<p>La trag&eacute;die parl&eacute;e du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle se distingue par la forte r&eacute;duction de son personnel dramatique. Apr&egrave;s l&rsquo;abandon de la forme chorale au tournant des ann&eacute;es 1620, et pour redonner ses lettres de noblesse &agrave; un genre tomb&eacute; en d&eacute;faveur<sup><a href="#_ftn1" id="_ftnref1" name="_ftnref1">1</a></sup>, les dramaturges s&rsquo;efforcent de concentrer leurs actions sur quelques personnages aristocratiques qui ont focalis&eacute; l&rsquo;attention de la critique. Et pour cause&nbsp;: les h&eacute;ros et h&eacute;ro&iuml;nes sont d&eacute;j&agrave; au centre du syst&egrave;me po&eacute;tique d&eacute;velopp&eacute; par les th&eacute;oriciens du temps. D&rsquo;une part parce que, selon Pierre Corneille, c&rsquo;est de ces personnages que doivent na&icirc;tre les &eacute;motions propres au genre&nbsp;: &laquo;&nbsp;la perfection de la trag&eacute;die consiste bien &agrave; exciter de la piti&eacute; et de la crainte par le moyen d&rsquo;un premier Acteur&nbsp;&raquo; (ou, dirions-nous, du personnage principal<sup><a href="#_ftn2" id="_ftnref2" name="_ftnref2">2</a></sup>)&nbsp;; d&rsquo;autre part, car le principe de vraisemblance, pos&eacute; en pierre de touche de ce syst&egrave;me dramaturgique, rend impossible toute intervention verbale de figures populaires. &Eacute;tant donn&eacute; que la trag&eacute;die suppose un style &laquo;&nbsp;pompeux et sublime<sup><a href="#_ftn3" id="_ftnref3" name="_ftnref3">3</a></sup>&nbsp;&raquo;, il n&rsquo;est pas&nbsp;<em>vraisemblable</em>, aux yeux des doctes, que de telles personnes puissent s&rsquo;exprimer en des termes suffisamment &eacute;lev&eacute;s pour prendre part aux dialogues. Les propos d&rsquo;Hippolyte de La Mesnardi&egrave;re, en 1639, rendent &eacute;vident le caract&egrave;re exclusif (pour ne pas dire &eacute;litiste) de la langue tragique&nbsp;; le th&eacute;oricien estime non seulement d&eacute;raisonnable qu&rsquo;un marchand &laquo;&nbsp;parle comme un prince&nbsp;&raquo;, mais il va jusqu&rsquo;&agrave; d&eacute;nier aux &laquo;&nbsp;gens de petite &eacute;toffe&nbsp;&raquo; la capacit&eacute; &agrave;&nbsp;<em>penser</em>&nbsp;dignement<sup><a href="#_ftn4" id="_ftnref4" name="_ftnref4">4</a></sup>. Ainsi, sur les plans &eacute;thiques comme esth&eacute;tiques, la parole non-aristocratique n&rsquo;a plus sa place ni sur les plateaux tragiques, ni dans les th&eacute;ories dramatiques.</p> <p>Pourtant, la foule n&rsquo;en demeure pas moins omnipr&eacute;sente dans la plupart des pi&egrave;ces. L&agrave; se loge assur&eacute;ment l&rsquo;un des paradoxes de la trag&eacute;die dite &laquo;&nbsp;classique&nbsp;&raquo;. Parce que les protagonistes sont &laquo;&nbsp;des princes et des grands&nbsp;&raquo;, leurs actions, ainsi que le souligne B&eacute;n&eacute;dicte Louvat, ont une port&eacute;e publique&nbsp;: &laquo;&nbsp;un roi ne saurait &ecirc;tre d&eacute;fait sans qu&rsquo;il y aille du destin de tout un peuple<sup><a href="#_ftn5" id="_ftnref5" name="_ftnref5">5</a></sup>&nbsp;&raquo;. Plus encore, d&rsquo;apr&egrave;s Lise Michel, l&rsquo;inscription du collectif &laquo;&nbsp;&agrave; l&rsquo;horizon de l&rsquo;individuel&nbsp;&raquo; est l&rsquo;un des moyens centraux de la dignit&eacute; de l&rsquo;action tragique&nbsp;; sans relever d&rsquo;une n&eacute;cessit&eacute; po&eacute;tique, la dimension publique des actes h&eacute;ro&iuml;ques &laquo;&nbsp;conf&egrave;re au sujet tragique une valeur qui d&eacute;passe les seules dimensions individuelle et priv&eacute;e&nbsp;&raquo; et qui conditionne, de ce fait, &laquo;&nbsp;son efficacit&eacute;<sup><a href="#_ftn6" id="_ftnref6" name="_ftnref6">6</a></sup>&nbsp;&raquo;. Mais puisque le dialogue est d&eacute;sormais r&eacute;serv&eacute; &agrave; des individus de haut rang, c&rsquo;est surtout par le biais de discours rapport&eacute;s que ce &laquo;&nbsp;collectif&nbsp;&raquo; se manifeste.</p> <p>Quelques critiques ont examin&eacute; la valeur contraignante de la &laquo;&nbsp;voix du peuple&nbsp;&raquo; vis-&agrave;-vis des personnages principaux&nbsp;: mais c&rsquo;est surtout en tant que&nbsp;<em>doxa</em>&nbsp;que celle-ci s&rsquo;est vue appr&eacute;hend&eacute;e<sup><a href="#_ftn7" id="_ftnref7" name="_ftnref7">7</a></sup>. En s&rsquo;int&eacute;ressant seulement &agrave; la mani&egrave;re dont elle pouvait influer sur la psychologie des protagonistes &ndash; et donc, sur l&rsquo;action &ndash;, on a peu pris en compte la vari&eacute;t&eacute; des bruissements populaires qui pouvaient se faire entendre et n&eacute;glig&eacute;, surtout, leur int&eacute;r&ecirc;t esth&eacute;tique. Cette contribution se propose pr&eacute;cis&eacute;ment de se consacrer aux bruits et murmures des collectivit&eacute;s laiss&eacute;es dans le hors-sc&egrave;ne, qu&rsquo;on abordera dans leurs fonctions pragmatiques et dramaturgiques. Apr&egrave;s une br&egrave;ve mise au point th&eacute;orique sur les rapports entre foules et opinion publique dans la pens&eacute;e dramatique du temps, nous &eacute;tudierons la mani&egrave;re dont les auteurs &ndash; &agrave; l&rsquo;image de Pierre Corneille dans&nbsp;<em>Horace</em>&nbsp;(1640) et&nbsp;<em>Othon</em>&nbsp;(1664) &ndash; tirent parti du caract&egrave;re diffus et diff&eacute;r&eacute; de la voix publique. En empruntant aux&nbsp;<em>sound studies</em>&nbsp;le postulat selon lequel les sons offrent une voie d&rsquo;acc&egrave;s &agrave; nos sensibilit&eacute;s pour penser des cat&eacute;gories oubli&eacute;es<sup><a href="#_ftn8" id="_ftnref8" name="_ftnref8">8</a></sup>, nous montrerons que cette voix &ndash; qui peut&nbsp;aller du bruit indistinct qu&rsquo;on mentionne avec crainte au discours de v&eacute;rit&eacute; r&eacute;p&eacute;t&eacute; par des personnages privil&eacute;gi&eacute;s &ndash; subit un traitement ambivalent permettant de cr&eacute;er des effets de contraste, de suspense et, plus largement, de&nbsp;<em>pathos</em>&nbsp;propre &agrave; orienter la r&eacute;ception des trag&eacute;dies.</p> <p>&nbsp;</p> <p><b>Par-del&agrave; la&nbsp;<em>doxa</em>&nbsp;: de la &laquo;&nbsp;foule&nbsp;&raquo; tragique au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</b></p> <p>Avant toute chose, pr&eacute;cisons que nous donnons ici au terme de foule le sens d&rsquo;une &laquo;&nbsp;assembl&eacute;e humaine qui existe avant tout en tant qu&rsquo;entit&eacute; propre, souvent politis&eacute;e, et compos&eacute;e d&rsquo;individus ind&eacute;finis&nbsp;&raquo;&nbsp;; outre que cette d&eacute;finition, propos&eacute;e par Marceau Deschamps-S&eacute;gura<sup><a href="#_ftn9" id="_ftnref9" name="_ftnref9">9</a></sup>, se fait assez l&acirc;che pour caract&eacute;riser l&rsquo;ensemble des regroupements humains qui feront l&rsquo;objet de notre &eacute;tude (ville en furie, arm&eacute;e, etc.), elle a l&rsquo;avantage de recouper celle que lui donnait le XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. Alors que la &laquo;&nbsp;foule&nbsp;&raquo; n&rsquo;&eacute;tait pas encore pens&eacute;e en tant que notion &ndash; c&rsquo;est au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle qu&rsquo;elle sera th&eacute;oris&eacute;e comme l&rsquo;assemblage d&rsquo;&ecirc;tres ali&eacute;n&eacute;s &agrave; eux-m&ecirc;mes, formant une puissance capable d&rsquo;actions soit h&eacute;ro&iuml;ques, soit dangereuses<sup><a href="#_ftn10" id="_ftnref10" name="_ftnref10">10</a></sup>&nbsp;&ndash;, on l&rsquo;employait volontiers comme un synonyme de la &laquo;&nbsp;multitude&nbsp;&raquo;, avec un lien privil&eacute;gi&eacute; au vulgaire (du latin&nbsp;<em>vulgus</em>&nbsp;&ndash; le petit peuple), que le dictionnaire de l&rsquo;Acad&eacute;mie fran&ccedil;aise rendait explicite : &laquo;&nbsp;On dit fig. Se tirer de la foule, pour dire, Se distinguer, se tirer du commun<sup><a href="#_ftn11" id="_ftnref11" name="_ftnref11">11</a></sup>&nbsp;&raquo;. C&rsquo;est d&rsquo;ailleurs ce dernier aspect de la foule, li&eacute; &agrave; l&rsquo;id&eacute;e abstraite de &laquo;&nbsp;commun&nbsp;&raquo;, qui a surtout fait l&rsquo;objet de travaux. En particulier, Gilles Declercq a consacr&eacute; une importante &eacute;tude &agrave; la&nbsp;<em>doxa</em>&nbsp;dans les trag&eacute;dies de Jean Racine, pour montrer que celle-ci instaurait &laquo; le drame politique au sein des passions&nbsp;&raquo; et remplissait une fonction dramatique de premier ordre<sup><a href="#_ftn12" id="_ftnref12" name="_ftnref12">12</a></sup>. En invitant &agrave; d&eacute;passer les perspectives centr&eacute;es sur l&rsquo;affrontement path&eacute;tique entre les personnages, le rh&eacute;toricien a en effet insist&eacute; sur la valeur&nbsp;<em>contrariante</em>&nbsp;du peuple, pr&eacute;sent, selon lui, non comme cat&eacute;gorie sociologique, mais comme instance oratoire dans les pi&egrave;ces de Racine&nbsp;:</p> <p><q>Il s&rsquo;y fait entendre par le truchement d&rsquo;autrui, ces confidents et conseillers, omnipr&eacute;sents dans la trag&eacute;die racinienne&nbsp;; ceux-ci se font l&rsquo;&eacute;cho de l&rsquo;opinion publique, voix collective, avatar du ch&oelig;ur antique<sup><a href="#_ftn13" id="_ftnref13" name="_ftnref13">13</a></sup>.</q></p> <p>Invoqu&eacute;e &eacute;galement dans les discours des protagonistes, cette &laquo;&nbsp;opinion publique&nbsp;&raquo; p&egrave;serait surtout sur les desseins amoureux des h&eacute;ros et h&eacute;ro&iuml;nes<sup><a href="#_ftn14" id="_ftnref14" name="_ftnref14">14</a></sup>. G. Declercq en donne pour preuve l&rsquo;exemple de&nbsp;<em>B&eacute;r&eacute;nice</em>&nbsp;(1670)&nbsp;: l&rsquo;opinion publique y appara&icirc;t comme un ressort central du drame puisque c&rsquo;est la proscription du mariage d&rsquo;un empereur &agrave; une reine &eacute;trang&egrave;re par les lois tacites de Rome qui cause le d&eacute;chirement du couple principal. Ressass&eacute;e par Titus tout au long de l&rsquo;action et rappel&eacute;e une fois encore par le confident Arsace au terme de la pi&egrave;ce (V,&nbsp;2), l&rsquo;&laquo;&nbsp;opinion&nbsp;&raquo; rel&egrave;verait alors d&rsquo;un &laquo;&nbsp;fil directeur menant de l&rsquo;argumentation politique &agrave; la fureur path&eacute;tique<sup><a href="#_ftn15" id="_ftnref15" name="_ftnref15">15</a></sup>&nbsp;&raquo;.</p> <p>Or, si l&rsquo;avis de &laquo;&nbsp;Rome&nbsp;&raquo; prend effectivement, dans cette pi&egrave;ce, la forme d&rsquo;un lieu d&rsquo;argumentation qui impose &agrave; Titus de renoncer &agrave; son amour pour B&eacute;r&eacute;nice, tel n&rsquo;est pas le cas de toutes les interventions populaires dans les trag&eacute;dies de la p&eacute;riode. Dans&nbsp;<em>B&eacute;r&eacute;nice</em>&nbsp;elle-m&ecirc;me, plusieurs personnages font mention de foules concr&egrave;tes environnant Titus &agrave; certains moments de l&rsquo;action &ndash; &agrave; l&rsquo;instar d&rsquo;Arsace qui raconte que &laquo;&nbsp;Le peuple avec transport l&rsquo;arr&ecirc;te [Titus], et l&rsquo;environne, / Applaudissant aux noms que le S&eacute;nat lui donne&nbsp;&raquo; (V, 2, v.&nbsp;1270-1272). Et si Gilles Declercq l&rsquo;assimile alors &agrave; &laquo;&nbsp;diff&eacute;rents cercles de l&rsquo;opinion publique&nbsp;&raquo;, rien n&rsquo;assure que ce &laquo;&nbsp;peuple&nbsp;&raquo; s&rsquo;accorde absolument avec les traditions centenaires de Rome. Titus, dans la pi&egrave;ce, fait personnellement &eacute;tat de cette diff&eacute;rence de nature entre&nbsp;<em>doxa</em>&nbsp;int&eacute;rioris&eacute;e et ville anim&eacute;e&nbsp;:</p> <p><q>TITUS.</q></p> <p><q>Je viens percer un c&oelig;ur que j&#39;adore, qui m&rsquo;aime.</q></p> <p><q>Et pourquoi le percer ? Qui l&rsquo;ordonne ? Moi-m&ecirc;me.</q></p> <p><q>Car enfin Rome a-t-elle expliqu&eacute; ses souhaits ?</q></p> <p><q>L&#39;entendons-nous crier autour de ce palais<sup><a href="#_ftn16" id="_ftnref16" name="_ftnref16">16</a></sup>&nbsp;? (IV, 4, v. 999-1002)</q></p> <p>Plusieurs instances collectives s&rsquo;expriment donc de mani&egrave;re vari&eacute;e (quoique toujours diff&eacute;r&eacute;e)&nbsp;: &laquo;&nbsp;sens de l&rsquo;honneur&nbsp;&raquo; et foule all&egrave;gre n&rsquo;apparaissent unies que dans l&rsquo;esprit du protagoniste qui prend les &laquo;&nbsp;applaudissements&nbsp;&raquo; des citoyens et citoyennes &agrave; son couronnement pour &laquo;&nbsp;autant d&rsquo;engagements&nbsp;&raquo; l&rsquo;obligeant &agrave; r&eacute;pudier son amante (V, 2, v. 1274). Un amalgame qui en dit donc peut-&ecirc;tre davantage sur Titus lui-m&ecirc;me que sur &laquo;&nbsp;Rome&nbsp;&raquo; en tant qu&rsquo;ensemble de citoyens.</p> <p>Pour le sujet qui nous occupe, il importe ainsi de s&rsquo;int&eacute;resser moins &agrave; l&rsquo;opinion qu&rsquo;&agrave; la&nbsp;<em>voix</em>&nbsp;publique, c&rsquo;est-&agrave;-dire &agrave; toutes les manifestations sonores d&rsquo;entit&eacute;s plurielles, par-del&agrave; (ou en plus) du on-dit. Sans n&eacute;gliger l&rsquo;importance actantielle des ph&eacute;nom&egrave;nes collectifs dans les pi&egrave;ces, d&eacute;passer le seul&nbsp;<em>logos</em>&nbsp;(ou langage rationnel) permet en effet, comme le signale Sarah Nancy, d&rsquo;&eacute;viter de &laquo;&nbsp;r&eacute;duire le genre dramatique au texte, au message moral, au h&eacute;ros&nbsp;&raquo; et, pourrions-nous ajouter, &agrave; la&nbsp;<em>doxa</em><sup><a href="#_ftn17" id="_ftnref17" name="_ftnref17">17</a></sup>. Ce recalibrage appara&icirc;t d&rsquo;autant plus pertinent qu&rsquo;au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, l&rsquo;&laquo;&nbsp;opinion publique<sup><a href="#_ftn18" id="_ftnref18" name="_ftnref18">18</a></sup>&nbsp;&raquo; na&icirc;t des d&eacute;bats litt&eacute;raires pour pr&eacute;figurer la sph&egrave;re publique bourgeoise en lui inculquant les valeurs qui sont les siennes&nbsp;; autrement dit, comme l&rsquo;a montr&eacute; H&eacute;l&egrave;ne Merlin-Kajman, &laquo;&nbsp;l&rsquo;<em>opinion du public</em>&nbsp;est ext&eacute;rieure au peuple, elle le manipule<sup><a href="#_ftn19" id="_ftnref19" name="_ftnref19">19</a></sup>&nbsp;&raquo;, et il convient par cons&eacute;quent de laisser leur place &agrave; de possibles dissonances entre&nbsp;<em>doxa</em>&nbsp;et mouvements de foule, et de donner enfin sa place au bruit en tant que composante du spectacle tragique.</p> <p>&nbsp;</p> <p><b>Bruits contrastifs&nbsp;: des tambours aux r&eacute;cits</b></p> <p>Car c&rsquo;est justement le &laquo;&nbsp;bruit&nbsp;&raquo; qui caract&eacute;rise les foules dans les trag&eacute;dies du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. D&rsquo;abord &agrave; un niveau tr&egrave;s concret&nbsp;: jusqu&rsquo;aux ann&eacute;es 1650, les dramaturges aiment encore construire des intrigues &agrave; rebondissements guerriers<sup><a href="#_ftn20" id="_ftnref20" name="_ftnref20">20</a></sup>&nbsp;o&ugrave; les actes h&eacute;ro&iuml;ques des personnages impliquent des batailles (racont&eacute;es) et des harangues militaires (jou&eacute;es). Dans ce cadre, il est r&eacute;current qu&rsquo;une arriv&eacute;e de figurants vienne mat&eacute;rialiser le d&eacute;but ou la fin d&rsquo;un mouvement de foule, en s&rsquo;annon&ccedil;ant par un authentique vacarme. Signal&eacute; par une didascalie dans le texte des pi&egrave;ces, celui-ci est produit, dans le spectacle, &agrave; l&rsquo;aide d&rsquo;instruments (tambours, trompettes) ou de boules de m&eacute;tal roulant sur des plaques de bois<sup><a href="#_ftn21" id="_ftnref21" name="_ftnref21">21</a></sup>.&nbsp;<em>Osman</em>&nbsp;de Tristan L&rsquo;Hermite (1646) en fournit un exemple&nbsp;:</p> <p><q>OSMAN.</q></p> <p><q>Je lui ferai voler la t&ecirc;te en un instant.</q></p> <p><q>Et par l&agrave; ferai voir au peuple de la Thrace,</q></p> <p><q><em>&Agrave; ce vers il se fait grand bruit derri&egrave;re le Th&eacute;&acirc;tre</em>.</q></p> <p><q>Qu&#39;un tr&eacute;pas violent suit de pr&egrave;s ma menace,</q></p> <p><q>[&hellip;] Mais quel grand bruit d&eacute;j&agrave; vient frapper nos oreilles&nbsp;?</q></p> <p><q>Ose-t-on nous troubler par des rumeurs pareilles&nbsp;?</q></p> <p><q>D&eacute;p&ecirc;che de ma part, va t&rsquo;en leur ordonner</q></p> <p><q>De garder le silence, ou de s&rsquo;en retourner :</q></p> <p><q>Si de ce mandement ils n&rsquo;ont aucune crainte,</q></p> <p><q>J&rsquo;irai sur le balcon pour entendre leur plainte<sup><a href="#_ftn22" id="_ftnref22" name="_ftnref22">22</a></sup>. (IV, 2, v. 1052-1062)</q></p> <p>La &laquo;&nbsp;plainte&nbsp;&raquo; en question sera prise en charge, deux sc&egrave;nes plus loin, par trois g&eacute;n&eacute;raux, chefs de la faction (IV, 4). Aussi la r&eacute;plique du sultan Osman, victime d&rsquo;une mutinerie de son arm&eacute;e, rend-elle explicite la dynamique double qui caract&eacute;rise la dimension sonore des foules tragiques&nbsp;: alors qu&rsquo;un &laquo;&nbsp;grand bruit&nbsp;&raquo; mat&eacute;rialise leur pr&eacute;sence dans le hors-sc&egrave;ne, celles-ci doivent &laquo;&nbsp;garder le silence&nbsp;&raquo; une fois entr&eacute;es sur le plateau.</p> <p>Le fait que ce bruit se fasse entendre au quatri&egrave;me acte de la trag&eacute;die n&rsquo;est bien s&ucirc;r pas anodin. De fait, c&rsquo;est g&eacute;n&eacute;ralement en fin de pi&egrave;ce qu&rsquo;ont lieu ces arriv&eacute;es, au point de devenir un motif attendu des spectacles : &laquo;&nbsp;j&rsquo;ou&iuml;s apr&egrave;s un bruit qui venait de sa maison, tel que celui que l&rsquo;on fait derri&egrave;re les th&eacute;&acirc;tres, &agrave; la catastrophe d&rsquo;une trag&eacute;die&nbsp;&raquo;, raconte un h&eacute;ros du romancier Charles Sorel dans&nbsp;<em>Polyandre, histoire comique</em>&nbsp;(1648)<sup><a href="#_ftn23" id="_ftnref23" name="_ftnref23">23</a></sup>, ent&eacute;rinant &agrave; la fois le caract&egrave;re habituel des bruitages et leur lien &agrave; la&nbsp;<em>catastrophe</em>, c&rsquo;est-&agrave;-dire au retournement de situation qui aboutit au d&eacute;nouement. Et voil&agrave; bien la principale fonction de ces sons m&eacute;talliques&nbsp;: au-del&agrave; de leur r&ocirc;le signal&eacute;tique, le choc auditif qu&rsquo;ils produisent s&rsquo;articule &agrave; la progression de l&rsquo;action fictionnelle, de mani&egrave;re &agrave; en amplifier les effets. Plus concr&egrave;tement, en se faisant entendre alors que l&rsquo;intrigue touche &agrave; son point culminant, pour signaler une intrusion collective pr&eacute;par&eacute;e depuis plusieurs sc&egrave;nes (voire plusieurs actes), ils d&eacute;cuplent pour quelques secondes un suspense qui aboutira lors de l&rsquo;entr&eacute;e en sc&egrave;ne du groupe. Comme dans&nbsp;<em>Osman</em>&nbsp;o&ugrave; cette arriv&eacute;e pr&eacute;figure le renversement du sultan par son arm&eacute;e, le bruitage s&rsquo;inscrit donc dans une logique &agrave; la fois narrative et esth&eacute;tique<sup><a href="#_ftn24" id="_ftnref24" name="_ftnref24">24</a></sup>.</p> <p>&Agrave; noter que ce type de manifestations sonores peut &eacute;galement accompagner des ph&eacute;nom&egrave;nes magiques : dans le premier tiers du si&egrave;cle, alors que le merveilleux est encore admissible dans le th&eacute;&acirc;tre parl&eacute;<sup><a href="#_ftn25" id="_ftnref25" name="_ftnref25">25</a></sup>, il arrive que des bruits de &laquo;&nbsp;tonnerre&nbsp;&raquo; pr&eacute;figurent l&rsquo;apparition d&rsquo;un dieu ou d&rsquo;une d&eacute;esse dans la derni&egrave;re sc&egrave;ne<sup><a href="#_ftn26" id="_ftnref26" name="_ftnref26">26</a></sup>. Ils s&rsquo;apparentent alors &agrave; un effet sp&eacute;cial, et leur cons&eacute;quence sur le spectacle est similaire&nbsp;: le son venu du hors-sc&egrave;ne marque le point ultime d&rsquo;un crescendo &eacute;motionnel qui se r&eacute;sout avec le dialogue qui le suit.</p> <p>N&eacute;anmoins, si les dieux peuvent aussi s&rsquo;associer aux bruitages, c&rsquo;est bien la foule qui, sur l&rsquo;ensemble du si&egrave;cle, entretient avec le bruit un rapport privil&eacute;gi&eacute;. En dehors des effets sc&eacute;niques, le terme en lui-m&ecirc;me est sans cesse employ&eacute; pour d&eacute;signer les manifestations sonores, opinions ou rumeurs qui circulent hors du microcosme h&eacute;ro&iuml;que. &Agrave; ce qualificatif s&rsquo;ajoutent aussi les termes de &laquo;&nbsp;cris&nbsp;&raquo;, de &laquo;&nbsp;murmure&nbsp;&raquo; et de &laquo;&nbsp;tumulte&nbsp;&raquo;. Autant de vocables qui disent le caract&egrave;re tout &agrave; la fois sonore et inaudible des groupes humains. Dans des pi&egrave;ces qui refusent au peuple l&rsquo;acc&egrave;s au dialogue, la foule, on va le voir,&nbsp;<em>est</em>&nbsp;le bruit.</p> <p>Les raisons de cette association sont multiples&nbsp;: d&rsquo;abord et sur un plan tr&egrave;s pragmatique, la multitude des corps et des voix r&eacute;unis en un m&ecirc;me lieu produit, par nature, des sons indistincts que ce lexique tente de sugg&eacute;rer. Ensuite, la notion de bruit s&rsquo;emploie, &agrave; l&rsquo;&eacute;poque, pour d&eacute;signer &laquo;&nbsp;la renomm&eacute;e, la r&eacute;putation&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;des nouvelles dont on s&rsquo;entretient dans le monde&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;un bruit confus nous apprend qu&rsquo;il y a eu une grande deffaite&nbsp;&raquo;, ajoute le&nbsp;<em>Dictionnaire</em>&nbsp;d&rsquo;Antoine&nbsp;Fureti&egrave;re<sup><a href="#_ftn27" id="_ftnref27" name="_ftnref27">27</a></sup>, qui tisse un lien presque essentiel entre &laquo;&nbsp;bruit&nbsp;&raquo; et valeur collective. Enfin, on ne peut que songer &agrave; la m&eacute;fiance &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de &laquo;&nbsp;la multitude&nbsp;&raquo; qui caract&eacute;rise, en France, les principaux courants politiques et philosophiques d&rsquo;apr&egrave;s les Guerres de Religion. On sait, en effet, que le r&eacute;gime absolutiste se forme sur la base d&rsquo;un &eacute;clatement des solidarit&eacute;s et d&rsquo;un morcellement du corps communautaire&nbsp;; d&rsquo;apr&egrave;s Robert Muchembled, la centralisation de l&rsquo;&Eacute;tat d&eacute;veloppe des liens verticaux qui, tout en tenant les masses &agrave; l&rsquo;&eacute;cart de la sph&egrave;re politique, recherchent le conformisme social<sup><a href="#_ftn28" id="_ftnref28" name="_ftnref28">28</a></sup>&nbsp;&ndash; une attitude qui r&eacute;pond &agrave; l&rsquo;essor g&eacute;n&eacute;ralis&eacute; de la pens&eacute;e individualiste. Ainsi que l&rsquo;explique Anna Maria Battista, l&rsquo;&eacute;thique communautaire c&egrave;de la place, depuis le XVI<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, &agrave; &laquo;&nbsp;une tendance &agrave; voir dans la soci&eacute;t&eacute; un v&eacute;hicule de fausses valeurs et de pseudo-concepts cristallis&eacute;s qui fa&ccedil;onnent irr&eacute;m&eacute;diablement la personnalit&eacute; individuelle<sup><a href="#_ftn29" id="_ftnref29" name="_ftnref29">29</a></sup>&nbsp;&raquo;. De telle sorte que les notions de &laquo;&nbsp;peuple&nbsp;&raquo; et de &laquo;&nbsp;populaire&nbsp;&raquo; sont m&ecirc;me souvent utilis&eacute;es par les intellectuels pour d&eacute;signer un &eacute;tat d&rsquo;inf&eacute;riorit&eacute; psychologique, une incapacit&eacute; &agrave; s&rsquo;extraire d&rsquo;une multitude incorrigible<sup><a href="#_ftn30" id="_ftnref30" name="_ftnref30">30</a></sup>. En un sens, donc, r&eacute;duire la foule au &laquo;&nbsp;bruit&nbsp;&raquo; dans les pi&egrave;ces, la tenir &agrave; distance du langage rationnel, revient aussi &agrave; prolonger cette d&eacute;pr&eacute;ciation du populaire.</p> <p>Mais la caract&eacute;risation de la voix publique comme un magma de sons indistincts peut &eacute;galement se comprendre sous un angle proprement dramaturgique. Ou plut&ocirc;t, les auteurs paraissent exploiter la caract&eacute;risation&nbsp;<em>bruyante</em>&nbsp;de la foule pour produire, vis-&agrave;-vis des dialogues hi&eacute;ratiques des personnages, des effets de contraste expressifs&nbsp;:</p> <p><q>JULIE.</q></p> <p><q>Sit&ocirc;t qu&rsquo;ils ont paru pr&ecirc;ts &agrave; se mesurer</q></p> <p><q>On a dans les deux camps entendu&nbsp;<em>murmurer</em>&nbsp;:</q></p> <p><q>&Agrave; voir de tels amis, des personnes si proches</q></p> <p><q>Venir pour leur patrie aux mortelles approches,</q></p> <p><q>L&#39;un&nbsp;<em>s&rsquo;&eacute;meut</em>&nbsp;de piti&eacute;, l&rsquo;autre est&nbsp;<em>saisi</em>&nbsp;d&rsquo;horreur,</q></p> <p><q>L&rsquo;autre d&rsquo;un si grand z&egrave;le&nbsp;<em>admire</em>&nbsp;la fureur,</q></p> <p><q>Tel&nbsp;<em>porte</em>&nbsp;jusqu&rsquo;aux cieux leur vertu sans &eacute;gale,</q></p> <p><q>Et tel l&rsquo;ose&nbsp;<em>nommer</em>&nbsp;sacril&egrave;ge et brutale.</q></p> <p><q>Ces divers sentiments n&rsquo;ont pourtant qu&rsquo;une voix,</q></p> <p><q>Tous&nbsp;<em>accusent</em>&nbsp;leurs chefs, tous&nbsp;<em>d&eacute;testent</em>&nbsp;leur choix,</q></p> <p><q>Et ne pouvant souffrir un combat si barbare,</q></p> <p><q>On&nbsp;<em>s&rsquo;&eacute;crie</em>, on s&rsquo;avance, enfin on les s&eacute;pare.</q></p> <p><q>[&hellip;] Et leurs&nbsp;<em>cris</em>&nbsp;des deux parts pouss&eacute;s en m&ecirc;me temps,</q></p> <p><q><em>Demandent</em>&nbsp;la bataille, ou d&rsquo;autres combattants<sup><a href="#_ftn31" id="_ftnref31" name="_ftnref31">31</a></sup>. (III, 2, v. 781-810. Nous soulignons)</q></p> <p>Cet extrait d&rsquo;<em>Horace</em>&nbsp;de Pierre Corneille (1640), qui retrace l&rsquo;indignation de deux arm&eacute;es face au combat devant opposer les trois Horace aux trois Curiace, accumule les termes &eacute;voquant &agrave; la fois le bruit et l&rsquo;&eacute;motion des foules. En passant du murmure aux &laquo;&nbsp;cris&nbsp;&raquo; finaux, il parvient &agrave; sugg&eacute;rer l&rsquo;agitation grandissante des Romains et des Albins pour faire advenir, dans l&rsquo;esprit du public, le tableau auditif d&rsquo;une arm&eacute;e d&eacute;cha&icirc;n&eacute;e. En plus d&rsquo;enrichir la texture sonore du spectacle, ce dernier ne peut manquer alors d&rsquo;entrer en collision avec l&rsquo;image sc&eacute;nique que l&rsquo;assistance a sous les yeux&nbsp;; &agrave; cet instant de la trag&eacute;die, le plateau (figurant un int&eacute;rieur romain) est occup&eacute; par Camille et Sabine, les s&oelig;urs d&rsquo;Horace et de Curiace, qui attendent avec inqui&eacute;tude de conna&icirc;tre l&rsquo;issue du duel. L&rsquo;effet de contraste est donc tr&egrave;s marqu&eacute;<sup><a href="#_ftn32" id="_ftnref32" name="_ftnref32">32</a></sup>&nbsp;: la cacophonie des plaintes populaires vient offrir un contrepoint &agrave; la peine contenue des deux femmes pour faire d&rsquo;autant mieux ressortir leur solitude, tout en faisant &eacute;cho &agrave; leur douleur<sup><a href="#_ftn33" id="_ftnref33" name="_ftnref33">33</a></sup>. L&rsquo;indignation des unes et des autres, vis-&agrave;-vis du combat des h&eacute;ros, se r&eacute;pond ainsi dans un jeu d&rsquo;oppositions et d&rsquo;entrelacs qui donnent &agrave; la sc&egrave;ne une valeur d&rsquo;autant plus path&eacute;tique.</p> <p>Du reste, ce n&rsquo;est pas parce que la voix publique se voit r&eacute;duite au &laquo;&nbsp;bruit&nbsp;&raquo; indistinct qu&rsquo;elle ne peut agir sur les sentiments des protagonistes et, par voie de prolongement, moduler la situation &eacute;motionnelle du public face &agrave; la trag&eacute;die. Le r&eacute;cit de Julie, en laissant toute sa place &agrave; une r&eacute;volte qui se d&eacute;ploie par des cris, en offre l&rsquo;illustration&nbsp;: ces derniers forment une longue complainte dont H&eacute;l&egrave;ne Merlin-Kajman, dans son tr&egrave;s bel article consacr&eacute; &agrave; la circulation des larmes dans&nbsp;<em>Horace</em>, a signal&eacute; qu&rsquo;elle contribuait &agrave; dessiner une unit&eacute; autre que l&rsquo;unit&eacute; d&rsquo;action<sup><a href="#_ftn34" id="_ftnref34" name="_ftnref34">34</a></sup>. En prolongeant les constats de Gilles Declercq au sujet de l&rsquo;importance du populaire, la chercheuse a montr&eacute; que, sans &ecirc;tre r&eacute;ductible &agrave; une instance rh&eacute;torique, cette plainte, prof&eacute;r&eacute;e par des individus physiques, d&eacute;passait aussi la&nbsp;<em>phon&egrave;</em>&nbsp;irrationnelle et antagoniste gr&acirc;ce &agrave; la mani&egrave;re dont l&rsquo;&eacute;coutaient les personnages, et en particulier les chefs des deux arm&eacute;es. Plus loin dans la m&ecirc;me sc&egrave;ne, la confidente Julie raconte en effet que les rois de Rome et d&rsquo;Albe, d&eacute;cident de suspendre pour un temps le duel des h&eacute;ros, si bien que les cris collectifs, re&ccedil;us par eux non comme simple expression path&eacute;tique, mais comme revendication de droits, instituent pour quelques instants le peuple en sujet politique digne de se faire entendre. Et m&ecirc;me si cette plainte est ensuite renvoy&eacute;e &laquo;&nbsp;au murmure d&rsquo;o&ugrave; elle a surgi<sup><a href="#_ftn35" id="_ftnref35" name="_ftnref35">35</a></sup>&nbsp;&raquo; par un oracle qui impose la reprise du combat (III, 5), elle provoque un trouble qui g&eacute;n&egrave;re un temps mort dans le d&eacute;roulement des de l&rsquo;intrigue comme du spectacle, ou plut&ocirc;t, un temps&nbsp;<em>anim&eacute;</em>&nbsp;de bruit liant l&rsquo;ensemble des personnages et des spectateurs dans un hal&egrave;tement commun.</p> <p>&nbsp;</p> <p><b>Des plaintes en&nbsp;<em>suspense</em>&nbsp;:&nbsp;<em>Othon</em>&nbsp;de Pierre Corneille</b></p> <p>&laquo;&nbsp;Face &agrave; la plainte du personnage injustement frapp&eacute; par le malheur, le spectateur est saisi d&rsquo;une compassion qui le porte &agrave; le plaindre&nbsp;&raquo;&nbsp;: tel est, selon H&eacute;l&egrave;ne Merlin-Kajman, le pr&eacute;suppos&eacute; qui sous-tend la production de piti&eacute; dans la th&eacute;orie po&eacute;tique du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle<sup><a href="#_ftn36" id="_ftnref36" name="_ftnref36">36</a></sup>. Les pi&egrave;ces, en effet, pr&eacute;tendent &eacute;mouvoir le public en donnant aux h&eacute;ros et h&eacute;ro&iuml;nes des espaces de complainte &ndash; une d&eacute;marche redoubl&eacute;e, on l&rsquo;a vu, par des strat&eacute;gies sonores contrastives. Or, que se passe-t-il lorsque ces personnages eux-m&ecirc;mes ne se laissent pas toucher par les plaintes d&rsquo;autrui&nbsp;? Si les spectateurs et spectatrices sont mis face &agrave; la souffrance des protagonistes, ces derniers sont pour leur part confront&eacute;s &agrave; la plainte (diff&eacute;r&eacute;e) de la foule, dont on attend qu&rsquo;elle fasse aussi sur eux un certain effet. D&rsquo;autant plus que, dans la pens&eacute;e politique du temps, il est essentiel que le gouvernement en place pr&ecirc;te l&rsquo;oreille au peuple &ndash; m&ecirc;me si cela ne d&eacute;bouche sur aucune prise de d&eacute;cision. Ainsi que le note H. Merlin-Kajman,</p> <p><q>seule la volont&eacute; divine, communiqu&eacute;e directement &agrave; la volont&eacute; royale, fait la loi&nbsp;; et la plainte du peuple, toujours mineure, ne vaut pas plus que le g&eacute;missement d&rsquo;un enfant, qu&rsquo;un p&egrave;re doit bien s&ucirc;r prendre en compte pour &ecirc;tre un bon p&egrave;re<sup><a href="#_ftn37" id="_ftnref37" name="_ftnref37">37</a></sup>.</q></p> <p>Reste que celles et ceux qui d&eacute;rogent &agrave; cette &eacute;thique ne peuvent que provoquer une forme de m&eacute;fiance. Et voil&agrave; bien une autre fa&ccedil;on qu&rsquo;ont les auteurs d&rsquo;exploiter la voix publique&nbsp;: en plus de son apport esth&eacute;tique, le traitement de cette voix par les personnages permet d&rsquo;orienter le jugement du public sur leur qualit&eacute; morale et d&rsquo;&eacute;clairer sa lecture des enjeux tragiques.</p> <p>Ce ressort herm&eacute;neutique appara&icirc;t tr&egrave;s pr&eacute;sent dans la dramaturgie de Pierre Corneille. Et si dans&nbsp;<em>Horace</em>, l&rsquo;attention que les chefs pr&ecirc;tent aux soldats souligne leur probit&eacute; et permet &agrave; l&rsquo;&eacute;motion de circuler entre eux, la foule, les h&eacute;ro&iuml;nes et le public, nombre de ses &oelig;uvres exploitent au contraire la surdit&eacute; des rois &agrave; la plainte commune pour les antagoniser aux yeux de l&rsquo;assistance.&nbsp;<em>Othon</em>&nbsp;(1664) est de cette cat&eacute;gorie&nbsp;: en tant que trag&eacute;die politique qui retrace la destitution (et l&rsquo;assassinat) de Galba au profit d&rsquo;Othon par l&rsquo;arm&eacute;e romaine, la pi&egrave;ce fait du &laquo;&nbsp;bruit&nbsp;&raquo; populaire une voix centrale de la pi&egrave;ce. D&rsquo;abord rumeur indistincte, celle-ci va se muter en cri et souligner du m&ecirc;me coup l&rsquo;aspect tyrannique d&rsquo;un empereur qui refuse de l&rsquo;entendre. Aussi l&rsquo;effet pragmatique de la voix publique consiste-t-il ici non seulement &agrave; d&eacute;valoriser le camp de Galba (et &agrave; valoriser, en creux, celui d&rsquo;Othon), mais il op&egrave;re aussi, par voie de prolongement, sur le&nbsp;<em>suspense</em>&nbsp;de la pi&egrave;ce&nbsp;: en raison de la surdit&eacute; de l&rsquo;empereur &agrave; ses plaintes r&eacute;p&eacute;t&eacute;e, l&rsquo;arm&eacute;e et sa fureur deviennent le motif d&rsquo;une attente angoiss&eacute;e pour le public.</p> <p>D&egrave;s l&rsquo;ouverture, le consul Vinius raconte &agrave; Othon le m&eacute;contentement populaire &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de Galba&nbsp;:</p> <p><q>VINIUS.</q></p> <p><q>Galba vieil et cass&eacute;, qui se voit sans enfants,</q></p> <p><q>Croit qu&rsquo;on m&eacute;prise en lui la faiblesse des ans,</q></p> <p><q>[&hellip;] Il voit de toutes parts du&nbsp;<em>tumulte</em>&nbsp;excit&eacute;,</q></p> <p><q>Le soldat en Syrie est presque r&eacute;volt&eacute;.</q></p> <p><q>[&hellip;] Ce qu&rsquo;il a de vieux corps le souffre avec ennui,</q></p> <p><q>Tous les pr&eacute;toriens&nbsp;<em>murmurent</em>&nbsp;contre lui,</q></p> <p><q>[&hellip;] Il le sait, et pr&eacute;tend par un jeune Empereur</q></p> <p><q>Ramener les esprits, et calmer leur fureur. (I, 2, v. 147-160. Nous soulignons)</q></p> <p>&Agrave; nouveau, c&rsquo;est en tant que bruit rapport&eacute; par un personnage secondaire que se pr&eacute;sente la foule &agrave; l&rsquo;oreille des personnages &ndash; et du public &ndash;, pour faire r&eacute;sonner le lieu sc&eacute;nique de sons inqui&eacute;tants. Du moins ces sons&nbsp;<em>devraient-ils</em>&nbsp;inqui&eacute;ter les protagonistes. Le confirme le vocabulaire employ&eacute;&nbsp;: le terme de &laquo;&nbsp;murmure&nbsp;&raquo;, au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, renvoie non seulement au &laquo;&nbsp;bruit confus&nbsp;&raquo;, mais encore &agrave; la &laquo;&nbsp;plainte secrette de plusieurs personnes, sur quelque tort qu&rsquo;on leur fait<sup><a href="#_ftn38" id="_ftnref38" name="_ftnref38">38</a></sup>&nbsp;&raquo;. Aussi rend-il &eacute;vidente la dimension morale de la situation&nbsp;: Galba est mis face &agrave; une plainte que son statut d&rsquo;empereur requiert d&rsquo;&eacute;couter. En se faisant entendre d&egrave;s la deuxi&egrave;me sc&egrave;ne du premier acte, cette plainte place donc la trag&eacute;die sous le signe d&rsquo;une &eacute;meute en devenir, les spectateurs et spectatrices ne pouvant qu&rsquo;attendre anxieusement d&rsquo;en d&eacute;couvrir la r&eacute;solution.</p> <p>Or, si Galba semble initialement prendre acte du m&eacute;contentement des soldats en cherchant &agrave; &laquo;&nbsp;calmer leur fureur&nbsp;&raquo; par le choix d&rsquo;un rempla&ccedil;ant, la corruption de sa cour le fait vite d&eacute;vier du droit chemin. C&eacute;dant aux manipulations de ses conseillers, le personnage choisit Pison comme successeur, et refuse d&rsquo;entendre &agrave; cet &eacute;gard le d&eacute;saveu d&rsquo;une arm&eacute;e gagn&eacute;e &agrave; la cause d&rsquo;Othon. &laquo;&nbsp;L&rsquo;arm&eacute;e a vu Pison, mais avec un murmure&nbsp;/ Qui semblait mal go&ucirc;ter ce qu&rsquo;on vous fait d&rsquo;injure&nbsp;&raquo; (v. 1257-1258) l&acirc;che Vinius au h&eacute;ros &eacute;ponyme durant le quatri&egrave;me acte, accentuant toujours davantage l&rsquo;atmosph&egrave;re de r&eacute;volte qui baigne le camp romain. Cette r&eacute;volte ne se fait d&rsquo;ailleurs pas attendre. La plainte collective passe ensuite d&rsquo;outil dramaturgique &agrave; ressort dramatique, mais toujours par un biais verbal&nbsp;:</p> <p><q>RUTILE.</q></p> <p><q>Ah ! Madame, apprenez quel malheur nous menace.</q></p> <p><q>Quinze ou vingt r&eacute;volt&eacute;s au milieu de la place</q></p> <p><q>Viennent de proclamer Othon pour Empereur.</q></p> <p><q>[&hellip;] Ils le m&egrave;nent au camp, ou plut&ocirc;t ils l&rsquo;y portent,</q></p> <p><q>Et ce qu&rsquo;on voit de peuple autour d&rsquo;eux s&rsquo;amasser</q></p> <p><q>Fr&eacute;mit de leur audace, et les laisse passer. (IV, 7, v. 1473-1480)</q></p> <p>&Agrave; cet instant du drame, la puissance pragmatique de la voix publique est presque mise en abyme, puisque c&rsquo;est un acte performatif qu&rsquo;ex&eacute;cute l&rsquo;arm&eacute;e. En &laquo;&nbsp;proclamant&nbsp;&raquo; le r&egrave;gne d&rsquo;Othon, elle agit non seulement sur la situation politique de Rome, mais aussi sur le peuple autour d&rsquo;elle&nbsp;: cette seconde foule &laquo;&nbsp;fr&eacute;mit&nbsp;&raquo; et semble accorder &agrave; cette voix l&rsquo;autorit&eacute; qu&rsquo;elle r&eacute;clame &ndash; au contraire de l&rsquo;empereur et de ses conseillers, qui continuent de d&eacute;nier aux soldats toute puissance effective. En t&eacute;moigne la d&eacute;claration du pr&eacute;fet Lacus &agrave; Galba&nbsp;:</p> <p><q>LACUS.</q></p> <p><q>Tous ces mutins ne sont que de simples soldats,</q></p> <p><q>Aucun des chefs ne trempe en leurs vains attentats&nbsp;:</q></p> <p><q>Ainsi ne craignez rien d&#39;une masse d&#39;arm&eacute;e (V, 2, v. 1543-1545)</q></p> <p>Ce conseil, que suivra l&rsquo;empereur, r&eacute;v&egrave;le une forme d&rsquo;aveuglement du gouvernement en fonction<sup><a href="#_ftn39" id="_ftnref39" name="_ftnref39">39</a></sup>&nbsp;; sur le plan du spectacle, il a pour cons&eacute;quence d&rsquo;accentuer la tension qui sous-tend le drame et dont on pressent, en ce d&eacute;but de cinqui&egrave;me acte, qu&rsquo;elle est au bord de l&rsquo;&eacute;ruption.</p> <p>Cette &eacute;ruption va alors s&rsquo;op&eacute;rer en deux temps, dans une circulation de&nbsp;<em>on-dit&nbsp;</em>contradictoires qui place une fois encore la &ndash; ou plut&ocirc;t&nbsp;<em>les</em>&nbsp;voix des foules &agrave; la source d&rsquo;un intense suspense. C&rsquo;est d&rsquo;abord un &laquo;&nbsp;rapport&nbsp;&raquo; anonyme qui semble r&eacute;soudre l&rsquo;intrigue, avec l&rsquo;annonce de l&rsquo;assassinat d&rsquo;Othon&nbsp;:</p> <p><q>PLAUTINE.</q></p> <p><q>Je ne m&rsquo;en d&eacute;fends point, Madame, Othon est mort,</q></p> <p><q>De quiconque entre ici c&#39;est le commun rapport,</q></p> <p><q>Et son tr&eacute;pas pour vous n&rsquo;aura pas tant de charmes</q></p> <p><q>Qu&rsquo;&agrave; vos yeux comme aux miens il n&rsquo;en co&ucirc;te des larmes.</q></p> <p><q>GALBA.</q></p> <p><q>Dit-elle vrai, Rutile, ou m&#39;en flatt&eacute;-je en vain&nbsp;?</q></p> <p><q>RUTILE.</q></p> <p><q>Seigneur, le bruit est grand, et l&rsquo;auteur incertain.</q></p> <p><q>Tous veulent qu&rsquo;il soit mort, et c&rsquo;est la voix publique,</q></p> <p><q>Mais comment et par qui, c&#39;est ce qu&#39;aucun n&rsquo;explique. (V, 3, v. 1651-1658)</q></p> <p>Plongeant les personnages dans des &eacute;motions distinctes (la joie pour Galba, le d&eacute;sespoir pour Plautine), cette annonce ne fait toutefois office que de rebondissement pour mieux pr&eacute;parer le public au soulagement qui doit suivre. Car la v&eacute;rit&eacute; de la victoire d&rsquo;Othon et de son arm&eacute;e est r&eacute;tablie deux sc&egrave;nes plus tard. De mani&egrave;re int&eacute;ressante, ce sont des soldats en chair et en os qui viennent la r&eacute;v&eacute;ler&nbsp;:</p> <p><q><em>Deux soldats entrent et parlent &agrave; Atticus &agrave; l&rsquo;oreille.</em></q></p> <p><q>ATTICUS.</q></p> <p><q>Si vous aimez Othon, Madame, il va revivre,</q></p> <p><q>Et vous verrez longtemps sa vie en s&ucirc;ret&eacute;. (V, 5, v. 1718-1719)</q></p> <p>Bien qu&rsquo;ils ne puissent se faire entendre du public pour les raisons esth&eacute;tiques qu&rsquo;on sait, leur jeu de sc&egrave;ne sugg&egrave;re qu&rsquo;ils sont bien les porteurs de la nouvelle venant infirmer le &laquo;&nbsp;bruit&nbsp;&raquo; qu&rsquo;un &laquo;&nbsp;auteur incertain&nbsp;&raquo; avait fait courir dans le palais. Tout se passe donc comme si la foule elle-m&ecirc;me r&eacute;tablissait une v&eacute;rit&eacute; que des intrigants avaient brouill&eacute;e. Venant, comme l&rsquo;a not&eacute; Charles Mazouer, imposer de l&rsquo;ext&eacute;rieur la solution au huis clos<sup><a href="#_ftn40" id="_ftnref40" name="_ftnref40">40</a></sup>, elle s&rsquo;&eacute;rige en voix sup&eacute;rieure du drame qui ajoute sa sonorit&eacute; aux rumeurs ayant modul&eacute; la tension du spectacle, mais qui d&eacute;montre aussi la pluralit&eacute; des bruissements populaires qui peuvent venir se m&ecirc;ler dans le hors-sc&egrave;ne, formant un arri&egrave;re-fond discursif difficile &agrave; saisir, et dont le caract&egrave;re ambigu permet aux dramaturges d&rsquo;importants jeux de suspense.</p> <p>Dans la France du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, le populaire est exclu des plateaux tragiques. Mais comme nombre de r&egrave;gles de la p&eacute;riode, l&rsquo;interdit est pr&eacute;cis&eacute;ment exploit&eacute; par les dramaturges, &agrave; l&rsquo;image de Pierre Corneille, pour en tirer parti. En tant que sujet inadmissible du dialogue tragique mais objet important de la repr&eacute;sentation th&eacute;&acirc;trale, le bruit des foules est loin de se r&eacute;sumer &agrave; un on-dit distant qui ne serait que l&rsquo;objet de d&eacute;bats entre les protagonistes&nbsp;: la voix publique transpara&icirc;t &agrave; travers une multitude de manifestations sonores non seulement pour enrichir la texture auditive des spectacles, mais aussi pour&nbsp;<em>sugg&eacute;rer</em>&nbsp;une pr&eacute;sence bruyante et expressive op&eacute;rant sur les personnages ainsi que sur les spectateurs.</p> <hr /> <p><b>R&eacute;f&eacute;rences</b></p> <p><strong>Corpus des pi&egrave;ces &eacute;tudi&eacute;es&nbsp;:</strong></p> <p>Corneille Pierre,&nbsp;<em>&OElig;uvres compl&egrave;tes</em>, Georges Couton (&eacute;d.), Paris, Gallimard, &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que de la Pl&eacute;aide&nbsp;&raquo;, 1980, 3 tomes.</p> <p>Racine Jean,&nbsp;<em>B&eacute;r&eacute;nice</em>&nbsp;[1670],&nbsp;<em>in &OElig;uvres compl&egrave;tes I</em>, Georges Forestier (&eacute;d.), Paris, Gallimard, &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que de la Pl&eacute;iade &raquo;, 1999, p. 454-509.</p> <p>Tristan L&rsquo;Hermite,&nbsp;<em>Osman</em>&nbsp;[1646],&nbsp;<em>in&nbsp;</em>Roger Guichemerre (dir.),&nbsp;<em>Les Trag&eacute;dies. Tristan L&#39;Hermite</em>, Paris, Champion classiques, 2009, p. 465-538.</p> <p><strong>Sources secondaires&nbsp;:</strong></p> <p>Battista Anna Maria, &laquo;&nbsp;Morale &ldquo;priv&eacute;e&rdquo; et utilitarisme politique en France au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;Christian Lazzeri et Dominique Reyni&eacute; (dir.),&nbsp;<em>Le Pouvoir de la raison d&rsquo;&Eacute;tat</em>, Paris, Presses universitaires de France, 1992, p.&nbsp;191-230.</p> <p>Corneille Pierre,&nbsp;&laquo;&nbsp;Discours de la trag&eacute;die et des moyens de la traiter, selon le vraisemblable ou le n&eacute;cessaire<em>&nbsp;</em>&raquo;,&nbsp;<em>in Trois discours sur le po&egrave;me dramatique</em>&nbsp;[1660], Marc Escola et B&eacute;n&eacute;dicte Louvat (&eacute;d.), Paris, GF-Flammarion, 2021, p.&nbsp;95-132.</p> <p>Declercq Gilles, &laquo;&nbsp;Une voix doxale&nbsp;: l&rsquo;opinion publique dans les trag&eacute;dies de Racine&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>, n&deg;&nbsp;182, 1994, p.&nbsp;105-120.</p> <p>La Mesnardi&egrave;re Hippolyte de,&nbsp;<em>La Po&eacute;tique</em>&nbsp;[1640], &eacute;d. Jean-Marc Civardi, Paris, Champion, 2015.</p> <p>Louvat B&eacute;n&eacute;dicte, &laquo;&nbsp;Des bruitages au chant : la dimension sonore du spectacle dramatique au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>L&rsquo;Annuaire th&eacute;&acirc;tral</em>, n&deg; 22, 1997, p.&nbsp;129-146.</p> <p>Mazouer Charles, &laquo; Corneille et l&rsquo;espace : de la sc&egrave;ne au hors-sc&egrave;ne&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>in&nbsp;</em>Mara Fazio et Pierre Frantz (dir.),<em>&nbsp;La Fabrique du th&eacute;&acirc;tre. Avant la mise en sc&egrave;ne [1650-1880]</em>, Paris, Desjonqu&egrave;res, 2010, p.&nbsp;107-116.</p> <p>Merlin-Kajman H&eacute;l&egrave;ne, &laquo;&nbsp;Ce crime de nos larmes&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>L&rsquo;Esprit Cr&eacute;ateur</em>, vol. 57, n&deg;&nbsp;2, 2017, p.&nbsp;89-108.</p> <p>Merlin-Kajman H&eacute;l&egrave;ne,&nbsp;<em>Public et litt&eacute;rature en France au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>, Paris, Les Belles Lettres, 1994.</p> <p>&nbsp;</p> <hr /> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref1" id="_ftn1" name="_ftn1" title="&gt;&lt;span style=">1</a></sup>&nbsp;Nous nous permettons de renvoyer, au sujet de ce changement de paradigme, &agrave; notre essai&nbsp;<em>&Agrave; ch&oelig;ur perdu. Les traces du ch&oelig;ur antique dans la trag&eacute;die fran&ccedil;aise du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>, Lausanne, Archipel Essais, 2020.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref2" id="_ftn2" name="_ftn2" title="&gt;&lt;span style=">2</a></sup>&nbsp;Pierre Corneille, &laquo;&nbsp;Discours de la trag&eacute;die et des moyens de la traiter, selon le vraisemblable ou le n&eacute;cessaire&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;<em>Trois discours sur le po&egrave;me dramatique</em>&nbsp;[1660], Marc Escola et B&eacute;n&eacute;dicte Louvat (&eacute;d.), Paris, GF-Flammarion, 2021, p. 103. Difficile de ne pas percevoir les &eacute;chos aristot&eacute;liciens dans cette conception de la crainte et de la piti&eacute; comme les &eacute;motions tragiques par excellence. Sur l&rsquo;influence de sa&nbsp;<em>Po&eacute;tique</em>&nbsp;sur les dramaturges et th&eacute;oriciens du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, voir notamment B&eacute;n&eacute;dicte Louvat,&nbsp;<em>La Po&eacute;tique de la trag&eacute;die classique</em>, Paris, Sedes, 1997, p.&nbsp;90.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref3" id="_ftn3" name="_ftn3" title="&gt;&lt;span style=">3</a></sup>&nbsp;Hippolyte de La Mesnardi&egrave;re,<em>&nbsp;La Po&eacute;tique</em>, Jean-Marc Civardi (&eacute;d.), Paris, Champion, 2015, p.&nbsp;116.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref4" id="_ftn4" name="_ftn4" title="&gt;&lt;span style=">4</a></sup>&nbsp;<em>Ibid</em>., p.&nbsp;349.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref5" id="_ftn5" name="_ftn5" title="&gt;&lt;span style=">5</a></sup>&nbsp;B&eacute;n&eacute;dicte Louvat,&nbsp;<em>La Po&eacute;tique</em>,&nbsp;<em>op. cit</em>., p.&nbsp;92.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref6" id="_ftn6" name="_ftn6" title="&gt;&lt;span style=">6</a></sup>&nbsp;Lise Michel,&nbsp;<em>Des princes en figure. Politique et invention tragique en France (1630-1650)</em>, Paris, Presses de l&rsquo;universit&eacute; Paris-Sorbonne, 2013, p. 87 et 92.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref7" id="_ftn7" name="_ftn7" title="&gt;&lt;span style=">7</a></sup>&nbsp;Voir surtout Gilles Declercq, &laquo; Une voix doxale&nbsp;: l&rsquo;opinion publique dans les trag&eacute;dies de Racine &raquo;,&nbsp;<em>XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>, n&deg;182, 1994.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref8" id="_ftn8" name="_ftn8" title="&gt;&lt;span style=">8</a></sup>&nbsp;Philippe Le Guern, &laquo;&nbsp;Qu&rsquo;est-ce que les&nbsp;<em>Sound Studies</em>&nbsp;?&nbsp;&raquo;,<em>&nbsp;De ligne en ligne</em>, n&deg; 26, 2018, p.&nbsp;11.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref9" id="_ftn9" name="_ftn9" title="&gt;&lt;span style=">9</a></sup>&nbsp;Marceau Deschamps-S&eacute;gura, &laquo;&nbsp;Foule pour foule, gens pour gens&nbsp;: spectaculaire et f&ecirc;te dans le th&eacute;&acirc;tre du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle fran&ccedil;ais&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Cahiers FoReLLis (La Foule au th&eacute;&acirc;tre)</em>, 2015, en ligne&nbsp;:&nbsp;<a href="https://cahiersforell.edel.univ-poitiers.fr/index.php?id=281">https://cahiersforell.edel.univ-poitiers.fr/index.php?id=281</a>, consult&eacute; le 24/11/2022.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref10" id="_ftn10" name="_ftn10" title="&gt;&lt;span style=">10</a></sup>&nbsp;&Agrave; ce sujet se r&eacute;f&eacute;rer au recueil dirig&eacute; par Elena Bovo,&nbsp;<em>La Foule</em>, Besan&ccedil;on, Presses Universitaires de Franche-Comt&eacute;, 2015.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref11" id="_ftn11" name="_ftn11" title="&gt;&lt;span style=">11</a></sup>&nbsp;<em>Art</em>. &laquo;&nbsp;Foule&nbsp;&raquo;&nbsp;<em>in Dictionnaire de l&rsquo;Acad&eacute;mie fran&ccedil;aise</em>, 1694, en ligne&nbsp;:&nbsp;<a href="https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A1F0175-01">https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A1F0175-01</a>, consult&eacute; le 10/11/2022. Au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, le terme de &laquo;&nbsp;peuple&nbsp;&raquo; peut lui-m&ecirc;me &ecirc;tre employ&eacute; pour d&eacute;signer un regroupement humain &eacute;ph&eacute;m&egrave;re, et se confond r&eacute;guli&egrave;rement avec &laquo;&nbsp;la foule&nbsp;&raquo;. Ainsi l&rsquo;abb&eacute; d&rsquo;Aubignac explique-t-il, &agrave; propos d&rsquo;une repr&eacute;sentation tragique, qu&rsquo;&laquo;&nbsp;au lieu de faire voir, dans le renfondrement et en perspective, l&rsquo;image de la Pucelle au milieu d&rsquo;un feu allum&eacute; et environn&eacute; d&rsquo;un grand peuple [&hellip;], [les com&eacute;diens] firent peindre un m&eacute;chant tableau sans art&nbsp;&raquo; (pr&eacute;face &agrave;&nbsp;<em>La Pucelle d&rsquo;Orl&eacute;ans</em>, 1642. Nous soulignons).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref12" id="_ftn12" name="_ftn12" title="&gt;&lt;span style=">12</a></sup>&nbsp;Gilles Declercq,&nbsp;<em>art. cit.</em>, p.&nbsp;105.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref13" id="_ftn13" name="_ftn13" title="&gt;&lt;span style=">13</a></sup>&nbsp;<em>Ibid</em>., p.&nbsp;106-107.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref14" id="_ftn14" name="_ftn14" title="&gt;&lt;span style=">14</a></sup>&nbsp;<em>Ibid</em>., p. 119. Jean-Pierre N&eacute;raudau qualifie pour sa part Rome de &laquo;&nbsp;principe actif&nbsp;&raquo; int&eacute;rioris&eacute; dans Titus (&laquo;&nbsp;Mais o&ugrave; sont ces Romains que fait parler Racine&nbsp;?&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Litt&eacute;ratures classiques</em>, n&deg; 26 [<em>Les Trag&eacute;dies romaines de Racine, Britannicus, B&eacute;r&eacute;nice, Mithridate</em>], 1996, p.&nbsp;78).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref15" id="_ftn15" name="_ftn15" title="&gt;&lt;span style=">15</a></sup>&nbsp;Gilles Declercq,&nbsp;<em>art. cit</em>., p. 120.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref16" id="_ftn16" name="_ftn16" title="&gt;&lt;span style=">16</a></sup>&nbsp;Jean Racine,&nbsp;<em>B&eacute;r&eacute;nice</em>,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;<em>&OElig;uvres compl&egrave;tes I</em>, &eacute;d. Georges Forestier, Paris, Gallimard, &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que de la Pl&eacute;iade&nbsp;&raquo;, 1999, p.&nbsp;490.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref17" id="_ftn17" name="_ftn17" title="&gt;&lt;span style=">17</a></sup>&nbsp;Sarah Nancy, &laquo;&nbsp;Introduction&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;Sarah Nancy et Julia Gros de Gasquet (dir.),&nbsp;<em>La Voix du public en France aux XVII<sup>e</sup>&nbsp;et XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cles</em>, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2019, p.&nbsp;8.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref18" id="_ftn18" name="_ftn18" title="&gt;&lt;span style=">18</a></sup>&nbsp;Sandro Landi pr&eacute;cise que, quoique la notion n&rsquo;&eacute;merge qu&rsquo;au XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle dans le discours historique, le processus de l&eacute;gitimation de &laquo;&nbsp;l&rsquo;opinion publique&nbsp;&raquo; d&eacute;bute avec l&rsquo;absolutisme. Son sens recoupe en grande partie celui de la &laquo;&nbsp;<em>doxa</em>&nbsp;&raquo; : toutes deux ont un rapport &agrave; la v&eacute;rit&eacute; &laquo;&nbsp;toujours variable&nbsp;&raquo;, et font na&icirc;tre d&egrave;s lors des sentiments ambivalents&nbsp;: on consid&egrave;re depuis l&rsquo;Antiquit&eacute;, qu&rsquo;&laquo;&nbsp;en tant qu&rsquo;&eacute;nonciation impersonnelle, d&eacute;positaire d&rsquo;un sens occulte, [l&rsquo;opinion publique] a pr&eacute;somption d&rsquo;autorit&eacute; et de v&eacute;rit&eacute;, m&ecirc;me si cette derni&egrave;re, irr&eacute;ductible &agrave; la raison, peut parfois confiner &agrave; la folie&nbsp;&raquo; (Sandro Landi, &laquo; Notes pour une histoire de l&rsquo;opinion publique comme cat&eacute;gorie du discours politique &raquo;, 2009, en ligne&nbsp;:&nbsp;<a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00442080">https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00442080</a>, consult&eacute; le 25/11/2022).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref19" id="_ftn19" name="_ftn19" title="&gt;&lt;span style=">19</a></sup>&nbsp;H&eacute;l&egrave;ne Merlin-Kajman,&nbsp;<em>Public et litt&eacute;rature en France au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>, Paris, Les Belles Lettres, 1994, p.&nbsp;282.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref20" id="_ftn20" name="_ftn20" title="&gt;&lt;span style=">20</a></sup>&nbsp;&Agrave; ce sujet, voir par exemple B&eacute;n&eacute;dicte Louvat,&nbsp;<em>L&rsquo;&ldquo;Enfance de la trag&eacute;die&rdquo; (1610-1642). Pratiques tragiques fran&ccedil;aises de Hardy &agrave; Corneille</em>, Paris, Presses de l&rsquo;universit&eacute; Paris-Sorbonne, 2014.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref21" id="_ftn21" name="_ftn21" title="&gt;&lt;span style=">21</a></sup>&nbsp;D&rsquo;apr&egrave;s B&eacute;n&eacute;dicte Louvat, &laquo;&nbsp;Des bruitages au chant&nbsp;: la dimension sonore du spectacle dramatique au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>L&rsquo;Annuaire th&eacute;&acirc;tral</em>, n&deg; 22, 1997, p.&nbsp;129-146.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref22" id="_ftn22" name="_ftn22" title="&gt;&lt;span style=">22</a></sup>&nbsp;Tristan L&rsquo;Hermite,&nbsp;<em>Osman</em>,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;Roger Guichemerre (dir.),&nbsp;<em>Les Trag&eacute;dies</em>&nbsp;[2001], Paris, Champion classiques, 2009, p. 516.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref23" id="_ftn23" name="_ftn23" title="&gt;&lt;span style=">23</a></sup>&nbsp;Charles Sorel,&nbsp;<em>Polyandre, histoire comique</em>, &eacute;d. Patrick Dandrey et C&eacute;cile Toublet, Paris, Klinckisieck, 2010, p.&nbsp;39.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref24" id="_ftn24" name="_ftn24" title="&gt;&lt;span style=">24</a></sup>&nbsp;On pourrait int&eacute;grer ces bruitages &agrave; la &laquo;&nbsp;syntaxe du spectaculaire&nbsp;&raquo; th&eacute;oris&eacute;e par Guy Spielman&nbsp;; dans son &eacute;tude consacr&eacute;e &agrave; la th&eacute;&acirc;tralit&eacute; du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, le chercheur a montr&eacute; que la structure g&eacute;n&eacute;rale des arts du spectacle reposait alors sur un principe d&rsquo;it&eacute;ration et de vari&eacute;t&eacute; (&laquo;&nbsp;Pour une syntaxe du spectaculaire au XVII<sup>e</sup>&nbsp;et au XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cles&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;Marie-France Wagner et Claire Le Brun-Gouanvic (dir.),&nbsp;<em>Les Arts du spectacle au th&eacute;&acirc;tre (1550-1700)</em>, p. 219-260). Ne convient-il pas d&rsquo;inscrire ces &eacute;v&eacute;nements sonores dans la s&eacute;rie des effets vari&eacute;s qui rythmaient les repr&eacute;sentations&nbsp;?</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref25" id="_ftn25" name="_ftn25" title="&gt;&lt;span style=">25</a></sup>&nbsp;Tel ne sera plus le cas apr&egrave;s l&rsquo;av&egrave;nement de la dramaturgie r&eacute;guli&egrave;re, puisque &laquo;&nbsp;la fatalit&eacute; comme mode d&rsquo;explication des conduites humaines est incompatible avec un th&eacute;&acirc;tre dont les principes cl&eacute;s sont la vraisemblance et la n&eacute;cessit&eacute;&nbsp;&raquo; (B&eacute;n&eacute;dicte Louvat,&nbsp;<em>La Po&eacute;tique de la trag&eacute;die</em>,&nbsp;<em>op. cit</em>., p.&nbsp;18).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref26" id="_ftn26" name="_ftn26" title="&gt;&lt;span style=">26</a></sup>&nbsp;Voir notamment&nbsp;<em>Hercule mourant</em>&nbsp;(1634) et&nbsp;<em>Iphig&eacute;nie</em>&nbsp;(1640) de Jean de Rotrou.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref27" id="_ftn27" name="_ftn27" title="&gt;&lt;span style=">27</a></sup>&nbsp;<em>Art</em>. &laquo;&nbsp;Bruit&nbsp;&raquo;&nbsp;<em>in</em>&nbsp;Antoine Fureti&egrave;re,&nbsp;<em>Dictionnaire universel</em>&nbsp;(1694), en ligne&nbsp;:&nbsp;<a href="http://www.xn--furetire-60a.eu/index.php/non-classifie/1432748">http://www.fureti&egrave;re.eu/index.php/non-classifie/1432748</a>-, consult&eacute; le 17/11/2022.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref28" id="_ftn28" name="_ftn28" title="&gt;&lt;span style=">28</a></sup>&nbsp;Robert Muchembled,&nbsp;<em>Culture populaire et culture des &eacute;lites dans la France moderne (XV<sup>e</sup>-XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cles)</em>, Paris, Flammarion, 1978.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref29" id="_ftn29" name="_ftn29" title="&gt;&lt;span style=">29</a></sup>&nbsp;Anna Maria Battista, &laquo;&nbsp;Morale &ldquo;priv&eacute;e&rdquo; et utilitarisme politique en France au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;Christian Lazzeri et Dominique Reyni&eacute; (dir.),&nbsp;<em>Le Pouvoir de la raison d&rsquo;&Eacute;tat</em>, Paris, Presses universitaires de France, 1992, p.&nbsp;205.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref30" id="_ftn30" name="_ftn30" title="&gt;&lt;span style=">30</a></sup>&nbsp;<em>Ibid</em>.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref31" id="_ftn31" name="_ftn31" title="&gt;&lt;span style=">31</a></sup>&nbsp;Pierre Corneille,&nbsp;<em>Horace</em>,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;<em>&OElig;uvres compl&egrave;tes I</em>, &eacute;d. Georges Couton, Paris, Gallimard, &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que de la Pl&eacute;aide&nbsp;&raquo;, 1980, p.&nbsp;870-871. Toutes les citations de Pierre Corneille seront tir&eacute;es de cette &eacute;dition.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref32" id="_ftn32" name="_ftn32" title="&gt;&lt;span style=">32</a></sup>&nbsp;On retrouve ici la po&eacute;tique extra-sc&eacute;nique du texte corn&eacute;lien qu&rsquo;avait relev&eacute;e Charles Mazouer, consid&eacute;rant que &laquo;&nbsp;comme la mer, les &eacute;v&eacute;nements viennent battre au seuil [des] enceintes. Mutinerie de soldats ou tumulte du peuple, nouvelles venues de l&rsquo;ext&eacute;rieur se font sentir sur la sc&egrave;ne&nbsp;&raquo; (&laquo;&nbsp;Corneille et l&rsquo;espace&nbsp;: de la sc&egrave;ne au hors-sc&egrave;ne&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;Mara Fazio et Pierre Frantz (dir.),&nbsp;<em>La Fabrique du th&eacute;&acirc;tre. Avant la mise en sc&egrave;ne (1650-1880)</em>, Paris, Desjonqu&egrave;res, 2010, p.&nbsp;112).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref33" id="_ftn33" name="_ftn33" title="&gt;&lt;span style=">33</a></sup>&nbsp;Ce type de strat&eacute;gie est souvent d&eacute;ploy&eacute;e dans les actions qui impliquent la pr&eacute;sence d&rsquo;une arm&eacute;e, et o&ugrave; les h&eacute;ro&iuml;nes sont en principe tenues &agrave; l&rsquo;&eacute;cart de l&rsquo;agitation. C&rsquo;est &eacute;galement le cas dans&nbsp;<em>Manlius</em>&nbsp;de Mlle Desjardins (1662), qui op&egrave;re pour sa part un contraste inverse&nbsp;: l&rsquo;arm&eacute;e fait entendre des cris de victoire qui s&rsquo;opposent &agrave; la douleur d&rsquo;une autre Camille. Celle-ci ayant perdu son &eacute;poux dans la bataille, elle ressent &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de la joie collective un sentiment d&rsquo;exclusion qui intensifie sa peine&nbsp;: &laquo;&nbsp;Le tumulte du camp, les cris, et les alarmes / [Est] un grand obstacle &agrave; mes trop justes larmes &raquo; (I, 2, v. 25-26).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref34" id="_ftn34" name="_ftn34" title="&gt;&lt;span style=">34</a></sup>&nbsp;H&eacute;l&egrave;ne Merlin-Kajman, &laquo;&nbsp;Ce crime de nos larmes&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>L&rsquo;Esprit Cr&eacute;ateur</em>, vol. 57, n&deg;2, 2017, p.&nbsp;89-108.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref35" id="_ftn35" name="_ftn35" title="&gt;&lt;span style=">35</a></sup>&nbsp;<em>Ibid</em>., p.&nbsp;101.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref36" id="_ftn36" name="_ftn36" title="&gt;&lt;span style=">36</a></sup>&nbsp;<em>Ibid</em>., p.&nbsp;89.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref37" id="_ftn37" name="_ftn37" title="&gt;&lt;span style=">37</a></sup>&nbsp;<em>Ibid</em>., p.&nbsp;101.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref38" id="_ftn38" name="_ftn38" title="&gt;&lt;span style=">38</a></sup>&nbsp;<em>Art</em>. &laquo;&nbsp;Bruit&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;Antoine Fureti&egrave;re, Dictionnaire universel [1690], en ligne&nbsp;:&nbsp;<a href="http://www.xn--furetire-60a.eu/index.php/non-classifie/1432748">http://www.fureti&egrave;re.eu/index.php/non-classifie/1432748</a>-, consult&eacute; le 22/11/2022.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref39" id="_ftn39" name="_ftn39" title="&gt;&lt;span style=">39</a></sup>&nbsp;La perspective de Lacus fait &eacute;cho &agrave; la conception machiav&eacute;lienne du populaire : comme l&rsquo;explique Agn&egrave;s Cugno, la foule est pour Machiavel une entit&eacute; incapable de se gouverner elle-m&ecirc;me, qui a besoin d&rsquo;un guide &ndash; le Prince &ndash; agissant &laquo;&nbsp;dans le secret&nbsp;&raquo; pour la mener vers le bien commun (&laquo;&nbsp;Machiavel et le Masque&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;Antony&nbsp;McKenna et Pierre-Fran&ccedil;ois Moreau (dir.),&nbsp;<em>Libertinage et philosophie au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. Les Libertins et le masque&nbsp;: simulation et repr&eacute;sentation</em>, Saint-&Eacute;tienne, Publications de l&rsquo;Universit&eacute; de Saint-&Eacute;tienne, 2001, p.&nbsp;17).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref40" id="_ftn40" name="_ftn40" title="&gt;&lt;span style=">40</a></sup>&nbsp;Charles Mazouer,&nbsp;<em>art. cit.</em>, p.&nbsp;114.</p>