<h2><strong>Introduction &agrave; l&rsquo;exception</strong></h2> <p>&nbsp; &nbsp;&nbsp; Le th&eacute;&acirc;tre de marionnettes, surtout celui des marionnettes &agrave; gaine (des marionnettes en bois et en tissu manipul&eacute;es du dessous par le marionnettiste, qui est g&eacute;n&eacute;ralement cach&eacute; derri&egrave;re le paravent appel&eacute; &laquo; castelet &raquo;), peut souffrir de quelques st&eacute;r&eacute;otypes. Dans l&rsquo;imaginaire commun il est consid&eacute;r&eacute; comme un th&eacute;&acirc;tre &laquo; mineur &raquo;, puisque compos&eacute; de courtes sc&egrave;nes qui se succ&egrave;dent de mani&egrave;re non harmonis&eacute;e, qu&rsquo;il est parfois anim&eacute; par des blagues faciles voire vulgaires, ainsi que par des masques traditionnels dont le spectateur attend toujours un certain type d&rsquo;attitude. Le th&eacute;&acirc;tre de Gigio Brunello, auteur et marionnettiste italien, est tr&egrave;s &eacute;loign&eacute; de cette image du th&eacute;&acirc;tre de marionnettes : en ne dissociant jamais la pratique textuelle de la v&eacute;rification sc&eacute;nique, cet auteur utilise les canons de la tradition pour les r&eacute;inventer et les rendre enti&egrave;rement originaux, en r&eacute;ussissant &agrave; rendre vivant le bois de ses marionnettes. Ses textes forment des architectures complexes, des m&eacute;canismes dramaturgiques raisonn&eacute;s dans lesquels les histoires v&eacute;cues par les marionnettes d&eacute;terminent une possibilit&eacute;, pour les marionnettes elles-m&ecirc;mes, de s&rsquo;&eacute;loigner de leurs r&ocirc;les canoniques. Les textes de Brunello donnent vie &agrave; un &eacute;ventail d&rsquo;histoires qui ne constituent pas un th&eacute;&acirc;tre de masques st&eacute;r&eacute;otyp&eacute;s, mais au contraire, un univers d&eacute;taill&eacute; de personnages aux traits fondamentalement humains : son <em>genos</em>, sa propre petite lign&eacute;e imaginaire. Les masques classiques d&eacute;riv&eacute;s de la<em> Commedia dell&rsquo;Arte</em> ou des traditions r&eacute;gionales italiennes (Arlecchino, Brighella, Balanzone, Colombina, pour citer les plus r&eacute;currents dans les textes de Brunello), sont associ&eacute;s &agrave; de nombreux autres personnages, invent&eacute;s par l&rsquo;auteur lui-m&ecirc;me ; ou bien les m&ecirc;mes masques traditionnels sont plong&eacute;es dans des situations in&eacute;dites, ce qui d&eacute;termine des r&eacute;ponses tout aussi peu canoniques : dans les textes de Brunello, il peut arriver qu&rsquo;Arlequin r&eacute;cite <em>Macbeth</em> et qu&rsquo;un lapin soit retrouv&eacute; chez le diable. &Agrave; travers l&rsquo;analyse de quelques &oelig;uvres de l&rsquo;auteur, nous chercherons donc &agrave; mettre en lumi&egrave;re les m&eacute;canismes de composition r&eacute;currents qui conf&egrave;rent aux marionnettes &agrave; gaine un niveau de complexit&eacute; peu fr&eacute;quent dans les castelets, et ainsi permettent d&rsquo;engendrer une r&eacute;flexion m&eacute;ta-th&eacute;&acirc;trale.</p> <h2><strong>Notice sur l&rsquo;auteur</strong></h2> <p>&nbsp; &nbsp;&nbsp; Depuis 1978, Gigio Brunello est auteur de textes pour le th&eacute;&acirc;tre de marionnettes, acteur, marionnettiste et exp&eacute;rimentateur de nouvelles possibilit&eacute;s pour le castelet. Originaire de Mestre, la contrepartie populaire de la ville de Venise, il na&icirc;t dans une famille ouvri&egrave;re. La fa&ccedil;on dont Brunello s&rsquo;est approch&eacute; de l&rsquo;art des marionnettes n&rsquo;est donc pas due au fait d&rsquo;&ecirc;tre issu d&rsquo;une <em>famiglia d&rsquo;arte</em> (dynastie th&eacute;&acirc;trale), circonstance assez r&eacute;pandue en Italie. En effet, l&rsquo;initiation au th&eacute;&acirc;tre de marionnettes, en Italie, &agrave; la diff&eacute;rence de beaucoup d&rsquo;autres pays, ne se produit pas habituellement gr&acirc;ce &agrave; la pr&eacute;sence d&rsquo;&eacute;coles d&eacute;di&eacute;es sur le territoire national. Bien que ce pays ait une tr&egrave;s longue tradition de culture populaire et de th&eacute;&acirc;tre de marionnettes, il reste aujourd&rsquo;hui encore d&eacute;pourvu d&rsquo;une &eacute;cole d&eacute;di&eacute;e &agrave; la formation d&rsquo;artistes marionnettistes, malgr&eacute; la pr&eacute;sence de quelques exceptions r&eacute;gionales. Le manque d&rsquo;une institution d&eacute;di&eacute;e a d&eacute;termin&eacute; le fait que, en Italie, traditionnellement, il y a deux fa&ccedil;ons principales de devenir marionnettiste : l&rsquo;une d&rsquo;elles d&eacute;pend de la descendance, du fait de na&icirc;tre dans une <em>famiglia d&rsquo;arte</em>, c&rsquo;est-&agrave;-dire une famille qui cultive depuis une ou plusieurs g&eacute;n&eacute;rations l&rsquo;art de la marionnette et qui en transmet la culture et la technique aux enfants ; l&rsquo;autre est celle d&rsquo;apprendre le m&eacute;tier dans l&rsquo;atelier d&rsquo;un artiste, c&rsquo;est-&agrave;-dire d&rsquo;&eacute;tablir une relation de confiance avec un ma&icirc;tre et d&rsquo;apprendre son art &agrave; travers un travail constant dans les coulisses. La formation de Gigio Brunello ne rel&egrave;ve d&rsquo;aucun de ces cas. Brunello n&rsquo;a pas derri&egrave;re lui une dynastie d&rsquo;experts marionnettistes. C&rsquo;est sa formation composite qui d&eacute;termine son aptitude &agrave; l&rsquo;exp&eacute;rimentation et sa r&eacute;ussite &agrave; donner vie &agrave; un tout autre type de lign&eacute;e, celle de ses personnages.</p> <figure> <p style="text-align: center;"><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="333" src="https://www.alepreuve.org/sites/default/files/Di%20Fazio%201.jpg" width="500" /></p> <figcaption> <p style="text-align: center;">Gigio Brunello parmi ses sculptures, s. d. &copy; G. Brunello,<br /> avec son aimable autorisation</p> </figcaption> </figure> <p>&nbsp; &nbsp;&nbsp; Au d&eacute;but des ann&eacute;es quatre-vingt, Brunello commence &agrave; faire du th&eacute;&acirc;tre de marionnettes &agrave; gaine avec Gyula Moln&agrave;r<a href="#nbp1" id="footnoteref1_ndrdw5o" name="liennbp1" title="Gyula Molnàr (1950), acteur, auteur, réalisateur d’origine hongroise, vit en Italie et travaille dans différents pays européens. Il a été professeur à l’École d’Art Dramatique Ernst Busch de Berlin. Depuis des années, il dirige des laboratoires de recherche sur une écriture scénique qui se sert de l’improvisation créative entre acteur et objet. Collaborateur de longue date de Gigio Brunello, il a codirigé la plupart de ses spectacles et a souvent pris part aussi à leur conception.">1</a>, acteur, auteur et r&eacute;alisateur parmi les premiers &agrave; avoir men&eacute; en Italie la recherche sur le th&eacute;&acirc;tre d&rsquo;objets. Dans ce type de th&eacute;&acirc;tre, l&rsquo;objet prosa&iuml;que et quotidien perd sa valeur objective ou sa fonctionnalit&eacute; la plus reconnaissable, pour servir de figure rh&eacute;torique faisant allusion &agrave; autre chose. L&rsquo;objet, isol&eacute; et sorti de son contexte, se charge de la force primordiale propre au f&eacute;tiche pour devenir sujet de l&rsquo;action sc&eacute;nique, protagoniste de l&rsquo;histoire qui est racont&eacute;e &agrave; travers lui. Comme le remarque Luigi Allegri, dans sa substance mat&eacute;rielle, dans l&rsquo;absence d&rsquo;un &laquo;&nbsp;dedans&nbsp;&raquo; au-del&agrave; de l&rsquo;&eacute;corce visible, dans l&rsquo;absence d&rsquo;une volont&eacute; consciente interne qui d&eacute;termine les actions ext&eacute;rieures, la marionnette, la poup&eacute;e, le pantin, c&rsquo;est-&agrave;-dire la figure &laquo;&nbsp;ne joue pas un personnage mais &quot;est&quot; un personnage<a href="#nbp2" id="footnoteref2_i7w8eht" name="liennbp2" title="Luigi Allegri, Per una storia del teatro come spettacolo: il teatro di burattini e marionette, Parma, Centro studi e archivio della comunicazione, 1978, p. 119.">2</a> &raquo;.&nbsp;<br /> &nbsp; &nbsp; &nbsp;&Agrave; partir des ann&eacute;es 1980, ces consid&eacute;rations ont ouvert la voie &agrave; des exp&eacute;rimentations de plus en plus libres, aboutissant &agrave; l&rsquo;utilisation d&rsquo;objets issus du quotidien utilis&eacute;s comme protagonistes de l&rsquo;action dramatique ou comme contrepoints &agrave; l&rsquo;acteur. Dans le th&eacute;&acirc;tre traditionnel occidental de marionnettes (qui comprend les marionnettes &agrave; fil, les marionnettes &agrave; gaine, <em>pupi</em>&hellip;), la copr&eacute;sence sur sc&egrave;ne de l&rsquo;acteur et de la figure, voire la sortie du marionnettiste du castelet, a d&eacute;termin&eacute; un &eacute;l&eacute;ment de rupture et un renouvellement cons&eacute;cutif des langages. En revanche, dans le th&eacute;&acirc;tre d&rsquo;objets, ce m&eacute;lange co&iuml;ncide avec la naissance m&ecirc;me du genre th&eacute;&acirc;tral&nbsp;: la pr&eacute;sence simultan&eacute;e d&rsquo;un acteur et d&rsquo;un objet est une caract&eacute;ristique intrins&egrave;que, inh&eacute;rente au th&eacute;&acirc;tre d&rsquo;objets. Ce n&rsquo;est pas toujours le cas du th&eacute;&acirc;tre de marionnettes &agrave; gaine, surtout au sens o&ugrave; on l&rsquo;entend traditionnellement. Dans celui-ci, bien qu&rsquo;il puisse arriver souvent que le marionnettiste apparaisse en sc&egrave;ne &agrave; certains moments de la pi&egrave;ce, le manipulateur reste cach&eacute; derri&egrave;re le castelet tandis qu&rsquo;il donne les voix &agrave; diff&eacute;rentes marionnettes qu&rsquo;il anime avec ses mains en les faisant appara&icirc;tre sur sc&egrave;ne. La plupart des spectacles de Brunello, con&ccedil;us presque tous avec Moln&agrave;r, se d&eacute;veloppent &agrave; travers les modalit&eacute;s traditionnelles de la marionnette &agrave; gaine, comme nous venons de l&rsquo;indiquer. Pourtant, la le&ccedil;on du th&eacute;&acirc;tre d&rsquo;objets, dans lequel l&rsquo;objet prend le dessus, devient autonome, semble avoir non seulement laiss&eacute; une forte empreinte dans le travail effectu&eacute; par les deux auteurs, mais a m&ecirc;me fonctionn&eacute; comme point de d&eacute;part pour leurs exp&eacute;rimentations &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur du castelet, comme nous le verrons plus loin.&nbsp;Ce n&rsquo;est pas un hasard si, dans une de ses publications de 2009, Moln&agrave;r &eacute;crit&nbsp;:&nbsp;</p> <p><q>Alors que la projection habituelle des qualit&eacute;s et des vicissitudes humaines dans la marionnette/objet r&eacute;duit la mati&egrave;re &agrave; une sorte d&rsquo;illustration agr&eacute;able, ici, le renversement de cette hi&eacute;rarchie produit des effets surprenants et significatifs. L&rsquo;acteur non seulement utilise les objets, mais il est &eacute;galement utilis&eacute; par eux<a href="#nbp3" id="footnoteref3_50eeahz" name="liennbp3" title="Giulio Molnàr, Teatro d’oggetti, Pisa, Titivillus, 2009, p. 47. « Mentre la consueta proiezione delle qualità e delle vicende umane al burattino/oggetto riduce la materia ad una sorta di illustrazione gradevole, qui, il ribaltamento di questa gerarchia produce effetti sorprendenti e significativi. l’attore non solo utilizza gli oggetti ma viene anche da loro utilizzato ». La traduction est de l’auteur de l’article.">3</a>.&nbsp;</q></p> <h2><strong>Conna&icirc;tre la tradition pour en changer la perspective</strong></h2> <p>&nbsp; &nbsp; &nbsp;La marionnette &agrave; gaine est un type de marionnette manipul&eacute;e par dessous. Elle est form&eacute;e d&rsquo;un corps en tissu et de mains et d&rsquo;une t&ecirc;te en bois, g&eacute;n&eacute;ralement sculpt&eacute;e et peinte avec des traits caricaturaux. Le marionnettiste enfile la marionnette sur toute la longueur de l&rsquo;avant-bras, et ins&egrave;re la main pour soutenir la t&ecirc;te et les membres&nbsp;: l&rsquo;index dans la t&ecirc;te, le pouce et le majeur, avec &eacute;ventuellement aussi l&rsquo;annulaire et le petit doigt, dans les bras. Comme le souligne Remo Melloni, expert en th&eacute;&acirc;tre de marionnettes de l&rsquo;Italie du Nord, &laquo; la marionnette &agrave; gaine devient un appendice de l&rsquo;animateur qui, avec ses mains, lui permet des gestes rapides et improbables qui n&rsquo;ont rien &agrave; voir avec le mouvement naturel humain<a href="#nbp4" id="footnoteref4_hcjw98t" name="liennbp4" title="« Il burattino diventa un'appendice dell'animatore il quale, con le proprie mani, gli permette gesti scattanti e improbabili che nulla hanno a che vedere col naturale movimento umano » (Remo Melloni, « Introduzione al repertorio del teatro dei burattini e delle marionette », paru dans « Chi è di scena? Baracche, burattini e marionette dalle collezioni emiliano-romagnole », supplément de la revue IBC. Informazioni, commenti, inchieste sui beni culturali, vol. 3, 1999, Istituto Beni Artistici, Culturali e Naturali Regione Emilia-Romagna, p. 39). La traduction est de l’auteur de l’article.">4</a> &raquo;.&nbsp;Cette technique de manipulation n&rsquo;a pas manqu&eacute; d&rsquo;influencer l&rsquo;aspect dramaturgique, en d&eacute;terminant un type de composition bas&eacute;e surtout sur la plaisanterie courte, satirique, sur le gag comique, sur les rebondissements.</p> <p><q>C&rsquo;est un th&eacute;&acirc;tre qui refuse la &laquo;&nbsp;repr&eacute;sentation&nbsp;&raquo; comme moteur de la machine dramatique, qui au moment o&ugrave; elle produit son sens par une action, un duel, un matraquage, par l&agrave; m&ecirc;me d&eacute;pense ce sens, ne le constitue pas comme r&eacute;f&eacute;rence &agrave; un autre, &agrave; &laquo;&nbsp;dehors&nbsp;&raquo;. Dans le th&eacute;&acirc;tre de marionnettes, par exemple, il n&rsquo;est jamais question de &laquo;&nbsp;psychologie&nbsp;&raquo; de personnages, de r&eacute;f&eacute;rences naturalistes, de dialogues subtils, de situations socialement caract&eacute;ris&eacute;es<a href="#nbp5" id="footnoteref5_duh7t4l" name="liennbp5" title="Luigi Allegri, op. cit., p. 73 : « È un teatro che rifiuta la « rappresentazione » come motore della macchina drammatica, che nel momento in cui produce senso con un’azione, un duello, una bastonatura, con ciò stesso spende quel senso, non lo costituisce come rimando ad altro, a « fuori ». Nel teatro di burattini, ad esempio, non è mai questione di « psicologia » di personaggi, di rimandi naturalistici, di dialoghi sottili, di situazioni socialmente caratterizzate ». La traduction est de l’auteur de l’article.">5</a>.</q></p> <p>&nbsp; &nbsp; &nbsp;En effet, une grande partie du th&eacute;&acirc;tre de marionnettes &agrave; gaine, en particulier celui traditionnel, est construit &agrave; travers l&rsquo;utilisation non pas de personnages dot&eacute;s d&rsquo;une &eacute;paisseur psychologique propre, mais de masques r&eacute;gionaux, de &laquo; types &raquo; n&eacute;s de l&rsquo;invention d&rsquo;un marionnettiste (tel Guignol, cr&eacute;&eacute; &agrave; Lyon vers 1808 par Laurent Mourguet), ou historiquement tir&eacute;s des masques de la <em>Commedia dell&rsquo;Arte</em>&nbsp;: Arlecchino, Colombina, Brighella, Balanzone, Pulcinella sont encore aujourd&rsquo;hui des masques tr&egrave;s utilis&eacute;es dans le th&eacute;&acirc;tre de marionnettes &agrave; gaine italien, et les plus connues au niveau international. Dans les deux cas, la marionnette &agrave; gaine, bien qu&rsquo;elle puisse &ecirc;tre utilis&eacute;e dans des histoires tr&egrave;s diff&eacute;rentes, correspond toujours aux caract&egrave;res de son masque&nbsp;: Arlecchino appara&icirc;t toujours comme le serviteur gai, maladroit et affam&eacute;, Balanzone comme le docteur faux savant, Brighella comme le serviteur rus&eacute; attach&eacute; &agrave; l&rsquo;argent, et ainsi de suite. Connaissant bien la tradition et les caract&egrave;res du th&eacute;&acirc;tre de marionnettes &agrave; gaine, Brunello et Moln&agrave;r se sont plong&eacute;s dans ces m&eacute;canismes pour v&eacute;rifier si des changements de perspective pouvaient renouveler cet art pluris&eacute;culaire sans d&eacute;naturer son identit&eacute;.</p> <figure> <p style="text-align: center;"><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="667" src="https://www.alepreuve.org/sites/default/files/Di%20Fazio%202%20Arlecchino.jpg" width="500" /></p> <figcaption> <p style="text-align: center;">La marionnette &agrave; gaine d&#39;Arlequin (Arlecchino) &copy; F. Di Fazio</p> </figcaption> </figure> <h2><strong>Un nouveau <em>genos</em></strong></h2> <p>&nbsp; &nbsp; &nbsp;C&rsquo;est avec cette intention &agrave; l&rsquo;esprit que, &agrave; partir de l&rsquo;un des premiers spectacles con&ccedil;us avec Moln&agrave;r, Brunello introduit certains &eacute;l&eacute;ments qui d&eacute;terminent un &eacute;cart par rapport &agrave; certains axiomes du th&eacute;&acirc;tre de marionnettes &agrave; gaine traditionnel. <em>Un trovatello a casa del diavolo</em><a href="#nbp6" id="footnoteref6_xq7qxkw" name="liennbp6" title="Un trovatello a casa del diavolo  [« un enfant trouvé chez le diable »], spectacle de marionnettes dans le castelet pour marionnettiste solo, conception et mise en scène de Gigio Brunello et Gyula Molnàr, 1994.">6</a> (1994) est un spectacle qui utilise des marionnettes classiques comme celles d&rsquo;Arlequin, de Colombina et du Diable, et dont le texte, tr&egrave;s maigre, se constitue &agrave; travers les m&eacute;canismes de l&rsquo;improvisation pour cr&eacute;er une piste simple, un <em>canovaccio </em>(canevas), une farce avec des dialogues simples et imm&eacute;diats qui renferment cependant d&eacute;j&agrave; le style de ses dramaturgies, c&rsquo;est-&agrave;-dire la tentative de cr&eacute;er le texte comme s&rsquo;il &eacute;tait issu de la personnalit&eacute; des marionnettes elles-m&ecirc;mes. Le Diable Alfredo aux mains froides, ma&icirc;tre de maison, veut &eacute;pouser Colombina dont il est amoureux, et son serviteur Arlecchino devrait l&rsquo;aider dans son entreprise. Mais l&rsquo;impr&eacute;vu fait irruption&nbsp;: c&rsquo;est le marionnettiste lui-m&ecirc;me qui le communique au public avant d&rsquo;entrer dans le castelet. En mettant ses marionnettes &agrave; gaine dans sa valise, il a remarqu&eacute; avec surprise qu&rsquo;au-dessus du bureau de son laboratoire, un petit lapin-marionnette, Ginetto, venait de na&icirc;tre. Pour ne pas le laisser seul, il l&rsquo;emm&egrave;ne en tourn&eacute;e en l&rsquo;allongeant dans un panier au seuil du th&eacute;&acirc;tre des marionnettes, qui est la maison du Diable. Colombina, &agrave; l&rsquo;ouverture du rideau, trouve l&rsquo;enfant&nbsp;: comment va-t-elle le cacher et le prot&eacute;ger dans cette maison&nbsp;? Le Diable se convainc que, pour se r&eacute;chauffer les mains, il doit se procurer une paire de gants en fourrure de lapin. Mais la vie du petit Ginetto est pr&eacute;serv&eacute;e par les actions de Colombina et Arlecchino, qui r&eacute;ussiront &agrave; vaincre le Diable en le transformant en oignon inoffensif.<br /> &nbsp; &nbsp; &nbsp;L&rsquo;histoire est en substance, bien qu&rsquo;avec ses aspects curieux et particuliers, un affrontement, une opposition entre le bien et le mal, entre l&rsquo;innocence du petit lapin Ginetto et la barbarie du Diable qui souhaite violenter un innocent pour son int&eacute;r&ecirc;t personnel. Le personnage du lapin, invent&eacute; par Brunello, et n&rsquo;appartenant donc pas au m&ecirc;me domaine que les autres masques de la pi&egrave;ce, permet de mat&eacute;rialiser en sc&egrave;ne l&rsquo;innocence typique de l&rsquo;enfance (Ginetto, &eacute;tant nouveau-n&eacute;, reconna&icirc;t tout le monde comme des figures parentales, en appelant &laquo; papa &raquo; &eacute;galement le Diable qui veut le tuer) sans tomber dans la sensation aga&ccedil;ante qu&rsquo;aurait engendr&eacute;e l&rsquo;introduction d&rsquo;un nouveau-n&eacute; aux traits humains. Plus proche du r&eacute;el, une figure humaine ne jouirait pas de la m&ecirc;me libert&eacute; di&eacute;g&eacute;tique que l&rsquo;animal en peluche, pr&eacute;cis&eacute;ment parce qu&rsquo;il appartient &agrave; un autre ordre de r&eacute;alit&eacute;, &agrave; une dimension d&eacute;cal&eacute;e.<br /> &nbsp; &nbsp; &nbsp;&Agrave; partir de cette intuition, d&rsquo;autres ont suivi&nbsp;: Brunello ins&egrave;re la figure de Ginetto dans d&rsquo;autres spectacles, en la r&eacute;p&eacute;tant et en la d&eacute;veloppant de fa&ccedil;on toujours diff&eacute;rente. Loin d&rsquo;&eacute;puiser le motif de la r&eacute;apparition du petit lapin, par exemple tel qu&rsquo;il appara&icirc;t dans <em>Un trovatello a casa del diavolo</em>, il vise au contraire &agrave; d&eacute;velopper de fa&ccedil;on coh&eacute;rente le personnage d&rsquo;un spectacle &agrave; l&rsquo;autre. Ainsi, Ginetto grandit en traversant diff&eacute;rentes &eacute;tapes&nbsp;: dans <em>Trovatello due. Festa di compleanno</em><a href="#nbp7" id="footnoteref7_fd05y0t" name="liennbp7" title="Trovatello due. Festa di compleanno [« Un enfant trouvé, deux. Fête d’anniversaire »], spectacle de marionnettes dans le castelet pour marionnettiste solo, conception et mise en scène de Gigio Brunello, 2004.">7</a>, il f&ecirc;te son premier anniversaire et commence &agrave; avoir la curiosit&eacute; typique des enfants, &agrave; poser mille questions, &agrave; exiger ce qu&rsquo;il veut ; dans <em>La Carota</em><a href="#nbp8" id="footnoteref8_ynlbp9x" name="liennbp8" title="La Carota [« La Carotte »], spectacle de marionnettes dans le castelet pour marionnettiste solo. Conception et mise en scène de Gigio Brunello et Gyula Molnàr, 2006.">8</a>,&nbsp;le petit lapin va &agrave; l&rsquo;&eacute;cole primaire et s&rsquo;exprime, dans ses devoirs, sur la maladie dont souffre son p&egrave;re Arlecchino&nbsp;; enfin, dans <em>Come gli Etruschi uscirono dalla crisi</em><a href="#nbp9" id="footnoteref9_n5z83dr" name="liennbp9" title="Come gli Etruschi uscirono dalla crisi, [« Comment les Étrusques sortirent de la crise »], spectacle de marionnettes dans le castelet pour marionnettiste solo. Conception et mise en scène de Gigio Brunello et Gyula Molnàr, 2008.">9</a> il se rend &agrave; l&rsquo;&eacute;cole en scooter et affirme ne plus &ecirc;tre un enfant. Avec les autres marionnettes, Ginetto est un v&eacute;ritable moteur de l&rsquo;action sc&eacute;nique. Au-del&agrave; de la progression de l&rsquo;&acirc;ge, de spectacle en spectacle, l&rsquo;importance de la pr&eacute;sence de cette marionnette insolite chez Brunello doit &ecirc;tre recherch&eacute;e ailleurs, et pr&eacute;cis&eacute;ment l&agrave; o&ugrave; le proc&eacute;d&eacute; de la d&eacute;finition de son caract&egrave;re arrive &agrave; donner au masque, &agrave; la marionnette, les traits, pourrait-on dire, d&rsquo;un personnage. C&rsquo;est-&agrave;-dire que la marionnette ne remplit plus seulement son r&ocirc;le imm&eacute;diat, elle n&rsquo;&eacute;puise pas son sens au moment o&ugrave; elle accomplit une action, elle ne se d&eacute;place pas sur sc&egrave;ne seulement pour jouer les gags que le spectateur attend, mais elle semble au contraire &ecirc;tre porteuse d&rsquo;une existence autonome et particuli&egrave;re. Comme indiqu&eacute; ci-dessus &agrave; propos du th&eacute;&acirc;tre d&rsquo;objets, chez Brunello, la marionnette &agrave; gaine, qui n&rsquo;est qu&rsquo;elle-m&ecirc;me un objet, prend le dessus, elle devient autonome. Ce proc&eacute;d&eacute; va donc &agrave; l&rsquo;oppos&eacute; des caract&eacute;ristiques indiqu&eacute;es par Luigi Allegri<a href="#nbp10" id="footnoteref10_4rnd7sa" name="liennbp10" title="La Carotta, op. cit.">10</a>,&nbsp;qui excluait, &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur du th&eacute;&acirc;tre de marionnettes, la possibilit&eacute; de l&rsquo;existence d&rsquo;une profondeur psychologique des personnages.<br /> &nbsp; &nbsp; &nbsp; La gen&egrave;se d&rsquo;une lign&eacute;e, cependant, ne se limite pas &agrave; l&rsquo;apparition d&rsquo;un seul individu. Le lapin Ginetto n&rsquo;est en effet qu&rsquo;un des exemples, dans le th&eacute;&acirc;tre de Brunello, de marionnettes qui font montre d&rsquo;une personnalit&eacute; propre, d&rsquo;une individualit&eacute; et presque d&rsquo;un libre arbitre qui transmet au spectateur &ndash; ainsi qu&rsquo;au lecteur des textes de Brunello &ndash; une id&eacute;e de l&rsquo;autonomie du personnage. C&rsquo;est une caract&eacute;ristique que l&rsquo;on retrouve en de nombreuses occasions dans l&rsquo;&oelig;uvre de l&rsquo;auteur. Dans <em>La Carota</em>, Arlecchino souffre d&rsquo;une tr&egrave;s grave maladie, la phobie des carottes, qui lui cause des moments aigus de d&eacute;lire o&ugrave; il se pose des questions existentielles inconfortables&nbsp;:</p> <p><q>Arlecchino &ndash;<i> </i>&Agrave; un certain moment, le rideau tombe, cela arrive toujours, non&nbsp;? ... Et apr&egrave;s&nbsp;? Qu&rsquo;est-ce qu&rsquo;il y a apr&egrave;s le rideau&nbsp;? Homme, si tu es l&agrave; montre-toi ! Pourquoi tu vieillis alors que je suis &eacute;ternel&nbsp;? Comment la cr&eacute;ature peut vivre plus que le cr&eacute;ateur&nbsp;: c&rsquo;est une contradiction dans les termes... Ce serait comme verser de l&rsquo;eau du verre dans la bouteille, (ou comme si l&rsquo;arbre cherchait un peu d&rsquo;ombre sous sa feuille...) Homme&nbsp;: pourquoi je dis des blagues que tu sais d&eacute;j&agrave; que je vais dire&nbsp;? O&ugrave; est ma libert&eacute;&nbsp;? Et pourquoi Balanzone a toujours &eacute;t&eacute; vieux et je n&rsquo;ai jamais &eacute;t&eacute; petit<a href="#nbp11" id="footnoteref11_80bsbl1" name="liennbp11" title="Gigio Brunello, Tragedie e commedie per tavoli e baracche, Treviso, De Bastiani Editore, 2018, p. 132. «A un certo punto il sipario si chiude, questo succede sempre, no? … E dopo? Cosa c’è dopo il sipario? Uomo, se ci sei fatti vedere!  Perché mentre tu invecchi io sono eterno? Come può la creatura vivere più del creatore: è una contraddizione in termini… Sarebbe come versare l’acqua dal bicchiere alla bottiglia, (o come se l’albero cercasse un po’ d’ombra sotto una sua foglia…) Uomo: perché io dico battute che tu sai già che io dirò? Dove sta la mia libertà? E perché Balanzone è sempre stato vecchio e io non son stato mai piccolo?». La traduction est de l’auteur de l’article.">11</a>.</q></p> <p>&nbsp; &nbsp; &nbsp;Il y a plusieurs occurrences dans les textes de Brunello de telles remontrances envers le marionnettiste, surtout en ce qui concerne la figure d&rsquo;Arlecchino. Non seulement dans <em>La Carota</em>, mais aussi dans le d&eacute;but de <em>Come gli Etruschi uscirono dalla crisi</em>, o&ugrave; Arlecchino avertit les spectateurs sur la nature peu divertissante du spectacle, pour arriver &agrave; une v&eacute;ritable r&eacute;bellion mise en place par la marionnette contre son manipulateur dans <em>Macbeth all&rsquo;improvviso</em><a href="#nbp12" id="footnoteref12_2ihdgyq" name="liennbp12" title="Macbeth all’improvviso [« Macbeth improvisé »], drame en deux actes pour marionnettes, librement adapté de William Shakespeare, conception de Gigio Brunello et Gyula Molnàr, mise en scène de Gyula Molnàr, avec Gigio Brunello, 2001.">12</a>.&nbsp;Ici, le refus d&rsquo;Arlecchino de remplir le r&ocirc;le de masque humoristique r&eacute;clam&eacute; par le marionnettiste d&eacute;termine une prise de position radicale&nbsp;: la marionnette revendique son libre arbitre dans le choix de mettre en sc&egrave;ne le <em>Macbeth</em> de Shakespeare &agrave; l&rsquo;insu du marionnettiste, comme nous le verrons plus loin.<br /> &nbsp; &nbsp; &nbsp;Bien que l&rsquo;on puisse relever, dans des textes et des spectacles de marionnettes d&rsquo;autres auteurs, des interactions similaires entre figures et marionnettistes, le fait que ces interventions &laquo;&nbsp;autonomes&nbsp;&raquo; de la marionnette visent &agrave; enqu&ecirc;ter sur son propre statut ontologique et &agrave; autod&eacute;terminer une alt&eacute;rit&eacute; qui est affirmation du soi constitue un &eacute;l&eacute;ment d&rsquo;occurrence rare. Un jalon historique de ce ph&eacute;nom&egrave;ne peut &ecirc;tre observ&eacute; notamment dans un texte pour marionnettes &agrave; fil centr&eacute; sur ces questions&nbsp;: <em>Il Filo</em>, compos&eacute; en 1883 par Giuseppe Giacosa, dramaturge et librettiste italien qui compte parmi ces auteurs de th&eacute;&acirc;tre d&rsquo;acteurs ayant regard&eacute; avec un &oelig;il curieux le th&eacute;&acirc;tre de marionnettes. Dans <em>Il Filo</em><a href="#nbp13" id="footnoteref13_hpwxcn2" name="liennbp13" title="Giuseppe Giacosa, Il Filo, Torino, F. Casanova Libraio-Editore, 1883.">13</a> l&rsquo;action a lieu dans un entrep&ocirc;t de marionnettes, &agrave; l&rsquo;arri&egrave;re de la sc&egrave;ne o&ugrave; elles demeurent suspendues. Le Docteur pr&eacute;tend avoir lu dans un livre que les marionnettes sont entra&icirc;n&eacute;es par des fils man&oelig;uvr&eacute;s par les hommes, provoquant l&rsquo;incr&eacute;dulit&eacute; de ses compagnons. Colombina propose alors de montrer que les hommes ont un fil qui leur lie le c&oelig;ur, et tous racontent des &eacute;pisodes de mesquinerie et de tristesse de la vie humaine. Mais Colombina conclut que le fil peut &ecirc;tre invisible pour ceux qui l&rsquo;ont, et comme les hommes, m&ecirc;me les marionnettes peuvent ne pas se rendre compte de ce qui les retient attach&eacute;s. Les autres marionnettes ne la croient pas, elles affirment que c&rsquo;est impossible, mais leurs discours sont interrompus par les marionnettistes qui les arrachent un par un pour les mettre en sc&egrave;ne, car le spectacle va commencer. Les marionnettes de Giacosa pensent &ecirc;tre autonomes, elles ne s&rsquo;imaginent pas qu&rsquo;elles sont attach&eacute;es &agrave; un fil et que quelqu&rsquo;un les man&oelig;uvre. Elles se trompent, certes, mais elles en sont profond&eacute;ment convaincues.<br /> &nbsp; &nbsp; &nbsp;C&rsquo;est pr&eacute;cis&eacute;ment cette conviction d&rsquo;autonomie, cette affirmation d&rsquo;ind&eacute;pendance que l&rsquo;on retrouve dans les volont&eacute;s individuelles des marionnettes con&ccedil;ues par Brunello. Dans <em>La Grande Guerra del sipario</em><a href="#nbp14" id="footnoteref14_7ei2bn0" name="liennbp14" title="La Grande Guerra del sipario [« La Grande Guerre du rideau »], acte unique pour marionnettes et marionnettiste solo, conception de Gigio Brunello et Gyula Molnàr, avec Gigio Brunello, 2015.">14</a>,&nbsp;les protagonistes sont deux marionnettes &laquo; anonymes &raquo;, personnages inconnus, Linda et Mario (deux noms communs), qui passent leur vie quotidienne derri&egrave;re le rideau, sur une sc&egrave;ne o&ugrave; ils auraient d&ucirc; r&eacute;citer le mythe de Phil&eacute;mon et Baucis, si la production n&rsquo;avait pas &eacute;t&eacute; soudainement arr&ecirc;t&eacute;e. C&rsquo;est le marionnettiste lui-m&ecirc;me, en pr&ecirc;tant la voix au G&eacute;n&eacute;ral Crocodile, qui au d&eacute;but du spectacle &eacute;voque la vie des marionnettes qui s&rsquo;&eacute;coule m&ecirc;me quand le rideau est ferm&eacute;&nbsp;:</p> <p><q>Marionnettiste &ndash; Nos remerciements vont non seulement &agrave; ceux qui, le long de la sc&egrave;ne, ont men&eacute; les plus nobles exploits pour la jouissance du public payant, pas seulement &agrave; Arlequin, Polichinelle, Orlando, Don Quijote, Rin Tin Tin et tant d&rsquo;autres marionnettes illustres qui tirent du rideau ouvert gloire et succ&egrave;s, mais aussi &agrave; toutes ces marionnettes anonymes qui, &agrave; rideau ferm&eacute;, m&egrave;nent leur vie de tous les jours, inconnue au plus grand nombre. Derri&egrave;re le rideau ferm&eacute;, ils se prom&egrave;nent, dorment, entretiennent le jardin, aiment, repassent, prom&egrave;nent le chien, ach&egrave;tent des pommes de terre au march&eacute;<em><a href="#nbp15" id="footnoteref15_p24ue1p" name="liennbp15" title="Gigio Brunello, op. cit., p. 73. « Il nostro ringraziamento va non solo a quelli che lungo questa linea hanno condotto le più nobili imprese per il godimento del pubblico pagante, non solo a Arlecchino, Pulcinella, Orlando, Don Quijote, Rin Tin Tin e tanti altri burattini illustri che dal sipario aperto traggono gloria e successi, ma anche a tutti quei burattini anonimi che, a sipario chiuso, conducono la loro vita di tutti i giorni, sconosciuta ai più. Dietro al sipario chiuso passeggiano, dormono, curano il giardino, amano, stirano, portano a spasso il cane, comprano patate al mercato ». La traduction est de l’auteur de l’article.">15</a>.</em></q></p> <p>&nbsp; &nbsp; &nbsp;Il appara&icirc;t de plus en plus manifeste que, dans le th&eacute;&acirc;tre de Brunello, les marionnettes &agrave; gaine ne sont pas une imitation d&rsquo;autre chose, ni quand elles sont utilis&eacute;es pour repr&eacute;senter des personnages de textes classiques (nous traiterons apr&egrave;s le cas de <em>Macbeth all&rsquo;improvviso</em>), ni quand elles sont utilis&eacute;es conform&eacute;ment &agrave; leur caract&egrave;re traditionnel. Le caract&egrave;re dans lequel cet aspect est le plus reconnaissable est certainement celui d&rsquo;Arlecchino, connu dans le monde entier comme un personnage farceur et au langage color&eacute;, toujours affam&eacute; et sans jamais envie de travailler. Dans tous les textes de Brunello o&ugrave; appara&icirc;t Arlecchino, ce masque ancien conserve d&rsquo;une part quelques caract&egrave;res typiques du <em>zanni</em> de la <em>Commedia dell&rsquo;Arte</em>, mais &agrave; c&ocirc;t&eacute; d&rsquo;eux d&eacute;veloppe une personnalit&eacute; et un caract&egrave;re propres qui se dessinent de texte en texte. Nous avons d&eacute;j&agrave; mentionn&eacute; que dans <em>La Carota</em>, sa principale pr&eacute;occupation n&rsquo;est plus de faire un bon repas, mais de r&eacute;soudre un traumatisme infantile qui lui cause des moments de d&eacute;lire chaque fois que quelqu&rsquo;un prononce le mot &laquo;&nbsp;carotte&nbsp;&raquo;, et qui le conduit &agrave; poser des questions sur le libre arbitre humain.&nbsp; Dans <em>Come gli Etruschi uscirono dalla crisi</em>, &agrave; cause de la crise &eacute;conomique, les ressources financi&egrave;res du th&eacute;&acirc;tre o&ugrave; vivent les marionnettes sont r&eacute;duites au minimum, de sorte qu&rsquo;Arlecchino se retrouve soudainement priv&eacute; de ses attributs typiques. D&rsquo;abord c&rsquo;est son masque qui dispara&icirc;t, et son visage se transforme en celui d&rsquo;un vieil homme, sillonn&eacute; de rides et avec une barbe blanche. Son b&acirc;ton (utilis&eacute; pour les sc&egrave;nes de bastonnade) refuse de devenir le b&acirc;ton de marche d&rsquo;un vieil homme, il veut se mettre &agrave; son compte et abandonne ainsi son ma&icirc;tre. Rest&eacute;e sans masque et sans b&acirc;ton, la marionnette d&rsquo;Arlecchino est abandonn&eacute;e m&ecirc;me par son c&oelig;ur, qui part seul &agrave; la recherche des deux autres attributs pour pouvoir recoller les morceaux.<br /> &nbsp; &nbsp; &nbsp;Comme Ginetto et Arlecchino, toutes les marionnettes &agrave; gaine, dans le th&eacute;&acirc;tre de Brunello et Moln&agrave;r, traversent des aventures, des probl&egrave;mes et des phases de la vie qui font d&rsquo;elles les protagonistes de leurs propres histoires, malgr&eacute; le bagage culturel qu&rsquo;elles portent. Les personnages cr&eacute;&eacute;s par Brunello constituent en ce sens une famille h&eacute;t&eacute;rog&egrave;ne de t&ecirc;tes de bois, dont les relations s&rsquo;entrecroisent d&rsquo;une com&eacute;die &agrave; l&rsquo;autre en int&eacute;grant des histoires et des relations qui commencent &agrave; partir des types de la <em>Commedia dell&rsquo;Arte</em> pour se projeter dans une constellation de situations surr&eacute;alistes.</p> <figure> <p style="text-align: center;"><img alt="" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="333" src="https://www.alepreuve.org/sites/default/files/Di%20Fazio%203%20Macbeth%20baracca.jpg" width="500" /></p> <figcaption> <p style="text-align: center;">Int&eacute;rieur du castelet pour <em>Macbeth all&#39;improvviso</em> &copy; F. Di Fazio</p> </figcaption> </figure> <h2><strong>&laquo; </strong><strong>On ne revient pas</strong> <strong>en arri&egrave;re</strong>&nbsp;<strong>&raquo;</strong></h2> <p>&nbsp; &nbsp; &nbsp;Cependant, quelle nouvelle g&eacute;n&eacute;ration ne s&rsquo;oppose pas &agrave; ceux qui l&rsquo;ont engendr&eacute;e&nbsp;? Quelle autonomie peut &ecirc;tre atteinte sans l&rsquo;&eacute;limination de celui qui pr&eacute;c&egrave;de&nbsp;? Quelle filiation, en somme, peut avoir lieu sans l&rsquo;assassinat du p&egrave;re&nbsp;? Dans <em>Macbeth all&rsquo;improvviso</em>, le texte le plus repr&eacute;sentatif de la po&eacute;tique con&ccedil;ue par Brunello et Moln&agrave;r, Arlecchino est &laquo; r&eacute;alisateur&nbsp;&raquo; de ce renversement et moteur de toute l&rsquo;action sc&eacute;nique. Le sujet de <em>Macbeth all&#39;improvviso</em> est form&eacute; d&rsquo;un m&eacute;lange de diff&eacute;rentes histoires.&nbsp;En ouverture de spectacle, le marionnettiste s&rsquo;adresse au public en s&rsquo;excusant de ne pas &ecirc;tre pr&ecirc;t &agrave; mettre en sc&egrave;ne la trag&eacute;die pr&eacute;vue pour ce soir-l&agrave;, <em>Macbeth</em>, parce que les t&ecirc;tes des marionnettes sont sculpt&eacute;es mais pas encore peintes, et les costumes et d&eacute;cors ne sont pas encore r&eacute;alis&eacute;s.&nbsp;Il informe ensuite les spectateurs du fait qu&rsquo;&agrave; la place de la trag&eacute;die, il mettra en sc&egrave;ne un in&eacute;dit de Goldoni, <em>L&#39;emigrante geloso</em> &ndash; qui est en fait un faux construit sp&eacute;cialement par Brunello. Suit un prologue prononc&eacute; par Arlecchino, qui se plaint fortement de la d&eacute;cision prise par le marionnettiste de ne pas mettre en sc&egrave;ne le <em>Macbeth&nbsp;:</em> ce n&rsquo;est pas vrai qu&rsquo;il n&rsquo;a pas de marionnettes, que serait-il sinon une marionnette&nbsp;? Arlecchino accepte cependant &laquo; de faire ce qu&rsquo;ils lui demandent &raquo; et commence ainsi la com&eacute;die goldonienne. Il s&rsquo;agit, &agrave; premi&egrave;re vue, d&rsquo;une habituelle intrigue de com&eacute;die d&rsquo;erreurs, dans laquelle deux jeunes amoureux (Rodolfo et Colombina) sont entrav&eacute;s par le perfide Federigo Rasponi (un nom qui renvoie volontairement &agrave; l&rsquo;un des personnages de la com&eacute;die de Goldoni, <em>Arlequin valet de deux ma&icirc;tres</em>) ; on s&rsquo;aper&ccedil;oit cependant d&rsquo;un premier et important &eacute;cart dans le moment o&ugrave; Rodolfo blesse &agrave; mort par inadvertance son p&egrave;re, Pantalone, en d&eacute;pla&ccedil;ant l&rsquo;atmosph&egrave;re du faux in&eacute;dit goldonien vers des traits &oelig;dipiens inattendus. La com&eacute;die se d&eacute;roule sans accroc jusqu&rsquo;au moment de grand pathos, o&ugrave; Pantalone moribond demande au serviteur Arlecchino de le mettre sur le canap&eacute; afin qu&rsquo;il puisse voir son cher fils s&rsquo;&eacute;loigner... mais le canap&eacute; n&rsquo;est pas l&agrave;. Arlecchino perd patience et refuse de continuer &agrave; jouer son r&ocirc;le dans la com&eacute;die&nbsp;: il veut jouer <em>Macbeth</em>. Pantalone tente inutilement de le dissuader, et &agrave; partir de la sc&egrave;ne sept du premier acte Arlecchino parvient &agrave; convaincre Brighella, Balanzone, le G&eacute;n&eacute;rique (la marionnette sans t&ecirc;te qui sert au marionnettiste pour essayer les t&ecirc;tes neuves qui n&rsquo;ont pas encore de costume) et enfin Pantalone &agrave; jouer la trag&eacute;die &agrave; l&rsquo;insu du marionnettiste. &laquo; On ne revient pas en arri&egrave;re &raquo; r&eacute;pond r&eacute;solument Brighella &agrave; l&rsquo;appel d&rsquo;Arlecchino. La prise de position est nette et ferme&nbsp;: les marionnettes cessent de correspondre au r&ocirc;le qui leur a &eacute;t&eacute; attribu&eacute; dans la fausse com&eacute;die goldonienne et, en totale autonomie par rapport &agrave; la volont&eacute; du marionnettiste, choisissent de changer de sc&eacute;nario et d&eacute;cident quoi jouer. &Agrave; partir de ce moment, aucune des marionnettes n&rsquo;adh&egrave;re plus &agrave; son propre caract&egrave;re, mais chacune d&rsquo;elles, comme si elles &eacute;taient des acteurs, interpr&egrave;te un autre personnage. D&egrave;s le deuxi&egrave;me acte commence la mise en sc&egrave;ne du<em> Macbeth&nbsp;:</em> Arlecchino est Macbeth et Brighella Lady Macbeth, Pantalone interpr&egrave;te Macduff et Balanzone Banquo, le G&eacute;n&eacute;rique s&rsquo;occupe des r&ocirc;les mineurs (les sorci&egrave;res, un messager, un gardien...).&nbsp;Les blagues prononc&eacute;es par les marionnettes &agrave; gaine s&rsquo;entrecroisent aux vers du <i>Macbeth </i>de Shakespeare. Cependant, chaque marionnette maintient sa cadence r&eacute;gionale, donnant lieu &agrave; un d&eacute;calage qui, en plus d&rsquo;&ecirc;tre comique, met en &eacute;vidence que les masques sont en train de jouer des personnages qui leur sont &eacute;trangers. La trag&eacute;die shakespearienne est reprise fid&egrave;lement bien que concentr&eacute;e dans les sc&egrave;nes saillantes du drame&nbsp;: l&rsquo;assassinat du roi Duncano (&laquo; dont le nom est italianis&eacute; avec une r&eacute;f&eacute;rence ironique au th&eacute;&acirc;tre du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle<a href="#nbp16" id="footnoteref16_758r99f" name="liennbp16" title="Pier Giorgio Nosari, introduction à G. Brunello, G. Molnàr, Macbeth all'improvviso, Bergamo, Edizioni Junior, 2003, p. 14.">16</a> &raquo;), la fuite de Macduff, la mort de Lady Macbeth, l&rsquo;arriv&eacute;e de la for&ecirc;t de Birnan vers le ch&acirc;teau de Macbeth et sa d&eacute;capitation par Macduff. Toutefois, au sein de <em>Macbeth all&#39;improvviso</em>, l&rsquo;intrigue shakespearienne subit une importante variation de nature m&eacute;ta-th&eacute;&acirc;trale, qui nous ram&egrave;ne au moment fondateur de cet insolite <em>genos</em> de t&ecirc;tes de bois&nbsp;: l&rsquo;assassinat du roi Duncan par Macbeth se confond ici avec la blessure du marionnettiste par Arlecchino (dans la sc&egrave;ne du meurtre surgira du castelet une main coup&eacute;e, et &agrave; la fin du spectacle le marionnettiste sortira du castelet amput&eacute; d&rsquo;un bras et avec la chemise ensanglant&eacute;e), de m&ecirc;me que le meurtre de Macbeth par Macduff est ici le double de la d&eacute;faite d&rsquo;Arlecchino, le r&eacute;volt&eacute;, de la part de Pantalone, le vengeur du roi-marionnettiste. Arlecchino meurt et l&rsquo;ordre semble &ecirc;tre r&eacute;tabli, mais la chemise ensanglant&eacute;e du marionnettiste sortant sans son bras affirme, manifestement, que quelque chose a chang&eacute;, que &laquo;&nbsp;on ne revient pas en arri&egrave;re&nbsp;&raquo;.&nbsp;C&rsquo;est &agrave; Colombina, jusque l&agrave; rest&eacute;e dans l&rsquo;ignorance, de mettre fin au spectacle et de pr&eacute;parer la sortie finale du marionnettiste bless&eacute;.<br /> &nbsp; &nbsp; &nbsp;Quelle est donc la trame de <em>Macbeth all&#39;improvviso&nbsp;?</em> Ce n&rsquo;est ni l&rsquo;intrigue de l&rsquo;<em>Emigrante geloso</em> ni celle de <em>Macbeth&nbsp;:</em> elle les comprend toutes les deux et les rend coh&eacute;rentes entre elles. La trag&eacute;die en cours n&rsquo;est pas seulement celle du texte de Shakespeare, mais aussi une autre qui lui est sp&eacute;culaire, dont les protagonistes ne sont pas les personnages interpr&eacute;t&eacute;s par les marionnettes &agrave; gaine (Macbeth, Lady Macbeth, MacDuff&hellip;) mais les marionnettes elles-m&ecirc;mes. Elles vivent leur propre trag&eacute;die, une trag&eacute;die int&eacute;rieure et r&eacute;sultant du choix de repr&eacute;senter le <em>Macbeth</em>, la m&ecirc;me trag&eacute;die que leur cr&eacute;ateur, le marionnettiste, avait refus&eacute; de mettre en sc&egrave;ne. Dans ce fort lien entre le rejet de l&rsquo;auteur et l&rsquo;auto-affirmation des personnages r&eacute;sonne l&rsquo;&eacute;cho du drame pirandellien <em>Six Personnages en qu&ecirc;te d&rsquo;auteur</em>, texte parmi les plus repr&eacute;sentatifs de la forme dramatique du m&eacute;tadrame<a href="#nbp17" id="footnoteref17_hduwz3t" name="liennbp17" title="Jean-Pierre Sarrazac, « Métadrame », Études théâtrales, n. 22, 2001, p. 65-67.">17</a>,&nbsp;dans lequel six personnages p&eacute;n&egrave;trent dans le th&eacute;&acirc;tre pendant les r&eacute;p&eacute;titions d&rsquo;une autre com&eacute;die du m&ecirc;me auteur pour affirmer l&rsquo;urgence de la repr&eacute;sentation de leur propre drame, refus&eacute; et abandonn&eacute; par celui qui l&rsquo;avait con&ccedil;u&nbsp;:</p> <p><q>Pourquoi ne pas repr&eacute;senter ce cas tout nouveau d&rsquo;un auteur qui se refuse &agrave; faire vivre quelques-uns de ses personnages, n&eacute;s vivants dans son imagination, et le cas de ces personnages qui, emplis d&eacute;sormais de vie, ne se r&eacute;signent pas &agrave; demeurer exclus du monde de l&rsquo;art<a href="#nbp18" id="footnoteref18_b4pslu2" name="liennbp18" title="Luigi Pirandello, « Préface à Six Personnages en quête d’auteur », in Écrits sur le théâtre et la littérature (1960), trad. G. Piroué, Paris, Denoël-Gonthier, « Médiations », 1968.">18</a> ?</q></p> <p>&nbsp; &nbsp; &nbsp;Le fondement &agrave; l&rsquo;&eacute;criture de <em>Macbeth all&rsquo;improvviso</em> est donc le m&ecirc;me geste de refus que celui de <em>Six Personnages</em>, refus qui, loin d&rsquo;&ecirc;tre paralysant, vivifie l&rsquo;action dramatique et appelle les personnages &agrave; s&rsquo;auto-affirmer malgr&eacute; le &ndash; ou justement en vertu du &ndash; refus de leur propre cr&eacute;ateur.&nbsp;<br /> &nbsp; &nbsp; &nbsp;La com&eacute;die traditionnelle est aspir&eacute;e dans la sombre trag&eacute;die moderne selon un proc&eacute;d&eacute; qui ne se limite pas &agrave; l&rsquo;utilisation des marionnettes pour amener Shakespeare dans le castelet, mais qui se traduit par la fiction d&rsquo;un libre arbitre des marionnettes elles-m&ecirc;mes. Par l&rsquo;exploitation de l&rsquo;imm&eacute;diatet&eacute; propre aux marionnettes &agrave; gaine, dans les pi&egrave;ces de Brunello l&rsquo;objet inanim&eacute; prend la place de celui qui le man&oelig;uvre, devient lui-m&ecirc;me un sujet volitif et d&eacute;place le canon de la repr&eacute;sentation vers un au-del&agrave; du sujet-homme, de la volont&eacute; du marionnettiste, de son principe ordonnateur. L&rsquo;auteur donne profondeur &agrave; ces masques qui restent g&eacute;n&eacute;ralement aplaties dans leur r&ocirc;le st&eacute;r&eacute;otyp&eacute;, les vivifie en inventant pour chacune d&rsquo;elles des histoires, des biographies, des probl&egrave;mes, des d&eacute;sirs. Les aventures v&eacute;cues par les marionnettes dans les diff&eacute;rents textes de Brunello, les probl&egrave;mes qui se posent et les phases de la vie qu&rsquo;elles traversent sont donc le premier pas vers une d&eacute;finition de leur existence en tant que telles, de leur ind&eacute;pendance de l&rsquo;homme qui les a cr&eacute;&eacute;es.&nbsp;Le choix, la r&eacute;volte, l&rsquo;affrontement ouvert dans le drame de <em>Macbeth</em> constituent l&rsquo;affirmation de l&rsquo;existence de la marionnette au-del&agrave; de son propre cr&eacute;ateur. En leur rendant leur autonomie, l&rsquo;auteur donne vie &agrave; des personnages, engendre une lign&eacute;e imaginaire, ainsi que son h&eacute;ritage.</p> <p>&nbsp;</p> <hr /> <p><strong>Notes et r&eacute;f&eacute;rences :</strong></p> <p><strong>Bibliographie</strong></p> <p>Luigi Allegri, <em>Per una storia del teatro come spettacolo: il teatro di burattini e marionette</em>, Parma, Centro studi e archivio della comunicazione, 1978.</p> <p>Gigio Brunello, <em>Tragedie e commedie per tavoli e baracche</em>, Treviso, De Bastiani Editore, 2018.</p> <p>G. Brunello, G. Moln&agrave;r, <em>Macbeth all&#39;improvviso</em>, Bergamo, Edizioni Junior, 2003.</p> <p>Alfonso Cipolla, Giovanni Moretti, <em>Commedianti figurati e attori pupazzani: testimonianze di moralisti e memorialisti, viaggiatori e cronisti per una storia del teatro con le marionette e con i burattini in Italia</em>. Torino, SEB 27, 2003.</p> <p>Alfonso Cipolla, Giovanni Moretti, <em>Storia delle marionette e dei burattini in Italia</em>. Corazzano (San Miniato), Titivillus, 2011.</p> <p>Giuseppe Giacosa, <em>Il Filo</em>, Torino, F. Casanova Libraio-Editore, 1883.</p> <p>Roberto Leydi, Renata Mezzanotte Leydi, <em>Marionette e burattini. Testi dal repertorio classico italiano del Teatro delle marionette e dei burattini con introduzione, informazioni, note</em>. Milano, Edizioni Avanti, 1958.</p> <p>Remo Melloni, &laquo;&nbsp;Introduzione al repertorio del teatro dei burattini e delle marionette &raquo;, paru dans &laquo; Chi &egrave; di scena? Baracche, burattini e marionette dalle collezioni emiliano-romagnole &raquo;, suppl&eacute;ment de la revue <em>IBC. Informazioni, commenti, inchieste sui beni culturali</em>, vol. 3, 1999, Istituto Beni Artistici, Culturali e Naturali Regione Emilia-Romagna.</p> <p>Giulio Moln&agrave;r, <em>Teatro d&rsquo;oggetti</em>, Pisa, Titivillus, 2009.</p> <p>Luigi Pirandello, &laquo; Pr&eacute;face &agrave; <em>Six Personnages en qu&ecirc;te d&rsquo;auteur</em>&nbsp;&raquo;, dans <em>&Eacute;crits sur le th&eacute;&acirc;tre et la litt&eacute;rature </em>(1960), trad. G. Pirou&eacute;, Paris, Deno&euml;l-Gonthier, &laquo;&nbsp;M&eacute;diations&nbsp;&raquo;, 1968.</p> <p>Jean-Pierre Sarrazac, &laquo;&nbsp;M&eacute;tadrame&nbsp;&raquo;, <em>&Eacute;tudes th&eacute;&acirc;trales</em>, n&deg;&nbsp;22, 2001, p. 65-67.</p> <p><strong>Sitographie</strong></p> <p>Renzo Francabandera, &laquo;&nbsp;Il realismo magico di Gigio Brunello. La video-intervista&nbsp;&raquo;, dans <em>PAC &ndash; Pane Acqua Culture. </em><a href="http://www.paneacquaculture.net/2016/03/31/il-realismo-magico-di-gigio-brunello-la-videointervista/">http://www.paneacquaculture.net/2016/03/31/il-realismo-magico-di-gigio-brunello-la-videointervista/</a></p> <p>Mario Bianchi, &laquo; Il teatro di figura in Italia. Ne parliamo con Gigio Brunello &raquo;, dans <em>Krapp&rsquo;s Last Post. </em><a href="http://www.klpteatro.it/gigio-brunello-1-parte">http://www.klpteatro.it/gigio-brunello-1-parte</a>; <a href="http://www.klpteatro.it/gigio-brunello-2-parte">http://www.klpteatro.it/gigio-brunello-2-parte</a>.</p> <hr /> <p><a href="#liennbp1" name="nbp1">1</a> Gyula Moln&agrave;r (1950), acteur, auteur, r&eacute;alisateur d&rsquo;origine hongroise, vit en Italie et travaille dans diff&eacute;rents pays europ&eacute;ens. Il a &eacute;t&eacute; professeur &agrave; l&rsquo;&Eacute;cole d&rsquo;Art Dramatique Ernst Busch de Berlin. Depuis des ann&eacute;es, il dirige des laboratoires de recherche sur une &eacute;criture sc&eacute;nique qui se sert de l&rsquo;improvisation cr&eacute;ative entre acteur et objet. Collaborateur de longue date de Gigio Brunello, il a codirig&eacute; la plupart de ses spectacles et a souvent pris part aussi &agrave; leur conception.</p> <p><a href="#liennbp2" name="nbp2">2</a> Luigi Allegri, <em>Per una storia del teatro come spettacolo: il teatro di burattini e marionette</em>, Parma, Centro studi e archivio della comunicazione, 1978, p. 119.</p> <p><a href="#liennbp3" name="nbp3">3</a> Giulio Moln&agrave;r, <em>Teatro d&rsquo;oggetti</em>, Pisa, Titivillus, 2009, p. 47. &laquo;&nbsp;<em>Mentre la consueta proiezione delle qualit&agrave; e delle vicende umane al burattino/oggetto riduce la materia ad una sorta di illustrazione gradevole, qui, il ribaltamento di questa gerarchia produce effetti sorprendenti e significativi. l&rsquo;attore non solo utilizza gli oggetti ma viene anche da loro utilizzato</em>&nbsp;&raquo;. La traduction est de l&rsquo;auteur de l&rsquo;article.</p> <p><a href="#liennbp4" name="nbp4">4</a> &laquo; <em>Il burattino diventa un&#39;appendice dell&#39;animatore il quale, con le proprie mani, gli permette gesti scattanti e improbabili che nulla hanno a che vedere col naturale movimento umano</em>&nbsp;&raquo; (Remo Melloni, &laquo; Introduzione al repertorio del teatro dei burattini e delle marionette &raquo;, paru dans &laquo; Chi &egrave; di scena? Baracche, burattini e marionette dalle collezioni emiliano-romagnole &raquo;, suppl&eacute;ment de la revue <em>IBC. Informazioni, commenti, inchieste sui beni culturali</em>, vol. 3, 1999, Istituto Beni Artistici, Culturali e Naturali Regione Emilia-Romagna, p. 39). La traduction est de l&rsquo;auteur de l&rsquo;article.</p> <p><a href="#liennbp5" name="nbp5">5</a> Luigi Allegri, <em>op. cit.</em>, p. 73 : &laquo;&nbsp;<em>&Egrave; un teatro che rifiuta la &laquo;&nbsp;rappresentazione&nbsp;&raquo; come motore della macchina drammatica, che nel momento in cui produce senso con un&rsquo;azione, un duello, una bastonatura, con ci&ograve; stesso spende quel senso, non lo costituisce come rimando ad altro, a &laquo;&nbsp;fuori&nbsp;&raquo;. Nel teatro di burattini, ad esempio, non &egrave; mai questione di &laquo;&nbsp;psicologia&nbsp;&raquo; di personaggi, di rimandi naturalistici, di dialoghi sottili, di situazioni socialmente caratterizzate </em>&raquo;. La traduction est de l&rsquo;auteur de l&rsquo;article.</p> <p><a href="#liennbp6" name="nbp6">6</a><em> Un trovatello a casa del diavolo</em>&nbsp; [&laquo;&nbsp;un enfant trouv&eacute; chez le diable&nbsp;&raquo;], spectacle de marionnettes dans le castelet pour marionnettiste solo, conception et mise en sc&egrave;ne de Gigio Brunello et Gyula Moln&agrave;r, 1994.</p> <p><a href="#liennbp7" name="nbp7">7</a><em> Trovatello due. Festa di compleanno</em> [&laquo;&nbsp;Un enfant trouv&eacute;, deux. F&ecirc;te d&rsquo;anniversaire&nbsp;&raquo;], spectacle de marionnettes dans le castelet pour marionnettiste solo, conception et mise en sc&egrave;ne de Gigio Brunello, 2004.</p> <p><a href="#liennbp8" name="nbp8">8</a><i> La Carota</i> [&laquo;&nbsp;La Carotte&nbsp;&raquo;], spectacle de marionnettes dans le castelet pour marionnettiste solo. Conception et mise en sc&egrave;ne de Gigio Brunello et Gyula Moln&agrave;r, 2006.</p> <p><a href="#liennbp9" name="nbp9">9 </a><i>Come gli Etruschi uscirono dalla crisi</i>, [&laquo;&nbsp;Comment les &Eacute;trusques sortirent de la crise&nbsp;&raquo;], spectacle de marionnettes dans le castelet pour marionnettiste solo. Conception et mise en sc&egrave;ne de Gigio Brunello et Gyula Moln&agrave;r, 2008.</p> <p><a href="#liennbp10" name="nbp10">10</a><i> La Carotta</i>, <i>op. cit</i>.</p> <p><a href="#liennbp11" name="nbp11">11</a> Gigio Brunello, <em>Tragedie e commedie per tavoli e baracche</em>, Treviso, De Bastiani Editore, 2018, p. 132. &laquo;<em>A un certo punto il sipario si chiude, questo succede sempre, no? &hellip; E dopo? Cosa c&rsquo;&egrave; dopo il sipario? Uomo, se ci sei fatti vedere!&nbsp; Perch&eacute; mentre tu invecchi io sono eterno? Come pu&ograve; la creatura vivere pi&ugrave; del creatore: &egrave; una contraddizione in termini&hellip; Sarebbe come versare l&rsquo;acqua dal bicchiere alla bottiglia, (o come se l&rsquo;albero cercasse un po&rsquo; d&rsquo;ombra sotto una sua foglia&hellip;) Uomo: perch&eacute; io dico battute che tu sai gi&agrave; che io dir&ograve;? Dove sta la mia libert&agrave;? E perch&eacute; Balanzone &egrave; sempre stato vecchio e io non son stato mai piccolo?</em>&raquo;. La traduction est de l&rsquo;auteur de l&rsquo;article.</p> <p><a href="#liennbp12" name="nbp12">12</a><i> Macbeth all&rsquo;improvviso</i> [&laquo;&nbsp;Macbeth improvis&eacute;&nbsp;&raquo;], drame en deux actes pour marionnettes, librement adapt&eacute; de William Shakespeare, conception de Gigio Brunello et Gyula Moln&agrave;r, mise en sc&egrave;ne de Gyula Moln&agrave;r, avec Gigio Brunello, 2001.</p> <p><a href="#liennbp13" name="nbp13">13</a> Giuseppe Giacosa, <i>Il Filo</i>, Torino, F. Casanova Libraio-Editore, 1883.</p> <p><a href="#liennbp14" name="nbp14">14</a><em> La Grande Guerra del sipario</em> [&laquo;&nbsp;La Grande Guerre du rideau&nbsp;&raquo;], acte unique pour marionnettes et marionnettiste solo, conception de Gigio Brunello et Gyula Moln&agrave;r, avec Gigio Brunello, 2015.</p> <p><a href="#liennbp15" name="nbp15">15</a> Gigio Brunello, <em>op. cit.</em>, p. 73. &laquo;&nbsp;<em>Il nostro ringraziamento va non solo a quelli che lungo questa linea hanno condotto le pi&ugrave; nobili imprese per il godimento del pubblico pagante, non solo a Arlecchino, Pulcinella, Orlando, Don Quijote, Rin Tin Tin e tanti altri burattini illustri che dal sipario aperto traggono gloria e successi, ma anche a tutti quei burattini anonimi che, a sipario chiuso, conducono la loro vita di tutti i giorni, sconosciuta ai pi&ugrave;. Dietro al sipario chiuso passeggiano, dormono, curano il giardino, amano, stirano, portano a spasso il cane,&nbsp;</em><i>comprano patate al mercato </i>&raquo;. La traduction est de l&rsquo;auteur de l&rsquo;article.</p> <p><a href="#liennbp16" name="nbp16">16</a> Pier Giorgio Nosari, introduction &agrave; G. Brunello, G. Moln&agrave;r, <i>Macbeth all&#39;improvviso</i>, Bergamo, Edizioni Junior, 2003, p. 14.</p> <p><a href="#liennbp17" name="nbp17">17</a> Jean-Pierre Sarrazac, &laquo;&nbsp;M&eacute;tadrame&nbsp;&raquo;, <i>&Eacute;tudes th&eacute;&acirc;trales</i>, n. 22, 2001, p. 65-67.</p> <p><a href="#liennbp18" name="nbp18">18</a> Luigi Pirandello, &laquo; Pr&eacute;face &agrave; <em>Six Personnages en qu&ecirc;te d&rsquo;auteur</em>&nbsp;&raquo;, in <em>&Eacute;crits sur le th&eacute;&acirc;tre et la litt&eacute;rature </em>(1960), trad. G. Pirou&eacute;, Paris, Deno&euml;l-Gonthier, &laquo;&nbsp;M&eacute;diations&nbsp;&raquo;, 1968.</p>