<h2 style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:center"><strong><span style="color:#16a085"><span style="background-color:null">La relationnalit&eacute; comme ouverture potentielle, &agrave; la mesure de la normativit&eacute;</span></span></strong></h2> <h3 style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:center"><strong><span style="background-color:null">Valentine Prouvez*</span></strong></h3> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <h3 style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><strong><span style="background-color:null">Introduction</span></strong></span></h3> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">En r&eacute;digeant les &laquo;&nbsp;Actuelles sur la guerre et la mort</span><a href="#_edn1" name="_ednref1" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[1]</span></span></a><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;, Freud s&rsquo;interrogeait sur les causes du rel&acirc;chement des dispositions morales des individus et des institutions sociales en temps de guerre&nbsp;: &laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">Il nous semble que jamais un &eacute;v&eacute;nement n&rsquo;a d&eacute;truit autant de patrimoine pr&eacute;cieux, commun &agrave; l&rsquo;humanit&eacute;, n&rsquo;a port&eacute; un tel trouble dans les intelligences les plus claires, n&rsquo;a aussi profond&eacute;ment abaiss&eacute; ce qui &eacute;tait &eacute;lev&eacute;</span></em><a href="#_edn2" name="_ednref2" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[2]</span></span></a><span style="background-color:null">.&nbsp;&raquo; La guerre donne &agrave; voir l&rsquo;&eacute;go&iuml;sme, le penchant &agrave; la destruction, et jusqu&rsquo;au plaisir de voir souffrir l&rsquo;autre (</span><em><span style="background-color:null">Schadenfreude</span></em><span style="background-color:null">) ordinairement dissimul&eacute;s derri&egrave;re les apparences de la moralit&eacute;. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Durant la guerre, les &Eacute;tats eux-m&ecirc;mes ont montr&eacute; le peu de valeur qu&rsquo;ils accordaient &agrave; ces valeurs morales dans leurs prises de d&eacute;cision. Si le rel&acirc;chement des cadres institutionnels, de la surveillance et de la contrainte produit un d&eacute;ferlement des tendances asociales, il y a lieu de s&rsquo;interroger sur les fondements de ce que nous appelons notre &laquo;&nbsp;humanit&eacute;&nbsp;&raquo;&nbsp;: ce pr&eacute;tendu changement de nature, produit du travail de culture, est-il fondamentalement autre chose qu&rsquo;une illusion&nbsp;? Pour Freud, &laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">Il y a ainsi incomparablement plus d&rsquo;hypocrites de la culture que d&rsquo;hommes effectivement culturels. </span></em><span style="background-color:null">[&hellip;] </span><em><span style="background-color:null">&nbsp;En r&eacute;alit&eacute; ils ne sont pas tomb&eacute;s aussi bas que nous le redoutions, parce qu&rsquo;ils ne s&rsquo;&eacute;taient absolument pas &eacute;lev&eacute;s aussi haut que nous l&rsquo;avions pens&eacute; d&rsquo;eux</span></em><a href="#_edn3" name="_ednref3" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[3]</span></span></a><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">La domestication de nos pulsions archa&iuml;ques &ndash; agressives et &eacute;go&iuml;stes &ndash; et notre int&eacute;gration des valeurs culturelles (sociales, morales) auraient &eacute;t&eacute; tr&egrave;s largement surestim&eacute;es. La crise a r&eacute;v&eacute;l&eacute; la persistance de cette &laquo;&nbsp;barbarie&nbsp;&raquo;, voil&eacute;e par un discours de partage et de moralit&eacute;. Selon l&rsquo;analyse de Freud, pour la plupart des individus, le privil&egrave;ge accord&eacute; aux &laquo;&nbsp;bonnes&nbsp;&raquo; valeurs culturelles, sociales, sur leurs aspirations &eacute;go&iuml;stes ne tiendrait qu&rsquo;&agrave; l&rsquo;angoisse devant une autorit&eacute; externe et &agrave; la crainte d&rsquo;une sanction sociale.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">&Agrave; toutes les &eacute;poques, nombreux sont ceux qui, comme Freud, se sont pos&eacute; la question de la nature r&eacute;elle de notre &laquo;&nbsp;humanit&eacute;&nbsp;&raquo;. Au regard de l&rsquo;Histoire, mais aussi de nos observations ordinaires, peut-on raisonnablement pr&eacute;juger de l&rsquo;universalit&eacute; de ces dispositions altruistes, empathiques, morales que nous appelons &laquo;&nbsp;&ecirc;tre humain&nbsp;&raquo;&nbsp;? L&rsquo;existence humaine peut si facilement basculer dans l&rsquo;inhumanit&eacute; &ndash; par cruaut&eacute;, par peur, ou simplement par inconscience des implications de ses actes &ndash; que nous h&eacute;sitons &agrave; pr&ecirc;ter &agrave; l&rsquo;homme le plus ordinaire ces traits &laquo;&nbsp;d&rsquo;humanit&eacute;&nbsp;&raquo;.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Comment interpr&eacute;ter ce ph&eacute;nom&egrave;ne&nbsp;de subversion des valeurs morales, de la solidarit&eacute; interindividuelle, des rapports sociaux qui se produit si fr&eacute;quemment dans les situations de crise&nbsp;? C&rsquo;est une question qui est souvent revenue dans ma pratique d&rsquo;&eacute;ducatrice sp&eacute;cialis&eacute;e, particuli&egrave;rement dans le secteur de &laquo;&nbsp;l&rsquo;urgence sociale&nbsp;&raquo;, dans le dispositif des Centres d&rsquo;H&eacute;bergement et de R&eacute;insertion Sociale (CHRS). Le partage du quotidien avec des personnes en situation de grande pr&eacute;carit&eacute;, et/ ou d&rsquo;exclusion sociale, et dans diff&eacute;rentes institutions du secteur montpelli&eacute;rain, m&rsquo;ont amen&eacute;e &agrave; appr&eacute;hender cette question dans sa complexit&eacute;. C&rsquo;est une r&eacute;flexion d&eacute;rangeante, parce qu&rsquo;elle s&rsquo;attache &agrave; d&eacute;construire des repr&eacute;sentations, des illusions qui sont pour nous fondamentales. Face au spectacle de la violence, du plaisir &eacute;prouv&eacute; dans la destruction de l&rsquo;autre, le plus difficile est probablement de ne pas rejeter les ph&eacute;nom&egrave;nes que nous observons dans le champ de &laquo;&nbsp;l&rsquo;inhumanit&eacute;&nbsp;&raquo;, c&rsquo;est-&agrave;-dire de la monstruosit&eacute;, du radicalement &laquo;&nbsp;autre&nbsp;&raquo;. Il est bien difficile d&rsquo;appr&eacute;hender ces tendances asociales ou destructives comme un possible &laquo;&nbsp;universel&nbsp;&raquo;, ou comme les effets pathologiques d&rsquo;un ph&eacute;nom&egrave;ne de d&eacute;fense &laquo;&nbsp;normal&nbsp;&raquo; impuls&eacute; par des angoisses ontologiques. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">N&eacute; du &laquo;&nbsp;terrain&nbsp;&raquo; de l&rsquo;&eacute;ducation sp&eacute;cialis&eacute;e, ce questionnement se poursuit aujourd&rsquo;hui pour moi dans le cadre d&rsquo;une th&egrave;se en &laquo;&nbsp;&Eacute;tudes psychanalytiques&nbsp;&raquo; (&agrave; l&rsquo;Universit&eacute; Paul-Val&eacute;ry Montpellier III). L&rsquo;objet qui nous est propos&eacute; pour ces deux journ&eacute;es de r&eacute;flexion interdisciplinaire &ndash; &laquo;&nbsp;la relationnalit&eacute; &agrave; l&rsquo;aune de la vuln&eacute;rabilit&eacute;&nbsp;&raquo; &ndash; me permet de partager certaines des interrogations qui sont n&eacute;es de cette recherche, dans une articulation entre psychanalyse et philosophie. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Je proposerai ici d&rsquo;introduire une r&eacute;flexion sur les fluctuations &laquo;&nbsp;normales&nbsp;&raquo; de notre ouverture &agrave; l&rsquo;autre (de notre &laquo;&nbsp;relationnalit&eacute;&nbsp;&raquo;), en fonction des repr&eacute;sentations que nous avons simultan&eacute;ment des exigences d&rsquo;une situation, et de notre capacit&eacute; &agrave; nous y adapter&nbsp;; c&rsquo;est-&agrave;-dire de notre puissance, ou au contraire de notre vuln&eacute;rabilit&eacute; normative. Nous approcherons cette question &agrave; partir du t&eacute;moignage de personnes accompagn&eacute;es dans certains dispositifs d&rsquo;accueil ou d&rsquo;h&eacute;bergement d&rsquo;urgence, et &agrave; la lumi&egrave;re des travaux de Sigmund Freud et de Georges Canguilhem. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <h3 style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">1. Le repli individualiste et les tendances &laquo; asociales&nbsp;&raquo; en situation de crise</span></span></strong></h3> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Les Centres d&rsquo;H&eacute;bergement et de R&eacute;insertion Sociale sont r&eacute;gis principalement par la loi contre les exclusions du 28/07/1998 et financ&eacute;s par l&rsquo;&Eacute;tat. Pr&eacute;vus au d&eacute;part pour h&eacute;berger les vagabonds et les lib&eacute;r&eacute;s de prison, ils ont &eacute;t&eacute; amen&eacute;s peu &agrave; peu &agrave; &eacute;largir leurs missions d&rsquo;accueil. La loi de 1975 pr&eacute;voit l&rsquo;acc&egrave;s au CHRS</span><em><span style="background-color:null"> &laquo; aux personnes et aux familles qui connaissent de graves difficult&eacute;s, notamment &eacute;conomiques, familiales, de logement, de sant&eacute; ou d&rsquo;insertion, et qui ont besoin d&rsquo;un soutien mat&eacute;riel et psychologique, en vue de les aider &agrave; acc&eacute;der ou &agrave; recouvrer leur autonomie personnelle et sociale</span></em><a href="#_edn4" name="_ednref4" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[4]</span></span></a><em><span style="background-color:null">&nbsp;</span></em><span style="background-color:null">&raquo;. Le CHRS communautaire dispose d&rsquo;une vingtaine de places d&rsquo;h&eacute;bergement, la plupart en chambres simples, et propose un projet d&rsquo;accompagnement orient&eacute; par des valeurs militantes : accueil, partage, solidarit&eacute;, faire et vivre ensemble. Le projet pr&eacute;voit l&rsquo;implication des usagers du lieu et de l&rsquo;&eacute;quipe professionnelle dans des actions dites &laquo;&nbsp;citoyennes&nbsp;&raquo;, soutenant la visibilit&eacute; sociale et la prise de parole des &laquo;&nbsp;exclus&nbsp;&raquo;.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Nous avons pu observer la complexit&eacute; qu&rsquo;il y a &agrave; soutenir un tel projet dans l&rsquo;accompagnement de personnes en situation de grande vuln&eacute;rabilit&eacute;, &agrave; un moment critique de leur parcours de vie : des personnes en situation transitoire, plong&eacute;es pour la plupart dans l&rsquo;incertitude et l&rsquo;angoisse quant &agrave; ce qui arrivera &laquo;&nbsp;apr&egrave;s&nbsp;&raquo;. Ce sentiment d&rsquo;ins&eacute;curit&eacute; existentielle est renforc&eacute; par le climat de tension qui r&egrave;gne dans ces institutions&nbsp;: la crise ou le conflit y semblent toujours latents, en attente d&rsquo;une situation favorable pour &eacute;clater. Les discours mena&ccedil;ants, l&rsquo;agressivit&eacute;, la violence sont pr&eacute;sents dans le quotidien d&rsquo;un CHRS, et la pr&eacute;sence des &eacute;quipes sur le &laquo;&nbsp;terrain&nbsp;&raquo; suffit souvent &agrave; peine &agrave; les contenir. &laquo;&nbsp;Faire la police&nbsp;&raquo;, d&eacute;samorcer les conflits entre les usagers, font partie des missions premi&egrave;res dans le quotidien d&rsquo;un &eacute;ducateur en CHRS et sont essentielles &agrave; son fonctionnement&nbsp;: de nombreuses personnes h&eacute;berg&eacute;es au CHRS &eacute;vitaient ainsi de se d&eacute;placer dans la maison et de rencontrer les autres usagers lorsque les salari&eacute;s &eacute;taient absents.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">De nombreux t&eacute;moignages</span><a href="#_edn5" name="_ednref5" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[5]</span></span></a><span style="background-color:null"> exposent cette situation&nbsp;:</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">&laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">Il vaut mieux que dans un truc comme &ccedil;a il y ait des &eacute;ducateurs, vaut mieux. Attends, tu imagines si y a personne ? D&eacute;j&agrave; le mardi quand vous &ecirc;tes en r&eacute;union c&rsquo;est </span></em><em><span style="background-color:null">&ldquo;le chat n&rsquo;est pas l&agrave; les souris dansent</span></em><em><span style="background-color:null">&rdquo;, alors imagine-toi, ce serait un truc de ouf. L&rsquo;&eacute;duc a un r&ocirc;le important dans le sens o&ugrave; c&rsquo;est difficile &agrave; g&eacute;rer. Je dirais m&ecirc;me &agrave; la limite pour le salari&eacute;, je sais pas s&rsquo;ils les ont, mais il faut une prime de risques, on va dire, parce qu&rsquo;excuse-moi, c&rsquo;est quand m&ecirc;me pas trop rassurant non plus quand tu vois que les r&eacute;sidents se font agresser pour un oui pour un non, c&rsquo;est&hellip; jour et nuit ici en fait.</span></em><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">&laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">C&rsquo;est inimaginable. On est expos&eacute;s &agrave; plus de probl&eacute;matiques ici, on est expos&eacute;s &agrave; davantage de probl&egrave;mes. J&rsquo;en ai parl&eacute; avec une salari&eacute;e, elle m&rsquo;a dit de rester ici, que c&rsquo;&eacute;tait mieux pour moi mais &agrave; ce moment j&rsquo;en avais marre, je voulais retourner &agrave; la rue.&nbsp;</span></em><span style="background-color:null">&raquo; </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">&laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">Les r&eacute;sidents &ccedil;a craint. Ah ouais &ccedil;a craint c&rsquo;est un truc de malade. C&rsquo;est les favelas ici. C&rsquo;est un truc de malade c&rsquo;est&hellip; Mais &ccedil;a craint, &ccedil;a craint. Dans tous les sens du terme c&rsquo;est&hellip; Moi &ccedil;a me traumatise, crois pas. Moi des fois je p&egrave;te un plomb, ah ouais. Des fois je suis dans ma chambre, je pleure, &ccedil;a craint. Quand d&rsquo;autres r&eacute;sidents insultent une personne sur un truc de sa vie qui lui est arriv&eacute; gravement tu vois, ici ils attendent que &ccedil;a clashe et ils arr&ecirc;tent pas les gens. Ici il y a un manque de respect, il y en a ils sont bizarres, ici. On ne se parle pas. De toutes fa&ccedil;ons, ils peuvent penser ce qu&rsquo;ils veulent, je m&rsquo;en fous. Je sais comment c&rsquo;est les &ecirc;tres humains entre eux, et &ccedil;a clashe toujours. Je sais comment c&rsquo;est les gens, comment ils parlent. Ils doivent avoir des probl&egrave;mes, quand ils souffrent et tout&hellip; Mais j&rsquo;accepte pas qu&rsquo;ils mettent leur rage sur moi. Je sais que &ccedil;a fait longtemps que je suis ici et que je gal&egrave;re trop, tout &ccedil;a, mais putain&hellip;</span></em><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Les plaintes relatives aux insultes, menaces, vols, &agrave; des situations de violence sont continuelles dans le quotidien d&rsquo;un CHRS. Il est cependant surprenant de constater que ceux qui souffrent de ce climat d&rsquo;ins&eacute;curit&eacute; contribuent aussi, paradoxalement, &agrave; le renforcer par leurs comportements. Il est difficile d&rsquo;interpr&eacute;ter cette tendance parfois extr&ecirc;me &agrave; l&rsquo;&eacute;go&iuml;sme, ce rejet des autres lorsqu&rsquo;ils se manifestent chez des personnes qui ont &eacute;t&eacute;, et qui sont encore, elles-m&ecirc;mes victimes de l&rsquo;indiff&eacute;rence ou du m&eacute;pris individualiste et de la violence sociale. Ces personnes connaissent et peuvent &eacute;prouver par empathie la souffrance et les angoisses qui d&eacute;coulent de ces comportements asociaux. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Ce constat nous dispose effectivement &agrave; penser que nos dispositions altruistes, &laquo;&nbsp;humaines&nbsp;&raquo;, ne seraient pas si solidement ancr&eacute;es dans notre nature. Que les situations de crise - pr&eacute;cis&eacute;ment celles dans lesquelles nous devrions pouvoir compter sur ces valeurs de solidarit&eacute; - nous ram&egrave;neraient tendanciellement &agrave; l&rsquo;&eacute;tat de nature&nbsp;: individualisme, agressivit&eacute;, jouissance destructive. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <h3 style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">2. Vuln&eacute;rabilit&eacute; et r&eacute;affirmation des valeurs de solidarit&eacute;</span></span></strong></h3> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Je pr&eacute;senterai maintenant des observations de nature bien diff&eacute;rente, issues de mon implication dans le quotidien d&rsquo;une association pisc&eacute;noise durant plusieurs mois. La mise en perspective de ces observations avec celles qui ont &eacute;t&eacute; r&eacute;alis&eacute;es en Centre d&rsquo;H&eacute;bergement et de R&eacute;insertion Sociale nous permettront de situer notre r&eacute;flexion dans un cadre probl&eacute;matique, et d&rsquo;&eacute;viter &ndash; autant que possible &ndash; l&rsquo;&eacute;cueil d&rsquo;une simplification de nos interpr&eacute;tations par pr&eacute;jug&eacute;s.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Cette association, le &laquo;&nbsp;Lieu Ressource&nbsp;&raquo;, d&eacute;ploie de multiples actions &ndash; sociales et culturelles &ndash; dans la lutte contre l&rsquo;isolement et les exclusions. Les probl&eacute;matiques auxquelles se trouvent confront&eacute;s les usagers du lieu sont proches de celles expos&eacute;es par les personnes accompagn&eacute;es au CHRS&nbsp;: d&eacute;socialisation, pr&eacute;carit&eacute; financi&egrave;re, difficult&eacute;s pour trouver un logement, un emploi, pour acc&eacute;der &agrave; des soins m&eacute;dicaux, etc. Le projet du &laquo;&nbsp;Lieu Ressource&nbsp;&raquo; s&rsquo;articule lui aussi autour des valeurs du partage, de la solidarit&eacute;, et sur le principe d&rsquo;une participation de chacun &agrave; la vie de l&rsquo;association. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Les rapports qui se jouent entre les usagers du lieu, les comportements qui se manifestent dans le quotidien, le d&eacute;sir de s&rsquo;impliquer dans la vie collective contrastent cependant fortement avec les tendances que nous avons observ&eacute;es, et qui apparaissent dans le t&eacute;moignage des personnes accompagn&eacute;es au CHRS. Les usagers rencontr&eacute;s au &laquo;&nbsp;Lieu Ressource&nbsp;&raquo; ne d&eacute;crivent pas ce collectif comme une menace, mais bien plut&ocirc;t comme une puissance de r&eacute;assurance leur permettant de s&rsquo;ouvrir progressivement &agrave; la rencontre, de se r&eacute;inscrire dans une vie sociale, aussi &agrave; l&rsquo;ext&eacute;rieur du cadre prot&eacute;g&eacute; de l&rsquo;institution.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">&laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">En principe ici c&rsquo;est ouvert aux gens qui touchent le RSA, mais bon ils acceptent un peu tout le monde. Le Lieu-ressources c&rsquo;est... Lieu ressources &ccedil;a veut dire qu&rsquo;on a perdu quelque chose. On a perdu quelque chose, &ccedil;a veut dire qu&rsquo;il y aurait quelque chose qu&rsquo;il faudrait reconstruire. Je pense qu&rsquo;ici on doit avoir une forte proportion de gens qui ont une mauvaise image d&rsquo;eux m&ecirc;me. C&rsquo;est pas &eacute;tonnant quand on d&eacute;passe deux ou trois ans de ch&ocirc;mage que l&rsquo;image de soi-m&ecirc;me en souffre. On finit par douter de soi &agrave; force. Il doit se passer quelque chose qui fait que l&rsquo;on s&rsquo;affaiblit. Au lieu ressources je trouve que le c&ocirc;t&eacute; humain est plus d&eacute;velopp&eacute;, par rapport &agrave; ce que j&rsquo;ai vu ailleurs. Je trouve qu&rsquo;on accepte davantage les diff&eacute;rences. C&rsquo;est plus convivial. J&rsquo;ai l&rsquo;impression que pour avoir une convivialit&eacute; il faut avoir pas mal souffert... Peut-&ecirc;tre que l&rsquo;ambiance chaleureuse peut venir compenser ou aider &agrave; restaurer beaucoup plus vite une mauvaise image qu&rsquo;on a de soi-m&ecirc;me. &Ccedil;a peut &ecirc;tre int&eacute;ressant de voir, en entourant suffisamment d&rsquo;affection les gens, ce qu&rsquo;il se passe au niveau de leur vie. Voir si les comportements s&rsquo;am&eacute;liorent si on les entoure d&rsquo;affection.</span></em><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">&laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">C&rsquo;est un lieu o&ugrave; on ne se moque pas, &ccedil;a surtout c&rsquo;est bien. C&rsquo;est vrai ici je trouve qu&rsquo;on est... Dans ce lieu de ressource, on est tous l&agrave; pour se ressourcer quoi. Pas tomber dans un trou, on est l&agrave; pour s&rsquo;aider. C&rsquo;est &ccedil;a qui est bien. On s&rsquo;aide pas financi&egrave;rement mais ... on s&rsquo;aide moralement. C&rsquo;est pour &ccedil;a que c&rsquo;est bien.</span></em><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Les usagers du &laquo;&nbsp;Lieu Ressource&nbsp;&raquo; parviennent &agrave; partager les espaces collectifs sans trop de heurts et participent activement &agrave; la vie de l&rsquo;association. Certains animent b&eacute;n&eacute;volement des ateliers, organisent des &eacute;v&eacute;nements, ce qui permet de faire vivre le lieu avec peu de moyens. Les entretiens r&eacute;alis&eacute;s au &laquo;&nbsp;Lieu Ressource&nbsp;&raquo; font par ailleurs appara&icirc;tre le fait que cette organisation collective r&eacute;pond &agrave; une demande, &agrave; un d&eacute;sir de r&eacute;affirmer les valeurs de la solidarit&eacute;, qui ne sont pas seulement les signifiants d&rsquo;une utopie institutionnelle, mais plus fortement des revendications port&eacute;es par les usagers. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Nombreux sont les usagers du &laquo;&nbsp;Lieu Ressources&nbsp;&raquo; qui parlent d&rsquo;un d&eacute;placement de leurs repr&eacute;sentations, de leurs choix d&rsquo;existence, de la part de l&rsquo;autre qu&rsquo;ils accordent dans la d&eacute;termination de leurs choix, &agrave; partir de cette situation &laquo;&nbsp;catastrophique&nbsp;&raquo; qu&rsquo;ils ont eu - et que la plupart d&rsquo;entre eux ont encore - &agrave; traverser. La prise de conscience de leur vuln&eacute;rabilit&eacute; ontologique, de la fragilit&eacute; de l&rsquo;existence humaine et de ses constructions, aurait ainsi produit chez ces personnes un renforcement de leurs dispositions sociales.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <h3 style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">3. Relationnalit&eacute; et normativit&eacute;</span></span></strong></h3> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Le t&eacute;moignage des personnes rencontr&eacute;es au &laquo;&nbsp;Lieu Ressources&nbsp;&raquo; fait apparaitre une capacit&eacute; &agrave; prendre de la distance et &agrave; mettre en perspective la situation actuelle, qui contraste avec le discours &laquo;&nbsp;catastrophique&nbsp;&raquo; tenu par les usagers rencontr&eacute;s au CHRS. C&rsquo;est ici le point essentiel de notre analyse&nbsp;: nous percevons une incidence des repr&eacute;sentations que les individus ont de leur capacit&eacute; &agrave; &laquo;&nbsp;rebondir&nbsp;&raquo; &agrave; partir d&rsquo;une situation critique, du niveau d&rsquo;int&eacute;gration de cet &eacute;v&egrave;nement catastrophique comme exp&eacute;rience &laquo;&nbsp;d&eacute;passable&nbsp;&raquo;, sur les rapports qu&rsquo;ils peuvent entretenir avec leur environnement. En d&rsquo;autres termes, les tendances normatives individuelles fluctueraient &laquo;&nbsp;normalement&nbsp;&raquo; entre relationnalit&eacute; et &eacute;gocentrisme, en fonction de la marge de variation constitutionnelle dont nous pensons pouvoir disposer pour affronter une situation nouvelle. Le sentiment que nous &eacute;prouvons de notre puissance normative (sentiment de la&nbsp;sant&eacute;), ou au contraire de notre pr&eacute;carit&eacute; ontologique (maladie) a une incidence d&eacute;terminante sur notre ouverture &agrave; l&rsquo;autre, et sur nos dispositions envers lui.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Le repli individualiste est distingu&eacute; par Georges Canguilhem comme la tendance fondamentale d&rsquo;un organisme &laquo;&nbsp;malade&nbsp;&raquo;&nbsp;: lorsque la crainte d&rsquo;&ecirc;tre an&eacute;anti par l&rsquo;&eacute;preuve des situations&nbsp;catastrophiques prend le pas sur notre besoin de vivre de nouvelles exp&eacute;riences, lorsque nous nous d&eacute;fendons contre le risque inh&eacute;rent &agrave; la rencontre en nous fermant &agrave; la relation, nous ne sommes plus d&eacute;termin&eacute;s par les valeurs &laquo;&nbsp;vitales&nbsp;&raquo; de notre d&eacute;sir mais par nos seuls instincts d&rsquo;auto-conservation. Ce ph&eacute;nom&egrave;ne correspond selon Canguilhem &agrave; une rigidification temporaire des normes de notre existence afin d&rsquo;emp&ecirc;cher son effondrement. Le sujet fait, litt&eacute;ralement, une maladie de ne pouvoir se positionner comme acteur dans un &laquo;&nbsp;d&eacute;bat avec le milieu&nbsp;&raquo;. Les fluctuations de l&rsquo;ouverture et de la sensibilit&eacute; du sujet au monde ext&eacute;rieur d&eacute;coulent des repr&eacute;sentations qu&rsquo;il se forme de son &eacute;tat actuel de sant&eacute;. La &laquo;&nbsp;normativit&eacute; vitale&nbsp;</span><a href="#_edn6" name="_ednref6" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[6]</span></span></a><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;&nbsp;est cette capacit&eacute; de correction et d&rsquo;ajustement dont un organisme dispose &ndash; biologiquement et psychiquement &ndash; pour interagir avec son environnement. C&rsquo;est cette force interne de d&eacute;passement des normes de l&rsquo;existant, cette capacit&eacute; &agrave; composer du possible &agrave; partir des &eacute;preuves de la vie, qui nous fait percevoir la rencontre comme une &laquo;&nbsp;chance&nbsp;&raquo;, et non comme une menace. Si le d&eacute;sir de l&rsquo;autre fait toujours &eacute;nigme, si nous ne connaissons v&eacute;ritablement rien de ses intentions, nous ne pouvons nous engager dans la relation qu&rsquo;&agrave; la mesure de notre confiance, non pas fondamentalement en lui, mais en notre capacit&eacute; de composer avec lui.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Si le repli individualiste et les tendances &agrave; l&rsquo;auto-conservation apparaissent &agrave; Georges Canguilhem comme des &laquo;&nbsp;pathologies&nbsp;&raquo; et non pas comme des dispositions &laquo;&nbsp;normales&nbsp;&raquo; (une nature &eacute;go&iuml;ste, agressive, qui serait propre &agrave; l&rsquo;homme), c&rsquo;est en tant que la nature profonde de l&rsquo;homme serait identique &agrave; celle de tout vivant. Le vivant est d&eacute;termin&eacute; &agrave; vivre suivant ses propres valeurs, mais il ne peut le faire qu&rsquo;en interagissant avec un milieu, lui-m&ecirc;me vivant&nbsp;: la vie s&rsquo;&eacute;puise dans le repli sur soi et l&rsquo;inertie&nbsp;; l&rsquo;isolement entra&icirc;ne la privation. Toute restriction des &eacute;changes avec le monde ext&eacute;rieur est ainsi une limitation pos&eacute;e &agrave; la vie individuelle, c&rsquo;est en cela qu&rsquo;elle caract&eacute;rise une pathologie. L&rsquo;&eacute;lan vital mobilise en permanence les capacit&eacute;s normatives de l&rsquo;individu, et le contraint &agrave; se normaliser continuellement &agrave; partir du changement. La normativit&eacute; est cette plasticit&eacute; essentielle du vivant, cette capacit&eacute; &agrave; imaginer et &agrave; r&eacute;aliser les conditions d&rsquo;un &eacute;quilibre rendu instable par les &eacute;v&egrave;nements de la vie. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Ce que nous appelons le &laquo;&nbsp;moi&nbsp;&raquo; ou le &laquo;&nbsp;sujet&nbsp;&raquo;, c&rsquo;est cette entit&eacute; qui prend conscience de sa propre existence en se positionnant dans un d&eacute;bat permanent avec l&rsquo;autre, avec le milieu. Ce &laquo;&nbsp;moi&nbsp;&raquo; n&rsquo;est pas indiff&eacute;rent aux conditions qui lui sont faites, il est affect&eacute; par la rencontre, et d&eacute;termine nos tendances normatives en fonction des impressions que produisent sur lui les situations. Le &laquo;&nbsp;moi&nbsp;&raquo; est attach&eacute; &agrave; sa propre existence, et peut ainsi se d&eacute;fendre contre les manifestations de la vie en lui, et &agrave; l&rsquo;ext&eacute;rieur de lui, lorsqu&rsquo;il juge que ces impulsions vitales constituent pour lui une menace. Ce ph&eacute;nom&egrave;ne, qui peut s&rsquo;&eacute;tendre jusqu&rsquo;&agrave; l&rsquo;expression compulsive de tendances &agrave; la destruction - de soi &agrave; travers l&rsquo;autre, et de la vie &agrave; travers soi &ndash; a notamment &eacute;t&eacute; analys&eacute; par Freud en 1920 dans &laquo;&nbsp;Au-del&agrave; du principe de plaisir</span><a href="#_edn7" name="_ednref7" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[7]</span></span></a><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <h3 style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">4. Le choc, le travail de deuil et les r&eacute;actions catastrophiques</span></span></strong></h3> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">&nbsp;&laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">C&rsquo;est dans les situations critiques, </span></em><span style="background-color:null">&eacute;crivait Georges Canguilhem,</span><em><span style="background-color:null"> que le vrai sens de la normalit&eacute; appara&icirc;t &ndash; Cela est v&eacute;rifi&eacute; dans le probl&egrave;me du normal social : les crises sont ici politiques, &eacute;conomiques </span></em><span style="background-color:null">[&hellip;] &ndash;</span><em><span style="background-color:null"> Cela est v&eacute;rifi&eacute; dans le probl&egrave;me du normal psychique : crises collectives de conscience ou crises de mentalit&eacute;</span></em><a href="#_edn8" name="_ednref8" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[8]</span></span></a><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;</span><em><span style="background-color:null">. </span></em><span style="background-color:null">La &laquo;&nbsp;crise des mentalit&eacute;s&nbsp;&raquo; est un &laquo; choc&nbsp;&raquo; dans la continuit&eacute; de l&rsquo;exp&eacute;rience&nbsp;: l&rsquo;individu est arr&ecirc;t&eacute; par un &eacute;v&egrave;nement, une situation qui lui appara&icirc;t comme ind&eacute;passable. Dans cette situation &laquo;&nbsp;catastrophique&nbsp;&raquo;, l&rsquo;individu &eacute;prouve d&rsquo;intenses sensations de d&eacute;plaisir, et ne parvient pas &agrave; &eacute;laborer un &laquo;&nbsp;plan&nbsp;&raquo; d&rsquo;adaptation pour les &eacute;vacuer. Il &eacute;prouve le sentiment d&rsquo;&ecirc;tre impuissant face &agrave; ce qui lui arrive, et cette perte de confiance en ses capacit&eacute;s normatives est source d&rsquo;une angoisse ontologique.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Certaines exp&eacute;riences &laquo;&nbsp;inimaginables&nbsp;&raquo; du point de vue d&rsquo;un sujet vont n&eacute;cessiter un travail consid&eacute;rable pour pouvoir &ecirc;tre int&eacute;gr&eacute;es, accaparant toute l&rsquo;&eacute;nergie psychique (la libido) dans un processus de deuil et de reconstruction. Ce ph&eacute;nom&egrave;ne a &eacute;t&eacute; finement analys&eacute; par Freud dans son essai de 1917 &laquo;&nbsp;Deuil et m&eacute;lancolie</span><a href="#_edn9" name="_ednref9" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[9]</span></span></a><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Un usager du &laquo;&nbsp;Lieu ressource&nbsp;&raquo; t&eacute;moignait de cette sensation d&rsquo;&ecirc;tre devenu &eacute;tranger &agrave; lui-m&ecirc;me, de cet &eacute;tat de profonde sid&eacute;ration dans lequel l&rsquo;avait plong&eacute; la perte de son emploi&nbsp;:</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">&laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">Ben au d&eacute;part moi, quand je travaillais, pour moi c&rsquo;&eacute;tait normal, je rentrais fatigu&eacute;, et quand on me parlait, je parlais du travail... Mais l&agrave; quand on me parle, je peux pas parler du travail parce que je travaille pas. Et c&rsquo;est vrai que quand y avait des gens qui disaient : </span></em><em><span style="background-color:null">&ldquo;je trouve pas de travail</span></em><em><span style="background-color:null">&rdquo; je comprenais pas moi. Et puis maintenant que je suis dans leur peau c&rsquo;est diff&eacute;rent quoi. C&rsquo;est... C&rsquo;est facile quand on a un travail qu&rsquo;on a une bonne situation, mais t&rsquo;es pas dans la peau d&rsquo;eux, t&rsquo;es pas dans la peau de ces personnes. Maintenant c&rsquo;est vrai que je le vis, &ccedil;a fait un choc.</span></em><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Le &laquo;&nbsp;choc&nbsp;&raquo; et la crainte de l&rsquo;effondrement sont &agrave; l&rsquo;origine de ce processus de d&eacute;fense que Georges Canguilhem appelle les &laquo;&nbsp;r&eacute;actions catastrophiques&nbsp;&raquo;&nbsp;: &laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">Une r&eacute;action catastrophique traduit l&rsquo;impossibilit&eacute; pour le malade de s&rsquo;adapter rapidement &agrave; des conditions nouvelles du milieu. Le souci d&rsquo;&eacute;viter les r&eacute;actions catastrophiques traduit donc la tendance &agrave; la conservation de l&rsquo;organisme</span></em><a href="#_edn10" name="_ednref10" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[10]</span></span></a><span style="background-color:null">.&nbsp;&raquo; </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Le repli individualiste est une organisation de r&eacute;sistance contre la menace d&rsquo;une effraction catastrophique&nbsp;; la restriction des interactions avec le monde ext&eacute;rieur est la norme de cette organisation. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">L&rsquo;homme qui, litt&eacute;ralement, &laquo;&nbsp;fait une maladie&nbsp;&raquo; de son v&eacute;cu actuel &laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">abandonne tout int&eacute;r&ecirc;t pour les choses du monde ext&eacute;rieur, pour autant qu&rsquo;elles ne concernent pas sa souffrance</span></em><a href="#_edn11" name="_ednref11" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[11]</span></span></a><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;. Cet &eacute;tat de sid&eacute;ration ne pourra &ecirc;tre d&eacute;pass&eacute; que par la r&eacute;&eacute;criture des normes de l&rsquo;existence individuelle &agrave; partir d&rsquo;un compromis form&eacute; entre le d&eacute;sir, l&rsquo;imaginaire, et la r&eacute;alit&eacute; ext&eacute;rieure. L&rsquo;individu doit r&eacute;aliser un travail de deuil pour parvenir &agrave; d&eacute;tacher ses investissements de la norme &agrave; laquelle ils sont actuellement fix&eacute;s.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">C&rsquo;est au niveau de la r&eacute;alisation de ce travail &ndash; de ce &laquo;&nbsp;passage&nbsp;&raquo; normatif &ndash; que nous interpr&eacute;tons la diff&eacute;rence essentielle entre les repr&eacute;sentations inh&eacute;rentes au t&eacute;moignage des usagers du CHRS, et celles des usagers du Lieu Ressources. L&rsquo;accident, l&rsquo;&eacute;v&egrave;nement de vie, demeurent encore &laquo;&nbsp;hors sens&nbsp;&raquo; dans le discours de ces personnes rencontr&eacute;es au CHRS&nbsp;; ils ne sont pas encore int&eacute;gr&eacute;s &agrave; la continuit&eacute; d&rsquo;une histoire subjective, et recouvrent donc le champ des possibles. Dans ce temps de la transition, les tendances normatives individuelles sont caract&eacute;ristiques des &laquo;&nbsp;r&eacute;actions de catastrophes&nbsp;&raquo; : c&rsquo;est une situation de &laquo;&nbsp;d&eacute;crochage&nbsp;&raquo;, qui se joue &agrave; la fois dans la continuit&eacute; d&rsquo;une histoire (du r&eacute;cit de soi) et dans les interactions avec le monde ext&eacute;rieur.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <h3 style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">5. Le passage&nbsp;: l&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;&eacute;v&egrave;nement comme exp&eacute;rience</span></span></strong></h3> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Le d&eacute;passement de la crise de conscience permet la remobilisation des capacit&eacute;s normatives&nbsp;: ce qui est v&eacute;cu a du sens, le possible s&rsquo;ouvre, la temporalit&eacute; subjective se d&eacute;gage du v&eacute;cu de l&rsquo;imm&eacute;diatet&eacute;. On passe du registre de la r&eacute;action (d&eacute;terminisme externe) &agrave; l&rsquo;action normative (d&eacute;terminisme interne), du repli sur soi &agrave; la relationnalit&eacute;&nbsp;: </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">&laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">La conservation de soi n&rsquo;est pas la tendance la plus g&eacute;n&eacute;rale de la vie, c&rsquo;est la tendance caract&eacute;ristique d&rsquo;une vie diminu&eacute;e, amoindrie. L&rsquo;homme sain est capable d&rsquo;affronter des risques et sa productivit&eacute; &ndash; disons sa normativit&eacute; &ndash; se traduit par sa capacit&eacute; de supporter des catastrophes pour parvenir &agrave; un ordre nouveau</span></em><a href="#_edn12" name="_ednref12" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[12]</span></span></a><span style="background-color:null">.&nbsp;&raquo;</span><em><sup><span style="background-color:null"> </span></sup><span style="background-color:null">&nbsp;</span></em></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Le passage normatif produit un renforcement narcissique et un sentiment de puissance. Cela se traduit par un sentiment relatif de s&eacute;curit&eacute; et de confiance qui relancent le d&eacute;sir du sujet. Le handicap, le stigmate, l&rsquo;exp&eacute;rience traumatique, ont &eacute;t&eacute; transpos&eacute;s en un &laquo;&nbsp;bagage&nbsp;&raquo; qui int&egrave;gre positivement le r&eacute;cit de soi. Ce passage peut faire naitre le d&eacute;sir de t&eacute;moigner de cette exp&eacute;rience et de s&rsquo;engager dans des actions militantes.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">C&rsquo;est ce qu&rsquo;affirment certains usagers du &laquo;&nbsp;Lieu Ressource&nbsp;&raquo;&nbsp;:</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">&laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">Ce genre de choses, le fait d&rsquo;&ecirc;tre descendu bas, quand m&ecirc;me assez bas, &ccedil;a fait souffrir mais &ccedil;a renforce. Moi j&rsquo;ai v&eacute;cu dans la rue, j&rsquo;ai v&eacute;cu tr&egrave;s tr&egrave;s durement dans la rue mais &ccedil;a m&rsquo;a renforc&eacute;, &ccedil;a m&rsquo;a pas cass&eacute;. Je sais que c&rsquo;est un bagage que j&rsquo;ai.</span></em><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">&laquo;&nbsp;</span><em><span style="background-color:null">L&agrave; j&rsquo;ai un projet : j&rsquo;aimerais bien organiser une soir&eacute;e. Pour que les jeunes de l&rsquo;h&ocirc;pital de jour parlent de la psychiatrie&nbsp;: qu&rsquo;est-ce que c&rsquo;est que la psychiatrie, pourquoi ils sont en psychiatrie&nbsp;? Que ce soit ouvert &agrave; plein de... pour qu&rsquo;ils comprennent ce que c&rsquo;est que la psychiatrie... que si jamais les jeunes sont en psychiatrie ils rencontrent pas toujours un souci avec les gens ext&eacute;rieurs. Parce que moi comme je suis en psychiatrie il y a souvent des gens qui me montrent du doigt, qui disent que je suis fou et tout &ccedil;a... Alors que si jamais on explique tout &ccedil;a aux gens on aurait moins de soucis...</span></em><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <h3 style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">6. La relationnalit&eacute; &agrave; la mesure de la confiance en soi et dans le monde ext&eacute;rieur</span></span></strong></h3> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">La simple perspective d&rsquo;une confrontation au changement peut &ecirc;tre &agrave; l&rsquo;origine de r&eacute;actions catastrophiques. Canguilhem appelle ce ph&eacute;nom&egrave;ne la &laquo;&nbsp;maladie de l&rsquo;homme normal</span><a href="#_edn13" name="_ednref13" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[13]</span></span></a><span style="background-color:null">&nbsp;&raquo;&nbsp;: la crainte de se trouver brutalement arr&ecirc;t&eacute; ou limit&eacute; par un &eacute;v&egrave;nement. Cette angoisse se d&eacute;veloppe par l&rsquo;observation progressive de notre environnement&nbsp;: nous y percevons la pr&eacute;sence de la mort, du vieillissement, de la maladie, des &eacute;checs. De ce regard sur le monde naissent la conscientisation de nos limites individuelles, le sentiment de la vuln&eacute;rabilit&eacute; et la crainte d&rsquo;un effondrement. La &laquo;&nbsp;maladie de l&rsquo;homme normal&nbsp;&raquo; peut &ecirc;tre, lorsqu&rsquo;elle se maintient dans une mesure supportable, &agrave; l&rsquo;origine d&rsquo;une r&eacute;affirmation des valeurs du collectif et de la solidarit&eacute;&nbsp;; mais au-del&agrave; d&rsquo;un certain seuil, lorsqu&rsquo;elle alt&egrave;re profond&eacute;ment la confiance que l&rsquo;individu a en ses potentialit&eacute;s normatives et que l&rsquo;ext&eacute;rieur est per&ccedil;u comme globalement mena&ccedil;ant, elle est &agrave; l&rsquo;origine de r&eacute;actions de catastrophes qui radicalisent les rapports interindividuels. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Le repli individualiste, mais aussi le d&eacute;sir de conformisme et &laquo;&nbsp;l&rsquo;hypernormalisation&nbsp;&raquo; sont les signes d&rsquo;une anxi&eacute;t&eacute; caract&eacute;ristique des individus qui ont &agrave; composer avec ce milieu &laquo;&nbsp;fabriqu&eacute;&nbsp;&raquo; par la modernit&eacute;. Le milieu social moderne se caract&eacute;rise par l&rsquo;absence de valeurs collectives id&eacute;ales ou d&rsquo;utopies&nbsp;; par l&rsquo;instabilit&eacute; et la contradiction de ses normes, dict&eacute;es par des valeurs progressistes&nbsp;; il se caract&eacute;rise aussi par la prise de conscience du caract&egrave;re &eacute;puisable de nos ressources, et de la probabilit&eacute; des &eacute;v&egrave;nements catastrophiques&nbsp;: risques naturels, technologiques, psychosociaux &hellip; </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Face aux risques contemporains, la revendication individualiste appara&icirc;t comme une qu&ecirc;te d&eacute;risoire mais s&rsquo;entend surtout comme un aveu d&rsquo;impuissance &agrave; exister relationnellement, dans un d&eacute;bat cr&eacute;atif avec le milieu. </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <h3 style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><strong><span style="background-color:null">Bibliographie</span></strong></span></h3> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Article 185-2 du code de la famille et de l&rsquo;aide sociale (d&eacute;cret du 15 juin 1976).</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Canguilhem Georges, </span><em><span style="background-color:null">Le normal et le pathologique </span></em><span style="background-color:null">[1943], Paris, PUF, 2013.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Canguilhem Georges, </span><em><span style="background-color:null">Normalit&eacute; et normativit&eacute;</span></em><span style="background-color:null">, dans </span><em><span style="background-color:null">Les Normes et le normal 1942-1943</span></em><span style="background-color:null">, dans </span><em><span style="background-color:null">Strasbourg &agrave; Clermont Ferrand</span></em><span style="background-color:null">, in&eacute;dit consultable aux archives du CAPHES, E.N.S, Paris, cote GC.11.2.2.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Freud Sigmund, </span><em><span style="background-color:null">Pour introduire le Narcissisme</span></em><span style="background-color:null">, [1914], Paris, &Eacute;ditions In press, 2013.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Freud Sigmund, </span><em><span style="background-color:null">Actuelles sur la Guerre et la mort</span></em><span style="background-color:null"> [1915], dans </span><em><span style="background-color:null">&OElig;uvres compl&egrave;tes Psychanalyse vol. XIII</span></em><span style="background-color:null">, Paris, PUF, 2005.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Freud Sigmund, </span><em><span style="background-color:null">Deuil et m&eacute;lancolie</span></em><span style="background-color:null">, [1915], dans </span><em><span style="background-color:null">&OElig;uvres compl&egrave;tes</span></em><span style="background-color:null">, </span><em><span style="background-color:null">vol. XIII&nbsp;: 1914-1915,</span></em><span style="background-color:null"> Paris, PUF, 2005.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">Freud Sigmund, </span><em><span style="background-color:null">Au-del&agrave; du principe de plaisir</span></em><span style="background-color:null"> [1920], dans </span><em><span style="background-color:null">Essais de Psychanalyse</span></em><span style="background-color:null">, Saint Amand, Petite Biblioth&egrave;que Payot, 1990.</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <h3 style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="background-color:null">* Biographie de l&#39;autrice</span></span></strong></h3> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">De formation monitrice-&eacute;ducatrice, puis &eacute;ducatrice sp&eacute;cialis&eacute;e, Valentine Prouvez est doctorante &agrave; l&#39;Universit&eacute; Paul-Valery Montpellier 3 (CRISES-EA 4424). Sa th&egrave;se porte sur une mise en perspective de Freud et de Canguilhem autour des notions &laquo;&nbsp;d&#39;adaptabilit&eacute; psychique&nbsp;&raquo; et de &laquo;&nbsp;principe de r&eacute;alit&eacute;&nbsp;&raquo;. Ce travail vise essentiellement &agrave; d&eacute;placer notre d&eacute;finition de la notion &laquo;&nbsp;d&rsquo;adaptation&nbsp;&raquo;, d&rsquo;une perspective d&eacute;terministe et centr&eacute;e sur la norme, vers sa compr&eacute;hension comme acte de cr&eacute;ation. A la lumi&egrave;re de ces deux auteurs, Valentine Prouvez propose ainsi une d&eacute;finition de la sant&eacute; (biologique, psychique) comme capacit&eacute; d&rsquo;ing&eacute;niosit&eacute;. Elle a publi&eacute; plusieurs articles, dont &laquo;&nbsp;Accompagner l&#39;errance&nbsp;: de la &quot;normalisation&quot; &agrave; la normativit&eacute; &raquo;, </span><em><span style="background-color:null">Les cahiers du travail social</span></em><span style="background-color:null">, N&deg;88. Jugement et intervention sociale, IRTS de Franche Comte, d&eacute;cembre 2017.</span></span></p> <div>&nbsp; <hr /> <div id="edn1"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><a href="#_ednref1" name="_edn1" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[1]</span></span></a><span style="background-color:null"> Sigmund Freud, </span><em><span style="background-color:null">Actuelles sur la Guerre et la mort</span></em><span style="background-color:null"> [1915], dans </span><em><span style="background-color:null">&OElig;uvres compl&egrave;tes Psychanalyse vol. XIII</span></em><span style="background-color:null">, Paris, PUF, 2005.</span></span></p> </div> <div id="edn2"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ednref2" name="_edn2" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[2]</span></span></span></a><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null"> Sigmund Freud, </span><em><span style="background-color:null">Actuelles sur la Guerre et la mort</span></em><span style="background-color:null"> [1915], op. cit., p 133.</span></span></span></p> </div> <div id="edn3"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ednref3" name="_edn3" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[3]</span></span></span></a><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null"> </span><em><span style="background-color:null">Idem</span></em><span style="background-color:null">., p 140.</span></span></span></p> </div> <div id="edn4"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ednref4" name="_edn4" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[4]</span></span></span></a><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null"> Article 185-2 du code de la famille et de l&rsquo;aide sociale (d&eacute;cret du 15 juin 1976).</span></span></span></p> </div> <div id="edn5"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ednref5" name="_edn5" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[5]</span></span></span></a><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null"> Les t&eacute;moignages pr&eacute;sent&eacute;s ici ont &eacute;t&eacute; recueillis par moi-m&ecirc;me dans le cadre d&rsquo;entretiens individuels, dans diff&eacute;rentes institutions sp&eacute;cialis&eacute;es. Ils ont &eacute;t&eacute; enregistr&eacute;s puis int&eacute;gralement retranscrits. Ces textes sont in&eacute;dits. Leur diffusion, sous une forme anonym&eacute;e, est autoris&eacute;e par les participants.</span></span></span></p> </div> <div id="edn6"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ednref6" name="_edn6" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[6]</span></span></span></a><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null"> Sur le d&eacute;veloppement du concept de &laquo;&nbsp;normativit&eacute; vitale&nbsp;&raquo; dans la philosophie de Georges Canguilhem, on pourra se r&eacute;f&eacute;rer &agrave; sa th&egrave;se de m&eacute;decine, </span><em><span style="background-color:null">Le normal et le pathologique</span></em><span style="background-color:null"> [1943], Paris, PUF, 2013.</span></span></span></p> </div> <div id="edn7"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ednref7" name="_edn7" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[7]</span></span></span></a><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null"> Sigmund Freud, </span><em><span style="background-color:null">Au-del&agrave; du principe de plaisir</span></em><span style="background-color:null"> [1920], dans </span><em><span style="background-color:null">Essais de Psychanalyse</span></em><span style="background-color:null">, Saint Amand, Petite Biblioth&egrave;que Payot, 1990.</span></span></span></p> </div> <div id="edn8"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ednref8" name="_edn8" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[8]</span></span></span></a><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null"> Georges Canguilhem, </span><em><span style="background-color:null">Normalit&eacute; et normativit&eacute;</span></em><span style="background-color:null">, dans </span><em><span style="background-color:null">Les Normes et le normal 1942-1943</span></em><span style="background-color:null">, dans </span><em><span style="background-color:null">Strasbourg &agrave; Clermont Ferrand</span></em><span style="background-color:null">, in&eacute;dit consultable aux archives du CAPHES, E.N.S, Paris, cote GC.11.2.2., f 96</span></span><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">.</span></span></span></p> </div> <div id="edn9"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><a href="#_ednref9" name="_edn9" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[9]</span></span></a><span style="background-color:null"> Sigmund Freud, </span><em><span style="background-color:null">Deuil et m&eacute;lancolie</span></em><span style="background-color:null">, [1915], dans </span><em><span style="background-color:null">&OElig;uvres compl&egrave;tes</span></em><span style="background-color:null">, </span><em><span style="background-color:null">vol. XIII&nbsp;: 1914-1915,</span></em><span style="background-color:null"> Paris, PUF, 2005.</span></span></p> </div> <div id="edn10"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ednref10" name="_edn10" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[10]</span></span></span></a><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null"> Georges Canguilhem, </span><em><span style="background-color:null">Normalit&eacute; et normativit&eacute;</span></em><span style="background-color:null">, op. cit., f 96</span></span></span></p> </div> <div id="edn11"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ednref11" name="_edn11" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[11]</span></span></span></a><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null"> Sigmund Freud, </span><em><span style="background-color:null">Pour introduire le Narcissisme</span></em><span style="background-color:null">, [1914], Paris, &Eacute;ditions In press, 2013, p 80. </span></span></span></p> </div> <div id="edn12"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ednref12" name="_edn12" title=""><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">[12]</span></span></span></a><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null"> Georges Canguilhem, </span><em><span style="background-color:null">Normalit&eacute; et normativit&eacute;</span></em><span style="background-color:null">, op. cit., f 97</span></span></span></p> </div> <div id="edn13"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ednref13" name="_edn13" title=""><span style="font-size:10.0pt"><span style="background-color:null">[13]</span></span></a><span style="background-color:null"> </span><span style="font-size:12.0pt"><span style="background-color:null">Sur le d&eacute;veloppement du concept de &laquo;&nbsp;maladie de l&rsquo;homme normal&nbsp;&raquo; dans la philosophie de Georges Canguilhem, on pourra se r&eacute;f&eacute;rer &agrave; l&rsquo;article </span><em><span style="background-color:null">Vingt ans apr&egrave;s&hellip;</span></em><span style="background-color:null">, dans </span><em><span style="background-color:null">Le normal et le pathologique</span></em><span style="background-color:null"> [1943], Paris, PUF, 2013.</span></span></span></p> </div> </div> <div> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> </div>