<p><em><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Par Philippe Joron, Sociologue,&nbsp;Professeur &agrave; l&rsquo;universit&eacute; Paul-Val&eacute;ry Montpellier 3,&nbsp;Directeur du LEIRIS.</span></span></span></span></em></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">S&rsquo;ils sont devenus accessibles au plus grand nombre et surtout avouables dans leur exploration, les univers de la pornographie n&rsquo;en restent pas moins marqu&eacute;s du sceau de la confidentialit&eacute; lorsqu&rsquo;il s&rsquo;agit de questionner leurs fonctions ou leurs servitudes sociales. Paradoxalement, il semble en effet plus ais&eacute; de reconna&icirc;tre l&#39;int&eacute;r&ecirc;t personnel que chacun peut tirer du visionnage de sc&egrave;nes pornographiques que d&#39;interroger le rapport que nous entretenons socialement avec le sexe en images, avec l&#39;impudeur de ses &eacute;vocations. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">D&egrave;s lors qu&#39;il &eacute;chappe &agrave; la sph&egrave;re de l&#39;intimit&eacute;, le sexe devient n&eacute;cessairement monstrueux, difforme, obsc&egrave;ne dans ses &eacute;panchements centrifuges. Au contact du social et de ses lignes de conduite morale, il est jug&eacute; obsc&egrave;ne sous pr&eacute;texte qu&#39;il se donne &agrave; voir&nbsp;; il est consid&eacute;r&eacute; comme difforme parce qu&#39;en se soustrayant &agrave; la seule finalit&eacute; de reproduction il fraye avec la contamination du d&eacute;sir et du plaisir&nbsp;; il est surtout synonyme de monstruosit&eacute; lorsqu&#39;il n&#39;est plus ce que l&#39;on voudrait qu&#39;il soit par conventions, lorsqu&#39;il sort des sentiers battus et qu&#39;il se singularise, lorsqu&#39;enfin il devient ce qu&#39;il est, reprenant ici une aporie nietzsch&eacute;enne qui sert &eacute;galement de mati&egrave;re &agrave; penser pour une exaltation militaire contemporaine en qu&ecirc;te de nouvelles recrues&nbsp;: dans le d&eacute;passement, &laquo;&nbsp;devenez vous-m&ecirc;mes&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref1"></a><a href="#_ftn1" title=""><sup><span style="color:blue">[1]</span></sup></a>. Une telle analogie militaire n&#39;est pas gratuite. Comme en toute affaire relevant de la pol&eacute;mologie, le sexe impose le d&eacute;bat parce qu&#39;il est surtout et encore la mise en &eacute;vidence d&#39;un combat &agrave; mener, avec les autres, avec soi-m&ecirc;me, avec la vie et le sentiment de finitude qu&#39;elle inspire.&nbsp;&nbsp; </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Sans doute n&#39;est-il pas aussi simple que cela semble l&#39;&ecirc;tre au prime abord de porter un regard d&eacute;pourvu d&#39;intentions inquisitoriales sur une &eacute;poque, sur une ambiance sociale dans laquelle le processus de lib&eacute;ralisation des m&oelig;urs au si&egrave;cle dernier, en paroles et en pratiques, a largement innerv&eacute; notre appr&eacute;hension actuelle de la sexualit&eacute; jusque dans ses ramifications les plus obsc&egrave;nes. Dans <i>L&#39;&Eacute;rotisme,</i> Georges Bataille a bien montr&eacute; que tout processus de d&eacute;cha&icirc;nement ou de d&eacute;senclavement, puisqu&#39;il induit logiquement un rapport aux valeurs dont ne saurait &ecirc;tre exempt le d&eacute;corticage social de la sexualit&eacute;, a toujours un double effet sur notre environnement social et naturel&nbsp;: &laquo;&nbsp;toute lib&eacute;ration affecte &eacute;galement le Bien et le Mal. Elle lib&egrave;re les m&oelig;urs et les esprits, mais elle d&eacute;livre aussi les crimes et les catastrophes. La lib&eacute;ration du droit et du plaisir entra&icirc;ne in&eacute;luctablement celle du crime (cela, Sade l&#39;avait bien compris et on ne lui a jamais pardonn&eacute;)&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref2"></a><a href="#_ftn2" title=""><sup><span style="color:blue">[2]</span></sup></a>. J&#39;ai pu indiquer ailleurs<a name="_ftnref3"></a><a href="#_ftn3" title=""><sup><span style="color:blue">[3]</span></sup></a> que l&#39;&eacute;rotisme, quand bien m&ecirc;me celui des c&oelig;urs, n&eacute;cessairement confront&eacute; aux exactions d&#39;une moralit&eacute; qui dit encore et toujours sa supr&eacute;matie sur toute chose, consacre avec Georges Bataille une souverainet&eacute; qui ne s&#39;encombre point de limites pour faire &eacute;clore une communication v&eacute;ritable, sans compromis aucun, entre des &ecirc;tres dont la tourmente des chairs en &eacute;moi annihile temporairement la biens&eacute;ance. Cet &eacute;rotisme-l&agrave;, selon les diverses factures que lui reconnaissait l&#39;h&eacute;t&eacute;rologien au milieu du XXe si&egrave;cle, prend d&eacute;sormais toute sa part dans l&#39;alt&eacute;rit&eacute; &eacute;lectronique qui fait et d&eacute;fait aujourd&#39;hui nos accroches respectives sur le Net. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Pointer du doigt une soci&eacute;t&eacute; qui dit le sexe, qui revendique d&eacute;sormais l&#39;&eacute;change de paroles sur la sexualit&eacute;, c&#39;est aussi courir le risque de rep&eacute;rer et donc d&#39;identifier des comportements, des pratiques et des imaginaires sociaux travaillant sans rel&acirc;che &agrave; l&#39;exhumation d&#39;un &eacute;rotisme prot&eacute;iforme qui s&rsquo;exhibe &agrave; vau-l&#39;eau et qui n&#39;a de cesse de montrer un voyeurisme &agrave; focale multiple. Ce que l&#39;on peut ais&eacute;ment deviner dans le cadre d&#39;une intimit&eacute; qui semble ne pas porter &agrave; cons&eacute;quence lorsque consentement et respect sont de mise, renvoie pourtant &agrave; un esprit du temps qui met en ligne notre alt&eacute;rit&eacute; sexuelle dans des r&eacute;cits et des images liminaires qui nous connectent les uns aux autres. La cyberculture anticipe et alimente d&eacute;sormais l&#39;extension de nos app&eacute;tences sexuelles. Dans sa <i>Joie Tragique</i>, Vincenzo Susca fait remarquer &agrave; juste titre que&nbsp;:</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">&laquo;&nbsp;<i>si les m&eacute;dias &eacute;lectroniques sont la peau de la culture, c&#39;est de ceux-ci que bondissent, comme des substances prolif&eacute;rantes, des amoncellements charnels, des circulations d&#39;humeurs, des contaminations entre corps dont Youporn n&#39;est qu&#39;une marque paroxystique, &agrave; savoir l&#39;all&eacute;gorie de la confusion orgiastique entre chair et pixels, de la danse extatique qui meut la socialit&eacute; contemporaine</i>&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref4"></a><a href="#_ftn4" title=""><sup><span style="color:blue">[4]</span></sup></a>.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Comme bien d&#39;autres en l&#39;esp&egrave;ce mais selon un registre d&#39;emploi qui lui est propre, la plateforme Youporn rend compte en effet d&#39;une praticit&eacute; de l&#39;&eacute;rotisme qui comble &agrave; sa mani&egrave;re les b&eacute;ances d&#39;une jouissance &agrave; l&#39;instant, sans pr&eacute;liminaire ni artifice &agrave; m&ecirc;me d&#39;encombrer les n&eacute;cessit&eacute;s du moment.</span></span></span></span></p> <h2><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">CE QUE PORNO VEUT DIRE</span></span></span></span></h2> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">J&rsquo;&eacute;voquais plus haut les univers de la pornographie contemporaine, sans encore les identifier pr&eacute;cis&eacute;ment et donc les distinguer les uns par rapport aux autres. Par d&eacute;finition, la pornographie renvoie &agrave; la visualisation du sexe, &agrave; l&#39;&eacute;vocation explicite d&#39;une partie corporelle ou d&#39;un contexte &eacute;rotique suscitant le d&eacute;sir, et donc &agrave; la mise en partage iconographique de situations, d&#39;ambiances, de pratiques dans lesquelles le co&iuml;t sudatoire se met en sc&egrave;ne entre pr&eacute;liminaires et conclusions plus ou moins h&acirc;tives. Activit&eacute; charnelle s&rsquo;il en est dans les commotions du plaisir auxquelles elle donne acc&egrave;s, elle n&rsquo;en demeure pas moins activateur symbolique du renflouage permanent de notre alt&eacute;rit&eacute;. Appliqu&eacute; ici &agrave; l&#39;&eacute;rotisme et &agrave; l&rsquo;obsc&eacute;nit&eacute; dont s&#39;abreuve n&eacute;cessairement la pornographie, l&#39;avertissement de Jean Baudrillard en mati&egrave;re d&#39;alt&eacute;rit&eacute; est encore et toujours de bonne augure&nbsp;: &laquo;&nbsp;si l&#39;individu ne se confronte plus &agrave; l&#39;autre, c&#39;est avec lui-m&ecirc;me qu&#39;il s&#39;affronte<a name="_ftnref5"></a><a href="#_ftn5" title=""><sup><span style="color:blue">[5]</span></sup></a> .&nbsp;&raquo; Au-del&agrave; de son allusion sexuelle qui pourrait pr&ecirc;ter &agrave; sourire, cette assertion indique bien la configuration anthropologique des rapports que nous entretenons avec la pornographie, en consid&eacute;rant la mise en &eacute;cran du sexe comme une mise &agrave; l&#39;&eacute;preuve du corps en d&eacute;sir d&#39;expression.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Du point de vue de son appr&eacute;hension normative ou subversive par l&rsquo;art et la litt&eacute;rature, mais encore par la religion, l&#39;&eacute;conomique et le politique, l&rsquo;iconographie sexuelle est pass&eacute;e par diverses phases de dilatation et de r&eacute;tractation au contact de nos fantasmes en qu&ecirc;te d&#39;exp&eacute;riences&nbsp;: parfois rude et rugueuse dans ses &eacute;vocations rupestres<a name="_ftnref6"></a><a href="#_ftn6" title=""><sup><span style="color:blue">[6]</span></sup></a>, souvent incisive dans ses inscriptions gr&eacute;co-latines<a name="_ftnref7"></a><a href="#_ftn7" title=""><sup><span style="color:blue">[7]</span></sup></a>, toujours suggestive dans ses transcriptions jud&eacute;o-chr&eacute;tiennes, assur&eacute;ment technique, artistique et philosophique dans ses libations orientales. Plus pr&egrave;s de nous, la psychanalyse, les &eacute;tudes ethnologiques et sociologiques, les utopies soci&eacute;taires ou encore les mouvements d&rsquo;opinion, dans l&#39;accompagnement des techniques de production et de diffusion toujours plus &eacute;labor&eacute;es, ont aussi fortement contribu&eacute; &agrave; l&rsquo;expansion de son imagerie, &agrave; grands coups de d&eacute;cha&icirc;nement et de contamination &eacute;mancipatrice&nbsp;: diss&eacute;quer l&rsquo;esprit pour le lib&eacute;rer, ouvrir la sexualit&eacute; pour lui conc&eacute;der quelques &eacute;chappatoires, montrer et partager collectivement ce qui est de l&#39;ordre du cach&eacute; et de l&#39;intime, comme pour nous d&eacute;charger de leurs oppressions pass&eacute;es ou de leurs contusions pr&eacute;sentes. Exercer sa sexualit&eacute; d&#39;abord, y faire allusion ensuite, puis la repr&eacute;senter, lui donner corps enfin dans des contr&eacute;es autres que celles des pratiques conventionnelles la comprimant, voil&agrave; une gageure qui restait jusqu&rsquo;alors confin&eacute;e au seul luxe de l&rsquo;intimit&eacute;, dans les couches d&rsquo;un plaisir avortant ses propres impudeurs en &eacute;tat de r&eacute;probation.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Le d&eacute;voilement du sexe, le d&eacute;pliage des limbes de la sexualit&eacute;, la transfiguration du corps en chair op&eacute;ratoire (op&eacute;rable et op&eacute;rante en termes de d&eacute;sir et de plaisir), tout cela renvoie &agrave; des pratiques socialement partag&eacute;es, apparemment assum&eacute;es voire revendiqu&eacute;es haut et fort, qui n&#39;en cachent pas moins quelques paradoxes avec lesquels nous continuons &agrave; nous d&eacute;battre dans le faux-semblant de nos certitudes. L&#39;intimit&eacute; d&#39;une relation durable entre deux &ecirc;tres est-elle davantage propice &agrave; l&#39;&eacute;panchement, &agrave; la d&eacute;couverte, au d&eacute;bridement, ou impose-t-elle au contraire de la retenue dans l&#39;exercice des &eacute;bats&nbsp;? L&rsquo;hyper-connaissance de l&rsquo;autre peut parfois conduire au retrait et &agrave; la d&eacute;saffection. A l&rsquo;inverse, pour peu que la situation s&rsquo;y pr&ecirc;te, une rencontre &agrave; la sauvette pourra d&eacute;boucher sur des plaisirs insoup&ccedil;onnables que chacun des amants inscrira au c&oelig;ur de sa m&eacute;moire corporelle dans l&rsquo;espoir de les revivre un jour. En la mati&egrave;re, rien n&rsquo;est jamais jou&eacute; d&rsquo;avance. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Selon le m&ecirc;me ordre d&rsquo;id&eacute;es, le fait de dire et de montrer collectivement les attributs du sexe dans une d&eacute;bauche presque blas&eacute;e et normalis&eacute;e de signes explicites, cela signifie-t-il n&eacute;cessairement une totale aisance dans l&#39;&eacute;change interpersonnel de leur &eacute;vocation&nbsp;? De fait, pour faire bonne figure, ou ne pas risquer le d&eacute;phasage, ou encore jouer le jeu de la s&eacute;duction partag&eacute;e, nous faisons mine de soutenir une enti&egrave;re d&eacute;contraction &agrave; leur approche tout en &eacute;levant quelques cloisons &eacute;tanches quand il s&#39;agit de mettre la main &agrave; l&#39;ouvrage, par peur sans doute de s&#39;y br&ucirc;ler les doigts ou d&#39;y laisser une phalange.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span arial="" style="font-family:">LA PORNOGRAPHIE PROSTITUANTE</span></b></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">On voit bien que l&#39;appr&eacute;hension sociale de la sexualit&eacute;, m&ecirc;me si elle semble consacr&eacute;e dans des paroles et des images qui la rende de plus en plus ordinaire et d&eacute;complex&eacute;e, instruit n&eacute;anmoins &agrave; son &eacute;vocation des zones de turbulences sur le plan des relations interpersonnelles. Nous baignons en effet dans un mouvement soci&eacute;tal qui en appelle au sexe, qui le met en images et en paroles, qui s&#39;en sert comme porte-drapeau de la libert&eacute; d&#39;expression et d&#39;&eacute;change, mais qui exerce cependant de fortes contraintes morales lorsque ces questions impr&egrave;gnent l&#39;univers des relations interindividuelles. Les rapports, consentis ou forc&eacute;s, que nous entretenons avec la pornographie sont sans doute une bonne illustration de cette difficult&eacute; dans laquelle nous sommes plac&eacute;s pour tenter de r&eacute;soudre au mieux un tel paradoxe. Cette difficult&eacute;, qu&#39;en son temps l&#39;utopie soci&eacute;taire fouri&eacute;riste<a name="_ftnref8"></a><a href="#_ftn8" title=""><sup><span style="color:blue">[8]</span></sup></a> avait tent&eacute; de r&eacute;duire &agrave; petits feux, s&#39;exprime en effet pleinement dans le statut social que nous accordons &agrave; la pornographie contemporaine.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">L&#39;&eacute;laboration de cette derni&egrave;re, ses objets d&#39;application, sa marchandisation et ses op&eacute;rateurs (producteur(trice)s, r&eacute;alisateur(trice)s, acteur(trice)s, amateur(trice)s, consommateur(trice)s, soci&eacute;t&eacute;s de service et de merchandising, etc.) lui valurent d&rsquo;&ecirc;tre syst&eacute;matiquement assimil&eacute;e &agrave; la prostitution, sans autre forme de proc&egrave;s. Si cet amalgame &eacute;tait en grande partie desservi par une p&eacute;nalisation de ces deux esp&egrave;ces d&rsquo;activit&eacute; portant atteinte aux m&oelig;urs, il n&rsquo;en &eacute;tait pas moins relativis&eacute; sur le plan des intentions pr&ecirc;t&eacute;es &agrave; l&rsquo;une et &agrave; l&rsquo;autre du point de vue des consommateurs en embuscade&nbsp;: pratique de l&rsquo;encanaillement et de l&rsquo;extraversion sexuelle en ce qui concerne la consommation de la prostitution, exercice de la perversion, du plaisir cach&eacute; et de l&rsquo;onanisme dans le cas de celle de la pornographie. Outre l&rsquo;atteinte aux m&oelig;urs et les d&eacute;sordres divers qui leur sont imputables, la prostitution et la pornographie g&eacute;n&egrave;rent ensemble quelques accointances des plus tenaces dans leurs rapports &agrave; l&rsquo;argent, &agrave; l&rsquo;exploitation humaine, aux divers r&eacute;seaux qui organisent les fili&egrave;res. Mais parce que rien n&#39;est aussi simple ou manich&eacute;en dans la vie, une telle &eacute;vidence ne saurait pour autant occulter un point de contact similaire entre prostitution et institution du mariage pour lesquelles l&#39;exercice du pouvoir, la qu&ecirc;te de l&#39;argent, la conqu&ecirc;te ou le maintien d&#39;une situation sociale introduisent des rapports de vassalit&eacute; entre hommes et femmes au d&eacute;triment de ces derni&egrave;res. Simone de Beauvoir notait d&eacute;j&agrave; au milieu du XXe si&egrave;cle quelques modifications dans cette forme d&#39;asservissement par le mariage, rendant ainsi la femme moderne moins sujette &agrave; la d&eacute;valorisation de son image. Une femme, de plus en plus ind&eacute;pendante &eacute;conomiquement, qui surcharge sa fonction reproductrice d&#39;un r&ocirc;le producteur dont la reconnaissance &eacute;tait jusqu&#39;alors d&eacute;volue aux seuls m&acirc;les. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Pour autant, aussi bien pour la prostitu&eacute;e que pour la femme mari&eacute;e, &laquo;&nbsp;l&#39;acte sexuel est un service&nbsp;; la seconde est engag&eacute;e &agrave; vie par un seul homme&nbsp;; la premi&egrave;re a plusieurs clients qui la paient &agrave; la pi&egrave;ce. Celle-l&agrave; est prot&eacute;g&eacute;e par un m&acirc;le contre tous les autres, celle-ci est d&eacute;fendue par tous contre l&#39;exclusive tyrannie de chacun&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref9"></a><a href="#_ftn9" title=""><sup><span style="color:blue">[9]</span></sup></a>. Si donc l&#39;assimilation du mariage &agrave; la prostitution est av&eacute;r&eacute;e, discutable, questionn&eacute;e sans autre parti pris que celui de la respectabilit&eacute; de ces femmes qui font commerce de leur disponibilit&eacute; corporelle, celle de la pornographie &agrave; cette m&ecirc;me prostitution doit &ecirc;tre comprise avec un semblable discernement, sans l&#39;ombre d&#39;un d&eacute;nigrement facile en ce qui concerne ces deux types d&#39;activit&eacute;. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Toujours dans <i>Le deuxi&egrave;me sexe</i>, Simone de Beauvoir &eacute;tablit une distinction entre la basse prostitu&eacute;e et la noble h&eacute;ta&iuml;re, &eacute;clairage qui peut nous aider &agrave; mieux comprendre les enjeux de la pornographie contemporaine&nbsp;: &laquo;&nbsp;la diff&eacute;rence essentielle, c&#39;est que la premi&egrave;re fait commerce de sa pure g&eacute;n&eacute;ralit&eacute;, si bien que la concurrence la maintient &agrave; un niveau de vie mis&eacute;rable, tandis que la seconde s&#39;efforce de se faire reconna&icirc;tre dans sa singularit&eacute;&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref10"></a><a href="#_ftn10" title=""><sup><span style="color:blue">[10]</span></sup></a>. L&#39;h&eacute;ta&iuml;re, c&#39;est la courtisane, la demi-mondaine, la chanteuse, la danseuse, l&#39;actrice, la cocotte, celle pour qui &laquo;&nbsp;l&#39;homme aura proclam&eacute; son prix aux yeux du monde&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref11"></a><a href="#_ftn11" title=""><sup><span style="color:blue">[11]</span></sup></a> et dont le maintien de sa haute estime est corollaire &agrave; la ruine qu&#39;elle occasionne. L&#39;h&eacute;ta&iuml;re, c&#39;est la galante qui &agrave; l&#39;inverse de la Marie-couche-toi-l&agrave; impose le choix des draps, le jour et l&#39;heure de leurs froissements et surtout le roitelet qui contribuera &agrave; les d&eacute;faire en y d&eacute;posant cadeaux d&#39;estime et moyens d&#39;entretien sonnants et tr&eacute;buchants. Cette parfum&eacute;e, cette capricieuse, cette scandaleuse admirable s&eacute;v&icirc;t telle quelle tout au long du XVIIIe et du XIXe si&egrave;cles, jusqu&#39;&agrave; la Belle &Eacute;poque, avant que le cin&eacute;ma ne la transforme en star livrant &laquo;&nbsp;la Femme aux r&ecirc;ves des hommes qui lui donnent en &eacute;change fortune et gloire&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref12"></a><a href="#_ftn12" title=""><sup><span style="color:blue">[12]</span></sup></a>. On le voit bien, Simone de Beauvoir n&#39;y va pas par quatre chemins ni ne m&acirc;che ses mots lorsqu&#39;il s&#39;agit d&#39;interpeler notre conscience sur le commerce du corps des femmes, avec cependant un soup&ccedil;on d&#39;admiration pour celles d&#39;entre elles qui en font la garantie de leur propre libert&eacute;. Plus singulier que celui de prostitu&eacute;e, le terme d&#39;h&eacute;ta&iuml;re d&eacute;signe pour elle &laquo;&nbsp;toutes les femmes qui traitent, non leur corps seulement, mais leur personne enti&egrave;re comme un capital &agrave; exploiter&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref13"></a><a href="#_ftn13" title=""><sup><span style="color:blue">[13]</span></sup></a>. Qu&#39;elle soit starlette ou bimbo, call-girl ou accompagnatrice, artiste de sa vie ou succ&eacute;dan&eacute;e de celle de toutes ces Madonna-sans-culotte, Britney-Spears-la-pucelle, Paris-Hilton-l&#39;h&eacute;riti&egrave;re, Victoria-Silvstedt-la-roue-de-la-fortune ou encore Lady-Gaga-la-paillette qui investissent nos &eacute;crans sous les ors du showbizz, l&#39;h&eacute;ta&iuml;re revendique le talent de plaire et d&#39;&ecirc;tre assur&eacute;ment, aux d&eacute;triments de ses concurrentes se perdant en surench&egrave;res, l&rsquo;&eacute;g&eacute;rie fantasmatique du d&eacute;sir des hommes qui la r&eacute;tribuent pour partie en admiration inconditionnelle sur l&#39;instant mais cependant versatile en fonction de l&#39;intensit&eacute; des feux de la rampe. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Si l&#39;on veut bien se conformer &agrave; l&#39;id&eacute;e que la pornographie partage quelques zones d&#39;occupation avec la prostitution, il faudra alors lui conc&eacute;der toute la symbolique de l&#39;h&eacute;ta&iuml;re telle qu&#39;elle vient d&#39;&ecirc;tre d&eacute;finie ici. Cette concession est d&#39;autant plus incontournable que la pornographie contemporaine a naturellement conquit ses terrains de pr&eacute;dilection sur Internet, au vu et au su de tout le monde alors que, conform&eacute;ment &agrave; la figure de l&#39;h&eacute;ta&iuml;re dont il vient d&#39;&ecirc;tre question, chacun de ses sites d&#39;&eacute;lection redouble d&#39;efforts pour se singulariser, capter les go&ucirc;ts h&eacute;t&eacute;roclites du chaland, proposer une offre de th&eacute;matiques toujours plus audacieuses, des plus conventionnelles aux plus inattendues. Achat en ligne de vid&eacute;os, t&eacute;l&eacute;chargements gratuits, galeries de photos, <i>chat hotline</i>, forums d&#39;&eacute;change, propositions de rencontre, gadgets, lingeries, produits aphrodisiaques, etc., l&#39;ensemble de ces services &agrave; la carte permet aux utilisateurs de composer selon l&#39;humeur du moment un d&eacute;sir et un plaisir d&#39;opportunit&eacute;, dans une mosa&iuml;que de propositions qui valorisent la d&eacute;couverte de leurs propres inclinations &eacute;rotiques. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Mais ce qui permet surtout d&#39;assimiler la pornographie &agrave; la symbolique de l&#39;h&eacute;ta&iuml;re, tout en la d&eacute;routant des seules conventions de la prostitution, c&#39;est le fait que celles et ceux qui se mettent en images dans des postures et des situations jug&eacute;es obsc&egrave;nes se donnent en offrandes au d&eacute;sir de chacun tout en limitant leurs pratiques effectives &agrave; leurs seuls partenaires d&#39;exhibition. Comme je l&#39;ai indiqu&eacute; ailleurs &agrave; propos du sacrifice<a name="_ftnref14"></a><a href="#_ftn14" title=""><sup><span style="color:blue">[14]</span></sup></a>, ce qui est &eacute;galement en jeu ici rel&egrave;ve de trois principes d&#39;alt&eacute;ration ax&eacute;s sur la substitution, la procuration et l&#39;assimilation qui fondent pour partie l&#39;utilit&eacute; et la servitude sociales de la pornographie. Si comme le soutient &agrave; juste titre Simone de Beauvoir &laquo;&nbsp;la prostitu&eacute;e est un bouc &eacute;missaire&nbsp;&raquo; parce que &laquo;&nbsp;l&#39;homme se d&eacute;livre sur elle de sa turpitude et il la renie&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref15"></a><a href="#_ftn15" title=""><sup><span style="color:blue">[15]</span></sup></a>, la pornographi&eacute;e est quant &agrave; elle une h&eacute;ta&iuml;re qui se livre aux turpitudes de tous, une intouchable qui joue la ren&eacute;gate devant la m&eacute;cr&eacute;ance assum&eacute;e ou duplice de ceux qui la d&eacute;sirent &agrave; l&#39;instant.&nbsp;&nbsp; </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span arial="" style="font-family:">LA PORNOGRAPHIE COMME FORME DE LIBATION ARTISTIQUE </span></b></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Avant la mont&eacute;e en puissance d&rsquo;Internet &agrave; la fin du si&egrave;cle dernier, l&rsquo;acc&egrave;s &agrave; la pornographie &eacute;tait relativement rudimentaire dans l&rsquo;&eacute;ventail de ses supports de divulgation, peu accessible au plus grand nombre en terme de bien consommable, mais sujet cependant au recyclage d&#39;usage et au repassage confraternel et interg&eacute;n&eacute;rationnel. En la mati&egrave;re, l&#39;&eacute;change &eacute;tait de mise, voire l&#39;emprunt en cachette. La pornographie se limitait en effet aux revues sp&eacute;cialis&eacute;es et aux films du genre, lesquels &eacute;taient distribu&eacute;s, diffus&eacute;s, consultables sur le mode de la confidentialit&eacute;, sous le manteau d&rsquo;abord, dans les &eacute;choppes &agrave; sexe ensuite, dans les vid&eacute;oclubs, les maisons de la presse et les kiosques &agrave; journaux enfin. L&#39;exercice de l&#39;art et son appr&eacute;ciation pouvaient aussi servir de pr&eacute;texte &agrave; la d&eacute;tention de croquis, peintures ou photographies repr&eacute;sentant la volupt&eacute; des corps distribu&eacute;s en poses lascives, lib&eacute;r&eacute;s de leurs astreintes vestimentaires et de leur biens&eacute;ance comportementale. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Comme le signifiait encore Simone de Beauvoir &agrave; propos de ces jeux interdits que partagent parfois prostitution et art, il existe une pornographie de bon aloi, celle que l&#39;on associe commun&eacute;ment &agrave; l&#39;&eacute;rotisme, qui remplit les yeux, desserre &agrave; l&#39;occasion le cordon des bourses animales, sans pour autant &eacute;corner la bonne tenue morale de ceux qui l&#39;&eacute;rigent en genre artistique&nbsp;: &laquo;&nbsp;&quot;Le nu est chaste&quot;, affirment les vieux messieurs qui, sous le nom de &quot;nus artistiques&quot;, collectionnent des photos obsc&egrave;nes<a name="_ftnref16"></a><a href="#_ftn16" title=""><sup><span style="color:blue">[16]</span></sup></a>&nbsp;&raquo;. Ces temps-l&agrave; sont r&eacute;volus, non qu&#39;il n&#39;y ait plus de vieux messieurs s&#39;essayant &agrave; l&#39;&eacute;tayage de leurs propres ardeurs suppos&eacute;ment bancales, mais parce que toutes g&eacute;n&eacute;rations confondues, dans des proportions entre hommes et femmes qui &eacute;tonnent les id&eacute;es pr&eacute;con&ccedil;ues, nous consommons tout autant que nous produisons des situations pornographiques, ou jug&eacute;es comme telles, qui contribuent &agrave; leur mani&egrave;re au soutien de notre vie quotidienne. En la mati&egrave;re, nous pouvons toujours essayer d&#39;&eacute;tablir une distinction s&eacute;curitaire entre le beau et le laid, l&#39;esth&eacute;tique et l&rsquo;obsc&egrave;ne, la culture et la nature, l&#39;humain et l&#39;animal, renvoyant chacune de ces antinomies dans des contr&eacute;es &eacute;tanches de nos facult&eacute;s de jugement, rien ne pourra cependant emp&ecirc;cher leurs accouplements ou leurs circulations dans les br&egrave;ches de nos barri&egrave;res morales qui nous les font accepter l&#39;une pour l&#39;autre. Le corps, qu&#39;il soit esth&eacute;tis&eacute; ou non, est toujours suggestion d&#39;un &eacute;rotisme en appel qui ne demande qu&#39;&agrave; s&#39;abandonner aux secousses d&#39;une animalit&eacute; en &eacute;veil. Georges Bataille &eacute;non&ccedil;ait cette r&egrave;gle de la mani&egrave;re suivante&nbsp;: &laquo;&nbsp;la beaut&eacute; de la femme d&eacute;sirable annonce ses parties honteuses&nbsp;: justement ses parties pileuses, ses parties animales<a name="_ftnref17"></a><a href="#_ftn17" title=""><sup><span style="color:blue">[17]</span></sup></a>&nbsp;&raquo;. M&ecirc;me annonciation pour l&#39;homme, semblable d&eacute;duction encore pour ce qui concerne l&#39;absence (culturelle, modale, occasionnelle) de pilosit&eacute; d&eacute;non&ccedil;ant cependant des zones d&#39;occupation originelles. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Il y aurait ainsi une esth&eacute;tique du porno qui renvoie non seulement &agrave; son appr&eacute;ciation comme th&egrave;me et forme d&#39;art, mais encore &agrave; sa mise en partage, pouvant g&eacute;n&eacute;rer du m&ecirc;me coup des situations pornographiques chez les r&eacute;cepteurs stimul&eacute;s par les &eacute;bats de l&#39;&oelig;uvre. Si par avant j&#39;ai &eacute;voqu&eacute; le rapport qu&#39;&eacute;tablissait Simone de Beauvoir entre prostitution et mariage, r&eacute;el, concevable mais difficilement acceptable, c&#39;est aussi pour ne pas passer sous silence le lien qui unit la pornographie aux sages conventions de la vie en couple. Sur ce registre, l&#39;enqu&ecirc;te men&eacute;e par l&#39;IFOP entre le 30 juin et le 2 juillet 2009 concernant les comportements et les pratiques des Fran&ccedil;ais &agrave; l&#39;&eacute;gard des films pornographiques<a name="_ftnref18"></a><a href="#_ftn18" title=""><sup><span style="color:blue">[18]</span></sup></a>, force l&#39;int&eacute;r&ecirc;t &agrave; plus d&#39;un titre. Ce sondage intitul&eacute; &laquo;&nbsp;Sexe, M&eacute;dia et Soci&eacute;t&eacute;&nbsp;&raquo;, r&eacute;alis&eacute; aupr&egrave;s de 1016 individus de 18 ans et plus, interroge tout d&#39;abord, par son existence command&eacute;e, le d&eacute;s&oelig;uvrement des &eacute;tudes sociologiques &agrave; propos de cette th&eacute;matique. Il existe bien-s&ucirc;r &agrave; disposition des donn&eacute;es concernant les Fran&ccedil;ais et leur sexualit&eacute;, mais bien peu d&#39;entre elles mettent en &eacute;vidence l&#39;utilisation de supports pornographiques dans l&#39;exploration de ces m&ecirc;mes pratiques sexuelles. &Eacute;videmment, un telle enqu&ecirc;te pourrait pr&ecirc;ter &agrave; caution, sachant qu&#39;elle a &eacute;t&eacute; commandit&eacute;e par le groupe Marc Dorcel &agrave; l&#39;occasion du trenti&egrave;me anniversaire de ses productions vid&eacute;os&nbsp;: elle est non seulement une photographie utile au positionnement du donneur d&#39;ordre sur le march&eacute; pluriel et fortement concurrentiel de la pornographie contemporaine mais elle est encore un vecteur publicitaire non n&eacute;gligeable pour des produits qui se veulent &laquo;&nbsp;haut de gamme&nbsp;&raquo; et innovants, aptes &agrave; renouveler le genre en fonction des attentes des divers publics sond&eacute;s<a name="_ftnref19"></a><a href="#_ftn19" title=""><sup><span style="color:blue">[19]</span></sup></a>.&nbsp; </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Ces circonstances d&#39;&eacute;tude mises &agrave; part, l&#39;int&eacute;r&ecirc;t de ladite enqu&ecirc;te porte essentiellement sur les rapports qu&#39;entretiennent les Fran&ccedil;ais avec les films pornographiques, sur leur acc&egrave;s et leur utilisation en tant que stimulants et agents d&#39;ambiance au regard de pratiques dispos&eacute;es &agrave; la virtualit&eacute; d&#39;une alt&eacute;rit&eacute; &eacute;rotique, sur les publics qui les int&egrave;grent d&eacute;sormais dans l&#39;entretien de leur intimit&eacute; sexuelle, qu&#39;elle soit solitaire ou partag&eacute;e. Elle montre ainsi la cons&eacute;cration du Web comme principal moyen d&#39;acc&egrave;s &agrave; ces films, devant Canal Plus et les DVD achet&eacute;s ou emprunt&eacute;s. Ce sondage indique &eacute;galement que si le c&oelig;ur de cible du march&eacute; reste le public masculin, plus de huit femmes sur dix reconnaissent en avoir d&eacute;j&agrave; vu un, dans son int&eacute;gralit&eacute; ou &agrave; partir d&#39;extraits, alors qu&#39;elles sont deux sur trois &agrave; pouvoir envisager le visionnage d&#39;un film X avec leur partenaire, et qu&#39;une sur cinq consentirait &agrave; filmer ses propres &eacute;bats sans que cela donne lieu n&eacute;cessairement &agrave; une diffusion ult&eacute;rieure des images dans un cadre autre que celui des personnes concern&eacute;es. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">En somme, un certain nombre de lieux communs et d&#39;id&eacute;es pr&eacute;con&ccedil;ues s&#39;effondrent, aussi bien pour ce qui rel&egrave;ve de la pratique sociale de la pornographie d&#39;une fa&ccedil;on g&eacute;n&eacute;rale, qu&#39;en ce qui concerne son utilisation solitaire ou en couple et sa r&eacute;partition en fonction des deux sexes&nbsp;: &laquo;&nbsp;le visionnage des films X n&#39;est plus une exp&eacute;rience honteuse et solitaire mais une affaire de couple&nbsp;&raquo;, telle est l&#39;une des principales conclusions sur laquelle s&#39;accordent les concepteurs de l&#39;enqu&ecirc;te. Le fait que les femmes soient davantage impliqu&eacute;es qu&#39;on ne le pensait dans le visionnage des films X, qu&#39;elles l&#39;int&egrave;grent volontiers dans l&#39;intimit&eacute; de leur vie de couple, qu&#39;elles soient favorables &agrave; une production pornographique &agrave; l&#39;esth&eacute;tique et aux sc&eacute;narios plus &eacute;labor&eacute;s qu&#39;ils ne l&#39;&eacute;taient jusqu&#39;alors, tout cela renforce le positionnement du donneur d&#39;ordre sur le cr&eacute;neau du Pornochic dont il se veut la figure de proue. La cons&eacute;cration esth&eacute;tique de la pornographie serait ainsi garante de sa plus large acceptation sociale. On pourra bien s&ucirc;r arguer une manipulation &agrave; peine voil&eacute;e dans ce genre d&#39;argumentaire qui attribue une telle acceptation au suppos&eacute; &eacute;veil d&eacute;sali&eacute;nant de la gente f&eacute;minine au sujet de telles pratiques. Un autre raisonnement, jug&eacute; tout autant fallacieux, pourrait &ecirc;tre &eacute;galement d&eacute;nonc&eacute; au pr&eacute;texte qu&#39;il assimile le Pornobrut et la bestialit&eacute; aux hommes, le Pornochic et le raffinement esth&eacute;tique aux femmes. Pour autant, cette &eacute;tude &agrave; l&#39;avantage de faire &eacute;tat de &laquo;&nbsp;choses dites&nbsp;&raquo; qui, &agrave; l&#39;instar des pr&eacute;tentions bourdivines<a name="_ftnref20"></a><a href="#_ftn20" title=""><sup><span style="color:blue">[20]</span></sup></a> quant &agrave; un certain structuralisme constructiviste, bousculent les automatismes dichotomiques de la pens&eacute;e.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">En revanche, ce que cette enqu&ecirc;te n&#39;aborde pas, ou seulement par la bande lorsqu&#39;elle &eacute;voque la d&eacute;mat&eacute;rialisation des films X, ce sont les liens qu&#39;entretiennent les Fran&ccedil;ais avec les univers intern&eacute;tiques de la pornographie. Or ces liens ne se tissent plus exclusivement dans les registres spatiaux et temporaux de l&#39;intimit&eacute; individuelle, c&#39;est-&agrave;-dire selon des plages de temps et des circonstances de lieu propices &agrave; l&#39;exploration et &agrave; la mise &agrave; nu de soi dans le saisissement m&eacute;diatis&eacute; des corps en offerte. La tranquillit&eacute; du nid, de la chambre ou des lieux d&#39;aisance n&#39;est plus exclusive, comme ne saurait l&#39;&ecirc;tre encore une unique contextualisation appropri&eacute;e &agrave; la consommation pornographique. Qui saurait dire avec exactitude (sachant avec Jean Baudrillard que &laquo;&nbsp;seul est exact ce qui s&#39;approche de la v&eacute;rit&eacute; sans y pr&eacute;tendre&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref21"></a><a href="#_ftn21" title=""><sup><span style="color:blue">[21]</span></sup></a>) que le visionnage de sc&egrave;nes pornographiques, esth&eacute;tiques et/ou graveleuses &agrave; souhait, se pratique dans de seuls lieux et moments d&#39;intimit&eacute; d&eacute;limit&eacute;s par convention du vivre-ensemble&nbsp;? Chez soi&nbsp;? En solitaire&nbsp;? &Agrave; l&#39;extinction des feux&nbsp;? Qui pourrait affirmer sans f&ecirc;lure dans la conviction que la pornographie n&#39;est jamais sollicit&eacute;e en plein jour, au vu et au su de celles et ceux qui partagent nos occupations journali&egrave;res et/ou nos confidences, au dehors du domicile, aux horaires et lieux de travail, dans le cadre des loisirs&nbsp;? Hier la presse &eacute;crite servait d&#39;habillage et donc de couverture aux revues pornographiques dans l&#39;achat, le transport et la consultation, aujourd&#39;hui ce sont les tablettes num&eacute;riques qui servent d&eacute;sormais de fourre-tout au d&eacute;sir de chair virtuelle. Si l&#39;informatique a chang&eacute; la donne, que dire alors du nomadisme &eacute;lectronique sinon qu&#39;il a r&eacute;volutionn&eacute; notre appr&eacute;hension de l&#39;alt&eacute;rit&eacute;, du contact avec l&#39;autre, de la jauge de soi-m&ecirc;me, ce dont l&#39;acc&egrave;s &agrave; la pornographie rend compte de fa&ccedil;on paroxystique. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span arial="" style="font-family:">TACTILIT&Eacute; VIRTUELLE ET PORNOD&Eacute;MAT&Eacute;RIALISATION</span></b></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Avec le pornonet, la pornoculture, le cybersexe, bref le sexe en &eacute;tat de turgescence m&eacute;diatique et communicationnelle, nous vivons de mani&egrave;re frontale les marges centrales d&rsquo;une existence t&eacute;nue en butte avec une alt&eacute;rit&eacute; qui ne cesse d&rsquo;en d&eacute;noncer le minimalisme d&#39;emploi. On reproche parfois &agrave; la cyberculture son abyme, sa perte de sens par exc&egrave;s, laissant deviner chez les utilisateurs une suppos&eacute;e existence en abstinence et en d&eacute;faut. L&#39;&oelig;uvre de Jean Baudrillard n&#39;eut d&#39;ailleurs de cesse d&#39;en souligner tout le fatalisme&nbsp;: &laquo;&nbsp;au-del&agrave; du sens, il y a la fascination, qui r&eacute;sulte de la neutralisation et de l&#39;implosion du sens. Au-del&agrave; de l&#39;horizon du social, il y a les masses, qui r&eacute;sultent de la neutralisation et de l&#39;implosion du social&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref22"></a><a href="#_ftn22" title=""><sup><span style="color:blue">[22]</span></sup></a>. Hypercommunication, transparence du sens, difformit&eacute;s de l&#39;alt&eacute;rit&eacute;, transmutation du social en masses dilat&eacute;es sur la toile des r&eacute;seaux &eacute;lectroniques. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Mais &ecirc;tre sur le net ne signifie en rien ne pas &ecirc;tre dans la vie. La virtualit&eacute; n&#39;abime pas n&eacute;cessairement les affects, elle peut m&ecirc;me les sublimer l&agrave; o&ugrave; pourrait les dissoudre la mat&eacute;rialit&eacute; des rapports humains. De la m&ecirc;me mani&egrave;re, &ecirc;tre porno-connect&eacute; n&#39;ouvre aucunement sur une d&eacute;sertification des relations sexuelles et affectives auxquelles chacun aspire. Tout au plus peut-on y voir l&#39;expression d&#39;une existence &laquo;&nbsp;en jach&egrave;re&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref23"></a><a href="#_ftn23" title=""><sup><span style="color:blue">[23]</span></sup></a> dont la sexualit&eacute; s&#39;&eacute;prouve en semailles, floraisons et moissons communicationnelles. Le porno ouvre sur un ailleurs de soi, en provoquant la domiciliation sexuelle des autres. Il est une &eacute;chapp&eacute;e belle, une sorte de d&eacute;fenestration sexuelle &agrave; moindre co&ucirc;t qui invite, pour un temps, au d&eacute;gorgeage de ses propres humeurs et dans de plus larges proportions au vitalisme social qui le nourrit en retour. On retrouve l&agrave; ce que Michel Maffesoli comprend comme une fuite &eacute;rotique, un escapisme par la bande s&#39;appuyant sur divers &eacute;panchements du refoul&eacute;, une forme de nomadisme sexuel qui contribue &agrave; l&rsquo;&eacute;tayage social sachant que &laquo;&nbsp;par une sorte de ruse anthropologique, le processus centrifuge tend &agrave; fortifier le corps social stable&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref24"></a><a href="#_ftn24" title=""><sup><span style="color:blue">[24]</span></sup></a>. Pour d&eacute;mat&eacute;rialis&eacute;e qu&#39;elle soit, la pornographie &eacute;lectronique n&#39;est rien moins qu&#39;une immersion commune, faite de multiples interconnexions, dans l&#39;humus humain, dans cette part d&#39;animalit&eacute; qui nous aimante les uns aux autres.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Avec le porno, dans tous les sens du terme, on se fait la belle (au cul aimant), on fait aussi de la retape avec soi-m&ecirc;me, on guette ses propres turpitudes sur les chemins du Net. D&rsquo;un clic &agrave; l&rsquo;autre, nul besoin de changer de trottoir pour soupeser les chairs, tester les performances, &eacute;valuer les prestations, sonder les envies. Ce que nous consommons alors en dit long sur ce que nous sommes pr&ecirc;ts &agrave; d&eacute;penser en &eacute;nergie obscure pour arpenter nos moindres d&eacute;sirs d&rsquo;accomplissement. Pas seulement ce que nous consommons d&#39;ailleurs, dans la mesure o&ugrave; une autre part de nous-m&ecirc;mes alimente sites et blogs en tout genre de ses propres productions visuelles, sous le registre certes discutable de l&#39;amateurisme, productions ou mises en exercice du sexe &laquo;&nbsp;maison&nbsp;&raquo; &agrave; l&#39;&eacute;cran qui montrent bien une pleine adh&eacute;sion au souci d&#39;exhibition de tout un chacun, l&#39;exception n&#39;infirmant pas la procuration. Pour celles et ceux qui se pr&ecirc;tent &agrave; de tels jeux de r&ocirc;les, il y a alors invention d&#39;une app&eacute;tence sexuelle plac&eacute;e en d&eacute;couverte de celles pour lesquelles elle s&#39;affiche.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Le porno est &agrave; la fois solvant et &eacute;dulcorant de nos fantasmes&nbsp;: il les nettoie, les d&eacute;graisse, les d&eacute;poussi&egrave;re, &ocirc;te les miasmes d&rsquo;un en-soi sexuel pour les diluer ensuite dans des pratiques exotiques v&eacute;cues par procuration. Mais il est sans doute aussi bien davantage que cela. Il est en effet un r&eacute;servoir de connaissances, d&rsquo;actes, d&rsquo;emballements imaginaires et de fictions d&rsquo;ordre &eacute;rotique dans lequel nous puisons all&egrave;grement pour alimenter nos travers, gr&acirc;ce auquel nous pouvons exp&eacute;rimenter, seul, en couple ou &agrave; plusieurs, diverses simulations ou inventions &agrave; la rencontre de nos inclinations les plus cach&eacute;es. Avec le porno tout devient possible, ou presque, d&egrave;s lors que l&rsquo;imagination s&#39;agite l&agrave; o&ugrave; peine encore une technologie servant au corps de prolongement conqu&eacute;rant. Tout devient probable en effet, m&ecirc;me l&rsquo;inimaginable, dans les frondaisons d&#39;une sexualit&eacute; que nous voulons cependant contenue par instant, cibl&eacute;e dans une optique de reproduction, afin d&#39;assurer notre continuit&eacute; dans l&#39;esp&egrave;ce. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Par l&#39;entremise du porno, qui plus est dans sa version &eacute;lectronique, le sexe n&#39;en revient pas de se faire en long et en large, dans des situations ou des positions qui le surprennent encore, dans un d&eacute;tournement des fonctions qui d&eacute;vergonde le d&eacute;sir, avec des &ecirc;tres, des objets, des mati&egrave;res qui forcent l&#39;inconcevable. Dans <i>Simulacres et simulation</i>, autre mani&egrave;re de dire l&#39;hyperr&eacute;alit&eacute; de notre existence en constat de communication technologique, Jean Baudrillard comprenait la sexualit&eacute; selon des &eacute;gards bien diff&eacute;rents de ceux au travers desquels nous l&#39;envisageons par habitude, convenance ou facilit&eacute; d&#39;emploi&nbsp;: &laquo;&nbsp;le sexe tel que nous le concevons n&#39;est qu&#39;une d&eacute;finition infime et sp&eacute;cialis&eacute;e de toutes les pratiques symboliques et sacrificielles auquel un corps peut s&#39;ouvrir, non plus par la nature, mais par l&#39;artifice, par le simulacre, par l&#39;accident. Le sexe n&#39;est que cette rar&eacute;faction d&#39;une pulsion appel&eacute;e d&eacute;sir sur des zones pr&eacute;par&eacute;es &agrave; l&#39;avance<a name="_ftnref25"></a><a href="#_ftn25" title=""><sup><span style="color:blue">[25]</span></sup></a>&nbsp;&raquo;. Cette analyse, adapt&eacute;e ici aux emballements des imaginaires pornographiques, introduit une d&eacute;multiplication du rapport au corps sexu&eacute; dont les fonctions classiques sont mises &agrave; l&#39;amende ou en sommeil selon les cas, pour donner cours &agrave; d&#39;autres exp&eacute;rimentations, d&#39;autres &eacute;bats, d&#39;autres &eacute;corchures aussi, quitte &agrave; sombrer dans la perte la plus enti&egrave;re qui soit.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">C&#39;est justement parce que le porno est tout cela &agrave; la fois, qu&#39;il est aussi un objet d&rsquo;apaisement de soi, tant du corps que de l&rsquo;esprit, lorsqu&rsquo;en lui nous trouvons des correspondances, des similitudes avec ce que nous g&eacute;n&eacute;rons secr&egrave;tement en nous. Images et sc&egrave;nes qui peuvent aussi d&eacute;passer notre entendement de la chose et, ce faisant, inaugurer une d&eacute;complexion en ab&icirc;me, lever le voile sur des formes de d&eacute;culpabilisation aux abois&nbsp;: car d&rsquo;autres exercent ce que nous ne saurions concevoir et pratiquer sans quelques hauts le c&oelig;ur ou mis&egrave;res de l&rsquo;&acirc;me. L&agrave; encore, Georges Bataille peut &ecirc;tre d&#39;un secours appr&eacute;ciable pour qui veut comprendre notre attirance pour un autre nous-m&ecirc;mes devenu fascinant dans ses &eacute;tats de condamnation&nbsp;: &laquo;&nbsp;le d&eacute;sir de l&#39;&eacute;rotisme est le d&eacute;sir qui triomphe de l&#39;interdit. Il suppose l&#39;opposition de l&#39;homme &agrave; lui-m&ecirc;me&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref26"></a><a href="#_ftn26" title=""><sup><span style="color:blue">[26]</span></sup></a>. Notre intimit&eacute; rencontre alors celles de nos tiers anonymes, une foultitude d&rsquo;intimit&eacute;s exhib&eacute;es, mises &agrave; nu, offertes au d&eacute;bordement, avatars sublim&eacute;s de notre propension &agrave; l&rsquo;expropriation sexuelle de nous-m&ecirc;mes.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Le <i>clic</i> et le <i>pad</i> remplacent d&eacute;sormais le l&eacute;chage de doigt et la t&eacute;l&eacute;commande pour tourner la page ou effectuer un arr&ecirc;t sur image d&rsquo;une pornographie en constante libation. Avec la t&eacute;l&eacute;vision d&#39;abord, le Web et les &eacute;crans tactiles ensuite, et d&eacute;j&agrave; la d&eacute;mat&eacute;rialisation de ces m&ecirc;mes &eacute;crans, la pr&eacute;hension de la mati&egrave;re pornographique n&rsquo;exige plus le m&ecirc;me doigt&eacute; que lorsqu&#39;elle &eacute;tait cantonn&eacute;e au seul support papier, dans une dext&eacute;rit&eacute; qui s&rsquo;invente d&rsquo;autres &eacute;preuves, plus floues, plus versatiles, diversement palpables. Plus &eacute;prouvantes aussi, tant l&#39;abondance des images et leur superposition tournent les sens. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">Avec les revues porno, la qualit&eacute; du papier et celle de l&#39;impression participaient &agrave; l&#39;ambiance, au regard que l&#39;on portait sur les protagonistes, au sentiment que l&#39;on pouvait avoir de soi-m&ecirc;me sur le moment, selon le gla&ccedil;age ou la rugosit&eacute; des images visualis&eacute;es. Avec Internet, ces diverses appr&eacute;hensions s&#39;appuient sur de nouveaux modes de palpation, alors que le support informatique multiplie &agrave; l&#39;infini l&#39;acc&egrave;s aux contenus. Tout en changeant de main &agrave; l&rsquo;occasion, nous restons aux manettes d&rsquo;une libido qui fleure bon la licence, jusqu&rsquo;&agrave; la perte de contr&ocirc;le in&eacute;vitable. En un instant, au hasard des <i>links</i> se superposant, une d&eacute;culott&eacute;e &agrave; l&#39;&eacute;cran peut alors nous forcer &agrave; un d&eacute;calottage d&rsquo;urgence ou &agrave; une clitorisation d&rsquo;exaction, malgr&eacute; nous, par surprise, &agrave; notre insu, alors que le voyeurisme se voulait encore dur&eacute;e. L&agrave; encore, pour attendue qu&rsquo;elle soit, l&rsquo;issue n&rsquo;en demeure pas moins ind&eacute;celable, m&ecirc;me si l&rsquo;on joue &agrave; domicile.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">La d&eacute;mat&eacute;rialisation des relations et des r&eacute;seaux sociaux sur le Net vaut &eacute;galement pour la pornographie qui y gagne ainsi en v&eacute;locit&eacute; et en souplesse d&#39;emploi, sinon en mall&eacute;abilit&eacute; dans l&#39;alt&eacute;rit&eacute; qu&#39;elle met en &oelig;uvre. Pour aussi paradoxale qu&#39;elle puisse para&icirc;tre, cette d&eacute;mat&eacute;rialisation rend le toucher plus pr&eacute;cis dans l&#39;usage des images, tant dans l&#39;exploitation de leur focale que dans les man&oelig;uvres employ&eacute;es pour leur d&eacute;filement. Comme si le grain de la peau virtuelle s&#39;affranchissait du pixel qui lui sert pourtant d&#39;existence &agrave; l&#39;&eacute;cran. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">L&rsquo;h&eacute;ta&iuml;re &eacute;lectronique, qu&#39;elle soit femme ou homme d&#39;apparat charnel, aux charmes perclus de professionnalisme ou confin&eacute;s &agrave; l&#39;amateurisme et &agrave; l&#39;artisanat domestique, &eacute;tale sa plastique, la livre &agrave; toute esp&egrave;ce de manipulations visuelles et tactiles, dans des inventions virtuelles qui la d&eacute;poss&egrave;dent de son enveloppe &eacute;rotique initiale. Sans doute peut-on voir dans cette offrande une signature de sa singularit&eacute; monstrueuse&nbsp;: &ecirc;tre unique par la surcharge de fantasmes collectifs dans laquelle elle se vautre, sans l&#39;astreinte de l&#39;&eacute;treinte concr&egrave;te. C&#39;est l&agrave; tout l&#39;enjeu de cette cyberpeau du porno, offerte &agrave; toutes les palpations et tous les frottements possibles, que de provoquer l&#39;adh&eacute;rence des d&eacute;sirs solitaires &agrave; l&#39;unisson d&#39;une transpiration commune.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span arial="" style="font-family:">BIBLIOGRAPHIE</span></b></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">BATAILLE G., &laquo; L&#39;&Eacute;rotisme &raquo;, <i>&OElig;uvres Compl&egrave;tes&nbsp;: Tome X</i>, Paris, Ed. Gallimard, 1987.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">&mdash;, &laquo; Les larmes d&rsquo;&eacute;ros&nbsp;&raquo;. <i>&OElig;uvres Compl&egrave;tes&nbsp;: Tome X</i>, Paris, Gallimard, 1987.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">BAUDRILLARD J., <i>Simulacres et simulation</i>, Paris, Galil&eacute;e, 1981.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">&mdash;,&nbsp;<i>La Transparence du mal. Essai sur les ph&eacute;nom&egrave;nes extr&ecirc;mes, </i>Paris,&nbsp;Galil&eacute;e, 1990.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">BOURDIEU P., <i>Choses dites, </i>Paris, Les &Eacute;ditions&nbsp;de Minuit, Coll. &laquo; Le sens commun&nbsp;&raquo;, 1987.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">DE BEAUVOIR S., <i>Le deuxi&egrave;me sexe</i>, Tome 2 : L&rsquo;exp&eacute;rience v&eacute;cue, Paris, Gallimard, 1949.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">JORON P., (Dir.), &laquo; La communication sacrificielle &raquo;, <i>Cahiers de l&rsquo;IRSA&nbsp;: Violences et communication, </i>Montpellier, PULM, , 2006.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">&mdash;, &laquo; L&rsquo;amour est sur le pr&eacute;. Georges Bataille et l&rsquo;&eacute;rotisme arm&eacute; &raquo;, <i>Les Cahiers europ&eacute;ens de l&rsquo;Imaginaire, </i>Paris, CNRS &Eacute;ditions, 2012.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">KHAN M.,<i> Passion, solitude et folie</i>, Paris, Gallimard, 1985.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">MAFFESOLI M., <i>Du nomadisme. Vagabondages initiatiques, </i>Paris, Le Livre de Poche, Coll. &laquo; Biblio/essais &raquo;, 1997.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">SUSCA V., <i>Joie tragique. Les formes &eacute;l&eacute;mentaires de la vie &eacute;lectronique, </i>pr&eacute;face de Christian Salmon, traduit de l&rsquo;italien par Arianna Bruzziches, Paris, CNRS &Eacute;ditions, 2011.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">TACUSSEL P., <i>Charles Fourier.</i> <i>Le jeu des passions,</i> Paris, Ed. Descl&eacute;e de Brouwer, Coll. &laquo; Sociologie du quotidien &raquo;, 2000.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="font-family:">&mdash;,&nbsp;<i>L&rsquo;imaginaire radical. Les mondes possibles et l&rsquo;esprit utopique selon Charles Fourier, </i>Paris, Les Presses du r&eacute;el, Coll. &laquo; L&rsquo;&eacute;cart absolu &raquo;, 2007.</span></span></span></span></p> <div> <hr align="left" size="1" width="33%" /></div> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn1"></a><a href="#_ftnref1" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[1]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> <a href="http://www.recrutement.terre.defense.gouv.fr/devenez-vous-meme"><span style="color:blue">http://www.recrutement.terre.defense.gouv.fr/devenez-vous-meme</span></a></span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn2"></a><a href="#_ftnref2" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[2]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> BAUDRILLARD J., <i>La Transparence du Mal. Essai sur les ph&eacute;nom&egrave;nes extr&ecirc;mes</i>, Paris, Ed. Galil&eacute;e, 1990, pp. 113-14.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn3"></a><a href="#_ftnref3" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[3]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> JORON P., &laquo;&nbsp;L&#39;amour est sur le pr&eacute;. Georges Bataille et l&#39;&eacute;rotisme arm&eacute;&nbsp;&raquo;, <i>Les Cahiers europ&eacute;ens de l&#39;imaginaire</i>, Paris, CNRS Editions, 2012.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn4"></a><a href="#_ftnref4" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[4]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> SUSCA V., <i>Joie Tragique. Les formes &eacute;l&eacute;mentaires de la vie &eacute;lectronique, </i>Paris, CNRS Editions, p. 205.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn5"></a><a href="#_ftnref5" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[5]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> BAUDRILLARD J., <i>La Transparence du Mal. Essai sur les ph&eacute;nom&egrave;nes extr&ecirc;mes</i>, <i>Op. Cit.</i>, p. 127.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn6"></a><a href="#_ftnref6" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[6]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> Cf. BATAILLE G., &laquo;&nbsp;Les larmes d&#39;&eacute;ros&nbsp;&raquo;, <i>&OElig;uvres compl&egrave;tes&nbsp;: Tome X</i>, Paris, Ed. Gallimard, 1987.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn7"></a><a href="#_ftnref7" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[7]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> &Agrave; l&#39;image par exemple des mosa&iuml;ques et graffitis retrouv&eacute;s sur les murs des maisons priv&eacute;es ou des &eacute;difices publics de la ville de Pomp&eacute;i.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn8"></a><a href="#_ftnref8" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[8]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> Cf. TACUSSEL P., <i>Charles Fourier. Le jeu des passions,</i> Paris, Ed. Descl&eacute;e de Brouwer, Coll. &laquo;&nbsp;Sociologie du quotidien&nbsp;&raquo;, 2000&nbsp;; <i>L&rsquo;imaginaire radical. Les mondes possibles et l&rsquo;esprit utopique selon Charles Fourier</i>, Paris, Les presses du r&eacute;el, Coll. &laquo;&nbsp;L&rsquo;&eacute;cart absolu&nbsp;&raquo;, 2007.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn9"></a><a href="#_ftnref9" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[9]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> BEAUVOIR S. de., <i>Le deuxi&egrave;me sexe</i>. <i>Tome 2&nbsp;: L&#39;exp&eacute;rience v&eacute;cue</i>, Paris, Ed. Gallimard, 1949, p. 377.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn10"></a><a href="#_ftnref10" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[10]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> <i>Idem</i>, p. 389.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn11"></a><a href="#_ftnref11" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[11]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> <i>Idem</i>, p. 389.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn12"></a><a href="#_ftnref12" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[12]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> <i>Idem</i>, p. 390.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn13"></a><a href="#_ftnref13" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[13]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> <i>Idem</i>, p. 391.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn14"></a><a href="#_ftnref14" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[14]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> JORON P. (Dir.), &laquo;&nbsp;La communication sacrificielle&nbsp;&raquo;, <i>Cahiers de l&rsquo;IRSA&nbsp;: Violences et communication</i>, Montpellier, <span style="font-variant:small-caps">Pulm</span>, 2006. pp. 245-264.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn15"></a><a href="#_ftnref15" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[15]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> BEAUVOIR S. de., <i>Le deuxi&egrave;me sexe</i>. <i>Tome 2&nbsp;: L&#39;exp&eacute;rience v&eacute;cue</i>, <i>Op. Cit.</i>,<i> </i>p. 376.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn16"></a><a href="#_ftnref16" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[16]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> <i>Idem</i>, p. 390.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn17"></a><a href="#_ftnref17" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[17]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> BATAILLE G., &laquo;&nbsp;L&#39;&Eacute;rotisme&nbsp;&raquo;, <i>&OElig;uvres Compl&egrave;tes</i>&nbsp;<i>:</i> <i>Tome X</i>, Paris, Ed. Gallimard, 1987, pp. 142-143.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn18"></a><a href="#_ftnref18" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[18]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> <a href="http://www.ifop.com/?option=com_publication&amp;type=poll&amp;id=932"><span style="color:blue">http://www.ifop.com/?option=com_publication&amp;type=poll&amp;id=932</span></a></span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn19"></a><a href="#_ftnref19" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[19]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> Cela montre &eacute;galement que le sociologue, id&eacute;ologiquement d&eacute;sint&eacute;ress&eacute; par sa suppos&eacute;e neutralit&eacute; axiologique et mat&eacute;riellement d&eacute;sargent&eacute; dans ses hardes universitaires, a presque toujours un temps de retard sur des sujets qui r&eacute;clament urgence de traitement ou qui sont mati&egrave;re &agrave; quelques b&eacute;n&eacute;fices &eacute;conomiques ou politiques. Le temps et l&#39;argent font alors la diff&eacute;rence et lorsque c&#39;est le cas, la frustration le gagne parfois. Mais s&#39;il se contente d&#39;une interpr&eacute;tation apr&egrave;s-coup portant sur des donn&eacute;es dont il n&#39;est pas &agrave; l&#39;origine (recueillies par des journalistes et des sondeurs), il lui reste cependant le luxe de dire des tendances &agrave; partir de faits qui lui semble opportuns et selon des fa&ccedil;ons de proc&eacute;der qui estampillent son expertise.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn20"></a><a href="#_ftnref20" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[20]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> Cf. BOURDIEU P., <i>Choses dites</i>, Paris, Les &Eacute;ditions de Minuit, Coll. &laquo;&nbsp;Le sens commun&nbsp;&raquo;, 1987.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn21"></a><a href="#_ftnref21" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[21]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> BAUDRILLARD J., <i>Simulacres et simulation</i>, Paris, Ed. Galil&eacute;e, 1981, p. 161.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn22"></a><a href="#_ftnref22" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[22]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> <i>Idem</i>, p. 128.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn23"></a><a href="#_ftnref23" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[23]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> KHAN M., <i>Passion, solitude et folie</i>, Paris, &Eacute;d. Gallimard, 1985, pp. 219-226.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn24"></a><a href="#_ftnref24" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[24]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> MAFFESOLI M., <i>Du nomadisme. Vagabondages initiatiques</i>, Paris, Le Livre de Poche, Coll. &laquo;&nbsp;Biblio/essais&nbsp;&raquo;, 1997. p. 121.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn25"></a><a href="#_ftnref25" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[25]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> BAUDRILLARD J., <i>Simulacres et simulation</i>, <i>Op. Cit.</i> p. 170.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:115%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><a name="_ftn26"></a><a href="#_ftnref26" title=""><sup><span arial="" style="font-family:"><span style="color:blue">[26]</span></span></sup></a><span arial="" style="font-family:"> BATAILLE G., &laquo;&nbsp;L&#39;&Eacute;rotisme&nbsp;&raquo;<i>,</i> <i>&OElig;uvres Compl&egrave;tes&nbsp;: Tome X</i>, <i>Op. Cit</i>, 1987, p. 250.</span></span></span></span></p> <p>&nbsp;</p>