<p><q><em>&quot;Que ce soit le chant d&#39;une lampe ou bien la voix de la temp&ecirc;te, que ce soit le souffle du soir ou le g&eacute;missement de la mer, qui t&#39;environne - toujours veille derri&egrave;re toi une ample m&eacute;lodie, tiss&eacute;e de mille voix, dans laquelle ton solo n&#39;a sa place que de temps &agrave; autre. Savoir &agrave; quel moment c&#39;est &agrave; toi d&#39;attaquer, voil&agrave; le secret de ta solitude : tout comme l&#39;art du vrai commerce c&#39;est : de la hauteur des mots se laisser choir dans la m&eacute;lodie une et commune.&quot;</em><br /> Rainer Maria Rilke,&nbsp;<em>Notes sur la m&eacute;lodie des choses</em>, 1898, Paris, Allia, 2008, p. 27.</q></p> <p>L&rsquo;histoire litt&eacute;raire a longtemps retenu la date de la R&eacute;volution fran&ccedil;aise comme &eacute;tant la fin de l&rsquo;&acirc;ge d&rsquo;or de la Parole de l&rsquo;&eacute;crivain. Fini le temps de la Conversation et des Salons, l&rsquo;artiste &agrave; l&rsquo;&egrave;re de l&rsquo;&eacute;crit, se serait isol&eacute; dans une tour d&rsquo;ivoire, &eacute;laborant sans rel&acirc;che, son &oelig;uvre. Pourtant, il suffit d&rsquo;&eacute;voquer le nom de Montmartre pour que tout un univers de chansons et de po&eacute;sies apparaisse. Nous savons par exemple que la voix de Verlaine est triste et &eacute;raill&eacute;e, celle de Rimbaud est convulsive comme celle d&rsquo;un enfant qui a du chagrin. La voix de Villiers est basse, celle de Mallarm&eacute;, flut&eacute;e. L&rsquo;histoire litt&eacute;raire a contribu&eacute; &agrave; occulter le dynamisme des pratiques orales au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle qui nous permettent de recueillir ces empreintes vocales ; or, ces pratiques orales s&rsquo;imposent en m&ecirc;me temps que l&rsquo;imprim&eacute;. Elles sont spectaculaires comme la chanson, la r&eacute;citation, la lecture publique, ou encore le monologue humoristique. Elles peuvent aussi prendre des formes plus circonstanci&eacute;es comme dans les discours, les conf&eacute;rences ou les sermons. Elles se fondent enfin dans les traits plus souples des sociabilit&eacute;s comme la causerie, la conversation et autres &eacute;changes n&eacute;s du plaisir des rencontres entre artistes. Ainsi, le Paris litt&eacute;raire est bavard et est &laquo; tiss[&eacute;] de mille voix<a href="#nbp_1" id="footnoteref1_8j09zc1" name="lien_nbp_1" title=" Rainer Maria Rilke, Notes sur la mélodie des choses, 1898, Paris, Allia, 2008, p. 27.">1</a>&raquo; qui se font entendre de part et d&rsquo;autre de la capitale.</p> <p>&Agrave; toutes ces pratiques orales correspondent autant d&rsquo;espaces qui quadrillent la ville. Du caf&eacute; de La Nouvelle-Ath&egrave;nes ou encore du caf&eacute; du Rat mort, il &nbsp;n&rsquo;y avait que quelques pas &agrave; faire pour se rendre au cabaret du Chat Noir o&ugrave; la sc&egrave;ne &eacute;tait ouverte &agrave; qui voulait offrir quelques vers. &Agrave; Saint-Germain-des-Pr&eacute;s, on se serre autour de Rachilde qui fait salon dans les bureaux du Mercure de France. &Agrave; chaque quartier, ses lieux de rencontres, ses festivit&eacute;s, ses adresses. Cartographier ces lieux de paroles revient &agrave; souligner l&rsquo;importance, voire les r&eacute;sistances, de la voix auctoriale en ce si&egrave;cle dit de l&rsquo;&eacute;crit &agrave; travers le dynamisme des sociabilit&eacute;s litt&eacute;raires. Les r&eacute;volutions esth&eacute;tiques ont plus souvent lieu dans les salons et c&eacute;nacles qu&rsquo;au coin d&rsquo;un bureau esseul&eacute;. Quel r&ocirc;le ont ces lieux dans la formation de l&rsquo;&eacute;crivain qui teste ses vers devant un public qui peut se montrer parfois cruel, parfois bienveillant, mais toujours exigeant<a href="#nbp_2" id="footnoteref2_d75udht" name="lien_nbp_2" title=" Voir Vincent Laisney, En lisant, en écoutant. Lectures en petit comité de Hugo à Mallarmé, Paris, Les Impressions nouvelles, 2017.">2</a>? En quoi ces lieux participent-ils &agrave; l&rsquo;&eacute;laboration d&rsquo;une identit&eacute;, d&rsquo;une posture auctoriale par l&rsquo;&eacute;crivain en recherche de reconnaissance ? Choisir le lieu o&ugrave; dire ses vers n&rsquo;est pas sans enjeux et r&eacute;v&egrave;le autant les choix esth&eacute;tiques que les strat&eacute;gies de positionnements dans le champ litt&eacute;raire de l&rsquo;artiste. Dans la continuit&eacute; des travaux initi&eacute;s en sociologie de l&rsquo;espace litt&eacute;raire<a href="#nbp_3" id="footnoteref3_dzipi6f" name="lien_nbp_3" title=" Voir Clément Dessy, Julie Fäcker et Denis Saint-Amand (dir.), Les lieux littéraires et artistiques. XVIII-XXIe siècle, COnTEXTE, n° 19, 2017, [En ligne] https://journals.openedition.org/contextes/6288 (site consulté le 23.10.2019).">3</a>, nous gageons que les lieux de parole sont le th&eacute;&acirc;tre des r&eacute;volutions ou &eacute;laborations esth&eacute;tiques de m&ecirc;me que des m&eacute;canismes de l&eacute;gitimation ou d&rsquo;exclusion symboliques.</p> <p>&Agrave; cela s&rsquo;ajoute la part d&rsquo;imaginaire que joue tout lieu de parole dans la vie litt&eacute;raire. Le c&eacute;l&egrave;bre caf&eacute; Momus, figur&eacute; dans les &oelig;uvres de Murger puis de Puccini, fait par exemple partie du mythe de ce Paris sonore. Il est une image d&rsquo;&Eacute;pinal qui contribue &agrave; construire l&rsquo;identit&eacute;, r&eacute;elle ou r&ecirc;v&eacute;e, de l&rsquo;habitat de l&rsquo;&eacute;crivain. Abondamment repr&eacute;sent&eacute;s dans les &oelig;uvres, dans la presse, dans les t&eacute;moignages recens&eacute;s dans les m&eacute;moires et journaux intimes, etc., les lieux qui abritent la parole vive construisent l&rsquo;imaginaire de l&rsquo;artiste au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. Ses figurations sont autant de discours port&eacute;s sur la vie litt&eacute;raire. Quelle est la continuit&eacute; entre ces diff&eacute;rents lieux, des caf&eacute;s chics des Grands Boulevards aux sc&egrave;nes obscures du Quartier latin ? Mais aussi quelles sont les cons&eacute;quences de ces pratiques orales sur les formes litt&eacute;raires et dans l&rsquo;histoire litt&eacute;raire ? Entre espace historique, symbolique et imaginaire, les lieux de parole de l&rsquo;&eacute;crivain offrent un angle d&rsquo;&eacute;tude particuli&egrave;rement propice &agrave; la compr&eacute;hension de ce qu&rsquo;est &ecirc;tre un &eacute;crivain &agrave; Paris au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. &Agrave; partir de sources vari&eacute;es &ndash; journaux intimes, correspondances, repr&eacute;sentations picturales, archives, livres d&rsquo;or, journaux, voire m&ecirc;me proc&egrave;s-verbaux de police &ndash; il est possible d&rsquo;entendre les &eacute;chos de ces voix et de retrouver leurs lieux de prof&eacute;ration.</p> <p><strong>Paris bavard : des espaces de parole en r&eacute;gime scripturaire</strong></p> <p>Au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, le m&eacute;c&eacute;nat se d&eacute;lite pour laisser place &agrave; une forme de financement artistique r&eacute;gie par les r&egrave;gles de l&rsquo;offre et de la demande. Ce sont les &eacute;diteurs, les directeurs de journaux, les directeurs de th&eacute;&acirc;tre qui deviennent le soutien financier des litt&eacute;rateurs. Le nouveau statut ind&eacute;pendant de l&rsquo;&eacute;crivain entra&icirc;ne de nouveaux modes d&rsquo;existence de l&rsquo;artiste o&ugrave; l&rsquo;oralit&eacute; joue un r&ocirc;le central. Le premier recensement effectu&eacute; par Vincent Laisney des lieux de parole au temps dit de l&rsquo;&eacute;crit montre leur place dans la vie litt&eacute;raire de l&rsquo;&eacute;poque :</p> <p><q>Paradoxalement, l&rsquo;industrialisation de la litt&eacute;rature, stimul&eacute;e par l&rsquo;&eacute;dition des livres &agrave; un sou et par la diffusion massive du journal, ne d&eacute;courage pas les &eacute;crivains de r&eacute;citer leurs &oelig;uvres en public, soit sur les tr&eacute;teaux d&rsquo;un caf&eacute;-concert, soit sur la table d&rsquo;une brasserie, soit sur la sc&egrave;ne d&rsquo;un cabaret, soit dans une salle de conf&eacute;rence, soit dans un salon mondain, soit encore dans l&rsquo;appartement d&rsquo;un confr&egrave;re<a href="#nbp_4" id="footnoteref4_leknh0f" name="lien_nbp_4" title=" Vincent Laisney, En lisant, en écoutant, op. cit., p. 20-21.">4</a>.&nbsp;</q></p> <p>Ainsi, brasseries et caf&eacute;s, cabaret, caf&eacute;-concert, salon litt&eacute;raire, r&eacute;sidence priv&eacute;e mais aussi salle de conf&eacute;rence sont des lieux de paroles de premi&egrave;re importance pour l&rsquo;&eacute;crivain. Cette liste est par ailleurs extensible : aux caf&eacute;s s&rsquo;ajoutent les cr&egrave;meries, &agrave; mi-chemin entre le restaurant et le caf&eacute;, les guinguettes qui sont des lieux festifs de r&eacute;union des soci&eacute;t&eacute;s chantantes comme le Moulin de la Galette immortalis&eacute; par le pinceau de Renoir, ou encore la rue, car il n&rsquo;est pas rare de voir la f&ecirc;te et la conversation des terrasses gagner les trottoirs parisiens, comme on peut le voir ci-dessous dans la repr&eacute;sentation du Boulevard des Italiens qui abrite de nombreux caf&eacute;s.&nbsp;</p> <figure><img alt="Café_Tortoni,_Eugene_von_Guerard_1856 (1).jpg" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="256" src="http://www.alepreuve.org/sites/alepreuve.org/files/pictures/Caf%C3%A9_Tortoni%2C_Eugene_von_Guerard_1856%20%281%29.jpg" width="372" /> <figcaption><em>Boulevard des italiens, le&nbsp;</em>Caf&eacute; Tortoni<em>, &agrave; 16h</em>, par Gu&eacute;rard (&agrave; c&ocirc;t&eacute;, le Caf&eacute; de Paris).</figcaption> </figure> <p>L&rsquo;engouement pour ces lieux de vie litt&eacute;raire n&rsquo;est pas sans lien avec les nouvelles conditions artistiques faites &agrave; l&rsquo;&eacute;crivain. Ce dernier peine parfois &agrave; se faire &eacute;diter. Par la mise en voix de son &oelig;uvre, l&rsquo;&eacute;crivain cherche &agrave; faire conna&icirc;tre son &oelig;uvre in&eacute;dite. Par des lectures publiques ou en petit comit&eacute;, des conf&eacute;rences, ou tout autre forme d&rsquo;oralisation de l&rsquo;&oelig;uvre &eacute;crite (et non forc&eacute;ment destin&eacute;e &agrave; la sc&egrave;ne), l&rsquo;&eacute;crivain &eacute;largit les possibilit&eacute;s de diffusion de son &oelig;uvre. Et qu&rsquo;en bien m&ecirc;me l&rsquo;&eacute;crivain a la chance d&rsquo;&ecirc;tre publi&eacute;, parfois &agrave; grand tirage, l&rsquo;essor de la presse &eacute;tant notamment due &agrave; la modernisation des techniques d&rsquo;imprimerie au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle<a href="#nbp_5" id="footnoteref5_zr2y09c" name="lien_nbp_5" title=" Dominique Kalifa, La Culture de masse en France, 1860-1930, t. I, Paris, La Découverte, coll. « Repères », 2001.">5</a>, incarner ses textes reste une pratique courante pour l&rsquo;&eacute;crivain &agrave; succ&egrave;s. Soit que l&rsquo;&eacute;crivain est sollicit&eacute; pour faire vivre son &oelig;uvre en dehors de son support &eacute;crit afin de la partager, soit que, face &agrave; cette large diffusion de l&rsquo;&oelig;uvre, il peut avoir le sentiment d&rsquo;en perdre sa &laquo; paternit&eacute; &raquo;. Certaines paroles d&rsquo;&eacute;crivain semblent alors &agrave; l&rsquo;intersection entre une affirmation auctoriale par un geste po&eacute;tique in&eacute;dit qui implique le corps de l&rsquo;&eacute;crivain et une adaptation aux&nbsp;<em>m&eacute;diamorphoses</em><a href="#nbp_6" id="footnoteref6_7hq8ur5" name="lien_nbp_6" title=" Voir Pascal Durand, Médiamorphoses. Presse, littérature et médias, culture médiatique et communication, Liège, Presses Universitaires de Liège, 2019.">6</a>&nbsp;qui r&eacute;gissent la vie litt&eacute;raire et qui changent en profondeur les pratiques de l&rsquo;homme de lettres et la place de l&rsquo;&eacute;crivain dans la soci&eacute;t&eacute;. Dans ce r&eacute;gime de visibilit&eacute;<a href="#nbp_7" id="footnoteref7_65hqn96" name="lien_nbp_7" title=" Voir Nathalie Heinich, De la visibilité. Excellence et singularité en régime médiatique, Paris, Gallimard, « Bibliothèque des Sciences humaines », 2012.">7</a>, la parole, on le comprend, est indispensable pour exister en litt&eacute;rature. Mais lire ses textes entre pairs, c&rsquo;est aussi s&rsquo;assurer une place dans la communaut&eacute; litt&eacute;raire: les lectures entra&icirc;nent des relectures et des r&eacute;visions et sont des &eacute;tapes particuli&egrave;rement pr&eacute;cieuses dans la trajectoire de l&rsquo;&oelig;uvre qui peut se voir remani&eacute;e &agrave; la suite des conseils des auditeurs ou du manque d&rsquo;effet d&rsquo;un passage sur ceux-ci. Nerval, dans une lettre adress&eacute;e &agrave; Sainte-Beuve, pr&eacute;sente en effet la lecture comme une &eacute;preuve. Il faut r&eacute;unir autour de soi &laquo; un public de choix o&ugrave; l&rsquo;on puisse essayer ses ouvrages d&rsquo;avance<a href="#nbp_8" id="footnoteref8_enijrml" name="lien_nbp_8" title=" Lettre de Gérard de Nerval à Sainte-Beuve, citée par Vincent Laisney, dans En lisant en écoutant, op. cit., p. 35.">8</a>&nbsp;&raquo;. Ainsi, la lecture serait moins un moment privil&eacute;gi&eacute; avec le texte qu&rsquo;une v&eacute;ritable confrontation avec l&rsquo;auditoire. Mieux encore, ces pratiques orales sont aussi l&rsquo;occasion de se divertir et de partager une m&ecirc;me passion pour la litt&eacute;rature. L&rsquo;enthousiasme de Musset qui compose des vers &laquo; pour avoir d&rsquo;autres vers &agrave; r&eacute;citer &agrave; ses amis<a href="#nbp_9" id="footnoteref9_xzjgflh" name="lien_nbp_9" title=" Paul de Musset, Ibid., p. 48.">9</a>&nbsp;&raquo; souligne le plaisir des auteurs &agrave; faire entendre leurs &oelig;uvres. Un plaisir qui peut devenir moteur de l&rsquo;&eacute;criture comme on le voit ici.</p> <p>Il n&rsquo;est donc pas &eacute;tonnant de retrouver ces lieux de paroles dans les fictions. Des Illusions perdues de Balzac avec les salons mondains et le c&eacute;nacle &laquo; arch&eacute;typal<a href="#nbp_10" id="footnoteref10_1qgxixb" name="lien_nbp_10" title=" Anthony Glinoer et Vincent Laisney, « Le cénacle à l’épreuve du roman », dans Michel Lacroix et Guillaume Pinson (dir.), Sociabilités imaginées : représentations et enjeux sociaux, Tangence, n° 80, 2006, p. 25.">10</a>&nbsp;&raquo; de Daniel D&rsquo;Arthez aux Sc&egrave;nes de la vie de boh&egrave;me d&rsquo;Henri Murger, avec ses mansardes et ses caf&eacute;s, les figurations des lieux de sociabilit&eacute; dans les &oelig;uvres du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle nourrissent les imaginaires li&eacute;s &agrave; la parole d&rsquo;&eacute;crivain. Repr&eacute;sent&eacute; en orateur, comme l&rsquo;h&eacute;ro&iuml;ne de Corinne ou l&rsquo;Italie de Germaine de Sta&euml;l, improvisatrice admir&eacute;e, ou comme le double fictif de Mallarm&eacute;, Calixte Armel, dans&nbsp;<em>Le Soleil des morts</em>&nbsp;de Camille Mauclair, dont le charisme et la voix provoque un &laquo; magn&eacute;tisme inexplicable<a href="#nbp_11" id="footnoteref11_m536edm" name="lien_nbp_11" title=" Camille Mauclair, Le Soleil des morts, Paris, Ollendorff, 1898, p. 879.">11</a>&nbsp;&raquo; sur les membres du c&eacute;nacle, l&rsquo;&eacute;crivain incarne son &oelig;uvre, en devient l&rsquo;interpr&egrave;te jusque dans ses repr&eacute;sentations fictionnelles. Cette figuration de l&rsquo;&eacute;crivain en performance souligne l&rsquo;ampleur des enjeux : il s&rsquo;agit de se faire litt&eacute;ralement entendre et voir. C&rsquo;est entour&eacute; de ses pairs que l&rsquo;&eacute;crivain s&rsquo;assure une place dans le monde litt&eacute;raire et forge son &oelig;uvre<a href="#nbp_12" id="footnoteref12_6binz7o" name="lien_nbp_12" title=" Voir Denis Saint-Amand (dir.), La Dynamique des groupes littéraires, Liège, Presses Universitaires de Liège, coll. « Situations », 2016.">12</a>.</p> <p>L&rsquo;explosion des lieux de paroles s&rsquo;est faite progressivement. Caf&eacute;s et cabarets artistiques n&rsquo;&eacute;taient pas aussi fr&eacute;quent&eacute;s, voire n&rsquo;existaient pas du tout dans la premi&egrave;re moiti&eacute; du si&egrave;cle. On peut en effet observer au fil du si&egrave;cle un d&eacute;placement progressif des espaces priv&eacute;s aux espaces publics. L&rsquo;&eacute;volution des lieux accueillant les formes orales est r&eacute;v&eacute;latrice de la recherche par les &eacute;crivains d&rsquo;une compagnie et d&rsquo;un public toujours plus &eacute;tendus.</p> <p><strong>Petite histoire des lieux de parole d&rsquo;&eacute;crivain : de l&rsquo;espace priv&eacute; &agrave; l&rsquo;espace public</strong></p> <p>La petite histoire des lieux de parole de l&rsquo;&eacute;crivain au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, dessin&eacute;e &agrave; gros traits, d&eacute;bute avec la premi&egrave;re g&eacute;n&eacute;ration des Romantiques qui se regroupait essentiellement dans les r&eacute;sidences priv&eacute;es des &eacute;crivains. La demeure de l&rsquo;&eacute;crivain propose trois configurations de sociabilit&eacute; qui correspondent &agrave; autant d&rsquo;espaces de l&rsquo;habitation. La visite au grand &eacute;crivain, &eacute;preuve oblig&eacute;e et redout&eacute;e pour tout homme qui recherche la reconnaissance, se passe dans le bureau de l&rsquo;auteur admir&eacute;, o&ugrave; l&rsquo;h&ocirc;te et le visiteur se lisent leurs &oelig;uvres et conversent<a href="#nbp_13" id="footnoteref13_lzf8qk8" name="lien_nbp_13" title=" Voir Olivier Nora, « La visite au grand écrivain », dans Les lieux de mémoire. La nation, t. II, Pierre Nora (dir.), Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque illustrée des histoires », 1986, pp. 563-587.">13</a>. Les c&eacute;nacles se regroupent, quant &agrave; eux davantage dans la salle &agrave; manger : la table au centre permet de travailler. Dans le tableau de Th&eacute;o Van Rysselberghe, Une lecture, l&rsquo;intimit&eacute; du cercle est palpable : on assiste &agrave; une lecture dans un d&eacute;cor bourgeois, en habit de ville. L&rsquo;auditoire, restreint et particuli&egrave;rement attentif, repr&eacute;sente l&rsquo;atmosph&egrave;re des premiers c&eacute;nacles.</p> <figure><img alt="54788109.jpg" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="380" src="http://www.alepreuve.org/sites/alepreuve.org/files/pictures/54788109.jpg" width="513" /> <figcaption>Th&eacute;o Van Rysselberghe,&nbsp;<em>Une lecture</em>, 1903, huile sur toile &nbsp;(181 x 241 cm), Museum voor Schone Kunsten (Gent).</figcaption> </figure> <p>Enfin, le salon est la pi&egrave;ce qui donne son nom &agrave; la derni&egrave;re forme de sociabilit&eacute; dans l&rsquo;espace priv&eacute; : le salon litt&eacute;raire. L&rsquo;espace priv&eacute; est, &agrave; travers ces pratiques sociabilitaires, paradoxal : l&rsquo;intimit&eacute; de l&rsquo;&eacute;crivain-h&ocirc;te est en r&eacute;alit&eacute; tendue vers l&rsquo;ext&eacute;rieur. Il y a &agrave; la fois effet de sanctuarisation de l&rsquo;habitat de l&rsquo;&eacute;crivain, la vente du mobilier de Victor Hugo<a href="#nbp_14" id="footnoteref14_2z46uby" name="lien_nbp_14" title=" Voir Théophile Gautier, « Vente du mobilier de Victor Hugo », La Presse, 7 juin 1852, repris dans Histoire du romantisme, Paris, Charpentier, 1874, p. 126-133.">14</a>&nbsp;en est l&rsquo;exemple, mais aussi effet d&rsquo;exposition &agrave; ouvrir ainsi son espace priv&eacute; &agrave; ses confr&egrave;res. La d&eacute;marche critique de Sainte-Beuve qui propose les portraits de ses contemporains dans leur int&eacute;rieur, la mode des physiologies montre &agrave; quel point la dite vie priv&eacute;e est en r&eacute;alit&eacute; vie publique<a href="#nbp_15" id="footnoteref15_tb73gtn" name="lien_nbp_15" title=" Voir Marie-Clémence Régnier, « Le spectacle de l’homme de lettres au quotidien : de l’intérieur bourgeois à l’intérieur artiste (1840-1903) », Romantisme, 2015/2, n° 168, p. 71-80.">15</a>.</p> <p>Ces trois configurations de sociabilit&eacute; sont des formes majoritairement r&eacute;serv&eacute;es &agrave; une &eacute;lite artiste. N&eacute;anmoins, les ateliers d&rsquo;artiste et les mansardes exig&uuml;es du Quartier latin proposent une alternative plus populaire &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur bourgeois. De quelques types qu&rsquo;ils soient, ces espaces priv&eacute;s, cadres privil&eacute;gi&eacute;s pour la parole de l&rsquo;&eacute;crivain, sont des lieux de premi&egrave;re importance dans la vie litt&eacute;raire du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle : ils assurent &agrave; l&rsquo;&eacute;crivain une camaraderie litt&eacute;raire<a href="#nbp_16" id="footnoteref16_pxdkwu1" name="lien_nbp_16" title=" Voir Anthony Glinoer et Vincent Laisney, L’Âge des cénacles. Confraternités littéraires et artistiques au XIXe siècle, Paris, Fayard, 2013, 706 p.">16</a>&nbsp;essentielle dans la difficile travers&eacute;e qu&rsquo;est la carri&egrave;re d&rsquo;un homme de lettres &agrave; l&rsquo;heure de l&rsquo;&egrave;re m&eacute;diatique de masse. C&rsquo;est pourquoi ces espaces priv&eacute;s, du d&eacute;but du si&egrave;cle avec le Groupe de Coppet &agrave; la fin du si&egrave;cle comme on le voit avec les mardis de Mallarm&eacute;, ont &eacute;t&eacute; des lieux de parole d&rsquo;&eacute;crivain particuli&egrave;rement recherch&eacute;s des litt&eacute;rateurs. Toutefois, ces formes de sociabilit&eacute;s qui ont cours dans l&rsquo;espace priv&eacute; r&eacute;pondent &agrave; des codes, construits pour la plupart au cours des si&egrave;cles pr&eacute;c&eacute;dents, les salons des Lumi&egrave;res ayant notamment fait la gloire de la formule. Les paroles d&rsquo;&eacute;crivain qui y sont prof&eacute;r&eacute;es sont majoritairement formalis&eacute;es. Les r&eacute;cits des visites au grand &eacute;crivain, par leur sc&eacute;nario r&eacute;p&eacute;t&eacute; de t&eacute;moignage en t&eacute;moignage et leurs topiques &ndash; apparition du grand homme, discussions et lectures captivantes &ndash; font de ces &eacute;changes des formalit&eacute;s litt&eacute;raires, ritualis&eacute;es et attendues. Il y a une mani&egrave;re de lire, un art de converser, une organisation habituelle des soir&eacute;es et chaque &eacute;cart &agrave; ces codes tacites fait &eacute;v&eacute;nement<a href="#nbp_17" id="footnoteref17_aosx1xl" name="lien_nbp_17" title=" On pense particulièrement à la surprise des auditeurs de la mansarde d’Étienne-Jean Delécluze, habitués à l’art déclamatoire, à l’écoute de la voix blanche et neutre de Mérimée : « À peine eut-il commencé la lecture de son drame, que les inflexions de sa voix gutturale et le ton dont il récita parurent étranges à l’auditoire. […] N’observant […] plus que les repos strictement indiqués par la coupe des phrases, mais sans élever ni baisser jamais le ton, il lut ainsi tout son drame sans modifier ses accents, même aux endroits les plus passionnés », dans Étienne-Jean Delécluze, Souvenirs de soixante années, Paris, Michel Lévy, 1862, p. 223.">17</a>.&nbsp;</p> <p>Au milieu du si&egrave;cle, l&rsquo;essor des caf&eacute;s parisiens a contribu&eacute; &agrave; diversifier ces lieux de paroles et par l&agrave;-m&ecirc;me &agrave; s&rsquo;&eacute;carter progressivement du formalisme attendu dans la parole auctoriale. Tout comme Rodolphe et ses comp&egrave;res des Sc&egrave;nes de la vie de boh&egrave;me, l&rsquo;&eacute;crivain quitte de plus en plus souvent sa mansarde pour gagner l&rsquo;espace public. &Agrave; partir des ann&eacute;es 1850, l&rsquo;&eacute;volution des caf&eacute;s en font un lieu particuli&egrave;rement appr&eacute;ci&eacute; de la population parisienne et plus particuli&egrave;rement des artistes. Le caf&eacute; au d&eacute;but du XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle ne proposait ni alcool, ni restauration. Au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, ce statut a chang&eacute; : on y boit, on y fume, on y mange. De nouvelles formes de sociabilit&eacute;s se d&eacute;veloppent alors. De 380 caf&eacute;s recens&eacute;s au d&eacute;but du XVIIIe si&egrave;cle, on en compte 2000 &agrave; la fin du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle<a href="#nbp_18" id="footnoteref18_m4j4mbl" name="lien_nbp_18" title=" Voir Alfred Franklin, Dictionnaire historique des arts, métiers et professions exercées dans Paris depuis le XVIIIe siècle, Paris-Leipzig, H. Welter éd., 1906.">18</a>. Ces caf&eacute;s sont particuli&egrave;rement appr&eacute;ci&eacute;s des artistes. Baudelaire avait ses habitudes au Momus, Verlaine au Fran&ccedil;ois Ier, Barbey au Tabourey, Champfleury &agrave; la Brasserie Andler o&ugrave; il jette les fondements de l&rsquo;esth&eacute;tique r&eacute;aliste, Zola au Guerbois. C&rsquo;est encore au Rat Mort que quelques sc&egrave;nes fameuses entre Verlaine et Rimbaud se sont pass&eacute;es.&nbsp;</p> <figure><img alt="Le Rat Mort.jpg" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="327" src="http://www.alepreuve.org/sites/alepreuve.org/files/pictures/Le%20Rat%20Mort.jpg" width="490" /> <figcaption>Le Grand Caf&eacute; Pigalle ou Le Rat Mort, 7 place Pigalle, Paris 9e, Photographie non dat&eacute;e.</figcaption> </figure> <p>&nbsp;</p> <figure><img alt="lh20129236001_1.jpg" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="395" src="http://www.alepreuve.org/sites/alepreuve.org/files/pictures/lh20129236001_1.jpg" width="490" /> <figcaption>Courbet,&nbsp;<em>La Brasserie Andler</em>, 1848, rue Hautefeuille, Paris 6e.</figcaption> </figure> <p>La parole y est spontan&eacute;e : des conversations intenses, des r&eacute;citations impr&eacute;vues juch&eacute;es sur les tables ou chuchot&eacute;es &agrave; l&rsquo;oreille ce qu&rsquo;affectionnait particuli&egrave;rement Baudelaire, mais encore des chansons et des sketchs s&rsquo;invitent r&eacute;guli&egrave;rement dans les estaminets. Mais si l&rsquo;espace public est aim&eacute; des &eacute;crivains, il n&rsquo;offre peut-&ecirc;tre pas la tranquillit&eacute; n&eacute;cessaire &agrave; l&rsquo;&eacute;laboration d&rsquo;une &oelig;uvre, d&rsquo;une esth&eacute;tique collective qui pourrait permettre &agrave; ces &oelig;uvres orales de se transformer en &oelig;uvre &eacute;crite. Le cas des Hydropathes le montre. Le 5 octobre 1878, cinq po&egrave;tes, qui &laquo; di[sent] des vers<a href="#nbp_19" id="footnoteref19_58bseom" name="lien_nbp_19" title=" Émile Goudeau, Dix ans de bohème, Paris, La Librairie illustrée, 1888, p. 150.">19</a>&nbsp;&raquo; au premier &eacute;tage du caf&eacute; le Rive Gauche, autour d&rsquo;un piano mis &agrave; la disposition du tout venant, sont interrompus par des lyc&eacute;ens f&ecirc;tards du quartier. Goudeau, Abram, Lorin, Rives et Rollinat, ainsi emp&ecirc;ch&eacute;s, font une demande aupr&egrave;s du patron du caf&eacute; : il leur faut un espace r&eacute;serv&eacute;, une fois par semaine. Pour amortir la location, chacun s&rsquo;engage &agrave; venir accompagn&eacute; d&rsquo;amis partageant leur go&ucirc;t pour les lettres. Le premier vendredi, jour arr&ecirc;t&eacute;, ils sont 75. Rapidement le cabinet du caf&eacute; devient trop petit. Un local r&eacute;serv&eacute; &agrave; ces r&eacute;unions est alors lou&eacute;. Le club des Hydropathes ouvre ainsi ses portes le 17 octobre 1878 et ne les refermera qu&rsquo;en 1880<a href="#nbp_20" id="footnoteref20_qbzko1u" name="lien_nbp_20" title=" Il continuera à exister de façon éphémère en 1884.">20</a>. Les ann&eacute;es 1880, avec la lib&eacute;ralisation de la vie culturelle, le d&eacute;veloppement des &laquo; cabarets artistiques &raquo; et la d&eacute;mocratisation du public, marquent le d&eacute;but d&rsquo;une nouvelle &egrave;re de la culture orale.&nbsp;</p> <p>Le dernier espace est donc un lieu v&eacute;ritablement d&eacute;di&eacute; &agrave; la parole de l&rsquo;&eacute;crivain. La sc&egrave;ne est le lieu d&rsquo;une repr&eacute;sentation assum&eacute;e qui tend vers une professionnalisation de la figure de l&rsquo;&laquo; &eacute;crivain en voix<a href="#nbp_21" id="footnoteref21_0klhqmc" name="lien_nbp_21" title=" Voir pour la définition de l’écrivain « en voix » Pascal Brissette et Will Straw, Poètes et poésie en voix au Québec (XX-XXIe siècle), Voix et Images, vol. 40, 2015, p. 7-13.">21</a>&nbsp;&raquo;. Une soir&eacute;e au Chat noir fait alterner chansons, r&eacute;citations, d&eacute;clamation, monologues humoristiques mais aussi th&eacute;&acirc;tre d&rsquo;ombres, et discours plus ou moins s&eacute;rieux.&nbsp;</p> <figure><img alt="6ce7c4436c489e7eee5bbed03abcb3ae_0.jpg" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="346" src="http://www.alepreuve.org/sites/alepreuve.org/files/pictures/6ce7c4436c489e7eee5bbed03abcb3ae_0.jpg" width="555" /> <figcaption>Le Chat noir, derni&egrave;re adresse 68, bd de Clichy, Paris 18e.</figcaption> </figure> <figure><img alt="L'Hydropathe_10_février_1879_0.jpg" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="577" src="http://www.alepreuve.org/sites/alepreuve.org/files/pictures/L%27Hydropathe_10_f%C3%A9vrier_1879_0.jpg" width="445" /> <figcaption>F&eacute;licien Champsaur sur la sc&egrave;ne des Hydropathes, caricatur&eacute; par Cabriol, &agrave; la une de&nbsp;<em>L&rsquo;Hydropathe</em>, n&deg; 3, 19 f&eacute;vrier 1879.</figcaption> </figure> <p>Les cabarets artistiques, qui sont pour la plupart situ&eacute;s &agrave; Montmartre, donnent un nouveau statut &agrave; l&rsquo;&eacute;crivain, qui, sans &ecirc;tre un professionnel (un com&eacute;dien, un chanteur) devient l&rsquo;interpr&egrave;te de ses propres &oelig;uvres. Il y &eacute;labore tout &agrave; la fois ses vers et son image &agrave; travers ses performances sc&eacute;niques. Ainsi expos&eacute; sur sc&egrave;ne le statut de l&rsquo;&eacute;crivain se transforme : il est non seulement po&egrave;te, fantaisiste, chansonnier, mais aussi homme de sc&egrave;ne. L&rsquo;explosion des cabarets artistiques puis des caf&eacute;s-concerts et des music-halls &agrave; partir des ann&eacute;es 1870<a href="#nbp_22" id="footnoteref22_dwst5t9" name="lien_nbp_22" title=" Voir la carte interactive des cafés-concerts et des music-halls des années 1870 à 1945 [En ligne] http://www.dutempsdescerisesauxfeuillesmortes.net/textes_divers/cafes_concerts_et_music_halls/cafes_concerts_et_music_halls_plan.htm (site consulté le 23.10.2019).">22</a>&nbsp;montre l&rsquo;engouement pour ce nouveau statut auctorial. L&rsquo;&eacute;crivain peut encore se faire entendre sur une sc&egrave;ne d&rsquo;un autre genre : celle d&rsquo;une acad&eacute;mie ou d&rsquo;une salle de conf&eacute;rence. Au Coll&egrave;ge de France, &agrave; l&rsquo;Acad&eacute;mie fran&ccedil;aise, voire m&ecirc;me &agrave; la Sorbonne, l&rsquo;&eacute;crivain prof&egrave;re une parole qui, par son incarnation, s&rsquo;apparente &agrave; la notion de performance, la conf&eacute;rence &eacute;tant une pratique &agrave; cheval entre le discours acad&eacute;mique et la lecture artistique.&nbsp;</p> <figure><img alt="738_054_cor13649_0.jpg" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="386" src="http://www.alepreuve.org/sites/alepreuve.org/files/pictures/738_054_cor13649_0.jpg" width="555" /> <figcaption>Gravure de la s&eacute;ance de l&#39;Acad&eacute;mie fran&ccedil;aise du 23 avril 1868, publi&eacute;e par&nbsp;<em>L&#39;Univers illustre&nbsp;</em>en 1868.</figcaption> </figure> <p>Dans ce cadre, l&rsquo;&eacute;crivain s&rsquo;inscrit dans une longue galerie d&rsquo;&eacute;crivains orateurs. C&rsquo;est le cas par exemple de Paul Val&eacute;ry, dont les auditeurs, au regard des nombreux t&eacute;moignages, viennent moins assister &agrave; son cours de po&eacute;tique au Coll&egrave;ge de France, qu&rsquo;&agrave; une cr&eacute;ation en acte, et en quelque sorte &agrave; la naissance de la po&eacute;sie tant le phras&eacute; du po&egrave;te &eacute;tait singulier<a href="#nbp_23" id="footnoteref23_3yr1c4g" name="lien_nbp_23" title=" Christophe Charle, « Le Collège de France », dans Pierre Nora (dir.), Les lieux de mémoire, Paris, Gallimard, 1992, t. III, p. 1983-2008.">23</a>.&nbsp;</p> <p>En somme, les configurations et reconfigurations des lieux de parole suivent les mutations de la figure sociale de l&rsquo;&eacute;crivain en voix. Plus encore, la multiplication des lieux de parole et leur &eacute;volution influencent les pratiques orales elles-m&ecirc;mes : les formalit&eacute;s litt&eacute;raires des premiers salons laissent place &agrave; une parole plus autonome et spectaculaire sur les sc&egrave;nes offertes aux &eacute;crivains notamment dans la deuxi&egrave;me moiti&eacute; du si&egrave;cle. En effet, au travers de cette mise en sc&egrave;ne de l&rsquo;auteur la parole se d&eacute;tache d&rsquo;un pur acte de communication. Si elle n&rsquo;est parfois qu&rsquo;&oelig;uvre parl&eacute;e, adoss&eacute;e &agrave; son texte publi&eacute;, elle peut aussi devenir &oelig;uvre &agrave; part enti&egrave;re et &ecirc;tre ainsi d&eacute;finie comme une &oelig;uvre orale. C&rsquo;est de cette mani&egrave;re qu&rsquo;a &eacute;t&eacute; d&eacute;finie la notion de parole vive comme toutes les formes de parole qui, par l&rsquo;acte d&rsquo;&eacute;nonciation effectif qu&rsquo;elle implique, fait &oelig;uvre<a href="#nbp_24" id="footnoteref24_15q22sm" name="lien_nbp_24" title=" Voir Stéphane Hirschi, Élisabeth Pillet et Alain Vaillant (dir), L’Art de la parole vive. Paroles chantées et paroles dites à l’époque moderne, Valenciennes, Presses universitaires de Valenciennes, coll. « Recherches Valenciennoises », n° 21, 2006, p. 8.">24</a>. Les lieux, les contextes sociaux dans lesquels cette parole est prof&eacute;r&eacute;e contribuent &agrave; d&eacute;finir le geste de la parole auctoriale entre formalit&eacute;s litt&eacute;raires et cr&eacute;ations ou &oelig;uvres orales. La carte litt&eacute;raire de la parole d&rsquo;&eacute;crivain est vaste puisque la parole, immat&eacute;rielle et &eacute;vanescente, s&rsquo;adapte &agrave; toutes les configurations sociabilitaires.</p> <p>Ces diff&eacute;rents espaces, aussi divers soient-ils, offrent un cadre privil&eacute;gi&eacute; &agrave; la parole de l&rsquo;&eacute;crivain. Leur existence et leur prolif&eacute;ration t&eacute;moignent de l&rsquo;importance de ces pratiques orales au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle ainsi que de leur richesse dans leur vari&eacute;t&eacute; de forme et de ton. Tous ces lieux forment l&rsquo;&eacute;cosyst&egrave;me symbolique de la vie litt&eacute;raire parisienne au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, et participent &agrave; l&rsquo;&eacute;laboration de son imaginaire.</p> <p><strong>Les voix litt&eacute;raires et leurs adresses : construction d&rsquo;imaginaire et processus de l&eacute;gitimation</strong></p> <p>La vie litt&eacute;raire du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle a ses adresses de pr&eacute;dilection. Certains endroits sont fr&eacute;quentables, d&rsquo;autres pas. Les r&eacute;putations de chacun de ces lieux varient d&rsquo;un groupe esth&eacute;tique, et surtout d&rsquo;un groupe social &agrave; l&rsquo;autre. Les processus de l&eacute;gitimation des &eacute;crivains sont ainsi &eacute;troitement li&eacute;s aux repr&eacute;sentations des espaces qu&rsquo;ils fr&eacute;quentent. L&rsquo;Acad&eacute;mie est probablement le plus l&eacute;gitim&eacute; des lieux de parole d&rsquo;&eacute;crivain. Son syst&egrave;me de cooptation savant en fait une citadelle tr&egrave;s difficile &agrave; prendre et ajoute &agrave; sa r&eacute;putation : jeunes &eacute;crivains et talents trop ind&eacute;pendants sont rapidement d&eacute;courag&eacute;s. Le salon mondain b&eacute;n&eacute;ficie de liens privil&eacute;gi&eacute;s avec l&rsquo;Acad&eacute;mie fran&ccedil;aise. Les auteurs de l&rsquo;<em>Histoire de la litt&eacute;rature fran&ccedil;aise du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>&nbsp;soulignent l&rsquo;entente qu&rsquo;il peut y avoir entre ces deux institutions :&nbsp;</p> <p><q>Une &eacute;lection dans une des cinq acad&eacute;mies, et a fortiori &agrave; l&rsquo;Acad&eacute;mie fran&ccedil;aise, est presque toujours le couronnement d&rsquo;une strat&eacute;gie &eacute;labor&eacute;e dans un salon. S&rsquo;ils ne constituent pas &agrave; proprement parler une institution, les salons sont n&eacute;anmoins un &eacute;l&eacute;ment essentiel de la sociabilit&eacute; intellectuelle et artistique du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle dont ils forment [&hellip;] &ldquo;l&rsquo;unit&eacute; de base<a href="#nbp_25" id="footnoteref25_6akm64b" name="lien_nbp_25" title=" Jean-Pierre Bertrand, Philippe Régnier, Alain Vaillant, Histoire de la littérature française du XIXe siècle, Paris, Nathan, 1998, p. 409.">25</a>&rdquo;.&nbsp;</q></p> <p>Ainsi, le salon par ses liens forts avec les institutions et son ancrage historique repr&eacute;sente un lieu strat&eacute;gique pour cr&eacute;er son r&eacute;seau et se cr&eacute;er une r&eacute;putation. &nbsp;&nbsp;&nbsp; &nbsp;</p> <p>Face &agrave; ce pouvoir, somme toute &eacute;crasant du salon et des institutions acad&eacute;miques, de nouvelles formes de sociabilit&eacute;s s&rsquo;organisent et ainsi de nouveaux lieux qui peuvent &ecirc;tre per&ccedil;us comme des &laquo; anti-salons &raquo; ou des &laquo; contre-acad&eacute;mies &raquo;. Au cabaret du Chat Noir, le personnel accueille le public par des &eacute;gards exag&eacute;r&eacute;s dans le traditionnel habit vert des acad&eacute;miciens pour caricaturer ces milieux &eacute;litistes et leur n&eacute;potisme. La libert&eacute; de ton et de forme est revendiqu&eacute;e dans ces lieux o&ugrave;, comme le rappelle &Eacute;mile Goudeau, seul le public juge les artistes, et non les critiques et journalistes &agrave; la mode<a href="#nbp_26" id="footnoteref26_ss41mi9" name="lien_nbp_26" title=" Émile Goudeau, « La coterie », dans la revue L’Hydropathe, n° 23, 10 décembre 1879, p. 2.">26</a>. Le c&eacute;nacle, tel que repr&eacute;sent&eacute; dans les&nbsp;<em>Illusions perdues</em>&nbsp;de Balzac par le c&eacute;nacle de Daniel d&rsquo;Arthez, cherche &agrave; proposer un mod&egrave;le plus sinc&egrave;re, o&ugrave; le travail r&eacute;el du texte prime sur les mondanit&eacute;s. Enfin, les mots de L&eacute;on Daudet en disent long sur ce que l&rsquo;on pense du salon au caf&eacute; :</p> <p><q>Le caf&eacute; est l&rsquo;&eacute;cole de la franchise et de la dr&ocirc;lerie spontan&eacute;e, tandis que le salon [&hellip;] est en g&eacute;n&eacute;ral l&rsquo;&eacute;cole du poncif et de la mode imb&eacute;cile. Le caf&eacute; nous a donn&eacute; l&rsquo;exquis Verlaine et le grand et pur Mor&eacute;as, les salons, R. de Montesquiou<a href="#nbp_27" id="footnoteref27_6dmyisl" name="lien_nbp_27" title=" Léon Daudet, « Souvenirs des milieux littéraires, politiques, artistiques et médicaux », dans Souvenirs et Polémiques, éd. B. Oudin, R. Laffont, coll. « Bouquins », p. 503.">27</a>.&nbsp;</q></p> <p>Toutefois, les habitu&eacute;s de chacun de ces lieux ont une commune ambition de se faire conna&icirc;tre et surtout de se faire publier. Le refrain de l&rsquo;hymne du Chat Noir est explicite : &laquo; Je cherche fortune autour du Chat Noir / Au clair de la lune &agrave; Montmartre le soir &raquo;. Les mots du st&eacute;nographe de la revue des Hydropathes qui fait le compte rendu d&rsquo;une des soir&eacute;es du cabaret, sont aussi explicites :</p> <p><q>Pour la po&eacute;sie : Taboureux, Lafitte, Raoul Fauvel, Martin ont dit les vers in&eacute;dits, qui ne demandent qu&rsquo;&agrave; &ecirc;tre &eacute;dits, apr&egrave;s avoir &eacute;t&eacute; dits. Oh !, je m&rsquo;arr&ecirc;te sur cette pente fatale, - et vite je signe. &nbsp;<br /> LE STENOGRAPHE<a href="#nbp_28" id="footnoteref28_3ra2yy0" name="lien_nbp_28" title=" Revue des Hydropathes, n°7, 20 avril 1879, p. 4.">28</a>.&nbsp;</q></p> <p>Les performances ont ainsi un caract&egrave;re strat&eacute;gique, quelque soit le lieu, salon ou cabaret, le but &eacute;tant de se faire une place dans le monde de la litt&eacute;rature. Une forme d&rsquo;&eacute;mulation est alors perceptible : on rivalise d&rsquo;ing&eacute;niosit&eacute; pour faire entendre sa voix, et par elle, son &oelig;uvre. Ces lieux deviennent, en quelque sorte, les laboratoires de la litt&eacute;rature. Le choix de la diction, le choix de la performance (lecture, discours, chansons, sketch, etc.), le choix d&rsquo;une mise en sc&egrave;ne, m&ecirc;me d&eacute;pouill&eacute;e, s&rsquo;av&egrave;rent r&eacute;v&eacute;lateurs du statut accord&eacute; &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre et d&eacute;montre la d&eacute;marche esth&eacute;tique de l&rsquo;auteur qui soigne ainsi son ethos. La diction neutre choisie par M&eacute;rim&eacute;e, loin des d&eacute;clamations jusqu&rsquo;ici de rigueur, pour lire son Cromwell dans la mansarde de Del&eacute;cluze marque les m&eacute;moires de son auditoire. Son &oelig;uvre est trop moderne pour &ecirc;tre lue dans la tradition d&eacute;clamatoire. Ainsi, les &eacute;crivains adoptent une posture et mettent en sc&egrave;ne leurs &oelig;uvres dans un double but de publicit&eacute; et d&rsquo;innovation esth&eacute;tique. Chaque lieu a son identit&eacute; propre et se construit par rapport &agrave; un autre. L&rsquo;inaccessibilit&eacute; de l&rsquo;acad&eacute;mie, du salon mais aussi de l&rsquo;&eacute;dition, conduit les artistes &agrave; organiser de nouvelles formes de sociabilit&eacute;s contestataires. Choisir de fr&eacute;quenter une forme de sociabilit&eacute; plut&ocirc;t qu&rsquo;une autre renseigne sur le milieu social de l&rsquo;&eacute;crivain, ses ambitions litt&eacute;raires et son esth&eacute;tique. Paris se fr&eacute;quente donc &agrave; la carte.</p> <p>Toutefois, malgr&eacute; les tensions et les oppositions entre ces diff&eacute;rents lieux de paroles, ces cat&eacute;gories ne sont pas imperm&eacute;ables et un homme de lettres au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle peut fr&eacute;quenter la m&ecirc;me semaine caf&eacute;s et salons mondains, cabarets et c&eacute;nacles. Charles Cros l&rsquo;illustre particuli&egrave;rement puisqu&rsquo;il fr&eacute;quentait tout aussi bien les Hydropathes ou le Chat noir que le salon de Nina Villard. La r&eacute;partition se joue en r&eacute;alit&eacute; &agrave; une &eacute;chelle plus fine : il s&rsquo;agit moins de choisir son camp que de choisir parmi chaque mod&egrave;le, quel type d&rsquo;&eacute;tablissement on veut fr&eacute;quenter.&nbsp;</p> <p>Beno&icirc;t Lecoq prend l&rsquo;exemple de Francisque Sarcey : &laquo; En jeune homme distingu&eacute; et d&eacute;j&agrave; mondain, Sarcey vise Momus ; il n&rsquo;oserait s&rsquo;en prendre &agrave; Tortoni<a href="#nbp_29" id="footnoteref29_y7ba6g3" name="lien_nbp_29" title=" Benoît Lecoq, « Le café », dans Pierre Nora (dir.), Les lieux de mémoire, t. III., Paris, Gallimard, 1992, p. 92.">29</a>&nbsp;&raquo;. Cette diff&eacute;rence de r&eacute;putation entre les &eacute;tablissements tient entre autre &agrave; leur emplacement g&eacute;ographique. Progressivement, Paris s&rsquo;est scind&eacute; en deux groupes antagonistes, symbolis&eacute;s par les deux rives. La rive droite est caract&eacute;ris&eacute;e par l&rsquo;acad&eacute;misme et le bon go&ucirc;t bourgeois, tandis que la rive gauche est associ&eacute;e &agrave; la boh&egrave;me. Dans les ann&eacute;es 1880 la g&eacute;ographie parisienne est assez nette : le Quartier latin, o&ugrave; les loyers sont plus accessibles, est le quartier de la boh&egrave;me qui loge dans ses mansardes et ses h&ocirc;tels garnis. On y trouve des caf&eacute;s populaires tels que la Brasserie Andler. Le confort y est restreint : bancs et tables en bois, bocks de bi&egrave;re. Ce type de caf&eacute; s&rsquo;oppose radicalement au mod&egrave;le du caf&eacute; des Grands Boulevards. Quartier o&ugrave; se concentrent les divertissements, les caf&eacute;s des Grands Boulevards offrent un d&eacute;cor qui se veut luxueux : dorures, marbrures, bronzes, colonnes lustres, sofas couverts de velours envahissent la plupart des &eacute;tablissements. Les fr&eacute;quentations varient selon le d&eacute;cor:</p> <p><q>Dans les caf&eacute;s du Boulevard, des hommes d&rsquo;&acirc;ge m&ucirc;r s&rsquo;inqui&egrave;tent de la prochaine &eacute;lection &agrave; l&rsquo;Acad&eacute;mie. Dans ceux du Quartier latin [&hellip;] la jeunesse &eacute;l&egrave;ve des statues aux &eacute;crivains qui n&rsquo;en ont pas et d&eacute;molit celles des auteurs consacr&eacute;s<a href="#nbp_30" id="footnoteref30_aklmyr9" name="lien_nbp_30" title=" Ibid.">30</a>.&nbsp;</q></p> <p>Montmartre repr&eacute;sente une troisi&egrave;me entit&eacute; et vient rompre ce dualisme rive gauche et rive droite. La butte Montmartre n&rsquo;est devenue parisienne qu&rsquo;en 1859. Par cette annexion tardive, le quartier a gard&eacute; une forme de pr&eacute;servation par rapport aux grands travaux d&rsquo;Haussmann. La butte est &eacute;rig&eacute;e en &laquo; ville libre &raquo; par les Montmartrois qui ont pour roi Rodolphe Salis, monarque autoproclam&eacute;. C&rsquo;est l&agrave; que prolif&egrave;rent les cabarets artistiques &agrave; mi-chemin entre un affranchissement esth&eacute;tique et une all&eacute;geance aux lois commerciales, qui r&eacute;gissent le monde des spectacles du Boulevard. D&rsquo;ailleurs, Montmartre d&eacute;borde sur le 9e arrondissement et le monde des boulevards. La cohabitation est parfois houleuse. L&rsquo;incompr&eacute;hension et l&rsquo;agacement de Philibert Audebrand le montre :</p> <p><q>Ceux qui s&rsquo;intitulaient les Jeunes et qui, pour la plupart, ne devaient pas vieillir, les novices du lendemain du 2 d&eacute;cembre, se montraient par moments au caf&eacute; de Robespierre. &laquo; Place aux Jeunes ! &raquo; s&rsquo;&eacute;tait &eacute;cri&eacute;e, un jour, je ne sais quelle feuille de chou &agrave; leur d&eacute;votion. Et qui les emp&ecirc;chait donc d&rsquo;avancer ? Qui leur volait l&rsquo;espace et le soleil ? Ils venaient r&ocirc;der autour de notre table, un peu pour nous voir, beaucoup pour nous railler. La Brasserie de la rue des Martyrs qui &eacute;tait quelque chose comme leur quartier g&eacute;n&eacute;ral, nous en d&eacute;putait, tous les soirs, une demi-douzaine. Ils apparaissaient, vidaient un moss, fumaient une pipe, lan&ccedil;aient au plafond deux ou trois brocards dans lesquels nous &eacute;tions trait&eacute;s de ganaches ou de Mathusalem, ce qui &eacute;tait &agrave; tr&egrave;s peu de chose pr&egrave;s le m&ecirc;me mot, puis ils sortaient bruyamment, et, cons&eacute;quemment, en r&eacute;p&eacute;tant leur sempiternel refrain : &quot;Place aux Jeunes<a href="#nbp_31" id="footnoteref31_0pt3x91" name="lien_nbp_31" title=" Philibert Audebrand, Un café de journalistes sous Napoléon III, Paris, Dentu, 1888, pp. 89-90.">31</a>&nbsp;!&quot;.</q></p> <p>On peut noter ici l&rsquo;efficacit&eacute; des toponymes qui font entendre &agrave; eux seuls les convictions de leurs habitu&eacute;s. Ainsi, les d&eacute;placements dans Paris sont dict&eacute;s par des repr&eacute;sentations symboliques des lieux. Le choix d&rsquo;aller dire ses po&egrave;mes &agrave; un endroit plut&ocirc;t qu&rsquo;un autre est un choix hautement significatif. Ces rivalit&eacute;s g&eacute;ographiques et institutionnelles influencent les pratiques litt&eacute;raires, confortent les amiti&eacute;s et les rivalit&eacute;s, et font r&eacute;sonner les paroles d&rsquo;&eacute;crivain dans la capitale.</p> <p><strong>***</strong></p> <p>Qu&rsquo;est-ce qui finalement regroupe tous ces lieux qui semblent, pour certains, antagonistes ? Est-ce le d&eacute;sir de se former ? Celui de se faire conna&icirc;tre ou de cr&eacute;er son r&eacute;seau ? Exister dans le champ litt&eacute;raire par la fr&eacute;quentation de ces espaces est effectivement un enjeu majeur de l&rsquo;artiste au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle.&nbsp;</p> <p>Mais ces lieux sont aussi, et peut-&ecirc;tre surtout, les espaces o&ugrave; la litt&eacute;rature se pense, se cr&eacute;e en acte, se vit. Sainte-Beuve l&rsquo;affirme :&nbsp;</p> <p><q>C&rsquo;est le seul moyen de se rendre la vie de Paris tol&eacute;rable que de se voir, de converser, de se lire entre soi ce qu&rsquo;on fait, de s&rsquo;&eacute;chauffer mutuellement, les plus faibles aux rayons des forts<a href="#nbp_32" id="footnoteref32_gdpjbwd" name="lien_nbp_32" title=" Lettre de Sainte-Beuve à Alphonse de Lamartine du 5 janvier 1829, dans Sainte-Beuve, Correspondance générale, t. I, éd. Jean Bonnerot, Paris, Stock, Delamain et Boutelleau, 1935, 1821-1835, p. 122.">32</a>.&nbsp;</q></p> <p>Le plaisir, voire la n&eacute;cessit&eacute; de se former au contact des autres &eacute;crivains par ces paroles vives, voil&agrave; le v&eacute;ritable point commun des salons, c&eacute;nacles, cabarets, caf&eacute;s et autres lieux de parole.&nbsp;</p> <p>Ainsi, de la butte Montmartre, au Quartier latin, en passant par les Grand Boulevards, Paris chante, converse, r&eacute;cite des vers et offre une sc&egrave;ne privil&eacute;gi&eacute;e &agrave; la parole vive. Ces lieux sont autant de choix de positionnement de l&rsquo;artiste dans le champ litt&eacute;raire de l&rsquo;&eacute;poque, il y d&eacute;veloppe non seulement son &oelig;uvre mais aussi sa posture et m&eacute;diatise sa cr&eacute;ation dans un geste symbolique et strat&eacute;gique renouvelant ainsi la figure de l&rsquo;auteur en auteur-interpr&egrave;te.</p> <hr /> <p><strong>BIBLIOGRAPHIE</strong></p> <p>BERTRAND, Jean-Pierre, Philippe R&Eacute;GNIER et Alain VAILLANT,&nbsp;<em>Histoire de la litt&eacute;rature fran&ccedil;aise du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>, Paris, Nathan, 1998.</p> <p>BRISSETTE, Pascal et Will Straw,&nbsp;<em>Po&egrave;tes et po&eacute;sie en voix au Qu&eacute;bec (XX-XXI<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle)</em>, Voix et Images, vol. 40, 2015, p. 7-13.</p> <p>CHARLE, Christophe, &laquo; Le Coll&egrave;ge de France &raquo;, dans Pierre Nora (dir.),&nbsp;<em>Les Lieux de m&eacute;moire</em>, Paris, Gallimard, 1992, t. III, p. 1983-2008.</p> <p>DESSY, Cl&eacute;ment, Julie F&Auml;CKER et Denis SAINT-AMAND (dir.), Les lieux litt&eacute;raires et artistiques. XVIII-XXI<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle,&nbsp;<em>COnTEXTES</em>, n&deg; 19, 2017, [En ligne]&nbsp;<a href="https://journals.openedition.org/contextes/6288">https://journals.openedition.org/contextes/6288</a>&nbsp;(site consult&eacute; le 23.10.2019).</p> <p>DURAND, Pascal,&nbsp;<em>M&eacute;diamorphoses. Presse, litt&eacute;rature et m&eacute;dias, culture m&eacute;diatique et communication</em>, Li&egrave;ge, Presses Universitaires de Li&egrave;ge, 2019, 333 p.</p> <p>GLINOER, Anthony et Vincent LAISNEY,&nbsp;<em>L&rsquo;&Acirc;ge des c&eacute;nacles. Confraternit&eacute;s litt&eacute;raires et artistiques au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>, &nbsp;Paris, Fayard, 2013, 706 p.&nbsp;</p> <p>&nbsp;&ndash;, &laquo; Le c&eacute;nacle &agrave; l&rsquo;&eacute;preuve du roman &raquo;, dans Michel LACROIX, Guillaume PINSON (dir.), Sociabilit&eacute;s imagin&eacute;es : repr&eacute;sentations et enjeux sociaux,&nbsp;<em>Tangence</em>, n&deg; 80, 2006.</p> <p>HEINICH, Nathalie,&nbsp;<em>De la visibilit&eacute;. Excellence et singularit&eacute; en r&eacute;gime m&eacute;diatique</em>, Paris, Gallimard, &laquo; Biblioth&egrave;que des Sciences humaines &raquo;, 2012.</p> <p>HIRSCHI, St&eacute;phane, &Eacute;lisabeth PILLET et Alain VAILLANT (dir),&nbsp;<em>L&rsquo;Art de la parole vive. Paroles chant&eacute;es et paroles dites &agrave; l&rsquo;&eacute;poque moderne</em>, Valenciennes, Presses universitaires de Valenciennes, coll. &laquo; Recherches Valenciennoises &raquo;, n&deg; 21, 2006.</p> <p>KALIFA, Dominique,&nbsp;<em>La Culture de masse en France,1860-1930</em>, t. I, Paris, La D&eacute;couverte, coll. &laquo; Rep&egrave;res &raquo;, 2001.</p> <p>LAISNEY, Vincent,&nbsp;<em>En lisant, en &eacute;coutant. Lectures en petit comit&eacute; de Hugo &agrave; Mallarm&eacute;</em>, Paris, Les Impressions nouvelles, 2017.</p> <p>LECOQ, Beno&icirc;t, &laquo; Le caf&eacute; &raquo;, dans Pierre Nora (dir.),&nbsp;<em>Les Lieux de m&eacute;moire</em>, t. III, Paris, Gallimard, 1992.</p> <p>NORA, Olivier, &laquo; La visite au grand &eacute;crivain &raquo;, dans Pierre NORA (dir.),&nbsp;<em>Les Lieux de m&eacute;moire. La nation</em>, t. II, Paris, Gallimard, coll. &laquo; Biblioth&egrave;que illustr&eacute;e des histoires &raquo;, 1986, pp. 563-587.</p> <p>R&Eacute;GNIER, Marie-Cl&eacute;mence, &laquo; Le spectacle de l&rsquo;homme de lettres au quotidien : de l&rsquo;int&eacute;rieur bourgeois &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur artiste (1840-1903) &raquo;,&nbsp;<em>Romantisme</em>, 2015/2, n&deg; 168, pp. 71-80.</p> <p>SAINT-AMAND, Denis (dir.),&nbsp;<em>La Dynamique des groupes litt&eacute;raires</em>, Li&egrave;ge, Presses Universitaires de Li&egrave;ge, coll. &laquo; Situations &raquo;, 2016.</p> <p>&nbsp;</p> <p><a href="#lien_nbp_1" name="nbp_1">1</a>&nbsp;Rainer Maria Rilke,<em>&nbsp;Notes sur la m&eacute;lodie des choses</em>, 1898, Paris, Allia, 2008, p.&nbsp;27.</p> <p><a href="#lien_nbp_2" name="nbp_2">2</a>&nbsp;Voir Vincent Laisney,&nbsp;<em>En lisant, en &eacute;coutant. Lectures en petit comit&eacute; de Hugo &agrave; Mallarm&eacute;</em>, Paris, Les Impressions nouvelles, 2017.</p> <p><a href="#lien_nbp_3" name="nbp_3">3</a>&nbsp;Voir Cl&eacute;ment Dessy, Julie F&auml;cker et Denis Saint-Amand (dir.),&nbsp;<em>Les lieux litt&eacute;raires et artistiques. XVIII-XXI<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle,&nbsp;</em>COnTEXTE, n&deg;&nbsp;19, 2017, [En ligne]&nbsp;<a href="https://journals.openedition.org/contextes/6288">https://journals.openedition.org/contextes/6288</a>&nbsp;(site consult&eacute; le 23.10.2019).</p> <p><a href="#lien_nbp_4" name="nbp_4">4</a>&nbsp;Vincent Laisney,&nbsp;<em>En lisant, en &eacute;coutant</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;20-21.</p> <p><a href="#lien_nbp_5" name="nbp_5">5</a>&nbsp;Dominique Kalifa,&nbsp;<em>La Culture de masse en France</em>,&nbsp;<em>1860-1930</em>, t.&nbsp;I, Paris, La D&eacute;couverte, coll.&nbsp;&laquo;&nbsp;Rep&egrave;res&nbsp;&raquo;, 2001.</p> <p><a href="#lien_nbp_6" name="nbp_6">6</a>&nbsp;Voir Pascal Durand,&nbsp;<em>M&eacute;diamorphoses. Presse, litt&eacute;rature et m&eacute;dias, culture m&eacute;diatique et communication</em>, Li&egrave;ge, Presses Universitaires de Li&egrave;ge, 2019.</p> <p><a href="#lien_nbp_7" name="nbp_7">7</a>&nbsp;Voir Nathalie Heinich,&nbsp;<em>De la visibilit&eacute;. Excellence et singularit&eacute; en r&eacute;gime m&eacute;diatique</em>, Paris, Gallimard, &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que des Sciences humaines&nbsp;&raquo;, 2012.</p> <p><a href="#lien_nbp_8" name="nbp_8">8</a>&nbsp;Lettre de G&eacute;rard de Nerval &agrave; Sainte-Beuve, cit&eacute;e par Vincent Laisney, dans&nbsp;<em>En lisant en &eacute;coutant</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;35.</p> <p><a href="#lien_nbp_9" name="nbp_9">9</a>&nbsp;Paul de Musset,&nbsp;<em>Ibid.</em>, p.&nbsp;48.</p> <p><a href="#lien_nbp_10" name="nbp_10">10</a>&nbsp;Anthony Glinoer et Vincent Laisney, &laquo;&nbsp;Le c&eacute;nacle &agrave; l&rsquo;&eacute;preuve du roman&nbsp;&raquo;, dans Michel Lacroix et Guillaume Pinson (dir.),&nbsp;<em>Sociabilit&eacute;s imagin&eacute;es&nbsp;: repr&eacute;sentations et enjeux sociaux</em>,&nbsp;<em>Tangence</em>, n&deg;&nbsp;80, 2006, p.&nbsp;25.</p> <p><a href="#lien_nbp_11" name="nbp_11">11</a>&nbsp;Camille Mauclair,&nbsp;<em>Le Soleil des morts</em>, Paris, Ollendorff, 1898, p.&nbsp;879.</p> <p><a href="#lien_nbp_12" name="nbp_12">12</a>&nbsp;Voir Denis Saint-Amand (dir.),&nbsp;<em>La Dynamique des groupes litt&eacute;raires</em>, Li&egrave;ge, Presses Universitaires de Li&egrave;ge, coll.&nbsp;&laquo;&nbsp;Situations&nbsp;&raquo;, 2016.</p> <p><a href="#lien_nbp_13" name="nbp_13">13</a>&nbsp;Voir Olivier Nora, &laquo;&nbsp;La visite au grand &eacute;crivain&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>Les lieux de m&eacute;moire. La nation</em>, t.&nbsp;II, Pierre Nora (dir.), Paris, Gallimard, coll.&nbsp;&laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que illustr&eacute;e des histoires&nbsp;&raquo;, 1986, pp.&nbsp;563-587.</p> <p><a href="#lien_nbp_14" name="nbp_14">14</a>&nbsp;Voir Th&eacute;ophile Gautier, &laquo;&nbsp;Vente du mobilier de Victor Hugo&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>La Presse</em>, 7&nbsp;juin 1852, repris dans&nbsp;<em>Histoire du romantisme</em>, Paris, Charpentier, 1874, p.&nbsp;126-133.</p> <p><a href="#lien_nbp_15" name="nbp_15">15</a>&nbsp;Voir Marie-Cl&eacute;mence R&eacute;gnier, &laquo;&nbsp;Le spectacle de l&rsquo;homme de lettres au quotidien&nbsp;: de l&rsquo;int&eacute;rieur bourgeois &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur artiste (1840-1903)&nbsp;&raquo;,&nbsp;<i>Romantisme</i>, 2015/2, n&deg;&nbsp;168, p.&nbsp;71-80.</p> <p><a href="#lien_nbp_16" name="nbp_16">16</a>&nbsp;Voir Anthony Glinoer et Vincent Laisney,&nbsp;<em>L&rsquo;&Acirc;ge des c&eacute;nacles. Confraternit&eacute;s litt&eacute;raires et artistiques au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>, Paris, Fayard, 2013, 706&nbsp;p.</p> <p><a href="#lien_nbp_17" name="nbp_17">17</a>&nbsp;On pense particuli&egrave;rement &agrave; la surprise des auditeurs de la mansarde d&rsquo;&Eacute;tienne-Jean Del&eacute;cluze, habitu&eacute;s &agrave; l&rsquo;art d&eacute;clamatoire, &agrave; l&rsquo;&eacute;coute de la voix blanche et neutre de M&eacute;rim&eacute;e&nbsp;: &laquo;&nbsp;&Agrave; peine eut-il commenc&eacute; la lecture de son drame, que les inflexions de sa voix gutturale et le ton dont il r&eacute;cita parurent &eacute;tranges &agrave; l&rsquo;auditoire. [&hellip;] N&rsquo;observant [&hellip;] plus que les repos strictement indiqu&eacute;s par la coupe des phrases, mais sans &eacute;lever ni baisser jamais le ton, il lut ainsi tout son drame sans modifier ses accents, m&ecirc;me aux endroits les plus passionn&eacute;s&nbsp;&raquo;, dans &Eacute;tienne-Jean Del&eacute;cluze,&nbsp;<i>Souvenirs de soixante ann&eacute;es</i>, Paris, Michel L&eacute;vy, 1862, p.&nbsp;223.</p> <p><a href="#lien_nbp_18" name="nbp_18">18</a>&nbsp;Voir Alfred Franklin,&nbsp;<em>Dictionnaire historique des arts, m&eacute;tiers et professions exerc&eacute;es dans Paris depuis le XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</em>, Paris-Leipzig, H. Welter &eacute;d., 1906.</p> <p><a href="#lien_nbp_19" name="nbp_19">19</a>&nbsp;&Eacute;mile Goudeau,&nbsp;<em>Dix ans de boh&egrave;me</em>, Paris, La Librairie illustr&eacute;e, 1888, p.&nbsp;150.</p> <p><a href="#lien_nbp_20" name="nbp_20">20</a>&nbsp;Il continuera &agrave; exister de fa&ccedil;on &eacute;ph&eacute;m&egrave;re en 1884.</p> <p><a href="#lien_nbp_21" name="nbp_21">21</a>&nbsp;Voir pour la d&eacute;finition de l&rsquo;&eacute;crivain &laquo;&nbsp;en voix&nbsp;&raquo; Pascal Brissette et Will Straw,&nbsp;<em>Po&egrave;tes et po&eacute;sie en voix au Qu&eacute;bec (XX-XXI<sup>e&nbsp;</sup>si&egrave;cle)</em>,&nbsp;<em>Voix et Images</em>, vol.&nbsp;40, 2015, p.&nbsp;7-13.</p> <p><a href="#lien_nbp_22" name="nbp_22">22</a>&nbsp;Voir la carte interactive des caf&eacute;s-concerts et des music-halls des ann&eacute;es 1870 &agrave; 1945 [En ligne]&nbsp;<a href="http://www.dutempsdescerisesauxfeuillesmortes.net/textes_divers/cafes_concerts_et_music_halls/cafes_concerts_et_music_halls_plan.htm">http://www.dutempsdescerisesauxfeuillesmortes.net/textes_divers/cafes_concerts_et_music_halls/cafes_concerts_et_music_halls_plan.htm</a>&nbsp;(site consult&eacute; le 23.10.2019).</p> <p><a href="#lien_nbp_23" name="nbp_23">23</a>&nbsp;Christophe Charle, &laquo;&nbsp;Le Coll&egrave;ge de France&nbsp;&raquo;, dans Pierre Nora (dir.),&nbsp;<em>Les lieux de m&eacute;moire</em>, Paris, Gallimard, 1992, t.&nbsp;III, p.&nbsp;1983-2008.</p> <p><a href="#lien_nbp_24" name="nbp_24">24</a>&nbsp;Voir St&eacute;phane Hirschi, &Eacute;lisabeth Pillet et Alain Vaillant (dir),&nbsp;<em>L&rsquo;Art de la parole vive. Paroles chant&eacute;es et paroles dites &agrave; l&rsquo;&eacute;poque moderne</em>, Valenciennes, Presses universitaires de Valenciennes, coll.&nbsp;&laquo;&nbsp;Recherches Valenciennoises&nbsp;&raquo;, n&deg;&nbsp;21, 2006, p.&nbsp;8.</p> <p><a href="#lien_nbp_25" name="nbp_25">25</a>&nbsp;Jean-Pierre Bertrand, Philippe R&eacute;gnier, Alain Vaillant,&nbsp;<i>Histoire de la litt&eacute;rature fran&ccedil;aise du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle</i>, Paris, Nathan, 1998, p.&nbsp;409.</p> <p><a href="#lien_nbp_26" name="nbp_26">26</a>&nbsp;&Eacute;mile Goudeau, &laquo;&nbsp;La coterie&nbsp;&raquo;, dans la revue&nbsp;<i>L&rsquo;Hydropathe</i>, n&deg;&nbsp;23, 10 d&eacute;cembre 1879, p.&nbsp;2.</p> <p><a href="#lien_nbp_27" name="nbp_27">27</a>&nbsp;L&eacute;on Daudet, &laquo;&nbsp;Souvenirs des milieux litt&eacute;raires, politiques, artistiques et m&eacute;dicaux&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<i>Souvenirs et Pol&eacute;miques</i>, &eacute;d. B. Oudin, R. Laffont, coll.&nbsp;&laquo;&nbsp;Bouquins&nbsp;&raquo;, p.&nbsp;503.</p> <p><a href="#lien_nbp_28" name="nbp_28">28</a>&nbsp;Revue des&nbsp;<em>Hydropathes</em>, n&deg;7, 20 avril 1879, p.&nbsp;4.</p> <p><a href="#lien_nbp_29" name="nbp_29">29</a>&nbsp;Beno&icirc;t Lecoq, &laquo;&nbsp;Le caf&eacute;&nbsp;&raquo;, dans Pierre Nora (dir.),&nbsp;<i>Les lieux de m&eacute;moire</i>, t.&nbsp;III., Paris, Gallimard, 1992, p.&nbsp;92.</p> <p><a href="#lien_nbp_30" name="nbp_30">30</a>&nbsp;<i>Ibid.</i></p> <p><a href="#lien_nbp_31" name="nbp_31">31</a>&nbsp;Philibert Audebrand,&nbsp;<em>Un caf&eacute; de journalistes sous Napol&eacute;on III</em>, Paris, Dentu, 1888, pp.&nbsp;89-90.</p> <p><a href="#lien_nbp_32" name="nbp_32">32</a>&nbsp;Lettre de Sainte-Beuve &agrave; Alphonse de Lamartine du 5 janvier 1829, dans Sainte-Beuve,&nbsp;<em>Correspondance g&eacute;n&eacute;rale</em>, t.&nbsp;I, &eacute;d. Jean Bonnerot, Paris, Stock, Delamain et Boutelleau, 1935, 1821-1835, p.&nbsp;122.</p>