<p>La trag&eacute;die parl&eacute;e du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle se distingue par la forte r&eacute;duction de son personnel dramatique. Apr&egrave;s l&rsquo;abandon de la forme chorale au tournant des ann&eacute;es 1620, et pour redonner ses lettres de noblesse &agrave; un genre tomb&eacute; en d&eacute;faveur, les dramaturges s&rsquo;efforcent de concentrer leurs actions sur quelques personnages aristocratiques qui ont focalis&eacute; l&rsquo;attention de la critique. Et pour cause&nbsp;: les h&eacute;ros et h&eacute;ro&iuml;nes sont d&eacute;j&agrave; au centre du syst&egrave;me po&eacute;tique d&eacute;velopp&eacute; par les th&eacute;oriciens du temps. D&rsquo;une part parce que, selon Pierre Corneille, c&rsquo;est de ces personnages que doivent na&icirc;tre les &eacute;motions propres au genre&nbsp;: &laquo;&nbsp;la perfection de la trag&eacute;die consiste bien &agrave; exciter de la piti&eacute; et de la crainte par le moyen d&rsquo;un premier Acteur&nbsp;&raquo; (ou, dirions-nous, du personnage principal)&nbsp;; d&rsquo;autre part, car le principe de vraisemblance, pos&eacute; en pierre de touche de ce syst&egrave;me dramaturgique, rend impossible toute intervention verbale de figures populaires. &Eacute;tant donn&eacute; que la trag&eacute;die suppose un style &laquo;&nbsp;pompeux et sublime&nbsp;&raquo;, il n&rsquo;est pas&nbsp;<em>vraisemblable</em>, aux yeux des doctes, que de telles personnes puissent s&rsquo;exprimer en des termes suffisamment &eacute;lev&eacute;s pour prendre part aux dialogues. Les propos d&rsquo;Hippolyte de La Mesnardi&egrave;re, en 1639, rendent &eacute;vident le caract&egrave;re exclusif (pour ne pas dire &eacute;litiste) de la langue tragique&nbsp;; le th&eacute;oricien estime non seulement d&eacute;raisonnable qu&rsquo;un marchand &laquo;&nbsp;parle comme un prince&nbsp;&raquo;, mais il va jusqu&rsquo;&agrave; d&eacute;nier aux &laquo;&nbsp;gens de petite &eacute;toffe&nbsp;&raquo; la capacit&eacute; &agrave;&nbsp;<em>penser</em>&nbsp;dignement. Ainsi, sur les plans &eacute;thiques comme esth&eacute;tiques, la parole non-aristocratique n&rsquo;a plus sa place ni sur les plateaux tragiques, ni dans les th&eacute;ories dramatiques.</p>