<p>&Agrave; l&rsquo;heure o&ugrave; se radicalisent les blocs culturels en m&ecirc;me temps que l&rsquo;on assiste &agrave; la transition du monde vers un village plan&eacute;taire, il n&rsquo;est pas ais&eacute; de d&eacute;finir le&nbsp;<em>barbare</em>. En effet celui-ci est, dans l&rsquo;usage commun, associ&eacute; au civilis&eacute;. Or, il est reconnu aujourd&rsquo;hui qu&rsquo;il n&rsquo;existe pas qu&rsquo;une seule culture. Il est aussi admis qu&rsquo;il est impossible d&rsquo;&eacute;tablir une hi&eacute;rarchie fond&eacute;e entre les diff&eacute;rentes cultures. Cependant, l&rsquo;imaginaire social con&ccedil;oit le monde actuel comme &eacute;tant scind&eacute; culturellement en fonction de la g&eacute;olocalisation des puissances &eacute;conomiques, politiques et militaires. Certaines cultures sont tenues en estime tandis que d&rsquo;autres ne le sont pas. Toutefois, celles qui ne sont pas per&ccedil;ues comme &eacute;tant &eacute;gales &agrave; la culture regardante ne sont pas tenues pour barbares. Cette id&eacute;e est d&eacute;velopp&eacute;e par Samuel Huntington<sup><a href="#nbp_1" id="note_1" name="lien_nbp_1" title="Aller à la note de bas de page n°1">1</a></sup>&nbsp;qui distingue les civilisations occidentale, musulmane, chinoise, japonaise, hindouiste, slave-orthodoxe, africaine, latino-am&eacute;ricaine. Cette classification est faite uniquement sur la base du crit&egrave;re religieux. Ces consid&eacute;rations tendent &agrave; prouver qu&rsquo;on ne saurait parler de &laquo;&nbsp;barbare&nbsp;&raquo; dans les soci&eacute;t&eacute;s actuelles.</p> <p>N&eacute;anmoins, le fait est que l&rsquo;on parle volontiers de &laquo;&nbsp;barbares&nbsp;&raquo; de nos jours pour d&eacute;signer des individus ou des groupements humains dont les agissements s&rsquo;&eacute;loignent de ce qui est pos&eacute; comme norme. C&rsquo;est le cas de ceux qui sont d&eacute;sign&eacute;s sous l&rsquo;appellation de&nbsp;<em>terroristes</em>. En r&eacute;alit&eacute;, affirme Andr&eacute; Tosel, &laquo;&nbsp;Les terroristes qui s&rsquo;en prennent &agrave; des populations civiles innocentes sont pr&eacute;sent&eacute;s comme des sauvages et des barbares qui se mettent au ban de l&rsquo;humanit&eacute; et qu&rsquo;il ne faut m&ecirc;me pas reconna&icirc;tre comme des ennemis politiques mais traiter comme des gangsters<sup><a href="#nbp_2" id="note_2" name="lien_nbp_2" title="Aller à la note de bas de page n°2">2</a></sup>&nbsp;&raquo;. Il montre que dans les discours politiques actuels, le terroriste islamiste est le barbare qui menace la civilisation incarn&eacute;e par l&rsquo;Occident. Cette assimilation n&rsquo;est pas sans rapport avec l&rsquo;&eacute;volution du terme. Car, un regard r&eacute;trospectif indique un changement d&rsquo;acception. Quelle a &eacute;t&eacute; son &eacute;volution&nbsp;? Consid&eacute;rant que le terme est appliqu&eacute; aux populations de l&rsquo;Afrique &Eacute;quatoriale Fran&ccedil;aise et aux Allemands entre les deux guerres mondiales, y a-t-il eu migration&nbsp;? Pour r&eacute;pondre &agrave; cette double interrogation, cette communication propose de montrer, dans un premier temps, que le terme&nbsp;<em>barbare&nbsp;</em>a &eacute;t&eacute; un mot puis une notion, avant d&rsquo;&ecirc;tre un concept. Dans un second temps, mon propos montrera que le &laquo;&nbsp;n&egrave;gre&nbsp;&raquo; a &eacute;t&eacute; le&nbsp;<em>barbare</em>&nbsp;subsaharien de l&rsquo;&eacute;poque coloniale tandis que le &laquo;&nbsp;boche&nbsp;&raquo; a tenu lieu de&nbsp;<em>barbare&nbsp;</em>occidental durant les deux guerres mondiales.</p> <h2>1.&nbsp;<strong>Barbare&nbsp;: du mot au concept</strong></h2> <p>Andr&eacute; Rousseau dit du&nbsp;<em>barbare</em>&nbsp;: &laquo;&nbsp;Un fait est s&ucirc;r&nbsp;: c&rsquo;est un &ldquo;mot voyageur&rdquo; [&hellip;] qui n&rsquo;a subi pratiquement aucune modification phon&eacute;tique<sup><a href="#nbp_3" id="note_3" name="lien_nbp_3" title="Aller à la note de bas de page n°3">3</a></sup>. &raquo; L&rsquo;affirmation tient d&rsquo;autant plus qu&rsquo;il estime son origine akkadienne et sum&eacute;rienne. Cependant son champ s&eacute;mantique a &eacute;t&eacute; remodel&eacute;. &Agrave; sa source, il est employ&eacute; pour d&eacute;crire le langage incompr&eacute;hensible des Cariens du sud-est de l&rsquo;Asie Mineure. Le mot ne sert donc qu&rsquo;&agrave; d&eacute;signer la langue du non-Grec. En tant que mot, le terme &laquo;&nbsp;barbare&nbsp;&raquo; est d&eacute;nu&eacute; de toute connotation. Il est employ&eacute; pour indiquer que le locuteur est un bredouilleur. Ces consid&eacute;rations illustrent que le mot &laquo;&nbsp;barbare&nbsp;&raquo; est essentiellement reli&eacute; &agrave; l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; chez les Grecs. Il est la d&eacute;signation de l&rsquo;autre. Sous cet angle, le barbare peut &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; comme l&rsquo;&eacute;gal du Grec, quoique diff&eacute;rent de lui par sa langue, sa religion et sa culture. Il n&rsquo;y a donc aucune repr&eacute;sentation de l&rsquo;autre. Celui-ci est reconnu enti&egrave;rement dans son humanit&eacute;. Cela a &eacute;t&eacute; possible par le fait que le mot barbare a servi &agrave; &eacute;tablir un binarisme &ndash;&nbsp;Grec ou Barbare&nbsp;&ndash;, qui permettait au premier de se d&eacute;finir par opposition au second&nbsp;: une opposition fond&eacute;e sur la langue uniquement.</p> <p>Michel Dubuisson abonde dans ce sens lorsqu&rsquo;il souligne que ce binarisme est particulier. Car les Grecs ont dispos&eacute; d&rsquo;un terme g&eacute;n&eacute;rique pour d&eacute;signer tout ce qui n&rsquo;&eacute;tait pas eux bien avant de penser un terme correspondant pour se d&eacute;signer eux-m&ecirc;mes. Il souligne &eacute;galement le fait que le mot a une source plut&ocirc;t po&eacute;tique&nbsp;: il d&eacute;coule d&rsquo;une onomatop&eacute;e. Cette insistance sur l&rsquo;origine du mot montre que son acception ne peut &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute;e sur une base &eacute;tymologique. Contrairement &agrave; Andr&eacute; Rousseau qui met l&rsquo;accent sur le lien possible entre le barbare et le loup, et donne au mot un sens ethnique et p&eacute;joratif, Dubuisson conclut&nbsp;:</p> <p><q>En somme, ce ne sont pas les Barbares qui ont &eacute;t&eacute; d&eacute;finis, en n&eacute;gatif ou en creux, par rapport aux Grecs, mais bien les Grecs qui ont &eacute;t&eacute; d&eacute;finis par opposition aux Barbares : le terme &laquo;&nbsp;&Epsilon;&lambda;&lambda;&eta;&nu;&nbsp;&raquo;, comme on sait, n&rsquo;est pas chez Hom&egrave;re (du moins dans ce sens), et ce n&rsquo;est pas un hasard si sa premi&egrave;re d&eacute;finition, qui est aussi la plus c&eacute;l&egrave;bre, se trouve chez le &phi;&iota;&lambda;&omicron;&beta;ά&rho;&beta;&alpha;&rho;&omicron;&sigmaf; H&eacute;rodote. Cette particularit&eacute; a t&ocirc;t frapp&eacute; les intellectuels grecs eux-m&ecirc;mes : on ne peut mieux faire que renvoyer aux consid&eacute;rations d&eacute;velopp&eacute;es par Thucydide dans &laquo; arch&eacute;ologie &raquo;<sup><a href="#nbp_4" id="note_4" name="lien_nbp_4" title="Aller à la note de bas de page n°4">4</a></sup>&nbsp;!</q></p> <p>C&rsquo;est dans cette perspective qu&rsquo;on lira Strabon qui estime que l&rsquo;origine du terme ne contient aucune connotation p&eacute;jorative. Il dit &agrave; ce sujet : &laquo; je pense que le mot &ldquo;barbare&rdquo; a &eacute;t&eacute; prononc&eacute; au d&eacute;part comme une onomatop&eacute;e s&rsquo;appliquant &agrave; ceux qui parlent d&rsquo;une fa&ccedil;on peu distincte, rude et rauque, comme&nbsp;<em>&beta;&alpha;&tau;&tau;&alpha;&rho;ί&zeta;&epsilon;&iota;&nu;</em>&nbsp;(b&eacute;gayer),&nbsp;<em>&tau;&rho;&alpha;&upsilon;&lambda;ί&zeta;&epsilon;&iota;&nu;</em>&nbsp;(bl&eacute;ser) et&nbsp;<em>&psi;&epsilon;&lambda;&lambda;ί&zeta;&epsilon;&iota;&nu;</em>&nbsp;(balbutier)<sup><a href="#nbp_5" id="note_5" name="lien_nbp_5" title="Aller à la note de bas de page n°5">5</a></sup>.&nbsp;&raquo; Mais au cours de son histoire, le mot subira des transformations. Si sa forme demeure intacte, son acception varie, et ce d&egrave;s son entr&eacute;e dans le monde romain. Effectivement, il passera du bredouilleur de la Gr&egrave;ce archa&iuml;que &agrave; la b&ecirc;te sauvage tapie aux fronti&egrave;res de l&rsquo;Empire et de la civilisation romaine<sup><a href="#nbp_6" id="note_6" name="lien_nbp_6" title="Aller à la note de bas de page n°6">6</a></sup>. Dans l&rsquo;antiquit&eacute; gr&eacute;co-romaine, il s&rsquo;appliquera aux &ecirc;tres humains auxquels manque l&rsquo;<em>humanitas&nbsp;</em>; aux hordes mena&ccedil;ant les espaces civilis&eacute;s. Pour G&eacute;rard Rabinovitch, cette transition du mot &agrave; la notion date du V<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle avant l&rsquo;&egrave;re commune. C&rsquo;est &agrave; cette p&eacute;riode que le terme aura une signification culturelle et non plus simplement linguistique. Le &laquo;&nbsp;barbare&nbsp;&raquo; est alors quiconque vit hors des sph&egrave;res de domination des Cit&eacute;s-&Eacute;tats grecques. Le crit&egrave;re linguistique n&rsquo;est plus, &agrave; ce moment, pris en compte. Car, le barbare &eacute;tait aussi bien celui qui parle le grec que celui qui ne le parle<sup><a href="#nbp_7" id="note_7" name="lien_nbp_7" title="Aller à la note de bas de page n°7">7</a></sup>.</p> <p>Starobinski indique que cette &eacute;poque inaugure l&rsquo;&eacute;tablissement des notions de Barbarie et de Civilisation qui ne se d&eacute;finiront plus que par leur relation, dans une logique d&rsquo;opposition et d&rsquo;exclusion<sup><a href="#nbp_8" id="note_8" name="lien_nbp_8" title="Aller à la note de bas de page n°8">8</a></sup>. D&egrave;s lors, il fut &eacute;tabli une division entre les Grecs (et leurs vertus) et les barbares (et leurs vices). G&eacute;rard Rabinovitch affirme&nbsp;: &laquo;&nbsp;Cette distinction demeura &ndash; malgr&eacute; les remarques d&rsquo;Eratost&egrave;ne (livre II Geographia) qui avait propos&eacute; de ne pas opposer Grecs et Barbares, mais bons et mauvais : &ldquo;il y a des Grecs mauvais et des barbares bons&rdquo;<sup><a href="#nbp_9" id="note_9" name="lien_nbp_9" title="Aller à la note de bas de page n°9">9</a></sup>. &raquo;, avait-il estim&eacute;. Claude Yvon fait remarquer dans l&rsquo;<em>Encyclop&eacute;die</em>&nbsp;de Diderot et d&rsquo;Alembert dans la suite des temps, les Grecs ne s&rsquo;en servirent que pour marquer l&rsquo;extr&ecirc;me opposition qui se trouvait entre eux et les autres nations. Ils se consid&eacute;raient comme &eacute;tant modernes. Ils estimaient qu&rsquo;ils avaient perfectionn&eacute; leur go&ucirc;t et contribu&eacute; beaucoup aux progr&egrave;s de l&rsquo;esprit humain tandis que les autres nations n&rsquo;&eacute;taient pas encore d&eacute;pouill&eacute;es de la rudesse des premiers si&egrave;cles. Claude Yvon ajoute dans cette perspective que cette vision grecque du &laquo;&nbsp;barbare&nbsp;&raquo; est identique &agrave; celle des Romains. Il conclura que les Grecs et les Romains &eacute;taient jaloux de dominer plus encore par l&rsquo;esprit que par la force des armes<sup><a href="#nbp_10" id="note_10" name="lien_nbp_10" title="Aller à la note de bas de page n°10">10</a></sup>.</p> <p>Le terme a alors davantage la valeur d&rsquo;une notion. Il permet de poser le Grec et le Romain en tant que citoyen, par opposition au barbare qui est non-citoyen. Cette position avait pour corollaire la perception de l&rsquo;autre comme &ecirc;tre inf&eacute;rieur. Cependant, cela ne signifie pas qu&rsquo;il faille le combattre pour l&rsquo;&eacute;liminer physiquement. Cette appr&eacute;hension de l&rsquo;autre sera vivace durant la p&eacute;riode des invasions. L&rsquo;accent sera mis sur la sup&eacute;riorit&eacute; de la civilisation gr&eacute;co-romaine. La notion permettra alors de cr&eacute;er un sentiment d&rsquo;appartenance commune selon une logique de l&rsquo;endogroupe qui fixe les fronti&egrave;res et rejette ce qui est de l&rsquo;exogroupe. &Agrave; l&rsquo;&eacute;poque moderne, la notion verra son contenu changer&nbsp;: il acquerra la valeur d&rsquo;un concept.</p> <p>J&rsquo;entends par concept une repr&eacute;sentation mentale d&rsquo;une chose (objet anim&eacute; ou inanim&eacute;) dont l&rsquo;existence r&eacute;elle peut concorder ou non avec l&rsquo;id&eacute;e. Il s&rsquo;agit de l&rsquo;image qu&rsquo;un sujet se fait d&rsquo;une chose tout en l&rsquo;investissant d&rsquo;une fonction et d&rsquo;une connotation, sans que cette image ne corresponde &agrave; la r&eacute;alit&eacute; de la chose. &Agrave; partir de l&agrave;, le terme &laquo;&nbsp;barbare&nbsp;&raquo; dans les temps modernes peut &ecirc;tre per&ccedil;u comme un concept. Il renvoie &agrave; l&rsquo;image de l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;. C&rsquo;est au&nbsp;Vie&nbsp;si&egrave;cle qu&rsquo;il sera inscrit dans l&rsquo;imaginaire th&eacute;orique. Il sera charg&eacute; des valeurs figur&eacute;es et affectives. L&rsquo;imagologie fran&ccedil;aise de l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; montre que les repr&eacute;sentations de celle-ci ont toujours &eacute;t&eacute; bas&eacute;es sur la reconnaissance d&rsquo;un dualisme entre soi et les autres. Le &laquo;&nbsp;barbare&nbsp;&raquo; en constitue l&rsquo;une des figures saillantes qu&rsquo;il faut affronter. Cette hypoth&egrave;se est corrobor&eacute;e par Fr&eacute;d&eacute;ric Ramel qui atteste&nbsp;: &laquo;&nbsp;Depuis Euripide jusqu&rsquo;aux discours coloniaux du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, l&rsquo;Occident a v&eacute;hicul&eacute; de mani&egrave;re constante de telles repr&eacute;sentations de l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;<sup><a href="#nbp_11" id="note_11" name="lien_nbp_11" title="Aller à la note de bas de page n°11">11</a></sup>. &raquo; Dans le domaine des sciences politiques actuelles, la production acad&eacute;mique de ces derni&egrave;res ann&eacute;es constitue un &eacute;cho de ce dualisme pr&eacute;sent dans l&rsquo;imaginaire populaire. On peut entendre Mark Salter<sup><a href="#nbp_12" id="note_12" name="lien_nbp_12" title="Aller à la note de bas de page n°12">12</a></sup>&nbsp;soutenir que l&rsquo;essor des th&eacute;ories des relations internationales est li&eacute; &agrave; l&rsquo;identit&eacute; occidentale qui doit &ecirc;tre fond&eacute;e, elle-m&ecirc;me, sur la d&eacute;signation permanente des Barbares.</p> <p>&Agrave; bien y regarder, on se rend compte que ces positions ne sont pas sp&eacute;cifiques au XXI<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. Elles sont caract&eacute;ristiques de ce qui est appel&eacute; p&eacute;riode des&nbsp;<em>Grandes</em>&nbsp;<em>D&eacute;couvertes</em>, moment o&ugrave; l&rsquo;opposition Civilis&eacute;/Barbare devient radicalement un &eacute;l&eacute;ment constitutif de la modernit&eacute; de l&rsquo;Occident. D&egrave;s cette &egrave;re, l&rsquo;Europe est pos&eacute;e en parangon. Elle constitue la Civilisation. Ses habitants con&ccedil;oivent alors que hors de ces fronti&egrave;res, il n&rsquo;y a que des barbares. Ceux-ci &eacute;tant repr&eacute;sent&eacute;s comme tout ce qui pouvait d&eacute;truire la r&eacute;cente tradition civilisatrice de l&rsquo;&eacute;poque<sup><a href="#nbp_13" id="note_13" name="lien_nbp_13" title="Aller à la note de bas de page n°13">13</a></sup>. Retra&ccedil;ant la repr&eacute;sentation du barbare dans l&rsquo;imaginaire fran&ccedil;ais des temps modernes, G&eacute;rard Rabinovitch dira que celui-ci a &eacute;t&eacute; &agrave; la fois l&rsquo;inculte, le rude et le cruel. Le barbare est reconfigur&eacute; autour de la figure du &laquo;&nbsp;primitif&nbsp;&raquo; et articul&eacute; dans une lecture dor&eacute;navant hi&eacute;rarchique de la Civilisation. L&rsquo;homme blanc occidental s&rsquo;auto-d&eacute;cr&eacute;tait sup&eacute;rieur et, en m&ecirc;me temps, r&eacute;introduisait la figure du &laquo;&nbsp;primitif&nbsp;&raquo; dans le champ de la civilisation. Giraldi-Dei-Cas<sup><a href="#nbp_14" id="note_14" name="lien_nbp_14" title="Aller à la note de bas de page n°14">14</a></sup>&nbsp;rel&egrave;ve une migration du concept au d&eacute;but du XX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle &agrave; travers l&rsquo;&oelig;uvre du P&eacute;ruvien Ricardo Palma. Ce dernier en fait un marginal, consid&eacute;r&eacute; comme tel parce que n&rsquo;appartenant pas &agrave; l&rsquo;&eacute;lite sociale. Giraldi ajoute que dans la pens&eacute;e du sociologue Michel Wieviorka, &laquo;&nbsp;le barbare est celui qui vient mettre en cause ce que nous consid&eacute;rons &ecirc;tre des valeurs universelles<sup><a href="#nbp_15" id="note_15" name="lien_nbp_15" title="Aller à la note de bas de page n°15">15</a></sup>&nbsp;&raquo;. Il ressort des diff&eacute;rents ouvrages cinq traits atemporels pour le caract&eacute;riser. Le barbare est celui dont on ne comprend pas la langue et qui s&rsquo;exprime mal dans la n&ocirc;tre. Il vient d&rsquo;un pays &eacute;tranger &agrave; la civilisation de r&eacute;f&eacute;rence et en est &eacute;loign&eacute; dans l&rsquo;espace. Manquant de culture, il doit &ecirc;tre instruit. Caract&eacute;ris&eacute; par sa sauvagerie et ses cris de guerre, c&rsquo;est un &ecirc;tre cruel et inhumain qui commet des actes de barbarie. Pour Alain Desjacques<sup><a href="#nbp_16" id="note_16" name="lien_nbp_16" title="Aller à la note de bas de page n°16">16</a></sup>, il faut ajouter &agrave; cela son caract&egrave;re nomade, oppos&eacute; au civilis&eacute; s&eacute;dentaire, et sa figure eschatologique. &Agrave; l&rsquo;&egrave;re coloniale et durant les deux guerres mondiales, l&rsquo;usage du terme barbare se fera dans son acception conceptuelle. C&rsquo;est sous le prisme imagologique qu&rsquo;il servira &agrave; appr&eacute;hender l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; du &laquo;&nbsp;n&egrave;gre&nbsp;&raquo;.</p> <h2>2.&nbsp;<strong>&laquo;&nbsp;N&egrave;gre&nbsp;&raquo;&nbsp;: barbare subsaharien de l&rsquo;&egrave;re des empires coloniaux</strong></h2> <p>Dans le discours colonial, le &laquo;&nbsp;n&egrave;gre&nbsp;&raquo; est le barbare d&rsquo;Afrique subsaharienne. Pour les tenants de la colonisation, la France se devait d&rsquo;apporter la Civilisation &agrave; ces &laquo;&nbsp;peuplades&nbsp;&raquo; d&rsquo;Afrique qui &eacute;taient alors ent&eacute;n&eacute;br&eacute;es<sup><a href="#nbp_17" id="note_17" name="lien_nbp_17" title="Aller à la note de bas de page n°17">17</a></sup>. Cette conception de l&rsquo;Africain en barbare se fondait sur&nbsp;<em>le credo de l&rsquo;homme blanc</em>. Celui-ci consistait pour &laquo;&nbsp;l&rsquo;homme blanc&nbsp;&raquo; &agrave; s&rsquo;auto-d&eacute;finir et &agrave; repr&eacute;senter les autres sur la base de la&nbsp;<em>race</em><sup><a href="#nbp_18" id="note_18" name="lien_nbp_18" title="Aller à la note de bas de page n°18">18</a></sup>. On sait, avec l&rsquo;&eacute;tat actuel de la recherche, que cette notion n&rsquo;est pas op&eacute;ratoire pour l&rsquo;esp&egrave;ce humaine. Mais dans la pens&eacute;e coloniale, il existe diff&eacute;rentes races humaines qui prouvent la th&egrave;se &eacute;volutionniste. Il s&rsquo;agit notamment des races : blanche, jaune, rouge et noire. La race noire, plus proche du singe, serait la plus attard&eacute;e tandis que la blanche serait le plus haut niveau de l&rsquo;&eacute;volution. La premi&egrave;re articulation du cr&eacute;do est, pour ainsi dire, que &laquo; l&rsquo;homme blanc&nbsp;&raquo; est l&rsquo;Humanit&eacute; achev&eacute;e tandis que le &laquo;&nbsp;n&egrave;gre&nbsp;&raquo; est le cha&icirc;non manquant entre l&rsquo;Homme et le singe. Jules Ferry, justifiant la colonisation, avancera comme principes et mobiles en faveur de la politique d&rsquo;expansion :</p> <p><q>Je disais qu&rsquo;on pouvait rattacher ce syst&egrave;me &agrave; trois ordres d&rsquo;id&eacute;es&nbsp;: &agrave; des id&eacute;es &eacute;conomiques, &agrave; des id&eacute;es de civilisation de la plus haute port&eacute;e et &agrave; des id&eacute;es d&rsquo;ordre politique et patriotique. [&hellip;] Un second ordre d&rsquo;id&eacute;es que je dois &eacute;galement aborder, le plus rapidement possible, croyez-le bien : c&rsquo;est le c&ocirc;t&eacute; humanitaire et civilisateur de la question. [&hellip;] Il faut parler plus haut et plus vrai ! Il faut dire ouvertement qu&rsquo;en effet les races sup&eacute;rieures ont un droit vis-&agrave;-vis des races inf&eacute;rieures&hellip; Je r&eacute;p&egrave;te qu&rsquo;il y a pour les races sup&eacute;rieures un droit, parce qu&rsquo;il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inf&eacute;rieures<sup><a href="#nbp_19" id="note_19" name="lien_nbp_19" title="Aller à la note de bas de page n°19">19</a></sup>.</q></p> <p>L&rsquo;accomplissement d&rsquo;une &laquo;&nbsp;mission civilisatrice<sup><a href="#nbp_20" id="note_20" name="lien_nbp_20" title="Aller à la note de bas de page n°20">20</a></sup>&nbsp;&raquo;&nbsp;constitue donc le socle de l&rsquo;id&eacute;ologie coloniale. Toutefois, un autre pilier du cr&eacute;do reconna&icirc;t que malgr&eacute; ses efforts, &laquo;&nbsp;l&rsquo;homme blanc&nbsp;&raquo; ne parviendra jamais &agrave; &eacute;lever les &ecirc;tres dont la nature est cong&eacute;nitalement inf&eacute;rieure &agrave; la sienne jusqu&rsquo;&agrave; lui : &laquo;&nbsp;En cons&eacute;quence, le fardeau de l&rsquo;homme blanc doit &ecirc;tre revu &agrave; la baisse&nbsp;: accepter de soigner les tares visibles de ses fr&egrave;res inf&eacute;rieurs suffira &agrave; peine<sup><a href="#nbp_21" id="note_21" name="lien_nbp_21" title="Aller à la note de bas de page n°21">21</a></sup>. &raquo; La mission de la France est non seulement d&rsquo;apporter la civilisation, mais aussi de mettre en valeur le globe. Cela passe par la lutte contre la traite n&eacute;gri&egrave;re. En effet, la r&eacute;pression contre l&rsquo;esclavage fut, en ce qui concerne l&rsquo;Afrique, l&rsquo;un des arguments fondateurs de l&rsquo;id&eacute;ologie coloniale. &laquo;&nbsp;En vertu de sa &ldquo;mission civilisatrice&rdquo;, la France [&hellip;] entend, par exemple, mettre fin &agrave; la traite intra-africaine et &agrave; la traite arabo-musulmane. L&rsquo;esclavage est officiellement prohib&eacute; par les colonisateurs fran&ccedil;ais dans leurs possessions africaines, tant au Maghreb qu&rsquo;au sud du Sahara<sup><a href="#nbp_22" id="note_22" name="lien_nbp_22" title="Aller à la note de bas de page n°22">22</a></sup>&nbsp;&raquo;. Sous cet angle, le colonialisme unit les humanistes, les moralistes et les religieux. Pour les premiers, le colonialisme est une voie qui permettrait de donner la dignit&eacute; &agrave; l&rsquo;Homme mis en esclave en l&rsquo;affranchissant. Toutefois, l&rsquo;affranchissement ne saurait &ecirc;tre une fin en soi dans la mesure o&ugrave; les affranchis risquent d&rsquo;&ecirc;tre &agrave; nouveau des barbares s&rsquo;ils n&rsquo;ont pas &eacute;t&eacute; f&eacute;cond&eacute;s par l&rsquo;unique civilisation reconnue. Pour les moralistes, la pratique de l&rsquo;id&eacute;ologie permet l&rsquo;intervention d&rsquo;une puissance qui donne la libert&eacute; &agrave; chaque individu. Gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;id&eacute;ologie coloniale, toutes les composantes de l&rsquo;humanit&eacute; sont lib&eacute;r&eacute;es. Cependant, cette libert&eacute; ne peut &ecirc;tre pleinement v&eacute;cue que si l&rsquo;on quitte ces oripeaux barbares. C&rsquo;est un devoir pour les civilis&eacute;s d&rsquo;amener ceux qui sont en retard. Pour les religieux, la n&eacute;cessit&eacute; de la mise en pratique de cette id&eacute;ologie est prouv&eacute;e. Car, elle permet de sortir les non-chr&eacute;tiens de la servitude humaine pour les placer sous la servitude de la doctrine religieuse et la soumission au civilis&eacute;.</p> <p>&Agrave; l&rsquo;instar du Grec et du Romain, le Fran&ccedil;ais concevra des pr&eacute;jug&eacute;s sur son barbare. &Agrave; travers la litt&eacute;rature et l&rsquo;art, le &laquo;&nbsp;n&egrave;gre&nbsp;&raquo; sera d&eacute;crit dans des termes p&eacute;joratifs, identiques &agrave; ceux employ&eacute;s dans l&rsquo;antiquit&eacute; gr&eacute;co-romaine. Dans la chanson&nbsp;<em>N&eacute;nufar</em>&nbsp;d&rsquo;Alibert<sup><a href="#nbp_23" id="note_23" name="lien_nbp_23" title="Aller à la note de bas de page n°23">23</a></sup>, par exemple, on retrouve tous les st&eacute;r&eacute;otypes employ&eacute;s &agrave; l&rsquo;&eacute;poque coloniale pour le d&eacute;crire. Le titre de la chanson r&eacute;v&egrave;le, avant m&ecirc;me d&rsquo;avoir lu le texte, la repr&eacute;sentation qui est faite de l&rsquo;autre. Les termes employ&eacute;s pour &eacute;tablir la carte d&rsquo;identit&eacute; du g&eacute;notype de ce barbare d&rsquo;Afrique sont, entre autres&nbsp;: ridicule, pas intelligent, cruel, pas fiable, idiot, ne sachant pas parler fran&ccedil;ais. Dans cette chanson, Alibert dit de lui&nbsp;: &laquo;&nbsp;Pour &ecirc;tre &eacute;l&eacute;gant / C&rsquo;est aux pieds qu&rsquo;il mettait ses gants / N&eacute;nufar / T&rsquo;as du r&rsquo;tard / mais t&rsquo;es un p&rsquo;tit rigolard / T&rsquo;es nu comme un vers / Tu as le nez en l&rsquo;air / et les ch&rsquo;veux en paille de fer [&hellip;]<strong><em>&nbsp;/&nbsp;</em></strong>Faut pas croire toujours / c&rsquo;que N&eacute;nufar raconte. &raquo; D&rsquo;autre part, la r&eacute;f&eacute;rence &agrave; l&rsquo;exposition coloniale rappelle qu&rsquo;&agrave; cette p&eacute;riode les &laquo;&nbsp;n&egrave;gres&nbsp;&raquo; &eacute;taient enferm&eacute;s dans des cages comme dans un zoo, pour assouvir la curiosit&eacute; des visiteurs &laquo;&nbsp;blancs&nbsp;&raquo;. Le but de l&rsquo;exposition coloniale &eacute;tait de prouver le bien-fond&eacute; des conqu&ecirc;tes et des colonies. La description physique du &laquo;&nbsp;n&egrave;gre&nbsp;&raquo; renvoie, elle aussi, au barbare&nbsp;: sa laideur en fait un &ecirc;tre immonde. Les descriptions rappellent sans cesse sa bouche lippue, son nez &eacute;pat&eacute;, ses cheveux cr&eacute;pus et sa peau noire. Ces traits physiques sont, &agrave; cette &eacute;poque, caract&eacute;ristiques du barbare. Mais aujourd&rsquo;hui, on se rend compte que certains d&rsquo;entre eux font partie du canon de beaut&eacute;. C&rsquo;est le cas des l&egrave;vres et de la peau.</p> <figure><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" src="https://alepreuve.org/sites/alepreuve/files/Metogho-02.jpg" width="400" /></figure> <figure><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" src="https://alepreuve.org/sites/alepreuve/files/banania-00-1920.jpg" width="400" /></figure> <figure><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" src="https://alepreuve.org/sites/alepreuve/files/Metogho-04.jpg" width="400" /></figure> <figure><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" src="https://alepreuve.org/sites/alepreuve/files/Metogho-01.jpg" width="400" /> <figcaption>Image tir&eacute;e du jeu de Mauclair Dacier vers 1890<sup><a href="#nbp_24" name="lien_nbp_24">24</a></sup>.</figcaption> </figure> <p>Alors que le &laquo;&nbsp;n&egrave;gre&nbsp;&raquo; tenait lieu de barbare en Afrique &eacute;quatoriale, l&rsquo;av&egrave;nement des deux grandes guerres donna lieu &agrave; un nouveau type de barbare&nbsp;: le &laquo;&nbsp;boche&nbsp;&raquo;.</p> <h2>3.<strong>&laquo;&nbsp;Boche&nbsp;&raquo;&nbsp;: barbare occidental de l&rsquo;&egrave;re des empires coloniaux</strong></h2> <p>Chaque &eacute;poque a son barbare. Il en est de m&ecirc;me de chaque peuple. D&egrave;s la Premi&egrave;re Guerre, l&rsquo;Allemand s&rsquo;est vu attribuer&nbsp;cette &eacute;tiquette. Aussi bien dans la litt&eacute;rature, la presse, la culture populaire que dans les discours officiels, &laquo;&nbsp;boche&nbsp;&raquo; rime avec barbare. Les titres d&rsquo;ouvrages et de romans sont illustratifs &agrave; ce sujet. On citera ici&nbsp;<em>l&rsquo;Outrage des Barbares</em><sup><a href="#nbp_25" id="note_25" name="lien_nbp_25" title="Aller à la note de bas de page n°25">25</a></sup>,&nbsp;<em>Barbarie allemande : les faits, les origines, les causes, la th&eacute;orie</em><sup><a href="#nbp_26" id="note_26" name="lien_nbp_26" title="Aller à la note de bas de page n°26">26</a></sup>,&nbsp;<em>La barbarie commence &agrave; un</em><sup><a href="#nbp_27" id="note_27" name="lien_nbp_27" title="Aller à la note de bas de page n°27">27</a></sup>. Sur le plan m&eacute;diatique,&nbsp;<em>Le Poilu, Les Boyaux du 95<sup>e</sup>, Le Petit &Eacute;cho du 18<sup>e</sup>&nbsp;Territorial, Le Gafouilleur</em>, entre autres, sont des journaux qui regorgent d&rsquo;informations sur le sujet. Le premier constat que l&rsquo;on fait &agrave; la lecture de ces journaux est que l&rsquo;Allemand est presque syst&eacute;matiquement d&eacute;sign&eacute; par &laquo; boche&nbsp;&raquo;. Expliquant sa naissance et son &eacute;volution, l&rsquo;auteur de&nbsp;<em>Les insultes envers les Allemands</em>&nbsp;soutiendra que &laquo;&nbsp;Le&nbsp;<em>boche</em>&nbsp;(1879) est une aph&eacute;r&egrave;se d&rsquo;<em>Alboche</em>. Le suffixe&nbsp;<em>boche</em>&nbsp;a &eacute;t&eacute; utilis&eacute; en argot :&nbsp;<em>rigolboche</em>&nbsp;(1860), italboche. Le croisement de cette construction avec d&rsquo;autres expressions a renforc&eacute; les connotations n&eacute;gatives<sup><a href="#nbp_28" id="note_28" name="lien_nbp_28" title="Aller à la note de bas de page n°28">28</a></sup>&nbsp;&raquo;. Il ajoute que le concept est parti d&rsquo;<em>Allemoche</em>, avec un renforcement sur&nbsp;<em>moche</em>, &laquo; laid &raquo; ou&nbsp;<em>boche</em>&nbsp;qui d&eacute;signait le mauvais sujet, le libertin vers 1866. Il rappelait aussi qu&rsquo;il renvoie &agrave; la &laquo;&nbsp;t&ecirc;te de boche&nbsp;&raquo;, qui est &laquo;&nbsp;une t&ecirc;te de bois, une t&ecirc;te dure &agrave; Marseille et c&rsquo;est la boule qui sert &agrave; jouer &agrave; la p&eacute;tanque<sup><a href="#nbp_29" id="note_29" name="lien_nbp_29" title="Aller à la note de bas de page n°29">29</a></sup>&nbsp;&raquo;. Cet auteur indique &eacute;galement que le mot appara&icirc;t d&rsquo;abord en Lorraine, &agrave; Metz en 1862. Or &laquo;&nbsp;le&nbsp;<em>peu boch</em>, c&rsquo;est le vilain, le pas beau en dialecte lorrain. Le&nbsp;<em>boche</em>, ce ne serait donc pas simplement celui qui a le cr&acirc;ne dur, mais aussi celui qui a une t&ecirc;te laide et cela expliquerait le double emploi d&rsquo;<em>Allemoche</em>&nbsp;et d&rsquo;<em>Alleboche</em><sup><a href="#nbp_30" id="note_30" name="lien_nbp_30" title="Aller à la note de bas de page n°30">30</a></sup>&nbsp;&raquo;.</p> <p>Ces traits sont visibles dans les images que les concepteurs visuels feront des Allemands durant la Guerre. Dans l&rsquo;iconographie fran&ccedil;aise de cette p&eacute;riode, le soldat allemand se rapproche de l&rsquo;animal. C&rsquo;est une brute d&rsquo;une laideur extr&ecirc;me. Il porte souvent une barbe mal taill&eacute;e. Celle-ci est le signe de sa barbarie. Il est toujours coiff&eacute; d&rsquo;un casque &agrave; pointe, m&ecirc;me apr&egrave;s que celui-ci ait &eacute;t&eacute; remplac&eacute; par le casque d&rsquo;acier. &laquo;&nbsp;Le casque &agrave; pointe &ndash; le &ldquo;couvre-Boche&rdquo;, comme l&rsquo;on dit alors &ndash; est en effet consid&eacute;r&eacute; comme le symbole de l&rsquo;&ldquo;archa&iuml;sme&rdquo; du militarisme prussien, et pour cette raison souvent utilis&eacute; par la propagande<sup><a href="#nbp_31" id="note_31" name="lien_nbp_31" title="Aller à la note de bas de page n°31">31</a></sup>.&nbsp;&raquo; Le boche est le repr&eacute;sentant de la &laquo;&nbsp;Kultur&nbsp;&raquo;, figur&eacute;e comme la n&eacute;gation de la Civilisation dont la France incarne, au plus haut degr&eacute;, les valeurs. La &laquo;&nbsp;Kultur&nbsp;&raquo; allemande, aux yeux des fran&ccedil;ais, n&rsquo;est que grossi&egrave;ret&eacute;, vulgarit&eacute;, mat&eacute;rialisme et contrefa&ccedil;on. Le &laquo;&nbsp;boche&nbsp;&raquo; est, en outre, celui qui manque de raffinement. L&rsquo;imagologie fran&ccedil;aise dresse des portraits d&rsquo;Allemands gras, gros, dodus et les assimile &agrave; ce qu&rsquo;ils mangent. Cela dans le but de les r&eacute;duire &agrave; quelque chose d&rsquo;indigeste. Pierre Brouland rajoute qu&rsquo;on fait aussi de l&rsquo;Allemand une sorte de pourceau afin de lui &ocirc;ter toute humanit&eacute;. Il est alors caract&eacute;ris&eacute; par la salet&eacute;, la sottise et la bestialit&eacute;. C&rsquo;est ce qui se donne &agrave; voir dans les figures ci-apr&egrave;s.</p> <figure><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" src="https://alepreuve.org/sites/alepreuve/files/Metogho-101.jpg" width="350" /><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" src="https://alepreuve.org/sites/alepreuve/files/Metogho-061.jpg" width="350" /></figure> <figure><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" src="https://alepreuve.org/sites/alepreuve/files/Metogho-11.jpg" width="350" /></figure> <figure><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" src="https://alepreuve.org/sites/alepreuve/files/Metogho-091.jpg" width="350" /> <figcaption><em>Leurs faits d&rsquo;armes&nbsp;!</em>&nbsp;&Eacute;ditions MIRL de Lyon. Carte postale illustr&eacute;e sign&eacute;e &laquo;&nbsp;Jehane&nbsp;&raquo;..</figcaption> </figure> <p>Toute image r&eacute;sultant d&rsquo;une prise de conscience, l&rsquo;imagologie peut de fait servir &agrave; lire la repr&eacute;sentation mentale de l&rsquo;&eacute;tranger qui met en &eacute;vidence les rapports de force entre deux cultures. L&rsquo;image peut alors &ecirc;tre per&ccedil;ue comme &laquo;&nbsp;un puissant r&eacute;v&eacute;lateur des options et des opinions de la culture regardante<sup><a href="#nbp_32" id="note_32" name="lien_nbp_32" title="Aller à la note de bas de page n°32">32</a></sup>&nbsp;&raquo;. &Agrave; travers l&rsquo;imagologie, il est possible de percevoir les options politiques et id&eacute;ologiques de la culture regardante sur elle-m&ecirc;me, d&rsquo;une part. D&rsquo;autre part, comme l&rsquo;autre face d&rsquo;une m&ecirc;me pi&egrave;ce, on peut apercevoir les opinions de cette culture sur celle(s) qu&rsquo;elle regarde. Cette hypoth&egrave;se est justifi&eacute;e par Jo&euml;l Bernat au sujet du barbare<sup><a href="#nbp_33" id="note_33" name="lien_nbp_33" title="Aller à la note de bas de page n°33">33</a></sup>. Son texte illustre que le barbare fait partie des&nbsp;<em>topo&iuml;&nbsp;</em>incontournables qui permettent &agrave; un groupe social ou &agrave; un individu de localiser et de canaliser sa haine. Son utilit&eacute; r&eacute;side dans sa capacit&eacute; &agrave; faciliter l&rsquo;auto-d&eacute;finition. Dans le jeu binaire de sym&eacute;tries qui s&rsquo;&eacute;tablit entre barbare et civilis&eacute;, &laquo;&nbsp;ce n&rsquo;est pas l&rsquo;humain (le joueur) qui change, mais les formes d&rsquo;expression (les r&egrave;gles du jeu) qui &eacute;voluent&nbsp;: elles utilisent comme ressources la science, la culture ou la Morale<sup><a href="#nbp_34" id="note_34" name="lien_nbp_34" title="Aller à la note de bas de page n°34">34</a></sup>&nbsp;&raquo;. Il s&rsquo;agit donc d&rsquo;une image phobique de l&rsquo;autre. Ce fut le cas du &laquo;&nbsp;boche&nbsp;&raquo;.</p> <p>On retrouve la canalisation de la haine du &laquo;&nbsp;boche&nbsp;&raquo; dans les journaux de guerre de cette &eacute;poque. Parlant des Allemands, F&eacute;lix Klein s&rsquo;&eacute;crie&nbsp;: &laquo; Les Barbares&nbsp;! Ce nom me faisait mal, nagu&egrave;re, [&hellip;] et je l&rsquo;estimais d&rsquo;une pol&eacute;mique grossi&egrave;re&nbsp;; or, l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement prouve qu&rsquo;il ne dit rien de trop. Quel autre peuple, au monde, se conduirait comme eux, envahirait des voisins pacifiques, les tuerait par milliers [&hellip;]<sup><a href="#nbp_35" id="note_35" name="lien_nbp_35" title="Aller à la note de bas de page n°35">35</a></sup>&nbsp;?&nbsp;&raquo; Ces propos trouvent &eacute;cho dans ceux de G&eacute;o Dorival qui compare le &laquo;&nbsp;boche&nbsp;&raquo; &agrave; la tuberculose dans une affiche de 1917. Il y &eacute;crit&nbsp;: &laquo;&nbsp;2 fl&eacute;aux&nbsp;: le Boche, la Tuberculose. L&rsquo;aigle boche sera vaincu, la tuberculose doit l&rsquo;&ecirc;tre aussi<sup><a href="#nbp_36" id="note_36" name="lien_nbp_36" title="Aller à la note de bas de page n°36">36</a></sup>.&nbsp;&raquo; C&rsquo;est dans cette perspective que l&rsquo;on lira le sixi&egrave;me num&eacute;ro du&nbsp;<em>Gafouilleur</em>&nbsp;qui, parlant de l&rsquo;Allemand dans un article intitul&eacute; &laquo;&nbsp;Le voisin d&rsquo;en face&nbsp;&raquo;, publie les lignes suivantes&nbsp;:</p> <p><q>Quand cet &eacute;tranger vint s&rsquo;installer dans le pays, sa mauvaise r&eacute;putation l&rsquo;avait pr&eacute;c&eacute;d&eacute;. Depuis, ce que nous avons pu conna&icirc;tre de ses m&oelig;urs et de ses habitudes ne nous donne pas bien haute opinion de sa personne. [&hellip;] il r&eacute;pond plus g&eacute;n&eacute;ralement au nom de Fritz. [&hellip;], disciple de notre Jean-Jacques, il r&ecirc;ve de voir revenir les hommes aux m&oelig;urs des premiers temps de l&rsquo;humanit&eacute;. Mais pour retrouver cet &acirc;ge d&rsquo;or, il faut d&rsquo;abord passer une seconde fois par l&rsquo;&acirc;ge de pierre et faire retour aux coutumes de l&rsquo;homme des cavernes.&nbsp;&raquo; Il est sauvage, gourmand, manque d&rsquo;&eacute;ducation.</q></p> <h2>4.<strong>Ouverture</strong></h2> <p>Il existe une abondante litt&eacute;rature sur le barbare, la barbarie et leur champ s&eacute;mantique. Ce propos voulait cerner uniquement la migration du concept &agrave; l&rsquo;&egrave;re des grands empires coloniaux. Pour cela, il fallait d&rsquo;abord montrer l&rsquo;&eacute;volution du terme qui indique qu&rsquo;il est tour &agrave; tour un mot, une notion et un concept. C&rsquo;est en tant que concept qu&rsquo;il a &eacute;t&eacute; appliqu&eacute; aux Africains du sud du Sahara et aux Allemands. L&rsquo;Africain n&rsquo;&eacute;tait barbare qu&rsquo;en tant que &laquo;&nbsp;n&egrave;gre&nbsp;&raquo;. L&rsquo;Allemand l&rsquo;&eacute;tait en tant que &laquo;&nbsp;boche&nbsp;&raquo;. Il ressort de ces analyses que l&rsquo;affect n&rsquo;est pas le m&ecirc;me selon qu&rsquo;il s&rsquo;agit du &laquo;&nbsp;boche&nbsp;&raquo; ou du &laquo;&nbsp;n&egrave;gre&nbsp;&raquo;. Le Fran&ccedil;ais aborde le barbare &laquo; n&egrave;gre&nbsp;&raquo; avec compassion et paternalisme tandis qu&rsquo;il &eacute;prouve de la haine &agrave; l&rsquo;&eacute;gard du barbare &laquo;&nbsp;boche&nbsp;&raquo;. On note un malaise dans la d&eacute;finition du concept. En effet, certains actes attribu&eacute;s aux Allemands et qui font d&rsquo;eux des barbares sont pos&eacute;s par les Fran&ccedil;ais en Afrique &Eacute;quatoriale durant la p&eacute;riode coloniale. C&rsquo;est le cas des incendies des villages et des plantations&nbsp;; des arrestations arbitraires et des tortures&nbsp;; des s&eacute;questrations des enfants, des femmes et des vieillards ainsi que des viols. Cependant, l&rsquo;entreprise coloniale n&rsquo;a pas &eacute;t&eacute; per&ccedil;ue comme un projet barbare, encore moins ses agents comme des barbares.</p> <p>Il se pose finalement la question du contenu et des crit&egrave;res de d&eacute;finition. Qu&rsquo;est-ce qu&rsquo;&ecirc;tre barbare&nbsp;? Qu&rsquo;est-ce qu&rsquo;&ecirc;tre civilis&eacute;&nbsp;? Donnant une r&eacute;ponse provisoire &agrave; cette double interrogation, Andr&eacute; Tosel dit&nbsp;: &laquo;&nbsp;le civilis&eacute; est celui qui accomplit les capacit&eacute;s d&rsquo;agir et de pens&eacute;e o&ugrave; se construit l&rsquo;humain&nbsp;: le barbare est celui qui ne conna&icirc;t pas ou ne reconna&icirc;t pas l&rsquo;humain d&eacute;fini par ses accomplissements dans l&rsquo;agir et la pens&eacute;e et qui les d&eacute;truit faisant ainsi preuve d&rsquo;une violence contre-productive<sup><a href="#nbp_37" id="note_37" name="lien_nbp_37" title="Aller à la note de bas de page n°37">37</a></sup>. &raquo; Ce qui se lit entre les mots de Tosel est que la civilisation est une agglom&eacute;ration d&rsquo;agir et de pens&eacute;e. Cette r&eacute;ponse ne peut &ecirc;tre valable que dans certains contextes. Car, l&rsquo;agir et la pens&eacute;e puisent dans l&rsquo;environnement qui entoure le sujet, dans ses besoins quotidiens et dans sa fa&ccedil;on d&rsquo;habiter le monde. Il est donc &eacute;vident qu&rsquo;on ne peut &ecirc;tre civilis&eacute; que par rapport &agrave; un milieu sp&eacute;cifique. On ne peut pas &ecirc;tre civilis&eacute; sans appartenir &agrave; un groupe. Or, ce qui est d&eacute;cr&eacute;t&eacute; comme civilisation dans un groupe ne l&rsquo;est pas forc&eacute;ment dans un autre. Dans la suite de son propos, Tosel se pose la question &laquo;&nbsp;Quelles sont les formes concr&egrave;tes de l&rsquo;humain&nbsp;?&nbsp;&raquo;. Cette interrogation a lieu d&rsquo;&ecirc;tre d&rsquo;autant qu&rsquo;il tente d&rsquo;y r&eacute;pondre en ne prenant appui que sur la pens&eacute;e &laquo;&nbsp;occidentale&nbsp;&raquo;. Or, c&rsquo;est elle qui regarde les autres groupes et d&eacute;cr&egrave;te ce qui est barbare ou qui ne l&rsquo;est pas. Finalement, ne sommes-nous pas tous les barbares des autres&nbsp;?</p> <hr /> <h2>Notes et r&eacute;f&eacute;rences</h2> <p><a href="#lien_nbp_1" name="nbp_1">1 </a>Samuel P. Huntington,&nbsp;<em>Le choc des civilisations</em>, Paris, Odile Jacob, 2000.</p> <p><a href="#lien_nbp_2" name="nbp_2">2 </a>Andr&eacute; Tosel, &laquo;&nbsp;Barbarie et choc des civilisations&nbsp;&raquo; [en ligne],&nbsp;<a href="http://www.lafauteadiderot.net/Barbarie-et-choc-des-civilisations">http://www.lafauteadiderot.net/Barbarie-et-choc-des-civilisations</a>, [consult&eacute; le 30 mai 2015].</p> <p><a href="#lien_nbp_3" name="nbp_3">3 </a>Andr&eacute; Rousseau, &laquo;&nbsp;Le mot&nbsp;<em>barbare</em>&nbsp;dans le vocabulaire indo-europ&eacute;en&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>&Eacute;tudes inter-ethniques</em>,&nbsp;n&deg;10, Lille, Universit&eacute; Charles de Gaulle Lille 3, 1995, p. 15-26.</p> <p><a href="#lien_nbp_4" name="nbp_4">4 </a>Michel Dubuisson, &laquo;&nbsp;Barbares et barbarie dans le monde gr&eacute;co-romain&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>L&rsquo;antiquit&eacute; classique&nbsp;</em>[en ligne], Tome 70, 2001. p. 1,&nbsp;<a href="http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/antiq_0770-2817_2001_num_70_1_2448">http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/antiq_0770-2817_2001_num_70_1_2448</a>&nbsp;[consult&eacute; le 30 mai 2015].</p> <p><a href="#" name="nbp_5">5 </a>Strabon, cit&eacute; par Michel Dubuisson,&nbsp;<em>op. cit</em>.</p> <p><a href="#lien_nbp_6" name="nbp_6">6 </a>Michel Dubuisson,&nbsp;<em>op. cit</em>.</p> <p><a href="#" name="nbp_7">7 </a>Hartog Fran&ccedil;ois,&nbsp;<em>Le Miroir d&rsquo;H&eacute;rodote</em>, Paris, Gallimard, 1980.</p> <p><a href="#" name="nbp_8">8 </a>Jean Starobinski, &laquo;&nbsp;le mot civilisation&nbsp;&raquo; dans&nbsp;<em>Le Rem&egrave;de dans le Mal</em>, Paris, Gallimard, 1989.</p> <p><a href="#lien_nbp_9" name="nbp_9">9 </a>G&eacute;rard Rabinovitch, &laquo;&nbsp;Figures de la barbarie&nbsp;&raquo; dans&nbsp;<em>Pard&egrave;s,&nbsp;</em>n&deg; 38 (2005) [en ligne], p. 65-82,&nbsp;<a href="http://www.cairn.info/revue-pardes-2005-1-page-65.htm">http://www.cairn.info/revue-pardes-2005-1-page-65.htm</a>&nbsp;[consult&eacute; le 07octobre 2015].</p> <p><a href="#lien_nbp_10" name="nbp_10">10 </a>Yvon Claude, &laquo;&nbsp;Barbares&nbsp;&raquo; dans Diderot et d&rsquo;Alembert [dir.],&nbsp;<em>Encyclop&eacute;die&nbsp;</em>[en ligne], p. 2,&nbsp;<a href="http://artflsrv02.uchicago.edu/cgi-bin/philologic/getobject.pl?c.1:380.encyclopedie0513">http://artflsrv02.uchicago.edu/cgi-bin/philologic/getobject.pl?c.1:380.encyclopedie0513</a>&nbsp;[consult&eacute; le 07octobre 2015].</p> <p><a href="#lien_nbp_11" name="nbp_11">11 </a>Fr&eacute;d&eacute;ric Ramel, &laquo;&nbsp;Le barbare : une nouvelle cat&eacute;gorie strat&eacute;gique ?&nbsp;&raquo; dans&nbsp;<em>Strat&eacute;gique&nbsp;</em>[en ligne], 2009, p. 685,&nbsp;<a href="https://hal-sciencespo.archives-ouvertes.fr/hal-01052803">https://hal-sciencespo.archives-ouvertes.fr/hal-01052803</a>&nbsp;[consult&eacute; le 30 mai 2015].</p> <p><a href="#lien_nbp_12" name="nbp_12">12 </a>Mark B. Salter,&nbsp;<em>Barbarians and Civilization in International Relations,&nbsp;</em>Londres, Pluto Press, 2002, passim.</p> <p><a href="#lien_nbp_13" name="nbp_13">13 </a>Norbert &Eacute;lias,&nbsp;<em>La Civilisation des m&oelig;urs</em>, Paris, Calmann-Levy, 1973.</p> <p><a href="#lien_nbp_14" name="nbp_14">14 </a>Norah Giraldi-Dei-Cas [dir.],&nbsp;<em>Lieux et figures de la barbarie</em>, Bruxelles, P.I.E. Peter Lang, 2014, p.13.</p> <p><a href="#lien_nbp_15" name="nbp_15">15&nbsp;</a><em>Ibidem</em>.</p> <p><a href="#lien_nbp_16" name="nbp_16">16 </a>Alain Desjacques, &laquo;&nbsp;Y a-t-il une civilisation de Barbares&nbsp;? Le cas des Mongols dans l&rsquo;histoire&nbsp;&raquo; dans Norah Giraldi-Dei-Cas [dir.],&nbsp;<em>op. cit</em>., p. 78.</p> <p><a href="#lien_nbp_17" name="nbp_17">17 </a>Lire &agrave; ce propos, entre autres, Benjamin Stora,&nbsp;<em>La guerre des m&eacute;moires. La France face &agrave; son pass&eacute; colonial</em>, Paris, &eacute;ditions de l&rsquo;aube, 2007&nbsp;; Eug&egrave;ne-Jean Duval,&nbsp;<em>Aux sources officielles de la colonisation fran&ccedil;aise 1870-1940</em>, Paris, L&rsquo;Harmattan, 2008&nbsp;; Yves Monnier,&nbsp;<em>L&rsquo;Afrique dans l&rsquo;imaginaire fran&ccedil;ais&nbsp;: (fin du XIX<sup>e&nbsp;</sup>d&eacute;but du XX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>)<em>,&nbsp;</em>Paris, L&rsquo;Harmattan, 1999.</p> <p><a href="#lien_nbp_18" name="nbp_18">18 </a>Lire &agrave; cet effet, entre autres, Pascal Blanchard, Sandrine Lemaire&nbsp;<em>et</em>&nbsp;<em>al.</em>,&nbsp;<em>Culture coloniale 1871-1931. La France conquise par son empire</em>, Paris, Autrement, 2003&nbsp;; Raoul Girardet,&nbsp;<em>L&rsquo;id&eacute;e coloniale en France</em>, Paris, Table Ronde 1972, Hachette, coll. &laquo;&nbsp;Litt&eacute;ratures&nbsp;&raquo;, 2005&nbsp;; Arthur Gobineau,&nbsp;<em>Essai sur l&rsquo;in&eacute;galit&eacute; des races humaines</em>, Paris, P. Belfond, 1853-1855.</p> <p><a href="#lien_nbp_19" name="nbp_19">19</a> Discours prononc&eacute; par Jules Ferry &agrave; la Chambre des d&eacute;put&eacute;s le 28 juillet 1885.</p> <p><a href="#lien_nbp_20" name="nbp_20">20 </a>Ce fut ce sur quoi se fondait la politique coloniale appliqu&eacute;e &agrave; l&rsquo;Afrique et &agrave; l&rsquo;Am&eacute;rique du Nord. Francis Garnier &eacute;crira &agrave; ce propos dans&nbsp;<em>La Cochinchine fran&ccedil;aise&nbsp;</em>: &laquo;&nbsp;Un pays comme la France, quand il pose le pied sur une terre &eacute;trang&egrave;re et barbare, doit-il se proposer exclusivement pour but l&rsquo;extension de son commerce et se contenter de ce mobile unique, l&rsquo;app&acirc;t du gain&nbsp;? Cette nation g&eacute;n&eacute;reuse dont l&rsquo;opinion r&eacute;git l&rsquo;Europe civilis&eacute;e et dont les id&eacute;es ont conquis le monde, a re&ccedil;u de la Providence une plus haute mission, celle de l&rsquo;&eacute;mancipation, de l&rsquo;appel aux Lumi&egrave;res et &agrave; la libert&eacute; des races et des peuples encore esclaves de l&rsquo;ignorance et du despotisme.&nbsp;&raquo;, pp. 44-45.</p> <p><a href="#lien_nbp_21" name="nbp_21">21 </a>Alain Ruscio,&nbsp;<em>Le&nbsp;cr&eacute;do de l&rsquo;homme blanc</em>, Paris, Complexe, 2002, p. 36.</p> <p><a href="#lien_nbp_22" name="nbp_22">22 </a>Sophie Dulucq&nbsp;<em>et</em>&nbsp;<em>al.</em>,&nbsp;<em>Les mots de la colonisation</em>, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 2008, p. 45.</p> <p><a href="#lien_nbp_23" name="nbp_23">23 </a>Alibert,&nbsp;<em>N&eacute;nufar</em>, chanson choisie pour le Marche Officielle de l&rsquo;Exposition Coloniale en 1931.</p> <p><a href="#lien_nbp_24" name="nbp_24">24 </a>Voir&nbsp;<a href="http://www.jeuxanciensdecollection.com/article-couleur-cafe-et-chocolat-noir-116881720.html">http://www.jeuxanciensdecollection.com/article-couleur-cafe-et-chocolat-noir-116881720.html</a>&nbsp;[consult&eacute; le 06/10/2015].</p> <p><a href="#lien_nbp_25" name="nbp_25">25 </a>Il fut &eacute;crit en juillet 1917, apr&egrave;s les destructions dans la r&eacute;gion de Chauny-Noyon, lors du repli allemand de 1917. Dans la pr&eacute;sentation de l&rsquo;&oelig;uvre, on peut lire&nbsp;: &laquo;&nbsp;Il s&rsquo;agit d&rsquo;une plaquette in-8 &eacute;dit&eacute;e pour la remise des prix de 1917 et r&eacute;serv&eacute;e aux enfants des &eacute;coles fran&ccedil;aises. C&rsquo;est un ouvrage patriotique &rdquo;anti-boche&rdquo;, genre litt&eacute;raire alors tr&egrave;s en vogue&nbsp;&raquo;, [en ligne],&nbsp;<a href="http://memchau.free.fr/lotioutrage.pdf%C2%A0[consult%C3%A9">http://memchau.free.fr/lotioutrage.pdf&nbsp;[consult&eacute;</a>&nbsp;le 23 mai 2015].</p> <p><a href="#lien_nbp_26" name="nbp_26">26 </a>Paul Gaultier,&nbsp;<em>Barbarie allemande : les faits, les origines, les causes, la th&eacute;orie</em>&nbsp;(1917) [en ligne], gallica.bnf.fr.</p> <p><a href="#lien_nbp_27" name="nbp_27">27 </a>Andr&eacute; Prudhommeaux, &laquo;&nbsp;La barbarie commence &agrave; un&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Agone&nbsp;</em>&nbsp;[en ligne], 35-36,&nbsp;2006,&nbsp;<a href="http://revueagone.revues.org/602">http://revueagone.revues.org/602</a>&nbsp;[consult&eacute; le 27 janvier 2015].</p> <p><a href="#lien_nbp_28" name="nbp_28">28 </a>Document num&eacute;rique,&nbsp;<a href="http://monsu.desiderio.free.fr/curiosites/allemand3.html">http://monsu.desiderio.free.fr/curiosites/allemand3.html</a>&nbsp;[consult&eacute; le 23 mai 2015].</p> <p><a href="#lien_nbp_29" name="nbp_29">29&nbsp;</a><em>Ibidem.</em></p> <p><a href="#lien_nbp_30" name="nbp_30">30&nbsp;</a><em>Ibidem</em>.</p> <p><a href="#lien_nbp_31" name="nbp_31">31 </a>Pierre Brouland, Guillaume Doizy [dir]<strong>,&nbsp;</strong><em>La Grande Guerre des cartes postales</em>&nbsp;[en ligne]<strong>,&nbsp;</strong><a href="http://www.lagrandeguerredescartespostales.com/">http://www.lagrandeguerredescartespostales.com/</a>&nbsp;[ consult&eacute; le 03 mai 2015].</p> <p><a href="#lien_nbp_32" name="nbp_32">32 </a>Daniel Henri Pageaux,&nbsp;<em>Recherche sur l&rsquo;imagologie&nbsp;: de l&rsquo;Histoire culturelle &agrave; la Po&eacute;tique</em>, Paris, Sorbonne Nouvelle, 1995, p. 136.</p> <p><a href="#lien_nbp_33" name="nbp_33">33 </a>Jo&euml;l Bernat, &laquo; &rdquo;Je est barbare&rdquo;, et notre inconsolable besoin de barbarie&nbsp;&raquo; dans Jean Schillinger, Philippe Alexandre [dir.],&nbsp;<em>Le Barbare. Images phobiques et</em>&nbsp;<em>r&eacute;flexions sur l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; dans la culture</em>&nbsp;<em>europ&eacute;enne</em>, Bern, Bruxelles, Frankfurt am Main, New York, Oxford, Wien, P. Lang, 2008, p. 13-24.</p> <p><a href="#lien_nbp_34" name="nbp_34">34 </a>Ayse Pirim, &laquo; Jean Schillinger, Philippe Alexandre, &eacute;ds,&nbsp;<em>Le Barbare. Images phobiques et r&eacute;flexions sur l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; dans la culture europ&eacute;enne&nbsp;</em>&raquo;,&nbsp;<em>Questions de communication&nbsp;</em>[en ligne], (2009)&nbsp;<a href="http://questionsdecommunication.revues.org/1149">http://questionsdecommunication.revues.org/1149</a>, [consult&eacute; le 07 mai 2015].</p> <p><a href="#lien_nbp_35" name="nbp_35">35 </a>F&eacute;lix Klein, &laquo;&nbsp;La guerre vue d&rsquo;une ambulance&nbsp;&raquo; dans Paul Christophe,&nbsp;<em>1914-1915, quand Dieu se tait. La barbarie racont&eacute;e jour apr&egrave;s jour</em>, Paris, Cerf, 2014, pp. 40-41.</p> <p><a href="#lien_nbp_36" name="nbp_36">36 </a>Voir Jean-Pierre Turbergue,&nbsp;<em>1914-1918. Les journaux de tranch&eacute;es. La Grande Guerre &eacute;crite par les Poilus</em>, Paris, &eacute;ditions des petits chouans, p. 159.</p> <p><a href="#lien_nbp_37" name="nbp_37">37 </a>Andr&eacute; Tosel,&nbsp;<em>Barbarie et choc des civilisations</em>&nbsp;[en ligne],&nbsp;<a href="http://www.lafauteadiderot.net/Barbarie-et-choc-des-civilisations">http://www.lafauteadiderot.net/Barbarie-et-choc-des-civilisations</a>&nbsp;[consult&eacute; le 30 mai 2015].</p>