<p>&nbsp;&nbsp;&nbsp; Le 24 mars 1875, l&rsquo;H&ocirc;tel Drouot accueille la premi&egrave;re vente impressionniste. Le m&eacute;diocre succ&egrave;s financier de l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement r&eacute;v&egrave;le pourtant un soutien important entre artistes&nbsp;: Gustave Caillebotte ach&egrave;te <em>Un coin d&rsquo;appartement</em><a href="#nbp1" id="footnoteref1_h6i3oxa" name="liennbp1" title=" Claude Monet, Un coin d’appartement, 1875, huile sur toile, 81,5 x 60,5 cm, musée d’Orsay.">1</a> (1875) de Claude Monet, Edgar Degas obtient une <em>T&ecirc;te de femme</em><a href="#nbp2" id="footnoteref2_593ggef" name="liennbp2" title="  Cette œuvre fut adjugée à Henri Rouart 80 francs. Il la donne à Degas ou l’achète pour lui, voir Degas inédit : actes du colloque Degas, Musée d'Orsay, 18-21 avril 1988, Paris, la Documentation française, « Rencontres de l’École du Louvre », 1989, note 7 p. 82.">2</a> d&rsquo;Auguste Renoir, tandis qu&rsquo;Henri Rouart acquiert deux &oelig;uvres de Monet et deux autres de Berthe Morisot. La fin du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, p&eacute;riode de basculement durant laquelle le rejet de l&rsquo;Acad&eacute;misme et l&rsquo;av&egrave;nement d&rsquo;une nouvelle modernit&eacute; cohabitent<a href="#nbp3" id="footnoteref3_lec3h2p" name="liennbp3" title="  Harrison C. et Cynthia A. White, La carrière des peintres au XIXe siècle : du système académique au marché des impressionnistes, Paris, Flammarion, « Art, histoire, société », 1991.">3</a>, repr&eacute;sente un moment cl&eacute; pour comprendre les enjeux des collections d&rsquo;artistes. En effet, si l&rsquo;historiographie retient les impressionnistes comme figure de proue de cette &eacute;poque &ndash; et dont plusieurs sont collectionneurs comme Caillebotte, Cassatt, Degas, Gauguin, Monet, Morisot, Pissarro, Renoir, Rodin, Rouart &ndash; d&rsquo;autres artistes tels que Bonnat, C&eacute;zanne, Dubourg, Flameng, Jacquemart ou Moreau-N&eacute;laton collectionnent aussi et &agrave; la m&ecirc;me p&eacute;riode. Ils acqui&egrave;rent des &oelig;uvres de leurs contemporains, mais aussi de ma&icirc;tres anciens ou modernes, en rapport avec les voies dans lesquelles ils s&rsquo;inscrivent. En ce sens, de quelles mani&egrave;res les artistes collectionneurs, par les &oelig;uvres qu&rsquo;ils rassemblent, construisent-ils leur propre g&eacute;n&eacute;alogie artistique&nbsp;? Les collections d&rsquo;artistes mettent en effet en lumi&egrave;re des liens de filiations r&eacute;currents ou diff&eacute;rents en fonction des r&eacute;seaux dans lesquels ils &eacute;voluent. Quels sont-ils et comment influencent-ils les artistes collectionneurs&nbsp;?<br /> &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Au moment o&ugrave; le collectionnisme<a href="#nbp4" id="footnoteref4_eexd0z5" name="liennbp4" title=" Le collectionnisme est une activité humaine de collecte d'objet dans un but d'accumulation. ">4</a> conna&icirc;t un d&eacute;veloppement sans pr&eacute;c&eacute;dent, avec une multiplication des collectionneurs, les valeurs de l&rsquo;art se modifient au profit d&rsquo;une autonomisation formelle du champ artistique. Parall&egrave;lement, la figure du marchand et les ventes aux ench&egrave;res se d&eacute;veloppent<a href="#nbp5" id="footnoteref5_e14zuob" name="liennbp5" title="  Raymonde Moulin, Le marché de la peinture en France, Paris, Minuit, 1967. ">5</a>, favorisant une intense circulation des &oelig;uvres en dehors des circuits officiels que repr&eacute;sentent les Salons. Ainsi se cr&eacute;ent des r&eacute;seaux fraternels d&rsquo;artistes qui s&rsquo;offrent des cadeaux et proc&egrave;dent &agrave; des &eacute;changes, &eacute;clairant en ce sens la mani&egrave;re dont les &oelig;uvres collectionn&eacute;es participent &agrave; la compr&eacute;hension des liens de filiation.</p> <table border="1" cellpadding="0" cellspacing="0"> <tbody> <tr> <td> <p>&nbsp;Afin d&rsquo;analyser la mani&egrave;re dont les artistes, &agrave; travers les &oelig;uvres qu&rsquo;ils collectionnent, se construisent une g&eacute;n&eacute;alogie, nous avons constitu&eacute; une base de donn&eacute;es recensant les &oelig;uvres collectionn&eacute;es par les artistes actifs durant la fin du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle<a href="#nbp6" id="footnoteref6_m43f5i3" name="liennbp6" title="  Cette base de données s’inscrit dans le cadre d'un travail de doctorat portant sur les artistes collectionneurs de la seconde moitié du XIXe siècle à aujourd’hui. ">6</a>. Plusieurs sources ont &eacute;t&eacute; n&eacute;cessaires &agrave; l&rsquo;&eacute;tablissement de cet inventaire. L&rsquo;analyse s&rsquo;est focalis&eacute;e sur les documents faisant &eacute;tat d&rsquo;une recension totale ou partielle des collections d&rsquo;artistes. Les catalogues sommaires ainsi que plusieurs bases de donn&eacute;es telles que Joconde ou Artl@s ont permis de fournir un premier socle. Les catalogues d&rsquo;exposition, de ventes et les inventaires apr&egrave;s d&eacute;c&egrave;s ont &eacute;galement fait &eacute;tat d&rsquo;&oelig;uvres poss&eacute;d&eacute;es par des artistes. Enfin, les correspondances d&rsquo;artistes ont par ailleurs r&eacute;v&eacute;l&eacute; une circulation des &oelig;uvres entre confr&egrave;res (voir Annexe). L&rsquo;ensemble de ces informations a ainsi donn&eacute; lieu &agrave; la recension de plus de 4800 &oelig;uvres pass&eacute;es entre les mains d&rsquo;artistes actifs &agrave; la fin du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle.</p> </td> </tr> </tbody> </table> <p>&nbsp;</p> <h2><strong>S&rsquo;identifier aux ma&icirc;tres anciens&nbsp;: l&rsquo;influence du syst&egrave;me acad&eacute;mique</strong></h2> <p><q><em>&nbsp;L&rsquo;&eacute;cole enseigne et pratique des doctrines saines et &eacute;lev&eacute;es, qu&rsquo;elle a le droit, sous tous les rapports, d&rsquo;enseigner sans contr&ocirc;le, et par son heureuse influence elle guide les jeunes &eacute;l&egrave;ves, pour arriver au v&eacute;ritable but de l&rsquo;art, par les &eacute;tudes classiques de la nature, de l&rsquo;antiquit&eacute; grecque et romaine, des beaux temps de la Renaissance, de Rapha&euml;l et des plus beaux si&egrave;cles de l&rsquo;Italie<a href="#nbp7" id="footnoteref7_w71s2bm" name="liennbp7" title="  Jean-Auguste-Dominique Ingres, Réponse au rapport sur l’École impériale et Spéciale des Beaux-Arts adressée au maréchal Vaillant, ministre de la Maison de l’Empereur et des Beaux-Arts, par M. Ingres, sénateur, membre de l’Institut, Paris, Librairie académique Didier et Cie, 1863.">7</a>. </em></q></p> <p>Ces mots de Jean-Auguste-Dominique Ingres, en r&eacute;ponse &agrave; la r&eacute;forme des Beaux-Arts survenue en 1863, r&eacute;sonnent avec les collections constitu&eacute;es par certains artistes issus du syst&egrave;me acad&eacute;mique. &Agrave; cette &eacute;poque, l&rsquo;&Eacute;cole des Beaux-Arts de Paris poss&egrave;de son propre mus&eacute;e avec un fonds d&rsquo;&oelig;uvres compos&eacute; des mod&egrave;les de monuments antiques (en talc ou en li&egrave;ge), de moulages de bas-reliefs de statues antiques en pl&acirc;tre, ainsi que d&rsquo;estampes, gravures et copies de tableaux de ma&icirc;tres. Les &eacute;l&egrave;ves envoy&eacute;s &agrave; Rome doivent d&rsquo;ailleurs transmettre &agrave; l&rsquo;Acad&eacute;mie, durant les premi&egrave;res ann&eacute;es de leur s&eacute;jour, des copies d&rsquo;apr&egrave;s les ma&icirc;tres modernes, ce qui permet d&rsquo;enrichir la collection mus&eacute;ale de l&rsquo;&eacute;cole. La formation dispens&eacute;e se base quant &agrave; elle sur une pratique assidue du dessin, art consid&eacute;r&eacute; comme le plus noble par les capacit&eacute;s intellectuelles qu&rsquo;il requiert. La copie d&rsquo;apr&egrave;s l&rsquo;antique, mais aussi d&rsquo;&oelig;uvres de la Renaissance italienne, constitue le fondement de l&rsquo;enseignement p&eacute;dagogique acad&eacute;mique<a href="#nbp8" id="footnoteref8_cph9nqr" name="liennbp8" title="  Jean-Miguel Pire, L’Éducation artistique en France : du modèle académique et scolaire aux pratiques actuelles, XVIIIe-XIXe siècles, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2010.">8</a>. L&eacute;on Cogniet par exemple, l&rsquo;un des artistes acad&eacute;miques les plus connus pour son r&ocirc;le de professeur, enseigne et ouvre plusieurs ateliers qui reprennent &laquo;&nbsp;en grande partie des exercices et des m&eacute;thodes enseign&eacute;s &agrave; l&rsquo;&Eacute;cole des beaux-arts&nbsp;: le programme comprenait des cours de dessin, des exercices de copie, des le&ccedil;ons de composition, mais proposait aussi des s&eacute;ances de peinture d&rsquo;apr&egrave;s le mod&egrave;le<a href="#nbp9" id="footnoteref9_lg41fcz" name="liennbp9" title="  Apprendre à peindre : les ateliers privés à Paris, 1780-1863 [actes du colloque organisé à l’université François-Rabelais de Tours, 16-17 juin 2011], Tours, Presses universitaires François-Rabelais, « Perspectives historiques », 2013, p. 277.">9</a> &raquo;. Parmi les &eacute;l&egrave;ves de Cogniet, deux artistes sont particuli&egrave;rement connus pour avoir &eacute;t&eacute; de grands collectionneurs&nbsp;: N&eacute;lie Jacquemart (1841-1912) et L&eacute;on Bonnat (1833-1922). Tous les deux fr&eacute;quentent des milieux ais&eacute;s et orientent leurs collections avec des go&ucirc;ts similaires.<br /> &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; N&eacute;lie Jacquemart, issue d&rsquo;un milieu modeste mais prot&eacute;g&eacute;e par Madame de Vatry &ndash; de trente-neuf ans son a&icirc;n&eacute;e et fille d&rsquo;un banquier fortun&eacute; &ndash; d&eacute;bute au Salon de 1863 avant d&rsquo;honorer plusieurs commandes officielles. En 1867, elle est invit&eacute;e &agrave; la Villa M&eacute;dicis &agrave; Rome par le peintre H&eacute;bert, un voyage au cours duquel elle se familiarise avec les &oelig;uvres italiennes. Elle se constitue par ailleurs une solide r&eacute;putation de portraitiste et &eacute;pouse, en 1881, &Eacute;douard Andr&eacute;. Ce dernier, qui appartient &agrave; une riche famille de banquiers, est &eacute;galement un grand amateur d&rsquo;art, propri&eacute;taire de la <em>Gazette des Beaux-Arts</em> et pr&eacute;sident de l&rsquo;Union Centrale des Beaux-Arts. Ensemble, ils sillonnent de nombreux pays, et notamment l&rsquo;Italie d&egrave;s 1882, o&ugrave; ils prennent contact avec des antiquaires tels que Stefano Bardini, Elia Volpi ou Attilio Simonetti. Ils y ach&egrave;tent de nombreuses &oelig;uvres d&rsquo;art, et particuli&egrave;rement des peintures florentines et v&eacute;nitiennes. Apr&egrave;s la mort de son mari, survenue en 1894, Jacquemart poursuit ses voyages, ses acquisitions, et redessine les contours de sa collection. Cette derni&egrave;re, qu&rsquo;elle rassemble dans l&rsquo;abbaye de Chaalis dans l&rsquo;Oise &agrave; partir de 1902, t&eacute;moigne de son r&ocirc;le de m&eacute;c&egrave;ne et de grande collectionneuse<a href="#nbp10" id="footnoteref10_19ie65o" name="liennbp10" title="  Jean-Pierre Babelon, Une passion commune pour l’art : Nélie Jacquemart et Édouard André, Florence, Scala Group, 2012.">10</a>. La personnalit&eacute; de Jacquemart offre un exemple d&rsquo;artiste collectionneuse particuli&egrave;rement int&eacute;ressant puisqu&rsquo;elle poss&egrave;de une collection personnelle avant son mariage<a href="#nbp11" id="footnoteref11_yzwljyb" name="liennbp11" title="  Julie Verlaine, Femmes collectionneuses d’art et mécènes de 1880 à nos jours, Malakoff, Hazan, 2014, p. 52.">11</a>. Elle oriente ses acquisitions vers des artistes recherch&eacute;s de la Renaissance, et amasse ainsi des toiles, sculptures, marbres et bronzes de Donatello, Sandro Botticelli,&nbsp;Le P&eacute;rugin, Giovanni Bellini, Andrea Mantegna ou Giambattista Tiepolo. L&rsquo;&eacute;ducation artistique que re&ccedil;oit N&eacute;lie Jacquemart, mais aussi les milieux artistiques dans lesquels elle &eacute;volue, font incontestablement &eacute;cho &agrave; ses go&ucirc;ts de collectionneuse. Elle participe &agrave; plusieurs reprises au Salon, o&ugrave; elle re&ccedil;oit plusieurs m&eacute;dailles et portraiture la grande bourgeoisie et l&rsquo;aristocratie. Si elle arr&ecirc;te son activit&eacute; de peintre apr&egrave;s son mariage au d&eacute;but des ann&eacute;es 1880, elle continue, gr&acirc;ce &agrave; son nouveau statut social, &agrave; fr&eacute;quenter les milieux ais&eacute;s parisiens.<br /> &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Pour sa part, L&eacute;on Bonnat obtient le deuxi&egrave;me prix de Rome en 1857. Au d&eacute;but des ann&eacute;es 1860, il entreprend un voyage en Italie, puis en Gr&egrave;ce et au Moyen-Orient &agrave; la fin des ann&eacute;es 1870, pour se sp&eacute;cialiser par la suite dans le portrait. Bonnat est en effet particuli&egrave;rement connu pour son activit&eacute; de portraitiste&nbsp;: il peint les pr&eacute;sidents de la III<sup>e</sup> R&eacute;publique<a href="#nbp12" id="footnoteref12_iuh8xps" name="liennbp12" title="  Guy Saigne, Léon Bonnat : le portraitiste de la IIIe République. Catalogue raisonné des portraits, Paris, Mare &amp; Martin, 2017.">12</a>, des hommes politiques, l&rsquo;aristocratie et la grande bourgeoisie fran&ccedil;aise et am&eacute;ricaine, ainsi que des artistes, hommes de lettres et musiciens. &Agrave; partir des ann&eacute;es 1880 &ndash; il ouvre son atelier &agrave; l&rsquo;&Eacute;cole des beaux-arts en 1883 &ndash; Bonnat se constitue une importante collection d&rsquo;&oelig;uvres anciennes. Il acquiert des &oelig;uvres d&rsquo;artistes qui l&rsquo;ont marqu&eacute; durant son apprentissage comme V&eacute;lasquez et Ribera, Michel-Ange, L&eacute;onard de Vinci et Rapha&euml;l, Rembrandt et Frans Hals. En effet, lorsqu&rsquo;il part pour Rome en 1858, Bonnat r&eacute;alise une s&eacute;rie de copies d&rsquo;apr&egrave;s les ma&icirc;tres, en t&eacute;moigne <em>La Cr&eacute;ation de l&rsquo;homme</em><a href="#nbp13" id="footnoteref13_255qhxd" name="liennbp13" title="  Léon Bonnat, La Création de l’homme, entre 1858 et 1861, huile sur toile, Bayonne, musée Bonnat-Helleu. ">13</a> (entre 1858 et 1861) ou <em>Copie d&rsquo;apr&egrave;s &laquo;&nbsp;L&rsquo;Expulsion du Paradis terrestre</em><a href="#nbp14" id="footnoteref14_9a0hpti" name="liennbp14" title="  Léon Bonnat, Copie d’après « L’Expulsion du Paradis terrestre », entre 1858 et 1861, crayon, estampe et lavis sur papier, Bayonne, musée Bonnat-Helleu.">14</a><em> &raquo;</em>, deux &oelig;uvres r&eacute;alis&eacute;es d&rsquo;apr&egrave;s Michel-Ange, un artiste dont il acquiert plus tard des &oelig;uvres comme <em>Adam et &Egrave;ve</em><a href="#nbp15" id="footnoteref15_ombetgq" name="liennbp15" title="  Michel-Ange, Adam et Ève, sanguine, lavis de sanguine, plume, encre brune, 27,7 x 19,6 cm, Bayonne, musée Bonnat-Helleu. ">15</a> ou <em>&Eacute;tude pour &laquo;&nbsp;Le Jugement dernier</em><a href="#nbp16" id="footnoteref16_ez68aa0" name="liennbp16" title="  Michel-Ange, Étude pour « Le Jugement dernier », 1534, pierre noire sur papier, 34,4 x 29 cm, Bayonne, musée Bonnat-Helleu.">16</a><em> &raquo;</em>.</p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Notre base de donn&eacute;es fait appara&icirc;tre des similitudes et r&eacute;currences entre les artistes acquis par Jacquemart et Bonnat. Les deux artistes collectionnent plusieurs &oelig;uvres de la Renaissance italienne&nbsp;: des sculptures et peintures de Baccio Bandinelli et Sandro Botticelli, de Lorenzo di Credi, des peintres mani&eacute;ristes Giovanni Cariani et Palma le Jeune, du peintre de l&rsquo;&eacute;cole de Bologne Girolamo da Carpi,&nbsp;du v&eacute;nitien Cima da Conegliano, du peintre de l&rsquo;&eacute;cole de Ferrare Giovanni di Niccol&ograve; de Lutero (dit Dosso Dossi), des pi&egrave;ces dans la mani&egrave;re des florentins Antonio Rossellino ou attribu&eacute;es &agrave; Francesco Salviati, mais aussi du peintre baroque Giovanni Paolo Panini et du toscan Luca Signorelli. Outre ces artistes, les deux &eacute;l&egrave;ves de Cogniet ont en commun de collectionner les &oelig;uvres du Flamand Corneille de Lyon, de l&rsquo;Anglais Richard Parkes Bonington, ainsi que plusieurs de leurs confr&egrave;res fran&ccedil;ais. Ainsi, ils obtiennent des &oelig;uvres des peintres acad&eacute;miques n&eacute;s &agrave; la toute fin du XVII<sup>e</sup> si&egrave;cle comme Jean-Baptiste Oudry, Hubert-Fran&ccedil;ois Bourguignon, mais aussi du sculpteur n&eacute;oclassique Augustin Pajou, d&rsquo;Eug&egrave;ne Lami ou encore de l&rsquo;orientaliste Henri Regnault. Ce dernier, qui est un ami de N&eacute;lie Jacquemart, r&eacute;alise d&rsquo;ailleurs son portrait qu&rsquo;il &eacute;dite sous forme de carte postale<a href="#nbp17" id="footnoteref17_24bbbla" name="liennbp17" title="  Henri Regnault, Jacques-Ernest Bulloz (éditeur), Mlle Nélie Jacquemart, estampe, 13,9 x 8,8 cm, Musée Carnavalet.">17</a>.<br /> &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; L&rsquo;environnement dans lequel Jacquemart et Bonnat &eacute;voluent les incite donc &agrave; adopter une d&eacute;marche de collectionneurs fortun&eacute;s, aux orientations issues de leurs parcours artistiques mais aussi des go&ucirc;ts qui existent alors. Si jusque dans les ann&eacute;es 1830, les tableaux du XVIII<sup>e</sup> si&egrave;cle et de la Renaissance ne trouvaient gu&egrave;re d&rsquo;acqu&eacute;reurs &ndash; les amateurs pr&eacute;f&eacute;rant les primitifs et des pi&egrave;ces m&eacute;di&eacute;vales &ndash; les inclinations des collectionneurs se modifient durant la seconde moiti&eacute; du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle&nbsp;:</p> <p><q><em>&nbsp;Le collectionneur typique de la seconde moiti&eacute; du&nbsp;XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle est tr&egrave;s diff&eacute;rent de celui de la premi&egrave;re moiti&eacute;&nbsp;; c&rsquo;est un homme fortun&eacute; qui ach&egrave;te cher, chez de grands antiquaires ou dans les ventes, et qui dispose de rabatteurs. En quelques ann&eacute;es, il r&eacute;unit des collections massives, comprenant des milliers d&rsquo;objets. Les p&eacute;riodes les mieux repr&eacute;sent&eacute;es sont le Moyen Age et la Renaissance et/ou le&nbsp;XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle fran&ccedil;ais<a href="#nbp18" id="footnoteref18_z0zea34" name="liennbp18" title="  Michel Hoog et Emmanuel Hoog, « L'Histoire du marché de l'art », dans Le marché de l'art, Paris, Presses Universitaires de France, 1995, p. 29.">18</a>. </em></q></p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Un autre artiste, peintre et graveur, collectionne des &oelig;uvres similaires &agrave; Jacquemart et Bonnat. Fran&ccedil;ois Flameng (1856-1923), qui entre &agrave; l&rsquo;&Eacute;cole des beaux-arts de Paris dans l&rsquo;atelier d&rsquo;Alexandre Cabanel puis suit les enseignements de Pierre Edmond Alexandre H&eacute;douin et de Jean-Paul Laurens, poss&egrave;de de nombreuses &oelig;uvres anciennes. Comme les &eacute;l&egrave;ves de Cogniet, il collectionne des pi&egrave;ces de Lorenzo di Credi, Oudry, Pajou, Bonington et Corneille de Lyon&nbsp;; et &agrave; l&rsquo;instar de Bonnat, des &oelig;uvres du renaissant allemand Hans Holbein le Jeune et d&rsquo;artistes italiens de la Renaissance<a href="#nbp19" id="footnoteref19_9n6y10k" name="liennbp19" title="  Antonio Correggio, Raphaël, Michel-Ange, Léonard de Vinci, Pisanello, Le Pérugin, Andrea del Sarto, Ottavio Mario Leoni, Fra Filippo Lippi, Tiepolo et Véronèse.">19</a>. Similairement, Bonnat et Flameng acqui&egrave;rent aussi des &oelig;uvres d&rsquo;artistes des XVI<sup>e</sup> et XVII<sup>e</sup> si&egrave;cles&nbsp;<a href="#nbp20" id="footnoteref20_jstcnd2" name="liennbp20" title=" Pierre Dumonstier, Pierre Puget et Claude Gellée.">20</a>, du XVIII<sup>e</sup> si&egrave;cle italien avec Francesco Guardi et fran&ccedil;ais<a href="#nbp21" id="footnoteref21_fdx4b6b" name="liennbp21" title="  Jean-Honoré Fragonard, Antoine Watteau, François Boucher, Charles Nicolas Cochin, Hubert Robert, Gabriel-Jacques de Saint-Aubin, Jacques-Louis David, Jean-Baptiste Greuze, Pierre-Paul Prud’hon mais aussi de François Marius Granet actif au tournant du siècle.">21</a>, mais aussi d&rsquo;Alexandre-Gabriel Decamps, un artiste consacr&eacute; en cette seconde moiti&eacute; du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle. En outre, ils poss&egrave;dent en commun des pi&egrave;ces du portraitiste &eacute;cossais Sir Henry Raeburn et des anglais John Hoppner et Sir Thomas Lawrence&nbsp;; du peintre allemand Hans Holbein le Jeune&nbsp;; des artistes n&eacute;erlandais<a href="#nbp22" id="footnoteref22_g90zex6" name="liennbp22" title="  Gerard ter Borch, Rembrandt et Adriaen van Ostade.">22</a> et flamands<a href="#nbp23" id="footnoteref23_a7q7m14" name="liennbp23" title="  Jacob Jordaens, Pierre Paul Rubens et Antoine van Dyck.">23</a>, ainsi que plusieurs &oelig;uvres de peintres espagnols<a href="#nbp24" id="footnoteref24_a0m66s6" name="liennbp24" title="  Alonso Cano et Francesco José de Goya y Lucientes.">24</a>. Enfin, les deux artistes obtiennent similairement des &oelig;uvres d&rsquo;Ingres<a href="#nbp25" id="footnoteref25_f4wpqms" name="liennbp25" title=" Plusieurs des œuvres d’Ingres possédées par Flameng avaient appartenues à des artistes : le peintre Édouard Dubufe (1819-1883) ainsi que le peintre et graveur Luigi Calamatta (1801-1869). En outre, parmi les œuvres recensées de la collection Flameng, celle de Dominique-Joseph van Oost appartenait au peintre Henri-Pierre Danloux (1753-1809).">25</a> et de Th&eacute;odore G&eacute;ricault, figures de renomm&eacute;e maintes fois pr&eacute;sentes dans les collections priv&eacute;es de la fin du si&egrave;cle<a href="#nbp26" id="footnoteref26_72zd93k" name="liennbp26" title=" À ce propos, voir les catalogues de ventes faisant état de la présence de Géricault et d’autres artistes de l’école française dans les collections particulières : celles de Michel-Ange Gihaut (1872), M. M. de N. (1874), Bouginier (1877), Horace His de la Salle (1881), François Walferdin (1880), Dr S. (1882), M. X. Rodrigues (1889), M. Moignon (1891), M. S. (1896) par exemple. ">26</a>. Ces artistes, en possession d&rsquo;&oelig;uvres plus ou moins anciennes, ont tous re&ccedil;u une &eacute;ducation artistique acad&eacute;mique. Il s&rsquo;agit d&rsquo;&ecirc;tre au plus pr&egrave;s des &oelig;uvres, comme l&rsquo;explique Bonnat&nbsp;:</p> <p><q><em>&nbsp;J&#39;ai toujours ador&eacute; les dessins et passais autrefois mes dimanches au Louvre. Mais c&#39;est M. de la Salle qui m&#39;a fait comprendre qu&#39;on pouvait en avoir &agrave;&nbsp;soi, chez soi, qu&#39;on pouvait, quand on le voulait, toucher une feuille de papier sur laquelle la main de Michel-Ange s&#39;&eacute;tait appuy&eacute;e. &ndash; Vous savez quelle passion c&#39;est devenu<a href="#nbp27" id="footnoteref27_2yfk1ej" name="liennbp27" title="  Charles-Philippe de Chennevières-Pointel, Souvenirs d’un directeur des beaux-arts, Paris, France, Aux bureaux de l’artiste, 1883, p. 142.">27</a> ! </em></q></p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; La collection peut donc servir de sujet d&rsquo;&eacute;tude, comme le souligne &eacute;galement Jacquemart dans son testament&nbsp;: &laquo;&nbsp;Ces collections, leur arrangement, ont &eacute;t&eacute; le but de mes &eacute;tudes, mes travaux y ont mis aussi leur empreinte&hellip; J&rsquo;esp&egrave;re qu&rsquo;elles serviront aux &eacute;tudes de ceux qui se d&eacute;vouent &agrave; l&rsquo;art et &agrave; son histoire<a href="#nbp28" id="footnoteref28_qaq5z44" name="liennbp28" title=" Cité par Julie Verlaine, op. cit., 2014, p. 62.">28</a>.&nbsp;&raquo; Ces artistes collectionneurs r&eacute;pondent aux normes du bon go&ucirc;t d&rsquo;alors tout en s&rsquo;attachant &agrave; obtenir des &oelig;uvres et des artistes qu&rsquo;ils avaient &eacute;tudi&eacute;s, et pour lesquels un regain d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t s&rsquo;&eacute;tait op&eacute;r&eacute;.</p> <p><q><em>&nbsp;Dans la seconde moiti&eacute; du si&egrave;cle, le rococo fran&ccedil;ais &eacute;tait trop populaire pour &ecirc;tre utilis&eacute; comme une arme efficace contre l&rsquo;art moderne&nbsp;; aussi, durant les ann&eacute;es 1870, recourut-on pendant quelque temps &agrave; des peintres italiens, tels que Guardi et Tiepolo, pour satisfaire au m&ecirc;me dessein<a href="#nbp29" id="footnoteref29_yg15wnu" name="liennbp29" title="  Francis Haskell, La norme et le caprice. Redécouvertes en art : aspects du goût et de la collection en France et en Angleterre, 1789-1914, Paris, Flammarion, 1986, p. 131.">29</a>. </em></q></p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; En outre, le contenu de leurs collections fait &eacute;cho aux biens disponibles sur le march&eacute;, soit un grand nombre de dessins. En ce sens, L&eacute;on Bonnat constitue un ensemble exceptionnel de pi&egrave;ces dessin&eacute;es&nbsp;: trente-quatre d&rsquo;Albrecht D&uuml;rer, cent de Rembrandt, vingt-trois de Pollajuolo, ainsi que de Michel-Ange, L&eacute;onard de Vinci,&nbsp;Poussin, Claude, Watteau, Prud&#39;hon, ou encore une quarantaine d&#39;Ingres et de Millet.<br /> &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Par la r&eacute;currence des artistes pr&eacute;c&eacute;demment cit&eacute;s, il appara&icirc;t nettement une forme de norme, de r&egrave;gle &agrave; suivre, suivie par Jacquemart, Bonnat ou encore Flameng. Cette norme est li&eacute;e d&rsquo;une part &agrave; leur formation acad&eacute;mique, d&rsquo;autre part aux go&ucirc;ts alors en vigueur, mais aussi au milieu mondain dans lequel ils &eacute;voluent et aux r&eacute;seaux marchands dans lesquels ils s&rsquo;ins&egrave;rent. Probablement par mim&eacute;tisme &agrave; l&rsquo;&eacute;ducation qu&rsquo;ils re&ccedil;oivent, ces artistes s&rsquo;inscrivent dans la technique du dessin en copiant des &oelig;uvres de ma&icirc;tres, mais aussi dans un attrait pour la peinture d&rsquo;histoire &ndash; avec des &oelig;uvres de Poussin, David ou Prud&rsquo;hon &ndash; qui incarne selon le peintre Thomas Couture &laquo;&nbsp;un art sublime, un splendide &eacute;cho de la patrie<a href="#nbp30" id="footnoteref30_2cpt1zk" name="liennbp30" title="  Thomas Couture, Méthode et entretiens d’atelier, Paris, T. Couture, 1867, p. 326.">30</a> &raquo;. Cette dimension patrimoniale est d&rsquo;ailleurs particuli&egrave;rement pr&eacute;sente dans l&rsquo;esprit des collectionneurs, qu&rsquo;ils soient artistes ou non. Nombreux sont ceux, &agrave; la fin du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, &agrave; donner ou l&eacute;guer leurs &oelig;uvres &agrave; des institutions&nbsp;<a href="#nbp31" id="footnoteref31_j3p78dq" name="liennbp31" title=" Véronique Long, « Les collectionneurs d'œuvres d'art et la donation au musée à la fin du XIXe siècle : l'exemple du musée du Louvre », Romantisme, 2001, n° 112, p. 45-54.">31</a>, comme Jacquemart qui l&egrave;gue l&rsquo;abbaye de Chaalis et sa collection &agrave; l&rsquo;Institut fran&ccedil;ais en 1912, ou Bonnat &agrave; la ville de Bayonne en 1922. La g&eacute;n&eacute;alogie que ces artistes choisissent, en s&rsquo;identifiant &agrave; des ma&icirc;tres du pass&eacute;, correspond donc &agrave; des r&eacute;seaux officiels et mondains, d&eacute;pendants du d&eacute;veloppement du march&eacute; et de plusieurs red&eacute;couvertes en art. L&rsquo;app&eacute;tence pour la Renaissance italienne, ainsi que pour des artistes flamands ou espagnols correspond en effet &agrave; un regain d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t pour certains peintres durant la seconde moiti&eacute; du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, qui voit la promotion de Botticelli, Tiepolo ou Guardi. En outre, les bouleversement politiques survenus en Italie &agrave; la suite du Risorgimento et de l&rsquo;ind&eacute;pendance nationale participent &agrave; un afflux d&rsquo;&oelig;uvres sur le march&eacute;. Ces choix ne sont pas d&eacute;nu&eacute;s de prestige social, puisque ces artistes figurent parmi les pr&ecirc;teurs de plusieurs expositions, comme en 1907 lors de l&rsquo;&laquo;&nbsp;Exposition de portraits peints et dessin&eacute;s du XIII<sup>e</sup> au XVI<sup>e</sup> si&egrave;cle&nbsp;&raquo; &agrave; la Biblioth&egrave;que nationale, &eacute;v&eacute;nement pour lequel Bonnat et Flameng pr&ecirc;tent un ensemble d&rsquo;&oelig;uvres de ma&icirc;tres anciens. Ces deux artistes, comme Jacquemart, fr&eacute;quentent assidument les antiquaires et les ventes aux ench&egrave;res qui se multiplient alors<a href="#nbp32" id="footnoteref32_wxldk6m" name="liennbp32" title=" Frits Lugt, Répertoire des catalogues de ventes publiques intéressant l’art ou la curiosité, Troisième période 1861-1900, La Haye, M. Nijhoff, « Répertoire des catalogues de ventes publiques intéressant l’art ou la curiosité », 1964.">32</a>. En effet,</p> <p><q><em>&nbsp;[l]e march&eacute; de l&#39;art ancien a longtemps b&eacute;n&eacute;ficié des cons&eacute;quences des bouleversements politiques et sociaux de la fin du XVIII<sup>e</sup> si&egrave;cle et du premier XIX<sup>e</sup> : spoliations et vente apr&egrave;s d&eacute;c&egrave;s, dispersion des biens nationaux, d&eacute;mant&egrave;lement du patrimoine du clerg&eacute;́, reliquat des prises de guerre, ont mis en circulation un flot sans pr&eacute;c&eacute;dent d&#39;&oelig;uvres et d&#39;objets d&#39;art qui sont pour les collectionneurs une v&eacute;ritable manne<a href="#nbp33" id="footnoteref33_s09lw84" name="liennbp33" title=" Anne-Doris Meyer, « L'Écriture d'une collection », in Cahiers Edmond et Jules de Goncourt, n°19, 2012, p. 158. ">33</a>. </em></q></p> <p>Pour autant, et durant la m&ecirc;me p&eacute;riode, certains artistes collectionneurs se tournent vers des ma&icirc;tres plus sp&eacute;cifiques, qui catalysent leurs recherches plastiques. Ils se construisent alors une g&eacute;n&eacute;alogie moderne, &agrave; l&rsquo;image des exp&eacute;rimentations qui les animent.</p> <h2><strong>Se construire un panth&eacute;on personnel&nbsp;: vers une g&eacute;n&eacute;alogie moderne</strong></h2> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Nombreux sont les artistes &agrave; avoir collectionn&eacute; des ma&icirc;tres modernes, incarnant des comp&eacute;tences techniques en m&ecirc;me temps qu&rsquo;un renouveau esth&eacute;tique. Eug&egrave;ne Delacroix, Jean-Auguste-Dominique Ingres, Jean-Baptiste Camille Corot ou encore Jean-Fran&ccedil;ois Millet en sont les principaux repr&eacute;sentants. Durant la vente organis&eacute;e apr&egrave;s la mort de Delacroix en 1863, des milliers de feuilles dessin&eacute;es sont dispers&eacute;es, inondant le march&eacute; d&rsquo;&oelig;uvres de l&rsquo;artiste. L&eacute;on Bonnat acquiert ainsi plus de quatre-vingts dessins et plusieurs peintures de Delacroix. Etienne Moreau-N&eacute;laton (1859-1927) en collectionne aussi, tout comme des artistes de l&rsquo;aventure impressionniste comme Henri Rouart (1833-1912), Edgar Degas (1834-1917), Claude Monet (1840-1926) ou Camille Pissarro (1830-1903).</p> <figure> <p style="text-align: center;"><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="373" src="https://alepreuve.org/sites/default/files/Corthier%201%20et%202.jpg" width="600" /></p> <figcaption> <p style="text-align: center;">(&agrave; gauche) Jean-Auguste-Dominique Ingres,<em> Jacques-Louis Leblanc</em>, 1823, huile sur toile,<br /> 121 x 95,6 cm, The Metropolitan Museum of Art, New York<br /> (&agrave; droite) Jean-Auguste-Dominique Ingres,<em> Madame Jacques-Louis Leblanc</em>, 1823, huile sur toile,<br /> 119,4 x 92,7 cm, The Metropolitan Museum of Art, New York</p> <p style="text-align: center;">Edgar Degas, voyant ces portraits pour la premi&egrave;re fois en 1854,<br /> d&eacute;crit son acquisition en 1896 comme &laquo;&nbsp;l&#39;&eacute;v&eacute;nement de [sa] vie de collectionneur&nbsp;&raquo;.</p> </figcaption> </figure> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Issu d&rsquo;une famille fortun&eacute;e, &Eacute;tienne Moreau-N&eacute;laton est &agrave; la fois peintre, graveur, photographe, c&eacute;ramiste, historien de l&rsquo;art et publicitaire. En 1882, il h&eacute;rite de la collection de son grand-p&egrave;re (Adolphe Moreau p&egrave;re), contenant plus de huit cents tableaux rassembl&eacute;s entre 1830 et 1859 et consacr&eacute;e aux artistes de son temps. &Eacute;tienne Moreau-N&eacute;laton l&rsquo;augmente à partir de 1886 en r&eacute;alisant des achats aupr&egrave;s d&rsquo;artistes vivants<a href="#nbp34" id="footnoteref34_im3em36" name="liennbp34" title=" Vincent Pomarède, Étienne Moreau-Nélaton : un collectionneur peintre ou un peintre collectionneur, Paris, Association Moreau-Nélaton, 1988.">34</a>. Il poss&egrave;de par ailleurs des dessins et toiles des XVI<sup>e</sup><a href="#nbp35" id="footnoteref35_hol46an" name="liennbp35" title=" Vincent Pomarède, « Le peu que l'on sait d'eux. Moreau-Nélaton et le portrait français au XVIe siècle », dans Cécile Scailliérez et Dominique Thiébaut, Hommage à Michel Laclotte. Études sur la peinture du Moyen Âge et de la Renaissance, Milan, Electa, 1994.">35</a>, XVII<sup>e</sup> et XVIII<sup>e</sup> si&egrave;cles, faisant &eacute;cho &agrave; ses recherches d&rsquo;historien de l&rsquo;art. Il d&eacute;tient ainsi des pi&egrave;ces de Rembrandt, Pieter Boel, Robert, David ou Prud&rsquo;hon. Cependant, la majeure partie de sa collection balaie tout le XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, chaque courant y &eacute;tant repr&eacute;sent&eacute;. Du d&eacute;but du si&egrave;cle, il ach&egrave;te entre autres trente-quatre albums de Corot (contenant plus de 360 dessins), vingt-sept Daubigny, des toiles et albums d&rsquo;Ingres ainsi que 1 524 dessins de Delacroix regroup&eacute;s en carnets. Grand amateur de l&rsquo;artiste<a href="#nbp36" id="footnoteref36_moli9h4" name="liennbp36" title="  Musée national Eugène Delacroix, Musée du Louvre et Musée du Louvre, Delacroix en héritage : autour de la collection Moreau-Nélaton [exposition, Paris Musée national Eugène Delacroix, 11 décembre 2013-17 mars 2014], Paris, Louvre éd. Le Passage, 2013.">36</a>, il acquiert l&rsquo;<em>Hommage &agrave; Delacroix </em>d&rsquo;Henri Fantin-Latour en 1897. Victoria Dubourg, &eacute;pouse de Fantin-Latour et peintre, poss&egrave;de elle aussi deux dessins de Delacroix qu&rsquo;elle l&egrave;gue &agrave; l&rsquo;&Eacute;tat en 1927. Ce tableau, l&rsquo;<em>Hommage &agrave; </em>Delacroix, peint en 1864, t&eacute;moigne du respect de la jeune g&eacute;n&eacute;ration pour un artiste repr&eacute;sentant un mod&egrave;le de libert&eacute;.</p> <p><q><em>&nbsp;Ceux qui, succ&eacute;dant &agrave; Delacroix, seront les champions de la couleur et de la lumi&egrave;re, ce sont les peintres que plus tard on appellera les impressionnistes : Renoir, Monet, Pissarro, Guillaumin, Sisley, C&eacute;zanne et leur pr&eacute;curseur admirable, Jongkind&nbsp;<a href="#nbp37" id="footnoteref37_dzawldq" name="liennbp37" title=" Paul Signac, D’Eugène Delacroix au néo-impressionnisme [1899], Paris, H. Floury, 1911, p. 49.">37</a>. </em></q></p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Henri Rouart, peintre mais aussi industriel et ing&eacute;nieur, davantage consid&eacute;r&eacute; comme un collectionneur par ses contemporains puis dans l&rsquo;historiographie, poss&egrave;de lui aussi plus d&rsquo;une centaine d&rsquo;&oelig;uvres de Delacroix et quelques pi&egrave;ces de Ingres.</p> <p><q><em>&nbsp;Les feuillets de Delacroix formaient un recueil des plus vari&eacute;s, que l&#39;on devait, faute de place, feuilleter dans des cartons, et l&#39;on ne s&#39;en faisait pas faute. Qu&#39;ajouter &agrave; cela ? Les plus piquantes raret&eacute;s, les &oelig;uvres les plus inspir&eacute;es, sous les esp&egrave;ces les plus modestes d&#39;un papier crayonn&eacute;, vous arr&ecirc;taient &agrave; l&#39;improviste<a href="#nbp38" id="footnoteref38_hosh760" name="liennbp38" title="  Arsène Alexandre, La collection Henri Rouart, Paris, Goupil &amp; Cie, 1912, p. 44.">38</a>. </em></q></p> <p>Rouart d&eacute;bute sa collection au d&eacute;but des ann&eacute;es 1870 et fait l&rsquo;acquisition de ma&icirc;tres anciens avec, par exemple, un <em>Ange</em> de Strigel, une <em>Vierge</em> de Tiepolo et une autre de Scorel, une <em>Ascension</em> hollandaise et <em>J&eacute;sus chez Marthe et Marie</em> de Beuckelaer. Les &oelig;uvres ant&eacute;rieures au XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle ne forment qu&rsquo;un quart de la collection, avec une inclination particuli&egrave;re pour le Greco, mais aussi pour des &oelig;uvres de Fragonard, Prud&rsquo;hon, Gell&eacute;e, David, Guardi, le reste &eacute;tant davantage ax&eacute; sur les artistes de son si&egrave;cle. Il obtient ainsi une dizaine d&rsquo;&oelig;uvres de Puvis de Chavannes, une quinzaine d&rsquo;&oelig;uvres de Fran&ccedil;ois Marius Granet, de Tassaert et de Stanislas L&eacute;pine, une vingtaine de Th&eacute;odore Rousseau et d&rsquo;Heim, mais surtout une cinquantaine de Corot, l&rsquo;un de ses artistes pr&eacute;f&eacute;r&eacute;s, avec des &eacute;tudes d&rsquo;Italie qui &eacute;voquaient parall&egrave;lement les s&eacute;jours de d&eacute;but de carri&egrave;re de Rouart<a href="#nbp39" id="footnoteref39_ltuko90" name="liennbp39" title=" Rouart effectue son premier voyage en Italie en 1861, accompagné de sa jeune épouse Hélène Jacob-Desmalter. Il y réalise des aquarelles. ">39</a>, comme des pi&egrave;ces de maturit&eacute;. Il le fr&eacute;quente, ainsi que Millet, d&egrave;s les ann&eacute;es 1860. Ce dernier est repr&eacute;sent&eacute; par de nombreuses &oelig;uvres au sein de sa collection, d&eacute;montrant l&rsquo;attachement de Rouart &agrave; cet artiste&nbsp;:</p> <p><q><em>&nbsp;L&rsquo;autre ma&icirc;tre de ses premiers pas, Jean-Fran&ccedil;ois Millet, sera l&rsquo;une des articulations majeures de sa collection, avec pas moins de 14 peintures et un choix impressionnant d&rsquo;&oelig;uvres graphiques. Notons ici que Rouart, en v&eacute;ritable artiste, sera un grand amateur de dessin, ce qui n&rsquo;est pas le cas de tous les collectionneurs&nbsp;<a href="#nbp40" id="footnoteref40_xjgzai0" name="liennbp40" title=" Jean-Dominique Rey, Henri Rouart. Peintre, collectionneur, ingénieur, Paris, L’Échoppe, 2014, p. 76-77. ">40</a>. </em></q></p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Voil&agrave; ce qui semble le distinguer des amateurs qu&rsquo;il fr&eacute;quente et auxquels il est identifi&eacute;. Fortun&eacute;, il installe sa collection dans son h&ocirc;tel particulier rue de Lisbonne o&ugrave; il consacre un cabinet entier &agrave; Honor&eacute; Daumier, caricaturiste repr&eacute;sentant &laquo;&nbsp;cette libert&eacute; de pens&eacute;e qui s&rsquo;attaque &agrave; tous les ridicules du temps, fustige l&rsquo;injustice sous le masque des juges et cerne avec une tendresse cruelle le quotidien&nbsp;<a href="#nbp41" id="footnoteref41_xp3iys0" name="liennbp41" title="Ibid., p. 77.">41</a>&raquo;. Certes Rouart collectionne comme les amateurs de son &eacute;poque des &oelig;uvres anciennes, mais son int&eacute;r&ecirc;t pour certains ma&icirc;tres modernes, son go&ucirc;t pour le dessin et son inscription au sein du r&eacute;seau impressionniste avec lequel il expose, en font un collectionneur singulier comme son proche ami Degas, avec qui il effectue ses &eacute;tudes au lyc&eacute;e Louis-le-Grand.</p> <figure> <p style="text-align: center;"><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="462" src="https://alepreuve.org/sites/default/files/Corthier%203.jpg" width="500" /></p> <figcaption> <p style="text-align: center;">Edgar Degas, <em>Les Danseuses &agrave; la barre</em>, 1876-1877, m&eacute;dium mixte sur toile, 74 x 76 cm, The Metropolitan Museum of Art, New York<br /> Cette toile est donn&eacute;e par Degas &agrave; Rouart.</p> </figcaption> </figure> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; En effet, Degas rassemble lui aussi une importante collection d&rsquo;&oelig;uvres &agrave; partir de la fin des ann&eacute;es 1890 dans son appartement parisien. L&rsquo;artiste se cr&eacute;e un v&eacute;ritable mus&eacute;e personnel, en s&rsquo;entourant d&rsquo;une centaine de peintures et de milliers de dessins. Sa collection prend de l&rsquo;ampleur parall&egrave;lement au succ&egrave;s qu&rsquo;il rencontre aupr&egrave;s des amateurs. Il fr&eacute;quente alors, souvent anonymement, l&rsquo;H&ocirc;tel Drouot, et utilise les sommes qu&rsquo;il gagne pour obtenir des &oelig;uvres, si bien qu&rsquo;il aurait dit au marchand Hector Brame&nbsp;: &laquo;&nbsp;Je sais comment amasser de belles peintures, pas de l&rsquo;argent&nbsp;<a href="#nbp42" id="footnoteref42_7gsrmdx" name="liennbp42" title=" Ann Dumas, The Private Collection of Edgar Degas, New York, The Metropolitan Museum of Art, 1997, p. 9.">42</a> &raquo;. Ces belles peintures &eacute;taient celles de Corot mais surtout d&rsquo;Ingres et Delacroix, ses deux ma&icirc;tres symboliques. &laquo;&nbsp;Je vous assure qu&#39;aucun art n&#39;a jamais &eacute;t&eacute; moins spontan&eacute; que le mien. Ce que je fais est le r&eacute;sultat de la r&eacute;flexion et de l&#39;&eacute;tude des grands ma&icirc;tres<a href="#nbp43" id="footnoteref43_nlfq5z0" name="liennbp43" title="  Georges Moore, « Degas. The Painter of Modern life », Magazine of Art, octobre 1890, p. 423.">43</a>&hellip;&nbsp;&raquo;, dit-il au critique irlandais Georges Moore. En effet, si Degas est connu comme le chef de file du groupe des Batignolles, ses &oelig;uvres demeurent fortement empreintes du travail des ma&icirc;tres. En 1855, Degas entre &agrave; l&rsquo;&Eacute;cole des beaux-Arts de Paris. Il suit &eacute;galement des cours de dessin &agrave; l&#39;atelier du peintre Louis Lamothe, un disciple de Ingres. Il poss&egrave;de par la suite vingt toiles et quatre-vingt-huit dessins de ce ma&icirc;tre, et renomme son domicile du 23 rue Ballu l&rsquo;&laquo;&nbsp;H&ocirc;tel Ingres&nbsp;&raquo;.</p> <p><q><em>&nbsp;Pour Degas, Ingres repr&eacute;sentait un id&eacute;al de dessin et de conception classique, principes qui ont &eacute;t&eacute; fondamentaux pour son propre art tout au long de sa carri&egrave;re. L&#39;admiration de Degas pour chaque aspect de la r&eacute;alisation d&#39;Ingres se refl&egrave;te dans les &oelig;uvres qu&#39;il a acquises<a href="#nbp44" id="footnoteref44_iwtleu9" name="liennbp44" title="Ann Dumas, Degas as a Collector, Londres, Apollo Magazine, National Gallery, 1996, p. 20.">44</a>. </em></q></p> <p>Les portraits de Monsieur et Madame Leblanc (fig. 1) constituent deux chefs-d&rsquo;&oelig;uvre au sein de sa collection. Achet&eacute;s en 1896, ils sont les seuls formant une paire dans l&rsquo;&oelig;uvre de Ingres et sont parmi les plus grands jamais r&eacute;alis&eacute;s par l&rsquo;artiste en dehors des commandes royales. En outre, Degas acquiert environ trente peintures et deux cents dessins de Delacroix. S&rsquo;il admire Ingres pour la ligne, Delacroix est selon lui le ma&icirc;tre de la couleur. C&rsquo;est probablement par l&rsquo;interm&eacute;diaire de l&rsquo;artiste Gustave Moreau, qu&#39;il rencontre lorsqu&#39;ils sont &eacute;tudiants &agrave; l&#39;Acad&eacute;mie fran&ccedil;aise de Rome, que Degas est introduit aux &oelig;uvres de Delacroix.</p> <p><q><em>&nbsp;De retour &agrave; Paris en 1859, Degas s&#39;&eacute;tait plong&eacute; dans une &eacute;tude approfondie de Delacroix qui n&#39;&eacute;tait pas moins intense que son exploration d&#39;Ingres quelques ann&eacute;es auparavant. Il s&#39;est attach&eacute; &agrave; copier un certain nombre d&#39;&oelig;uvres majeures de Delacroix<a href="#nbp45" id="footnoteref45_k7b6cci" name="liennbp45" title=" Ibid., p. 30.">45</a>[&hellip;]. </em></q></p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Comme les artistes &eacute;tudi&eacute;s pr&eacute;c&eacute;demment, Degas s&rsquo;int&eacute;resse aux pi&egrave;ces anciennes en achetant deux tableaux du Greco ainsi que des dessins de Tiepolo. Degas entre aussi en possession d&rsquo;estampes de Rembrandt &ndash; qu&rsquo;il copie au Louvre durant ses ann&eacute;es de jeunesse &mdash;, des pastellistes du XVII<sup>e</sup> si&egrave;cle Robert Nanteuil et G&eacute;rard Edelinck, ou encore d&rsquo;une toile de Jean-Baptiste Perronneau et d&rsquo;un dessin de Jacques-Louis David. Les impressionnistes Monet et Pissarro collectionnent eux aussi des artistes sp&eacute;cifiques&nbsp;: Delacroix mais aussi Johan Barthold Jongkind, Eug&egrave;ne Boudin, Charles-Fran&ccedil;ois Daubigny ou Corot pour le chef de file du mouvement, Millet ou Daumier pour le second. C&eacute;zanne acquiert quant &agrave; lui au moins deux &oelig;uvres de Delacroix, ainsi que de Daumier et de Forain. Ces deux derniers sont aussi collectionn&eacute;s par Gauguin. Cette seconde moiti&eacute; du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle voit donc cohabiter des collections plurielles &ndash; entre ma&icirc;tres anciens et ma&icirc;tres modernes &ndash; qui leur permettent de se construire un v&eacute;ritable panth&eacute;on personnel.</p> <h2><strong>S&rsquo;allier &agrave; ses contemporains&nbsp;: un r&eacute;seau d&rsquo;artistes fraternel</strong></h2> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Si l&rsquo;acad&eacute;mie garantissait l&rsquo;union d&rsquo;une communaut&eacute; sociale autour de pratiques et de conceptions identiques<a href="#nbp46" id="footnoteref46_poktm5z" name="liennbp46" title=" Alain Bonnet, L’Enseignement des arts au XIXe siècle : la réforme de l’École des Beaux-Arts de 1863 et la fin du modèle académique, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006, p. 13. ">46</a>, dont d&eacute;pendait ensuite le syst&egrave;me culturel lui-m&ecirc;me, le tournant des ann&eacute;es 1860 offre aux artistes l&rsquo;accession &agrave; des d&eacute;bouch&eacute;s professionnels sans pour autant avoir suivi la fili&egrave;re scolaire acad&eacute;mique. L&rsquo;autonomie formelle de l&rsquo;art<a href="#nbp47" id="footnoteref47_katwp8d" name="liennbp47" title=" « C'est au moment même où se constitue un marché de l'œuvre d'art que, par un paradoxe apparent, se trouve donnée aux écrivains et aux artistes la possibilité d'affirmer à la fois dans leur pratique et dans la représentation qu’ils en ont l’irréductibilité de l’œuvre d’art au statut de simple marchandise et du même coup la singularité de leur pratique » : Pierre Bourdieu, « Le marché des biens symboliques », L’Année Sociologique, vol. 22, 1971, p. 52-53.">47</a>, l&rsquo;originalit&eacute; comme crit&egrave;re majeur de l&rsquo;appr&eacute;ciation artistique&nbsp;<a href="#nbp48" id="footnoteref48_dn8mp0l" name="liennbp48" title=" « Les artistes indépendants opposent à un art qui se réfère à la tradition un art qui se définit par sa volonté de rupture. L’excellence ne se confond plus avec la perfection canonique, mais avec la nouveauté et l’esthétique de la priorité prend le pas sur celle de l’imitation » : Raymonde Moulin, « De l’artisan au professionnel : l’artiste », Sociologie du travail, n°4, 1983, p. 392.">48</a>, le d&eacute;veloppement de galeries comme celles de Paul Durand-Ruel, Ambroise Vollard ou Georges Petit, contribuent ainsi &agrave; modifier la sc&egrave;ne artistique et, par &eacute;cho, les collections constitu&eacute;es par les artistes eux-m&ecirc;mes.</p> <p><q><em>&nbsp;Les groupes anti-Salon n&eacute;s de pr&eacute;occupations artistiques communes et de retrouvailles de caf&eacute; ont organis&eacute; des expositions particuli&egrave;res, des ventes aux ench&egrave;res, cr&eacute;&eacute; de nouveaux salons, suscit&eacute; un nouveau type de marchand et un nouveau type de collectionneur<a href="#nbp49" id="footnoteref49_q4pcst4" name="liennbp49" title=" Raymonde Moulin, op. cit., 1967, p. 28. ">49</a>. </em></q></p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; En 1862, au Louvre, Degas rencontre Manet puis fait la connaissance d&rsquo;artistes tels que Monet, Pissarro, Fr&eacute;d&eacute;ric Bazille ou Henri Fantin-Latour au Caf&eacute; Guerbois de Montmartre. Outre des pi&egrave;ces anciennes, il entre en possession de multiples &oelig;uvres de ses contemporains. Il acquiert ainsi une centaine de pi&egrave;ces de Manet, des peintures mais aussi des dessins et des estampes, caract&eacute;ristiques de l&rsquo;ensemble de sa pratique. Degas obtient &eacute;galement plus d&rsquo;une vingtaine de peintures, dessins et estampes de Pissarro. Ils exposent ensemble lors de la premi&egrave;re exposition impressionniste qui se tient en avril et mai 1874 au 35 boulevard des Capucines, dans l&rsquo;atelier du photographe Nadar. Outre ces artistes directement li&eacute;s &agrave; l&rsquo;aventure impressionniste, Degas collectionne ses contemporains comme Vincent Van Gogh, C&eacute;zanne &ndash; dont il eut une dizaine de toiles et aquarelles &mdash;, Gauguin avec une trentaine d&rsquo;&oelig;uvres, ainsi qu&rsquo;environ 3000 lithographies de Daumier, Paul Gavarni, James Abbott McNeill Whistler ou Mary Cassatt.&nbsp;Sa collection s&rsquo;oriente en effet vers des &oelig;uvres repr&eacute;sentatives du renouveau de la gravure des ann&eacute;es 1850-1860 avec les artistes pr&eacute;c&eacute;demment cit&eacute;s mais aussi de F&eacute;lix Bracquemond, Alphonse Legros ou Fantin-Latour. Ces derniers sont en effet membres de la Soci&eacute;t&eacute; des Aquafortistes, fond&eacute;e en 1862 par Auguste Del&acirc;tre et Alfred Cadart. Si Degas n&rsquo;en fait pas partie, il s&rsquo;attache toutefois &agrave; s&rsquo;entourer de pi&egrave;ces qualitatives, d&eacute;montrant son app&eacute;tence pour l&rsquo;innovation technique dans le domaine des arts.<br /> &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; L&rsquo;inventaire apr&egrave;s d&eacute;c&egrave;s d&rsquo;&Eacute;douard Manet<a href="#nbp50" id="footnoteref50_ptl0p4s" name="liennbp50" title="  Inventaire après décès d’Édouard Manet (extrait), Archives nationales (MC/ET/LXXXIX/1713).">50</a> (1832-1883), &eacute;tabli le 18 juin 1883, ne fait pas mention d&rsquo;&oelig;uvres de Degas au sein de sa collection. Or, il est tr&egrave;s probable que le chef de file du Groupe des Batignolles et figure de proue de la modernit&eacute;<a href="#nbp51" id="footnoteref51_c6gde4l" name="liennbp51" title="  En 1863, lors du Salon des Refusés, Manet présente Le Déjeuner sur l’herbe, une œuvre qui fait scandale et consacre l’artiste comme premier moderne dans l’historiographie du XXe siècle ">51</a> en poss&eacute;da au moins une. Nous savons en effet que Manet re&ccedil;oit en cadeau un tableau de <em>Prunes</em> de la part de Degas&nbsp;<a href="#nbp52" id="footnoteref52_tdlgugu" name="liennbp52" title=" John Rewald, Histoire de l’impressionnisme [1946], Paris, A. Michel, 1986, p. 135.">52</a>. Manet, qui &eacute;change ses &oelig;uvres avec ses confr&egrave;res et est particuli&egrave;rement li&eacute; &agrave; Degas, a donc pu poss&eacute;der des Degas sans que cela figure dans l&rsquo;inventaire posthume de sa collection. Nous savons par ailleurs que Manet poss&egrave;de au moins deux &oelig;uvres suppl&eacute;mentaires de Berthe Morisot<a href="#nbp53" id="footnoteref53_h0e9s9c" name="liennbp53" title=" Berthe Morisot, Correspondance de Berthe Morisot avec sa famille et ses amis, Manet, Puvis de Chavannes, Degas, Monet, Renoir et Mallarmé, documents réunis et présentés par Denis Rouart, Paris, Quatre Chemins-Editart, 1950, p. 52.">53</a>, ainsi que de Fr&eacute;d&eacute;ric Bazille<a href="#nbp54" id="footnoteref54_x4umt81" name="liennbp54" title=" Lionello Venturi, Les archives de l’impressionnisme : lettres de Renoir, Monet, Pissarro, Sisley et les autres. Mémoires de Paul Durand-Ruel documents, Paris, New York, Durand-Ruel éd, 1939, p. 258.">54</a> et d&rsquo;Auguste Renoir<a href="#nbp55" id="footnoteref55_lwbencj" name="liennbp55" title=" Catalogue de la deuxième Exposition de peinture, Paris, Durand-Ruel éd., 1876, p. 21.">55</a>. Manet pr&ecirc;te des pi&egrave;ces de ces artistes lors de la premi&egrave;re et deuxi&egrave;me exposition impressionniste en 1874 et 1876, non inscrites dans l&rsquo;inventaire. L&rsquo;inventaire r&eacute;v&egrave;le &eacute;galement que Manet poss&egrave;de quarante-deux &oelig;uvres de vingt-trois de ses confr&egrave;res &agrave; son d&eacute;c&egrave;s. La majorit&eacute; d&rsquo;entre eux sont des contemporains. Il obtient un grand nombre d&rsquo;&oelig;uvres de Monet (sept toiles) et de son &eacute;l&egrave;ve Eva Gonzal&egrave;s (six pi&egrave;ces)&nbsp;; ainsi que de Fantin-Latour avec quatre &oelig;uvres, puis Marcellin Desboutin, Morisot et Th&eacute;odule Ribot, repr&eacute;sent&eacute;s chacun par deux &oelig;uvres. Cette collection, comme celle de Degas, s&rsquo;oriente donc vers des artistes contemporains, du Groupe des Batignolles et des impressionnistes.</p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; L&rsquo;analyse des pr&ecirc;teurs lors des huit expositions impressionnistes<a href="#nbp56" id="footnoteref56_l303gdq" name="liennbp56" title=" Sophie Monneret et René Huyghe, L’Impressionnisme et son époque : dictionnaire international, Paris, R. Laffont, 1987, p. 232-253.">56</a>, lorsqu&rsquo;ils sont mentionn&eacute;s, montrent en effet que les artistes expos&eacute;s sont eux-m&ecirc;mes souvent en possession des &oelig;uvres de leurs contemporains :</p> <table border="1" cellpadding="0" cellspacing="0"> <tbody> <tr> <td> <p style="text-align: left;"><strong>Exposition</strong></p> </td> <td> <p style="text-align: left;"><strong>Ann&eacute;e</strong></p> </td> <td> <p style="text-align: left;"><strong>Artiste collectionneur pr&ecirc;teur (artiste collectionn&eacute;)</strong></p> </td> </tr> <tr> <td> <p style="text-align: left;">1<sup>&egrave;re</sup> exposition impressionniste</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">1874</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">Henri Rouart&nbsp;(Edgar Degas) ; &Eacute;douard Manet (Berthe Morisot)</p> </td> </tr> <tr> <td> <p style="text-align: left;">2<sup>e</sup> exposition impressionniste</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">1876</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">&Eacute;douard Manet (Auguste Renoir)</p> </td> </tr> <tr> <td> <p style="text-align: left;">3<sup>e</sup> exposition impressionniste</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">1877</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">Gustave Caillebotte (Degas, Monet, Renoir, Pissarro)&nbsp;; Henri Rouart&nbsp;(Degas), &Eacute;douard Manet (Monet)</p> </td> </tr> <tr> <td> <p style="text-align: left;">4<sup>e</sup> exposition impressionniste</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">1879</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">F&eacute;lix Bouchor (Jean-Louis Forain), Gustave Caillebotte (Monet, Pissarro), Paul Gauguin (Pissarro)</p> </td> </tr> <tr> <td> <p style="text-align: left;">5<sup>e</sup> exposition impressionniste</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">1880</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">Paul Gauguin (Pissarro)</p> </td> </tr> <tr> <td> <p style="text-align: left;">6<sup>e</sup> exposition impressionniste</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">1881</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">Edgar Degas (Gauguin)&nbsp;; Paul Gauguin (Armand Guillaumin, Pissarro)&nbsp;; Mary Cassatt (Pissarro)&nbsp;; Henri Rouart (Pissarro)</p> </td> </tr> <tr> <td> <p style="text-align: left;">7<sup>e</sup> exposition impressionniste</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">1882</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">Gustave Caillebotte (Monet)</p> </td> </tr> <tr> <td> <p style="text-align: left;">8<sup>e</sup> exposition impressionniste</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">1886</p> </td> <td> <p style="text-align: left;">Zacharie Astruc (Guillaumin)&nbsp;; Camille Pissarro (Paul Signac)&nbsp;; Georges Seurat (Paul Signac)</p> </td> </tr> </tbody> </table> <p style="text-align: left;"><em>Liste des artistes collectionneurs ayant pr&ecirc;t&eacute; des &oelig;uvres de leurs collections personnelles durant les expositions impressionnistes (1874-1886)</em></p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Les &oelig;uvres collectionn&eacute;es par les artistes, et expos&eacute;es lors de ces diff&eacute;rentes expositions, t&eacute;moignent de collections orient&eacute;es autour d&rsquo;un cercle &eacute;troit de pairs. Les impressionnistes partagent en effet les m&ecirc;mes questionnements quant &agrave; la lumi&egrave;re, la division de la couleur, le travail de l&rsquo;ombre, le plein-air, ou encore la gravure.</p> <figure> <p style="text-align: center;"><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="628" src="https://alepreuve.org/sites/default/files/Corthier%20jardin.jpg" width="500" /></p> <figcaption> <p style="text-align: center;">&Eacute;douard Manet, <em>La famille Monet au jardin</em>, 1874, huile sur toile, 48 x 95 cm, The Metropolitan Museum of Art, New York<br /> Claude Monet poss&egrave;de cette &oelig;uvre entre 1874 et 1876.</p> </figcaption> </figure> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; S&rsquo;ils ne pr&ecirc;tent pas tous lors de ces expositions, les impressionnistes sont majoritairement collectionneurs. Fr&eacute;d&eacute;ric Bazille (1841-1870) ach&egrave;te les <em>Femmes au jardin</em> de Monet. Ce dernier acquiert des &oelig;uvres de Manet, Degas, Rodin, Renoir, Caillebotte, Morisot ou encore Pissarro. La collection de Monet t&eacute;moigne en effet de ses relations amicales, comme <em>La famille Monet au jardin </em>(fig. 3) que Manet peint durant l&rsquo;&eacute;t&eacute; 1874 et qu&rsquo;il offre &agrave; Monet, mais aussi caract&eacute;ristique du style de ses confr&egrave;res, &agrave; l&rsquo;image de <em>Jeune fille au bain</em> de Renoir (fig.&nbsp;4), acquise pour 6 000 francs &agrave; la galerie Bernheim-Jeune, et que Monet conserve pr&eacute;cieusement.</p> <figure> <p style="text-align: center;"><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="565" src="https://alepreuve.org/sites/default/files/Corthier%204.jpg" width="500" /></p> <figcaption> <p style="text-align: center;">Auguste Renoir, <em>Jeune fille au bain</em>, 1892, huile sur toile, 81,3 x 64,8 cm, The Metropolitan Museum of Art, New York<br /> Claude Monet ach&egrave;te cette &oelig;uvre &agrave; la galerie Bernheim-Jeune le 11 avril 1900 pour 6000 francs.</p> </figcaption> </figure> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Elle repr&eacute;sente un &laquo;&nbsp;tableau &eacute;blouissant de couleurs, d&rsquo;une merveilleuse &eacute;poque de Renoir&nbsp;<a href="#nbp57" id="footnoteref57_cnm29ia" name="liennbp57" title=" François Gérard Seligmann, 24 mars 1935, Archives of the History of art, The Getty Center for the History of Art and the Humanities, Los Angles, cité dans Marianne Mathieu et Dominique Lobstein, Monet collectionneur [exposition, Paris, musée Marmottan Monet, 14 septembre 2017 - 14 janvier 2018], Vanves, Paris, Hazan, musée Marmottan Monet, 2017, p. 112.">57</a> &raquo;. Pissarro lui aussi, se constitue une collection d&rsquo;&oelig;uvres contemporaines. Il obtient ainsi une dizaine d&rsquo;&oelig;uvres de Manet, au moins un pastel de Degas, une aquarelle de Jongkind, ainsi que des &oelig;uvres de Monet et de sa belle-fille Blanche Hosched&eacute;, Cassatt, Amand Gauthier, une dizaine d&rsquo;Armand Guillaumin, de Morisot ou encore Renoir. En outre, il acquiert des pi&egrave;ces d&rsquo;artistes plus jeunes comme Maximilien Luce, Georges Seurat, Paul Signac, Th&eacute;odore van Rysselberghe, Alfred Sisley ou du moins connu Louis Le Bail&nbsp;; mais aussi du peintre et graveur comme lui &Eacute;douard Dufeu, et sept &oelig;uvres de son tr&egrave;s proche ami et peintre Ludovic Piette. Il rassemble aussi des pi&egrave;ces de Gauguin, Van Gogh, ainsi qu&rsquo;une vingtaine de C&eacute;zanne. Comme ses camarades, Renoir (1841-1919) rassemble des &oelig;uvres de ses compagnons d&rsquo;aventure comme Manet, Monet, Morisot ou encore Degas. Ces artistes constituent donc un r&eacute;seau de pairs aliment&eacute; par des affinit&eacute;s amicales et artistiques, le partage mutuel d&rsquo;&eacute;v&eacute;nements mais aussi par un r&eacute;seau marchand commun autour de Durand-Ruel, Vollard ou Petit. Comme le soulignait le sociologue Mark Granovetter&nbsp;:</p> <p><q><em>&nbsp;Les acteurs n&#39;agissent ni ne d&eacute;cident comme des atomes en dehors de tout contexte social, pas plus qu&#39;ils n&#39;adh&egrave;rent servilement &agrave; des destins &eacute;crits pour eux par l&#39;intersection des cat&eacute;gories sociales auxquelles ils appartiennent. Leurs tentatives d&rsquo;actions intentionnelles sont plut&ocirc;t encastr&eacute;es dans le syst&egrave;me concret des relations sociales<a href="#nbp58" id="footnoteref58_8nfjr5m" name="liennbp58" title=" Mark Granovetter, « Economic Action and Social Structure: The Problem of Embeddedness », The American Journal of Sociology, 1985, 91-3, p. 487.">58</a>. </em></q></p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; En ce sens, les collections des artistes impressionnistes font pleinement partie du syst&egrave;me artistique moderne. Si, comme Jacquemart, Bonnat ou Flameng, certains impressionnistes acqui&egrave;rent des ma&icirc;tres du pass&eacute; &ndash; eux aussi sont influenc&eacute;s par leurs formations comme par le contexte artistique de red&eacute;couvertes en art, &eacute;conomique avec le d&eacute;veloppement des ventes aux ench&egrave;res &ndash; les valeurs qu&rsquo;ils d&eacute;fendent sont diff&eacute;rentes et s&rsquo;inscrivent dans l&rsquo;avant-garde, au sens d&rsquo;une position protestataire en renouvellement r&eacute;gulier&nbsp;<a href="#nbp59" id="footnoteref59_fxthfmp" name="liennbp59" title=" Béatrice Joyeux-Prunel, Les avant-gardes artistiques, 1848-1918 : une histoire transnationale, Paris, Gallimard, 2015, p. 23.">59</a>, de la fin du si&egrave;cle et dont leurs d&eacute;marches de collectionneurs se font l&rsquo;&eacute;cho.<br /> &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Caillebotte (1848-1894) par exemple, entr&eacute; dans l&rsquo;atelier de Bonnat en 1871, effectue un voyage &agrave; Naples l&rsquo;ann&eacute;e suivante chez son ami de Nittis, qui l&rsquo;introduit aupr&egrave;s de Degas. En 1873, date &agrave; laquelle il effectue son entr&eacute;e aux Beaux-Arts o&ugrave; il ne reste qu&rsquo;un an, il fait la connaissance de Desboutin, Rouart et Monet. Son p&egrave;re, d&eacute;c&eacute;d&eacute; le 25 d&eacute;cembre 1874, lui laisse une importante fortune qui le met &agrave; l&rsquo;abri des d&eacute;boires financiers &eacute;prouv&eacute;s par certains de ses confr&egrave;res. Il l&rsquo;utilise, entre autres, pour financer les expositions impressionnistes mais &eacute;galement pour acqu&eacute;rir des &oelig;uvres de ses camarades dans le besoin. La premi&egrave;re &oelig;uvre qu&rsquo;il obtient de son ami Monet est probablement <em>Un coin d&rsquo;appartement</em> qu&rsquo;il ach&egrave;te lors de la premi&egrave;re vente impressionniste en 1875. L&rsquo;objectif de cette toile, o&ugrave; sont pr&eacute;sents son fils Jean et sa femme Camille, &eacute;tait surtout l&rsquo;occasion d&rsquo;&eacute;tudier l&#39;entr&eacute;e de l&#39;air et de la lumi&egrave;re dans une sc&egrave;ne d&rsquo;int&eacute;rieur. Si la vente se solde par un relatif fiasco financier, elle permet &agrave; la jeune g&eacute;n&eacute;ration de b&eacute;n&eacute;ficier de retomb&eacute;es m&eacute;diatiques. En avril 1876, au sortir de la seconde exposition impressionniste, il obtient du m&ecirc;me artiste <em>R&eacute;gates &agrave; Argenteuil</em>. Cette ann&eacute;e-l&agrave;, il ach&egrave;te trois &oelig;uvres &agrave; Monet pour 1 000 francs, suivi de la toile <em>Le d&eacute;jeuner</em> pour 600 francs en 1878, et <em>Effet de neige &agrave; Vetheuil</em> en 1879. Cette &oelig;uvre appartient d&eacute;j&agrave; &agrave; Caillebotte lors de la quatri&egrave;me exposition impressionniste. C&rsquo;est donc dans une dynamique de soutien et de valorisation imm&eacute;diate que l&rsquo;artiste effectue ses achats, en pr&eacute;sentant les &oelig;uvres de ses amis peu de temps apr&egrave;s leur production et leur acquisition. <em>Effet de neige &agrave; Vetheuil</em> est en effet peinte entre 1878 et 1879, achet&eacute;e en janvier 1879 et pr&ecirc;t&eacute;e pour l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement en avril de la m&ecirc;me ann&eacute;e. Caillebotte r&eacute;alise par ailleurs des avances d&rsquo;argent r&eacute;guli&egrave;res et le paiement du loyer parisien de Monet. Intime de Renoir &ndash; Caillebotte est le parrain de son fils Pierre &mdash;, il acquiert <em>La Balan&ccedil;oire</em> en 1877 et l&rsquo;une des &oelig;uvres les plus importantes de l&rsquo;artiste, <em>Le bal du moulin de la Galette</em>, en 1879.</p> <figure> <p style="text-align: center;"><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="565" src="https://alepreuve.org/sites/default/files/Corthier%205.jpg" width="500" /></p> <figcaption> <p style="text-align: center;">Edgar Degas, <em>La Le&ccedil;on de danse</em>, vers 1879, Pastel et craie noire sur 3 feuilles de papier jointes, 64,6 x 56,3 cm, The Metropolitan Museum of Art, New York<br /> Gustave Caillebotte ach&egrave;te probablement cette &oelig;uvre lors de la 4<sup>e</sup> exposition impressionniste de 1879 ou peu apr&egrave;s. En 1894, il la l&egrave;gue &agrave; Renoir, qui la vend peu apr&egrave;s.</p> </figcaption> </figure> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Le caract&egrave;re fraternel est en effet d&eacute;terminant chez les artistes collectionneurs impressionnistes. Berthe Morisot (1841-1895) est par exemple particuli&egrave;rement flatt&eacute;e lorsque Monet lui fait cadeau d&rsquo;une pi&egrave;ce&nbsp;: &laquo;&nbsp;Je commence &agrave; entrer dans l&rsquo;intimit&eacute; de mes confr&egrave;res les Impressionnistes. Monet veut absolument m&rsquo;offrir un panneau pour mon salon. Tu juges si je l&rsquo;accepte avec plaisir<a href="#nbp60" id="footnoteref60_d85do75" name="liennbp60" title=" Lettre de Berthe Morisot à sa sœur Edma, début 1884, in Berthe Morisot, op. cit., 1950, p. 118. ">60</a> &raquo;. Mais c&rsquo;est surtout Manet, son beau-fr&egrave;re, que Berthe Morisot collectionne, et dont elle obtient au moins une dizaine de pi&egrave;ces. Mary Cassatt (1844-1926) elle aussi poss&egrave;de une &oelig;uvre du peintre d&rsquo;<em>Olympia</em>, mais ce sont surtout des pi&egrave;ces de Degas qu&rsquo;elle acquiert. Degas et Cassatt, tr&egrave;s proches amicalement comme artistiquement, collaborent de nombreuses fois. C&rsquo;est lui qui l&rsquo;encourage &agrave; exposer lors de la quatri&egrave;me exposition impressionniste en 1879. Cassatt est &eacute;galement une grande admiratrice de Pissarro, &agrave; qui elle ach&egrave;te des &oelig;uvres&nbsp;: une toile ainsi que deux gouaches qu&rsquo;elle pr&ecirc;te lors de la sixi&egrave;me exposition impressionniste en 1881. En outre, si le sculpteur Rodin (1840-1917) est connu comme un grand collectionneur d&rsquo;antiques &ndash; il en poss&egrave;de plus de 6 000 &ndash; il collectionne &eacute;galement ses contemporains : Alexandre Falgui&egrave;re, Medardo Rosso, Eug&egrave;ne Carri&egrave;re, Jules Desbois, Aristide Maillol, Antoine Bourdelle, Renoir ou Van Gogh. Le peintre arl&eacute;sien, rang&eacute; dans la cat&eacute;gorie des inclassables aux c&ocirc;t&eacute;s de Gauguin et de C&eacute;zanne, r&eacute;alise de nombreux &eacute;changes avec ses confr&egrave;res &Eacute;mile Bernard et Gauguin. Ce dernier &eacute;volue parmi les impressionnistes. C&rsquo;est donc vers eux que se tourne Gauguin pour collectionner des &oelig;uvres de ses contemporains, avec des pi&egrave;ces de Manet, Degas, Guillaumin, Cassatt, Renoir, C&eacute;zanne, ou encore Pissarro avec lequel il est tr&egrave;s proche au d&eacute;but de sa carri&egrave;re et dont il obtient des &oelig;uvres qui t&eacute;moignent des recherches impressionnistes, comme en t&eacute;moigne la s&eacute;rie des <em>Meules</em> de Pissarro, des &eacute;tudes sur la variation de la lumi&egrave;re sur un m&ecirc;me motif, et que Gauguin collectionne.</p> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Le r&eacute;seau impressionniste se construit donc une g&eacute;n&eacute;alogie tr&egrave;s personnelle, sans pour autant faire table rase du pass&eacute;. Plusieurs d&rsquo;entre eux sont en effet particuli&egrave;rement attach&eacute;s aux ma&icirc;tres anciens, voire m&ecirc;me au syst&egrave;me acad&eacute;mique. Rappelons par exemple Manet qui tente de l&rsquo;int&eacute;grer tout au long de sa carri&egrave;re. Cependant, s&rsquo;ils re&ccedil;oivent une formation &agrave; l&rsquo;&Eacute;cole des beaux-arts et copient toujours des &oelig;uvres anciennes, ils choisissent de s&rsquo;entourer, au quotidien, de ma&icirc;tres modernes ou de leurs contemporains. &Eacute;changer des &oelig;uvres entre confr&egrave;res ou les acheter pour se soutenir permettent aux artistes de s&rsquo;allier, dans une communaut&eacute; empreinte de respect, d&rsquo;admiration, mais aussi d&rsquo;exp&eacute;rimentations. Ces &oelig;uvres collectionn&eacute;es, parfois tout juste sorties de l&rsquo;atelier, souvent rejet&eacute;es, participent &agrave; la construction d&rsquo;un r&eacute;seau solidaire au sein duquel les filiations se d&eacute;veloppent conjointement aux recherches de chacun. &Agrave; partir des &oelig;uvres collectionn&eacute;es par les impressionnistes, il semble donc que la g&eacute;n&eacute;alogie qu&rsquo;ils construisent, outre des pi&egrave;ces anciennes toujours pr&eacute;sentes, se double d&rsquo;une forte contemporan&eacute;it&eacute;. Les nouvelles recherches d&eacute;velopp&eacute;es deviennent tout aussi importantes que des &oelig;uvres de ma&icirc;tres pour stimuler leurs propres productions.</p> <h2>&nbsp;</h2> <h2><strong>Conclusion</strong></h2> <p>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &Eacute;tablir une g&eacute;n&eacute;alogie artistique &agrave; partir des &oelig;uvres collectionn&eacute;es par les artistes &agrave; la fin du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle permet d&rsquo;entrer dans leur intimit&eacute; pour comprendre leurs motivations, aussi vari&eacute;es soient-elles. Les relier &agrave; un environnement artistique, mais aussi &eacute;conomique, permet aussi d&rsquo;embrasser ces collections dans un contexte de mutation, durant lequel le syst&egrave;me acad&eacute;mique perd de son pouvoir au profit d&rsquo;une autonomie formelle de l&rsquo;art et du d&eacute;veloppement du march&eacute;, incitant les artistes &agrave; imaginer de nouvelles formes d&rsquo;expression. Si des propositions in&eacute;dites &eacute;mergent, l&rsquo;enseignement artistique fonctionne lui toujours gr&acirc;ce &agrave; un syst&egrave;me de ma&icirc;tres et d&rsquo;ateliers domin&eacute; par l&rsquo;&Eacute;cole des beaux-arts de Paris et certains ateliers priv&eacute;s. Les formations dispens&eacute;es, s&rsquo;appuyant sur l&rsquo;&eacute;tude d&rsquo;apr&egrave;s les ma&icirc;tres anciens ont un impact sur les &oelig;uvres que collectionnent par la suite les artistes. Ceux qui &eacute;voluent dans les cercles acad&eacute;miques trouvent leurs filiations chez de grands ma&icirc;tres italiens, flamands ou fran&ccedil;ais, issus de la Renaissance et du XVIII<sup>e</sup> si&egrave;cle. Ces &oelig;uvres font &eacute;cho &agrave; l&rsquo;enseignement qu&rsquo;ils re&ccedil;oivent mais &eacute;galement au d&eacute;veloppement du collectionnisme durant cette fin de si&egrave;cle, lors de laquelle les amateurs se multiplient au m&ecirc;me titre que les &oelig;uvres anciennes sur le march&eacute;. Parall&egrave;lement, des ma&icirc;tres symboliques apparaissent. Qu&rsquo;ils soient acad&eacute;miques ou &agrave; l&rsquo;origine d&rsquo;une nouvelle modernit&eacute;, les artistes s&rsquo;identifient &agrave; des confr&egrave;res tels que Delacroix ou Ingres, artistes qui font autorit&eacute; en alliant ma&icirc;trise technique et nouveau souffle pour la jeune g&eacute;n&eacute;ration. Les impressionnistes collectionnent ainsi des figures parfois similaires aux artistes du cercle acad&eacute;mique. Cependant, c&rsquo;est surtout gr&acirc;ce &agrave; leurs contemporains, et &agrave; la construction d&rsquo;un r&eacute;seau solidaire que la nouvelle avant-garde se distingue. Ces artistes s&rsquo;offrent des cadeaux, s&rsquo;&eacute;changent des &oelig;uvres, ou les ach&egrave;tent. Les alliances qu&rsquo;ils mettent en place et les &oelig;uvres qui circulent, parfois tout juste r&eacute;alis&eacute;es, montrent en effet que la g&eacute;n&eacute;alogie qu&rsquo;ils construisent est contemporaine de leurs productions.</p> <p>&nbsp;</p> <hr /> <p><strong>Notes et r&eacute;f&eacute;rences :</strong></p> <p><strong>Bibliographie</strong></p> <p>Edmond Bonnaff&eacute;, <em>Causeries sur l&#39;art et la curiosit&eacute;</em>, Paris, A. Quantin, 1878.</p> <p>Alain Bonnet, <em>L&rsquo;Enseignement des arts au XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle : la r&eacute;forme de l&rsquo;&Eacute;cole des Beaux-Arts de 1863 et la fin du mod&egrave;le acad&eacute;mique</em>, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006.</p> <p>Pierre Bourdieu, &laquo;&nbsp;Le march&eacute; des biens symboliques&nbsp;&raquo;, in <em>L&rsquo;Ann&eacute;e Sociologique</em>, vol. 22, 1971, p.&nbsp;49-126.</p> <p>Pierre Cabanne, <em>Les grands collectionneurs. Tome II, &Ecirc;tre&nbsp;collectionneur&nbsp;au XX<sup>e</sup> si&egrave;cle</em>, Paris, &Eacute;d. de l&rsquo;Amateur, 2004.</p> <p><em>Degas in&eacute;dit : actes du colloque Degas, Mus&eacute;e d&#39;Orsay, 18-21 avril 1988</em>, Paris, la Documentation fran&ccedil;aise, &laquo;&nbsp;Rencontres de l&rsquo;&Eacute;cole du Louvre&nbsp;&raquo;, 1989.</p> <p>Mark Granovetter, &laquo; Economic Action and Social Structure: The Problem of Embeddedness&nbsp;&raquo;, <em>The American Journal of Sociology</em>, 1985, 91/3, p.&nbsp;481-510.</p> <p>Francis Haskell, <em>La norme et le caprice. Red&eacute;couvertes en art&nbsp;: aspects du go&ucirc;t et de la collection en France et en Angleterre, 1789-1914</em>, trad. Robert Fohr, Paris, Flammarion, 1986.</p> <p>Michel Hoog et Emmanuel&nbsp;Hoog, &laquo;&nbsp;L&#39;Histoire du march&eacute; de l&#39;art&nbsp;&raquo;, <em>Le march&eacute; de l&#39;art</em>, Paris, Presses Universitaires de France, 1995.</p> <p>B&eacute;atrice Joyeux-Prunel, <em>Les avant-gardes artistiques, 1848-1918 : une histoire transnationale</em>, Paris, Gallimard, 2015.</p> <p>V&eacute;ronique Long, &laquo;&nbsp;Les collectionneurs d&#39;&oelig;uvres d&#39;art et la donation au mus&eacute;e &agrave; la fin du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle : l&#39;exemple du mus&eacute;e du Louvre&nbsp;&raquo;, <em>Romantisme</em>, n&deg;112, 2001, p.&nbsp;45-54.</p> <p>Frits Lugt, <em>R&eacute;pertoire des catalogues de ventes publiques int&eacute;ressant l&rsquo;art ou la curiosit&eacute;, Troisi&egrave;me p&eacute;riode 1861-1900</em>, La Haye, M. Nijhoff, &laquo;&nbsp;R&eacute;pertoire des catalogues de ventes publiques int&eacute;ressant l&rsquo;art ou la curiosit&eacute;&nbsp;&raquo;, 1964.</p> <p>Anne-Doris Meyer, &laquo;&nbsp;L&#39;&eacute;criture d&#39;une collection&nbsp;&raquo;, in <em>Cahiers Edmond et Jules de Goncourt</em>, n&deg;19, 2012, p.&nbsp;155-164.</p> <p>Sophie Monneret et Ren&eacute; Huyghe, <em>L&rsquo;impressionnisme et son &eacute;poque&nbsp;: dictionnaire international</em>, Paris, R. Laffont, 1987.</p> <p>Raymonde Moulin, <em>Le march&eacute; de la peinture en France</em>, Paris, Minuit, 1967.</p> <p>Raymonde Moulin, &laquo;&nbsp;De l&rsquo;artisan au professionnel&nbsp;: l&rsquo;artiste&nbsp;&raquo;, <em>Sociologie du travail</em>, n&deg;4, 1983, p.&nbsp;388-403.</p> <p>France Nerlich, Alain Bonnet (dir.), <em>Apprendre &agrave; peindre : les ateliers priv&eacute;s &agrave; Paris, 1780-1863 [actes du colloque, Universit&eacute; Fran&ccedil;ois-Rabelais de Tours, 16-17 juin 2011]</em>, Tours, Presses universitaires Fran&ccedil;ois-Rabelais, &laquo;&nbsp;Perspectives historiques&nbsp;&raquo;, 2013.</p> <p>Dominique Pety, &laquo;&nbsp;Le personnage du collectionneur au XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle : de l&#39;excentrique &agrave; l&#39;amateur distingu&eacute;&nbsp;&raquo;, <em>Romantisme</em>, n&deg;112, 2001, p.&nbsp;71-81.</p> <p>Jean-Miguel Pire, <em>L&rsquo;&eacute;ducation artistique en France&nbsp;: du mod&egrave;le acad&eacute;mique et scolaire aux pratiques actuelles, XVIII<sup>e</sup>-XIX<sup>e</sup> si&egrave;cles</em>, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2010.</p> <p>John Rewald, <em>Histoire de l&rsquo;impressionnisme </em>[1946], trad. Nancy Goldet-Bouwens, Paris, A. Michel, 1986.</p> <p>Dominique Rey, <em>Henri</em> <em>Rouart. Peintre, collectionneur, ing&eacute;nieur</em>, Paris, L&rsquo;&Eacute;choppe, 2014.</p> <p>Guy Saigne, <em>L&eacute;on Bonnat : le portraitiste de la III<sup>e</sup> R&eacute;publique. Catalogue raisonn&eacute; des portraits</em>, Paris, Mare &amp; Martin, 2017.</p> <p>Paul Signac, <em>D&rsquo;Eug&egrave;ne Delacroix au n&eacute;o-impressionnisme </em>[1899], Paris, H. Floury, 1911.</p> <p>Julie Verlaine, <em>Femmes collectionneuses d&rsquo;art et m&eacute;c&egrave;nes de 1880 &agrave; nos jours</em>, Malakoff, Hazan, 2014.</p> <p>Ambroise Vollard, <em>En &eacute;coutant C&eacute;zanne, Degas, Renoir</em>, Paris, Grasset, 1938.</p> <p>Harrison C. et Cynthia A. White, <em>La carri&egrave;re des peintres au XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle : du syst&egrave;me acad&eacute;mique au march&eacute; des impressionnistes</em>, trad. Antoine Jaccottet, Paris, Flammarion, &laquo;&nbsp;Art, histoire, soci&eacute;t&eacute;&nbsp;&raquo;, 1991.</p> <p>&nbsp;</p> <hr /> <p><a href="#liennbp1" name="nbp1">1</a> Claude Monet, <em>Un coin d&rsquo;appartement</em>, 1875, huile sur toile, 81,5 x 60,5 cm, mus&eacute;e d&rsquo;Orsay.</p> <p><a href="#liennbp2" name="nbp2">2</a> Cette &oelig;uvre fut adjug&eacute;e &agrave; Henri Rouart 80 francs. Il la donne &agrave; Degas ou l&rsquo;ach&egrave;te pour lui, voir <em>Degas in&eacute;dit : actes du colloque Degas, Mus&eacute;e d&#39;Orsay, 18-21 avril 1988</em>, Paris, la Documentation fran&ccedil;aise, &laquo;&nbsp;Rencontres de l&rsquo;&Eacute;cole du Louvre&nbsp;&raquo;, 1989, note 7 p. 82.</p> <p><a href="#liennbp3" name="nbp3">3</a> Harrison C. et Cynthia A. White, <em>La carri&egrave;re des peintres au XIXe si&egrave;cle : du syst&egrave;me acad&eacute;mique au march&eacute; des impressionnistes</em>, Paris, Flammarion, &laquo;&nbsp;Art, histoire, soci&eacute;t&eacute;&nbsp;&raquo;, 1991.</p> <p><a href="#liennbp4" name="nbp4">4</a>&nbsp;Le collectionnisme est une activit&eacute; humaine de collecte d&#39;objet dans un but d&#39;accumulation.</p> <p><a href="#liennbp5" name="nbp5">5</a> Raymonde Moulin, <em>Le march&eacute; de la peinture en France</em>, Paris, Minuit, 1967.</p> <p><a href="#liennbp6" name="nbp6">6</a> Cette base de donn&eacute;es s&rsquo;inscrit dans le cadre d&#39;un travail de doctorat portant sur les artistes collectionneurs de la seconde moiti&eacute; du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle &agrave; aujourd&rsquo;hui.</p> <p><a href="#liennbp7" name="nbp7">7</a> Jean-Auguste-Dominique Ingres, <em>R&eacute;ponse au rapport sur l&rsquo;&Eacute;cole imp&eacute;riale et Sp&eacute;ciale des Beaux-Arts adress&eacute;e au mar&eacute;chal Vaillant, ministre de la Maison de l&rsquo;Empereur et des Beaux-Arts, par M. Ingres, s&eacute;nateur, membre de l&rsquo;Institut</em>, Paris, Librairie acad&eacute;mique Didier et Cie, 1863.</p> <p><a href="#liennbp8" name="nbp8">8</a> Jean-Miguel Pire, <em>L&rsquo;&Eacute;ducation artistique en France&nbsp;: du mod&egrave;le acad&eacute;mique et scolaire aux pratiques actuelles, XVIII<sup>e</sup>-XIX<sup>e</sup> si&egrave;cles</em>, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2010.</p> <p><a href="#liennbp9" name="nbp9">9</a> <em>Apprendre &agrave; peindre : les ateliers priv&eacute;s &agrave; Paris, 1780-1863</em> [actes du colloque organis&eacute; &agrave; l&rsquo;universit&eacute; Fran&ccedil;ois-Rabelais de Tours, 16-17 juin 2011], Tours, Presses universitaires Fran&ccedil;ois-Rabelais, &laquo;&nbsp;Perspectives historiques&nbsp;&raquo;, 2013, p. 277.</p> <p><a href="#liennbp10" name="nbp10">10</a> Jean-Pierre Babelon, <em>Une passion commune pour l&rsquo;art : N&eacute;lie Jacquemart et &Eacute;douard Andr&eacute;</em>, Florence, Scala Group, 2012.</p> <p><a href="#liennbp11" name="nbp11">11</a> Julie Verlaine, <em>Femmes collectionneuses d&rsquo;art et m&eacute;c&egrave;nes de 1880 &agrave; nos jours</em>, Malakoff, Hazan, 2014, p. 52.</p> <p><a href="#liennbp12" name="nbp12">12</a> Guy Saigne, <em>L&eacute;on Bonnat : le portraitiste de la IIIe R&eacute;publique. Catalogue raisonn&eacute; des portraits</em>, Paris, Mare &amp; Martin, 2017.</p> <p><a href="#liennbp13" name="nbp13">13</a> L&eacute;on Bonnat, <em>La Cr&eacute;ation de l&rsquo;homme</em>, entre 1858 et 1861, huile sur toile, Bayonne, mus&eacute;e Bonnat-Helleu.</p> <p><a href="#liennbp14" name="nbp14">14</a> L&eacute;on Bonnat, <em>Copie d&rsquo;apr&egrave;s &laquo;&nbsp;L&rsquo;Expulsion du Paradis terrestre&nbsp;&raquo;</em>, entre 1858 et 1861, crayon, estampe et lavis sur papier, Bayonne, mus&eacute;e Bonnat-Helleu.</p> <p><a href="#liennbp15" name="nbp15">15</a> Michel-Ange, <em>Adam et &Egrave;ve</em>, sanguine, lavis de sanguine, plume, encre brune, 27,7 x 19,6 cm, Bayonne, mus&eacute;e Bonnat-Helleu.</p> <p><a href="#liennbp16" name="nbp16">16</a> Michel-Ange, <em>&Eacute;tude pour &laquo;&nbsp;Le Jugement dernier&nbsp;&raquo;</em>, 1534, pierre noire sur papier, 34,4 x 29 cm, Bayonne, mus&eacute;e Bonnat-Helleu.</p> <p><a href="#liennbp17" name="nbp17">17</a> Henri Regnault, Jacques-Ernest Bulloz (&eacute;diteur), <em>Mlle N&eacute;lie Jacquemart</em>, estampe, 13,9 x 8,8 cm, Mus&eacute;e Carnavalet.</p> <p><a href="#liennbp18" name="nbp18">18</a> Michel Hoog et Emmanuel&nbsp;Hoog, &laquo;&nbsp;L&#39;Histoire du march&eacute; de l&#39;art&nbsp;&raquo;, dans <em>Le march&eacute; de l&#39;art</em>, Paris, Presses Universitaires de France, 1995, p. 29.</p> <p><a href="#liennbp19" name="nbp19">19</a> Antonio Correggio, Rapha&euml;l, Michel-Ange, L&eacute;onard de Vinci, Pisanello, Le P&eacute;rugin, Andrea del Sarto, Ottavio Mario Leoni, Fra Filippo Lippi, Tiepolo et V&eacute;ron&egrave;se.</p> <p><a href="#liennbp20" name="nbp20">20</a> Pierre Dumonstier, Pierre Puget et Claude Gell&eacute;e.</p> <p><a href="#liennbp21" name="nbp21">21</a> Jean-Honor&eacute; Fragonard, Antoine Watteau, Fran&ccedil;ois Boucher, Charles Nicolas Cochin, Hubert Robert, Gabriel-Jacques de Saint-Aubin, Jacques-Louis David, Jean-Baptiste Greuze, Pierre-Paul Prud&rsquo;hon mais aussi de Fran&ccedil;ois Marius Granet actif au tournant du si&egrave;cle.</p> <p><a href="#liennbp22" name="nbp22">22</a> Gerard ter Borch, Rembrandt et Adriaen van Ostade.</p> <p><a href="#liennbp23" name="nbp23">23</a> Jacob Jordaens, Pierre Paul Rubens et Antoine van Dyck.</p> <p><a href="#liennbp24" name="nbp24">24</a> Alonso Cano et Francesco Jos&eacute; de Goya y Lucientes.</p> <p><a href="#liennbp25" name="nbp25">25</a> Plusieurs des &oelig;uvres d&rsquo;Ingres poss&eacute;d&eacute;es par Flameng avaient appartenues &agrave; des artistes&nbsp;: le peintre &Eacute;douard Dubufe (1819-1883) ainsi que le peintre et graveur Luigi Calamatta (1801-1869). En outre, parmi les &oelig;uvres recens&eacute;es de la collection Flameng, celle de Dominique-Joseph van Oost appartenait au peintre Henri-Pierre Danloux (1753-1809).</p> <p><a href="#liennbp26" name="nbp26">26</a> &Agrave; ce propos, voir les catalogues de ventes faisant &eacute;tat de la pr&eacute;sence de G&eacute;ricault et d&rsquo;autres artistes de l&rsquo;&eacute;cole fran&ccedil;aise dans les collections particuli&egrave;res&nbsp;: celles de Michel-Ange Gihaut (1872), M. M. de N. (1874), Bouginier (1877), Horace His de la Salle (1881), Fran&ccedil;ois Walferdin (1880), Dr S. (1882), M. X. Rodrigues (1889), M. Moignon (1891), M. S. (1896) par exemple.</p> <p><a href="#liennbp27" name="nbp27">27</a> Charles-Philippe de Chennevi&egrave;res-Pointel, <em>Souvenirs d&rsquo;un directeur des beaux-arts</em>, Paris, France, Aux bureaux de l&rsquo;artiste, 1883, p. 142.</p> <p><a href="#liennbp28" name="nbp28">28</a> Cit&eacute; par Julie Verlaine, <em>op. cit.</em>, 2014, p. 62.</p> <p><a href="#liennbp29" name="nbp29">29</a> Francis Haskell, <em>La norme et le caprice. Red&eacute;couvertes en art&nbsp;: aspects du go&ucirc;t et de la collection en France et en Angleterre, 1789-1914</em>, Paris, Flammarion, 1986, p. 131.</p> <p><a href="#liennbp30" name="nbp30">30</a> Thomas Couture, <em>M&eacute;thode et entretiens d&rsquo;atelier</em>, Paris, T. Couture, 1867, p. 326.</p> <p><a href="#liennbp31" name="nbp31">31</a> V&eacute;ronique Long, &laquo;&nbsp;Les collectionneurs d&#39;&oelig;uvres d&#39;art et la donation au mus&eacute;e &agrave; la fin du XIXe si&egrave;cle : l&#39;exemple du mus&eacute;e du Louvre&nbsp;&raquo;, <em>Romantisme</em>, 2001, n&deg; 112, p. 45-54.</p> <p><a href="#liennbp32" name="nbp32">32</a> Frits Lugt, <em>R&eacute;pertoire des catalogues de ventes publiques int&eacute;ressant l&rsquo;art ou la curiosit&eacute;, Troisi&egrave;me p&eacute;riode 1861-1900</em>, La Haye, M. Nijhoff, &laquo;&nbsp;R&eacute;pertoire des catalogues de ventes publiques int&eacute;ressant l&rsquo;art ou la curiosit&eacute;&nbsp;&raquo;, 1964.</p> <p><a href="#liennbp33" name="nbp33">33</a> Anne-Doris Meyer, &laquo;&nbsp;L&#39;&Eacute;criture d&#39;une collection&nbsp;&raquo;, in <em>Cahiers Edmond et Jules de Goncourt</em>, n&deg;19, 2012, p. 158.</p> <p><a href="#liennbp34" name="nbp34">34</a> Vincent Pomar&egrave;de, <em>&Eacute;tienne Moreau-N&eacute;laton&nbsp;: un collectionneur peintre ou un peintre collectionneur</em>, Paris, Association Moreau-N&eacute;laton, 1988.</p> <p><a href="#liennbp35" name="nbp35">35</a> Vincent Pomar&egrave;de, &laquo; Le peu que l&#39;on sait d&#39;eux. Moreau-N&eacute;laton et le portrait fran&ccedil;ais au XVIe si&egrave;cle &raquo;, dans C&eacute;cile Scailli&eacute;rez et Dominique Thi&eacute;baut, <em>Hommage &agrave; Michel Laclotte. &Eacute;tudes sur la peinture du Moyen &Acirc;ge et de la Renaissance</em>, Milan, Electa, 1994.</p> <p><a href="#liennbp36" name="nbp36">36</a> Mus&eacute;e national Eug&egrave;ne Delacroix, Mus&eacute;e du Louvre et Mus&eacute;e du Louvre, <em>Delacroix en h&eacute;ritage : autour de la collection Moreau-N&eacute;laton</em> [exposition, Paris Mus&eacute;e national Eug&egrave;ne Delacroix, 11 d&eacute;cembre 2013-17 mars 2014], Paris, Louvre &eacute;d. Le Passage, 2013.</p> <p><a href="#liennbp37" name="nbp37">37</a> Paul Signac, <em>D&rsquo;Eug&egrave;ne Delacroix au n&eacute;o-impressionnisme</em> [1899], Paris, H. Floury, 1911, p. 49.</p> <p><a href="#liennbp38" name="nbp38">38</a> Ars&egrave;ne Alexandre, <em>La collection Henri Rouart</em>, Paris, Goupil &amp; Cie, 1912, p. 44.</p> <p><a href="#liennbp39" name="nbp39">39</a> Rouart effectue son premier voyage en Italie en 1861, accompagn&eacute; de sa jeune &eacute;pouse H&eacute;l&egrave;ne Jacob-Desmalter. Il y r&eacute;alise des aquarelles.</p> <p><a href="#liennbp40" name="nbp40">40</a> Jean-Dominique Rey, <em>Henri Rouart. Peintre, collectionneur, ing&eacute;nieur</em>, Paris, L&rsquo;&Eacute;choppe, 2014, p. 76-77.</p> <p><a href="#liennbp41" name="nbp41">41</a><em> Ibid.</em>, p. 77.</p> <p><a href="#liennbp42" name="nbp42">42</a> Ann Dumas, <em>The Private Collection of Edgar Degas</em>, New York, The Metropolitan Museum of Art, 1997, p. 9.</p> <p><a href="#liennbp43" name="nbp43">43</a> Georges Moore, &laquo;&nbsp;Degas. The Painter of Modern life&nbsp;&raquo;, <em>Magazine of Art,</em> octobre 1890, p. 423.</p> <p><a href="#liennbp44" name="nbp44">44</a> Ann Dumas, <em>Degas as a Collector</em>, Londres, Apollo Magazine, National Gallery, 1996, p. 20.</p> <p><a href="#liennbp45" name="nbp45">45</a> <em>Ibid.</em>, p. 30.</p> <p><a href="#liennbp46" name="nbp46">46</a> Alain Bonnet, <em>L&rsquo;Enseignement des arts au XIXe si&egrave;cle : la r&eacute;forme de l&rsquo;&Eacute;cole des Beaux-Arts de 1863 et la fin du mod&egrave;le acad&eacute;mique</em>, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006, p. 13.</p> <p><a href="#liennbp47" name="nbp47">47</a> &laquo;&nbsp;C&#39;est au moment m&ecirc;me o&ugrave; se constitue un march&eacute; de l&#39;&oelig;uvre d&#39;art que, par un paradoxe apparent, se trouve donn&eacute;e aux &eacute;crivains et aux artistes la possibilit&eacute; d&#39;affirmer &agrave; la fois dans leur pratique et dans la repr&eacute;sentation qu&rsquo;ils en ont l&rsquo;irr&eacute;ductibilit&eacute; de l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art au statut de simple marchandise et du m&ecirc;me coup la singularit&eacute; de leur pratique&nbsp;&raquo; : Pierre Bourdieu, &laquo;&nbsp;Le march&eacute; des biens symboliques&nbsp;&raquo;,<em> L&rsquo;Ann&eacute;e Sociologique</em>, vol. 22, 1971, p. 52-53.</p> <p><a href="#liennbp48" name="nbp48">48</a> &laquo;&nbsp;Les artistes ind&eacute;pendants opposent &agrave; un art qui se r&eacute;f&egrave;re &agrave; la tradition un art qui se d&eacute;finit par sa volont&eacute; de rupture. L&rsquo;excellence ne se confond plus avec la perfection canonique, mais avec la nouveaut&eacute; et l&rsquo;esth&eacute;tique de la priorit&eacute; prend le pas sur celle de l&rsquo;imitation &raquo; : Raymonde Moulin, &laquo;&nbsp;De l&rsquo;artisan au professionnel&nbsp;: l&rsquo;artiste&nbsp;&raquo;, <em>Sociologie du travail</em>, n&deg;4, 1983, p. 392.</p> <p><a href="#liennbp49" name="nbp49">49</a> Raymonde Moulin, <em>op. cit.</em>, 1967, p. 28.</p> <p><a href="#liennbp50" name="nbp50">50</a><em> Inventaire apr&egrave;s d&eacute;c&egrave;s d&rsquo;&Eacute;douard Manet </em>(extrait), Archives nationales (MC/ET/LXXXIX/1713).</p> <p><a href="#liennbp51" name="nbp51">51</a> En 1863, lors du Salon des Refus&eacute;s, Manet pr&eacute;sente <em>Le D&eacute;jeuner sur l&rsquo;herbe</em>, une &oelig;uvre qui fait scandale et consacre l&rsquo;artiste comme premier moderne dans l&rsquo;historiographie du XXe si&egrave;cle</p> <p><a href="#liennbp52" name="nbp52">52</a> John Rewald, <em>Histoire de l&rsquo;impressionnisme</em> [1946], Paris, A. Michel, 1986, p. 135.</p> <p><a href="#liennbp53" name="nbp53">53</a> Berthe Morisot, <em>Correspondance de Berthe Morisot avec sa famille et ses amis, Manet, Puvis de Chavannes, Degas, Monet, Renoir et Mallarm&eacute;</em>, documents r&eacute;unis et pr&eacute;sent&eacute;s par Denis Rouart, Paris, Quatre Chemins-Editart, 1950, p. 52.</p> <p><a href="#liennbp54" name="nbp54">54</a> Lionello Venturi, <em>Les archives de l&rsquo;impressionnisme : lettres de Renoir, Monet, Pissarro, Sisley et les autres. M&eacute;moires de Paul Durand-Ruel documents</em>, Paris, New York, Durand-Ruel &eacute;d, 1939, p. 258.</p> <p><a href="#liennbp55" name="nbp55">55</a> <em>Catalogue de la deuxi&egrave;me Exposition de peinture</em>, Paris, Durand-Ruel &eacute;d., 1876, p. 21.</p> <p><a href="#liennbp56" name="nbp56">56</a> Sophie Monneret et Ren&eacute; Huyghe, <em>L&rsquo;Impressionnisme et son &eacute;poque&nbsp;: dictionnaire international</em>, Paris, R. Laffont, 1987, p.&nbsp;232-253.</p> <p><a href="#liennbp57" name="nbp57">57</a> Fran&ccedil;ois G&eacute;rard Seligmann, 24 mars 1935, Archives of the History of art, The Getty Center for the History of Art and the Humanities, Los Angles, cit&eacute; dans Marianne Mathieu et Dominique Lobstein, <em>Monet collectionneur [exposition, Paris, mus&eacute;e Marmottan&nbsp;Monet,&nbsp;14 septembre 2017 - 14 janvier 2018]</em>, Vanves, Paris, Hazan, mus&eacute;e Marmottan Monet, 2017, p. 112.</p> <p><a href="#liennbp58" name="nbp58">58</a> Mark Granovetter, &laquo; Economic Action and Social Structure: The Problem of Embeddedness &raquo;, <em>The American Journal of Sociology</em>, 1985, 91-3, p. 487.</p> <p><a href="#liennbp59" name="nbp59">59</a> B&eacute;atrice Joyeux-Prunel, <em>Les avant-gardes artistiques, 1848-1918 : une histoire transnationale</em>, Paris, Gallimard, 2015, p. 23.</p> <p><a href="#liennbp60" name="nbp60">60</a> Lettre de Berthe Morisot &agrave; sa s&oelig;ur Edma, d&eacute;but 1884, in Berthe Morisot, <em>op. cit.</em>, 1950, p. 118.</p>