<p>Le Qu&eacute;bec, province canadienne francophone dont le bilan d&eacute;mographique le plus r&eacute;cent est estim&eacute; &agrave; plus de 8 millions d&rsquo;habitants (Gouvernement du Qu&eacute;bec, 2016), accueille environ 50000 personnes issues de l&rsquo;immigration par an depuis 2008 (MIDI, 2016). La question de l&rsquo;accueil de ces personnes d&eacute;pend notamment des ententes de r&eacute;gionalisation d&eacute;velopp&eacute;es depuis le milieu des ann&eacute;es 1990 puisqu&rsquo;au Qu&eacute;bec les personnes r&eacute;fugi&eacute;es prises en charge par l&rsquo;&Eacute;tat sont s&eacute;lectionn&eacute;es pour s&rsquo;installer en r&eacute;gion&nbsp;: 88,1% d&rsquo;entre elles se sont &eacute;tablies &agrave; l&rsquo;ext&eacute;rieur de la m&eacute;tropole entre 2009 et 2013 (MICC, 2014). Cette politique se refl&egrave;te dans la transformation progressive de l&rsquo;&eacute;cole qu&eacute;b&eacute;coise car, si moins de familles issues de l&rsquo;immigration s&rsquo;installent en r&eacute;gion qu&rsquo;en m&eacute;tropole, la proportion de r&eacute;fugi&eacute;s y est plus importante. Corollairement, les &eacute;l&egrave;ves nouvellement arriv&eacute;s sont souvent allophones et il n&rsquo;est pas rare que leur niveau scolaire diff&egrave;re significativement des normes d&rsquo;&acirc;ge du pays d&rsquo;accueil, parce qu&rsquo;ils sont plus avanc&eacute;s ou, au contraire, n&rsquo;ont pas toujours &eacute;t&eacute; scolaris&eacute;s de fa&ccedil;on continue. Les enseignants qui les accueillent doivent par cons&eacute;quent tenir compte de leur besoin d&rsquo;apprentissage du fran&ccedil;ais &agrave; des fins communicatives ainsi qu&rsquo;&agrave; des fins scolaires (Chnane-Davin, 2011&nbsp;; De Koninck et Armand, 2012a) et ils doivent, dans un rapport d&rsquo;environ un jeune sur quatre, accompagner des &eacute;l&egrave;ves pr&eacute;sentant un retard scolaire de plus de deux ans par rapport au syst&egrave;me qu&eacute;b&eacute;cois (De Koninck et Armand, 2012a).</p> <p>Un r&eacute;cent portrait sur la place de la diversit&eacute; ethnoculturelle, religieuse et linguistique dans la formation &agrave; l&rsquo;enseignement au Qu&eacute;bec a montr&eacute; que les enseignants non sp&eacute;cialis&eacute;s en didactique du fran&ccedil;ais langue seconde (FLS) ne recevaient que tr&egrave;s peu de formation obligatoire, voire aucune, sur la question de l&rsquo;int&eacute;gration linguistique, socioscolaire ou socioculturelle des &eacute;l&egrave;ves allophones issus de l&rsquo;immigration, et ce, particuli&egrave;rement en milieu r&eacute;gional (Larochelle-Audet, Borri-Anadon, McAndrew et Potvin, 2013). Afin de soutenir les milieux scolaires, la Direction des services aux communaut&eacute;s culturelles du minist&egrave;re de l&rsquo;&Eacute;ducation, du Loisir et du Sport du Qu&eacute;bec &eacute;ditait en 2014 le&nbsp;<em>Cadre de r&eacute;f&eacute;rence pour l&rsquo;accueil et l&rsquo;int&eacute;gration des &eacute;l&egrave;ves issus de l&rsquo;immigration</em>. Elle y rappelait notamment que l&rsquo;Article 1 de la Loi sur l&rsquo;instruction publique stipule que toute personne a droit aux services &eacute;ducatifs, compl&eacute;mentaires et particuliers, ce qui, pour les &eacute;l&egrave;ves allophones, se traduit par des services d&rsquo;accueil et de soutien &agrave; l&rsquo;apprentissage du fran&ccedil;ais (SASAF). En mati&egrave;re de ressources humaines, le cadre recommande aux &eacute;tablissements scolaires de recruter des enseignants form&eacute;s en fran&ccedil;ais langue seconde, et les universit&eacute;s de la province sont appel&eacute;es &agrave; int&eacute;grer &agrave; la formation de tous les enseignants des activit&eacute;s li&eacute;es au processus d&rsquo;acquisition d&rsquo;une langue seconde, &agrave; l&rsquo;int&eacute;gration sociale et scolaire des &eacute;l&egrave;ves immigrants, &agrave; l&rsquo;enseignement en contexte pluriethnique et plurilingue et au d&eacute;ploiement d&rsquo;une &eacute;ducation interculturelle (MELS, 2014).</p> <p>Malgr&eacute; cet effort de structuration de l&rsquo;accueil et de l&rsquo;int&eacute;gration des &eacute;l&egrave;ves issus de l&rsquo;immigration, les enseignants d&eacute;j&agrave; en fonction doivent s&rsquo;adapter &agrave; la transformation de l&rsquo;&eacute;cole pour r&eacute;pondre aux besoins sp&eacute;cifiques des &eacute;l&egrave;ves allophones, souvent fragilis&eacute;s par des parcours migratoires ou personnels complexes (McAndrew&nbsp;<em>et al.</em>, 2015). Face &agrave; ce changement, la formation continue s&rsquo;impose donc comme un moyen de pallier le manque de pr&eacute;paration des enseignants en service.</p> <p>L&rsquo;&eacute;tude dont nous rendons compte investiguait l&rsquo;influence d&rsquo;un projet de formation continue universitaire de deux ans sur la capacit&eacute; d&rsquo;adaptation d&rsquo;enseignants et de conseill&egrave;res p&eacute;dagogiques de la r&eacute;gion de Qu&eacute;bec, portant sur l&rsquo;acquisition du fran&ccedil;ais langue scolaire chez des &eacute;l&egrave;ves allophones scolaris&eacute;s ou sous-scolaris&eacute;s : Alloscol<a href="http://revue-tdfle.fr/les-numeros/numero-71/50-accueillir-les-eleves-allophones-nouveaux-arrivants-en-milieu-regional-au-quebec-un-defi-pour-tous-les-enseignants#_ftn1" id="_ftnref1">[1]</a>. Outre les apports pour les &eacute;ducateurs, cet article met en exergue les facteurs syst&eacute;miques susceptibles d&rsquo;entraver la mise en &oelig;uvre de nouvelles pratiques en faveur des &eacute;l&egrave;ves allophones. Pour ce faire, nous pr&eacute;sentons des interpr&eacute;tations r&eacute;sultant d&rsquo;un effort de triangulation temporelle et situationnelle qui illustrent la prise de conscience des acteurs scolaires eu &eacute;gard les besoins des &eacute;l&egrave;ves allophones, notamment lorsqu&rsquo;il est question du parcours scolaire du jeune avant son entr&eacute;e en &eacute;cole francophone. Afin de bien situer les enjeux didactiques, professionnels et humains qui sont ceux des &eacute;ducateurs de cette localit&eacute;, nous pr&eacute;sentons le contexte dans lequel ils interviennent avant d&rsquo;exposer notre cadre conceptuel et les choix m&eacute;thodologiques op&eacute;r&eacute;s pour conduire cette &eacute;tude longitudinale.</p> <h2>1. L&rsquo;adaptation de l&rsquo;&eacute;cole qu&eacute;b&eacute;coise&nbsp;: les offres de service pour les &eacute;l&egrave;ves allophones</h2> <p>En vertu de l&rsquo;article 88 de la Loi sur l&rsquo;instruction publique du Qu&eacute;bec, l&rsquo;organisation des services d&rsquo;apprentissage du fran&ccedil;ais rel&egrave;ve de chaque &eacute;tablissement concern&eacute; et il revient aux &eacute;coles d&rsquo;instituer des mod&egrave;les de services adapt&eacute;s aux besoins des &eacute;l&egrave;ves (MELS, 2014). Ainsi, De Koninck recensait en 2012 cinq mod&egrave;les d&rsquo;int&eacute;gration des &eacute;l&egrave;ves allophones au Qu&eacute;bec&nbsp;:</p> <p>1) la classe d&rsquo;accueil ferm&eacute;e, dans laquelle les &eacute;l&egrave;ves allophones sont regroup&eacute;s et suivent l&rsquo;int&eacute;gralit&eacute; de leurs cours ;</p> <p>2) la classe d&rsquo;accueil avec aide &agrave; l&rsquo;int&eacute;gration de la part d&rsquo;une personne-ressource ;</p> <p>3) l&rsquo;int&eacute;gration partielle qui combine classe d&rsquo;accueil et int&eacute;gration avec les &eacute;l&egrave;ves francophones dans certains cours ;</p> <p>4) l&rsquo;int&eacute;gration totale en classe ordinaire avec soutien &agrave; l&rsquo;apprentissage du fran&ccedil;ais (SAF) ;</p> <p>5) l&rsquo;int&eacute;gration totale sans soutien linguistique.</p> <p>&Agrave; Montr&eacute;al, o&ugrave; il a vu le jour en 1969, le mod&egrave;le privil&eacute;gi&eacute; est la classe d&rsquo;accueil o&ugrave; les &eacute;l&egrave;ves allophones sont regroup&eacute;s pour apprendre le fran&ccedil;ais. Mais, en r&eacute;gion, c&rsquo;est l&rsquo;int&eacute;gration dans les classes ordinaires qui est encore le mod&egrave;le le plus souvent rencontr&eacute; (De Koninck et Armand, 2012a). Dans ce mod&egrave;le, ce ne sont plus les seuls professeurs de fran&ccedil;ais qui sont concern&eacute;s par l&rsquo;accueil et l&rsquo;int&eacute;gration des &eacute;l&egrave;ves allophones, mais bien l&rsquo;ensemble de l&rsquo;&eacute;quipe-&eacute;cole, incluant les enseignants titulaires au primaire et les enseignants disciplinaires au secondaire. Ces derniers, nous l&rsquo;avons soulign&eacute;, ne sont que tr&egrave;s peu form&eacute;s en la mati&egrave;re. De surcro&icirc;t, les SASAF ne sont pas toujours dispens&eacute;s par des sp&eacute;cialistes de la didactique des langues. En effet, malgr&eacute; les recommandations minist&eacute;rielles, certains enseignants &agrave; statut pr&eacute;caire form&eacute;s en &laquo;&nbsp;fran&ccedil;ais langue d&rsquo;enseignement&nbsp;&raquo;, c&rsquo;est-&agrave;-dire en fran&ccedil;ais langue premi&egrave;re (L1), se voient encore attribuer des t&acirc;ches partielles ou compl&egrave;tes de SAF sans aucune pr&eacute;paration dans le domaine (De Koninck et Querrien, 2014). Il convient ici de pr&eacute;ciser qu&rsquo;au Qu&eacute;bec, les politiques de recrutement des enseignants de SAF sont propres aux commissions scolaires, c&rsquo;est-&agrave;-dire des institutions de droit public dont la mission est d&rsquo;assurer l&rsquo;&eacute;ducation dans une circonscription donn&eacute;e et d&rsquo;y administrer les &eacute;coles primaires et secondaires (Gouvernement du Qu&eacute;bec, 2014).</p> <p>Dans un contexte d&rsquo;une telle complexit&eacute;, il convient alors de s&rsquo;interroger sur l&rsquo;efficience des services dispens&eacute;s. Selon une r&eacute;cente m&eacute;ta-analyse des recherches sur la r&eacute;ussite des &eacute;l&egrave;ves issus de l&rsquo;immigration au Qu&eacute;bec (McAndrew&nbsp;<em>et al</em>., 2015), il n&rsquo;existerait pas de preuve empirique qu&rsquo;un mod&egrave;le d&rsquo;int&eacute;gration pr&eacute;vale sur un autre en termes d&rsquo;efficacit&eacute;. Les chercheurs ont recens&eacute; onze facteurs de risques en mati&egrave;re de r&eacute;ussite scolaire, dont notamment le retard scolaire &agrave; l&rsquo;arriv&eacute;e au secondaire, l&rsquo;origine ethnique, le changement d&rsquo;&eacute;cole fr&eacute;quent, l&rsquo;appartenance de l&rsquo;&eacute;cole &agrave; une certaine commission scolaire, les caract&eacute;ristiques de l&rsquo;&eacute;cole et de ses &eacute;l&egrave;ves, ou encore le niveau d&rsquo;entr&eacute;e dans le syst&egrave;me scolaire qu&eacute;b&eacute;cois (pour une recension compl&egrave;te, voir McAndrew&nbsp;<em>et al</em>., 2015). Bien qu&rsquo;ils recoupent des caract&eacute;ristiques individuelles et syst&eacute;miques, il est apparu que ces facteurs dans leur ensemble sont loin d&rsquo;expliquer les variations rencontr&eacute;es en mati&egrave;re de r&eacute;ussite acad&eacute;mique, puisqu&rsquo;ils ne pr&eacute;diraient qu&rsquo;&agrave; concurrence de 50% la variation dans la diplomation des &eacute;l&egrave;ves allophones issus de l&rsquo;immigration. Les chercheurs ont ainsi conclu que l&rsquo;ouverture des milieux &agrave; adopter une approche &eacute;ducative r&eacute;pondant aux besoins particuliers des &eacute;l&egrave;ves allophones aurait un r&ocirc;le &agrave; jouer dans leur r&eacute;ussite. Ce constat est rassurant &agrave; la fois pour les &eacute;l&egrave;ves et pour les &eacute;ducateurs, puisque tout ne serait pas jou&eacute; &agrave; l&rsquo;entr&eacute;e en &eacute;cole secondaire et les actions prises par les intervenants scolaires auraient le pouvoir d&rsquo;influencer positivement les parcours d&rsquo;apprentissage des &eacute;l&egrave;ves allophones, quel que soit le mod&egrave;le d&rsquo;int&eacute;gration. La comp&eacute;tence et la capacit&eacute; d&rsquo;adaptation des enseignants deviennent d&egrave;s lors primordiales, notamment en ce qui concerne le soutien au d&eacute;veloppement du fran&ccedil;ais comme langue des apprentissages scolaires chez des &eacute;l&egrave;ves pr&eacute;sentant, dans un rapport d&rsquo;un sur quatre, un retard scolaire important &agrave; leur arriv&eacute;e.</p> <h2>2. La comp&eacute;tence professionnelle de l&rsquo;enseignant&nbsp;: la dynamique du changement et le r&ocirc;le de la formation</h2> <p>Selon Richer (2011), dans le domaine de l&rsquo;enseignement des langues, la comp&eacute;tence et le savoir agir de l&rsquo;enseignant se composeraient, entre autres, de savoirs d&eacute;claratifs, de savoir-faire proc&eacute;duraux, int&eacute;grant des sch&egrave;mes op&eacute;ratoires, et de savoir-&ecirc;tre, c&rsquo;est-&agrave;-dire d&rsquo;&eacute;l&eacute;ments relevant du comportement, des relations &agrave; autrui et de la sph&egrave;re psychologique. Comme le rapporte l&rsquo;auteur, la comp&eacute;tence n&rsquo;existerait pas tant qu&rsquo;elle n&rsquo;est pas traduite par une action : &laquo; Si la comp&eacute;tence se r&eacute;v&egrave;le davantage dans le savoir agir que dans le savoir-faire, c&rsquo;est qu&rsquo;elle existe v&eacute;ritablement quand elle sait affronter l&rsquo;&eacute;v&egrave;nement, l&rsquo;impr&eacute;vu &raquo; (Le Boterf, 2000&nbsp;: 44). Cette conception de la comp&eacute;tence la situe dans une dynamique d&rsquo;adaptation envers des situations sp&eacute;cifiques. Dans le contexte d&rsquo;une formation continue d&rsquo;enseignants, il faut donc comprendre les processus qui les conduisent &agrave; op&eacute;rer des changements.</p> <p>Borg (2006) envisage l&rsquo;ensemble des &eacute;v&egrave;nements mentaux de l&rsquo;enseignant de langue, li&eacute;s &agrave; ce qu&rsquo;il pense, &agrave; ce qu&rsquo;il sait, &agrave; ce qu&rsquo;il croit et &agrave; ce qu&rsquo;il fait, comme relevant de sa cognition. Avant m&ecirc;me que n&rsquo;intervienne la notion d&rsquo;ad&eacute;quation dans le savoir agir, ce sont les interactions entre la cognition de l&rsquo;enseignant et sa propre exp&eacute;rience d&rsquo;apprenant, sa formation et les facteurs contextuels de son milieu de travail &ndash; dont les exp&eacute;riences v&eacute;cues en classe &ndash; qui influenceront ses savoirs, ses savoir-faire et ses savoir-&ecirc;tre. C&rsquo;est au cours de ce processus complexe, o&ugrave; r&eacute;flexion, prise de d&eacute;cision et prise d&rsquo;action s&rsquo;alternent, que l&rsquo;enseignant formule et confronte ses croyances ou ses repr&eacute;sentations. Bien que ne constituant pas des savoirs &agrave; proprement parler, ces &eacute;v&egrave;nements cognitifs sont d&eacute;terminants dans la capacit&eacute; d&rsquo;un enseignant &agrave; s&rsquo;engager dans un effort d&rsquo;adaptation, puisqu&rsquo;ils constituent les indicateurs du changement dans la r&eacute;ponse qu&rsquo;il produit face &agrave; une situation donn&eacute;e (Borg, 2006 ; Donaghue, 2003 ; Korthagen, 2010a).</p> <p>En termes de p&eacute;dagogie de formation, Korthagen (2010a) affirme que les activit&eacute;s d&rsquo;accompagnement professionnel devraient rejoindre les &eacute;ducateurs dans le respect de leurs exp&eacute;riences v&eacute;cues en milieu de pratique. Il propose, d&rsquo;une part, de consid&eacute;rer la perception que l&rsquo;enseignant a de ses exp&eacute;riences de terrain dans les apprentissages qu&rsquo;il fait en formation et, d&rsquo;autre part, d&rsquo;envisager les enseignants en tant que communaut&eacute; de pratique. Sur le plan conceptuel, cette approche comporte une dimension r&eacute;flexive qui, plut&ocirc;t que d&rsquo;imposer aux enseignants une th&eacute;orie, les invite &agrave; remanier, &agrave; sch&eacute;matiser et &agrave; former la leur sur une base empirique. Concr&egrave;tement, cela se traduit par des activit&eacute;s stimulant la r&eacute;flexion &agrave; l&rsquo;&eacute;chelle individuelle, mais aussi en interaction avec des pairs.</p> <p>C&rsquo;est pour cette approche int&eacute;grant prise en compte de la r&eacute;alit&eacute; d&rsquo;intervention, invitation &agrave; la r&eacute;flexion et collaboration que les formatrices du projet Alloscol ont opt&eacute;. Ainsi, six journ&eacute;es de formation &agrave; l&rsquo;universit&eacute; ont &eacute;t&eacute; pilot&eacute;es au cours de deux ann&eacute;es scolaires (2012-2014), les participants ont eu &agrave; collaborer pour r&eacute;aliser des d&eacute;marches p&eacute;dagogiques adapt&eacute;es &agrave; leur public d&rsquo;apprenants et ils ont eu acc&egrave;s &agrave; une plateforme collaborative num&eacute;rique sur laquelle les formatrices publiaient des synth&egrave;ses de recherches et o&ugrave; tous les acteurs d&rsquo;Alloscol pouvaient communiquer entre eux. Parmi les activit&eacute;s r&eacute;alis&eacute;es lors des journ&eacute;es de rencontre, les participants ont notamment eu &agrave; r&eacute;aliser eux-m&ecirc;mes des apprentissages ou &agrave; observer la r&eacute;alisation de certaines comp&eacute;tences scolaires en langue &eacute;trang&egrave;re (japonais, mandarin, farsi, vietnamien, espagnol, n&eacute;erlandais). Ils &eacute;taient alors invit&eacute;s &agrave; r&eacute;fl&eacute;chir et &agrave; s&rsquo;exprimer sur ce qu&rsquo;ils avaient v&eacute;cu ou observ&eacute;. Cet effort de r&eacute;flexion &eacute;tait compl&eacute;t&eacute; par des activit&eacute;s &agrave; port&eacute;e didactique visant, par exemple, &agrave; comprendre l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t de l&rsquo;&eacute;valuation par les pairs, ou encore l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t de la diff&eacute;renciation en classe de SAF comme en classe ordinaire. Sur le plan conceptuel, la formation empruntait ainsi &agrave; la didactique des langues, &agrave; la perspective interculturelle d&rsquo;inclusion des &eacute;l&egrave;ves issus de l&rsquo;immigration, ainsi qu&rsquo;au domaine des sciences de l&rsquo;&eacute;ducation plus g&eacute;n&eacute;ralement.</p> <h2>3. M&eacute;thodologie</h2> <p>L&rsquo;&eacute;tude conduite dans le cadre de cette formation continue est de nature qualitative et elle s&rsquo;inscrit dans le domaine des recherches sur la formation des enseignants, et plus pr&eacute;cis&eacute;ment sur la formation des enseignants intervenant en contexte de diversit&eacute; linguistique et ethnoculturelle (Adamson, Santau et Lee, 2013 ; Chu et Garcia, 2014 ; Coady, Harper et de Jong, 2011 ; Hansen-Thomas, Casey et Grosso, 2012 ; Hutchinson et Hadjioannou, 2011). Puisque l&rsquo;objectif d&rsquo;Alloscol &eacute;tait de soutenir les enseignants et les conseill&egrave;res p&eacute;dagogiques dans le d&eacute;veloppement de leur savoir agir envers les &eacute;l&egrave;ves allophones concernant le fran&ccedil;ais comme langue des apprentissages scolaires, et ce, au sein de milieux eux-m&ecirc;mes en cours d&rsquo;adaptation, nos questions de recherche (QR) &eacute;taient ainsi d&eacute;finies :</p> <p><strong>QR1</strong>&nbsp;: Les participants &agrave; Alloscol ont-ils op&eacute;r&eacute; des changements dans leurs croyances, leurs repr&eacute;sentations et leurs savoirs &agrave; l&rsquo;&eacute;gard des &eacute;l&egrave;ves allophones au cours de la formation ?</p> <p><strong>QR2</strong>&nbsp;: Existe-t-il des liens, dans les discours des participants, entre leur capacit&eacute; d&rsquo;adaptation et les conditions de leurs milieux d&rsquo;enseignement respectifs ?</p> <h3>3.1. Participants</h3> <p>Au total, 30 enseignants et 10 conseill&egrave;res p&eacute;dagogiques ont assist&eacute; &agrave; au moins une journ&eacute;e de formation Alloscol. Parmi ces 40 participants, 39 ont accept&eacute; de participer &agrave; l&rsquo;entrevue initiale r&eacute;alis&eacute;e dans le cadre du projet (seule une participante n&rsquo;a jamais r&eacute;pondu &agrave; l&rsquo;invitation &agrave; participer aux entrevues). &Agrave; l&rsquo;issue de la formation, seuls 23 r&eacute;pondants ont particip&eacute; &agrave; l&rsquo;entrevue finale, dont 17 enseignants et six conseill&egrave;res p&eacute;dagogiques. Cette diff&eacute;rence entre les deux groupes de r&eacute;pondants s&rsquo;explique par des changements de t&acirc;che ou d&rsquo;institution, des raisons personnelles qui les ont pouss&eacute;s &agrave; quitter le projet, ou une d&eacute;mobilisation de certains qui n&rsquo;ont pas r&eacute;pondu &agrave; l&rsquo;invitation &agrave; l&rsquo;entrevue finale. Sont ainsi consid&eacute;r&eacute;s en priorit&eacute; les r&eacute;pondants aux deux entrevues dans les r&eacute;sultats pr&eacute;sent&eacute;s (d&eacute;sign&eacute;s par &laquo;&nbsp;groupe final&nbsp;&raquo;), notamment pour relater les changements dans leurs croyances, leurs repr&eacute;sentations et leurs savoirs.</p> <p>Les participants &eacute;taient tous d&rsquo;origine qu&eacute;b&eacute;coise et de langue premi&egrave;re fran&ccedil;aise, et le groupe final &eacute;tait compos&eacute; de 19 femmes (dont les six conseill&egrave;res p&eacute;dagogiques) et de quatre hommes. Ils repr&eacute;sentaient dix &eacute;coles appartenant &agrave; quatre commissions scolaires de Qu&eacute;bec et de sa r&eacute;gion proche. Trois enseignantes de SAF et deux enseignantes de classe ordinaire enseignaient au primaire, tandis que neuf enseignants de SAF (dont quatre en classe d&rsquo;accueil), deux enseignants disciplinaires (math&eacute;matiques et sciences) et une enseignante d&rsquo;adaptation scolaire repr&eacute;sentaient le secondaire.</p> <h3>3.2. Instruments de recherche</h3> <p>La collecte des donn&eacute;es a &eacute;t&eacute; r&eacute;alis&eacute;e en plusieurs temps et dans diff&eacute;rents contextes. Ainsi, les entrevues initiales et finales ont &eacute;t&eacute; conduites par une m&ecirc;me chercheuse en suivant pour chaque &eacute;tape un questionnaire d&rsquo;entrevue semi-dirig&eacute;e. Les questions d&rsquo;entrevue sur les croyances et les repr&eacute;sentations des participants au d&eacute;but et &agrave; la fin de la formation ont &eacute;t&eacute; con&ccedil;ues en miroir, et elles portaient sur la figure de l&rsquo;&eacute;l&egrave;ve allophone et l&rsquo;acquisition d&rsquo;une langue seconde (L2) en contexte scolaire, sur le ou les mod&egrave;les d&rsquo;accueil offerts dans le milieu du r&eacute;pondant, ainsi que sur le r&ocirc;le et les objectifs p&eacute;dagogiques du r&eacute;pondant vis-&agrave;-vis des &eacute;l&egrave;ves allophones.</p> <p>Les journ&eacute;es de formation ont &eacute;galement &eacute;t&eacute; observ&eacute;es par la chercheuse &agrave; l&rsquo;aide d&rsquo;une grille d&rsquo;observation pour chaque activit&eacute; propos&eacute;e, les diff&eacute;rentes versions des d&eacute;marches p&eacute;dagogiques r&eacute;alis&eacute;es par les bin&ocirc;mes ou les &eacute;quipes de participants ont &eacute;t&eacute; collect&eacute;es, ainsi que la documentation soumise par les formatrices lors des rencontres &agrave; l&rsquo;universit&eacute; ou sur la plateforme 2.0. Les publications des formatrices et des participants sur les forums de la plateforme ont, de surcro&icirc;t, &eacute;t&eacute; relev&eacute;es pendant toute la dur&eacute;e du projet et pendant les six mois suivants. Les enseignants du groupe final ont &eacute;galement livr&eacute; des t&eacute;moignages &agrave; la fin du projet, suite &agrave; l&rsquo;entrevue finale. Cette diversit&eacute; des instruments de recherche a permis de garantir un bon niveau de validit&eacute; des r&eacute;sultats par un effort de triangulation des donn&eacute;es (Mucchielli, 2009).</p> <h3>3.3. Traitement et analyse des donn&eacute;es</h3> <p>Les analyses ont &eacute;t&eacute; r&eacute;alis&eacute;es en deux &eacute;tapes. Dans un premier temps, les 36 heures d&rsquo;enregistrement d&rsquo;entrevue ont &eacute;t&eacute; transcrites et leur analyse &eacute;tait bas&eacute;e sur une strat&eacute;gie de codage ouvert (Patton, 2002), impliquant deux niveaux de triangulation des chercheurs inter et intra-codeur (Miles et Huberman, 2003 ; Mucchielli, 2009) assist&eacute; par ordinateur &agrave; l&rsquo;aide de<em>&nbsp;QDA Miner</em>. Un premier examen empirique des transcriptions a permis de d&eacute;gager des tendances dans les r&eacute;ponses formul&eacute;es par les participants et de constituer une liste pr&eacute;liminaire de codes th&eacute;matiques (Paill&eacute; et Mucchielli, 2013). Une &eacute;preuve de codage a ensuite &eacute;t&eacute; effectu&eacute;e par deux chercheuses sur 20% du corpus. Une confrontation a permis d&rsquo;ajuster la liste de codes qualitatifs, et d&rsquo;obtenir une fiabilit&eacute; de codage inter-juges de 93,7% pour l&rsquo;entrevue initiale et de 93,9% pour l&rsquo;entrevue finale.</p> <p>Dans un second temps, les donn&eacute;es cod&eacute;es ont fait l&rsquo;objet d&rsquo;une extraction pour r&eacute;unir tous les segments correspondant &agrave; un code &agrave; travers l&rsquo;ensemble du corpus, ce que Mucchielli (2009) nomme &laquo;&nbsp;rubrique&nbsp;&raquo;. Des cat&eacute;gories conceptualisantes ont alors &eacute;t&eacute; d&eacute;finies &agrave; partir des rubriques extraites, ce qui a permis d&rsquo;organiser les r&eacute;sultats en fonction des tendances et des particularit&eacute;s du corpus. Les r&eacute;sultats ci-dessous sont ainsi pr&eacute;sent&eacute;s sous la forme des cat&eacute;gories issues de l&rsquo;analyse des donn&eacute;es.</p> <h2>4. R&eacute;sultats et interpr&eacute;tations</h2> <h3>4.1. Adaptation des enseignants et des conseill&egrave;res p&eacute;dagogiques : &eacute;volution des croyances, des repr&eacute;sentations et des savoirs</h3> <p>Concernant la dimension langagi&egrave;re, les participants ont pris conscience du fait que l&rsquo;apprentissage d&rsquo;une langue &agrave; des fins scolaires exige de l&rsquo;&eacute;l&egrave;ve allophone qu&rsquo;il apprenne de fa&ccedil;on articul&eacute;e la langue lui servant &agrave; communiquer et la langue &laquo;&nbsp;acad&eacute;mique&nbsp;&raquo;, laquelle inclut le vocabulaire et les &eacute;nonc&eacute;s typiques des disciplines (d&eacute;finition, description ou d&eacute;monstration, parexemple). Fait &agrave; souligner, les changements dans leurs discours &eacute;taient li&eacute;s &agrave; leurs profils pr&eacute;professionnels et &agrave; leurs t&acirc;ches. Par exemple, les enseignants qui soulignaient l&rsquo;importance du vocabulaire des disciplines seulement dans leur r&eacute;ponse finale avaient comme point commun qu&rsquo;ils n&rsquo;&eacute;taient pas form&eacute;s en didactique des langues avant de s&rsquo;engager dans le projet Alloscol, tandis que les enseignants de SAF en faisaient mention d&egrave;s le d&eacute;but du projet. Les deux extraits d&rsquo;entrevue d&rsquo;un enseignant de sciences au secondaire illustrent tr&egrave;s bien cette &eacute;volution car, s&rsquo;il percevait initialement l&rsquo;enseignement &agrave; des &eacute;l&egrave;ves allophones comme un obstacle au bon d&eacute;roulement de son cours, il explique dans son discours final en quoi le vocabulaire de sa discipline est incontournable et qu&rsquo;il doit, quoiqu&rsquo;il en soit, l&rsquo;enseigner aux &eacute;l&egrave;ves francophones &eacute;galement :</p> <p>&nbsp;</p> <blockquote> <p>ENTREVUE INITIALE<br /> REP- C&#39;est qu&#39;ils doivent avoir atteint un certain niveau de langage, un certain euh, comment je vous dirais euh, une certaine connaissance euh&hellip; Comment je vous dirais ben un certain nombre de mots<br /> INT- Oui de vocabulaire<br /> REP- Qui est de le vocabulaire c&#39;est &ccedil;a. C&#39;est la m&ecirc;me chose en anglais c&#39;est la m&ecirc;me chose en n&#39;importe quelle langue euh la [x3] compr&eacute;hension des verbes euh, les accords des verbes et tout l&agrave; euh, c&#39;est [x3] &agrave; partir du moment o&ugrave; ce niveau-l&agrave; est atteint &ccedil;a peut aller c&#39;est s&ucirc;r que&hellip; la difficult&eacute; qu&#39;on a quand on a des [x6] apprenants allophones dans nos classes r&eacute;guli&egrave;res<a href="http://revue-tdfle.fr/les-numeros/numero-71/50-accueillir-les-eleves-allophones-nouveaux-arrivants-en-milieu-regional-au-quebec-un-defi-pour-tous-les-enseignants#_ftn2" id="_ftnref2">[2]</a>&nbsp;c&#39;est que on peut toujours les rejoindre d&#39;une certaine fa&ccedil;on ces [x2] allophones-l&agrave; pour leur le [x3] [inspiration] le contenu qu&#39;on a &agrave; leur faire passer l&agrave;, mais il faudrait s&#39;y prendre d&#39;une fa&ccedil;on telle que tous les r&eacute;guliers l&agrave;&hellip; s&#39;ennuieraient &eacute;norm&eacute;ment l&agrave;<br /> (Transcription de DS230134)</p> </blockquote> <blockquote> <p>ENTREVUE FINALE<br /> REP &ndash; Parce que le vocabulaire qui est en [x2] lien avec notre [x2] mati&egrave;re d&#39;enseignement ben c&#39;est un vocabulaire qu&#39;on doit expliquer de toute mani&egrave;re aux [x2] jeunes du r&eacute;gulier alors les termes scientifiques et tout mais c&#39;est [x3] tous les termes qui relient ces termes-l&agrave; entre eux qu&rsquo;il faut [x2] faire comprendre<br /> (Transcription de DS230076)</p> </blockquote> <p>Ce remaniement des croyances s&rsquo;est transcrit dans la question du rythme d&rsquo;apprentissage : certains avaient tendance au d&eacute;but de la formation &agrave; vouloir amener leurs &eacute;l&egrave;ves au niveau de comp&eacute;tence d&rsquo;un &eacute;l&egrave;ve qu&eacute;b&eacute;cois en l&rsquo;espace d&rsquo;une ann&eacute;e scolaire, alors que la litt&eacute;rature scientifique nous indique que cinq &agrave; sept ann&eacute;es sont n&eacute;cessaires (Cummins et Early, 2015). On observe dans le corpus une nette tendance &agrave; la r&eacute;&eacute;valuation en faveur d&rsquo;un plus grand respect du temps n&eacute;cessaire &agrave; l&rsquo;acquisition d&rsquo;une L2 en vue de faire des apprentissages scolaires.</p> <p>Par ailleurs, les participants ont r&eacute;alis&eacute; qu&rsquo;ils devaient faire davantage de liens entre l&rsquo;apprentissage de la langue et les apprentissages disciplinaires. Ainsi, en fin de projet, les enseignants de SAF avaient pris conscience du r&ocirc;le &agrave; jouer pour assurer&nbsp;la transition avec la classe ordinaire. La prise en compte du vocabulaire des disciplines dans les contenus &agrave; enseigner en priorit&eacute; fait donc directement &eacute;cho &agrave; ces changements dans la conception de leur r&ocirc;le : &laquo;&nbsp;coordonnatrice &raquo;, &laquo; pont &raquo;, &laquo; le centre, le pivot &raquo;, &laquo; r&ocirc;le d&rsquo;int&eacute;gration sociale, linguistique et scolaire &raquo; sont autant d&rsquo;expressions qu&rsquo;ils ont utilis&eacute;es pour qualifier ce r&ocirc;le lors de l&rsquo;entrevue finale. En d&eacute;but de formation, ces m&ecirc;mes enseignants avaient opt&eacute; pour un vocabulaire tel que &laquo;&nbsp;personne-ressource &raquo; ou &laquo;&nbsp;mod&egrave;le&nbsp;&raquo;, un changement qui t&eacute;moigne donc d&rsquo;une meilleure prise en compte des besoins acad&eacute;miques des &eacute;l&egrave;ves allophones. Au sein de leur &eacute;quipe p&eacute;dagogique, ils estimaient souvent incarner des personnes-ressources pour les enseignants de la classe ordinaire au d&eacute;but de la formation. &Agrave; la fin, ils abordaient cette dimension davantage en termes de &laquo;&nbsp;collaboration &raquo; avec leurs coll&egrave;gues et &laquo; d&rsquo;arrimage &raquo; des enseignements entre le SAF et la classe ordinaire.</p> <p>Pour les enseignants de classe ordinaire, le r&ocirc;le initialement d&eacute;fini comme celui de soutien &agrave; l&rsquo;int&eacute;gration sociale a &eacute;volu&eacute; en un r&ocirc;le plus complexe, incluant le soutien &agrave; l&rsquo;apprentissage du fran&ccedil;ais. Des expressions comme &laquo; un r&ocirc;le multiple &raquo;, &laquo; un guide, une personne de r&eacute;f&eacute;rence &raquo; ou encore &laquo; un soutien en classe [&hellip;] mais aussi en dehors de la classe &raquo; sont ressorties de leur discours final, ce qui &eacute;tait l&rsquo;apanage des enseignants de SAF au d&eacute;but d&rsquo;Alloscol. Dans le m&ecirc;me ordre d&rsquo;id&eacute;e, un enseignant de math&eacute;matiques au secondaire a expliqu&eacute; que le fait de faire vivre des r&eacute;ussites aux &eacute;l&egrave;ves allophones dans les disciplines faciliterait leur int&eacute;gration en permettant le d&eacute;veloppement d&rsquo;un plus grand sentiment d&rsquo;appartenance au sein de l&rsquo;&eacute;cole :</p> <blockquote> <p>REP &ndash; Un r&ocirc;le fondamental parce qu&#39;ils vont vivre certaines r&eacute;ussites en math&eacute;matiques parce que &ccedil;a va devenir &agrave; leur niveau et non pas euh totalement inaccessible comme auparavant donc euh le fait d&#39;avoir des r&eacute;ussites scolaires peut permettre l&#39;int&eacute;gration de ces jeunes sentir qu&#39;ils appartiennent &agrave; un groupe parce que avec les vingt &eacute;l&egrave;ves ben ils se reconnaissent ensemble ils peuvent travailler en &eacute;quipe ils peuvent s&#39;aider donc euh je crois que c&#39;est tr&egrave;s bien pour qu&#39;ils p- c&#39;est [x2] un bon moyen d&#39;int&eacute;gration de ces &eacute;l&egrave;ves.<br /> (Transcription de DS230069)</p> </blockquote> <p>Certains r&eacute;pondants associaient ce changement dans leurs croyances et dans leurs repr&eacute;sentations aux apports des activit&eacute;s de r&eacute;flexion et de collaboration propos&eacute;es pendant le projet Alloscol. Ils ont largement identifi&eacute; les activit&eacute;s v&eacute;cues en langue &eacute;trang&egrave;re comme des moments cl&eacute;s pour leur progression, notamment gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;empathie ainsi d&eacute;velopp&eacute;e envers les &eacute;l&egrave;ves. Les activit&eacute;s &agrave; r&eacute;aliser en collaboration avec leurs coll&egrave;gues &eacute;taient &eacute;galement per&ccedil;ues comme centrales, car elles leur auraient permis d&rsquo;en apprendre davantage sur les interventions de leurs coll&egrave;gues en classe ordinaire ou en SAF et de prendre conscience des besoins de l&rsquo;&eacute;l&egrave;ve allophone en fran&ccedil;ais et dans les disciplines.</p> <p>L&rsquo;&eacute;volution de la conception des r&ocirc;les de chacun s&rsquo;est d&rsquo;ailleurs refl&eacute;t&eacute;e dans leurs d&eacute;clarations concernant leurs objectifs et leurs approches d&rsquo;enseignement envers les &eacute;l&egrave;ves allophones. Un plus grand sentiment d&rsquo;efficacit&eacute; relativement &agrave; la question de l&rsquo;accueil, de l&rsquo;int&eacute;gration et de l&rsquo;accompagnement socioscolaire traverse le corpus final, notamment gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;am&eacute;lioration des pratiques emprunt&eacute;es aux activit&eacute;s et aux ressources d&rsquo;Alloscol, particuli&egrave;rement : 1) le recours d&eacute;clar&eacute; &agrave; davantage de diff&eacute;renciation pour rejoindre les diff&eacute;rents profils des &eacute;l&egrave;ves allophones en fonction de leurs parcours scolaires (&eacute;l&egrave;ve &agrave; niveau ou sous-scolaris&eacute;) ; 2) la pr&eacute;s&eacute;ance de l&rsquo;oral sur l&rsquo;&eacute;crit dans la planification des activit&eacute;s de classe pour v&eacute;rifier la compr&eacute;hension, pour mobiliser les connaissances ant&eacute;rieures ou encore pour pr&eacute;parer un exercice de r&eacute;daction ; 3) l&rsquo;explicitation des consignes pour s&rsquo;assurer de la compr&eacute;hension de tous 4) la contextualisation des &eacute;nonc&eacute;s, comme les strat&eacute;gies de questionnement des &eacute;l&egrave;ves &agrave; port&eacute;e diagnostique ou le recours &agrave; des supports visuels.</p> <p>La mise en application de nouvelles pratiques s&rsquo;est concr&eacute;tis&eacute;e chez certains enseignants par une &eacute;tape que nous nommons &laquo;&nbsp;validation empirique&nbsp;&raquo; : ils n&rsquo;ont d&eacute;clar&eacute; int&eacute;grer certaines pratiques de fa&ccedil;on permanente qu&rsquo;apr&egrave;s en avoir constat&eacute; la bonne r&eacute;ception de leurs &eacute;l&egrave;ves allophones. Un enseignant de SAF a d&rsquo;ailleurs livr&eacute; un t&eacute;moignage dans lequel il souligne l&rsquo;importance d&rsquo;int&eacute;grer les contenus disciplinaires en SAF et parle du point de vue de ses &eacute;l&egrave;ves :</p> <blockquote> <p>Rep &ndash; [...] il faut arrimer le plus possible la classe de francisation avec la classe r&eacute;guli&egrave;re, ce que je ne faisais pas du tout. Moi je donnais un cours de francisation<a href="http://revue-tdfle.fr/les-numeros/numero-71/50-accueillir-les-eleves-allophones-nouveaux-arrivants-en-milieu-regional-au-quebec-un-defi-pour-tous-les-enseignants#_ftn3" id="_ftnref3">[3]</a>, c&rsquo;&eacute;tait toujours un cours o&ugrave; on avait des notions, des exercices, ainsi de suite. Lorsque j&rsquo;ai allum&eacute; que &ccedil;a pourrait &ecirc;tre beaucoup plus signifiant pour eux d&rsquo;aller chercher ce qu&rsquo;ils font dans leurs cours et de l&rsquo;apporter dans leur cours de francisation, le cours de francisation est devenu moins p&eacute;nible pour moi, moins p&eacute;nible pour les &eacute;l&egrave;ves, parce qu&rsquo;ils voient le b&eacute;n&eacute;fice que &ccedil;a apporte [2 sec] &ccedil;a, si j&rsquo;avais pas assist&eacute; &agrave; Alloscol, je l&rsquo;aurais probablement jamais fait.<br /> (Transcription du t&eacute;moignage vid&eacute;o #1)</p> </blockquote> <p>Ces r&eacute;sultats indiquent non seulement que les enseignants ont op&eacute;r&eacute; des changements dans leurs croyances, leurs repr&eacute;sentations et leurs savoirs &agrave; l&rsquo;&eacute;gard des &eacute;l&egrave;ves allophones, mais &eacute;galement qu&rsquo;ils &eacute;taient en mesure d&rsquo;identifier les contenus et les strat&eacute;gies de formation qui ont soutenu leur effort d&rsquo;adaptation. Ces changements corroborent ainsi le cadre de Korthagen (2010a) sur l&rsquo;approche int&eacute;grative de formation des enseignants, incluant r&eacute;flexion et collaboration dans une perspective contextualis&eacute;e. Ils illustrent par ailleurs la nature individuelle du processus d&rsquo;adaptation, en ce sens que les participants ont &eacute;volu&eacute; diff&eacute;remment selon leur formation initiale et selon leur r&ocirc;le au sein de l&rsquo;&eacute;quipe-&eacute;cole (SAF ou classe ordinaire), particuli&egrave;rement en mati&egrave;re de connaissances didactiques et de pratiques de classe &agrave; int&eacute;grer &agrave; l&rsquo;enseignement. &Agrave; l&rsquo;&eacute;chelle du groupe final, ces changements ont conduit &agrave; une meilleure compr&eacute;hension des besoins des &eacute;l&egrave;ves allophones, notamment l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t de pr&eacute;parer les activit&eacute;s de la classe ordinaire &agrave; travers le SAF et de soutenir, r&eacute;ciproquement, le d&eacute;veloppement du fran&ccedil;ais au sein de l&rsquo;&eacute;cole, au-del&agrave; des murs de la classe de SAF.</p> <h3>4.2. Capacit&eacute; d&rsquo;adaptation et conditions d&rsquo;intervention &eacute;ducative envers les &eacute;l&egrave;ves allophones</h3> <p>Si ces r&eacute;sultats r&eacute;v&egrave;lent que les participants se sont engag&eacute;s dans un processus d&rsquo;adaptation en r&eacute;ponse &agrave; l&rsquo;&eacute;volution de leurs milieux d&rsquo;enseignement, il appara&icirc;t que plusieurs facteurs semblent influencer la progression d&rsquo;un participant donn&eacute; et, par cons&eacute;quent, la mise en &oelig;uvre des pratiques sugg&eacute;r&eacute;es en cours de formation.</p> <p>En l&rsquo;occurrence, les enseignants et les conseill&egrave;res p&eacute;dagogiques impliqu&eacute;s dans le projet connaissaient des conditions d&rsquo;intervention tr&egrave;s variables d&rsquo;un milieu &agrave; l&rsquo;autre. Dans l&rsquo;une des commissions scolaires, les enseignants charg&eacute;s de l&rsquo;accueil et de l&rsquo;enseignement aux &eacute;l&egrave;ves allophones intervenaient en &laquo;&nbsp;cheminement particulier continu&nbsp;&raquo; (CPC), c&rsquo;est-&agrave;-dire en classe d&rsquo;adaptation scolaire pour des &eacute;l&egrave;ves pr&eacute;sentant des difficult&eacute;s d&rsquo;apprentissage, sans pour autant que les &eacute;l&egrave;ves allophones accueillis aient re&ccedil;u un diagnostic de cette nature. Dans une autre commission, le recrutement des enseignants et des conseill&egrave;res assign&eacute;s aux SASAF n&rsquo;&eacute;tait pas bas&eacute; sur des qualifications en didactique des langues, mais sur la combinaison des t&acirc;ches d&rsquo;enseignants de fran&ccedil;ais L1 ou d&rsquo;adaptation scolaire, qui se voyaient alors assurer quelques heures de SAF par semaine, comme l&rsquo;explique en ses propres termes cette enseignante form&eacute;e en adaptation scolaire&nbsp;:</p> <blockquote> <p>REP &ndash; Moi, je suis pr&eacute;caire encore, hein. Puis, vous avez remarqu&eacute;, en formation, nous sommes beaucoup [&hellip;] Nous sommes beaucoup d&rsquo;enseignants pr&eacute;caires qui se retrouvent avec cette&hellip; Je peux pas dire charge de travail, mais en fait c&rsquo;est &ccedil;a. Avec ce travail-l&agrave; qui arrive au compte-goutte et on compl&egrave;te souvent nos t&acirc;ches avec la francisation puisqu&rsquo;il y a rien encore dans l&rsquo;organisation scolaire [&hellip;]<br /> (Transcription de DS230165)</p> </blockquote> <p>Les r&eacute;pondants issus des deux autres commissions scolaires repr&eacute;sent&eacute;es avaient, quant &agrave; eux, des qualifications ou de l&rsquo;exp&eacute;rience dans l&rsquo;accueil et l&rsquo;int&eacute;gration des &eacute;l&egrave;ves allophones avant d&rsquo;assumer leur t&acirc;che au SAF, et leurs &eacute;coles disposaient de diff&eacute;rents mod&egrave;les de service, voire d&rsquo;une offre de service combin&eacute;e (classe d&rsquo;accueil et int&eacute;gration en classe ordinaire avec SAF). Les politiques en mati&egrave;re de ressources humaines et d&rsquo;adaptation syst&eacute;mique aux besoins des &eacute;l&egrave;ves allophones pr&eacute;sentaient ainsi des variations substantielles d&rsquo;une commission scolaire &agrave; l&rsquo;autre et, dans certains cas, d&rsquo;une &eacute;cole &agrave; l&rsquo;autre.</p> <p>Parall&egrave;lement, le sentiment de pr&eacute;paration pour intervenir aupr&egrave;s d&rsquo;&eacute;l&egrave;ves allophones d&eacute;pendait intimement des profils des r&eacute;pondants, puisque celles et ceux qui n&rsquo;avaient pas re&ccedil;u de formation en didactique des langues, que ce soit en SAF ou en classe ordinaire, ont d&eacute;clar&eacute; ne pas &ecirc;tre pr&eacute;par&eacute;s &agrave; cet aspect de leur mission. Cependant, certains intervenants du SAF se sentaient devenir de plus en plus comp&eacute;tents gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;exp&eacute;rience ou, comme l&rsquo;explique cette enseignante form&eacute;e en adaptation scolaire et intervenant en classe d&rsquo;accueil, gr&acirc;ce au transfert de certaines comp&eacute;tences ou connaissances acquises dans son domaine de sp&eacute;cialisation :</p> <blockquote> <p>INT &ndash; Ok, est-ce que vous pensez que votre formation et votre exp&eacute;rience vous ont pr&eacute;par&eacute;e &agrave; recevoir des &eacute;l&egrave;ves issus de l&#39;immigration ?<br /> [&hellip;]<br /> REP &ndash; Ben nous en adaptation scolaire c&#39;est d&eacute;j&agrave; euh quand j&#39;ai fait mon bac<a href="http://revue-tdfle.fr/les-numeros/numero-71/50-accueillir-les-eleves-allophones-nouveaux-arrivants-en-milieu-regional-au-quebec-un-defi-pour-tous-les-enseignants#_ftn4" id="_ftnref4">[4]</a>&nbsp;l&agrave; c&#39;&eacute;tait d&eacute;j&agrave; int&eacute;gr&eacute; dans notre programme tu sais on a pas eu euh [x2] francisation 101<a href="http://revue-tdfle.fr/les-numeros/numero-71/50-accueillir-les-eleves-allophones-nouveaux-arrivants-en-milieu-regional-au-quebec-un-defi-pour-tous-les-enseignants#_ftn5" id="_ftnref5">[5]</a>&nbsp;l&agrave; c&#39;est pas &ccedil;a l&agrave; mais tu sais dans quand m&ecirc;me le cadre de certains cours l&agrave; dans l&#39;intervention aupr&egrave;s des &eacute;l&egrave;ves ayant des probl&eacute;matiques XY ben on a vu un peu euh comment intervenir aupr&egrave;s des &eacute;l&egrave;ves allophones, sauf que tu sais, mettons que j&#39;aurais eu des [x2] &eacute;l&egrave;ves je [x2] prends un &eacute;l&egrave;ve je le sors puis je fais du un &agrave; un l&agrave; probablement que j&#39;aurais &eacute;t&eacute; euh peut-&ecirc;tre mieux outill&eacute;e que d&#39;avoir un groupe aussi grand que ce que j&#39;ai l&agrave;. Par contre en adaptation scolaire nous on apprend la diff&eacute;renciation donc, probablement que c&#39;est peut-&ecirc;tre moins pire pour moi d&#39;&ecirc;tre confront&eacute;e &agrave; une situation o&ugrave; tous les &eacute;l&egrave;ves sont &agrave; des niveaux diff&eacute;rents que si j&#39;avais &eacute;t&eacute; par exemple euh un prof dans au r&eacute;gulier qui est habitu&eacute; &agrave; avoir un groupe tout le monde au m&ecirc;me niveau, l&agrave;.<br /> (Transcription de DS230167)</p> </blockquote> <p>Par ailleurs, une lecture transversale des donn&eacute;es a r&eacute;v&eacute;l&eacute; que les enseignants qui intervenaient dans les &eacute;coles secondaires semblaient avoir davantage profit&eacute; des apports de la formation continue que leurs cons&oelig;urs du primaire. En effet, en comparant les entrevues finales de deux participants distincts, il appara&icirc;t que les enseignants du secondaire ont plus souvent d&eacute;velopp&eacute; leurs r&eacute;ponses en termes de progression dans le savoir agir envers les &eacute;l&egrave;ves allophones. Ce constat ne permet cependant pas, &agrave; lui seul, de d&eacute;terminer les facteurs ayant soutenu ou limit&eacute; l&rsquo;influence des activit&eacute;s de formation pour la question des ordres d&rsquo;enseignement (primaire ou secondaire).</p> <p>En outre, quelles que soient les conditions du milieu ou la fonction du r&eacute;pondant, un th&egrave;me r&eacute;current dans le corpus est le manque de temps pour proc&eacute;der &agrave; une adaptation ad&eacute;quate et efficace de l&rsquo;enseignement. Quelques participants ont ainsi d&eacute;clar&eacute;, concernant la conception de d&eacute;marches p&eacute;dagogiques collaboratives, qu&rsquo;ils &eacute;prouvaient de la difficult&eacute; &agrave; planifier une diff&eacute;renciation des apprentissages ou &agrave; mettre en application certaines pratiques de fa&ccedil;on r&eacute;guli&egrave;re pour cette raison. Concernant l&rsquo;utilisation de la plateforme collaborative entre deux journ&eacute;es de formation, c&rsquo;est encore le manque de temps qui &eacute;tait invoqu&eacute; pour justifier l&rsquo;absence de plusieurs participants sur les forums. L&rsquo;une des conseill&egrave;res p&eacute;dagogiques explique cet &eacute;tat de fait :</p> <blockquote> <p>INT &ndash; D&egrave;s le d&eacute;but de la formation, il y a des outils qui ont &eacute;t&eacute; mis en place dans le cadre de la formation. Je pense &agrave; l&#39;ann&eacute;e un, vous avez particuli&egrave;rement v&eacute;cu [&hellip;] la plateforme internet. Est-ce que vous pouvez me dire ce que vous avez pens&eacute; de ces outils [&hellip;] est-ce que vous les avez trouv&eacute;s utiles ?&nbsp;<br /> REP &ndash; Euh [soupir] la conception &ccedil;a va ce que je trouve difficile c&#39;est euh dans le contexte des t&acirc;ches d&#39;aujourd&#39;hui de [x3] d&#39;arriver &agrave; en fait il faut se faire violence et se dire on le met &agrave; l&#39;agenda, il faut le faire parce que sinon il y a une omnipr&eacute;sence des outils euh interactifs, donc la sollicitation elle est au-del&agrave; du nombre d&#39;heures qu&#39;il y a dans une semaine donc &ccedil;a prend un calcul judicieux du moment et une rigueur dans l&#39;utilisation des outils. C&#39;est pas les outils qui sont remis en question, c&#39;est la gestion du temps qui est li&eacute;e &agrave; l&#39;utilisation des outils.<br /> (Transcription de DS230174)</p> </blockquote> <p>Le discours de l&rsquo;une des conseill&egrave;res p&eacute;dagogiques abondait &eacute;galement en ce sens, puisqu&rsquo;elle expliquait que seuls 10% de sa t&acirc;che &eacute;taient allou&eacute;s au SAF, ce qui rendait difficile le travail collaboratif avec les enseignants et donc la mise en &oelig;uvre de temps de r&eacute;flexion ou de conception en &eacute;quipe.</p> <p>Ces r&eacute;sultats r&eacute;v&egrave;lent ainsi que, si la participation &agrave; une formation telle qu&rsquo;Alloscol a permis aux r&eacute;pondants de d&eacute;velopper des savoirs, des savoir-faire et des savoir-&ecirc;tre mieux adapt&eacute;s &agrave; l&rsquo;accueil d&rsquo;&eacute;l&egrave;ves allophones, il semblerait que les facteurs contextuels ainsi que l&rsquo;organisation des services &ndash; notamment les profils privil&eacute;gi&eacute;s pour intervenir au SAF par un milieu ou un autre &ndash; influencent significativement les pr&eacute;alables de chacun et donc la progression en mati&egrave;re d&rsquo;intervention aupr&egrave;s d&rsquo;&eacute;l&egrave;ves allophones dans le contexte d&rsquo;un programme de formation continue.</p> <h2>Conclusion</h2> <p>Comme tout travail empirique, cette &eacute;tude pr&eacute;sente des limites d&rsquo;interpr&eacute;tation&nbsp;: r&eacute;alis&eacute;e dans un contexte pr&eacute;cis, ces r&eacute;sultats ne permettent pas de g&eacute;n&eacute;raliser &agrave; l&rsquo;ensemble des milieux scolaires qu&eacute;b&eacute;cois les interpr&eacute;tations qui en d&eacute;coulent. N&eacute;anmoins, ils r&eacute;v&egrave;lent des disparit&eacute;s dans les conditions d&rsquo;enseignement aux &eacute;l&egrave;ves allophones, notamment en ce qui concerne le manque de pr&eacute;paration de certains enseignants assign&eacute;s au SAF.</p> <p>Par ailleurs, si les participants ont, dans les faits, tous d&eacute;montr&eacute; une progression dans leurs savoirs, leurs croyances et leurs repr&eacute;sentations, l&rsquo;analyse des donn&eacute;es a r&eacute;v&eacute;l&eacute; une lacune importante dans les conceptions de certains en d&eacute;but de formation sur l&rsquo;acquisition d&rsquo;une L2 et sur la d&eacute;finition de leur r&ocirc;le envers l&rsquo;&eacute;l&egrave;ve allophone. Les conditions professionnelles semblent par ailleurs pouvoir entraver la mise en &oelig;uvre d&rsquo;une dynamique de collaboration soutenue dans le temps entre les diff&eacute;rents membres de l&rsquo;&eacute;quipe p&eacute;dagogique, ce qui pose la question, &agrave; long terme, du maintien des pratiques syst&eacute;miques gagnantes dans les milieux.</p> <p>Dans un contexte d&rsquo;int&eacute;gration de plus en plus massif des &eacute;l&egrave;ves allophones issus de l&rsquo;immigration au Qu&eacute;bec, et consid&eacute;rant que le mod&egrave;le d&rsquo;int&eacute;gration le plus fr&eacute;quent en r&eacute;gion est toujours l&rsquo;int&eacute;gration en classe ordinaire aupr&egrave;s des enseignants titulaires ou disciplinaires, il est donc urgent d&rsquo;int&eacute;grer cette probl&eacute;matique &agrave; la pr&eacute;paration professionnelle de tous les enseignants, et ce, quelle que soit leur sp&eacute;cialit&eacute;.</p> <p>En guise de prospective, il conviendrait de conduire davantage de recherches sur les conditions d&rsquo;intervention des enseignants aupr&egrave;s des &eacute;l&egrave;ves allophones eu &eacute;gard leur pr&eacute;paration professionnelle, notamment pour voir si elles diff&egrave;rent selon les localit&eacute;s ou selon les situations urbaines. Il serait par ailleurs int&eacute;ressant d&rsquo;&eacute;tudier les initiatives mises en &oelig;uvre par les institutions scolaires, par les &eacute;quipes p&eacute;dagogiques et par les enseignants pour r&eacute;pondre &agrave; la transformation progressive de l&rsquo;&eacute;cole et, plus particuli&egrave;rement, pour soutenir la r&eacute;ussite des &eacute;l&egrave;ves allophones issus de l&rsquo;immigration au fil de ce profond changement.</p> <h2>Bibliographie</h2> <p>ADAMSON, Karen, SANTAU, Alexandra et LEE, Okhee, &laquo;&nbsp;The impact of professional development on elementary teachers&#39; strategies for teaching science with diverse student groups in urban elementary schools&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Journal of Science Teacher Education</em>&nbsp;n&ordm;24(3), 2013, p. 553-571.</p> <p>BORG, Simon,&nbsp;<em>Teacher Cognition and Language Education: Research and Practice</em>, Londres, Bloomsbury Academic, 2006.</p> <p>CHNANE-DAVIN, Fatima (dir.),&nbsp;<em>Le fran&ccedil;ais langue seconde en milieu scolaire fran&ccedil;ais</em><em>&nbsp;: cultures d&#39;enseignement et cultures d&#39;apprentissage</em>, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 2011.</p> <p>CHU, Szu-Yin et GARCIA, Shernaz, &laquo;&nbsp;Culturally responsive teaching efficacy beliefs of in-service special education teachers&nbsp;&raquo;<em>, Remedial and Special Education</em>&nbsp;n&ordm;35(4), 2014, p. 218-232.</p> <p>COADY, Maria, HARPER, Candace et DE JONG, Esther, &laquo;&nbsp;From preservice to practice: Mainstream elementary teacher beliefs of preparation and efficacy with English language learners in the state of Florida&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Bilingual Research Journal&nbsp;</em>n&ordm;34(2), 2011, p. 223-239.</p> <p>CUMMINS, Jim et EARLY, Margaret,&nbsp;<em>Big ideas for expanding minds: Teaching English language learners across the curriculum</em>, Toronto, Pearson, 2015.</p> <p>DE KONINCK, Zita et ARMAND, Fran&ccedil;oise, &laquo;&nbsp;Entre m&eacute;tropole et r&eacute;gions, un m&ecirc;me raisonnement peut-il soutenir un choix de mod&egrave;les de services diff&eacute;rent pour l&rsquo;int&eacute;gration des &eacute;l&egrave;ves allophones ? &raquo;,&nbsp;<em>Diversit&eacute; urbaine</em>&nbsp;n&ordm;12(1), 2012a, p. 69-85.</p> <p>DE KONINCK, Zita et QUERRIEN, Diane, &laquo;&nbsp;Formation initiale et formation continue &agrave; la diversit&eacute; en r&eacute;gion&nbsp;: le cas de l&rsquo;Universit&eacute; Laval&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Diversit&eacute; Canadienne</em>&nbsp;n&ordm;11(2), 2014, p. 125-130.</p> <p>DE KONINCK, Zita, &laquo;&nbsp;Les services d&rsquo;accueil, d&rsquo;int&eacute;gration scolaire et de francisation offerts aux immigrants au Qu&eacute;bec&nbsp;&raquo;, dans Rodriguez Garcia D. (dir.),&nbsp;<em>Managing immigration and diversity in Canada: A transatlantic dialogue in the New Age of Migration</em>, Montr&eacute;al, McGill-Queen&rsquo;s University Press, 2012, p. 305-324.</p> <p>DONAGHUE, Helen, &laquo;&nbsp;An instrument to elicit teachers&#39; beliefs and assumptions&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>ELT Journal</em>&nbsp;n&ordm;57(4), 2003, p. 344-351.</p> <p>GOUVERNEMENT DU QU&Eacute;BEC,&nbsp;<em>Th&eacute;saurus de l&rsquo;activit&eacute; gouvernementale&nbsp;: Commission scolaire</em>, 2014. Disponible &agrave; l&rsquo;adresse :&nbsp;<a href="http://www.thesaurus.gouv.qc.ca/tag/terme.do?id=2881">http://www.thesaurus.gouv.qc.ca/tag/terme.do?id=2881</a></p> <p>GOUVERNEMENT DU QU&Eacute;BEC, INSTITUT DE LA STATISTIQUE DU QU&Eacute;BEC,&nbsp;<em>Le bilan d&eacute;mographique du Qu&eacute;bec&nbsp;:</em><em>&nbsp;&Eacute;dition 2016</em>, Qu&eacute;bec, Biblioth&egrave;que et Archives Canada, 2016.</p> <p>HANSEN-THOMAS, Holly, CASEY, Patricia J. et GROSSO, Liliana, &laquo;&nbsp;Multiplying the effect of professional development: Teachers training teachers<em>&nbsp;</em>&raquo;,&nbsp;<em>TESOL Journal</em>&nbsp;n&ordm;4(1), 2013, p. 129-150.</p> <p>HUTCHINSON, Mary et HADJIOANNOU, Xenia, &laquo;&nbsp;Better serving the needs of limited English proficient (LEP) students in the mainstream classroom: examining the impact of an inquiry-based hybrid professional development program<em>&nbsp;</em>&raquo;,&nbsp;<em>Teachers and Teaching</em>&nbsp;n&ordm;17(1), 2011, p. 91-113.</p> <p>KORTHAGEN, Fred A., &laquo;&nbsp;Situated learning theory and the pedagogy of teacher education: Towards an integrative view of teacher behavior and teacher learning&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Teaching and Teacher Education: An International Journal of Research and Studies</em>&nbsp;n&ordm;26(1), 2010a, p. 98-106.</p> <p>LAROCHELLE-AUDET, Julie, BORRI-ANADON, Corina, MC ANDREW, Marie et POTVIN, Maryse,&nbsp;<em>La formation initiale du personnel scolaire sur la diversit&eacute; ethnoculturelle, religieuse et linguistique dans les universit&eacute;s qu&eacute;b&eacute;coises : portrait quantitatif et qualitatif,</em>&nbsp;rapport de recherche, Montr&eacute;al, UQAM/Universit&eacute; de Montr&eacute;al, 2013.</p> <p>LE BOTERF, Guy,&nbsp;<em>Comp&eacute;tence et navigation professionnelle</em>, Paris, Les &Eacute;ditions d&rsquo;Organisation, 2000.</p> <p>MC ANDREW, Marie et &Eacute;QUIPE DU GRIES,&nbsp;<em>La r&eacute;ussite &eacute;ducative des &eacute;l&egrave;ves issus de l&rsquo;immigration&nbsp;: Dix ans de recherche et d&rsquo;intervention au Qu&eacute;bec</em>, Montr&eacute;al, Presses de l&rsquo;Universit&eacute; de Montr&eacute;al, 2015.</p> <p>MILES, Matthew B. et HUBERMAN, A. Michael,&nbsp;<em>Analyse des donn&eacute;es qualitatives</em>, Bruxelles, De Boeck Universit&eacute;, 2003.</p> <p>MINIST&Egrave;RE DE L&rsquo;&Eacute;DUCATION, DU LOISIR ET DU SPORT (MELS),&nbsp;<em>Cadre de r&eacute;f&eacute;rence&nbsp;: Accueil et int&eacute;gration des &eacute;l&egrave;ves issus de l&rsquo;immigration au Qu&eacute;bec</em>, 2014. Disponible &agrave; l&rsquo;adresse&nbsp;:&nbsp;<a href="http://www.ecoleplurielle.ca/wp-content/uploads/2014/09/AccueilIntegration_2_OrganisationServices.pdf">http://www.ecoleplurielle.ca/wp-content/uploads/2014/09/AccueilIntegration_2_OrganisationServices.pdf</a></p> <p>MINIST&Egrave;RE DE L&rsquo;IMMIGRATION, DE LA DIVERSIT&Eacute; ET DE L&rsquo;INCLUSION (MIDI),&nbsp;<em>Politique qu&eacute;b&eacute;coise en mati&egrave;re d&rsquo;immigration, de participation et d&rsquo;inclusion&nbsp;: Recueil de statistiques</em>, 2016. Disponible &agrave; l&rsquo;adresse :&nbsp;<a href="http://www.midi.gouv.qc.ca/publications/fr/dossiers/RecueilStatistiques.pdf">http://www.midi.gouv.qc.ca/publications/fr/dossiers/RecueilStatistiques.pdf</a></p> <p>MINIST&Egrave;RE DE L&#39;IMMIGRATION ET DES COMMUNAUT&Eacute;S CULTURELLES (MICC).&nbsp;<em>Portrait statistique : L&#39;immigration permanente au Qu&eacute;bec selon les cat&eacute;gories d&#39;immigration et quelques composantes 2009-2013</em>. Qu&eacute;bec, Gouvernement du Qu&eacute;bec, 2014. Disponible &agrave; l&rsquo;adresse&nbsp;:&nbsp;<a href="http://www.stat.gouv.qc.ca/statistiques/population-demographie/bilan2016.pdf">http://www.stat.gouv.qc.ca/statistiques/population-demographie/bilan2016.pdf</a></p> <p>MUCCHIELLI, Alex,&nbsp;<em>Dictionnaire des m&eacute;thodes qualitatives en sciences humaines,</em>&nbsp;Paris, Armand Colin, 2009.</p> <p>PAILL&Eacute;, Pierre et MUCCHIELLI, Alex,&nbsp;<em>L&rsquo;analyse qualitative en sciences humaines et sociales,&nbsp;</em>Paris, Armand Colin, 2013.</p> <p>PATTON, Michael Quinn,&nbsp;<em>Qualitative research and evaluation methods</em>, Saint Paul, SAGE Publications, 2002.</p> <p>RICHER, Jean-Jacques, &laquo;&nbsp;De l&rsquo;enseignant de langue(s) au professionnel des langues&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>&Eacute;tudes de linguistique appliqu&eacute;e</em>, n&ordm;161, 2011, p. 63-77.</p> <h2>Notes&nbsp;</h2> <p><a href="http://revue-tdfle.fr/les-numeros/numero-71/50-accueillir-les-eleves-allophones-nouveaux-arrivants-en-milieu-regional-au-quebec-un-defi-pour-tous-les-enseignants#_ftnref1" id="_ftn1">[1]</a>&nbsp;Projet financ&eacute; par le minist&egrave;re de l&rsquo;&Eacute;ducation, du Loisir et du Sport du Qu&eacute;bec dans le cadre des chantiers 7 visant la formation continue du personnel scolaire. Responsable&nbsp;: Zita De Koninck, PhD.</p> <p><a href="http://revue-tdfle.fr/les-numeros/numero-71/50-accueillir-les-eleves-allophones-nouveaux-arrivants-en-milieu-regional-au-quebec-un-defi-pour-tous-les-enseignants#_ftnref2" id="_ftn2">[2]</a>&nbsp;Dans les milieux scolaires, l&rsquo;adjectif &laquo;&nbsp;r&eacute;gulier&nbsp;&raquo; d&eacute;signe les classes ordinaires.</p> <p><a href="http://revue-tdfle.fr/les-numeros/numero-71/50-accueillir-les-eleves-allophones-nouveaux-arrivants-en-milieu-regional-au-quebec-un-defi-pour-tous-les-enseignants#_ftnref3" id="_ftn3">[3]</a>&nbsp;La d&eacute;signation &laquo;&nbsp;SAF&nbsp;&raquo; n&rsquo;est que peu employ&eacute;e dans les milieux scolaires qu&eacute;b&eacute;cois qui empruntent le terme &laquo;&nbsp;francisation&nbsp;&raquo; par abus de langage, alors utilis&eacute; dans le secteur de la formation des adultes au Qu&eacute;bec au moment du projet. L&rsquo;emploi du terme est aujourd&rsquo;hui questionn&eacute;.</p> <p><a href="http://revue-tdfle.fr/les-numeros/numero-71/50-accueillir-les-eleves-allophones-nouveaux-arrivants-en-milieu-regional-au-quebec-un-defi-pour-tous-les-enseignants#_ftnref4" id="_ftn4">[4]</a>&nbsp;&laquo;&nbsp;Bac&nbsp;&raquo; est le diminutif de &laquo;&nbsp;baccalaur&eacute;at&nbsp;&raquo;, dipl&ocirc;me de premier cycle universitaire au Qu&eacute;bec.</p> <p><a href="http://revue-tdfle.fr/les-numeros/numero-71/50-accueillir-les-eleves-allophones-nouveaux-arrivants-en-milieu-regional-au-quebec-un-defi-pour-tous-les-enseignants#_ftnref5" id="_ftn5">[5]</a>&nbsp;En Am&eacute;rique du Nord, les cours 101 d&eacute;signent les cours d&rsquo;introduction &agrave; une discipline.</p> <p>&nbsp;</p> <h3>Diane QUERRIEN<br /> D&eacute;partement d&#39;&Eacute;tudes fran&ccedil;aises<br /> Universit&eacute; Concordia, Montr&eacute;al</h3>