:sdt>, &laquo;&nbsp;Une arch&eacute;ologie du livre de voix&nbsp;&raquo; dans <w:sdt id="2133126241" sdttag="goog_rdk_106">&laquo;&nbsp;Livres de voix. Narrations pluralistes et d&eacute;mocratie.&nbsp;&raquo;</w:sdt><w:sdt id="-993489923" sdttag="goog_rdk_107">, </w:sdt>Alexandre Gefen &amp; Fr&eacute;d&eacute;rique Leichter-Flack (dir.), <w:sdt id="249473448" sdttag="goog_rdk_112">Fabula</w:sdt>, 2022, <a href="https://www.fabula.org/colloques/document8102.php">https://www.fabula.org/colloques/document8102.php</a>. Consult&eacute; le 6 janvier 2024.</p> </div> <div id="ftn19"> <p><sup><a href="«#_ftnref19" name="_ftn19" title="">[19]</a></sup> G. C<w:sdt id="-522784817" sdttag="goog_rdk_114">ourchelle</w:sdt>, <em>Les coulisses de la radio, op. cit.</em>, p.&nbsp;98.</p> </div> <div id="ftn20"> <p><sup><a href="«#_ftnref20" name="_ftn20" title="">[20]</a></sup> S. K<w:sdt id="1211536131" sdttag="goog_rdk_116">ronlund</w:sdt>, <em>Les pieds sur terre, op.&nbsp;cit.</em>, p.&nbsp;13.</p> </div> <div id="ftn21"> <p><sup><a href="«#_ftnref21" name="_ftn21" title="">[21]</a></sup> S. K<w:sdt id="1084570576" sdttag="goog_rdk_117">ronlund</w:sdt>, i<em>bid.,</em> p.&nbsp;12. Contre ce fantasme de la parole brute, Pierre Bourdieu insiste en effet, dans le chapitre &laquo;&nbsp;Comprendre&nbsp;&raquo; de <em>La Mis&egrave;re du monde</em>, sur la n&eacute;cessit&eacute; de travailler la transcription du t&eacute;moignage en accompagnant les paroles confi&eacute;es, affirmant que &laquo;&nbsp;ce n&rsquo;est pas donner r&eacute;ellement la parole &agrave; ceux qui ne l&rsquo;ont pas habituellement pas que livrer telle quelle leur parole&nbsp;&raquo; (P. Bourdieu (dir.), <em>La Mis&egrave;re du monde</em>, Paris, &Eacute;ditions du Seuil, coll.&nbsp;&laquo; Libre examen. Documents&nbsp;&raquo;, 1993, p.&nbsp;921).</p> </div> <div id="ftn22"> <p><sup><a href="«#_ftnref22" name="_ftn22" title="">[22]</a></sup> S. Kronlund (productrice), &laquo; Des femmes qui crient&nbsp;&raquo;, <em>Les Pieds sur terre, France Culture</em>, 22 mai 2023, <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-pieds-sur-terre/des-femmes-qui-crient-6424452">https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-pieds-sur-terre/des-femmes-qui-crient-6424452</a>. Consult&eacute; le 7 f&eacute;vrier 2024.</p> </div> <div id="ftn23"> <p><sup><a href="«#_ftnref23" name="_ftn23" title="">[23]</a></sup> C. Deleu, <em>Les anonymes &agrave; la radio, op.&nbsp;cit.,</em> p.&nbsp;163.</p> </div> <div id="ftn24"> <p><sup><a href="«#_ftnref24" name="_ftn24" title="">[24]</a></sup> S. K<w:sdt id="183334555" sdttag="goog_rdk_116">ronlund</w:sdt>, <em>Les pieds sur terre, op.&nbsp;cit.</em>, p.&nbsp;13.</p> </div> <div id="ftn25"> <p><sup><a href="«#_ftnref25" name="_ftn25" title="">[25]</a></sup> M<w:sdt id="-21786237" sdttag="goog_rdk_118">.</w:sdt> R<w:sdt id="1741286504" sdttag="goog_rdk_120">oussign&eacute;</w:sdt>, &laquo;&nbsp;Le terrain&nbsp;: une affaire de discipline&nbsp;?&nbsp;&raquo;, <em>Revue critique de fixxion fran&ccedil;aise contemporaine</em>, n&deg;18, 2019, <a href="https://journals.openedition.org/fixxion/1295">https://journals.openedition.org/fixxion/1295</a>. Consult&eacute; le 5 f&eacute;vrier 2024.</p> </div> <div id="ftn26"> <p><sup><a href="«#_ftnref26" name="_ftn26" title="">[26]</a></sup> H. Foster, &laquo; L&rsquo;Artiste comme ethnographe, ou la &ldquo;fin de l&rsquo;Histoire&rdquo; signifie-t-elle le retour &agrave; l&rsquo;anthropologie ? &raquo;, in Jean-Paul Ameline (dir.), <em>Face &agrave; l&rsquo;histoire, L&rsquo;artiste moderne devant l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement historique</em>, Paris, &Eacute;ditions Flammarion/Centre Georges Pompidou, coll. &laquo;&nbsp;Les cahiers du mus&eacute;e national d&rsquo;art moderne&nbsp;&raquo;, 1996.</p> </div> <div id="ftn27"> <p><sup><a href="«#_ftnref27" name="_ftn27" title="">[27]</a></sup> A. Wieviorka, <em>L&rsquo;&Egrave;re du t&eacute;moin,</em> Paris, Plon, 1998.</p> </div> <div id="ftn28"> <p><sup><a href="«#_ftnref28" name="_ftn28" title="">[28]</a></sup> M<w:sdt id="1104159448" sdttag="goog_rdk_122">.</w:sdt> L<w:sdt id="1855764713" sdttag="goog_rdk_124">ecacheur</w:sdt>, &laquo;&nbsp;La litt&eacute;rature sur &eacute;coute&nbsp;: recueillir la parole d&rsquo;autrui de Georges Perec &agrave; Olivia Rosenthal&nbsp;&raquo;, th&egrave;se cit&eacute;e.</p> </div> <div id="ftn29"> <p><sup><a href="«#_ftnref29" name="_ftn29" title="">[29]</a></sup> F. D<w:sdt id="-1303612539" sdttag="goog_rdk_127">ujardin</w:sdt>, &laquo;&nbsp;&Eacute;crire avec les voix des autres : quels enjeux &eacute;thiques derri&egrave;re le &quot;beau documentaire&quot; ?&nbsp;&raquo;, <w:sdt id="10339978" sdttag="goog_rdk_128" showingplchdr="t">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;<em>&nbsp;</em></w:sdt><em>Komodo21</em>, n&deg; 18, <w:sdt id="70165067" sdttag="goog_rdk_129">&laquo;&nbsp;Le d&eacute;sir de belle radio aujourd&rsquo;hui&nbsp;&raquo;, </w:sdt>2022, <a href="https://komodo21.fr/ecrire-avec-les-voix-des-autres-quels-enjeux-ethiques-derriere-le-beau-documentaire/">https://komodo21.fr/ecrire-avec-les-voix-des-autres-quels-enjeux-ethiques-derriere-le-beau-documentaire/</a>. Consult&eacute; le 7 f&eacute;vrier 2024.</p> </div> <div id="ftn30"> <p><sup><a href="«#_ftnref30" name="_ftn30" title="">[30]</a></sup> S<w:sdt id="-1742010843" sdttag="goog_rdk_131">.</w:sdt> K<w:sdt id="-1373074318" sdttag="goog_rdk_133">ronlund</w:sdt>, <em>Les pieds sur terre, op. cit.</em>, p.&nbsp;28.</p> </div> <div id="ftn31"> <p><sup><a href="«#_ftnref31" name="_ftn31" title="">[31]</a></sup> M<w:sdt id="1489675544" sdttag="goog_rdk_134">.</w:sdt>-J. Z<w:sdt id="-1922093833" sdttag="goog_rdk_138">enetti</w:sdt>, &laquo;&nbsp;Les &quot;Invisibles&quot; peuvent-il se raconter&nbsp;? L&rsquo;entreprise &quot;Raconter la vie&quot; entre ambition litt&eacute;raire et soup&ccedil;on de &quot;storytelling&quot;&nbsp;&raquo;, <em>Comparatismes en Sorbonne</em> n&deg;6, 2014, p.&nbsp;1-13.</p> </div> <div id="ftn32"> <p><sup><a href="«#_ftnref32" name="_ftn32" title="">[32]</a></sup> S<w:sdt id="1323391528" sdttag="goog_rdk_139">.</w:sdt> S<w:sdt id="-396903500" sdttag="goog_rdk_141">ervoise</w:sdt>, &laquo;&nbsp;Reconnaissance, empowerment et processus de subjectivation&nbsp;: les enjeux d&eacute;mocratiques de la polyphonie narrative&nbsp;&raquo;, dans &laquo;&nbsp;Livres de voix. Narrations pluralistes et d&eacute;mocratie.&nbsp;&raquo;, <w:sdt id="391308139" sdttag="goog_rdk_143">Alexandre Gefen &amp; Fr&eacute;d&eacute;rique Leichter-Flack (dir.), </w:sdt><em>Fabula</em>, 2022, <a href="https://www.fabula.org/colloques/document8078.php">https://www.fabula.org/colloques/document8078.php</a>. Consult&eacute; le 5 f&eacute;vrier 2024.</p> </div> <div id="ftn33"> <p><sup><a href="«#_ftnref33" name="_ftn33" title="">[33]</a></sup> <em>Ibid.,</em> p.&nbsp;18.</p> </div> <div id="ftn34"> <p><sup><a href="«#_ftnref34" name="_ftn34" title="">[34]</a></sup> S. Kronlund, <em>Les pieds sur terre,</em> <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;69.</p> </div> <div id="ftn35"> <p><sup><a href="«#_ftnref35" name="_ftn35" title="">[35]</a></sup> Rediffusion du 9 septembre 2016.</p> </div> <div id="ftn36"> <p><sup><a href="«#_ftnref36" name="_ftn36" title="">[36]</a></sup> R<w:sdt id="-1474367534" sdttag="goog_rdk_145">.</w:sdt> G<w:sdt id="1805814375" sdttag="goog_rdk_147">uid&eacute;e</w:sdt>, &laquo;&nbsp;Le gentil r&eacute;cit litt&eacute;raire et le grand m&eacute;chant <w:sdt id="-183060618" sdttag="goog_rdk_148">storytelling</w:sdt>&nbsp;: anatomie d&rsquo;un conte contemporain&nbsp;&raquo;, dans <w:sdt id="-1501876512" sdttag="goog_rdk_149">&laquo;&nbsp;Litt&eacute;rature contre <w:sdt id="-1793983492" sdttag="goog_rdk_150">storytelling</w:sdt> avant l&rsquo;&egrave;re n&eacute;olib&eacute;rale. Pour une autre histoire des engagements litt&eacute;raires du <w:sdt id="1428314081" sdttag="goog_rdk_151">xx</w:sdt>e si&egrave;cle&nbsp;&raquo;, </w:sdt>Danielle Perrot-Corpet et Judith Sarfati-Lanter (dir.), <em>Raison publiqu</em>e, juin 2018, <a href="https://raison-publique.fr/1687/">https://raison-publique.fr/1687</a>. Consult&eacute; le 7 f&eacute;vrier 2024.</p> </div> <div id="ftn37"> <p><sup><a href="«#_ftnref37" name="_ftn37" title="">[37]</a></sup> C<w:sdt id="75798353" sdttag="goog_rdk_155">.</w:sdt> D<w:sdt id="-850568463" sdttag="goog_rdk_157">eleu</w:sdt>, &laquo;&nbsp;Y a-t-il une sp&eacute;cificit&eacute; du service public en mati&egrave;re radiophonique&nbsp;?&nbsp;&raquo;, <em>Les </em><w:sdt id="110636968" sdttag="goog_rdk_159"><em>e</em></w:sdt><em>njeux de l&rsquo;information et de la communication</em>, n&deg;14/2, 2013.</p> </div> <div id="ftn38"> <p><sup><a href="«#_ftnref38" name="_ftn38" title="">[38]</a></sup> C. A<w:sdt id="-1686277984" sdttag="goog_rdk_162">rbrun</w:sdt>, &laquo;&nbsp;La fabrique des &quot;Pieds sur Terre&quot;, l&rsquo;&eacute;mission &agrave; contre-courant de <em>France culture</em>&nbsp;&raquo;, <em>Les Inrocks</em>, 23 f&eacute;vrier 2019, <a href="https://www.lesinrocks.com/actu/les-pieds-sur-terre-ou-letonnement-face-au-reel-141979-23-02-2019/">https://www.lesinrocks.com/actu/les-pieds-sur-terre-ou-letonnement-face-au-reel-141979-23-02-2019/</a>. Consult&eacute; le 7 f&eacute;vrier 2024.</p> </div> <div id="ftn39"> <p><sup><a href="«#_ftnref39" name="_ftn39" title="">[39]</a></sup> En 2022, l&rsquo;&eacute;mission &eacute;tait 11&egrave;me dans le classement des programmes &eacute;cout&eacute;s en ligne&nbsp;: <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/40-3-millions-d-ecoutes-a-la-demande-record-d-audience-pour-france-culture-5404971">https://www.radiofrance.fr/franceculture/40-3-millions-d-ecoutes-a-la-demande-record-d-audience-pour-france-culture-5404971</a>. Consult&eacute; le 4 f&eacute;vrier 2024.</p> </div> <div id="ftn40"> <p><sup><a href="«#_ftnref40" name="_ftn40" title="">[40]</a></sup> <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/selection-les-pieds-sur-terre-la-selection-des-auditeurs-et-auditrices">https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/selection-les-pieds-sur-terre-la-selection-des-auditeurs-et-auditrices</a>.</p> </div> <div id="ftn41"> <p><sup><a href="«#_ftnref41" name="_ftn41" title="">[41]</a></sup> S. Kronlund, <em>L&rsquo;homme aux mille visages</em>, Paris, Grasset, 2024.</p> <h2>Bibliographie</h2> <p>&nbsp;</p> <p>ARBRUN Cl&eacute;mence, &laquo;&nbsp;La fabrique des &quot;Pieds sur Terre&quot;, l&rsquo;&eacute;mission &agrave; contre-courant de <em>France Culture</em>&nbsp;&raquo;, <em>Les Inrocks</em>, 23 f&eacute;vrier 2019, <a href="https://www.lesinrocks.com/actu/les-pieds-sur-terre-ou-letonnement-face-au-reel-141979-23-02-2019">https://www.lesinrocks.com/actu/les-pieds-sur-terre-ou-letonnement-face-au-reel-141979-23-02-2019</a>.</p> <p>COURCHELLE G&eacute;rard, <em>Les coulisses de la radio</em>, Paris, &Eacute;ditions du Ch&ecirc;ne, 2015.</p> <p>CAILLET Aline, <em>Dispositifs critiques. Le documentaire, du cin&eacute;ma aux arts visuels</em>, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. &laquo;&nbsp;Arts contemporains&nbsp;&raquo;, 2014.</p> <p>DELEU Christophe, <em>Les anonymes &agrave; la radio, usages, fonctions et port&eacute;e de leur parole</em><w:sdt id="354612080" sdttag="goog_rdk_52">,</w:sdt> Bruxelles, De Boeck, 2006.</p> <p>DELEU Christophe,&nbsp;<em>Le documentaire radiophonique</em>, Paris, L&rsquo;Harmattan, 2013.</p> <p>DELEU Christophe, &laquo;&nbsp;Y a-t-il une sp&eacute;cificit&eacute; du service public en mati&egrave;re radiophonique&nbsp;?&nbsp;&raquo;, <em>Les </em><w:sdt id="-1119983269" sdttag="goog_rdk_61"><em>e</em></w:sdt><em>njeux de l</em><w:sdt id="958075896" sdttag="goog_rdk_63"><em>&rsquo;</em></w:sdt><em>information et de la communication</em>, n&deg;14/2, 2013, <a href="https://www.cairn.info/revue-les-enjeux-de-l-information-et-de-la-communication-2013-2-page-95.htm">https://www.cairn.info/revue-les-enjeux-de-l-information-et-de-la-communication-2013-2-page-95.htm</a>.</p> <p>DEMANZE Laurent, <em>Un nouvel &acirc;ge de l&rsquo;enqu&ecirc;te</em>, Paris, Jos&eacute; Corti, coll. &laquo;&nbsp;Les Essais&nbsp;&raquo;, 2019.</p> <p>DUJARDIN Fanny, &laquo;&nbsp;&Eacute;crire avec les voix des autres&nbsp;: quels enjeux &eacute;thiques derri&egrave;re le &quot;beau documentaire&quot;&nbsp;?&nbsp;&raquo;, <em>Komodo21</em>, n&deg;18, <w:sdt id="38025044" sdttag="goog_rdk_68">&laquo;&nbsp;Le d&eacute;sir de belle radio aujourd&rsquo;hui&nbsp;&raquo;, </w:sdt>2022, <a href="https://komodo21.fr/ecrire-avec-les-voix-des-autres-quels-enjeux-ethiques-derriere-le-beau-documentaire/">https://komodo21.numerev.com/articles/revue-18/3292-ecrire-avec-les-voix-des-autres</a>.</p> <p>FOSTER Hal, &laquo; L&rsquo;Artiste comme ethnographe, ou la &ldquo;fin de l&rsquo;Histoire&rdquo; signifie-t-elle le retour &agrave; l&rsquo;anthropologie ? &raquo;, in Jean-Paul Ameline (dir.), <em>Face &agrave; l&rsquo;histoire, L&rsquo;artiste moderne devant l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement historique</em>, Paris, &Eacute;ditions Flammarion/Centre Georges Pompidou, coll. &laquo;&nbsp;Les cahiers du mus&eacute;e national d&rsquo;art moderne&nbsp;&raquo;, 1996.</p> <p>GUID&Eacute;E Rapha&euml;lle, &laquo;&nbsp;Le gentil r&eacute;cit litt&eacute;raire et le grand m&eacute;chant storytelling&nbsp;: anatomie d&rsquo;un conte contemporain&nbsp;&raquo;, <em>Raison publique</em>, juin 2018, <a href="https://raison-publique.fr/1790/">https://raison-publique.fr/1790</a>.</p> <p>JAMES Alison et VIART Dominique, &laquo;&nbsp;Les litt&eacute;ratures de terrain&nbsp;&raquo;, <em>Revue critique de fixxion fran&ccedil;aise contemporaine</em>, 18/2019, <a href="https://journals.openedition.org/fixxion/1254">https://journals.openedition.org/fixxion/1254</a>.</p> <p>KRONLUND Sonia, <em>Les pieds sur terre : nouvelles du r&eacute;el</em>, Arles, Actes sud, 2012.</p> <p>KRONLUND Sonia,&nbsp;<em>L&rsquo;homme aux mille visages</em>, Paris, Grasset, 2024.</p> <p>LECACHEUR Maud, &laquo;&nbsp;Une arch&eacute;ologie du livre de voix&nbsp;&raquo; dans <w:sdt id="-1035814813" sdttag="goog_rdk_72">&laquo;&nbsp;Livres de voix. Narrations pluralistes et d&eacute;mocratie.&nbsp;&raquo;, </w:sdt>Alexandre Gefen &amp; Fr&eacute;d&eacute;rique Leichter-Flack (dir.), <em>Fabula</em>, 2022, <a href="https://www.fabula.org/colloques/document8102.php">https://www.fabula.org/colloques/document8102.php</a>.</p> <p>LECACHEUR Maud, &laquo; La litt&eacute;rature sur &eacute;coute : recueillir la parole d&rsquo;autrui de Georges Perec &agrave; Olivia Rosenthal &raquo;, th&egrave;se men&eacute;e sous la direction de Laurent Demanze, soutenue en 2022, ENS de Lyon.</p> <p>MERMET Daniel, <em>L&agrave;-bas si j&rsquo;y suis. Carnets de route</em>, Paris, La D&eacute;couverte, 1999.</p> <p>ROUSSIGN&Eacute; Mathilde, &laquo;&nbsp;Le terrain&nbsp;: une affaire de discipline&nbsp;?&nbsp;&raquo;, <em>Revue critique de fixxion fran&ccedil;aise contemporaine</em>, n&deg;18, 2019, <a href="https://journals.openedition.org/fixxion/1295">https://journals.openedition.org/fixxion/1295</a>.</p> <p>ROUSSIGN&Eacute; Mathilde,&nbsp;&nbsp;<em>Terrain et litt&eacute;rature, nouvelles approches</em>, Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, 2023.</p> <p>RUFFET Lionel, &laquo; Un r&eacute;alisme contemporain : les narrations documentaires &raquo;,<em> Litt&eacute;rature</em>, n&deg;166, &laquo;&nbsp;Usages du document en litt&eacute;rature &raquo;, 2012, p. 13-25.</p> <p>SERVOISE Sylvie, &laquo;&nbsp;Reconnaissance, empowerment et processus de subjectivation&nbsp;: les enjeux d&eacute;mocratiques de la polyphonie narrative&nbsp;&raquo;, dans <w:sdt id="2129506999" sdttag="goog_rdk_78" showingplchdr="t">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;</w:sdt>&laquo;&nbsp;Livres de voix. Narrations pluralistes et d&eacute;mocratie.&nbsp;&raquo;, <w:sdt id="-2064169595" sdttag="goog_rdk_79">Alexandre Gefen &amp; Fr&eacute;d&eacute;rique Leichter-Flack (dir.), </w:sdt><em>Fabula</em>, 2022, <a href="https://www.fabula.org/colloques/document8078.php">https://www.fabula.org/colloques/document8078.php</a>.</p> <p>WIEVIORKA, <em>L&rsquo;&Egrave;re du t&eacute;moin</em>, Paris, Plon, 1998.</p> <p>ZENETTI Marie-Jeanne, &laquo;&nbsp;Les &quot;Invisibles&quot; peuvent-il se raconter&nbsp;? L&rsquo;entreprise &quot;Raconter la vie&quot; entre ambition litt&eacute;raire et soup&ccedil;on de &quot;storytelling&quot;&nbsp;&raquo;, <em>Comparatismes en Sorbonne</em>, n&deg;6, 2014, p.1-13, <a href="https://shs.hal.science/halshs-01637872">https://shs.hal.science/halshs-01637872</a>.</p> <div>&nbsp;</div> <h2>Autrice</h2> <div> <p><strong>Madeleine Martineu</strong> est ancienne &eacute;l&egrave;ve de l&rsquo;&Eacute;cole normale sup&eacute;rieure de Lyon et agr&eacute;g&eacute;e de lettres modernes. Sa th&egrave;se &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; Grenoble Alpes porte sur les liens entre litt&eacute;rature contemporaine et journalisme, et concerne en particulier l&rsquo;&eacute;criture du fait divers, de la chronique judiciaire et du reportage, genres propices &agrave; des circulations entre les champs journalistique et litt&eacute;raire. Son corpus est constitu&eacute; d&rsquo;auteurs et autrices qui sont par ailleurs journalistes et publient &agrave; la fois dans des journaux et des lieux traditionnellement d&eacute;di&eacute;s &agrave; la litt&eacute;rature. Elle a r&eacute;cemment &eacute;crit au sujet de deux &eacute;crivaines-journalistes : Ondine Millot (&laquo;&nbsp;Ondine Millot, de l&rsquo;article au livre : rendre justice au fait divers&nbsp;&raquo; publi&eacute; dans la revue<em> Fixxion)</em>, et Florence Aubenas (&laquo; De l&rsquo;enqu&ecirc;te journalistique &agrave; la proposition d&rsquo;un r&eacute;cit alternatif :&nbsp;<em>L&rsquo;Inconnu de la poste</em>&nbsp;de Florence Aubenas&nbsp;&raquo;, disponible en ligne).&nbsp;</p> </div> <div>&nbsp;</div> </div> </div>